Upload
others
View
0
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
LES DEUX VISAGES DU PÉROU
trAnSItIonStrimestriel • Iles de Paix • rue du Marché 37 • 4500 Huy
Belgique - BelgiëPP - B-22
Bruxelles XP0077304
© O
livie
r G
enar
d/ID
P
> UMArI Une 3e île de paix au Pérou
> cAMPAGnE 2013Adrien Devyver s’engage !
n° 9
7 •
Déc
EMb
rE
20
12
Dans quelques semaines, des milliers de bénévoles se mobiliseront
pour soutenir les populations du Sud. Le décompte en vue de la
campagne d’Iles de Paix 2013 est lancé.
« Campagne », un terme qui fait, ô combien, partie de notre
quotidien. Des campagnes électorales aux incontournables
campagnes publicitaires, en passant par les campagnes militaires,
trop souvent au cœur de l’actualité.
Le temps d’un week-end, la campagne d’Iles de Paix attirera, elle
aussi, votre attention. Tout comme ces opérations, elle sera menée
en vue d’atteindre un objectif, en un temps déterminé. Mais la
comparaison s’arrête là.
Notre campagne annuelle offre à chacun l’occasion de tendre la
main, de faire un geste en faveur de celles et ceux qui en ont le
plus besoin dans les pays du Sud. Et cette main tendue a une valeur
inestimable, tout particulièrement dans le contexte actuel. Une
actualité dominée par la crise financière, l’austérité, la dette ou
encore le chômage.
En ces temps de morosité, il est plus important que jamais de
rappeler à chacun d’entre nous qu’ailleurs dans le monde, des
femmes, des hommes et des enfants se trouvent dans des situations
bien plus difficiles encore. C’est cela aussi, la campagne d’Iles de
Paix : sensibiliser la population, lui permettre de s’ouvrir au monde
et de créer des liens de solidarité avec les pays défavorisés.
Bien sûr, la campagne vise également à collecter des fonds pour
ces populations. C’est son pan le plus visible, et celui qui nous
permet de concrétiser, sur le terrain, cet élan de solidarité. Cet
aspect revêt lui aussi un sens tout particulier dans le contexte de
crise que nous connaissons.
En effet, comme vous le savez sans doute, le budget consacré
par l’État belge à la coopération au développement subit des
coupes importantes. Nos perspectives de financements publics
s’amaigrissent. Les populations que nous soutenons ont donc
besoin, de façon plus criante encore, de la générosité du public
belge. Outre cet aspect financier, vos dons sont également le garant
de l’indépendance d’Iles de Paix. Ce sont ces ressources propres qui
permettent à l’association d’apporter l’appui le plus approprié aux
populations du Sud, notamment quand les contraintes imposées
par les financeurs publics ne sont pas adaptées à la situation.
Si vous doutiez encore que votre soutien puisse faire la différence,
les témoignages et articles de ce numéro de Transitions montrent,
une fois de plus, que nos projets changent des vies. Que notre
campagne change des vies. Alors, mobilisez-vous, rejoignez nos
bénévoles les 11, 12 et 13 janvier
2013 et faites des guirlandes de
modules ! Pour défier le climat
ambiant et mettre sous les feux
de la rampe toute la force de la
solidarité.
EditEur rEsponsablE > Laurence Albert - Rue du Marché, 37 - 4500 Huy
ils ont collaboré à cE numéro
Laurence Albert, Nico Bakker, Anselme Dabiré, Gaël de Bellefroid, Christine de Bray,
Laurent Deutsch, Maribel Dominguez, Olivier Genard, Pierre-Yves Gillet,
Ousseini Koudougou, Stéphanie Laloux, Abdoulaye Traoré
rédaction > Jacques Bodeux
GraphismE > Marie Freres
éditEur - Iles de Paix - Rue du Marché, 37 - 4500 Huy - Tél. : 085 23 02 54
[email protected] - www.ilesdepaix.org - RPM : 408.908.151
imprEssion > Van Ruys Printing. Transitions est imprimé sur du papier recyclé
Transitions bénéficie du soutien de la Direction générale
de la coopération au développement (DGD)
pour fairE un don
Belgique :
Banque de la Poste BE97 0000 0000 4949
BNP PARIBAS FORTIS BE04 2400 2962 6531
CBC BE30 1963 6001 1111
Déduction fiscale à partir de 40 euros par an
GD Luxembourg :
DEXIA LU24 0023 1454 6660 0000
CCPL LU61 1111 0227 5355 0000
Communication : « Iles de Paix-Luxembourg »
Déduction fiscale à partir de 120 euros par an
SoMMAIrE
4 Action Sud > trois actions 2013 d’Iles de Paix,
au burkina, Mali et Pérou
7 Question/Réponse > Interroger le développement
8 Dossier > Le Pérou : entre richesse et pauvreté
14 Infos Monde > brèves sans frontières
> Édito
97 Décembre
2012
En campagne !
laurence albertSecrétaire générale
3
> IL
S n
oU
S S
oU
tIE
nn
Ent PoUrqUoI jE ME bAtS PoUr ILES DE PAIX !
« L’idée révolutionnaire de Dominique Pire en matière de développement d’« apprendre à pêcher plutôt
que de donner un poisson » est géniale. Il faut le faire! Comme médecin de santé publique, je salue la
stratégie - analyse et diagnostic avant d’opérer, objectifs clairs, action, évaluations régulières pour
s’améliorer -, la patience, la volonté, l’opiniâtreté d’Iles de Paix qui, depuis plus de 50 ans, réalise des
miracles. J’ai rencontré il y a peu administrateurs, gestionnaires et coordinateurs régionaux des pays
du Sud et peux témoigner que le professionnalisme, l’enthousiasme et l’esprit fondateur sont bien
vivants. Bravo ! »
fanny hoeffelman (bruxelles) contribue par ses dons au financement des actions d’iles de paix.
ADrIEn DEVyVEr : LES MODULES, IL CONNAîT !
Journaliste et animateur aux multiples casquettes, Adrien
Devyver a très tôt baigné dans les modules.
depuis quand connaissez-vous iles de paix ?
Depuis au moins 25 ans : mon grand-père était très investi dans
son quartier à la Hulpe. Chaque année, nous faisions la vente en
porte-à-porte dans 200 maisons. Ça me permettait de vivre des
moments intenses, rien que nous deux. C’était vraiment chouette !
