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REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET UNIVERSITAIRE
UNIVERSITE NOTRE –DAME DU KASAYI
« U.KA. »
FACULTE DE DROIT
B.P. 70 KANANGA
Présenté par Présenté par Présenté par Présenté par Médard MULENGA KALENGAMédard MULENGA KALENGAMédard MULENGA KALENGAMédard MULENGA KALENGA Assistant Assistant Assistant Assistant
EncadreurEncadreurEncadreurEncadreur : : : : BASUE BABU KAZADI Greg.BASUE BABU KAZADI Greg.BASUE BABU KAZADI Greg.BASUE BABU KAZADI Greg. Professeur Ordinaire Professeur Ordinaire Professeur Ordinaire Professeur Ordinaire
L’IMPACT DE LA DECENTRALISATION DANS LA
CONSTRUCTION DE L’ETAT DE DROIT EN
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
ANNEE ACADEMIQUE 2014ANNEE ACADEMIQUE 2014ANNEE ACADEMIQUE 2014ANNEE ACADEMIQUE 2014----2015201520152015
Travail de Recherche financé par la
Chaire UNESCO de l’Université de
Bergame et l’Association Vittorino
Chizzolini Coopération Internationale
ONLUS
1
L’IMPACT DE LA DECENTRALISATION DANS LA CONSTRUCTION DE L’ETAT
DE DROIT EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
INTRODUCTION
La présente étude veut examiner l’apport de la décentralisation
territoriale comme mode de gouvernance dans la formation de l’Etat de droit en
RDC. Plus concrètement, il est question de scruter la valeur intrinsèque de la
décentralisation, les forces centrifuges et celles centripètes de l’avènement d’un
Etat de droit.
En effet, la plupart des Etats africains, et la RDC n’est pas du reste,
clament, haut et fort qu’ils sont « Etats de droit ». A l’instar des Etats occidentaux,
leurs anciennes métropoles, ils insèrent dans l’arsenal juridique qui les régit ce
concept d’ « Etat de droit » comme attribut principal de leurs Etats. C’est le cas
de la RDC1 qui, non seulement l’adopte mais, institue la décentralisation2 comme
mode de gestion de ce vaste Etat au cœur de l’Afrique.
Cependant, quel lien établir entre la décentralisation et l’Etat de
droit ? Il ne sert à rien de les insérer dans son armature juridique si le fossé
persiste entre la théorie et la pratique. C’est cette situation d’écart différentiel
entre le contenu de la constitution et sa mise en application que dénonce P. Vialle
lorsqu’il écrit : « Certes, les constitutions modernes contiennent presque toutes
les dispositions protectrices des citoyens mais, il s’agit bien souvent plus d’une
révérence à des grands principes que d’une foi dans la nécessité de leur mise en
œuvre »3.
Au sujet de la RDC, nous voulons vérifier grâce aux méthodes
sociologique, exégétique et comparative si la décentralisation peut contribuer à
l’émergence et à la consolidation de l’Etat de droit. Curieusement, les questions
paraissent plus nombreuses que les réponses. En fait, il ne faut pas créer des
cathédrales dans le désert : rêver jouir du bonheur de l’Etat de droit par la
décentralisation est permis. Mais notre peur est que ce ne soit pas un mirage.
Avec un régime politique qui ne dit pas son nom : régime mixte, semi-
présidentiel, parlementarisme rationalisé, ou présidentialisme africain ; avec une
forme de l’Etat hybride : régionalisme politique ou constitutionnel, l’on se
demande si la RDC serait prête à construire un Etat de droit sur base de la
1 Article 1 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006, 47
ème année, numéro spécial, Journal Officiel, 2006.
2 Article 3 de la Constitution, op. cit.
3 VIALLE, P., Droit constitutionnel et science politique, Paris, Hermès, 1998,p.59.
2
décentralisation. N’est-ce pas qu’avec un régime de confusion qui se meut dans
une forme de l’Eta de confusion, l’on ne peut attendre que la confusion ?
Nous estimons que la RDC doit dépasser le caractère déclaratoire qui la
caractérise pour s’inscrire dans la logique d’actions qui répondent aux besoins
identifiés de la population. D’où, pour cet Etat aux dimensions continentales, il
serait important de penser à la fédération à défaut de la partition.
Voilà l’ensemble de questions qui nous préoccupent et auxquelles nous tenterons
de répondre dans cette étude.
Ainsi, nous allons, non seulement nous investir dans la compréhension
de la décentralisation et de l’Etat de droit (I), mais aussi nous interroger sur le
lien entre les deux et l’apport de l’une dans la construction de l’autre (II) avant de
déboucher sur quelques perspectives (III).
3
I. COMPREHENSION DE LA DECENTRALISATION ET DE L’ETAT DE DROIT
Le sage Chinois Confucius+7/* a dit avec raison que « pour éviter la
guerre, il faut commencer par définir le sens des mots ». Partant de ce célèbre
principe, l’élucidation de ces deux concepts s’avère indispensable pour la
meilleure saisie de notre propos. Il ne s’agira pas d’une étude étymologique ou
lexicale. Il sera plutôt question de situer ces concepts dans leur contexte pour
dénicher leur véritable sens.
I.1. La décentralisation
Il sera question de présenter ses différentes acceptions avant
d’analyser ses principes de base.
I.1.1. différentes acceptions
La décentralisation peut se comprendre de trois façons différentes : la
décentralisation industrielle, la décentralisation technique et la décentralisation
territoriale.
���� La décentralisation industrielle s’entend selon le lexique des termes
juridiques comme « la politique économique tendant, dans le cadre de
l’aménagement du territoire, à inciter les entreprises à s’installer dans les
régions géographiques insuffisamment industrialisées ». l’objectif
poursuivi par les gouvernants est de favoriser l’industrialisation et par
ricochet chercher d’améliorer les conditions de vie des populations sur
toute l’étendue du territoire national.
���� La décentralisation technique consiste à permettre à un service de gérer
sous le contrôle vigilant de l’Etat. D’où l’octroi à ce service, de la
personnalité juridique, d’autorités propres et des ressources. Ici, l’on
accorde à un service d’intérêt général les prérogatives de s’administrer en
vue de satisfaire convenablement aux besoins des citoyens.
���� La décentralisation territoriale est un système d’administration consistant
à permettre à une collectivité humaine de s’administrer elle-même sous le
contrôle de l’Etat, en la dotant de la personnalité juridique, d’autorités
propres et des ressources4.
4 GUILLIEN, R. et VINCENT, J., Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, p.160.
4
La décentralisation territoriale consiste à accepter que des collectivités
infra-étatiques s’administrent librement par des conseils élus, respectent la loi
nationale et restent sous le contrôle de l’Etat5.
Elle est une technique administrative qui départage la personnalité
juridique détenue par l’Etat entre ce dernier et les entités territoriales infra
étatiques afin de rapprocher l’administration des administrés. Elle vise quant à
elle, le développement de l’Etat à partir de la base.
C’est cette dernière acception de la décentralisation qui nous intéresse
dans le cadre de cette étude.
En effet, la décentralisation territoriale est un système administratif
conçu pour pallier au défaut de la concentration et de la déconcentration du
pouvoir de l’Etat. L’Etat unitaire concentré se remarque par les structures
administratives où il n’existe qu’un seul centre d’impulsion et d’exécution des
tâches administratives, ce système provoque l’asphyxie au centre et la paralysie
aux extrémités6. D’où l’existence des modalités d’organisation de l’Etat unitaire :
la déconcentration et la décentralisation.
La déconcentration consiste à insérer entre les centres administrés des
autorités étroitement hiérarchisées. Ces dernières vont jouer le rôle de charnière
entre le centre et la périphérie. Philippe Ardant l’exprime mieux quant il écrit :
« la déconcentration consiste à faire exercer les attributions de l’Etat par des
autorités nommées par lui et réparties dans des circonscriptions à travers le
territoire (…). Les fonctionnaires ou agents de l’Etat, affecté dans les
circonscriptions, exécutent les ordres du pouvoir central et prennent des
décisions sous son contrôle : ils sont insérés dans une hiérarchie »7
C’est comme le disait Odilon Barrot : « c’est le même marteau qui
frappe, mais on en a raccourci les manches »8
Par la décentralisation on confie l’exercice de certaines attributions
administratives à des autorités locales élues par les citoyens. Même si l’existence
des entités locales est garantie par la constitution, leur mode d’organisation et
leurs pouvoirs sont généralement fixés par la loi. Ces entités territoriales
demeurent sous le contrôle de tutelle de l’Etat central. Philippe Ardant souligne
également que « la décentralisation consiste à confier les attributions propres à
5 KADA, N., Lexique de droit constitutionnel, Coll. Ellipses, Ed. Marketing, 2004, p.46.
6 BASUEBABU, G., Droit administratif, Kinshasa, PUIC, 2014, p.25.
7 ARDANT, Ph., Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 1999, p.36.
8 BARROT, O., cité par JACQUE, J-P., Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, Dalloz, 1994,p.10.
5
des autorités élues à l’échelon local par les citoyens (décentralisation territoriale :
la commune, la région)»9.
En fait, la décentralisation postule que les entités locales sont dotées
d’une personnalité juridique distincte de celle de l’Etat. Du point de vue
territorial, des simples circonscriptions administratives sont érigées en
collectivités infra-étatiques. Ces entités se voient accorder une autonomie
administrative et financière, c'est-à-dire la gestion des affaires locales ainsi que
d’un budget financé par des ressources propres10. Cela indique mieux le principe
de la décentralisation.
Ainsi, le concept « décentralisation » n’a pas de sémantique univoque. Il
existe autant de définitions qu’il existe d’auteurs. Toutefois, malgré les
différences de contexte et des périodes, il existe des constances qui constituent
les substances du concept sous examen.
Entendu dans un sens général, la décentralisation désigne un
processus engageant un transfert de pouvoir d’un niveau central à un niveau
local11. C’est l’application de la démocratie au plan local consistant dans le
transfert des compétences d’ordre administratif du pouvoir central à des
collectivités dont les instances dirigeantes sont élues par les citoyens concernés
Pour Pamphile Mabiala et Richard Dion, elle constitue « une approche
organisationnelle visant le transfert du processus de prise des décisions, le plus
près possible du niveau de services ou d’actions. Selon cette vision, la
décentralisation devient un processus s’appliquant aussi bien à un système
politique qu’à toute autre organisation et qui vise la délégation et la prise des
décisions du centre vers les périphéries ».12
Vunduawe Te Pemako estime que « la décentralisation consiste à
confier l’exercice d’une compétence qui pouvait appartenir aux seuls organes de
l’Etat à plusieurs autorités dont chacune n’a en charge qu’une fraction de la
collectivité étatique »13. Le même auteur soutient que c’est « un système
9 ARDANT, Ph., op. cit., p.36.
10 LIEGEOI, M., La décentralisation en R.D.Congo. Enjeux et défis, GRIP, 2008, p.7.s
11 AVRIL, p. et GIQUEL, J. Lexique de droit constitutionnel, pp.86-87, cité par BAKANDEJA G., La décentralisation
fiscale, communication d’atelier sur la décentralisation tenu, Kinshasa, Décembre 2009, pp. 2-3. 12
MABIALA, P. et DION, R., « Pouvoir central et pouvoirs provinciaux et locaux » in Mandats, rôles et fonctions des pouvoirs constitués dans le nouveau système de la RDC, éd. PNUD, Kinshasa, 2009,pp.54-56. 13
VUNDUAWE Te Pemako, « Qu’est-ce que la décentralisation administrative ? », in Cahier du potentiel, vol.01/12/2001, fév. 2003, pp.11-19.
6
d’organisation administrative dans lequel et en vertu de la loi, il y a existence en
dehors du centre d’autres niveaux de responsabilité et de décision »14.
