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Promotion 2011 Année 2 Enseignement diversifié 1 PHY431 Principes variationnels et Mécanique analytique Édition 2012 Christoph Kopper

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promotion 2011Année 2

Enseignement diversifié 1pHY431

Principes variationnelset

Mécanique analytique

Édition 2012

Christoph Kopper

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Table des matières

Préface 2012 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3

0 Avant-propos 51 L’esthétique et la physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52 La métaphysique et la science . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 Les nombres, la musique et la physique quantique . . . . . . . 84 La philosophie des lumières et le principe du meilleur . . . . . 135 Le principe de Fermat et ses conséquences . . . . . . . . . . . 146 Les principes variationnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 La période moderne, de Lagrange à Einstein et à Feynman . . 19

1 Principes variationnels 291 Principe de Fermat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31

1.1 Réfraction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 311.2 Rayons courbes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 351.3 Mirages . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

2 Principe de Maupertuis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 403 Principe de moindre action . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 42

2 Mécanique analytique et calcul variationnel 451 Le calcul variationnel d’Euler et Lagrange . . . . . . . . . . . 462 Le lagrangien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 483 Invariances et lois de conservation . . . . . . . . . . . . . . . . 51

3.1 Moments conjugués, impulsions généralisées . . . . . . 523.2 Changement de coordonnées, variables cycliques. . . . . 523.3 Energie et translation dans le temps . . . . . . . . . . . 533.4 Impulsion et translations dans l’espace . . . . . . . . . 543.5 Moment cinétique et rotations . . . . . . . . . . . . . . 543.6 Symétries dynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55

4 Multiplicateurs de Lagrange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 565 Exemples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58

5.1 Rayons courbes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 585.2 Forme d’une corde pesante . . . . . . . . . . . . . . . . 595.3 Lois de Kirchhoff . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 625.4 Potentiel électrostatique . . . . . . . . . . . . . . . . . 635.5 Bulles de savon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

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Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

3 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme 711 Lagrangien d’une particule relativiste . . . . . . . . . . . . . 74

1.1 Particule libre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 741.2 Impulsion et énergie d’une particule libre . . . . . . . . 751.3 Particule chargée dans un champ électromagnétique . . 76

2 Théorie lagrangienne des champs . . . . . . . . . . . . . . . . 812.1 Corde vibrante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 822.2 Equations d’Euler-Lagrange généralisées . . . . . . . . 842.3 Champ électromagnétique . . . . . . . . . . . . . . . . 86

Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

4 Formalisme canonique de Hamilton 931 Equations canoniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 952 Crochets de Poisson ; Espace des phases . . . . . . . . . . . . . 98

2.1 Evolution temporelle, constantes du mouvement . . . . 992.2 Transformations canoniques . . . . . . . . . . . . . . . 1002.3 Théorème de Liouville . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1042.4 Flot hamiltonien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1062.5 Mécanique analytique et mécanique quantique . . . . . 106

3 Systèmes dynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1073.1 Poincaré et le chaos dans le système solaire . . . . . . . 1083.2 L’effet aile de papillon ; l’attracteur de Lorenz . . . . . 110

4 L’action et l’équation de Hamilton-Jacobi . . . . . . . . . . . . 1134.1 L’action comme fonction des coordonnées et du temps . 1134.2 Equation de Hamilton-Jacobi . . . . . . . . . . . . . . 1154.3 Limite géométrique de l’optique ondulatoire. . . . . . . 1204.4 Approximation semi-classique en mécanique quantique. 123

Exercices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 124

Solution des exercices 138

Bibliographie 163

Index 165

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Préface au Cours 2012

Les principes variationnels et la mécanique analytique sont enseignés à l’EcolePolytechnique depuis la réforme X 2000 dans le cadre du cours PHY 431.Parmi les neuf blocs de ce cours trois blocs ont été dédiés à ce sujet. Jean-Louis Basdevant, qui est le fondateur de cet enseignement à l’Ecole, les aenseignés trois fois de suite. Il a élaboré un cours original dont la dernièreversion écrite a paru aux éditions Vuibert [1].

Ce polycopié se base sur celui de Jean-Louis Basdevant, qui a mis à madisposition les sources de son manuscrit. Il a été réaménagé à plusieurs re-prises dans le but de le faire suivre les évolutions du cours enseigné. Nouscommençons par décrire les origines des principes variationnels et en donnerquelques exemples typiques et classiques. Ensuite nous passsons à la méca-nique analytique de Lagrange, qui nous sert de cadre pour l’analyse de sys-tèmes simples en mécanique des points, mais aussi pour la théorie du champélectromagnétique. Le dernier chapitre est dédié au formalisme canonique deHamilton, qui donne accès à une approche geométrique aux systèmes dyna-miques, là où les méthodes de solution explicites ont trouvé leurs limites.

Dans le cours de Jean-Louis Basdevant se trouvent en outre un exposésur la description de l’équilibre thermodynamique en physique statistique,un chapitre sur le mouvement dans un espace courbe avec applications enrelativité générale et illustrations en l’astrophysique, et un chapitre sur lesintégrales des chemins de Feynman. Nous espérons que cette première in-troduction donnera envie au lecteur de consulter l’œuvre plus complet «Leprincipe de moindre action et les principes variationnels en physique» deJean-Louis Basdevant. Dans ce but nous reproduisons ici son magnifiqueavant-propos, chef-d’œuvre dans son genre, même si c’est l’avant-propos dulivre [1] et non pas à ce cours.

C’est évidemment à Jean-Louis Basdevant que s’adressent mes profondsremerciements pour son soutien constant et indispensable dans la préparationde cet enseignement, qui restera dans les traces qu’il a dessinées. Je voudraiségalement remercier mes collègues Denis Bernard, Francis Bernardeau, AdelBilal, Cédric Deffayet, David Langlois, Roland Lehoucq, Marios Petropoulos,André Rougé, Jean-François Roussel, avec qui j’avais le privilège de pouvoirtravailler pour ce cours dans une atmosphère toujours amicale et fructueuse.Finalement je remercie Dorian Nogneng (X2010) pour une lecture attentivedu manuscrit qui a mené à quelques améliorations du texte.

Palaiseau, au mois d’octobre 2012 Christoph Kopper

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Avant-propos

Puisque les mystères nous dépassent,feignons d’en être les organisateurs.

Jean Cocteau

L’art est indissociable de la métaphysique et de la philosophie. Dans sesLeçons sur l’esthétique, en réponse à la question : « Quel besoin l’hommea-t-il de produire des œuvres d’art ? », Hegel dit que : « Le besoin générald’art est [...] le besoin rationnel qui pousse l’homme à prendre conscience dumonde intérieur et extérieur et à en faire un objet dans lequel il se reconnaisselui-même. »

0.1 L’esthétique et la physique

Ce même besoin explique que l’esthétique imprègne aussi profondémentla physique. De fait, la beauté d’une théorie a souvent été considérée commedéterminante dans son acceptation. La relativité générale d’Einstein en donneun exemple célèbre. Enoncée en 1916, elle n’a commencé de recevoir sespremières vérifications expérimentales authentiques que 70 ans plus tard. 1

Pourtant, on peut affirmer que personne ne pensait sérieusement que cettethéorie pourrait être remise en cause. 2 En effet, comme le dit Landau « [Elle]est vraisemblablement la plus belle des théories physiques existantes. Il estremarquable qu’Einstein l’ait construite par voie purement déductive et que

1. On a coutume de distinguer les vérifications du principe d’équivalence (voir la réfé-rence [3], Chapitre 8), comme la déviation des rayons lumineux par le champ gravitationnel,la variation de la marche d’une horloge en fonction de la pesanteur, ou la précession du pé-rihélie des astres, des véritables prévisions de la relativité générale, comme le rayonnementd’ondes gravitationnelles.

2. Ce qui n’est évidemment pas une raison pour renoncer aux vérifications expérimen-tales.

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6 Avant-Propos

c’est seulement par la suite qu’elle ait été confirmée par des observationsastronomiques. »

Les éléments de l’esthétique sont de nature diverse. Il y a, bien entendu, labeauté d’une idée en soi, difficile voire impossible à définir de façon générale.Mais deux facteurs sont plus facilement identifiables : la simplicité d’unethéorie et sa nature unificatrice. Ces deux facteurs n’ont de sens que parce quela physique s’exprime sous forme mathématique. Nous parlerons ci-dessousde l’archétype qu’est la gamme pythagoricienne, les exemples abondent, bienentendu.

A l’issue d’un travail considérable, tant sur le plan observationnel 3 quesur celui du calcul 4, Kepler parvient à ses célèbres lois sur le mouvementdes planètes du système solaire. Découvrir, dans une vision copernicienne dusystème solaire, que les orbites sont des ellipses, ces courbes pures et légen-daires de la géométrie d’Apollonius, Euclide et Archimède, est d’une beautéet d’une simplicité auxquelles Kepler ne peut résister. Il ne peut qu’êtreamené à concevoir l’univers comme inspiré par une esthétique mathématiquequi montre la pureté et l’unité. Il exprime son émotion dans sa phrase : « lanature aime la simplicité » 5. Ce sera un triomphe et un émerveillement pourNewton que de déduire mathématiquement les lois de Kepler dans le cadrede ses Principia.

De même, l’unification de l’électricité et du magnétisme par Ampère, puiscelle de l’électromagnétisme et de la lumière par Maxwell est une prodigieuseaventure du 19e siècle qui se poursuivra longtemps. La structure mathé-matique des équations de Maxwell dévoilera la relativité. L’unification desinteractions électro-faibles par Glashow, Weinberg et Salam dans les années1960 sera saluée comme l’étape suivante de cette aventure exaltante. Elleest à l’origine d’un fabuleux effort qui perdure pour unifier l’ensemble desinteractions fondamentales, y compris la gravitation. On y retrouve à chaqueétape le souci de l’esthétique comme celui de la simplicité et de l’unité.

La simplicité ne signifie pas que les choses deviennent abordables autout venant, bien au contraire. Cette simplicité vaut dans le langage mathé-matique. Galilée est le premier à l’énoncer : « La philosophie est écrite dans celivre immense perpétuellement ouvert devant nos yeux (je veux dire : l’Uni-

3. La lunette de Galilée ne fut inventée qu’en 1609, plus de dix ans après les travauxde Kepler.

4. Kepler dédia son mémoire Mysterium cosmographicum à Napier, inventeur des loga-rithmes, sans qui, disait-il, il n’aurait jamais pu mener à bien son entreprise.

5. Natura simplicitatem amat

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0.2. LA MÉTAPHYSIQUE ET LA SCIENCE 7

vers), mais on ne peut le comprendre si l’on n’apprend pas d’abord à connaîtrela langue et les caractères dans lesquels il est écrit. Il est écrit en langue ma-thématique, et ses caractères sont des triangles, des cercles et d’autres figuresgéométriques sans l’intermédiaire desquelles il est humainement impossibled’en comprendre un seul mot. » Il est difficile de ne pas rapprocher de cesmots ceux de Léonard de Vinci dans son Traité de la Peinture : « Non milegga chi non è matematico, nelli mia principi » 6. La simplicité réside dansla possibilité – mystérieuse – de représenter les phénomènes naturels pardes structures mathématiques de plus en plus générales. Si je peux dire quela structure mathématique la plus fondamentale de la mécanique quantiqueest la première des quatre opérations, l’addition 7, c’est la conséquence del’immense effort de synthèse mené par les physiciens et mathématiciens desannées 1920-1930. Le principe de superposition, pont aux ânes de celui quiaborde la mécanique quantique, est ce qui heurte le plus l’intuition physiquepremière. Mais si son expression se réduit à peu de choses, cette simpliciténe peut être véritablement savourée qu’au bout d’un long et incontournableparcours mathématique.

0.2 La métaphysique et la science

La réflexion philosophique accompagne couramment le progrès scienti-fique, cela se comprend. Mais il est intéressant de constater que les consi-dérations véritablement métaphysiques ont constamment frôlé, voire épousé,les chemins de la physique. En étudiant la trajectoire de la comète de 1682,et signalée dès 240 avant J.-C., Halley montre que son orbite est elliptiqueet, appliquant pour la première fois les lois de Newton sur le mouvement,prévoit avec succès sa réapparition pour 1758. Le mouvement céleste, tota-lement imbriqué dans la notion de temps, le plus mystérieux des conceptsphysiques 8 hantait les hommes depuis qu’ils observaient le ciel. Avec les loisde Newton, l’homme était devenu capable de prédire l’état du ciel avec par-faite précision ! Newton, émerveillé par cette précision, y avait trouvé une

6. Ne lise pas mes principes qui n’est pas mathématicien.7. Voir par exemple J-L. Basdevant, La Mécanique quantique, dogme ou humanisme ?

Découverte, Revue du Palais de la Découverte, numéro 288, Mai 2001.8. « Qu’est-ce donc que le temps ? Si personne ne me le demande, je le sais. Si quel-

qu’un pose la question et que je veuille l’expliquer, je ne sais plus. » Saint Augustin, Les

Confessions Livre XI, XIV, 17.

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8 Avant-Propos

preuve de l’existence de Dieu. Puisque le système était si parfaitement réglé,puisque l’on pouvait prédire l’état futur du ciel, puisque l’on pouvait, parles équations, remonter le temps et retrouver l’état des planètes à n’importequelle date antérieure, il fallait admettre que le système solaire, comme toutle cosmos, avait été conçu et installé par une puissance supérieure. « L’ordrequi règne dans les choses matérielles indique assez qu’elles ont été créées parune volonté pleine d’intelligence » écrit-il dans son Traité d’Optique.