Et puis maintenant, ma mère est bénévole à l’entrée du Delhaize de
Genval et je lui donne toujours un petit coup de main.
Quelles sont, selon vous, les qualités des projets iles de paix ?
Par la sensibilisation, dans la médiatisation que vous menez, on se
sent proche des bénéficiaires. Il y a un bon retour sur l’aide qui est
apportée. Il y a une proximité entre ici et là-bas. Et on la retrouve
dans votre devise.
le célèbre « si j’apprends à pêcher, je mangerai toute ma vie. »
C’est un terrible slogan ! Dans mon métier, je l’utilise tout le temps.
On peut l’appliquer aussi dans l’éducation d’un enfant ou même
dans une relation amoureuse.
Que pensez-vous du module ?
C’est génial ! Dans la cour de récréation, c’était chaque année le
concours de celui qui en avait le plus. Certains arrivaient à faire
une sphère et c’étaient les gros leaders.
Le personnage est sympa, il est indémodable. Au fil du temps, il a
toujours eu cette espèce de modernité. Il a une bonne bouille et je
prie pour que vous ne le changiez jamais.
avez-vous un message pour les bénévoles qui vendront des
modules en janvier ?
La campagne est un moment de rencontre hyper intense, différent
de ceux qu’on a tous les jours dans la rue, dans les embouteillages…
c’est un contact fraternel pour une même cause, ce qui devient
rare dans notre société. On a la satisfaction de s’engager et on voit
le sourire des gens qui ont posé un geste de solidarité en achetant
des modules.
retrouvez adrien devyver
SANS CHICHIS > du lundi au vendredi
à 17h00 sur la Deux. Nouveauté :
l’émission passe en prime-time, un
jeudi sur deux, dans une nouvelle
formule d’une heure trente.
THE VOICE, SAISON 2 > dès le mois de
janvier sur la Une.
notrE noUVEAU SItE IntErnEt :LA TOUCHE DE GLOBULE BLEU
Le nouveau site Internet d’Iles de Paix est en ligne. On y retrouve toutes les rubriques de
l’ancien site, mais dans une version plus concise, plus directe, plus accessible. Et surtout,
elles sont mises en valeur par un graphisme rafraîchi et attrayant.
Pour la conception de ce site complètement relooké, Iles de Paix a pu compter sur la
collaboration de l’agence de communication Globule Bleu. Cette agence liégeoise a par
ailleurs réalisé nos outils de communication campagne et le jeu interactif Value Your
Friends, outil de sensibilisation à la coopération au développement.
À chaque fois, Globule Bleu s’est fortement impliqué dans ces projets et a mis toute sa
créativité au service d’Iles de Paix. A prix d’ami, nous en remercions toute l’équipe !
découvrez sans tarder le résultat de son travail sur www.ilesdepaix.org
L’intégrale de l’interview d’Adrien Devyver > www.ilesdepaix.org
4 | transitions n°97 | Décembre 2012
> A
ct
Ion
SU
D
Ourouhan Fébé Kamaté est agricultrice à Bénéna. Pourquoi son groupement
a-t-il souhaité se lancer dans la culture de légumes ?
Nous cherchions une activité rentable, que nous pourrions pratiquer après
la saison des pluies, quand la récolte des céréales est achevée. Pour gagner
un peu d’argent et nous « garantir ». Il faut de l’argent pour acheter ce qui
est nécessaire pour le ménage et les enfants. Il faut aussi de l’argent quand
les pluies ont été mauvaises et qu’il faut acheter des céréales au marché.
En période de soudure, on commence à épuiser les réserves des
dernières récoltes et on attend les suivantes. Avec inquiétude. Les femmes
ont constaté que les ménages qui pratiquent la culture des légumes en
contre-saison sont moins exposés que les autres à la disette. Elles ont
donc contacté Iles de Paix pour obtenir un appui, afin de se lancer dans
le maraîchage.
Une équipe d’Iles de Paix a aidé les promoteurs à préciser leur projet. Des
aménagements – clôture des périmètres, puits avec pompe et bassins pour
le stockage de l’eau – seront nécessaires. Les candidats maraîchers doivent
mobiliser une partie du coût de ceux-ci et acheter des équipements de base :
arrosoirs, binettes, brouettes, etc. Les exploitants paieront en outre les
semences et les engrais. Il y va de leur autonomie future. Iles de Paix
interviendra dans l’aménagement des sites et assurera la formation
technique des maraîchers.
De la vente des échalotes, tomates, gombos et autres piments, chaque
producteur devrait tirer, un revenu annuel d’environ 20 000 à 30 000 francs
CFA (de 30 à 45 e). Cela peut paraître modeste, mais c’est en réalité une
belle somme dans cette zone du Mali. •
Quatre hectares de cultures maraîchères seront aménagés en 2013 à Bénéna et Fangasso (Mali). Une aubaine pour les 80 producteurs (dont 56 femmes) qui ont porté ce projet à bout de bras.
© ID
P
> Coût de l’appui à un producteur : 263 €
> Participation d’un producteur : 24 €
> Bénéficiaires : 80 maraîchers, dont 56 femmes
Après la saison des pluies, beaucoup de femmes
cherchent une activité qui leur rapporte un peu
d’argent. Certaines vendent du tchapalo, une bière
que l’on fait avec des céréales. Cela rapporte peu.
De plus, elles utilisent des céréales qui manqueront
peut-être à la famille quelques mois plus tard.
Le maraîchage va vraiment nous apporter quelque
chose en plus. Un peu d’argent pour les petits frais
de la famille et aussi des légumes qui vont rendre
nos sauces plus agréables et plus nourrissantes.
Ce qui est bien aussi, c’est qu’on va travailler
ensemble sur un même site et ainsi apprendre à
mieux se connaître et s’apprécier.
ourouhan fébé Kamaté, agricultrice dans le village de barana
© O
usse
ini K
oudo
ugou
/ID
PQuand les réserves de céréales de la famille s’épuisent, la production de légumes est souvent une vraie planche de salut.
MaliDES LéGUMES SUr LE MArcHé…Et DAnS LA SAUcE !
> A
ct
Ion
SU
D
5
© O
usse
ini K
oudo
ugou
/ID
P
Dans la petite communauté de Yanarumi, la vie de Tomasa Sacramento, 28 ans, et
Cristino Noreña, 30 ans, a complètement changé depuis qu’ils disposent dans leur
maison de l’eau courante et d’une toilette.