En définitive, Bakajika Ntumba note que, le mot « décentralisation »
dérive du verbe décentraliser qui peut, pour une bonne compréhension être écrit
en deux mots : « DE-CENTRALISER » et être de ce fait compris comme « détacher
du centre » et quand on détache du centre on renvoi toujours à la périphérie.
Cette expression peut également être comprise comme « dépouiller le centre des
charges encombrantes » et les confier à la périphérie15. Au lieu de maintenir un
seul centre d’impulsion des activités en vue de satisfaire les besoins de la
population, on multiplie plusieurs centres qui seront contrôlés, par le pouvoir
prévu dans les textes juridiques.
Mais, quels sont les indicateurs de la décentralisation ou ses principes
fondamentaux ?
I.1.2. Principes fondamentaux
On peut en relever au moins cinq :
- La personnalité juridique ;
- La libre administration ;
- Les ressources propres ;
- L’autonomie de gestion ;
- La tutelle
Avec la décentralisation, l’Etat n’est pas le seul détenteur de la
personnalité juridique. Il la détient concurremment avec les collectivités locales
décentralisées, la personnalité juridique rend les entités territoriales
décentralisées sujets de droit, c'est-à-dire capables d’avoir des droits et des
obligations. La personnalité juridique confère aux entités décentralisées de
défendre les intérêts devant la justice et d’accueillir des participations dans les
organismes nationaux ou étrangers.
La libre administration signifie que toute collectivité décentralisée soit
dotée d’attributions effectives. Cela suppose la non-ingérence du pouvoir central
dans la gestion de leurs affaires propres. Les ressources propres : cela veut dire
que les entités décentralisées disposent d’un patrimoine propre distinct de celui
14
VUNDUAWE Tepemako, « Réflexion sur le régionalisme politique de la nouvelle décentralisation territoriale »
in Mandat et rôles … PNUD , Kinshasa, 2007, p.82. 15
BAKAJIKA NTUMBA, La décentralisation en RD. Congo, Repères, mécanismes et impact sur la société, Tome I, éd. La Vie, Kananga, 2010, p.65.
7
de l’Etat. Cela fait penser aussi au partage des pouvoirs et des compétences entre
le sommet et la base entre l’Etat et les entités décentralisées. L’Etat transfère
donc les moyens et des charges à la collectivité décentralisée. L’on dispose des
ressources mais l’on a aussi des charges à supporter.
L’autonomie de gestion dont jouissent les entités décentralisées et
prévues pour favoriser la bonne gouvernance. Pour tout dire, la décentralisation
est donc source d’autonomie et non pas d’indépendance car « s’administrer » ce
n’est pas « gouverner » mais c’est gérer sans bénéfice d’un pouvoir normatif
initial. Il s’agit donc d’une autonomie relative : une auto-organisation encadrée et
contrôlée16.
La tutelle : c’est un contrôle administratif exercé par l’Etat sur les
organes décentralisés et sur leurs actes, dans les limites fixées par les lois pour
faire respecter la légalité et l’intérêt général. Elle vise à éviter les abus possible et
à préserver l’intérêt national face aux intérêts locaux.17
Il convient de noter qu’à la centralisation correspond le contrôle
hiérarchique et à la décentralisation correspond le contrôle de tutelle. Les deux
contrôles se différencient sur trois plans : le cadre, la source et l’étendue.
Le contrôle hiérarchique a pour cadre une seule personne morale ; sa
source est de droit commun et son étendue porte sur la régularité et l’opportunité
des actes des autorités inférieures.
Alors que le contrôle de tutelle s’exerce dans le cadre de rapport entre
deux personnes morales ; la tutelle a pour source la loi de telle sorte qu’il n’y a
pas de tutelle sans texte et pas de tutelle au-delà des textes. Son étendue porte sur
la régularité et parfois l’opportunité des actes des entités décentralisées et de ses
autorités.
Ce tableau synthétique peut bien clarifier la distinction qui existe entre la
déconcentration et la décentralisation territoriale dans un Etat unitaire :
16
FAVOREU, L., Droit constitutionnel, Ed, Dalloz, Paris, 1998, P.445. 17
KAMUKUNY, A., Cours de Droit Constitutionnel. Théorie générale et institutions politiques, G1 Droit, U.KA, 2014-2015, P. 83, Notes polycopiées et inédites.
8
Etat unitaire Déconcentration Décentralisation
territoriale
Personnalité juridique Une seule personnalité
juridique
Plusieurs personnalités
juridiques
Centre de décision Un seul centre de
décisions
Plusieurs centres de
décisions
Choix des gouvernants Nomination Elections
Pouvoir Délégation du pouvoir et
dépendance
Autonomie de gestion et
libre administration
Contrôle Contrôle hiérarchique Contrôle de tutelle
Toutefois, la décentralisation se distingue de la dévolution. Cette
dernière s’entend au sens large comme un transfert de l’hérédité aux
successibles. Au sens restreint, elle signifie qu’en cas de la défaillance d’une
lignée, la vocation héréditaire soit attribuée à une autre lignée18. La
décentralisation quant à elle, est un mode d’organisation de pouvoir de l’Etat : le
pouvoir central transfère certaines de ses compétences sur base de la
constitution ou de la loi à certaines entités territoriales.
Entre 1967 et 2007, la RDC est passée par « plusieurs ajustements et
réajustements dans le sens de la centralisation, de la déconcentration, de la
décentralisation, de la rédaction et de l’augmentation du nombre des entités
territoriales ainsi que de leurs appellations »19.
La décentralisation Congolaise apparait dans certaines dispositions de
la constitution. En effet, au regard de ces articles 2, 3, 197 et 198, 201, 202 et 203,
la RDC est composée de la ville de Kinshasa et de 25 Provinces dotées de la
personnalité juridique (article 2) ; les provinces et les entités territoriales
décentralisées jouissent de la libre administration et de l’autonomie de gestion de
leurs ressources économiques, humaines, financières et techniques (article 3) ;
les provinces sont dotées des institutions politiques (une assemblée provinciale
et un gouvernement provincial) (articles 197 et 198) ; les provinces ne sont pas
reprises sur la liste des entités territoriales décentralisées qui sont exclusivement
la ville, la commune, le secteur et la chefferie (article 3, alinéa 2). 18
GULLIEN R., & VINCENT J.,op. cit., p.185. 19
TOENGAHO, F., « La réforme sur la décentralisation et le découpage territorial : portée, forces et faiblesses », in Congo-Afrique, n° 433, p. 213.
9
Cette décentralisation, se manifeste aussi à travers la répartition des
compétences entre les pouvoir central et les provinces (article 201) : il s’agit des
matières qui sont de la compétence exclusive du pouvoir central (article 202), des
matières qui sont de la compétence concurrente du pouvoir central et des
provinces (article 203) et des matières qui sont de la compétence exclusive des
provinces (article 204). Et l’article 220 de la constitution interdit formellement
toute révision constitutionnelle ayant pour objet de réduire les prérogatives des
provinces et des entités territoriales décentralisées.
En plus, selon l’esprit de la constitution, plusieurs textes importants
ont été adoptés pour la mise en œuvre de la décentralisation. Il s’agit de :
- La loi 08/12 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux
relatifs à la libre administration des provinces ;
- La loi organique n° 08/015 du 07 octobre 2008 portant modalités
d’organisation et de fonctionnement de la conférence des
Gouverneurs ;
- La loi organique n° 08/016 du 07 octobre 2008 portant composition,
organisation et fonctionnement des entités territoriales
décentralisées et leurs rapports avec l’Etat et les provinces ;
- La loi n° 11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques.
De toutes ces dispositions constitutionnelles et législatives on peut
retenir que :
- La répartition des compétences entre le pouvoir central et les
provinces, est inscrite dans la constitution et que toute révision
tendant à réduire les prérogatives des provinces et des ETD est
interdite ;
- L’autonomie politique et financière reconnues aux provinces reste
une autonomie contrôlée par le pouvoir central. De la, on tombe
dans le régionalisme constitutionnel qui est un mode d’organisation
de l’Etat qui confère à la région (province) un rôle et un statut
politique propres, caractérisée par une autonomie relative ;
autonomie encadrée par l’autorité nationale20. Les institutions
20
BAUFAYS, J., et alii (2008), « Régionalisme », in V. BOURDEAU et R. MERRIL (dir.), Dicopo, Dictionnaire de théorie politique, http://www.dicopo.org/spip.php?article103.
10
provinciales (assemblée et gouvernement) peuvent être renversées
sur décision du pouvoir central ;
- Il est institué un cadre de concertation entre les provinces et le
pouvoir central : la conférence des Gouverneurs. Elle a pour mission
d’émettre des avis et formuler des suggestions concrètes sur la
politique à mener et la législation à élaborer ;
- Il n’existe pas de tutelle du pouvoir central sur les provinces. La cour
constitutionnelle est la seule autorité habilitée à régler un conflit
entre ces deux niveaux de pouvoir d’Etat. Par contre la province
exerce le contrôle de tutelle sur les ETD. Mais cette tutelle
administrative peut être remplacée par un contrôle du juge
administratif21.
- Les rapports entre les ETD, le pouvoir central et les provinces, les
ressources financières des ETD et le statut judiciaire des autorités
des ETD sont consacrés par des lois de la République22.
Examinons à présent ce qu’est l’Etat de droit.
I.2. L’Etat de Droit
Avant d’analyser les indicateurs de l’Etat de Droit, il s’avère
indispensable de saisir le contour de cette expression en la définissant.
I.2.1 La sémantique de l’Etat de Droit
L’expression d’Etat de droit est une construction sémantique
récente. Elle est inconnue de la révolution française. Pourtant, on se plait à placer
celle-ci à l’origine de cette notion.
Quoique le juriste américain J. Kent ait forgé la formule voisine de
State of low, ce sont surtout des juristes allemands de la fin du 19ème siècle qui
sont à l’origine du succès du vocable de Rechtsstaat.
La notion se répandit très tôt dans certains pays comme l’Italie, où
on en tira les empressions comme celle de Stato giuridico, mais ce n’est qu’avec
21
VUNDUAWE te Pemako, F., « La dynamique et la décentralisation territoriale en RDC », in Congo-Afrique, n° 432, Février 2009, p. 106. 22
Pour plus de lecture, voyez, Simon-Pierre METENA M’nteba, « Des entités territoriales décentralisées (ETD) », qu’est-ce à dire et pourquoi faire ? », in Congo-Afrique, N° 433, mars 2009, pp. 187-202.
11
retard, à compter du début du XXè siècle, que les juristes français adoptèrent le
terme. Il ne se diffusa que dans la seconde moitié du XXè siècle voir les années
soixante-dix23
Il existe souvent une querelle définitionnelle lorsqu’il s’agit de
donner le sens de l’Etat de droit. Il sied d’indiquer que la définition de l’Etat de
droit ne fait pas unanimité entre les doctrinaires. Autant d’auteurs, autant de
définitions qui, parfois se recoupent ou sont généralement différentes. Devenu un
nouveau paradigme en vogue, l’Etat de droit n’a pas un sens univoque24.
Rousseau Dominique présente mieux cette querelle définitionnelle
lorsqu’il écrit : « pour certains, cette notion est tautologique dans la mesure où
tout Etat est nécessairement un Etat de droit, avec un système normatif produit
appliqué et contrôlé par les autorités habiletés à ces différentes tâches. Pour
d’autres, Etat de droit signifie que le pouvoir exécutif, l’administration et la justice
sont soumis au respect de la loi votée par le Parlement, loi qui comme expression
de la volonté générale est incontestable ; ici l’Etat de droit signifie comme l’Etat
légal, l’Etat de la loi, aucune autre norme ne pouvant juger et s’imposer à la loi
faite par l’Etat. Pour d’autres au contraire, l’Etat de droit ne peut pas être l’Etat de
n’importe quelle loi ; ici les lois elles-mêmes doivent être soumises au respect des
normes qui leur sont supérieures et qui fondent en conséquence un contrôle
possible des lois »25.