A l’apogée de la découverte d’une théorie physique, il n’est pas inhabituelde voir invoquer une « puissance supérieure ». Ce peut être, comme dans lecas de Newton, un véritable argument théologique. C’est souvent une inter-rogation par rapport à cet « organisme » structuré que constitue l’ensembledes phénomènes naturels. Kepler et les orbites planétaires en donnent unexemple. On ne peut évidemment pas manquer de rappeler les phrases légen-daires d’Einstein, comme « le Seigneur n’est pas méchant, il est subtil » ou« Dieu ne joue pas aux dés ». Toutefois, au delà de ces interrogations ou affir-mations, peut-être marquées par la culture judéo-chrétienne, on retrouve enpermanence, dans la progression de la physique, une quête métaphysique, unerecherche des causes du monde et des principes mêmes de la connaissance.Cette quête se transforme souvent en celle d’une véritable « méta-théorie ».Le nom même de « M-théorie » né depuis 1995 avec la démonstration del’équivalence de l’ensemble des théories de super-cordes, et qui a provoquéun regain d’intérêt complètement inattendu dans le domaine des interactionsfondamentales, est révélateur à cet égard.

0.3 Les nombres, la musique et la physique quan-

tique.

On convient de situer la naissance de la physique moderne au 17e siècleavec Galilée. Il lui revient en effet d’avoir posé les deux principes fondateursde cette science : la méthode expérimentale et la formulation de la théoriedans le langage mathématique.

Mais le point de départ de la physique expérimentale et théorique sesitue il y a 2500 ans. En effet, le théorème de Pythagore occulte ce qui, ausens de Galilée, constitue la première découverte moderne en physique : lathéorie des sons et la gamme musicale. Moderne, car la découverte possèdeces deux vertus d’avoir un fondement expérimental et d’être exprimée de

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0.3. LES NOMBRES, LA MUSIQUE ET LA PHYSIQUE QUANTIQUE 9

Figure 1 – Sylvano Bussotti, « Pièces de piano pour David Tudor # 4 » extrait de« Pièces de Chair II », c© Casa Ricordi-BMG Ricordi Milan ; tous droits réservés.

façon mathématique.

La musique est le premier art abstrait. Elle fascine parce qu’elle atteintdirectement l’inconscient. Elle échappe à toute tentative de verbalisation.Hormis les discussion techniques ponctuelles que peuvent entretenir des ini-tiés, on ne raconte pas la musique. L’écriture musicale est un sujet d’émer-veillement inépuisable, on en voit un exemple sur la figure 1.

On ne peut dater la naissance de cet art, mais il est certain que, très tôt,les humains, dans leurs chants, ont compris l’harmonie. L’octave, qui en estle plus simple exemple, est la découverte étonnante qu’un même son puissese reproduire à l’aigu comme au grave.

La tradition veut que Pythagore, en passant quotidiennement devantl’atelier d’un forgeron, dans son île natale de Samos, 9 ait compris que lahauteur des sons est directement reliée aux dimensions des objets qui les pro-duisent. Il avait remarqué que des barres de longueur différente produisaientdes sons différents lorsqu’elles étaient percutées par le marteau du forgeron.Comme le dit Arthur Koestler (réf.[4], chapitres V et VII), « Depuis que

9. Peu importe, à vrai dire, que l’anecdote soit vraie, que ce soit Pythagore lui-mêmequi ait fait la découverte. Dans tous les cas, on ne peut nier ni la profondeur de l’idée,ni l’observation expérimentale qu’elle provoque, ni la théorie en nombres entiers qu’elleengendre et qui nous est parvenue.

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10 Avant-Propos

l’âge de bronze avait fait place à l’âge de fer, les martèlements assourdissantsavaient été considérés par les mortels ordinaires comme une simple nuisance.Pythagore avait ainsi transformé du bruit en de l’information ». De retourchez lui, il procède à une expérimentation sur des objets musicaux, notam-ment sur les cordes vibrantes d’une lyre. Il comprend que diviser une cordepar un nombre entier appartenant à la tetraktys de la décade, la progressiondes nombres 1,2,3,4 dont la somme est le nombre « parfait » 10, produit ceque l’on nomme depuis longtemps l’harmonie, à savoir l’octave, la quinte etla quarte.

Laissons la parole à Diderot 10 : La musique est un concert de plusieursdiscordants. Il ne faut pas borner son idée aux sons seulement. L’objet del’harmonie est plus général. L’harmonie a ses règles invariables. [...]L’octave, la quinte et la quarte sont les bases de l’arithmétique harmonique.La manière dont Pythagore découvrit les rapports en nombres de ces inter-valles de sons marque que ce fut un homme de génie.Il entendit des forgerons qui travaillaient ; les sons de leurs marteaux ren-daient l’octave, la quarte et la quinte : il entra dans leur atelier. Il fit peserles marteaux. De retour chez lui, il appliqua aux cordes tendues par des poidsl’expérience qu’il avait faite ; et il forma la gamme du genre diatonique, d’oùil déduisit ensuite celles des genres chromatique et enharmonique ; et il dit :Il y a trois genres de musique : le diatonique, le chromatique et l’enharmo-nique.Chacun a son progrès et ses degrés. Le diatonique procède du semi-ton auton, etc.C’est par le nombre et non par le sens qu’il faut estimer la sublimité de lamusique. Etudiez le monocorde.Il y a des chants propres à chaque passion, soit qu’il s’agisse de les tempérer,soit qu’il s’agisse de les exciter.La flûte est molle. Le philosophe prendra la lyre : il en jouera matin et soir.

Après une étude que l’on peut imaginer sur les harmoniques d’un son, etsur la façon de les ramener dans l’intervalle d’une même octave en divisantpar des puissances de 2, Pythagore parvient à ces gammes, notamment cellequi porte son nom et qui est représentée dans la table ci-dessous. Les nombresdésignent ici des rapports de fréquence (les modes grecs étaient énoncés sousla forme descendante en fonction de la longueur).

10. dans l’article Pythagorisme de l’Encyclopédie, édition critique de J. Assézat, GarnierFrères, Paris, 1876.

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0.3. LES NOMBRES, LA MUSIQUE ET LA PHYSIQUE QUANTIQUE 11

note do ré mi fa sol la si do

rapport de fréquence 1 98

8164

43

32

2716

243128

2

Rapports de fréquences dans la gamme pythagoricienne .

Dans cette gamme, les intervalles séparant deux notes voisines ne prennentque deux valeurs : le ton (rapport 9/8) et le demi-ton (rapport 256/243). Py-thagore voit une importance particulière à ce que les numérateurs et déno-minateurs de ces fractions soient des puissances des éléments de la tetraktys(en l’occurrence de 2 et 3). Pour lui, la gamme ci-dessus a une esthétiqueinfiniment supérieure à celle des autres. Nous devons, en effet, compléter letexte de Diderot par sa dernière phrase :Le mouvement des orbites célestes, qui emporte les sept planètes, forme unconcert parfait.

Un mérite de Pythagore est, comme le soulignait Aristoxène, d’avoir« élevé l’arithmétique au-dessus des besoins des marchands ». Il a transforméun ensemble de recettes empiriques utilitaires, notamment dans le commerce,en une science démonstrative. Il est probable que c’est à Pythagore lui-mêmeque l’on doit l’affirmation, rapportée par Aristote, selon laquelle toutes chosessont des nombres. Mais, partant de son analyse de l’harmonie musicale, quise laisse ramener à des nombres entiers, il ne peut résister à l’idée que lesnombres sont le principe, la source et la racine de toutes choses. Nous voilàdonc dans la métaphysique. Sur ce principe, les pythagoriciens élaborent unearithmologie mystique, en assignant aux nombres des propriétés qualitatives.Ils en arrivent à concevoir et décrire ainsi le cosmos et son origine grâce àl’harmonie des sphères. Le principe d’harmonie envahit ainsi toute la phi-losophie des pythagoriciens : ils conçoivent l’univers tout entier comme régipar les nombres entiers et par l’harmonie qui en résulte.

Pythagore lui-même est l’une des personnalités les plus mystérieuses del’antiquité. On ne lui connaît aucun écrit. Longtemps, sa pensée ne fut connueque par la tradition orale. Aristote évite le plus souvent de prononcer sonnom, pour ne parler que des pythagoriciens, coutume qui subsiste de nosjours.

Né au VIe siècle avant J.-C. à Samos en Asie Mineure, il émigra vers l’âge

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12 Avant-Propos

de quarante à Crotone, en Italie. Il y fonda une communauté (ou secte) à lafois religieuse et politique, qui fut massacrée lors d’une révolte populaire.

Il porta les nombres entiers comme un fondement du monde. On dit qu’ilse suicida le jour où il comprit qu’il venait de démontrer que

√2 était ir-

rationnel, qu’il ne pouvait pas s’écrire comme le rapport de deux entiers.Autrement dit, la diagonale d’un carré ne se rapporte pas à son côté par unefraction entière !

La numérologie a joué un rôle considérable dans le développement de lascience au XIXe siècle. La loi des proportions définies ramenait les réactionschimiques à des jeux de nombres entiers. La classification et l’évolution desespèces en zoologie et en botanique reposait sur des nombres (pétales, coty-lédons, dents, doigts etc.). La phénoménologie des spectres atomiques faisaitintervenir des fractions entières. Cette dernière aventure débouchera sur unedes percées les plus étonnantes, celle de la formule en nombres entiers deBalmer et son rôle dans la naissance de la mécanique quantique.

C’est tout à fait par hasard qu’en 1885, Balmer, professeur de lycée à Bâleet passionné de numérologie, fut mis en présence du spectre de l’hydrogène.Il constata que les longueurs d’onde des raies d’émission de l’hydrogène dansle visible pouvaient se représenter, au millième près, par une formule faisantintervenir des nombres entiers : 1/λ ∝ (n2 − 4)/n2, n ≥ 3. Bien qu’il nefût pas physicien, frappé par la simplicité et l’esthétique de cette formule,il écrivit dans son article de 1885 : « Il m’apparaît que l’hydrogène,..., plusque toute autre substance, est destiné à nous ouvrir de nouvelles voies dansla connaissance de la matière, de sa structure et de ses propriétés », parolesprophétiques.

En effet, lorsqu’en 1912, Niels Bohr, âgé de 27 ans, travaillait chez Ruther-ford sur un modèle de l’atome, il ignorait totalement la formule de Balmer, etcelles, analogues, de Rydberg pour les alcalins. Quand, par hasard, il appritl’existence de la formule de Balmer, il ne fallut que quelques semaines à Bohrpour construire son célèbre modèle de l’atome d’hydrogène, un des tournantsde la physique quantique.

Une énigme amusante demeure : la loi empirique de Titius en 1772, re-prise par Bode en 1778. Cette loi établit une relation entre la distance a desplanètes au Soleil (plus précisément le grand axe de leur orbite), exprimée enunités astronomiques (1 U.A. = 150 millions de km.), et leur rang n, comptéà partir du Soleil. Elle s’écrit :

a = 0, 4 + 0, 3× 2n−1

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0.4. LA PHILOSOPHIE DES LUMIÈRES ET LE PRINCIPE DU MEILLEUR 13

où a est la distance planète-Soleil . Pour Mercure, n = −∞ et a=0,4 ; n = 1pour Vénus ; n = 2 pour la Terre ; n = 3 pour Mars ; n = 5 pour Jupiter.La « lacune » observée pour n = 4 a permis la découverte de la ceinture desastéroïdes en incitant les astronomes à rechercher une planète à la distance de2,8 U.A. La loi de Titius-Bode, assez exacte jusqu’à Uranus devient inexactepour des distances plus grandes (elle donne a=77,2 U.A. pour Pluton dont ladistance réelle est de 39,2 U.A.). On spécule actuellement sur le fait qu’ellesoit ou non valable dans les systèmes planétaires extra-solaires découvertsces dernières années. Aucun calcul dynamique n’a jamais été en mesure dela retrouver par la théorie.

0.4 La philosophie des lumières et le principe

du meilleur

La notion d’équilibre était chère aux penseurs du 18e siècle. Citons, neserait-ce que par sa consonnance d’actualité, une phrase de Montesquieu dansDe l’esprit des lois : « Dans toute magistrature, il faut compenser la grandeurde la puissance par la brièveté de sa durée ».

Avec la philosophie de Leibniz, (1646-1716) on voit se dessiner une recon-naissance de conditions optimales dans la nature. Retournons vers Diderotet l’article Leibnizianisme dans l’Encyclopédie.

Il avait encore sur la physique générale une idée particulière : c’est queDieu a fait avec la plus grande économie possible ce qu’il y avait de plusparfait et de meilleur ; il est le fondateur de l’optimisme, ou de ce systèmequi semble faire de Dieu un automate dans ses décrets et dans ses actions,et ramener sous un autre nom et sous une forme spirituelle le fatum desAnciens, ou cette nécessité aux choses d’être ce qu’elles sont.Cependant, comme il y a une infinité de combinaisons et de mondes possiblesdans les idées de Dieu, et que de ces mondes il n’en peut exister qu’un, il fautqu’il y ait une certaine raison suffisante de son choix : or cette raison ne peutêtre que dans le différent degré de perfection ; d’où il s’ensuit que le mondequi est, est le plus parfait. Dieu l’a choisi dans sa sagesse, connu dans sabonté, produit dans la plénitude de sa puissance.

Dans ses Nouveaux essais sur l’entendement humain Leibniz écrit : « Monsystème prend le meilleur de tous côtés ». Chez lui, Dieu est conçu commeun mathématicien. Nous revoilà dans la métaphysique.

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14 Avant-Propos

Il faut, bien entendu, tempérer cette impression d’enthousiasme. Il n’yavait unanimité pas plus sur Leibniz que sur tout autre penseur. Voltairedans Candide, se complaît à ridiculiser les idées de Leibniz : « Tout est pourle mieux dans le meilleur des mondes ».