Ces jeunes parents de trois enfants vivent de l’élevage familial de cochons d’Inde,
de la culture de fleurs et d’autres activités champêtres.
Auparavant, Ils devaient se lever à 4 heures du matin pour aller chercher de l’eau
au canal le plus proche et remplir leur puits. Cette sorte de citerne leur permettait
de conserver l’eau pendant trois ou quatre jours. L’eau n’était pas potable.
Pourtant, ils la consommaient.
Aujourd’hui, je suis heureuse, dit Tomasa. Ma famille est maintenant «saine». Nous
ne buvons plus de l’eau impure. Je peux laver les mains des enfants avec de l’eau
propre avant le repas ; ils peuvent faire leur toilette tous les jours. Je cuisine plus
rapidement, et je peux laver les ustensiles au fur et à mesure que j’avance dans
la préparation du repas.
Avant on n’avait rien, on vivait pauvrement, avoue Cristino. Maintenant, avec
cette eau à domicile et une vraie toilette, j’ai plus de temps pour me consacrer
à améliorer ma maison, ma cuisine et mes cultures de fleurs. Je montre à mes
enfants qu’on peut vivre mieux, en bonne santé, dans de meilleures conditions. •
DE L’EAU qUI cHAnGE LEUr VIE
Iles de Paix mène au Pérou un important programme d’installation de réseaux de distribution d’eau potable et d’aménagement de sanitaires privatifs. En deux ans, 450 familles ont été raccordées. En 2013, quatre nouveaux réseaux en desserviront 350 de plus.
Ce programme eau et assainissement a eu un grand retentissement. Suite à une visite de son président, le gouvernement régional a décidé d’investir massivement dans ce domaine et il a demandé à Iles de Paix de superviser ses projets.
coMMEnt çA MArcHE ?L’eau est captée à partir de sources situées en altitude. Elle est acheminée vers
un réservoir où s’effectue un traitement au chlore. La population a été formée
pour renouveler régulièrement cette opération de chlorage.
Des canalisations amènent l’eau à chaque habitation, qui est équipée d’un évier
avec un plan de travail et d’un WC hydraulique. Souvent aussi d’une douche, si la
famille fournit les briques nécessaires à sa construction.
Les familles sont fortement mobilisées : elles creusent et rebouchent les
tranchées depuis la captation jusqu’aux maisons. Ce sont des kilomètres de
tranchée, et la pente est rude !
Elles assurent aussi l’excavation de deux fosses, une fosse septique pour l’évacuation
du WC et une autre pour celle de l’évier.Ce programme est financé à 59 % par les
communes concernées. Le Coopération belge et Iles de Paix assurent l’appoint.
coMbIEn çA coûtE ?1.470 € > coût moyen de l’opération
eau potable et assainissement pour une
famille
120 € > quote-part d’Iles de Paix,
déduction faite des apports de la
commune et de la Coopération belge
Les familles, par leur contribution en
main-d’œuvre, assument 17 % du coût réel
d’un réseau
Découvrez deux vidéos sur ce programme eau potable >www.ilesdepaix.org/transitions
© M
arib
al D
omin
guez
/ID
P
Pérou
6 | transitions n°97 | Décembre 2012
diapkampoa : le riz de ma parcelle, c’est à moi !
DE noUVELLES tErrES PoUr LE rIz
Burkina Faso
Depuis 2005, la production de riz a considérablement augmenté dans les communes de Yamba et Diapangou. Plus de 1 500 agriculteurs le cultivent sur des terres auparavant peu ou pas exploitées. Et ils seront plus nombreux encore en 2013.
La proposition d’Iles de Paix : aménager des bas-fonds.
Ce sont des terres basses. L’eau y transite en saison des
pluies. On réalise des diguettes de terre compactée. Elles
retiennent l’eau et la conservent le temps nécessaire à la
culture du riz.
Les femmes sont pionnières. Elles ont aménagé, à la force
du poignet, un premier bas-fond dans la commune de
Yamba.
C’est là que Diapkampoa, agricultrice dans la commune
voisine de Diapangou, a découvert cette activité, à
l’occasion d’un voyage de découverte organisé par Iles de
Paix.
Cela nous a donné des idées. Nous étions huit et nous
avons pu, grâce à un appui, aménager un hectare. J’ai
une parcelle, tout comme mon mari. Je n’ai pas à me
plaindre de mes récoltes. Depuis que je fais du riz, j’ai
toujours obtenu au moins dix sacs de 70 kilos.
La production de ma parcelle est à moi. J’en fais ce que
je veux, dit fièrement Diapkampoa. Pour l’argent, je ne
suis plus dépendante de mon mari et, pour ce qui est
de la nourriture, nous arrivons maintenant à couvrir les
besoins de notre famille. Beaucoup de femmes trouvent
là un moyen d’émancipation. L’argent que leur procure
la vente d’une partie de leur production leur ouvre de
nouveaux horizons.
Moi, dit Diapkampao, j’ai consacré un peu d’argent au
développement de ma production de dolo (bière de
sorgho), une activité que je pratique en saison sèche, et
j’ai pu remplacer mes vieilles casseroles en terre. Je peux
mieux m’occuper des enfants, payer les frais de santé, les
fournitures scolaires et leur habillement.
Je peux aussi bien mieux prendre soin de moi et même
soutenir ma famille d’origine quand elle en a besoin.
Pourvu que ça dure !
Diapkampoa est optimiste. Nous sommes maintenant en
cours de récolte et j’ai bon espoir d’obtenir beaucoup de
riz. Si c’est le cas, je pourrai réaliser un nouveau projet :
acheter un âne et une charrue pour faciliter le travail sur
ma parcelle et aussi sur celles de mes enfants. Depuis
l’année dernière, eux aussi, ils s’y sont mis.
Cette activité à succès, dont les aménagements sont
facilement maîtrisables et peu coûteux, n’en finit pas de
se développer ; souvent, sans l’intervention d’Iles de Paix :
on appelle cela des extensions spontanées. Dans mon
bas-fond, dit Diapkampoa, on est passé de 1 à 7 hectares.
Nous sommes une vingtaine de riziculteurs, dont de
nombreuses femmes. •
Depuis le début de cette activité, les superficies cultivées dans des bas-fonds ont augmenté de près de 40 % sans l’aide d’Iles de Paix. Un résultat vraiment inespéré !