Dans le cadre de cette réflexion nous estimons que la deuxième
position présentée par Rousseau vaut tout sont pesant d’or car l’Etat de droit est
donc un Etat soumis aux normes juridiques qu’il génère. Cela signifie que la loi
est au-dessus de tous, gouvernants et gouvernés sans distinction. Ce qui suppose
la mise en avant plan des droits fondamentaux des citoyens et leur protection.
« La domination des faibles ou le traitement discriminatoire des individus dans
pareil Etat n’a pas de place car nul n’est au-dessus de la loi »26. Léon de Saint
Moulin affirme qu’ « un régime de droit (ou Etat de droit) correspond par
conséquent à un type de société organisée pour la protection et la mise en valeur
de la dignité des droits de ses membres »27.
23
DÉBBASCH CH. Et DAUDET Y. cité par BASUE BABU, G. Histoire du droit et des idées politiques, sociales et économiques, Kinshasa, PUIC, 2014, pp. 87-88. 24
MADIMBA, C., et MULENGA, M., « Justice et Etat de droit, quel lien ? » in Le Plumitif, Revue de Droit et de sciences judiciaires, Vol. O2/2015, Collection B. Kingudi, Matadi, 2015, P. 74. 25
ROUSSEAU, D., « L’Etat de droit est-il un Etat des valeurs particulières ? », en ligne sur http// : www.ais-mrs;iufm.fr/formation/filières/ecjs/reflexions/etatdroit.html consulté le 27 Mars 2015 26
MADIMBA, C., et MULENGA, M., Op. Cit, P. 75. 27
L. de Saint MOULIN et alii, La perception de la démocratie et l’Etat de droit en RDC, CEPAS, Kinshasa, 2003, P. 51.
12
Même si l’Etat de droit est considéré comme un argument d’autorité
dans les stratégies modernes de communication politique28, c’est sur base de ses
postulats que se décline la légitimité du pouvoir social, économique et politique
dans le monde actuel29.
Au fondement de l’Etat de droit, il y a un principe négatif sur un Etat
qui risque de tomber dans l’arbitraire et dans l’oppression. Cela est fait pou
garantir et protéger les droits de l’homme pour qu’ils ne soient assujettis aux
caprices des dirigeants, mais seulement aux lois, expression de la volonté
générale du peuple.
C’est ce qui a fait dire à J. Chevalier que l’Etat de droit est celui dans
lequel « le pouvoir ne peut user que des moyens autorisés par l’ordre juridique
en vigueur, tandis que les individus disposent des voies de recours
juridictionnelles contre les abus qu’il est susceptible de commettre »30. Dans le
même ordre d’idée, Laurent Gaba soutient que l’Etat de droit est soit celui qui
pose des actes au moyen du droit soit assujetti au droit (conception formelle ou
hiérarchique) soit celui dont le droit comporte certains attributs ou valeurs
intrinsèques (vision matérielle ou substantielle) »31.
En définitive, l’Etat de droit c’est l’Etat dont la démocratie avec ses
principes constituent le fondement. Il s’éloigne plus de l’Etat de police et la
dictature où la tyrannie est érigée en loi. C’est dans cette optique que J.P. Jacqué
écrit : « L’Etat de droit se distinguerait de l’Etat de police en ce sens que, dans le
premier, la puissance publique ne peut agir que sur base et dans les limites des
règles qui s’imposent à elle tandis que dans le second, la puissance publique
pourrait agir selon son bon vouloir sans être tenu au respect de ces règles »32.
L’opposition entre les deux formes de l’Etat est évidente de telle sorte qu’on ne
voit pas en quel point ils peuvent se ressembler. L’Etat dictatorial est régi par un
pouvoir personnel, qui se considère comme source des lois mais qui n’est pas
soumis aux lois. Il est confondu à la personne du dictateur à qui on peut appliquer
facilement la célèbre formule de Louis XIV : « l’Etat c’est moi ». C’est le dictateur
qui est la seule source du droit et détenteur des droits supérieurs. Il est
intouchable de par la loi33.
28
GABA, L., « L’Etat de droit et la Démocratie en Afrique Subsaharienne » in D. MOCKLE (din), Mondialisation et Etat de droit, Bruylant, Bruxelles, 2002, P. 202. 29
CHEVALIER, J., Etat de droit, 3ème
Ed. Montchrestien, Paris, 2003, P. 7. 30
IDEM, P. 14. 31
GABA, L., L’Etat de droit, la démocratie et le développement économique en Afrique subsaharienne, L’Harmattan, 2002, P. 31. 32
JACQUE, J-P., Op. Cit, P. 8. 33
NGAKOUTOU, T., Les limites de la démocratie subsaharienne, Ed. L’Harmattan, Paris, 2005, P. 72-73.
13
L’Etat de droit est un Etat où le pouvoir s’exerce dans le cadre du droit,
en se soumettant lui-même à cet encadrement normatif. C’est à cette seule et
unique condition que l’on peut affirmer que l’arbitraire est alors exclu du pouvoir
des gouvernants. La théorie allemande (doctrine du « Rechsstaat ») a ainsi
distingué l’Etat de droit de l’Etat de police, qui s’apparente à un Etat qui édicterait
certes des règles opposables à ses ressortissants, mais qui ne se soumettrait pas
lui-même à des règles supérieures.
En France, l’absence de véritable contrôle de constitutionnalité
jusqu’en 1958, la loi était la norme suprême : il s’agissait donc alors d’un cadre
légal auquel les autorités étatiques se soumettent selon leur bon vouloir. Avec
l’avènement de la Vè République, la proclamation de la supériorité de la
Constitution sur la Loi et l’instauration du conseil constitutionnel, la France est
donc ainsi devenue un véritable Etat de droit34.
Toutefois, il convient de retenir que l’Etat de droit a ses principes de
base qu’il faut observer si l’on veut qu’il soit effectif.
I.2.2 Principes de base
Les principaux indicateurs à vérifier dans la constitution actuelle sont
les suivants : le pluralisme politique baignant dans un système démocratique, la
séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire, la
participation des citoyens à l’exercice du pouvoir, le contrôle des gouvernants par
les gouvernés, la transparence dans la gestion des affaires publiques, la
subordination de l’autorité militaire à l’autorité civile ainsi que la protection des
personnes et de leurs biens.
1.1. Le pluralisme politique dans un cadre démocratique
La constitution du 18 février 2006 garantit le pluralisme politique.
Tout citoyen peut créer un parti politique ou être membre d’un parti de son choix.
L’article 6 de cette constitution l’exprime mieux : « Le pluralisme politique est
reconnu en République Démocratique du Congo… ».
Pour éclairer ses choix, ses opinions, le citoyen congolais ne doit pas
seulement être en mesure de comprendre le monde qui l’entoure, il doit inscrire
sa compréhension dans un cadre de référence idéologique. Telle est la fonction
des partis politiques porteurs d’un projet idéologique global ; à l’occasion des
34
KADA, N., op. cit. p.44.
14
élections, ils ont pour rôle de susciter le vote des citoyens au profit des candidats
qui s’en réclament. Ainsi, de l’avis de Joseph Lapalombara et Myron Wiener ces
quatre éléments caractérisent un parti politique : la continuité de l’organisation,
la nationalisation de l’organisation, la volonté d’exercer le pouvoir et la recherche
d’un soutien populaire35.
L’article 7 de la constitution interdit le monopartisme considéré
comme une infraction punie par la loi : « Nul ne peut instituer, sous quelque
forme que ce soit, de parti unique sur tout ou partie du territoire national.
L’institution d’un parti unique constitue une infraction de haute trahison punie
par la loi ». Toutefois, lorsqu’on considère le pullulement des partis en RDC, on
peut dire qu’ils correspondent au nombre d’ethnies. Le multipartisme voulu
comme cadre de mobilisation et d’encadrement pour l’action politique risque de
conduire au multi tribalisme avec des partis politiques sans implantation réelle et
profonde sur le terrain.
1.2. La séparation des pouvoirs
L’organisation et l’exercice du pouvoir sont consacrés dans le Titre II
de la constitution du 18 février 2006, précisément dans les articles 68 jusqu’à
207. Suivant ce titre, les institutions de la république sont : « le Président de la
République, le Parlement, le Gouvernement et les Cours et Tribunaux »36. C’est
entre ces quatre institutions de l’Etat que la séparation des pouvoirs doit être
établie pour éviter le hiatus dans la gestion des affaires de la République. Le
pouvoir exécutif est exercé par le Président de la République et le Gouvernement.
C’est un exécutif bicéphale ; c’est-à-dire qu’il est constitué du Président de la
République et du Premier Ministre, chef du gouvernement (article 79 et 91). Ce
pouvoir a la charge de la gestion quotidienne de l’Etat.
Le pouvoir législatif est exercé par un Parlement bicaméral : « Le
pouvoir législatif est exercé par un Parlement composé de deux chambres :
l’Assemblée Nationale et le Sénat. Sans préjudice des autres dispositions de la
présente constitution, le Parlement vote les lois, il contrôle le Gouvernement, les
entreprises publiques ainsi que les établissements et les services publics »37. Le
député national, membre de l’Assemblée nationale, représente la nation, alors
que le sénateur représente sa province (article 101n al 3 et 104, al 2).
35
DUVERGER M., Les partis politiques, Paris, Armand-Colin, 1973, p.2. 36
Constitution de la RDC du 18 février 2006 telle que modifiée a ce jour (art.68). 37
Idem, art.100.
15
Il y a des cas où l’Assemblée nationale et le Sénat doivent se réunir en
congrès ; il s’agit notamment des cas où il faut recevoir la constitution (article
119) , autoriser la proclamation par le président de la république de l’Etat
d’urgence ou de siège, autoriser au Président de la République la déclaration de la
guerre (article 119), écouter le discours du Président de la République sur l’état
de la nation une fois l’an conformément à l’article 77 de la présente constitution,
désigner 3 membres de la cour constitutionnelle parmi les 9 (article 119).
Cependant, dans le cadre de collaboration « le Gouvernement peut,
pour l’exécution urgente de son programme d’action, demander à l’Assemblée
nationale ou au Sénat l’autorisation de prendre, par ordonnance-loi, pendant un
délai limité et sur des matières déterminées des mesures qui sont normalement
du domaine de la loi »(art.129). On peut aussi retenir que l’initiative des lois
appartient concurremment au Gouvernement (projet de loi) et à chaque
parlementaire (proposition de loi) (article 130).
S’agissant des moyens d’information, de contrôle du Parlement, on peut
citer : la question orale ou écrite avec ou sans débat non suivi de vote, la question
d’actualité, l’interpellation, la mission d’enquête et d’audition par les
commissions. Ces moyens de contrôle sont exercés suivant le règlement intérieur
de chacune des chambres et peuvent conduire, le cas échéant, à la motion de
défiance ou de censure, conformément aux articles 146 et 147 de la constitution
en question (article 138).
Les lois votées n’auraient aucune importance si elles sont constamment
violées sans sanction. C’est pour que les choses ne se passent pas comme cela
qu’il existe un pouvoir judiciaire38.
Les cours et tribunaux résultent du pouvoir judiciaire. Ce pouvoir est
indépendant du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif. Il a pour mission de
trancher les litiges, de punir les manquements à la loi, de rendre justice. C’est
parce que le pouvoir judiciaire distribue la justice que la constitution le définit
comme « garant des libertés individuelles et des droits fondamentaux des
citoyens »39.
Selon le prescrit de l’article 151 de la constitution, la séparation du
pouvoir exécutif du judiciaire et la séparation du pouvoir législatif du judiciaire
est nette pour garantir l’indépendance de la justice : « le pouvoir exécutif ne peut
donner d’injonction au juge dans l’exercice de sa juridiction, ni statuer sur les
38
MINANI R., Guide de vulgarisation du projet de constitution, Kinshasa, CEPAS, 2005, p.39. 39
Constitution, o. c. (art.150).