Il est démontré, disait-il, que les choses ne peuvent être autrement : cartout étant fait pour une fin, tout est nécessaire pour la meilleure fin. Remar-quez bien que les nez ont été faits pour porter des lunettes. (Chap. 1).Pangloss les consola, en les assurant que les choses ne pouvaient être autre-ment : « Car, dit-il, tout ceci est ce qu’il y a de mieux ; car s’il y a un volcanà Lisbonne, il ne pouvait être ailleurs ; car il est impossible que les choses nesoient pas où elles sont ; car tout est bien. » (Chap. 4).

0.5 Le principe de Fermat et ses conséquences

Le coup de tonnerre scientifique, c’est-à-dire la formalisation mathéma-tique de telles idées, nous est d’abord venue de Pierre de Fermat (1601-1665),comme nous le verrons au chapitre 1. L’idée fondatrice est le principe del’optique géométrique qui porte son nom et qui est un principe de tempsminimum.

De fait, tout a démarré vers 1637 dans une vive critique adressée à Des-cartes par Fermat à propos de la notion de démonstration. L’irritation de Fer-mat faisait suite à la publication de la Dioptrique dans le Discours de la Mé-thode. Fermat, magistrat toulousain, était mathématicien, mais pas physicien.Il s’intéressait cependant à la structure des lois physiques 11 et notammentaux lois de l’optique. Le manque de rigueur de la « pseudo-démonstration »de Descartes, irritait Fermat. Celui-ci était convaincu que l’on pouvait faireles choses correctement : « Il me semble qu’un peu de géométrie pourra noustirer d’affaire ». Quand il parvint à démontrer géométriquement la loi de laréfraction n1 sin i1 = n2 sin i2, Fermat fut littéralement fasciné : Le fruit demon travail a été le plus extraordinaire, le plus imprévu et le plus heureuxqui fût jamais. Car [...] j’ai trouvé que mon principe donnait justement etprécisément la même proportion des réfractions que M. Descartes a établie.A la fin de 1661, Fermat écrivit son principe de moindre temps, qui déclenchatout.

11. Il avait notamment entretenu une correspondance avec Etienne Pascal, père deBlaise, et Roberval sur l’équilibre mécanique.

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0.6. LES PRINCIPES VARIATIONNELS 15

En 1744, Maupertuis énonça pour la première fois le principe de la moindrequantité d’action pour la mécanique. Pierre-Louis Moreau de Maupertuis(1698-1759) avait introduit en 1730 les idées de Newton en France. Même sil’énoncé et la justification proposés initialement par Maupertuis sont confus,il s’agit d’une date historique dans l’évolution des idées en physique et, àl’époque, dans la philosophie. Poursuivant les travaux de Fermat, Mauper-tuis comprit que, dans des conditions bien déterminées, les équations deNewton sont équivalentes au fait qu’une quantité, qu’il nomma l’action, soitminimale. Selon ses propre termes :

« L’Action est proportionnelle au produit de la masse par la vitesse et parl’espace. Maintenant, voici ce principe, si sage, si digne de l’être suprême :Lorsqu’il arrive quelque changement dans la Nature, la quantité d’Actionemployée pour ce changement est toujours la plus petite qu’il soit possible. »

Pour une particule de masse m, de vitesse v, l’action de Maupertuis estdonc le produit de trois facteurs, la masse, la vitesse, et la distance parcourue,ou encore la circulation de la quantité de mouvement le long de la trajectoire :A =

mv dl. La formulation et la démonstration du principe de Maupertuisfurent données peu après par Euler, son ami.

Ces principes eurent un grand retentissement au XVIIIe siècle. Que leslois de la nature puissent se déduire de principes d’optimisation, c’est-à-dire d’équilibre entre causes en conflit, ne pouvait que frapper les espritsau siècle des lumières. Ce Principe d’économie naturelle fascinait. Il réa-lisait le meilleur accord entre différentes lois de la nature qui semblaient enopposition, voire incompatibles. On le rattachait volontiers au principe du« meilleur » de Leibniz.

0.6 Les principes variationnels

Les principes variationnels sont la forme mathématique du superlatif.Cette formulation se fait en demandant que la valeur d’une quantité typiquedu système, soit optimale pour la performance effectivement réalisée par lesystème par rapport à ce qu’elle vaudrait si l’on imaginait une performancedifférente.

Dans une certaine mesure, les principes variationnels, par leur universalitédans le monde des choses, peuvent apparaître comme une « méta-théorie »générale de la physique, voire, un jour peut-être, des autres sciences naturellescomme la biologie, la psychologie ou les phénomènes sociaux. Ils jouent un

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16 Avant-Propos

rôle en économie.

La forme première d’une théorie physique explique un phénomène parune loi locale. Telles sont les lois de la dynamique de Newton, les lois deSnell-Descartes, et les lois différentielles de l’électromagnétisme ou de la ther-modynamique. Une fois la première pierre de la théorie mise à jour, et aprèsles premières exploitations de la découverte, on en recherche les principessous-jacents et leurs liens avec d’autres schémas.

Les « Principes variationnels » permettent d’exprimer les lois physiquessous une forme globale. Cette forme permet, bien entendu, de retrouver les loislocales, mais on découvre qu’elle est plus riche et puissante. Elle permet dedégager les principes fondamentaux des lois qu’elle manipule. Cela donne unevision plus féconde au plan des fondements comme à celui des applications.

On retrace cette façon de concevoir les processus et structures physiqueschez les mathématiciens et philosophes grecs. Les Grecs caractérisaient unsegment de droite comme la ligne de plus petite longueur joignant ses ex-trémités. Héron d’Alexandrie (au 1er siècle avant notre ère) avait démontréque l’égalité des angles d’incidence et de réflexion en optique géométriquese ramène au fait que la longueur du chemin parcouru par la lumière entrela source et l’oeil de l’observateur est la plus courte possible. Dans la mêmeligne de pensée, les Aristotéliciens pensaient pouvoir « justifier » que les or-bites célestes soient circulaires par le fait qu’à périmètre donné, de toutes lescourbes planes fermées, le cercle est celle qui entoure l’aire la plus grande(problème dit de l’isopérimètre). 12 Dire que la ligne droite est le chemin leplus court entre deux points ou que le cercle est la ligne la plus courte quientoure une aire plane donnée sont des façons simples de définir ces êtresgéométriques.

De la même façon, en physique, dire que le courant électrique se distribuedans un réseau de façon telle que la puissance convertie en chaleur est laplus petite possible est une description de la circulation directe du courantqui recouvre quantité de cas particuliers sans faire usage de mathématiquescompliquées (bien entendu, les calculs réapparaissent dès que l’on appliquele principe à un cas particulier). La proposition qu’un système physique agit(ou évolue) de façon telle qu’une certaine fonction qui lui est reliée soit mini-mum ou maximum, est souvent le point de départ de la recherche théorique

12. La légende dit que Didon, lorsqu’elle fonda Carthage, avait reçu pour condition quesa ville tienne à l’intérieur d’une peau de taureau. Elle découpa des fines lanières dans lapeau de façon à en faire un énorme cercle.

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0.6. LES PRINCIPES VARIATIONNELS 17

et de l’expression ultime des relations entre les faits physiques. Ainsi, les prin-cipes variationnels présentent les phénomènes naturels comme des problèmesd’optimisation sous contraintes. Ils sont présents dans tous les domaines dela physique (on pourra lire à ce propos les chapitres I,26 et II,19 du cours deFeynman réf.[5] et le livre de Yourgrau et Mandelstam réf.[6]).

En mécanique, première des sciences physiques si l’on y inclut l’acous-tique de Pythagore, on reconnaît que la grande percée physique et philoso-phique qui mène aux idées actuelles provient de la remise en cause des idéesd’Aristote sur le mouvement 13. Pour expliquer le mouvement et son évo-lution, Aristote peuplait l’espace de moteurs. Jean Philopon, philosophe etgrammairien grec (490-566) fut le premier à réfuter les conceptions aristotéli-ciennes du mouvement. Au travers d’une série passionnante d’observations etde leur analyse critique, relevons deux questions d’une étonnante modernité.Lorsque deux corps en mouvement entrent en collision, leur trajectoire est dé-viée ; comment se fait-il que s’ils se frôlent sans se toucher, leur trajectoire nesoit pas affectée ? Autrement dit, comment ces « moteurs », qui remplissentle milieu ambiant, peuvent-ils agir de façon discontinue et imprévisible ? Parailleurs, pourquoi est-il plus facile de lancer un objet léger plus haut qu’unobjet lourd ? Philoppon entrevoyait qu’un élan est donné à l’objet lancé parcelui qui le lance.

Il fut suivi 800 ans plus tard par Jean de Buridan (1300-1358). CommePhilopon, Buridan avait une vision du mouvement comme résultant d’unéquilibre entre des causes en conflit. Ce cadre de pensée est la premièreconception moderne de la mécanique. Buridan, Recteur de l’Université deParis de 1328 à 1340 était un logicien commentateur d’Aristote. On lui doitle concept de base, celui « d’impetus » ou d’élan comme source du mou-vement, en opposition avec les « moteurs » dont Aristote peuplait l’espace.Pour Buridan, la nature du mouvement résulte de la mise en oeuvre d’un en-semble d’impetus et de leurs conflits, les lois du mouvement résultant d’uneoptimisation de cet ensemble de conflits. Buridan avait, dans la même lignede pensée, donné un argument célèbre sur le problème du libre arbitre. Unâne affamé est à égale distance de deux tas de foin, personne, même pas Dieune peut savoir celui qu’il choisira. Il fallait du courage, de l’autorité et del’habileté pour dire cela à la Sorbonne à cette époque.

En balistique au XVIe siècle les artilleurs calculaient le mouvement des

13. On pourra se référer à l’article de Luca Bianchi La flèche d’Aristote : la physique du

mouvement, page 44, Dossier Pour la Science, octobre 2002

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18 Avant-Propos

Figure 2 – Extrait d’un manuel d’artillerie polonais Ars Magnae Artilleriae - Parsprima : Dell’Aqua Praxis, XVIe siècle : exemples de tirs. (Il est permis d’y voir lesprémisses des collisionneurs de particules de la fin du XXe siècle.) Archives deCasimir Siemienowicz, général d’artillerie de la couronne polonaise et lithuaniennec©Richard Orli 2001.

boulets de canon en utilisant le concept d’impetus de Buridan, comme onpeut le voir sur la figure 2. Dans le mouvement du projectile, trois phasesétaient distinguées, qui sont représentées sur la figure 3. Lors de la première,appelée mouvement violent, la trajectoire est rectiligne et le mouvement sedéveloppe sous l’action de l’impetus fourni par le canon. Dans la troisième,appelée mouvement naturel, la trajectoire est encore rectiligne, l’impetuscause du mouvement est celui de la pesanteur, impetus naturel, et le bouletretombé 14.

La phase intermédiaire correspond à l’affaiblissement de l’impetus violentsous l’action de l’impetus naturel et aboutit à une sorte de repos, le mediaquies. Cette phase était conçue comme une transition, un compromis, entredeux états de mouvement contradictoires où le projectile a un mouvementgrosso modo horizontal et uniforme. L’impetus était très en vogue au XVIesiècle. Leonard de Vinci expliquait qualitativement le mouvement de la toupiepar un conflit d’impetus axiaux.

14. Davantage à la verticale que lors de l’impetus violent. Heureuse coincidence que lefrottement de l’air produise cet effet !

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0.7. LA PÉRIODE MODERNE, DE LAGRANGE À EINSTEIN ET À FEYNMAN 19

Fig. 3 : Phases successives du mouvement d’un boulet de canon dans la théorie de

l’impetus.

0.7 La période moderne, de Lagrange à Ein-

stein et à Feynman

L’enthousiasme métaphysique ne dura guère. Ce n’était pas faute de ri-chesse ou d’esthétisme intellectuel. C’est parce que les principes variationnelsn’ont cessé, depuis, de produire des résultats physiques de plus en plus riches.C’est l’ambition de ce texte d’en décrire quelques uns.

Leonhard Euler (1707-1783) et Joseph-Louis Lagrange (1736-1813), dontles travaux furent poursuivis par William R. Hamilton (1805-1865) en po-sèrent les fondements mathématiques. Ils sont les pères de l’une des pierresangulaires de la physique théorique contemporaine.

Les conséquences de cette vision de la physique se retrouvent aux sourcesde la relativité générale d’Einstein aussi bien que des théories modernes desinteractions fondamentales, les théories de jauge. L’outil mathématique cen-tral en est le calcul variationnel. On le doit à Euler qui en avait compris lefonctionnement et à Lagrange qui, en 1766, apporta une contribution déci-sive. 15 Le calcul variationnel est un pan étonnant des mathématiques, tantpar son côté fédérateur que par le nombre de questions auxquelles il a permisde répondre.

15. Euler, qui était malvoyant depuis l’âge de 28 ans, devint complètement aveugle encette même année 1766. Il reçut, en 1754, la visite du jeune Lagrange qui lui exposa sestravaux. Emerveillé par le talent de ce jeune homme, il dissimula un temps ses propresrésultats, pour que le mérite en revienne au seul Lagrange. C’est un exemple, à peu prèsunique et maintenant disparu, de courtoisie humaine et de passion pour la science.

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20 Avant-Propos

Euler publia en 1744 son traité Methodus inveniendi lineas curvas maximiminimive proprietate gaudens, qui fondait le calcul des variations, dans lalignée des travaux de Jacques et Jean Bernoulli (l’ouvrage eut une influenceconsidérable sur Lagrange). C’est dans ce travail qu’Euler justifia a posteriorile principe de moindre action de son ami Maupertuis.