> A
ct
Ion
SU
D
© A
nsel
me
Dab
iré/
IDP
> Coût de l’aménagement d’un ha de rizière : 300 €
> Nombre d’exploitants par ha : 10 personnes, en moyenne
> Participation des gens : 10 % du coût de l’aménagement + de la main-
d’œuvre que l’on peut estimer à 60 % du coût de l’aménagement
> Au programme en 2013 : aménagement de 28 hectares supplémentaires
Découvrez un reportage sur ce programme riziculture > www.ilesdespaix.org/transitions
7
Bien dépensé ≠ Bien dépensé« Bien dépensé » a deux sens. 1. L’argent est effectivement
dépensé. 2. L’argent est dépensé de bonne façon, utilement.
EffEctIVEMEnt DéPEnSéLes pouvoirs publics surveillent les ONG qui, comme
Iles de Paix, sont agréées. Chacune doit soumettre ses
comptes à un commissaire aux comptes indépendant qui
respecte des procédures strictes de contrôle. Une ONG
agréée doit dépenser l’argent de la façon dont elle le dit,
en toute transparence.
DéPEnSé UtILEMEntLa question est beaucoup plus subjective. Telle personne
estime qu’est utile ce qui favorise la fréquentation scolaire.
Telle autre jugera que la sécurité alimentaire, ou la santé
infantile, est prioritaire. Chaque ONG définit ce qui est
« utile » à ses yeux. Cela sert de balise pour les interventions
sur le terrain. Des évaluateurs externes et indépendants se
rendent ensuite sur place pour estimer dans quelle mesure
les objectifs fixés sont atteints.
dépensé utilement ≠ dépensé PoUr DU bétonSpontanément, on a tendance à privilégier des choses
concrètes comme la construction d’écoles, d’orphelinats
ou de puits. Toutefois, si on veut que ces infrastructures
perdurent, une plus grande intervention humaine est
nécessaire. Apprendre à pêcher n’entraîne pas le même
type de dépenses et d’activités que donner des poissons.
Investir dans la formation est aussi profitable, et sans
doute plus durable, que dans le béton. Des formations
impliquent toutefois plus de dépenses en salaires.
AU norD, AU SUDSi on donne de l’argent à une ONG, c’est pour qu’il aille au
Sud. Il arrive toutefois, même si c’est de moins en moins
le cas, que certains équipements requis pour un chantier
au Sud ne soient disponibles qu’en Europe. De plus, la
recherche des financements nécessaires se fait le plus
souvent au Nord. Cela peut surprendre : une association
qui prétendrait ne rien dépenser en Belgique ne serait
probablement pas la plus performante. Il faut trouver le
bon équilibre. •
qU
ESt
Ion
/r
éPo
nS
E
L’ArGEnt D’ILES DE PAIX
est-il Bien DéPEnSé ?
Les ONG sollicitent le public pour soutenir leurs
activités. On verse plus volontiers de l’argent
pour améliorer les conditions de vie des
populations du Sud si l’on est sûr que l’argent
leur arrive.
Iles de Paix le dépense-t-il bien à leur bénéfice ?
Est-il déboursé sur le terrain ou se perd-il dans
des salaires ?
Ces questions sont plus complexes qu’il n’y paraît !
© ID
P
un barrage pour irriguer des cultures. c’est du béton ! mais pas seulement, il faut aussi former les gens à sa gestion, pour assurer sa durabilité.
une formation pour techniciens paysans. des dépenses qui laissent peu de traces « visibles », mais dont les effets peuvent être considérables.
Posez une question. nous y ré[email protected] - 085 23 02 54
© A
nsel
me
Dab
iré/
IDP
consultez les comptes d’Iles de Paix sur www.ilesdepaix.org/transitions
© O
livie
r G
enar
d/ID
P
> D
oS
SIE
r P
éro
U
Un pays qui croît ne peut espérer se développer s’il ne répartit pas ses
richesses, s’il continue d’exclure de la fête des millions de citoyens.
Tout le paradoxe du Pérou et le principal défi
qu’il lui faut aujourd’hui relever se trouvent
résumés en un mot : « inégalités ».
En une vingtaine d’années, à force d’efforts et
de rigueur de gestion, le Pérou s’est extirpé
du peloton des pays en perdition financière
pour se profiler comme une sorte de tigre
sud-américain, au même titre que le Brésil,
l’Argentine ou le Chili.
Il y a été bien aidé par les immenses
ressources de son sous-sol. Tout l’or du Pérou,
disait-on jadis. L’expression n’a rien perdu de
son actualité. On pourrait y ajouter l’argent, le
zinc, le cuivre, l’étain, le gaz, etc. Ce pays est
un véritable phénomène géologique ! Et sans
doute est-il un peu scandaleux qu’il demeure,
comme tant d’autres sur ce continent, un
espace où la plus grande richesse côtoie la
plus extrême pauvreté.
LE PéroUEntrE rIcHESSE
Et PAUVrEté
8 | transitions n°96 | septembre 2012
© R
epor
ters
EQUATEURCOLOMBIE
BRÉSIL
BOLIVIE
CHILI
PÉROU
Lima
CARTE D’IDENTITÉ> Par sa superficie - 1.285.220 km2 -, le Pérou est le troisième plus grand pays d’Amérique
du Sud.
> la population approche les 30 millions d’habitants, dont 9 millions vivent à Lima, la
capitale.
> 60 % des péruviens vivent dans la costa, la région côtière, la plus prospère (10 % de la
superficie) ; 30 % dans la Sierra, la région andine (30 % du territoire) ; 10 % dans la Selva,
l’immense zone amazonienne (60 % du pays).
> les amérindiens représentent 45 % de la population ; les métis, 37 % ; les
« Européens », principalement des descendants des colonisateurs espagnols, 15 % ; les
Noirs, Asiatiques et autres, 3 %.
> avec un produit intérieur brut de 5.171 $ par habitant (42.630 $ pour la Belgique), le
Pérou est considéré comme un pays à revenus intermédiaires. Il figure au 84e rang dans
le classement établi par le Fonds monétaire international. Ce résultat honorable cache de
très fortes disparités sociales.
> le pérou se classe en 80e position en matière de développement humain (sur
187 pays), avec un indice de développement humain (IDH) considéré comme élevé. L’IDH,
établi par le Programme des Nations unies pour le développement, tient compte de trois
critères majeurs : espérance de vie, niveau d’éducation et niveau de vie. Ici aussi, les
disparités sont considérables.