16
différends, ni entraver le cours de la justice, ni s’opposer à l’exécution d’une
décision de justice. Le pouvoir législatif ne peut ni statuer sur des différends
juridictionnels, ni modifier une décision de justice, ni s’opposer à son exécution.
Toute loi dont l’objectif est manifestement de fournir une solution au procès en
cours est nulle et de nul effet ».
Le principe sacro-saint sur lequel se fonde le pouvoir judiciaire est
celui de l’indépendance du juge. En effet, on ne peut attendre aucune justice ni
même aucune application équitable de la loi si les juges manquent d’un minimum
vital ou sont téléguidés par ceux qui déterminent le pouvoir exécutif ou législatif.
C’est pourquoi la constitution dispose que « les juges ne sont soumis dans
l’exercice de leur fonction qu’à l’autorité de la loi » (article 150).
Les cours et tribunaux, civils et militaires, ainsi que les parquets qui y
sont attachés constituent les organes de justice de l’ordre judiciaire. Ils sont
coiffés par la cour de cassation en tant que juridiction compétente pour casser en
cas de violation de la loi, les arrêts et jugements rendus en dernier ressort. La
haute cour militaire qui est au sommet de la hiérarchie des juridictions militaires
perd sa compétence d’annulation au profit de la cour de cassation40.
A ce sujet, il existe un conflit terrible entre la cour de cassation et la
haute cour militaire. La constitution dit clairement que la cour de cassation
connait des pourvois en cassation émanant des juridictions militaires. Mais la loi
attribue ce pouvoir de cassation à la haute cour militaire. C’est une confusion
terrible que l’on ne peut expliquer dans un Etat qui se veut « Etat de droit ». Cette
haute cour militaire nous semble être une juridiction de trop, étant donné que les
cours militaires sont des juridictions de second degré.
1.3. La participation des citoyens à la gestion du pouvoir et le contrôle des
gouvernants
La participation est un « principe d’aménagement du fonctionnement
des institutions politiques et administratives (…) qui consiste à associer au
processus de prise des décisions les intéressés (citoyens) ou leurs
représentants »41. La constitution en vigueur dispose que « la souveraineté
nationale appartient au peuple qui l’exerce directement par voie de référendum
ou élection et indirectement par ses représentants » (article 5 al 1).
40
MINANI R., o. c. p.41. 41
GUILLIEN R., et alii, Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2012, p.361.
17
En effet, la nouvelle forme juridique de l’Etat, qu’est le régionalisme
politique appuyé par la décentralisation, permet de faire participer la population
à la gestion de l’Etat, à contrôler les gouvernants et à les sanctionner s’il échet. Le
rapprochement des administrés de l’administration favorise sans relâche la
participation des citoyens au pouvoir et à contrôler les représentants qu’ils se
sont choisis. Mabiala l’explique mieux quand il dit que la « bonne foi d’un
gouvernement à instaurer un Etat de droit démocratique se mesure désormais
non seulement par sa capacité de faire participer les citoyens aux décisions
politiques mais aussi par son habileté à rapprocher le plus possible
l’administration des administrés et ainsi donner une impulsion au
développement »42. Les articles 2, al 4 et 3 indiquent déjà cette décentralisation.
L’élection du président de la République, des députés nationaux et
provinciaux, des sénateurs et des dirigeants des entités territoriales
décentralisées contribue à la participation politique des citoyens et constitue un
moyen de sanction positive ou négative des dirigeants ; la population à la base
acquiert un sens élevé de responsabilité et d’initiative pour le développement
local.
Cependant, ce développement n’est possible que si la bonne
gouvernance dirige les actions des gouvernants. Cette bonne gouvernance ne va
pas sans contrôle organisé des gouvernants par les gouvernés à travers leurs
représentants. En RDC, le contrôle de la gestion des affaires publiques est avant
tout, une question constitutionnelle, ce qui lui confère tout son poids politique et
juridique. L’article 100 de la constitution du 18 février 2006 met un accent
particulier sur deux fonctions parlementaires : la fonction de législation et celle
de contrôle. Cette mission parlementaire est aussi valable pour les assemblées
provinciales, en vertu de l’article 197 qui dispose in fine que « …les dispositions
des articles 100, 101, 102, 103, 108 et 109 sont applicables, mutatis mutandis,
aux assemblées provinciales ».
Mr Wathum D., Mme Tabalo B, et Mr Lugoma A, ont écrit avec raison à ce
sujet que « la mission de contrôle est une des prérogatives constitutionnelles
reconnues à chacune des chambres parlementaires et assemblée provinciale en
vue de s’assurer de la bonne application des dispositions constitutionnelles,
légales et réglementaires, de manière à promouvoir la bonne gouvernance et
lutter contre l’impunité »43. On peut donc comprendre que l’objectif du contrôle
est la promotion de la transparence et l’efficacité dans la gestion de la chose
42
MABIALA P., et alii, « Pouvoir central et pouvoirs provinciaux et locaux » in Mandats, rôle et fonction des
pouvoirs constitués dans le nouveau système politique de la RDC, Kinshasa, PNUD, 2007, p.54. 43
WATHUM D., et alii, « Le député et sa fonction de contrôle », in Mandats, o. c, p.158.
18
publique ; de limiter les gaspillages des ressources publiques, de réunir des
données objectives pour toute sanction éventuelle, de favoriser le développement
économique et humain, et par conséquent, de contribuer au bien-être de la
population. Ce contrôle peut conduire à des sanctions politiques ou disciplinaires
qui n’empêchent pas l’administration des sanctions judiciaires.
Du reste, on peut retenir que « le contrôle est vecteur de bonne
gouvernance, celle-ci étant entendu comme le respect d’un certain nombre des
valeurs démocratiques et républicaines. De ces valeurs, nous citons notamment :
1) l’Etat de droit, c’est-à-dire le fait que nul ne peut se mettre au-dessus de la loi
et que tout manager public ou privé doit gérer, agir et se comporter
conformément aux lois et règles établies. 2) La responsabilité (…). 3) La bonne
gestion des ressources »44.
En définitive, le contrôle des pouvoirs publics et de la gestion des
affaires publiques nécessitent des contre-pouvoirs. L’Etat de droit est donc un
Etat dont la gestion est contrôlée par des contre-pouvoirs. Ceux-ci sont :
l’opposition parlementaire légale et loyale, l’opinion publique, s’exprimant dans
une presse libre, le syndicat, les confessions religieuses ou les églises, les
associations pour les droits de l’homme et les groupes de pression, les
organisations non gouvernementales de développement (ONGD).
En RDC, la constitution du 18 février 2006 reconnait l’opposition
politique (article 8), garantit la liberté d’expression (article 23) et celle de
manifestation (article 26). La même constitution garantit la liberté religieuse
(article 22), la liberté d’association (article 37), la liberté syndicale (article 38). A
propos de l’opposition Jean Marie Van Parys soutient que « cette opposition fait
une critique objective des décisions et des réalisations du gouvernement. Elle
exerce une pression légale et loyale sur le gouvernement pour que son action soit
conforme aux lois, et sa gestion efficace (…) l’opposition parlementaire doit avoir
pour but premier une bonne gestion de l’Etat, non le renversement d’un
gouvernement qui gérerait les affaires publiques de manière satisfaisante »45.
Cela suppose le respect de la loi par tous les citoyens, civils ou militaires.
1.4. La subordination de l’autorité militaire à l’autorité civile
La constitution de la RDC prévoit que l’armée est subordonnée au
gouvernement civil : « Les forces armées sont républicaines. Elles sont au service
de la nation toute entière. Nul ne peut sous peine de haute trahison les détenir à
44
Idem, pp.159-160. 45
J.M. PARYS (Van), L’Etat de droit. Espoir des opprimés, Kinshasa, Epiphanie, 1996, pp.25-27.
19
ses fins propres. Elles sont apolitiques et soumises à l’autorité civile »46. Déjà la
constitution de la transition disposait en son article 181 que « les forces armées
de la République Démocratique du Congo sont soumises à l’autorité civile… »
pour éviter que les militaires ne s’emparent du pouvoir par un coup d’Etat. Il en
est de même de la police nationale congolaise. Elle est aussi apolitique et
subordonnée à l’autorité civile : « la police nationale est apolitique. Elle est au
service de la nation congolaise. Nul ne peut la détourner à ses fins propres (…) la
police nationale est soumise à l’autorité civile locale et est placée sous la
responsabilité du ministre qui a les affaires intérieures dans ses attributions »47.
Force est de relever que l’armée de la RDC est directement issue des
mouvements armés. Elle se caractérise souvent par le manque d’organisation, de
moyens et par l’adoption du modèle de l’ancien colonisateur que l’on ne parvient
pas à bien maitriser. Souvent les forces armées prennent le parti du pouvoir en
place et sont utilisées non pas pour défendre l’intégrité du territoire national et
les frontières48, mais pour défendre à tout prix le pouvoir installé. La police quant
à elle, est non pas au service de la population (article 182) mais au service des
gouvernants contre la population. La misère des hommes en uniforme les conduit
parfois à des actes de barbarie que la justice nationale ne réprime que
difficilement.
Ngakoutou le démontre bien lorsqu’il écrit : «si la misère d’un citoyen
civil peut être un simple problème social, la misère d’un soldat en arme peut
dégénérer en un défi politique propre à mettre en danger non seulement la survie
du régime, mais également la paix et la stabilité de la société entière ; là réside
l’extrême danger de la clochardisation des forces armées. Que faire de ces armées
misérables, médiocres et incontrôlables, dans un environnement délétère ? »49.
Nous pouvons affirmer qu’un militaire armé, sans moyen de survie, constitue un
danger pour la population qu’il prétend protéger. S’il ne peut être mis à l’abri de
besoin, le militaire doit avoir le minimum vital pour qu’il donne le meilleur de
lui-même pour sa patrie.
En fait, la police congolaise a pour mission la protection des personnes
et de leurs biens : « la police nationale est chargée de la sécurité publique, de la
sécurité des personnes et de leurs biens, du maintien et du rétablissement de
l’ordre public ainsi que la protection rapprochée des hautes autorités» (article
182). La reprise des termes de l’article 185 indique à suffisance l’importance que
46
Constitution, op.cit., Art. 188. 47
Idem, Art. 183-184. 48
Idem, Art. 187. 49
NGAKOUTOU T., Les limites de la démocratie subsaharienne, Paris L’Harmattan, 2005, p.145.
20
l’on attache à la police nationale congolaise et aux forces armées de la R.D.C. ; la
qualification des policiers et des militaires doit dépendre des critères objectifs :
« les effectifs, à tous les niveaux, les fonctions de commandement en tout temps
et en toute circonstance doivent tenir compte des critères objectifs liés à la fois à
l’aptitude physique, à une instruction suffisante, à une moralité éprouvée ainsi
qu’à une représentation équitable des provinces ». La police nationale congolaise
doit selon la constitution exercer son action sur l’ensemble du territoire national
dans le respect de ladite constitution et des lois de la république dont l’irrespect
entraine la sanction (article 183, al 2).
Le contrôle de constitutionnalité des lois et des actes ayant force des lois
En principe c’est la notion de l’Etat de droit qui soutient la hiérarchie
des normes légales et réglementaires, ce qui a pour corollaire de faire contrôler
par la justice la conformité des règles et de sanctionner celles qui ne se
conforment pas. Ensuite, la constitution étant la norme supérieure, c’est la cour
constitutionnelle qui veille à son respect. De ce fait, « la haute juridiction est le
gendarme de l’Etat de droit »50.
Dans la plupart des Etats modernes, il existe des cours
constitutionnelles. Elles sont chargées du contrôle de la constitutionnalité des
conventions internationales, des lois et des actes ayant force des lois : « le juge
exerce un contrôle de la constitutionnalité ‘’externe’’ : il sanctionne le non respect
des procédures d’élaboration de la loi fixées par la constitution. Il exerce aussi un
contrôle de la constitutionnalité ‘’interne’’ : il sanctionne la violation des règles de
fond posées par la loi fondamentale »51. Ce contrôle peut être a priori ou a
posteriori.