Lagrange appartenait à une famille turinoise. Il était particulièrementdoué et précoce. La réaction favorable d’Euler à ses travaux l’encouragea et,en 1756, il appliqua ses techniques au principe de moindre action, fondementde la mécanique moderne. Une des contributions majeures de Lagrange est saMécanique analytique où il effectue la synthèse de l’ensemble des méthodes destatique et de dynamique qu’il avait développées antérieurement. L’ouvrage,achevé en 1782, ne parut qu’en 1788 à Paris. Lagrange consacra les dernièresannées de sa vie à une seconde édition revue et considérablement augmentéedont le premier volume parut en 1811. La mécanique de Lagrange est aussiimportante dans l’histoire de la Physique, de la Mécanique et des Mathéma-tiques que la mécanique céleste de Newton. Elle sera le point de départ detoutes les recherches ultérieures, notamment des travaux de Hamilton, qui laqualifiera de « poème scientifique par le Shakespeare des mathématiques ».

Hamilton, né à Dublin, avait été, lui aussi, un enfant prodige. A l’âge dedix-neuf ans, il écrivit un travail remarquable sur l’optique. A vingt-trois ans,il devint professeur d’astronomie à Dublin et astronome royal à l’observatoirede Dunsink. Il resta toute sa vie fidèle à Dublin et à son observatoire. L’in-térêt de Hamilton pour l’optique venait des instruments de son observatoire.Son mémoire, On caustics (Des caustiques), écrit en 1824, fait date. C’estpeu après qu’il développa et amplifia la mécanique analytique de Lagrange,en lui donnant sa forme actuelle. Fasciné par les principes variationnels, eten particulier par la similitude entre le principe de Maupertuis en mécaniqueet le principe de Fermat en optique géométrique, il fit en 1830 la remarqueétonnante que les formalismes de l’optique et de la mécanique pouvaient êtreunifiés, et que la mécanique newtonienne correspondait à la même limite ouapproximation, que l’optique géométrique par rapport à l’optique ondula-toire ! Cette remarque fut ignorée par ses contemporains ce que déplora en1891 le célèbre mathématicien Felix Klein. Il est vrai qu’en 1830 aucune ex-périence ne mettait en évidence le rôle de la constante de Planck. Néanmoins,à bien des égards, Hamilton peut être considéré comme un précurseur de lamécanique quantique.

L’objectif central de ce livre est de fournir une description aussi instruc-tive que possible de la mécanique analytique de Lagrange et Hamilton. Ce

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0.7. LA PÉRIODE MODERNE, DE LAGRANGE À EINSTEIN ET À FEYNMAN 21

sont là des pans essentiels de la culture de tout physicien. Mais nous verrons,au passage, la multitude de leur retombées dans d’autres secteurs. Nous mon-trerons notamment les liens intimes de la mécanique analytique avec l’optiqueet avec la mécanique quantique.

Dans le premier chapitre, nous commencerons par rappeler le principe deFermat. Les lois de Descartes prévoient quel sera le chemin suivi par un rayonlumineux initial donné. Fermat adopte un point de vue plus général. Il se posela question de déterminer le chemin effectivement suivi par la lumière pouraller d’un point à un autre. Ce point de vue permet, on le sait, d’expliquerles rayons courbes et les mirages, ce que les lois de Descartes ne peuvent pasfaire. Fermat énonça à la fin de 1661 son principe de moindre temps. Celanous amènera naturellement au coeur mathématique de notre propos : leCalcul variationnel d’Euler et Lagrange. C’est un chapitre très riche des ma-thématiques, mais délibérément nous n’avons pas souhaité l’aborder dans sesdétails mathématiques, amplement traités dans la littérature. Nous souhai-tons ici aboutir rapidement aux applications et résultats physiques. D’abordnous présentons le « Principe de la moindre quantité d’action » de Mauper-tuis. Ensuite nous passerons en revue quelques applications pour camper ledécor. Nous verrons quelques applications mécaniques simples, ainsi que desexemples plus originaux comme les lois de Kirchhoff ou l’équation de Poissonen électrostatique.

Finalement, nous nous tournerons vers un cas complètement analoguedans son esprit, mais qui fascine par la quantité et la puissance de ses consé-quences, en comparaison de la simplicité de l’hypothèse de départ. Il s’agit dufondement de la thermodynamique statistique 16 En introduisant la techniquedes multiplicateurs de Lagrange, et le Principe d’équiprobabilité des configura-tions, nous verrons émerger une définition étonnamment simple de la notionde température, accompagnée de sa propriété première qu’est l’égalisationdes températures de systèmes en contact thermique. Puis, nous aboutirons àla définition statistique et absolue de l’entropie, due à Boltzmann. Cela nousmènera au principe étonnamment simple : L’équilibre thermodynamique cor-respond à une situation qui maximise l’entropie compte tenu des contraintes,c’est à dire qui maximise le désordre compte tenu des contraintes. Sa por-tée dépasse largement le cadre de la physique. Il a notamment constitué,on peut le comprendre, une des pierres angulaires dans la construction de

16. Cette section n’est pas reproduite dans le présent polycopié.

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22 Avant-Propos

modèles économiques. 17

Le chapitre 2 est consacré à la mécanique analytique de Lagrange. Lafin du XVIIe siècle avait vu le triomphe de la mécanique de Newton, poséeen 1687 dans les "Philosophiae Naturalis Principia Mathematica". Newtonayant formulé, par ailleurs, la loi universelle d’attraction gravitationnelle,pouvait expliquer le mouvement des corps célestes. Ce mouvement céleste,complètement imbriqué dans la notion de temps, hantait les hommes depuisqu’ils observaient le ciel. L’homme savait maintenant prédire l’état du cielavec une précision vertigineuse ! Mais on n’en resta pas là. A la suite de lasynthèse newtonienne, le XVIIIe et le XIXe siècle furent marqués par uneaventure étonnante où l’on découvrit la véritable structure de la mécanique :une structure géométrique. Une large classe de problèmes peuvent être rame-nés à de purs problèmes de géométrie.

Le couronnement de ces idées vint avec Lagrange en 1788, un siècle aprèsles Principia. Lagrange publia, dans sa « Méchanique Analitique », une nou-velle formulation de la mécanique où il mit en relief cette structure globaleet géométrique. La mécanique analytique de Lagrange repose sur le principede moindre action. Lagrange adopte une façon nouvelle de considérer les pro-blèmes de mécanique. Au lieu de déterminer la position et la vitesse d’uneparticule à un instant quelconque connaissant son état initial, il se pose laquestion de déterminer la trajectoire effectivement suivie par la particule si,partant d’un point donné à l’instant initial, elle arrive en un certain point àl’instant final. C’est la même démarche que celle de Fermat pour les rayonslumineux.

Le formalisme lagrangien est particulièrement bien adapté pour traiterdes lois d’invariance des phénomènes physiques et des lois de conservation quien découlent. Cette question est fondamentale, les symétries et invariancesforment l’ensemble de ce que l’on sait a priori sur la physique d’un problème.Nous verrons évidemment comment la conservation de l’énergie est liée àl’homogénéité du temps, celle de l’impulsion à l’homogénéité de l’espace, celledu moment cinétique à l’isotropie de l’espace. Au cours de cette discussion,nous introduirons la notion fondamentale de moment conjugué de Lagrangeou encore d’impulsion généralisée, qui joue un rôle central dans toute la suite.

Au chapitre 3, nous présenterons la formulation lagrangienne de l’élec-tromagnétisme. D’abord, nous étendrons nos considérations au cas d’une

17. Voir, par exemple, Jean-Michel Grandmont, Introduction à l’analyse microécono-

mique, Cours de l’Ecole Polytechnique, Edition 2002.

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0.7. LA PÉRIODE MODERNE, DE LAGRANGE À EINSTEIN ET À FEYNMAN 23

particule relativiste, soit libre soit dans un champ électromagnétique. Lefondement de notre propos sera précisément l’invariance relativiste. Le prin-cipe de moindre action ne peut avoir de sens que s’il détermine le mouvementd’une particule de la même façon, quel que soit l’état de mouvement rela-tif de l’observateur. Cela nous permettra de construire le lagrangien. Nousverrons comment l’impulsion et l’énergie d’une particule libre sont reliéesà sa masse et sa vitesse. Nous démontrerons ainsi que l’ensemble (E/c,p)forme un quadrivecteur de l’espace-temps en relativité. Ensuite nous passe-rons à la théorie des champs, vaste problème en lui-même, qui ne peut êtrevéritablement couvert qu’en un traité spécialement conçu pour lui. En ef-fet, le formalisme lagrangien trouve sa pleine puissance lorsque l’on traitede systèmes ayant un nombre de degrés de liberté très grand, voire infini.Nous donnerons les principes de la théorie lagrangienne des champs et sonapplication au champ électromagnétique. Nous déduirons l’action complètede l’électromagnétisme.

Le chapitre 4, nous mènera à la formulation dite canonique de la méca-nique analytique due à Hamilton. Ce formalisme canonique date de 1834. Ilest plus commode pour un certain nombre de problèmes, notamment la mé-canique du point ou d’ensembles de points. Mais il est surtout d’une richesseimpressionnante par ses développements tant mathématiques que physiques.Ce texte est avant tout orienté vers les applications à la mécanique, maisnous ferons allusion à quantité d’autres retombées des travaux de Hamilton.Après avoir décrit le formalisme canonique, qui consiste à décrire l’état d’unsystème par les variables conjuguées que sont les positions et les momentsconjugués de Lagrange, et non par les positions et les vitesses, nous pré-senterons quelques aspects des systèmes dynamiques. Ce type de problèmephysique a, en effet, été une extraordinaire source de découvertes tant enmathématiques qu’en physique. Le fondateur de ce champ d’étude est HenriPoincaré, en 1885, notamment quand il a étudié le problème des 3 corps. Celamène à des problèmes fascinants : les problèmes limites à t = ∞, les attrac-teurs et les attracteurs étranges, les bifurcations, le chaos etc. L’attracteurétrange le plus célèbre est sans doute l’attracteur de Lorenz, du nom de soninventeur Edward N. Lorenz qui le découvrit en 1963 à partir d’un modèlemathématique de l’atmosphère, et relança de façon spectaculaire, avec l’ef-fet « aile de papillon » en météorologie, l’intérêt pour le chaos, inventé parPoincaré 80 ans plus tôt.

Nous abordons ensuite, avec les crochets de Poisson, une structure mathé-matique, beaucoup plus proche de notre propos. Jacobi considérait que c’était

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24 Avant-Propos

la plus grande découverte de Poisson, qui, pourtant, avait fait des contri-butions considérables aux mathématiques, aux probabilités, à la mécaniqueanalytique et à l’électrostatique. Nous parviendrons ensuite naturellement àl’étonnante découverte faite par Dirac en 1925. Il y a une parfaite symétrieentre mécanique analytique et mécanique quantique si l’on fait correspondreaux crochets de Poisson classiques les commutateurs des observables quan-tiques (divisés par i~).

La dernière partie de ce chapitre est consacrée à l’équation de Hamilton-Jacobi, où l’on choisit d’énoncer les lois de la physique directement à partir del’action et non plus du lagrangien ou du hamiltonien. Nous verrons comment,pour les systèmes conservatifs, le flot des trajectoires est orthogonal aux sur-faces d’action constante. Cela nous fera redécouvrir le Principe de Maupertuissous une forme parfaitement géométrique. Nous verrons alors comment l’op-tique géométrique apparaît comme limite de l’optique ondulatoire, ainsi quel’avait découvert Hamilton. Cette démonstration fait intervenir ce que l’onnomme l’eikonal (du grec ει

κ ′ων , image) qui est l’analogue optique de l’ac-tion. Dans l’approximation des faibles longueurs d’onde dite approximationeikonale, l’onde se propage avec un vecteur d’onde localement perpendiculaireaux surfaces sur lesquelles l’eikonal est constant. Ces surfaces sont les frontsd’ondes géométriques. L’approximation eikonale correspond exactement auprincipe de Fermat. L’interprétation géométrique n’est autre que le Prin-cipe de Huygens-Fresnel. Finalement, nous montrerons comment le mêmecadre de pensée peut être appliqué à la mécanique ondulatoire et à l’équa-tion de Schrödinger. Cela constitue la célèbre approximation semi-classiquede Brillouin, Kramers et Wentzel.

Au chapitre 5 18, nous formalisons le problème du mouvement d’une par-ticule libre dans un espace courbe. Le chef-d’oeuvre d’Einstein qu’est laRelativité générale repose sur l’observation étonnante que deux grandeursphysiques qui n’ont a priori aucun rapport, sont égales (ou strictement pro-portionnelles). Il s’agit, on le sait, des deux acceptions du concept de masse.L’une est celle de coefficient d’inertie ou de résistance à l’accélération d’uncorps dans les lois de la dynamique, l’autre est celle de coefficient de couplageau champ de gravitation. Il n’existe aucun argument a priori qui expliquele pourquoi de cette égalité. Le mouvement d’une particule chargée dansun champ électromagnétique dépend des deux paramètres indépendants quesont la masse, coefficient d’inertie, et la charge de la particule, coefficient

18. Ce chapitre n’est pas reproduit dans le présent polycopié.

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0.7. LA PÉRIODE MODERNE, DE LAGRANGE À EINSTEIN ET À FEYNMAN 25

de couplage au champ. Dans un champ gravitationnel, l’égalité de la masseinertielle et de la masse pesante élimine la masse d’un corps des équationsdu mouvement. Deux corps placés dans les mêmes conditions initiales ontle même mouvement, quelle que soit leur masse. La prise de conscience dela profondeur de cette constatation a été relativement tardive. L’expériencehistorique d’Eötvös en 1890 a été reprise systématiquement depuis. Elle l’estencore à l’heure actuelle avec des techniques de plus en plus sophistiquées.