> un sous-sol prodigieux. Le Pérou est le 1er producteur d’argent et le 2e producteur de
cuivre et de zinc du monde. Le premier producteur d’or, de plomb et de tellure d’Amérique
du Sud. Ses ressources en pétrole et surtout en gaz naturel sont très prometteuses.
9
UnE éconoMIE ProSPèrE MAIS VULnérAbLELe contexte économique semble favorable. Le Pérou affiche
une croissance qui dépasse les 6 % depuis de nombreuses
années, une inflation limitée à 2 %, des réserves en devises
de près de 50 milliards de dollars et une dette inférieure à
25 % du produit intérieur brut. Nos riches pays européens en
feraient leur miel.
L’économiste péruvien Juan José Marthans émet sur ce
constat alléchant quelques réserves. « Le Pérou jouit d’une
prospérité statistique et non structurelle. La croissance
économique s’explique par des facteurs externes, en
particulier par la hausse des cours des métaux sur les
marchés internationaux, dont le pays est l’un des principaux
exportateurs. » L’économie du Pérou est vulnérable, fortement
dépendante des fluctuations des prix internationaux des
matières premières et de l’attirance qu’elle exerce sur les
investisseurs étrangers. Elle s’est trop peu diversifiée, a
négligé de développer une industrie pouvant répondre aux
besoins des Péruviens. Elle n’a pas non plus réussi à favoriser
l’émergence d’une classe moyenne, condition de l’éclosion
d’une économie nationale davantage centrée sur son propre
territoire, sa propre population.
La volonté politique de développer les secteurs des
infrastructures, de l’énergie, des services et du tourisme existe.
C’est toutefois encore dans le secteur minier que les plus gros
investissements sont attendus. Ils devraient atteindre 41,6
milliards de dollars dans les cinq années à venir.
LA PAUVrEté A LA VIE DUrEComment se fait-il que ces milliards de dollars investis depuis
tant d’années au Pérou ne se concrétisent pas davantage
dans l’amélioration des conditions de vie de l’ensemble de
la population ? « Parce que le modèle économique péruvien
est marqué par une redistribution minime, voire nulle, des
richesses. Le paradoxe péruvien est que les salaires ont
chuté de 10 % au cours des dix dernières années, quand les
bénéfices des grands groupes s’envolaient de 30 % », note le
sociologue Julio Cotler.
La pauvreté d’un grand nombre de personnes demeure,
au Pérou, une réalité bien visible. Dans les quartiers
périphériques des villes comme dans les campagnes
reculées. Des progrès ont été accomplis et la situation s’est
bien améliorée durant les cinq ans de la présidence d’Alan
Garcia, qui s’est achevée l’année dernière. Au début de son
© R
epor
ters
En août dernier, le projet d’exploitation minière Conga (or et cuivre) a
été suspendu par le gouvernement péruvien. La compagnie américaine
Newmont devra fournir d’ici deux ans des garanties sur la préservation
des ressources en eau de la région andine de Cajamarca.
C’est une victoire pour les adversaires de ce gros projet, évalué à 3,8
milliards d’euros. Leurs manifestations ont amené le gouvernement à
déclarer à plusieurs reprises l’état d’urgence.
Cette affaire Conga est emblématique des luttes, souvent violentes et
parfois meurtrières, qui opposent les populations aux sociétés minières
qui convoitent leurs territoires.
Les gens ne sont pas contre le principe de l’exploitation des ressources
minières, mais ils n’en reçoivent que peu d’emplois et des atteintes à leur
environnement. « Souvent, l’État est perçu par les populations comme
un allié des compagnies minières et non comme un défenseur de leurs
intérêts, alors qu’il devrait jouer un rôle de régulateur et de garant des
droits des gens », note l’anthropologue Javier Torres.
Le président Humala a affirmé en mai dernier que le rôle du
gouvernement serait de protéger les intérêts nationaux. Lors de sa
récente tournée européenne, il a promis de nouer une nouvelle relation
avec les entreprises minières, « privilégiant l’eau sur l’or ».
Il aura fort à faire pour éviter de nouveaux conflits. On considère en effet
que seulement 10 % du territoire péruvien qui a un potentiel minier ont
été explorés et que seulement 6 % de ce potentiel sont actuellement
exploités.
Des mines très explosives
le projet minier conga suscite une vive opposition. il menace des lacs d’altitude vitaux pour les populations locales.
mandat, la pauvreté touchait encore 55 % des Péruviens,
contre 39,6 % à son terme. Mais ce taux de pauvreté atteint
60 % en milieu rural. Entre le Pérou des villes et celui des
champs, l’écart demeure considérable. Encore faut-il préciser
qu’environ 15 % des habitants du pays vivent dans l’extrême
pauvreté, avec moins de deux dollars par jour.
Services de base absents ou déficients, insécurité
alimentaire, isolement sont encore le lot de trop de Péruviens.
L’État s’est préoccupé de redresser l’économie du pays, de
la stabiliser. Il s’est peu soucié de tempérer les effets des
recettes ultralibérales qu’il a appliquées. Certes, une série
d’indicateurs chiffrés témoignent de leur succès, mais elles
ne furent guère assorties d’un minimum de mesures sociales
de partage, de redistribution, de développement humain. >
> DoSSIEr PéroU
10 | transitions n°97 | Décembre 2012
© R
epor
ters
Comme Evo Morales, président de la Bolivie, Ollanta Humala, 50 ans, est un Amérindien. Son prénom signifie en quichua « le guerrier qui
voit tout ». Son père est connu pour ses thèses mêlant marxisme et affirmation de la supériorité des Incas sur la race blanche.
Il entame une carrière militaire dans les années 1980 et il est lieutenant-colonel quand, en 2000, il mène, sans succès, une rébellion contre
le très controversé président Alberto Fujimori. Emprisonné, il est amnistié peu de temps après quand Fujimori, accusé de corruption et de
bien d’autres turpitudes, est contraint de s’exiler.
Retiré de l’armée, il se présente en 2006 aux élections présidentielles sur un programme très marqué à gauche, proche des thèses du
président vénézuélien Hugo Chavez. C’est sans doute la principale raison de son échec.