Au total 13 articles de la constitution du 18 février 2006 traitent de la
cour constitutionnelle en RDC ; il s’agit des articles 157 à 169. Composée de 9
membres (article 158) la cour constitutionnelle est chargée du contrôle de la
constitutionnalité des lois et des actes ayant force des lois (article 160). Ce
contrôle sacralise la hiérarchie des normes et par conséquent la primauté de la
constitution. Les opposants au contrôle invoquent son caractère illégitime car la
loi est l’œuvre de l’assemblée élue et représentative, expression de la volonté
générale.
50
YABILI, M., Etat de droit : Les contrôles de constitutionnalité par la cour constitutionnelle, les cours et tribunaux en RDC, PUL, Lubumbashi, 2012, p.20. 51
DUVERGER M., Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, Armand Colin, 1973, p.78.
21
La justice constitutionnelle, bien que les juges ne soient pas élus,
bénéficie d’une véritable légitimité démocratique : « pour l’école positiviste, le
rôle du juge constitutionnel est compatible avec le principe démocratique car le
contrôle de constitutionnalité se fonde sur le droit positif créé par les
représentants de la nation. De même pour l’école du droit naturel (ou jus-
naturalis), ce contrôle est légitime car il oblige le législateur à respecter les droits
naturels et imprescriptibles de l’homme »52. Le contrôle de constitutionnalité est
une sanction juridique en cas de violation d’une constitution.
Ce mécanisme de la sanction juridique consiste à faire constater par un
organe approprié qu’un acte juridique édicté par une autorité publique a été pris
en violation de la constitution et est en conséquence dépourvu de toute force
juridique. « Dans la plupart des Etats un tel contrôle de constitutionnalité existe à
l’égard des règlements c’est-à-dire des actes de l’exécutif »53. Ces actes doivent
être conformes aux lois dont ils émanent et à la constitution qui est la loi
suprême. C’est cette conformité aux lois et à la constitution qui entraine leur
validité. Il n’y a pas des lois valides qui contredisent la constitution.
En RDC, la Cour constitutionnelle est la plus haute instance judiciaire
de la nation. C’est pourquoi « les arrêts de la cour constitutionnelle ne sont
susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires » (article 168 al
1). Cette cour chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois est également
habileté à juger le président de la république et le premier ministre notamment
pour haute trahison (violation intentionnelle de la constitution, des droits
humains ou cession d’une partie du territoire national), délit d’initié, corruption
enrichissement illicite…. (art.165).
52
BURDEAU G., Droit constitutionnel et institutions politiques, Paris, L.G.D.J., 1993, p.38. 53
CHANTEBOUT B., Droit constitutionnel, Paris, Montchrestien, 1985, p.18.
22
II. L’APPORT DE LA DECENTRALISATION DANS LA CONSOLIDATION DE
L’ETAT DE DROIT
Il convient de jeter un regard rétrospectif sur la décentralisation
congolaise (II.1) avant d’indiquer le lien qui existe entre la décentralisation et
l’Etat de droit (II.2) et d’établir le rapport entre la décentralisation et le
découpage territorial (II.3).
II.1. Bref aperçu historique de la décentralisation congolaise
La RDC n’est pas à sa première tentative de décentralisation. En 1982 il
y a eu la première tentative de décentralisation appelée décentralisation
Vunduawe. Mais cette initiative s’était soldée par un échec criant. Plusieurs
raisons ont été évoquées pour justifier l’organisation administrative de 1982. La
première a trait à la nécessité de rapprocher l’administration des administrés
pour éviter que le pays ne soit ingouvernable. La seconde est relative à la volonté
d’accorder une large autonomie aux provinces et aux ETD en tenant compte des
réalités de chaque région. L’on visait ainsi le développement économique de la
nation à partir de la base.
Ainsi, le Chef de l’Etat a dû assouplir les méthodes de sa gouvernance
par l’ordonnance-loi sur la décentralisation qui fut promulgué le 25 février 1982.
Elle accordée la personnalité juridique à la région, aux villes et aux zones
urbaines, aux zones rurales et aux collectivités c’est ainsi qu’une loi financière
sera promulguée en 1983. Elle visait à concrétiser l’autonomie financière des
entités administratives décentralisées conformément à l’article 186 de
l’ordonnance-loi n° 82/006 du 25 février 1982.
Toutefois il est important de signaler que cette décentralisation
connaitra des difficultés à telle enseigne que sa mise en œuvre deviendra
inefficace et ineffective. Cela est dû au cadre général d’émergence et
d’instauration de cette dernière.
En effet, la décentralisation de 1982 a baigné dans un système
dictatorial qui na pas favorisé sa mise en œuvre normale. L’on comprend sans
peine que dans un contexte non démocratique la décentralisation ne soit qu’une
illusion chimérique. En 1983, le Mouvement Populaire de la Révolution (MPR)
23
devient Parti-Etat sur base de la décision d’Etat n° 32/CC/83 du comité central,
prise le 01 avril 1983 et publiée au journal officiel n° 14 du 15 juillet 1983. Le
comité central se referait lui-même au troisième congrès ordinaire du MPR qui
s’était tenu à la N’Sele du 06 au 11 décembre 1982. De ce congrès on peut retenir
que le MPR devenait « unique institution de la république », « la nation Zaïroise
organisée politiquement », « Parti-Etat » et « l’unique source de pouvoir et de la
légitimité au Zaïre… ».
Face à ces innovations audacieuses, la décentralisation n’était pas prête
à être instaurée en RDC. Avec des dirigeants nommés comme auparavant et le
développement accru de la prédation des deniers publics, le peuple n’eut pas le
sentiment de changement de mode gestion. L’histoire de cette politique de
décentralisation était celle de son échec par défaut de réalisation des objectifs lui
assignés.
En 1998, M’ze Laurent Désiré Kabila initie une nouvelle
décentralisation qui a été étouffée par sa politique qui n’était rien d’autre que la
dictature comme celle de son prédécesseur, Joseph Désiré Mobutu. L’interdiction
des activités politiques dans des partis politiques à part celles de l’AFDL en est un
exemple significatif.
II.2. Lien entre décentralisation et Etat de droit
La décentralisation territoriale étant un apprentissage de la
démocratie à la base a des liens très étroits avec l’Etat de droit car ce dernier ne
peut exister que là où il y a un cadre démocratique établi. Les valeurs de l’Etat de
droit sont généralement celles que recouvre la décentralisation. De telle sorte que
lorsque la décentralisation est effective dans un Etat, elle ne peut que conduire à
l’instauration de l’Etat de droit.
II.2.1. L’incidence de la décentralisation
La décentralisation comme mode de gouvernance a ses principes et
valeurs qui concourent bien à la formation de l’Etat de droit. L’on dirait même
qu’elle est pour l’Etat de droit, ce que le sang est au corps humain.
A première vue « décentralisation » et « Etat de droit » sont
diamétralement opposés. Mais lorsqu’on analyse attentivement les deux l’on
comprend vite que l’Etat de droit ne peut exister que là où l’administration est
proche des administrés, les gouvernants sont élus par les gouvernés, les citoyens
participent à la gestion de la chose publique, les dirigeants sont redevables
24
auprès des citoyens, la bonne gouvernance est de mise et la loi est au dessus de
tout le monde sans distinction. Bref, la décentralisation présage l’Etat de droit. On
peut le retenir, l’Etat de droit sans décentralisation n’est qu’un leurre.
Aujourd’hui dans la plupart des Etats modernes, la centralisation ou la
concentration du pouvoir de l’Etat est devenue impopulaire et inadaptée. La
décentralisation et la bonne gouvernance sont considérées comme des nouveaux
paradigmes pouvant faciliter le développement et l’instauration de l’Etat de droit.
Pamphile Mabiala et Richard Dion l’expriment bien lorsqu’ils soutiennent que « la
bonne foi d’un gouvernement à instaurer un Etat de droit démocratique se
mesure désormais non seulement par sa capacité de faire participer les citoyens
aux décisions politiques mais aussi par son habileté à rapprocher le plus possible
l’administration des administrés et ainsi donner une impulsion au
développement54.
Voilà qui démontre bien l’impact de la décentralisation sur l’Etat de
droit. Mais pour mieux appréhender cette incidence il convient de savoir que la
décentralisation répond à des besoins fondamentaux pour l’émergence d’un Etat
de droit. Toute forme de gestion des affaires publiques a le pouvoir de mettre en
place des instruments juridiques (normes et procédures) en vue d’assurer une
distribution optimale des ressources et richesses disponibles. Ainsi, on reconnait
à la décentralisation ce pouvoir de régulation des affaires publiques car elle a
pour vertu la gestion par des autorités plus proches au détriment des instances
centrales trop éloignées.
Cette aptitude à la régulation renvoie à trois aspects ou critères, à
savoir : l’efficacité, l’efficience et la responsabilité. Cela signifie qu’en matière de
compétences, l’aptitude consiste à réguler les affaires publiques de manière
efficace. En matière de financement, l’aptitude réside dans l’utilisation efficiente
(à moindre coût) des ressources disponibles. Pour les postes d’autorité, l’aptitude
consiste dans la responsabilisation des régulateurs par rapport à la base
organisationnelle55.
Comme on peut aussi le constater les huit principes qui constituent le
fondement de la décentralisation peuvent aussi être considérés comme le
soubassement de l’Etat de droit. Il s’agit de : subsidiarité, autonomie, efficacité,
proximité, valorisation, participation, supériorité et solidarité.
54
MABIALA P. et DION R., « Pouvoir central et pouvoirs provinciaux et locaux », in Mandats, Rôles et fonctions des pouvoirs constitués dans le nouveau système politique de la RDC, Module de formation, PNUD, Kinshasa, 2007 p.60. 55
Idem, p.61.
25
La subsidiarité suppose que les affaires publiques sont gérées par les
entités plus proches et que la régulation ne sera confiée à des entités éloignées
qu’en cas d’incapacité ou d’insuffisance avérée des entités plus proches. C’est
pour favoriser une administration de proximité et efficiente. Ce principe marche
de pair avec celui de l’autonomie qui préconise l’acquisition et la maîtrise des
moyens financiers suffisants pour assurer ses fonctions. Il s’agit là de l’autonomie
fiscale et de l’autonomie politique qui ne sont pas à confondre avec
l’Independence. Malgré le pouvoir de s’auto-organiser, s’auto-administrer elle-
même l’entité territoriale décentralisée est soumise au contrôle de tutelle : la
tutelle administrative sur les organes et sur les actes. L’autonomie d’une entité
décentralisée se remarque non seulement dans l’élection des dirigeants des
organes mais aussi par l’acquisition et la maîtrise des moyens financiers. Ainsi on
peut dire que la décentralisation territoriale a pour corollaire la décentralisation
financière.
Le principe d’efficacité va de pair avec celui de proximité. Les ETD sont
en principe plus proches des citoyens et peuvent être plus aptes à mener une
politique de développement plus conforme aux réalités locales en réduisant la
distance et en tenant compte des particularités de chaque population dans son
milieu de vie. L’efficacité et l’administration concourent à l’amélioration des
conditions de vie de la population en rendant plus accessibles les services publics.
La décentralisation valorise les fonctions des responsables locaux en
vue d’une gestion efficace et capable de mobiliser des moyens pour le progrès de
leurs entités. Ce qui suppose une participation des citoyens à la gestion de leur
collectivité par le choix des dirigeants compétents et moralement éprouvés. Ce
qui permet aux citoyens d’avoir un sens élevé de responsabilité et de prendre des
initiatives pour leur développement local.