L’idée qui sous-tend la Relativité générale est que cette égalité devient na-turelle si le mouvement que nous nommons « gravitationnel » est, de fait, unmouvement libre dans un espace-temps courbe. Einstein racontait qu’en 1907,alors qu’il travaillait sur la façon d’incorporer la gravitation newtonienne dansla relativité (celle de l’électromagnétisme ne posant par construction aucunproblème) il eut l’idée la plus « heureuse » de sa vie (« glücklichster Gedankemeines Lebens »). Il s’était mis à penser aux impressions de quelqu’un quitomberait d’un toit ! Pour un tel « observateur » (et, bien entendu, tant qu’ilne rencontre pas d’autre objet) il n’existe pas de champ gravitationnel (lesitaliques sont d’Einstein). S’il « laisse tomber » des objets de ses poches,ceux-ci restent au repos, ou sont en mouvement uniforme par rapport à lui,quelle que soit leur nature physique ou chimique. Nous verrons l’idée de basedu « Principe d’équivalence » et quelques unes de ses conséquences, le butde ce chapitre étant d’utiliser le formalisme lagrangien pour montrer com-ment l’idée de mouvement dans un espace courbe fournit des éléments pourconstruire une théorie où l’égalité des « deux » masses est réalisée de façonnaturelle.

Après avoir défini ce qu’on nomme espace courbe et introduit la notionfondamentale de métrique de l’espace, nous écrirons le mouvement d’une par-ticule libre dans un tel espace. Cette étude débouchera sur un résultat fon-damental : les trajectoires physiques sont les géodésiques de l’espace, c’est-à-dire les courbes de longueur minimale (extrémale). C’est là que nous verronscomment le mouvement d’une particule soumise à un potentiel indépendantdu temps, d’énergie constante, dans l’espace euclidien peut être transformédans le mouvement libre de cette particule dans un espace courbe, ce quiéquivaut au Principe de Maupertuis. Ces développements nous permettrontde comprendre la démarche d’Einstein lorsqu’il construisit la relativité gé-nérale, ainsi que certaines conséquences de cette théorie. Nous montreronstrois exemples historiques : la variation de la marche d’une horloge dans unchamp gravitationnel, les corrections à la mécanique céleste newtonienne etla déviation de la lumière par le champ gravitationnel.

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26 Avant-Propos

Ces exemples sont historiques, ils sont également d’une grande actualité.Comme nous le verrons, la déflexion de la lumière par un champ de pesanteurjoue un rôle considérable en Astrophysique et en Cosmologie au travers del’effet de lentille gravitationnelle. Une application est la recherche de la dis-tribution d’une composante baryonique dans la « masse cachée » ou matièrenoire de l’univers. Une autre provient de ce que la distribution de masse dansl’univers, masse des galaxies mais aussi la matière noire, agit comme un ins-trument d’optique permettant d’observer des objets lointains, donc beaucoupplus jeunes. Cet effet est celui d’un télescope cosmique naturel, et l’universapparaît ainsi comme une galerie de mirages sans fin.

Nous avons, enfin, consacré le chapitre 6 19 à la formulation variationnellede la mécanique quantique de Feynman. Richard P. Feynman est peut-êtrele physicien théoricien le plus brillant de la seconde moitié du 20e siècle.Dans son travail de thèse, soutenu en mai 1942 à Princeton, Feynman cher-chait à résoudre le problème des corrections de l’électrodynamique quantiqueà la masse de l’électron. Ces corrections sont infinies dans une théorie deschamps où l’électron est considéré comme une particule ponctuelle. L’éner-gie électrostatique ∼ e2/(4πε0r0) d’une distribution d’extension r0 nulle est,en effet, infinie. La théorie de la renormalisation consiste à incorporer cettequantité infinie en redéfinissant la masse « nue » de l’électron (en l’absencede champ) comme un paramètre non-physique lui-même infini, les deux infi-nis se compensant l’un l’autre. Feynman découvrit un "principe de moindreaction" qui lui permettait de résoudre le problème en utilisant des potentielspour moitié avancés et pour moitié retardés. A cette fin, il avait introduit leconcept mathématique des intégrales de chemins, qui n’a cessé d’être déve-loppé depuis. Cette méthode connut un premier triomphe lorsqu’elle permitde calculer le déplacement de Lamb des niveaux de l’atome d’hydrogène sansintroduire de paramètres de régularisation arbitraires, mais, au contraire,de gérer les termes infinis d’une manière systématique et bien définie. Bienloin d’un simple outil technique, le Groupe de renormalisation a révélé, de-puis, une profondeur qui le mettent au premier plan de la physique théoriquecontemporaine.

Ce n’est que quelques années plus tard que Feynman comprit qu’il pouvaitappliquer ses idées à une formulation variationnelle de la mécanique quan-tique non relativiste. Il y a deux piliers dans cette approche. Tout d’abord,Feynman s’intéresse non pas à l’état des systèmes mais à l’amplitude des pro-

19. Ce chapitre n’est pas reproduit dans le présent polycopié.

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0.7. LA PÉRIODE MODERNE, DE LAGRANGE À EINSTEIN ET À FEYNMAN 27

cessus. C’est une attitude plus réaliste dans la mesure où tout phénomène,toute expérience, consiste en un processus. Ensuite, Feynman pose le pro-blème de la mécanique quantique dans l’espace-temps. Le principe de Feyn-man consiste à poser que, de façon générale, dans un dispositif quelconque,la phase de l’amplitude correspondant à un chemin donné est l’action clas-sique le long de ce chemin divisée par la constante de Planck ~. La sommede toutes les amplitudes réalisant le processus considéré est un objet ma-thématique compliqué que l’on nomme une intégrale de chemins, sur laquellerepose tout le formalisme. Feynman montre que l’on obtient ainsi les relationsd’Einstein et de Broglie, ainsi que l’équation de Schrödinger, les observableset toute la mécanique quantique usuelle. La physique statistique a profité,elle aussi, du concept d’intégrale de chemins. D’innombrables résultats ontété obtenus, et cet outil joue un rôle central dans la théorie quantique deschamps contemporaine.

Si l’on considère des systèmes et processus où l’action S(b, a) classiqueest macroscopique, c’est-à-dire beaucoup plus grande que la constante dePlanck ~, la contribution de chemins qui peuvent paraître très proches l’unde l’autre au sens classique, mais tels que la différence de l’action calculéesur ces chemins soit, elle aussi, beaucoup plus grande que ~, va être, avec uneforte probabilité, en interférence destructive. La contribution de l’ensemblede tels chemins à l’intégrale sera par conséquent nulle, chacun annulant lacontribution d’un autre.

Mais, bien entendu, au voisinage de la trajectoire classique xcl(t), l’actionScl(b, a) est stationnaire. Par conséquent, seuls contribuent de façon appré-ciable les chemins le long desquels l’action S(b, a) est suffisamment proche del’action classique Scl(b, a), la différence étant nettement inférieure à l’unité~. Autrement dit, dans ces conditions, seul contribue un voisinage infinité-simal de la trajectoire classique, impossible à résoudre expérimentalementdans ses détails. La « probabilité » de la trajectoire classique est par consé-quent égale à un, celle de toute autre trajectoire imaginable et distinguableexpérimentalement de la trajectoire classique est nulle. On voit ainsi la mé-canique classique apparaître comme la limite de la mécanique quantique,pour des actions macroscopiques. En outre, nous verrons que l’amplitude sa-tisfait identiquement l’expression (moderne) du principe de Huygens-Fresnelen optique.

Par conséquent, le principe de Feynman porte en lui une esthétique uni-ficatrice étonnante après les 5 chapitres précédents. Il consiste à prendreen compte, dans le calcul de l’amplitude d’un processus quelconque, le plus

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28 Avant-Propos

grand « nombre » de chemins possibles, avec la contrainte que des cheminstrop éloignés donnent des interférences destructives. On peut se représentercela comme le fait qu’une amplitude est d’autant plus importante que le « vo-lume » de l’ensemble des voies qui y contribuent en cohérence de phase, estgrand. De ce point de vue, la phase d’une amplitude prend un sens physiqueet une importance substantielle qu’on ne mesure peut-être pas suffisamment.

***

Jean-Louis BasdevantParis, mai 2004

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Chapitre 1

Principes variationnels

La nature agit toujours par les voies les plus courtes.Pierre de Fermat

Ce qui est remarquable dans les principes variationnels est double. D’unepart, ils présentent les structures et processus naturels comme résultant d’unprincipe d’optimalité, de l’autre, ils sont universels . Toutes les lois physiquespeuvent s’exprimer sous cette forme globale. Elle permet de retrouver les loislocales, mais, plus riche et plus puissante, elle dégage les principes fondamen-taux des lois qu’elle manipule. Les principes variationnels ont en commun deprésenter les phénomènes naturels comme des problèmes d’optimisation souscontraintes. L’idée fondatrice dans la physique moderne et sa formalisation,proviennent de Fermat et du principe qu’on lui doit en optique géométrique.Fermat lui-même l’appelle principe d’économie naturelle. Le principe de Mau-pertuis nous apparaît comme une prolongation du principe de Fermat versla mécanique. Sa généralisation sous la forme du principe de moindre actionpar Euler, Lagrange et ensuite Hamilton lui a donné sa forme définitive souslaquelle il régit de nos jours toute la physique fondamentale.

La mise à jour des concepts et principes fondamentaux de la mécaniques’est effectuée au 17e siècle. Copernic ayant donné la notion de repère en 1543,Galilée énonce le principe d’inertie en 1638 dans son grand ouvrage Discorsie dimostrazioni mathematiche intorno a due nove scienze. 1 Un corps soumisà aucune force a une vitesse constante. Le mouvement rectiligne uniforme estun état relatif à l’observateur, et non un processus. C’est la variation de lavitesse qui est un processus résultant d’une action extérieure. Nombreux sont

1. Discours et démonstrations mathématiques concernant deux sciences nouvelles.

29

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30 Principes variationnels

ceux qui participèrent à cette évolution : Tycho Brahe, Kepler, Descartes, lePère Mersenne, Roberval, Huygens, Varignon etc.

Le couronnement vint avec la synthèse de Newton, en 1687, les "Philoso-phiae Naturalis Principia Mathematica". Newton y posa ses 4 lois : principed’inertie, loi de composition des forces, proportionnalité de l’accélération etde la force, principe de l’action et de la réaction. Il formula, par ailleurs, laloi universelle d’attraction gravitationnelle qui lui permettait d’expliquer leslois de Kepler et le mouvement des corps célestes. Ce mouvement céleste,complètement imbriqué dans la notion de temps, hantait les hommes depuisqu’ils observaient le ciel. L’homme savait maintenant prédire l’état du cielavec une précision vertigineuse !

Mais on n’en resta pas là. A la suite de la synthèse newtonienne, le XVIIIeet le XIXe siècle furent marqués par une aventure étonnante. Sous l’impul-sion de d’Alembert, de Maupertuis, des frères Bernoulli (notamment Daniel),d’Euler et de Lagrange, puis de Hamilton, on découvrit la véritable structurede la mécanique gouvernée par un principe variationnel global.

D’Alembert, qui le premier avait compris l’importance du concept abs-trait de masse au travers de la quantité de mouvement et de sa conservation,s’attaqua au concept abstrait de force introduit par Newton. Pour lui, lemouvement est le seul phénomène observable, tandis que la « causalité mo-trice » reste une abstraction. D’où l’idée d’étudier non pas telle trajectoireparticulière de la théorie mais l’ensemble des mouvements qu’elle prévoit(conception tout à fait moderne des forces, ou interactions).

Le « Principe de la moindre quantité d’action », énonçé en 1744 parMaupertuis pour la mécanique marque une date historique dans l’évolutionde ces idées en physique et, à l’époque, dans la philosophie. Le couronnementvint avec Lagrange en 1788, un siècle après les Principia. Lagrange publia,dans sa « Méchanique Analitique », une nouvelle formulation de la mécaniqueoù il mit en relief cette structure globale. 2

«On ne trouvera point de Figures dans cet ouvrage. Les méthodes que j’yexpose ne demandent ni constructions, ni raisonnements géométriques ouméchaniques, mais seulement des opérations algébriques, assujetties à unemarche régulière & uniforme. Ceux qui aiment l’Analyse, verront avec plaisirla Méchanique en devenir une nouvelle branche, & me sauront gré d’en avoir

2. Il y a de nombreux livres sur la mécanique analytique. Nous recommandons, bienentendu, le « grand classique » de Landau et Lifshitz [9], le remarquable ouvrage deHerbert Goldstein Classical Mechanics [10] aussi clair que complet, et l’ouvrage moderneen langue française de Guignoux et Silvestre-Brac [11].

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1.1. PRINCIPE DE FERMAT 31

étendu ainsi le domaine. » écrivait M. de La Grange dans sa MéchaniqueAnalitique.

Dans la partie 1 de ce chapitre, nous reprenons le principe de Fermat, etnotamment la démonstration par ce dernier des lois de la réfraction. Fermatne connaissait pas la vitesse de la lumière et les indices de réfraction. Ensupposant que le temps mis par la lumière à parcourir une certaine distancedans un milieu est proportionnel à la « résistance » de ce milieu au passagede la lumière, Fermat énonça à la fin de 1661 son principe de moindre temps.Il l’appella « principe d’économie naturelle ». On sait que ce principe ex-plique les rayons courbes, responsables des mirages, qui ne peuvent pas êtreexpliqués par les lois de Snell-Descartes. Nous passons en revue qualitativequelques exemples.

Dans la partie 2, nous exposerons le « Principe de la moindre quantitéd’action », énonçé en 1744 par Maupertuis pour la mécanique qui carac-térise une trajectoire physique par le fait que la circulation de la quantitéde mouvement le long d’une trajectoire physique est minimale. Le principes’applique au cas où l’énergie est conservée.