En 2011, c’est plutôt dans la lignée du socialiste modéré brésilien Lula qu’Humala a mené sa campagne. La modération de son discours
lui a permis de grignoter au centre les voix nécessaires à son succès. Le fait qu’il était opposé au second tour à Keiko Fujimori, la fille de
l’ex-président, aujourd’hui incarcéré, a aussi joué en sa faveur.
c’est au nom des péruviens les plus pauvres, que le candidat humala a mené sa campagne électorale.
Un Indien aux commandes
VErS Un étAt Un PEU PLUS « ProVIDEncE » ?
C’est de cette attente de plus de social, plus de justice, qui
a propulsé au pouvoir Ollanta Humala en juin 2011. Très
« gauche radicale » au début de sa carrière politique, il
a mené sa campagne électorale victorieuse sur un ton
nettement plus modéré. Il a promis que l’État interviendrait
davantage dans l’économie, au profit de tous les
citoyens. Il s’est aussi engagé à ne pas mettre en péril les
investissements péruviens et étrangers dans son pays, ni à
revenir sur les accords internationaux signés par le Pérou,
notamment l’accord de libre-échange conclu avec les Etats-
Unis. En somme, il s’est adressé aux pauvres en se gardant
d’effrayer les riches. Sa récente tournée européenne lui a
encore permis de faire passer un message rassurant à tous
les candidats investisseurs.
Il se fait aujourd’hui l’apôtre d’une sorte de capitalisme à
visage humain, qui s’exprime dans des politiques sociales
s’adressant à ceux qui demeurent en marge de l’économie.
Il a promis une augmentation du salaire minimum (jusqu’à
280 dollars par mois), une réforme des retraites, un
développement et une amélioration des aides sociales, une
forte présence de l’État dans de grands travaux d’utilité
publique, comme, par exemple, la construction de routes et
de logements.
Il lui faudra aussi, s’agissant d’un secteur minier si crucial
pour le Pérou, faire en sorte que cette activité profite enfin
aux populations, en termes de retombées suffisantes,
pour l’Etat comme pour les collectivités locales. Il devra
notamment garantir que l’exploitation minière et celle du gaz,
qui devraient beaucoup se développer à l’avenir, ne portent
plus atteinte à l’environnement, à la santé et à la qualité de
vie des populations riveraines.
Il ne sera pas aisé pour Ollanta Humala, de relever tous ces
défis et de tenir ses promesses. S’il échoue dans cette tâche,
la déception des Péruviens sera à la hauteur des immenses
attentes qu’a fait naître leur président. •
11
Au Pérou, la pauvreté et la richesse se côtoient, mettant en évidence une
redistribution inéquitable des revenus dont dispose le pays. Dans ces conditions,
l’aide extérieure doit-elle encore agir en faveur des Péruviens les plus pauvres,
se substituer en quelque sorte à un gouvernement qui jusqu’à présent s’en
serait trop peu préoccupé ?
Pour répondre à cette question, il est nécessaire de se
pencher de façon détaillée sur les réalités de ce pays.
Le Pérou est un pays immense aux facettes multiples. Cela
implique non pas une mais des politiques économiques
adaptées à chacun des contextes dans lesquels vivent
les populations. Or, jusqu’il y a peu, l’État péruvien, très
centralisé, n’apportait qu’une réponse unique aux problèmes
des la pauvreté. La plupart des investissements consentis se
sont donc concentrés dans les grandes villes et les zones de
production de la côte, délaissant les populations andines et
amazoniennes.
Grâce à la décentralisation, cette situation est en train
d’évoluer. Les communes disposent aujourd’hui de
compétences qui leur permettent de répondre aux attentes
spécifiques de leurs populations. Toutefois, dans les régions
les plus pauvres, les maires élus ne disposent pas toujours
de la formation nécessaire pour bien gouverner leur
municipalité. Ils sont par ailleurs confrontés à une législation
complexe qui, logiquement, leur interdit de réaliser des
investissements en faveur de particuliers. Dans la région
andine, cela pose malheureusement un sérieux problème
car les zones de production sont fortement morcelées et
le développement de l’économie paysanne nécessite des
investissements au niveau familial. Les municipalités se
concentrent donc sur l’amélioration des infrastructures
sociales. Cela constitue une avancée importante mais
insuffisante pour agir sur tous les facteurs de la pauvreté.
L’aide dont le Pérou a besoin pour que les habitants des
zones les plus pauvres profitent des fruits de la croissance
« statistique » du niveau de vie se situe donc à trois niveaux.
Premièrement, il s’agit d’appuyer les projets des familles
qui, parce que trop isolées, échappent aux actions de large
échelle.
différentes onG apportent leur contribution à l’effort de
développement de la population péruvienne. iles de paix a-t-il sa
place dans ce concert ?
Assurément. Iles de Paix trouve au Pérou un terreau favorable pour
des actions peu coûteuses qui touchent directement des populations
très pauvres et très réceptives. Les investissements consentis au
niveau des familles ont un impact important et immédiat sur leur
niveau de vie. Par ailleurs, les projets réalisés servent de modèles
pour les autorités et autres acteurs locaux engagés dans le secteur du
développement. L’action d’Iles de Paix dans ce pays est donc pleinement
complémentaire à celle menée par les pouvoirs publics et par d’autres
ONG. On peut dès lors affirmer que dans le contexte actuel, elle garde
toute son utilité et sa pertinence.
une aide aux familles marginalisées, qui profitent peu de la
« prospérité » du pays, demeure indispensable.
© ID
P
Et Iles de Paix ?
Deuxièmement, il faut renforcer la capacité des populations
à influencer les politiques économiques et sociales qui les
concernent, du niveau local au niveau national.
Troisièmement, il est important d’aider les autorités
locales à concevoir, formuler et exécuter leurs plans de
développement. •
> DoSSIEr PéroU
Faut-il encore aider le Pérou ?
12 | transitions n°97 | Décembre 2012
Iles de Paix intervient au Pérou depuis 2008, dans la région
andine de Huánuco, l’une des plus pauvres du pays. Il y
développe des programmes de développement intégré,
touchant l’ensemble des aspects de la vie des populations :
sécurité alimentaire et revenus, services de base, bonne
gestion des affaires locales.
L’association ne débarquait pas tout à fait en terrain
inconnu. Elle retrouvait dans cette zone marginalisée des
problématiques assez proches de celles rencontrées dans
les Andes équatoriennes. Sans pratiquer le copier-coller,
il y avait l’opportunité de transposer à Huánuco, en les
adaptant au contexte local, les « recettes » qui ont fait
leurs preuves en Équateur depuis le milieu des années
1990.