Dans la centralisation comme dans la décentralisation il y a toujours
une instance qui contrôle les décisions. Généralement, dans un système
décentralisé les autorités centrales ont tendance à recourir plus au principe de
supériorité qu’au principe de subsidiarité. Souvent, c’est le contrôle de tutelle
exercé sur les actes du pouvoir local qui indique cette supériorité.
Le dernier principe, celui de solidarité veut que tous les citoyens
jouissent des richesses nationales. La solidarité est nécessaire malgré l’autonomie
afin d’éviter des inégalités ou des disparités dans le processus de développement
des entités locales. D’où la nécessité des mécanismes de péréquation 56.
56
MABIALA P. et DION R., op.cit., pp.59-61.
26
Il s’agit là des principes, combinés à la bonne gouvernance et à la
protection des droits de l’homme qui ne sont pas en contradiction avec l’Etat de
droit. Ils contribuent plutôt à son épanouissement dans un cadre où la démocratie
s’applique à la base. La bonne gouvernance « relève d’une pratique synchronique
politico-administrative »57. Ainsi, les quatre valeurs qui conditionnent la bonne
gouvernance en Afrique telles que proposées par la banque mondiale sont : la
gestion saine du service public, la responsabilisation des gouvernants, le cadre
légal de développement et l’Etat de droit, l’information ouverte.
Entant que telle la bonne gouvernance procède de la certitude dans la
définition des objectifs, la mobilisation de ressources, leur affectation aux
opérations découlant des objectifs selon les procédures et standards préétablis, et
un contrôle pour s’assurer de la conformité aux normes. Elle procède aussi de la
prise en compte des aspirations, des besoins des citoyens pour ne pas priver ces
derniers des possibilités de leur floraison totale.
En plus, il sied de constater que la démocratie marche de pair avec
l’Etat de droit. La décentralisation comme démocratie appliquée au niveau des
entités infra étatiques se définit comme le régime qui se fonde sur l’égalité entre
les personnes. Pour soutenir cet argument Chevalier pense que « le pouvoir ne
peut user que des moyens autorisés par l’ordre juridique en vigueur, tandis que
des individus disposent des voies de recours juridictionnelles contre les abus
qu’il est susceptible de commettre »58. L’on peut donc affirmer que la
décentralisation contribue au renforcement de la démocratie dans un Etat de
droit car elle offre à ce dernier l’adhésion du peuple à ses vertus et lui donne la
légitimité populaire.
II.2.2. Le renforcement de la démocratie
Les Etats modernes aspirent à être des Etats démocratiques. Mais
comment y parvenir ? Les techniques de gouvernance utilisées dans des Etats
autoritaires ou de police ne peuvent les conduire à la concrétisation de leur rêve.
Il s’agit de la centralisation, concentration (ou déconcentration) qui sont des
procédés utilisés dans la dictature. Par contre, la décentralisation paraît
aujourd’hui être la recette magique qui convient le mieux à la démocratie
comprise comme un système politique, forme de gouvernement dans lequel la
souveraineté appartient au peuple.
57
TSHIKOJI, Sylvain, De la bonne gouvernance. Appel à un nouvel ordre éthique du pouvoir en Afrique noire, Cerdaf, Kinshasa, sd., p. 32. 58
CHEVALIER, J, L’Etat de droit, Ed. Montchrestien, Paris, 2003, p. 14.
27
La décentralisation suppose la démocratie parce que les principes de
base de cette dernière s’appliquent bien lorsque les citoyens, à la base sont
considérés comme acteurs et bénéficiaires de leurs progrès. Il est question du
principe libéral par lequel l’individu est protégé contre l’arbitraire et l’emprise de
l’Etat. Et du principe démocratique par lequel la souveraineté populaire est
affirmée dans la société59. C’est ce que David Held résume en théories « légales » ;
équivalent au principe libéral et théories « participatives », ce qui équivaut au
principe démocratique60.
L’effectivité du principe libéral dans la vie nationale se manifeste au
travers du constitutionnalisme et de l’Etat de droit, de la séparation des pouvoirs
et de la garantie des droits civiques. Les droits individuels et les libertés,
publiques se doivent également d’être des garanties pour la bonne marche de la
démocratie. Cela signifie que l’opinion doit se former et se modifier sans
contrainte. Ainsi, la mesure du caractère libéral d’un régime démocratique est le
sort réservé à l’opposition.
Pour ce qui est du principe démocratique il s’agit de la reconnaissance
du suffrage universel, de la responsabilité du gouvernement devant le parlement
et du libre choix des gouvernants politiques. Ici, c’est le peuple qui est la source
du pouvoir et le pouvoir repose sur le consentement du peuple. Les élections
libres et transparentes constituent un critère déterminant du régime
démocratique. Cela suppose qu’on évite toutes dérives oligarchiques : la fraude,
l’achat de conscience, le tribalisme, la corruption, …61
De ce point de vue, la décentralisation reste une tâche, une quête et
reconquête. Elle n’est jamais un idéal acquis au préalable et n’est même pas un
acquis perpétuel ; elle exige engagement, sacrifice et persévérance.
On le voit donc, la démocratie et la bonne gouvernance permettent,
selon Sylvain Tshikoji, l’auto-administration, l’autogouvernement des peuples ;
mais aussi elles permettent l’exécution des décisions socioculturelles,
économiques et politiques, et la réalisation des projets de développement : les
citoyens qui les exécuteront et qui en subiront les retombées, ayant contribués
par un débat démocratique à leur élaboration, pourront contribuer à leur
application avec un peu plus de conscience. On peut même dire que, la
décentralisation, la démocratie et la bonne gouvernance permettent aux citoyens
de penser avec les gouvernants au lieu de laisser ceux–ci penser pour eux et
59
AKOUN et alii, Dictionnaire de politique, Paris, Larousse, 1979, p. 100. 60
David HELD, Models of Democracy, Cambridge, Polity press, 1987, p. 82. 61
CENCO, Manuel de référence d’éducation civique et électorale, Tome I, Module I à IV, Ed Secrétariat Général, Kinshasa, 2004, p. 90.
28
parfois contre eux. La libre discussion des problèmes de développement par un
grand nombre peut amener à leur meilleure intelligence62.
L’on comprend sans peine que pour asseoir la démocratie il faut la
décentralisation. Au lieu que les décisions politiques soient prises d’en haut par
un petit groupe, ils doivent connaître la participation des peuples destinataires
afin que ceux-ci les acceptent et les appliquent spontanément et
consciencieusement. Cela exige que chaque citoyen, chaque peuple se donne à
l’exercice permanent de l’œuvre politique, la participation effective et efficace à la
gestion politique de la cité.
C’est donc un renforcement de la démocratie lorsque le peuple apprend
à partir de sa collectivité de base à participer à sa gestion, à réfléchir et à
proposer des solutions pour la floraison de son milieu ambiant.
Toutefois, en RD Congo, la décentralisation territoriale préconisée par
la constitution actuelle et les différents textes légaux et réglementaires risque de
demeurer une simple théorie si l’on n’y prend garde. C’est avec raison que nous
pensons que « la décentralisation congolaise a atteint un pas de géant sur le plan
théorique c’est-à-dire législatif et réglementaire. Mais la concrétisation de cette
dernière tarde à venir car les vraies questions demeurent et deviennent de plus en
plus nombreuses … D’où la nécessité de s’en tenir aux réalités de terrain en se
soustrayant aux cris des sirènes des technocrates et experts en décentralisation
drapés dans leurs subtils mentaux des conseillers techniques ».63.
Parmi les multiples problèmes qui minent la décentralisation
territoriale en RD Congo, vient s’ajouter celui du découpage territorial prévu à
l’article 2 de la constitution du 18 Février 2006 telle que modifiée le 20 Janvier
2011.
II.3. La décentralisation et le découpage territorial
La décentralisation se singularise par l’existence des affaires locales
(matières directement liées aux intérêts locaux), l’indépendance des autorités
décentralisées vis-à-vis du pouvoir central et l’autonomie de gestion
(personnalité juridique). Alors que le découpage territorial est le fait de
subdiviser une région en plusieurs ou des collectivités en plusieurs autres
collectivités.
62
TSHIKOJI, op. Cit, p,43. 63
MULENGA, M., « La décentralisation territoriale : clé pour la reconstruction de la RD Congo », in Revue de l’U.KA, Vol. 2, N° 3 (Mai 2014), pp. 98-100.
29
Dans le cas de la RD Congo, le découpage territorial voudrait que
certaines provinces soient subdivisées en plusieurs pour favoriser la
décentralisation ou rapprocher l’administration des administrés. Mais la question
qui se pose est celle de savoir si dans le contexte actuel de notre pays il était
opportun d’appliquer l’article 4 de la constitution quand on sait que le processus
de décentralisation amorcé a encore du mal à s’enraciner et à produire des effets.
Est-ce une avancée ou un recul démocratique d’aller avec les deux à la fois ? N’est-
ce pas une manière de freiner l’avènement de l’Etat de droit auquel la population
congolaise aspire ?
II.3.1. Entre avancée et recul démocratique
La RD Congo se trouve confrontée au problème de choix de priorité.
D’où les atermoiements entre décentralisation et découpage territorial. Selon
l’article 2 de la constitution « La RD Congo est composée de la ville de Kinshasa et
de 25 Provinces dotées de la personnalité juridique. Ces provinces sont : Bas-Uélé,
Equateur, Haut-Lomami, Haut-Katanga, Haut-Uélé, Ituri, Kasaï, Kasaï Oriental
Kasaï Central, Kongo-Central, Kwango, Kwilu, Lomami, Lualaba, Maï-Ndombe,
Maniema, Mongala, Nord-Kivu, Nord-Ubangi, Sankuru, Sud-Kivu, Sud-Ubangi,
Tanganika, Tshopo et Tshuapa ».
Le constituant a pour ambition non seulement de rapprocher les
administrés des chefs-lieux provinciaux des décisions mais aussi de liquider les
tendances sécessionnistes de certaines provinces qui sont démantelées. Cette
répartition vise une augmentation du degré de protection des citoyens64.
Par ailleurs, dans son article 4, la constitution de la RD Congo dispose
que « De nouvelles provinces et entités territoriales peuvent être créées par
démembrement ou par regroupement dans les conditions fixées par la constitution
et la loi». La compréhension de cette disposition exige la combinaison de trois
éléments essentiels tels que le propose le professeur Vunduawe Te Pemako pour
créer ces entités territoriales :
- Le critère juridique ;
- Les mécanismes de découpage ;
- Les conditions de viabilité65.
64
MABIALA, P. et alii, Op. Cit., pp. 68-69.
65 VUNDUAWE Te PEMAKO, « Réflexions sur le régionalisme politique ou la nouvelle décentralisation
territoriale » in Mandats, Rôle et fonctions … p. 99.
30
Le critère juridique suppose que seul le pouvoir constituant est
compétent pour créer de nouvelles provinces et que les entités territoriales
décentralisées ne peuvent être créées que par le pouvoir législatif, agissant par
voie des lois ordinaires.
Le découpage territorial est un procédé administratif qui consiste à
créer de nouvelles provinces ou de nouvelles entités territoriales décentralisées
soit par démembrement, soit par regroupement par l’autorité compétente prévue
par la constitution.
Le démembrement est une technique ou mieux une opération
administrative consistant à créer de nouvelles provinces ou des entités
territoriales par dissociation en augmentant ou multipliant leur nombre.
En revanche, le regroupement procède d’une opération administrative
contraire. C’est une technique administrative de découpage consistant à créer de
nouvelles provinces ou nouvelles entités territoriales par association en
réduisant leur nombre.
Pour être viables, les nouvelles provinces doivent remplir certaines
conditions qui avaient été retenues lors du découpage territorial de l’ancienne
province du Kivu en 1988. Ce découpage a donné naissance aux nouvelles
provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du Maniema. Ces conditions cumulatives
sont au nombre de trois :
- Condition géographique, c’est-à-dire l’étendue raisonnable du territoire ;
- Condition démographique, c’est-à-dire 500 000 habitants au moins ;
- Condition économique, c’est-à-dire autonomie ou capacité de gestion des
ressources économiques, humaines, financières et techniques66.