La partie 3 expose finalement le principe de moindre action de Lagrangeet Hamilton comme principe fondateur de la mécanique analytique. Sous saforme généralisée à la théorie des champs ce principe est même devenu unprincipe fondamental de toute la physique ! Lagrange propose de déterminerla trajectoire effectivement suivie par la particule si, partant de r1, à l’instantt1, elle arrive en r2 à t2 , au lieu de déterminer sa position r(t) et sa vitesse v(t)à l’instant t connaissant son état initial r(0),v(0). C’est la même démarcheque celle de Fermat pour les rayons lumineux. Le principe qui est à l’originede la réponse à cette question est celui de moindre action. L’introduction àce nouveau concept d’action est donc un des objectifs principaux de ce cours.

1.1 Principe de Fermat

Comme nous l’avons dit, tout est né vers 1637 d’une dispute entre Des-cartes et Fermat à propos de la notion de démonstration, à la suite de lapublication de la Dioptrique dans le Discours de la Méthode. Les lois deDescartes prévoient quel sera le chemin suivi par un rayon lumineux initialdonné. Fermat adopte un point de vue plus général. Il se pose la questionde déterminer le chemin effectivement suivi par la lumière pour aller de A àB. Ce point de vue permet, on le sait, d’expliquer les rayons courbes et les

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32 Principes variationnels

mirages, ce que les lois de Descartes ne peuvent pas faire.

Fermat comprend (comme l’avait fait Héron d’Alexandrie) que la loi dela réflexion est une propriété géométrique de la longueur optique des rayons.La démonstration est schématisée sur la figure 1.1.

Figure 1.1 – Rayons lumineux possibles entre l’émetteur A et l’observateur Blorsqu’il y a réflexion sur un plan. B’ étant le symétrique de B par rapport aumiroir, la longueur AOB’ est la même que la longuer de AOB. Le chemin le pluscourt entre A et B’ est une ligne droite. Un chemin AFB est plus long quel quesoit F 6=O.

Soit un émetteur A et observateur B. On suppose que la lumière émise parA est réfléchie par un miroir plan avant d’atteindre B. Soit B’ le symétriquede B par rapport au miroir, et O l’intersection du miroir et de la droite AB’(figure 1.1). La longueur AOB’ est la même que la longuer de AOB. Le cheminle plus court entre A et B’ est bien évidemment une ligne droite. Un cheminAFB où F 6=O est tel que par inégalité triangulaire (ou par définition d’uneligne droite) AF+FB’>AB’, et cela quelque soit F. La géométrie élémentairemontre alors que les angles d’incidence i et de réflexion r sont égaux pour lechemin AOB.

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1.1. PRINCIPE DE FERMAT 33

1.1.1 Réfraction

Concernant les lois de la réfraction, Descartes avait été obligé de supposerque la vitesse de la lumière dans la matière (dans un milieu dense) étaitsupérieure à celle dans le vide (ou dans un milieu dilué) 3. C’est cela, toutautant que le manque de rigueur de la « démonstration » de Descartes, quiavait fâché Fermat. Celui-ci était convaincu que l’on pouvait faire les chosescorrectement : « Il me semble qu’un peu de géométrie pourra nous tirerd’affaire ».

Poussé par les critiques des partisans de Descartes, Fermat ne résolut leproblème de la réfraction que beaucoup plus tard, en 1661. L’essentiel deson raisonnement tient dans l’hypothèse que la vitesse de la lumière dans unmilieu dense est, au contraire, inférieure à celle dans un milieu dilué.

Soit (xOy) le plan séparant les deux milieux, d’indices n1 et n24. La

source est en A, l’observateur en B, comme représenté sur la figure (1.2).Soient H et H ′ les projections de A et B sur l’axe x. On note h la distancede A à la surface et h′ celle de B. La distance HH ′ est l. On considère unchemin AOB et on note x la distance HO. Il s’agit de minimiser le cheminoptique n1AO + n2OB. Par le théorème de Pythagore, on a

AO2 = h2 + x2 , OB2 = h′2 + (l − x)2 .

Le temps T mis par la lumière pour parcourir ce chemin est

T = (n1AO + n2OB)/c . (1.1)

Fermat, dans sa preuve, démontre que pour tout chemin voisin AO′B, quis’obtient de AOB par un déplacement O → O′ sur l’axe horizontal, le tempsde parcours T ′ ne diffère de T que par une quantité de deuxième ordre dansla distance OO′ [6]. Pour nous, connaissant le calcul différentiel, il est plussimple à chercher x tel que (1.1) soit minimal. En dérivant cette expression

3. Cette idée provient vraisemblablement du fait que beaucoup de dioptres étudiésétaient des liquides dont la surface est horizontale, c’est-à-dire perpendiculaire à la direc-tion de la gravité. Comme le rayon lumineux se rapproche de la verticale lorsqu’il passe,par exemple, de l’air dans l’eau, il semblait intuitif de supposer qu’il « tombait » plus vite.

4. Fermat ne connaissait la vitesse de la lumière ni les indices de réfraction ; il parlaitseulement de la « résistance » d’un milieu dense au passage de la lumière. Il supposait quele temps mis à parcourir une distance L dans le milieu est proportionnel à cette résistancece qui lui paraissait plus conforme au bon sens que l’inverse.

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34 Principes variationnels

1

2

i

i

φ

φ1

2

h

h’

n2

n1

A

B

HO H’

x

Figure 1.2 – Rayon lumineux possible entre l’émetteur A et l’observateur Blorsqu’il y a réfraction par une surface plane séparant deux milieux d’indices n1et n2. H et H ′ sont les projections de A et B sur cette surface. On note h ladistance de A à la surface et h′ celle de B. La distance HH ′ est l. On considère unchemin AOB et on note x la distance HO. Il s’agit de minimiser le chemin optiquen1AO + n2OB.

par rapport à x, et en écrivant que la dérivée dT/dx est nulle, on obtient

n1 x√h2 + x2

=n2 (l − x)

h′2 + (l − x)2. (1.2)

Mais, bien évidemment,

x√h2 + x2

= cos φ1 = sin i1 , et(l − x)

h′2 + (l − x)2= cos φ2 = sin i2 ,

(1.3)où les angles φ1 et φ2 sont indiqués sur la figure, et i1 et i2 sont les anglesd’incidence et de réfraction. Par conséquent, on obtient la loi de Descartes-Snell

n1 sin i1 = n2 sin i2 . (1.4)

En outre, on voit que cet extremum est bien un minimum : d2T/dx2 > 0.Ce résultat fascine Fermat : Le fruit de mon travail a été le plus extraor-

dinaire, le plus imprévu et le plus heureux qui fût jamais. Car [...] j’ai trouvéque mon principe donnait justement et précisément la même proportion desréfractions que M. Descartes a établie. A la fin de 1661, Fermat écrit son

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1.1. PRINCIPE DE FERMAT 35

principe de moindre temps, qui déclenche tout. Il l’appelle « principe d’éco-nomie naturelle » en ajoutant « la nature agit toujours par les voies les pluscourtes ». Comme nous l’avons dit, ce principe aura un grand retentissementau 18e siècle. Il sera repris par Maupertuis en mécanique.

Sauvetage en mer

Le résultat ci-dessus se transpose à quantité de situations. Un exemple,parmi d’autres, est celui du trajet optimal que doit suivre un sauveteur, surune plage puis dans l’eau, pour aller secourir un baigneur en difficulté. Lavitesse du sauveteur sur terre, v1, et dans l’eau, v2, ne sont pas les mêmes.La trajectoire correspondante, qui se schématise comme en figure 1.2, obéità

sin i1/v1 = sin i2/v2 .

1.1.2 Rayons courbes

Considérons un problème bidimensionnel (xOz) , comme la propagationde la lumière dans une atmosphère fixe, mais de densité variable, si bien quel’indice de réfraction varie continûment d’un point à un autre. Le schéma estreprésenté sur la figure 1.3.

Les rayons se propagent selon des courbes et non des droites, et la positionangulaire optique d’un objet ne correspond pas à sa position angulaire géomé-trique. Ces rayons courbes, qui sont responsables des mirages, ne peuvent pass’expliquer par les lois de Snell-Descartes. Du point de vue mathématique, ils’agit de trouver la trajectoire z = Z(x) d’un rayon lumineux se propageantdans un milieu d’indice n(z, x) , ou encore n(z) si le système est invariantpar translation selon Ox , et allant d’un point d’émission A en (z0, x0) à unobservateur B en (z1, x1). Le temps dτ mis par la lumière pour aller de [x, z]à [x+ dx, z + dz] est

dτ = n(z)dℓ

c= n(z)

√dz2 + dx2

c.

Nous devons trouver la fonction Z(x) qui minimise le temps passé sur latrajectoire, c’est-à-dire, qui minimise l’intégrale

T =1

c

∫ B

A

n dℓ =1

c

∫ B

A

n(z)√

1 + z′(x)2 dx (1.5)

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36 Principes variationnels

Figure 1.3 – Rayon lumineux entre l’émetteur A et l’observateur B dans unmilieu d’indice de réfraction variable. La coordonnée z est la hauteur, x la distancehorizontale. On suppose le problème invariant par translation dans la direction yperpendiculaire à la figure. La direction apparente du point A vu par B est cellede la tangente du rayon arrivant en B.

compte tenu des contraintes : z(x = x0) = z0 et z(x = x1) = z1. Nous avonsposé z′(x) = (dz/dx)(x) .

Au chapitre 2 nous déduirons une équation différentielle pour la trajec-toire temporelle du rayon lumineux à partir de (1.5) qu’on sait résoudreexplicitement dans des cas particuliers. Mais qualitativement, ce qui va sepasser est déjà évident. Si n(z) augmente avec z le rayon aura une courburepositive comme indiqué sur la figure 1.3. Pour n(z) diminuant avec z ce serale contraire. Et l’effet sera plus prononcé pour un gradient important de n(z) .

1.1.3 Mirages

C’est dans ce type de situation que l’on observe des mirages. On saitqu’une route fortement chauffée l’été peut apparaître par endroits commeun lac. C’est un mirage du type schématisé sur la figure 1.3. L’indice deréfraction est faible au niveau de la route où l’air est moins dense. Il est plusélevé en hauteur où la température est plus faible. Le « lac » est le refletdu ciel. Dans ce cas de figure, on dit qu’il y a un mirage inférieur . L’image

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1.1. PRINCIPE DE FERMAT 37

Figure 1.4 – Schémas de mirages inférieur (haut) et supérieur (bas).

apparente est au dessous de l’objet. Cela est décrit sur la figure 1.4.

Comme on le comprend sur l’exemple simple ci-dessus, une dépendancede l’indice de réfraction n(z) plus complexe donnera lieu à des phénomènesvariés. Des variations d’indice peuvent se produire dans le sens inverse lorsquela température en altitude est supérieure à la température à un niveau in-férieur. Ce type de situation, qui se présente par exemple pour des rayonslumineux passant au voisinage du sommet d’une colline chauffée, provoquedes mirages supérieurs. On peut alors voir un objet caché (au sens géomé-trique) derrière une colline.

On voit le soleil se coucher bien après qu’il ait franchi l’horizon géogra-phique. En effet, comme le montre la figure 1.5, lorsque le soleil est au voisi-

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38 Principes variationnels

Direction apparente du soleil

Atmosphère

Direction du soleil

Rayon lumineux

Terre

Figure 1.5 – Directions réelle et apparente du soleil au voisinage de l’horizon.Elles diffèrent d’environ un demi degré.

nage de l’horizon, ses rayons traversent un milieu d’indice fortement variable,plus dense au sol qu’en altitude, avec en outre de possibles fluctuations atmo-sphériques en fonction de l’altitude et du lieu. Au coucher du soleil, l’angleentre la direction optique du soleil et sa direction géométrique est d’environun demi degré. Sa direction géométrique est bien au dessous de l’horizon(voir la référence [5] pour d’autres exemples).

Les mirages sont particulièrement nombreux dans l’arctique et dans l’antar-ctique où pendant une durée très longue, la ligne de visée traverse une épais-seur d’atmosphère considérable. Sur cette distance, la densité, la compositionet la température de l’atmosphère peuvent varier énormément. Il en résultedes effets spectaculaires. La figure 1.6 est une image prise lors d’une expé-dition allemande du Germania dans l’arctique en 1888. Elle est très richecar, pour chacun des deux bateaux, il y a deux mirages supérieurs, inversésl’un par rapport à l’autre. Entre les deux bateaux, on distingue un iceberg.Cette image fait évidemment penser à la légende du Hollandais volant (oudu Vaisseau fantôme) des marins du Cap de Bonne espérance (à l’autre boutdu monde) 5. La figure 1.7 montre deux mirages supérieurs photographiés enScandinavie par Pekka Parviainen, un mirage du soleil et un mirage d’uncargo.

Les variations d’indice de l’atmosphère ne sont pas seulement à l’origine

5. Le « Hollandais volant » était un navigateur prestigieux. Il prétendait pouvoir dou-bler le Cap de Bonne Espérance quelles que fussent les conditions météorologiques. Pendantdes années après sa disparition dans une tempête épouvantable, d’innombrables naviga-teurs affirmèrent avoir revu son navire, notamment dans le ciel, preuve que les élémentsn’avaient rien pu contre lui.