Dans la région de Huánuco, l’exploitation minière est
marginale. Ce sont les activités agricoles qui assurent la
subsistance de la majorité des familles. Celles-ci ont été
parachutées là, sur des terres ingrates, par les réformes
agraires des années 1950-1960. Les paysans ne maîtrisent
pas les techniques adaptées à « leur nouvelle condition ».
Vivant dans des petites communautés isolées, s’organiser
pour vendre leurs éventuels surplus n’est pas aisé. En
outre, les lopins sont très petits et l’irrigation lacunaire.
Souvent, le paysan migre vers les grandes plantations de
la zone côtière. Temporairement ou pour toujours. Seul ou
en famille.
le développement de la culture de la grenadille amorcera l’appui d’iles de paix dans le district d’umari.
Iles de Paix entamera en 2013 une nouvelle intervention dans le
district d’Umari. Il compte 17 000 habitants qui, pour la plupart,
survivent tant bien que mal de leurs activités agricoles.
La municipalité est prête à s’engager fortement dans un partenariat
pour le développement en faveur de sa population. Elle a mis en
place un comité de développement agraire auquel participera Iles
de Paix. Notre volonté commune est d’aller de l’avant, sans tarder.
En 2013, une première action très concrète sera mise en route.
Elle concernera le développement de la culture de la grenadille
(une sorte de fruit de la passion). Cette activité s’est imposée ces
dernières années, notamment à Molino et Santa Maria del Valle,
comme une production à fort potentiel commercial. 80 familles
seront concernées par ce programme.
Parallèlement, une équipe d’Iles de Paix établira, avec la population
et ses représentants, le programme de développement économique
et social qui sera mené dans le district. Une nouvelle aventure
démarre à Umari.
© O
livie
r G
enar
d/ID
P
Umari : une troisième « île de paix »
Iles de Paixdans le Pérou des pauvres
les équipes d’iles de paix sont aux côtés des paysans. pour des appuis techniques
comme pour des actions visant une meilleure organisation, plus efficace et
plus rentable, des producteurs.
© O
livie
r G
enar
d/ID
P
Un taux de pauvreté de 61 %, l’extrême pauvreté touchant plus de 50 % de la population, des enfants
chroniquement sous-alimentés, des taux importants de mortalité
maternelle et infantile : la zone où opère Iles de Paix figure en avant-
dernière position dans le classement des régions du Pérou en matière de
développement humain.
Une caractéristique de l’intervention d’Iles
de Paix au Pérou est qu’elle est construite
en plus étroite concertation qu’ailleurs avec
les autorités municipales. Celles-ci sont de
réels partenaires, disposant de moyens et
garantissant la pérennité des actions.
En moins de cinq ans, Iles de Paix a mis en
œuvre des interventions pour le développe-
ment dans deux districts (communes) de la
région de Huánuco, Molino et Santa Maria
del Valle. L’association y apporte un appui
direct à un peu plus de 30 000 personnes.
Le bilan est très positif. Tous les acteurs
locaux (paysans et autorités) sont
très réactifs. Comme en Équateur, la
formation de techniciens paysans, issus
des communautés, joue un rôle majeur
dans la diffusion de nouvelles pratiques et
techniques agricoles. Une sorte de cercle
vertueux s’est peu à peu mis en place. Tant
dans le domaine de la production que dans
celui de l’amélioration des services de base
(santé, éducation, accès à l’eau potable), les
investissements accomplis portent leurs
fruits et en entraînent d’autres, portés par
les gens. Dans ces deux communes, la prise
de relais est en bonne voie. Cela donne à
Iles de Paix l’opportunité et la volonté de
s’engager dans un troisième district de la
région. •
© O
livie
r G
enar
d/ID
P
Si le Pérou est un très gros producteur de minerais, il est aussi, juste derrière
la Colombie, le 2e producteur mondial de feuilles de coca, matière première
de la cocaïne.
Dans son rapport 2011, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime
estime que le Pérou a assuré en 2011 38 % de la production de feuille de coca
et que seulement 9 000 des 133 000 tonnes produites étaient destinées à une
utilisation légale. Outre ses multiples usages pharmaceutiques, la coca est
profondément ancrée dans la culture locale : on la mâche pour se donner du
cœur au ventre, elle est utilisée dans de nombreuses manifestations rituelles.
Reste sa transformation en cocaïne, qui fait la fortune des réseaux de
trafiquants et de certains mouvements révolutionnaires dévoyés dans la
délinquance, comme le tristement célèbre Sentier lumineux, qui a ravagé et
meurtri le Pérou entre 1980 et 2000.
Pour de nombreux paysans, la culture de la coca apparaît comme une option
économique incontournable quand leurs productions licites ne leur permettent
pas d’assurer leur survie.
Beaucoup de programmes de développement, financés en particulier par
les États-Unis, cherchent à réorienter les producteurs de coca vers d’autres
activités agricoles. Ce n’est pas facile car la coca peut rapporter gros, même
si ce sont les trafiquants qui se taillent la part du lion dans cette économie
parallèle.
À sa petite échelle, Iles de Paix, par ses appuis à la production agricole,
détourne certains paysans de cette activité discutable.
un paysan récolte les feuilles de coca. une activité rentable, mais surtout pour les réseaux qui produisent et trafiquent la cocaïne.
© R
epor
ters
La coca comme recours
> DoSSIEr PéroU
Visionnez des reportages vidéo sur deux actions d’Iles de Paix au Pérou > www.ilesdepaix.org/transitions 13
© ID
P
14 | transitions n97 | Décembre 2012
> In
foS
Mon
DELa coopération belge « un peu » rabotée
Le budget fédéral 2013, adopté non sans
peine par le gouvernement, se traduit
par de douloureuses économies. Celui du
ministère de la Coopération n’échappe pas
à l’austérité : il sera amputé de 100 millions
d’euros. Fort heureusement, c’est moins
que ce que beaucoup craignaient.
Encore faudra-t-il que les moyens de la
coopération soient entièrement affectés
et ne soient pas rabotés par un éventuel
contrôle budgétaire, comme ce fut le cas
en 2012 : une réduction de quelque 420
millions d’euros qui met en difficulté bien
des ONG engagées dans l’aide humanitaire.
Tournant autour de 1,4 milliard d’euros,
le budget de la coopération représentera
0,5 % du revenu national brut du pays.