Mais la question lancinante est celle de l’opportunité ou du moment
choisi pour appliquer ce découpage. A ce sujet les avis des observateurs du
processus de décentralisation en RD Congo sont partagés. On assiste à deux
camps opposés : l’un soutenant la décentralisation et le découpage immédiat,
l’autre soutenant que le moment ne s’y prête pas et qu’il n’ya pas d’urgence à le
faire dans la précipitation comme c’est le cas.
Toutefois, il faut reconnaitre que ce débat laisse couler beaucoup
d’encre et de salive et peut-être pas encore le sang67.
66 VUNDUAWE te PEMAKO, Op. Cit., p. 100.
31
Lorsqu’on sait que le pays traverse une période préélectorale troublée
et mouvementée, il est de bonne intelligence prudent de ne pas s’engager sur la
voie du découpage qui jusqu’en ce jour est venu multiplier les difficultés que la
RD Congo connait dans son ensemble.
Ce n’est pas parce que la constitution a prévu telle ou telle disposition
qu’elle doit être appliquée sans tenir compte des circonstances et des temps.
Pourquoi jusqu’au jour d’aujourd’hui l’article 175 alinéa 2 au sujet de la retenue à
la source de 40% des recettes à caractère national n’est pas appliqué ?
Il sied de constater que depuis le 30 Janvier 2009 une pétition contre le
découpage du Katanga fut initiée et signée par plus de 150 000 personnes. Cela
pour dénoncer le plan machiavélique de ceux qui veulent s’éterniser au pouvoir
sans aucun souci de l’intérêt général. Ils passent tout leur temps à monter des
stratégies pour aller au-delà du mandat leur accordé par le peuple.
Au fait, le découpage n’est pas une mauvaise chose pour un Etat aussi
vaste que la RD Congo. Mais il faut savoir quand le faire et comment le faire. Si
pour l’ancienne province du Kivu on a pris du temps pour le faire, pourquoi ne
pas y aller expérimentalement province par province ? Cela nous évitera des
déboires que nous connaissons aujourd’hui avec des provinces sans
gouvernement provincial mais fonctionnant avec une assemblée provinciale qui
n’a rien à faire ? Tantôt il faut nommer les ¨commissaires spéciaux¨ à la tête de ces
nouvelles provinces selon la Cour Constitutionnelle alors que cela n’a aucune base
légale, tantôt il faut laisser les anciens gouverneurs des provinces démembrées
continuer à expédier les affaires courantes jusqu’à l’organisation des élections.
Et comme les commissaires spéciaux sont nommés à la tête de ces
provinces quel type de rapport s’établira entre eux et les assemblées
provinciales ? Ils seront des petits potentats car ils n’auront pas de compte à
rendre aux assemblées provinciales parce qu’elles ne les ont pas élu, mais plutôt
au chef qui les a nommé. L’on peut donc se demander si cette façon d’organiser le
pouvoir de l’Etat au niveau provincial peut nous conduire à l’émergence d’un Etat
de droit.
Le découpage se défend d’être avant tout, une réforme administrative.
Mais une province est bien davantage qu’un rouage administratif. Elle est un
cadre de vie collective confusément accepté, un creuset des valeurs partagées,
une entité soudée par un minimum de vouloir vivre ensemble. Le souci légitime
67
Yav KATSHUNG Joseph, « la ¨décentralisation –découpage¨ en RD Congo : Une tour de Babel ? » (Http//:www.controlecitoyen.com).
32
de rapprocher l’administré de son administration qui est évoqué à titre de
justification ne peut donc, à lui seul, fonder et orienter la création des provinces.
D’où notre souci de suggérer aux décideurs de se concentrer sur la
décentralisation territoriale et de retirer tous les textes légaux relatifs au
découpage avant d’être surpris par des conséquences dommageables de ce choix,
avant de regretter d’avoir engagé une réforme risquée, du temps perdu, des
ressources gaspillées et des occasions manquées de bâtir la paix et le progrès68.
II.3.2. Les contraintes et difficultés de mise en œuvre
La concrétisation de la décentralisation en RD Congo fait face à
plusieurs contraintes qui méritent d’être analysées pour qu’on y prenne garde. Il
s’agit notamment de la voracité du pouvoir central, la mentalité attentiste à
l’égard du pouvoir central, la gestion ethnique du pouvoir, l’incivisme fiscal, du
manque d’adhésion de la population, du manque du personnel qualifié, … Dans le
cadre du découpage, les défis à relever sont légion. Retenons-en quelques uns : la
résurgence du reflex identitaire, l’hypothèque sur la paix dans le pays, la
recrudescence de la sensibilité aux inégalités, la fragmentation de l’espace
économique, l’exigüité des provinces comme espace de développement.
1° La voracité du pouvoir central
La décentralisation exige, pour sa matérialisation, le transfert des
compétences du pouvoir central au niveau provincial et local. D’où la nécessité de
veiller à cela pour que la répartition des compétences soit scrupuleusement
respectée telle que prévue par la constitution. « Un pouvoir politique trop
préoccupé par sa survie politique risque de faire trainer le processus de
décentralisation, en le considérant comme un obstacle à la jouissance de la
plénitude du pouvoir »69. Ainsi, le principe d’autonomie risque d’être
régulièrement violé lorsqu’on ne se base que sur le principe de supériorité et de
la tutelle administrative. Ça sera de la voracité pure et simple du pouvoir central.
2° L’attentisme des pouvoirs provincial et local
Après avoir évolué pendant plus d’un quart de siècles dans la
centralisation et la déconcentration, il sera difficile aux autorités provinciales et
68
KABEYA TSHIKUKU, « Découpage politico-administratif et avenir socio-économique du Kasaï » in Colloque organisé par le CEREHISA consacré à l’examen de l’histoire et du destin des peuples, Inédit.
69 MABIALA, P. et alii, Op. Cit, p. 63.
33
locales de se retrouver dans ce nouveau paradigme qui prévoit « le retour du
pouvoir au terroir »70.
La mentalité attentiste et paternaliste qui les caractérise ne peut pas
aider le pays à sortir du carcan de sa misère. Plus ancrés dans les pratiques de la
déconcentration où les autorités du niveau inférieur sont réduites à des simples
exécutants des décisions qui viennent d’en haut, les dirigeants locaux et
provinciaux risquent de jouer le rôle qui n’est pas le leur. Dans cette phase
d’opérationnalisation de la décentralisation, ils doivent être créatifs et prendre
des décisions, selon les lois du pays, qui permettent le développement de leurs
entités.
3° Le manque d’adhésion de la population au processus
Si la population n’adhère pas au processus ou si elle le considère
comme un nouveau mécanisme orchestré par l’élite pour se partager le pouvoir
politique, la décentralisation ne saurait se concrétiser.
Elle exige l’adhésion de tout le monde, la participation de tous pour son
effectivité. Il est donc nécessaire d’organiser les activités de sensibilisation, de
vulgarisation de ce processus afin qu’elle le comprenne et l’accepte. Son adhésion
est aussi liée à la prise des décisions qui favorisent l’intérêt général au niveau
provincial ou local.
4° La Gestion ethnique du pouvoir public
Les provinces ou les ETD congolaises ne sont pas habitées par une
population homogène, elles sont peuplées de différents groupes hétérogènes.
Maizs certains groupes ethniques ont une plus grande importance
démographique que d’autres. Si l’on ne se base que sur la loi de la majorité pour
accéder au pouvoir il faudra craindre la frustration des peuples minoritaires et la
tyrannie de la majorité qui prendra toujours le poste de responsabilité. Il est
donc nécessaire de prévoir le consensus et la représentativité de toutes les forces
sociales au sein des institutions provinciales et locales afin que la chose publique
soit gérée par tous.
70
COULLIBALY cité par BREHIMA KASSIBO, « la décentralisation au Mali : État de lieux » in l’Essor spécial, 2010, p. 5.
34
5° La culture de l’échec
La mentalité congolaise d’une manière générale est celle de s’opposer
à tout, de critiquer négativement ce que font les autres (les Gouvernants) sans
proposer les pistes des solutions. Les congolais se moquent, parfois même de
ceux qui veulent promouvoir le bien commun. On ne veut pas que ceux qui
gouvernent réussissent. On est plutôt heureux de les voir échouer au lieu de
contribuer avec des idées pour que la réussite soit totale : il y en a qui montent
des stratégies et qui tendent des pièges pour que l’action publique de l’intérêt
collectif échoue et que le peuple désavoue les gestionnaires ou les dirigeants.
Les spécialistes de ces pratiques d’intoxication de la population
devront se débarrasser de ce comportement qui ne profite qu’à eux-mêmes.
Il importe donc que le projet, les performances, les réalisations des
autorités provinciales et locales soient médiatisées et connues de la population
pour encourager ces dernières.
6° L’incivisme fiscal
Il n’y a pas de décentralisation sans argent. Les provinces et les ETD ont
à supporter un certain nombre des charges dont les dépenses de
fonctionnement, d’équipement et d’investissement. Elles doivent bénéficier des
prestations financières sous forme de collecte d’impôts et des taxes pour
supporter ces charges.
Cependant, le niveau de recouvrement des impôts et taxes demeurent
très bas dans l’ensemble du pays. D’ailleurs, la population congolaise n’aime pas
payer l’impôt. Elle le considère comme un poids car elle vit dans une pauvreté
criante. La population, habituée à l’incivisme fiscal et les percepteurs d’impôts à
la corruption (à la concussion) risquent de ne pas faciliter la tâche à
l’instauration de la décentralisation. La question est donc de savoir comment
transformer le mauvais payeur d’hier en bon contribuable de demain ? 71
71 MULENGA, M., « La Décentralisation territoriale : Clé pour la reconstruction de la RDC », in Revue de l’U.KA.
Vol. 2 n°3 (Mai 2014) p.100.
35
7° La résurgence du réflexe identitaire
L’Etat congolais est une mosaïque des peuples, langues et cultures.
Pour ne prendre que l’exemple de deux anciennes provinces du Kasai- occidental
et Kasai- oriental, le découpage risque de prendre une tournure plus
préoccupante, la langue « tshiluba » qui était le symbole d’unité des habitants de
ces deux provinces sera-t-il accepté dans les nouvelles provinces bien qu’il soit la
langue la plus répandue du kasai en plus du rôle de langue d’enseignement et de
culture?
Si l’on prend le cas de la province du Kasai où nous retrouvons les
territoires de Luebo (langue : tshiluba) , de Mueka (langues dominantes :
tshikuba et tshikete), d’Ilebo ( langue dominante :kikongo, tshishilele,tshiluba) de
dekese ( langue dominante : ndengese) et de tshilkapa (langues dominantes :
Tshiluba, tshokue et thimpende) . Dans un espace comme celui-là, il est difficile
de prévenir des conflits parce que les entités politiques vont entrer dans une
compétition sévère en faveur de la représentation de leurs terroirs, et pour la
prise en compte de leurs spécificités et de leurs aspirations. C’est un rêve de
conquête qui sera porté par tous. Ils désirent chacun devenir le pivot identitaire
et hégémonique ; ils désirent détenir l’essentiel du pouvoir, de distribuer postes
administratifs et prébendes économiques. C’est le rêve secret des élites
politiciennes de chaque coin. C’est un sérieux risque de dérapage dans un pays
aussi mal préparé mais également mal parti en cette matière de découpage. Que
dire? Cela relève du manque de volonté ou de l’insouciance politique? La RDC est
mal partie.
8° Une lourde hypothèse sur la paix civile sans forcément être menacée, la
paix risque d’être en recul dans plusieurs coins du pays.
Le droit reconnu à chaque citoyen d’établir son domicile dans la localité
de son choix risque d’être une coquille vide.