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1.1. PRINCIPE DE FERMAT 39

Figure 1.6 – Mirages supérieurs dédoublés observés par des marins du Germaniapendant une expédition dans l’arctique en 1888. Avec l’aimable autorisation deRoger Lapthorn ; tous droits réservés.

des mirages. Ils provoquent aussi des effets de lentille qui entraînent desgrandissements apparents considérables. On peut ainsi voir des îles, bateaux,rivages distants de plusieurs centaines de kilomètres. Finalement l’indice varieavec la fréquence de la lumière de façon que les effets sont différents selon ladécomposition spectrale de la lumière. Cet effet ajouté à la diffusion de lalumière dans l’atmosphère terrestre est à l’origine du quasi-mythique « rayonvert » au coucher du soleil [1] qu’on peut observer et photographier (voirPekka Parviainen dans http ://virtual.finland.fi/finfo/english/mirage2.html).

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40 Principes variationnels

Figure 1.7 – Mirages supérieurs du soleil au couchant et d’uncargo dans l’arctique. Avec l’aimable autorisation de Pekka Parviainen<[email protected]> ; tous droits réservés. Voir aussi le sitehttp ://virtual.finland.fi/finfo/english/mirage2.html

1.2 Principe de Maupertuis

C’est en 1744 que Maupertuis énonça pour la première fois le principede la moindre quantité d’action pour la mécanique. Même si l’énoncé et lajustification proposés initialement par Maupertuis sont confus, il s’agit làd’une date historique dans l’évolution des idées en physique et, à l’époque,dans la philosophie. Pour une particule de masse m, de vitesse v, l’action deMaupertuis est le produit de trois facteurs, la masse, la vitesse, et la distanceparcourue. En fait, il s’agit de la circulation de la quantité de mouvement lelong de la trajectoire : A =

mv dl. La formulation et la démonstration duprincipe de Maupertuis furent données peu après par Euler.

En termes actuels on peut considérer le principe de Maupertuis commeun cas particulier du principe de moindre action, qui sera exposé au para-

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1.3. LE PRINCIPE DE MOINDRE ACTION 41

graphe suivant. On se limite aux systèmes conservatifs (c’est à dire les forcesdérivent d’un potentiel), et on demande que l’énergie soit une constante dumouvement, c’est à dire conservée. Pour un seul point matériel de masse mplacé dans un potentiel V (r) on note v la vitesse et v sa norme. Si son énergieest une constante du mouvement notée E, sa valeur est

E =1

2mv2 + V (r) .

L’action de Maupertuis est alors

Aa,b =

∫ b

a

mv dl ≡∫ b

a

2m(E − V ) dl , (1.6)

où dl est l’élément de longueur sur la trajectoire. Le principe de Maupertuisdit que la trajectoire effectivement suivie par la particule pour aller de a à bavec une énergie E fixée est celle qui rend (1.6) minimum.

Dans le chapitre 2 nous verrons que les équations de mouvement de New-ton sont en accord avec ce résultat. Ici nous pouvons déjà constater la par-faite analogie de (1.6) et de (1.5) qui se transforment l’une dans l’autre parle remplacement

2m(E − V ) ↔ n/c .

Ceci veut dire que la trajectoire sélectionée par le principe de Maupertuisest une trajectoire minimale par rapport à une échelle de longueur qui varielocalement comme

2m(E − V ), de la même manière que la trajectoire deFermat minimise la longueur en unités proportionnelles à l’indice n . Dansles deux cas on peut donc décrire les trajectoires sélectionnées comme tra-jectoires minimales par rapport à une métrique qui varie localement selonles propriétés physiques du système considéré. On entrevoit ainsi que le pro-blème mécanique est ramené à un problème géométrique : le mouvementd’une particule, soumise à des forces dérivant d’un potentiel, dans un es-pace plat euclidien, peut être considéré comme un mouvement libre d’uneparticule dans un espace courbe (elle suit alors des trajectoires de longueurminimale ou «géodésiques»). Einstein avait cette idée en tête dès 1908 lors-qu’il construisait la Relativité Générale. Pour plus d’explications sur ce pointon peut se référer à [1].

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42 Principes variationnels

trajectoire réelle X(t)

trajectoire possible x(t) x1, t1

x2, t2

Figure 1.8 – Exemples de trajectoires partant de x1 à l’instant t1 et aboutissanten x2 à l’instant t2. Parmi toutes ces trajectoires, la trajectoire physique effective-ment suivie par la particule est celle qui rend l’action S extrémale.

1.3 Principe de moindre action

Dans sa Méchanique Analitique, Lagrange propose de considérer les pro-blèmes de mécanique de la façon suivante. Au lieu de déterminer la positionr(t) et la vitesse v(t) d’une particule à l’instant t connaissant son état initialr(0),v(0), il pose la question : quelle est la trajectoire effectivement suiviepar la particule si, partant de r1, à l’instant t1, elle arrive en r2 à t2 ?

Pour simplifier, considérons d’abord le cas d’une seule dimension d’espace.Parmi l’infinité de trajectoires possibles (voir figure 1.8), quelle est la loi quidétermine la bonne ? Lagrange sait qu’on peut répondre à cette question parle « principe d’économie naturelle » de Fermat, repris par Maupertuis.

Le principe variationnel comme nous le présentons ici n’a pas la forme uti-lisée par Lagrange 6. Il a été reformulé par Hamilton en 1834. Nous l’exposonssous cette forme, plus générale que celle proposée par Lagrange.

On pose

1. Tout système mécanique est caractérisé par une fonction de Lagrangeou lagrangien L(x, x; t), dépendant de la coordonnée x, de sa dérivéepar rapport au temps x = dx/dt, et éventuellement du temps 7. Les

6. le principe variationnel de Lagrange s’applique aux systèmes conservatifs, et portesur l’action réduite (voir ch. 4.4.2)

7. pour s degrés de liberté nous avons évidemment L(x1, . . . , xs, x1, . . . , xs; t)

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1.3. LE PRINCIPE DE MOINDRE ACTION 43

quantités x et x sont appelées variables d’état. Par exemple, pour lemouvement unidimensionnel d’une particule dans un potentiel V (x, t),nous verrons que le lagrangien vaut

L =1

2mx2 − V (x, t) . (1.7)

2. Pour toute trajectoire x(t), partant de x1 à l’instant t1 et allant vers x2à l’instant t2 on définit l’action S par l’intégrale

S =

∫ t2

t1

L(x, x; t) dt . (1.8)

Le principe de moindre action dit que la trajectoire physique ef-fectivement suivie X(t) est telle que S est minimale, ou, plus généra-lement, extrémale.

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44 Principes variationnels

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Chapitre 2

Mécanique analytique et calcul

variationnel

Au commencement était l’action.Johann Wolfgang von Goethe

Nous avons établi le principe de base de la mécanique analytique. Il nousfaut maintenant analyser ses conséquences. Cela nous amènera naturellementau coeur mathématique de notre propos : le Calcul variationnel d’Euler etLagrange qui sera présenté en partie 1. C’est un pan étonnant des mathéma-tiques, tant par son côté fédérateur que par le nombre de questions auxquellesil a permis de répondre. Nous en déduirons les équations d’Euler-Lagrange quisont les équations de mouvement de la mécanique analytique. Nous n’aborde-rons pas les détails mathématiques du calcul variationnel, amplement traitésdans la littérature [7], mais passerons rapidement aux résultats physiques.

Dans la partie 2 nous analysons la forme du lagrangien dans les situa-tions le plus simples. Elle se déduit largement de concepts de symétrie etd’invariance.

La partie 3 est consacrée aux lois d’invariance des phénomènes physiqueset aux lois de conservation qui en découlent. Le formalisme lagrangien estparticulièrement bien adapté pour traiter de cette question. Nous verronscomment la conservation de l’énergie est liée à l’homogénéité du temps, cellede l’impulsion à l’homogénéité de l’espace, celle du moment cinétique à sonisotropie. Au cours de cette discussion, nous introduirons la notion fondamen-tale de moment conjugué de Lagrange ou encore d’impulsion généralisée, quijoue un rôle central dans toute la suite.

45

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46 Mécanique analytique et calcul variationnel

Ensuite nous introduirons dans la partie 4 un outil technique important,dû lui aussi à Lagrange, les multiplicateurs dits de Lagrange.

Puis dans la partie 5, nous passerons en revue quelques applications.D’abord, nous revenons - muni du calcul variationnel - aux rayons courbes.Ensuite nous regardons la forme d’une corde pesante, les lois de Kirchhoff,l’équation de Poisson en électrostatique et les bulles de savon.

2.1 Le calcul variationnel d’Euler et Lagrange

Considérons d’abord un système uni-dimensionnel. Le principe de moindreaction d’Euler et Lagrange prétend d’abord que la dynamique du système estdéterminée par un lagrangien L(x, x; t) dépendant de la position, de la vi-tesse et (éventuellement) explicitement du temps. La trajectoire physique estsélectionnée par le fait que l’action S =

∫ t2t1

L(x, x; t) dt soit extrémale.Le problème posé est donc de trouver une fonction, ou une famille de fonc-

tions, qui minimise une certaine intégrale. Sa résolution se fait par le calculdes variations ou encore le Calcul variationnel. On le doit à Euler qui en avaitcompris le fonctionnement et à Lagrange qui apporta d’importantes contri-butions. Le lecteur pourra consulter le cours de Jean-Pierre Bourguignon [7]comme traité mathématique du calcul variationnel.

Nous cherchons donc la fonction x(t) d’une variable réelle t qui minimise(ou maximise) l’intégrale

S =

∫ t2

t1

L(x(t), x(t); t) dt , (2.1)

où les extrémités t1 et t2 sont fixes, où x(t) ≡ dx/dt et où le lagrangien L estune fonction connue 1. Supposons qu’il existe une solution, la vraie trajec-toire, que nous notons x = X(t). Considérons une trajectoire x(t) infinimentvoisine de X(t), partant elle aussi de x1 à t1, et aboutissant en x2 à t2

x(t) = X(t) + δx(t) , x(t) = X(t) + δx(t) , δx(t) =d

dtδx(t) (2.2)

1. C’est exactement, faut-il le préciser, le type de problème posé dans l’équation 1.5,sachant qu’en (1.5) la variable x prend le rôle de t et la variable z prend le rôle de x . Onremarque que la fonction n(z)

1 + z′(x)2 en (1.5) ne dépend pas de x qu’implicitement

à travers de z(x) , et non pas explicitement, comme il serait le cas, par exemple, si n étaitfonction de x et de z en même temps.

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2.1. LE CALCUL VARIATIONNEL D’EULER ET LAGRANGE 47

avec par hypothèseδx(t1) = δx(t2) = 0 . (2.3)

Au premier ordre en δx, la variation de S est

δS =

∫ t2

t1

(

∂L∂x

δx(t) +∂L∂x

δx(t)

)

dt . (2.4)

Le second terme peut être intégré par parties puisque par définition δx =(d/dt)δx. Les termes tout intégrés ne contribuent pas, car δx(t1) = δx(t2) =0. Par conséquent, la variation δS s’écrit :

δS =

∫ t2

t1

(

∂L∂x

− d

dt

(

∂L∂x

))

δx(t) dt . (2.5)

Le principe de moindre action affirme que δS doit être nul quelle que soit lavariation infinitésimale δx(t). Par conséquent, l’équation du mouvement quidétermine la trajectoire effectivement suivie, est l’équation différentielle dusecond ordre appelée

Equation d’Euler-Lagrange :d

dt(∂L∂x

) =∂L∂x

.

(2.6)On vérifiera sans peine sur le cas simple (1.7) que l’on retrouve bien l’équationdu mouvement habituelle

mx = −∂V∂x

≡ f

où f est la force.La généralisation à s degrés de liberté (xi, xi), i = 1, . . . , s est immédiate.

Le lagrangien est une fonction L(xi, xi; t) des variables xi et xi et(éventuellement) du temps t, et les équations du mouvement sont donnéespar l’ensemble des équations de Euler-Lagrange

d

dt

(

∂L∂xi

)

=∂L∂xi

i = 1, . . . , s . (2.7)

Pour une particle dans l’espace R3 nous employons la notation

∂L∂r

≡ ~∇rL =

∂L∂x∂L∂y∂L∂z

, où r =

xyz

,∂L∂v

≡ ~∇vL =

∂L∂vx∂L∂vy∂L∂vz

(2.8)

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48 Mécanique analytique et calcul variationnel

de façon que l’équation (2.7) s’écrit

d

dt

(

∂L∂v

)

=∂L∂r

. (2.9)

2.2 Le lagrangien

Non-unicité du Lagrangien

Pour savoir utiliser le principe de moindre action il faut évidemment com-prendre quel lagrangien s’associe à quel système. La première remarque à faireest peut-être décourageante, puisque le lagrangien d’un système donné n’estpas unique. On vérifiera notamment que si on lui ajoute une dérivée totalepar rapport au temps d’une fonction quelconque f(xi, t),

L′ = L+d

dtf(xi, t) (2.10)

les équations du mouvement demeurent inchangées. Ceci suit directement dufait que l’intégrale du terme ajouté ne change pas dans une variation desxi(t) qui satisfait δxi(t1) = δxi(t2) = 0 2.

Rappelons qu’il est important de distinguer la signification des derivéestotale d/dt et partielle ∂/∂t par rapport au temps. La dervivée totale d/dttient compte aussi de la dépendance en temps due à l’évolution temporelledes coordonnées et vitesses le long de la trajectoire. Pour une seule variablex

d

dtL(x, x; t) = ∂L

∂xx+

∂L∂x

x+∂L∂t

.

Au cas où ∂L∂t

6= 0 on parle d’un lagrangien qui dépend explicitement dutemps. On appelle «système isolé» un système lagrangien avec ∂L

∂t= 0 .

Forme du Lagrangien

Cherchons donc le lagrangien le plus simple associé à un système physiquedonné. Commençons par le cas le plus élémentaire, celui d’une particule libredans l’espace R3. Son lagrangien provient du principe d’inertie, ou encore del’invariance sous les transformations de Galilée (voir réf [9]) :

2. D’ailleurs on se convainc facilement de l’identité ddt

∂∂xi

dfdt

= ∂∂xi

dfdt

, pour vérifier ceconstat explicitement.