L’objectif affirmé d’atteindre 0,7 % en 2015
paraît d’ores et déjà hors d’atteinte.
868 millions de personnes dans le monde ont encore souffert de la faim
pendant la période 2010-2012, indique un rapport de l’ONU publié en octobre.
Un statu quo par rapport aux trois années précédentes. La faim régresse
tout de même légèrement compte tenu de l’augmentation de la population
mondiale.
Kanayo Nwanze, président du Fonds international de développement agricole
(FIDA), estime que la solution au problème de la faim réside dans un soutien
renforcé à l’agriculture familiale, « qui peut et doit devenir rentable, afin de
susciter des vocations et de contribuer à nourrir l’humanité ».
Pour Monsieur Nwanze, il est important d’aider les agriculteurs à augmenter
leurs rendements, mais cela ne suffit pas. « A quoi sert de produire plus si
le paysan ne peut commercialiser sa production ? Il est nécessaire, aussi,
de favoriser l’accès des producteurs au crédit, aux marchés et à un certain
nombre de services et d’infrastructures, par exemple des installations de
stockage fiables. »
Le FIDA fait donc de la commercialisation de la production des petits agriculteurs
une de ses priorités. Iles de Paix aussi, depuis de très nombreuses années.
En équateur, iles de paix a ouvert des pistes. notamment pour permettre aux paysans de commercialiser leur production.
© E
ric
Lam
pe/I
DP
Contre la faim, une agriculture familiale rentable
Salon de l’éducation 2012
Iles de Paix a pris l’initiative de favoriser le
jeu collectif. Il invite toutes les ONG actives en
éducation au développement à présenter leurs
outils pédagogiques dans un catalogue commun.
La production de 22 ONG se trouve ainsi réunie en
un seul fascicule.
La carte du collectif ne s’arrête pas là. Le Salon de
l’éducation de Namur, qui se déroule en octobre,
est un rendez-vous annuel et incontournable du
monde enseignant. De très nombreux stands
les informent des dernières nouveautés de leur
secteur. Iles de Paix y est abonné. C’est l’occasion
de rencontrer des professeurs de tous niveaux
et de toutes disciplines, de discuter avec eux et
de mieux cerner leurs attentes. Là aussi, Iles de
Paix met son espace à la disposition de tous afin
de favoriser l’utilisation des outils conçus par
toutes les ONG.
Une taxe sur les transactions financières, mais quand et pour qui ?
Une sorte de taxe Tobin est en train de voir
le jour. Le 9 octobre, onze pays de l’Union
européenne ont donné leur accord pour
l’introduction d’une taxe sur les transactions
financières. Faute de pouvoir convaincre
l’ensemble des membres de l’UE, ces pays
ont décidé d’aller de l’avant.
Une étude récente, portant sur 9 pays qui appliqueraient une telle taxe,
a conclu que celle-ci pourrait rapporter annuellement 32 milliards
d’euros. Comparé au budget de l’Union, ce n’est pas énorme, mais
c’est tout de même une belle somme.
Depuis de nombreuses années, des ONG militent pour la création d’une
taxe « Tobin » et son affectation à l’aide aux pays en développement.
Elles plaident aujourd’hui pour qu’une partie significative des
revenus générés serve à lutter contre le réchauffement climatique
et la pauvreté dans ces pays. On peut craindre en effet que, vu la
conjoncture actuelle, cet argent ne soit majoritairement affecté à
l’assainissement budgétaire des pays taxateurs.
À moins que d’ici l’entrée en vigueur de cette taxe, la crise soit derrière
nous. D’après un cadre du ministère allemand des Finances, ce ne
sera pas avant 2016.
15
Le reportage Aller à l’école au burkina faso et des prolongements sur ces brèves > www.ilesdepaix.org/transitions
Vous êtes en 5e secondaire ? Inscrivez votre classe
sur le site www.moveforafrica.be et partez peut-être
avec Iles de Paix au Bénin. Lancée par le quotidien
La Libre, en collaboration avec une série d’ONG,
Move for Africa est une action de sensibilisation
à la coopération au développement. Au total, 130
jeunes auront l’occasion de se rendre en Afrique
l’année prochaine. Plongés au cœur de projets de
développement ou d’aide humanitaire, ils auront
l’occasion de se forger une opinion plus avisée sur
des réalités dont on n‘a trop souvent que des échos
lointains et généralement peu audibles.
Move for Africa : se rendre compte sur place
Se frotter aux stéréotypes,cheminer vers l’autonomieOn l’appelle la série des « Guillaume », du nom du premier
opus Guillaume les pieds sur terre. Chaque élément
comprend un livret destiné à l’élève. Il propose une histoire
qui sensibilise à une thématique. On se souvient de Chez
Nora sur l’engagement et des Peuples migrateurs sur les
migrations. Un dossier pédagogique fournit à l’enseignant
des pistes d’exploitation en classe, pour aller plus loin.
Voici désormais Le mystère Manu Gaffi. Il traite la question
des stéréotypes, en particulier ceux liés au genre. L’histoire,
comme toujours, est simple : un sac à commissions a
été oublié sur un banc public. Son contenu permet-il de
déduire quel(le) est son ou sa propriétaire ? L’exploitation
pédagogique porte aussi sur la discrimination, petite sœur
des préjugés.
Iles de Paix publie également Zébulon apprend à pêcher.
Zébulon, jeune prince, part à l’aventure pour découvrir
la vie et le monde. On suit ses apprentissages. L’élève se
penche ainsi sur le long chemin qui mène à l’autonomie,
mais aussi à la liberté dont elle est le creuset.
Reportage au Burkina : l’école est un droit
L’accès à l’éducation est l’un des droits fondamentaux
de chacun. On sait que c’est aussi un accélérateur de
développement. Aller à l’école au Burkina Faso, le dernier
reportage d’Iles de Paix à destination des jeunes, passe en
revue les obstacles à la fréquentation scolaire. Il faut des
salles de classe bien équipées, des enseignants physiquement
présents et des enfants disponibles. Les pouvoirs publics, les
populations et les ONG y travaillent. On découvre notamment
l’action d’Iles de Paix : construction de salles de classe et
de logements pour les maîtres, séances de sensibilisation à
l’adresse des parents, forages pour libérer les jeunes filles de
leurs charges et leur permettre d’aller à l’école.
tout le monde au poste devant la nouvelle école de pendjamboula.
11-12-13 janvierSoutenez la campagne d’Iles de Paix !