Lorsqu’on scrute l’histoire on peut se rendre compte des conflits à base
identitaire ; lutte entre Baluba et Bena lulua dans les années 1960 et l’épuration
ethnique au Katanga en 1992-1993. Mal compris, le découpage risque de
conduire à des palabres interminables surtout que les nouvelles provinces et les
ETD ont l’autonomie de gestion. Déjà des quolibets tels que « nous sommes des
originaires », des ayant droit et vous êtes des « venants » ou des résidants font
figurent partout. Des coups de gueules entre prétendus « originaires » et
« venants » sont de nature à conduire à une certaine instabilité et à des conflits
ouverts.
36
Le territoire national risque de se transformer en un vaste champ de
palabres, avec ça et là des déménagements, des fâcheries croisées et des vaines
gloires. La paix sociale promet de demeurer pour longtemps encore, parmi les
principales préoccupations. La mise en veilleuse des élections à tous les échelons,
le découpage territorial précipité, la convocation du dialogue national et la
révision sous-jacente de la constitution comme le souhaite le Président de la
République, Joseph Kabila sont des signes avant coureurs du plan machiavélique
générateur des conflits pour s’éterniser au pouvoir par les gouvernants actuels.
37
III. QUELQUES PERSPECTIVES
La RDC est un Etat souverain. Cette souveraineté est une et non
multiple malgré la décentralisation, le découpage territorial, le régionalisme
politique ou constitutionnel. Ce qui signifie que tous les pouvoirs remontent au
peuple dont la volonté souveraine trouve son fondement et son expression dans
la Constitution : « La souveraineté nationale appartient au peuple. Tout pouvoir
émane du peuple qui l’exerce directement par voie de référendum ou d’élections
et indirectement par voie de ses représentants. Aucune fraction du peuple ni
aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice ». (Article 5 de la Constitution).
L’on voit clairement que la nomination par le Chef de l’Etat le 29
octobre 2015 des « Commissaires spéciaux » et leurs adjoints dans les provinces
démembrées est une violation pure et simple de la constitution dans plusieurs de
ses dispositions (art 195 ; 198 et 220). Il est scandaleux de constater que les
principes de base sur lesquels s’appuie tout Etat démocratique en vue d’une
formation d’un Etat de droit sont foulés aux pieds par ceux qui ont la charge de
protéger la Constitution. Cela hypothèque même l’émergence d’un Etat de droit
parce que c’est un recul démocratique qui risque de nous conduire à la dérive
totalitaire ou à l’Etat de police connu pendant la deuxième république sous le
régime de Mobutu.
Voilà qui exige le respect des textes constitutionnels et légaux : le
respect de la lettre et de l’esprit des textes juridiques qui régissent la RDC
constitue le point de départ du processus de décentralisation dans l’objectif de
parvenir à un Etat de droit.
En plus, il est nécessaire de mettre en œuvre un nouveau système de
transfert financier. L’argent étant le nerf de la guerre, il est important de concilier
les impératifs d’équité et la sauvegarde des finances publiques72.
Concernant la rétrocession, le pouvoir central devra définir avec
précision l’assiette de ressources devant servir à la rétrocession, c’est-à-dire la
72
VUNDUAWE Te Pemako, op.cit., p.108.
38
liste limitative des recettes à caractère national faisant partie du champ de la
rétrocession. Le principe de la retenue à la source de 40% des recettes à caractère
national mobilisées par les provinces devra être appliqué afin de faciliter le
développement de province et des ETD.
En effet, la décentralisation territoriale bien conçu et bien appliqué
peut satisfaire les besoins du peuple et par conséquent favoriser la consolidation
de l’Etat de droit. En outre, l’autorité politique congolaise doit s’efforcer dans la
gestion quotidienne de ses responsabilités de maintenir allumer la flamme
patriotique, nationaliste et démocratique. Pour cala elle doit se vouloir toujours à
la fois rationnelle et raisonnable afin de conduire les hommes et les femmes à une
vie digne et sensée. Cela suppose la prévention des situations, heureuses ou
malheureuses, par l’anticipation car « gouverner c’est prévoir » dit-on.
De la sorte la tâche ultime des gouvernants devient donc la
construction d’une société où seront réunies les conditions de la satisfaction de
l’homme.
Mais cette société dont il s’agit de construire en RDC aujourd’hui
suppose la libération de l’homme congolais dans ses attitudes, ses mouvements et
ses rapports avec ses semblables qui dépendent encore de la violence et du
mépris. L’idéal de l’action politique devra dès lors être la suppression des
violences et des violations des droits pour établir le règne de la vraie liberté.
Donc, il ne s’agit pas seulement de résoudre les contradictions de la société mais
d’éduquer la population aux attitudes et aux comportements qui libèrent.
Il est important que l’élite congolaise s’occupe de certaines tâches
fondamentales pour espérer un jour vivre dans un Etat où le droit est au dessus
de tout le monde. Il s’agit de la mise sur pied d’un régime qui favorise la
participation des citoyens à la gestion de la chose publique. Les gouvernants
doivent prendre des décisions visant à promouvoir le développement intégral et
l’enseignement. L’élite clairvoyante doit amener par des critiques constructives,
d’autres élites politiques à réajuster leurs actions et à prendre des décisions qui
favorisent l’intérêt général.
Toutefois, il faut le redire, la construction d’un Etat décentralisé n’est
pas l’affaire de quelques individus- gouvernants soient-ils- mais l’affaire des
efforts conjugués en synergie par tous, sous l’impulsion des tenants du pouvoir
politique. Elle n’est pas l’apanage d’un camp politique ou d’un parti politique.
C’est dans ce sens que Brehima Kassibo, parlant de la décentralisation au Mali,
39
pense que « les partis politiques et les mass-médias doivent contribuer à
l’émergence d’une société civile éclairée, empreinte de civisme et du sens de
responsabilité : c’est une des conditions indispensables à la réussite d’une
décentralisation véritable, capable d’intégrer les marginaux et de les informer sur
leurs droits par rapport à leurs représentants »73.
Dès lors, la RDC étant un Etat post-conflit les citoyens seront
presqu’armés contre la résurgence des conflits identitaires qui guettent le
processus de décentralisation auquel on a associé le découpage des nouvelles
provinces. Une population informée suffisamment évitera de tomber dans les
erreurs du passé : les sécessions katangaises et kasaïennes initiées par des
leaders politiques de ces provinces à la recherche de leurs intérêts égoïstes, les
conflits tribaux, les épurations ethniques… La population devra donc apprendre à
vivre dans l’unité et non dans l’adversité malgré les diversités de langue, de
culture…
73
BREHIMA, K. « la décentralisation au Mali : Etat de lieux », in Essor spécial, 2010, p.7.
40
CONCLUSION
La formation de l’Etat de droit en RDC est une tâche de longue haleine
car elle exige clairvoyance et rationalité de la part de tous ceux qui sont impliqués
dans le processus. Aujourd’hui, la décentralisation territoriale paraît la voie
obligée par laquelle il faut nécessairement passer pour y parvenir. Les Etats
avancés du monde, qu’ils soient unitaires ou fédéraux, appliquent la
décentralisation à cause de ses vertus qui favorisent la participation de la
population à la gestion de la chose publique et la bonne gouvernance en vue du
développement à partir de la base.
La décentralisation peut donc contribuer à la construction de l’Etat de
droit et a toutes les chances de réussir si trois conditions sont réunies comme
l’exprime le professeur Vunduawe : « d’abord, une bonne gestion des hommes
c’est-à-dire leurs ambitions légitimes et leurs mentalités par des sanctions
positives et négatives ; ensuite une bonne organisation des structures
rationnelles et efficaces ; et enfin une bonne gestion des ressources matérielles et
surtout financières »74.
Il ne nous reste qu’à signaler qu’un Etat à la taille d’un continent
comme la république Démocratique du Congo doit dépasser le cap d’essai des
modes de gouvernance de l’Etat comme c’est le cas aujourd’hui. La
décentralisation tant prônée reste sur papier et a du mal à prendre de l’envol et à
se concrétiser dans cet Etat qui du reste connait des sérieux problèmes de
gouvernance dans plusieurs collectivités où l’autorité de l’Etat est absente. C’est
pourquoi nous pensons qu’il est nécessaire de renfoncer l’autorité de l’Etat
partout en adoptant le fédéralisme comme forme de l’Etat si l’on veut qu’il soit
bien gouverné.
Le processus de la décentralisation couplé au découpage territorial est
en passe de se concrétiser en RDC lorsqu’on analyse attentivement les actes posés
par les dirigeants. Les pouvoirs accordés aux provinces sont réduits de fond en
comble : la nomination des « commissaires spéciaux » nous rappelle encore la
période de la deuxième république où le pouvoir central était le seul à détenir la
personnalité juridique. Ces commissaires qui ne sont que des délégués du pouvoir
central n’auront pas à travailler pour satisfaire les intérêts du peuple mais plutôt
74
VUNDUAWE te Pemako, Op. Cit. p.110.
41
ceux de leurs chefs hiérarchiques. Ainsi, la décentralisation cède le pas à la
déconcentration. L’on attendra encore longtemps pour que la démocratie et l’Etat
de droit se matérialisent en RDC.
BIBLIOGRAPHIE
I. Textes juridiques
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4. La loi organique n° 08/015 du 07 octobre 2008 portant modalités
d’organisation et de fonctionnement de la conférence des Gouverneurs ;
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organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et
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43
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3. Yav KATSHUNG Joseph, « la ¨décentralisation –découpage¨ en RD
Congo : Une tour de Babel ? » (Http//:www.controlecitoyen.com).
44
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION 1
I. COMPREHENSION DE LA DECENTRALISATION ET DE L’ETAT DE DROIT.. 3
I.1. La décentralisation........................................................................................................................ 3
I.1.1. différentes acceptions .............................................................................................................. 3
I.1.2. Principes fondamentaux ......................................................................................................... 6
I.2. L’Etat de Droit................................................................................................................................10
I.2.1 La sémantique de l’Etat de Droit ........................................................................................10
I.2.2 Principes de base.......................................................................................................................13
1.1. Le pluralisme politique dans un cadre démocratique ...................................................13
1.2. La séparation des pouvoirs.......................................................................................................14
1.3. La participation des citoyens à la gestion du pouvoir et le contrôle des
gouvernants ............................................................................................................................................16
1.4. La subordination de l’autorité militaire à l’autorité civile ..........................................18
Le contrôle de constitutionnalité des lois et des actes ayant force des lois...................20
II. L’APPORT DE LA DECENTRALISATION DANS LA CONSOLIDATION DE L’ETAT
DE DROIT ................................................................................................................................................22
II.1. Bref aperçu historique de la décentralisation congolaise........................................22
II.2. Lien entre décentralisation et Etat de droit ...................................................................23
II.2.1. L’incidence de la décentralisation...................................................................................23
II.2.2. Le renforcement de la démocratie..................................................................................26
II.3. La décentralisation et le découpage territorial.............................................................28
II.3.1. Entre avancée et recul démocratique............................................................................29
II.3.2. Les contraintes et difficultés de mise en œuvre .......................................................32
1° La voracité du pouvoir central.................................................................................................32
2° L’attentisme des pouvoirs provincial et local ...................................................................32
3° Le manque d’adhésion de la population au processus ................................................33
4° La Gestion ethnique du pouvoir public................................................................................33
5° La culture de l’échec .....................................................................................................................34
6° L’incivisme fiscal ............................................................................................................................34
45
7° La résurgence du réflexe identitaire .....................................................................................35
8° Une lourde hypothèse sur la paix civile sans forcément être menacée, la paix
risque d’être en recul dans plusieurs coins du pays............................................................35
III. QUELQUES PERSPECTIVES ..............................................................................................37
CONCLUSION .........................................................................................................................................40
BIBLIOGRAPHIE...................................................................................................................................41
TABLE DES MATIERES......................................................................................................................44