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2.2. LE LAGRANGIEN 49

1. Il n’y a pas d’origine des temps privilégiée, par conséquent ∂L/∂t = 0 .

2. Il n’y a pas d’origine d’espace privilégiée, par conséquent ∂L/∂xi = 0 .

3. Il n’y a pas de direction dans l’espace privilégiée ; cette invariance parrotation implique que L ne dépend que du carré de la vitesse, soitL(v2).Le forme la plus simple du lagrangien d’une particule libre est alorsL = Kv2 où K est une constante qu’on choisira comme étant égale àm/2. On obtient donc pour une particule libre

Le lagrangien d’une particule libre L =m

2v2 . (2.11)

On voit facilement qu’un choix plus général, sous la forme de L =f(v2) , (f différentiable), mène à la même équation du mouvement 3.

4. Dans ces conditions, dans un référentiel animé d’une vitesse constanteV par rapport au premier, le lagrangien devient

L′ =m

2(v +V)2 = L+

d

dt(mr ·V +mV 2t/2) ,

et les équations du mouvement sont les mêmes dans les deux référentielsd’après le paragraphe précédent, voir (2.10). On peut donc revenir à(2.11).

5. Revenant au cas d’une particule soumise à un champ de force, on voitque le terme d’énergie potentielle dans (1.7) n’est qu’une définition dela force. Nous souhaitons, bien entendu, retrouver la loi fondamentalede Newton, et ce choix nous le garantit lorsque les forces dérivent depotentiels.

6. GénéralisationLe lagrangien d’un ensemble de N points matériels dans un référentielinertiel, exposés au potentiel V (r1, . . . , rN ; t) - qui inclut les potentielsd’interaction entre particules - est

L =1

2

N∑

i=1

mi r2i − V (r1, . . . , rN ; t) . (2.12)

3. on excluera f(x) =√x

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50 Mécanique analytique et calcul variationnel

Fonctionnement du principe d’optimisation

Il est remarquable que les lois de la mécanique se déduisent d’un principevariationnel . La trajectoire physique est celle qui minimise ou optimise l’ac-tion. Cette optimisation apparaît ici comme réalisant un «compromis» entrel’effet de diverses contributions en «conflit» . En effet, en l’absence de force(V = cte dans (1.7)), S est minimum pour x =cte, c’est-à-dire que le mouve-ment est rectiligne uniforme. En l’absence d’inertie, au contraire, la particulese logera au maximum du potentiel à l’instant de départ pour en «revenir» àl’instant d’arrivée. La présence du potentiel peut être considérée comme unepropriété de l’espace qui courbe la trajectoire. Force et inertie apparaissentcomme étant en conflit. La particule suit un chemin de «longueur» minimum,cette longueur étant mesurée par l’action S.

Calcul variationnel et principe de Maupertuis

Nous verrons en 4.4.2 que le principe de Maupertuis se comprend commeun cas particulier du principe de moindre action. Ici nous voulons montrerque l’équation pour la trajectoire que nous en déduisons, est la même quecelle qu’on obtient de l’équation de Newton.

Regardons donc un système conservatif d’énergie conservée et revenons à(1.6) qui est l’analogue de (1.5). Supposons, pour simplifier les notations, quela trajectoire se situe dans le plan (xOz) , et qu’elle puisse être paramétréepar la coordonnée x . Dans ce cas la trajectoire s’obtient à l’aide du calculvariationnel, à partir du «lagrangien»

L(z(x), z′(x); x) =√

2m(E − V (z(x), x)) (1 + z′2)1

2 ,

où nous avons utilisé

dℓ =√dx2 + dz2 =

√1 + z′2 dx .

L’équation d’Euler-Lagrange

d

dx

∂L∂z′

=∂L∂z

nous donne après simplification 4

(−∂V∂x

) z′ + 2(E − V )z′′

1 + z′2= −∂V

∂z. (2.13)

4. On se souvient que la dérivée totale d/dx du potentiel donne dVdx

= ∂V∂zz′ + ∂V

∂x.

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2.3. INVARIANCES ET LOIS DE CONSERVATION 51

Pour vérifier que les équations de Newton

mx = −∂V∂x

, mz = −∂V∂z

définissent la même trajectoire, il faut éliminer le paramètre temps dans ceséquations : pour une courbe qui peut être paramétrée par la coordonnée xnous avons

z = z′ x , z = z′′ x2 + z′x .

Les équations de Newton permettent d’éliminer x et z, la conservation del’énergie z2 + x2 = 2

m(E − V ) et la première des équations précédentes per-

mettent d’éliminer x et z, de façon que la deuxième de ces équations peutfinalement se récrire sous la forme

−∂V∂z

= z′′2(E − V )

1 + z′2+ (−∂V

∂x) z′ (2.14)

qui n’est autre que (2.13).

2.3 Invariances et lois de conservation

Les lois d’invariance des phénomènes physiques sont fondamentales. Ellesforment l’ensemble de ce que l’on sait a priori sur la physique d’un problème.Elles impliquent des lois de conservation, qui jouent un rôle fondamental enmécanique au travers des intégrales premières correspondantes. Dans desproblèmes plus élaborés que ceux que nous avons considérés jusqu’ici, ellesconstituent le corpus de base pour construire le lagrangien d’un système(nous en avons donné un aperçu en discutant la forme du lagrangien libreci-dessus).

Un système à s degrés de liberté possède, a priori, 2s intégrales premières.En effet, l’évolution du système est complètement déterminée par la connais-sance des 2s conditions initiales xi(0), xi(0). Il y a donc, en principe, 2srelations entre les variables xi(t), xi(t) qui, à tout instant, permettent derecalculer xi(0), xi(0). De manière générale seul un sous-ensemble de cesrelations sont utiles en pratique.

2.3.1 Moments conjugués, impulsions généralisées

Afin de discuter les lois de conservation, nous introduisons la notion fon-damentale de moment conjugué de Lagrange. Pour un lagrangien donné les

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52 Mécanique analytique et calcul variationnel

quantités

pi =∂L∂xi

(2.15)

s’appellent moments conjugués des variables xi, ou encore impulsions géné-ralisées . Dans le cas simple (2.12), pi = mxi, mais cela cesse d’être vraidans des coordonnées non cartésiennes ou, comme nous le verrons, lorsqueles forces dépendent de la vitesse. On note que, d’après (2.7), l’évolutiontemporelle du moment conjugué pi est donné par

pi =∂L∂xi

, (2.16)

que l’on peut considérer comme la forme généralisée de la loi de Newton. Aucas où ri décrit la position de la particle i dans l’espace R3 nous employonsla notation (2.8) pour écrire

pi =∂L∂ri

. (2.17)

2.3.2 Changement de coordonnées, variables cycliques

Dans le formalisme lagrangien, on peut évidemment faire tout changementde variables

(x1, x2, . . . , xN) → (q1, q2, . . . , qN) ,

soit

L(xi, xi; t) → L′(qi, qi; t) := L(xi(qi), xi(qi, qi); t) .

Dans un changement de variables, les équations d’Euler-Lagrangegardent la même forme, et l’on définit le moment conjugué pi d’une va-riable qi par la relation

pi =∂L′

∂qi(2.18)

qui obéit à la même équation que (2.16) c’est-à-dire pi = ∂L′/∂qi . On appellecoordonnées généralisées un ensemble quelconque de coordonnées qi. Pourl’exemple (x, y, z) → (r, θ, ϕ) , voir l’exercice 2.7.

De façon générale, on nomme variable cyclique une variable qi qui nefigure pas explicitement dans le lagrangien L′, c’est-à-dire que

∂L′

∂qi= 0 .

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2.3. INVARIANCES ET LOIS DE CONSERVATION 53

Dans ce cas, le moment conjugué pi = ∂L′/∂qi est conservé pi = Cte. Larecherche de variables cycliques joue un rôle important dans la résolution desproblèmes de mécanique, en raison des lois de conservation qui en découlent.

2.3.3 Énergie et translation dans le temps

Supposons le système isolé, c’est-à-dire ∂L/∂t = 0. Une autre façond’énoncer cette hypothèse est de dire que le problème est invariant par trans-lation dans le temps, ou encore que le temps est homogène. Evaluons l’évo-lution de L(x, x) le long de la trajectoire x(t) effectivement suivie

dLdt

(x, x) = x(t)∂L∂x

+ x(t)∂L∂x

=d

dt

(

x(t)∂L∂x

)

(2.19)

où nous avons transformé le premier terme en tenant compte de l’équationd’Euler-Lagrange (2.6). On en déduit

d

dt

(

x(t)∂L∂x

− L)

= 0 . (2.20)

On appelle énergie E la valeur de la quantité

x(t)∂L∂x

− L resp.

s∑

i=1

xi(t)∂L∂xi

− L (2.21)

le long de la trajectoire physique. Par conséquent, pour un système isolé, ouencore lorsqu’il y a invariance par translation dans le temps, l’énergie estconservée. C’est une intégrale première du mouvement. Dans le cas (2.12),l’énergie est bien la somme de l’énergie cinétique et de l’énergie potentielle

E =N∑

i=1

mir2i

2+ V (r1, . . . , rN ; t) . (2.22)

En utilisant les moments conjugués de Lagrange, la définition de l’énergies’écrit

E =∑

i

pixi − L . (2.23)

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54 Mécanique analytique et calcul variationnel

2.3.4 Impulsion et translations dans l’espace

Supposons que le problème est invariant par translation dans l’espace.C’est le cas d’une particule libre, mais c’est également le cas d’un système departicules dont les interactions ne dépendent que des coordonnées relatives :V (ri− rj). Dans cette hypothèse, pour toute transformation infinitésimaleri → ri + ~ε le lagrangien est invariant

δL =∑

i

∂L∂ri

· ~ε = 0 ∀~ε , soit∑

i

∂L∂ri

= 0 . (2.24)

Pour un système dont le lagrangien est de la forme (2.12) avec un potentielV (ri− rj) , la relation (2.24) n’est autre que le principe de l’action et de laréaction de Newton. Soit, en effet, un système de deux particules interagissantau travers d’un potentiel V (r1 − r2), on obtient

f1 = −~∇1V = +~∇2V = −f2 . (2.25)

Cependant, le résultat (2.24) a une autre interprétation. Utilisant les défini-tions (2.15) des impulsions généralisées et les équations du mouvement, cetterelation s’écrit en effet

d

dt

N∑

i=1

pi ≡d

dtP = 0 (2.26)

où P est l’impulsion totale P =∑N

i=1 pi.L’invariance par translation dans l’espace implique la conservation de l’im-pulsion totale d’un système de particules.

On voit de la même manière que l’invariance par translations en directionx implique la conservation de Px, la composante selon x de P etc. de façonque la conservation P est correspond à 3 quantités conservées simultanément.

2.3.5 Moment cinétique et rotations

Considérons maintenant les rotations. Une rotation infinitésimale d’unangle δφ autour d’un axe porté par le vecteur unitaire u transforme les po-sitions et vitesses comme

ri → ri + δφ u× ri , ri → ri + δφ u× ri .

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2.3. INVARIANCES ET LOIS DE CONSERVATION 55

Dans cette transformation, la variation du lagrangien est

δL =∑

i

(∂L∂ri

· (δφ u× ri) +∂L∂ri

· (δφ u× ri)) (2.27)

ou encore

δL =

(

i

ri ×∂L∂ri

+ ri ×∂L∂ri

)

· u δφ .

S’il y a invariance par rotation, alors δL = 0 quel que soit δφ u. En revenantà la définition des moments conjugués et de leurs dérivées, on obtient enutilisant les équations du mouvement

i

(ri × pi + ri × pi) = 0

soitd

dt

i

ri × pi ≡d

dt

i

Li =d

dtL = 0 , (2.28)

où le moment cinétique (généralisé) Li de chaque particule et le momentcinétique (généralisé) total L sont définis par

Li = ri × pi , L =∑

i

Li . (2.29)

Nous avons donc montré :A l’invariance par rotation d’un système correspond la conservation du mo-ment cinétique total.

2.3.6 Symétries dynamiques

Un problème peut avoir des symétries, plus ou moins cachées, d’originedynamique. Nous verrons, au chapitre 4, les symétries multiples de l’oscil-lateur harmonique. Une symétrie bien connue dans le problème de KeplerV (r) = −g2/r, soit L = mv2/2 + g2/r, provient de la conservation du vec-teur de Runge-Lenz

A =p× L

m− g2

r

r(2.30)

où p est l’impulsion et L = r × p le moment cinétique de la particule enorbite. Dans le problème de Kepler, on doit déterminer six grandeurs à tout

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56 Mécanique analytique et calcul variationnel

instant : r(t), r(t). La conservation du moment cinétique et de l’énergie fixe 4de ces grandeurs. La conservation de la direction du vecteur de Runge-Lenzfixe une grandeur restante, voir l’exercice 4.8. Par conséquent la résolution duproblème ne nécessite pas de «quadrature» (ou intégration). Une conséquenceest que les trajectoires compactes sont fermées, ce qui est exceptionnel : seulsles potentiels harmonique (∝ r2) et newtonien (∝ 1/r) conduisent à cettepropriété.

2.4 Multiplicateurs de Lagrange

A ce stade nous rappelons rapidement un outil technique presqu’omni-présent dans le contexte de problèmes d’optimisation. De manière généralela quantitié qu’on cherche à optimiser est soumise à des contraintes qu’il fautrespecter 5. Une manière souvent commode de tenir compte des contraintesest d’introduire des multiplicateurs de Lagrange.

Un exemple simple serait de trouver le point le plus haut non pas d’unemontagne mais d’un chemin dessiné sur cette montagne. Mathématiquementce problème revient à trouver le maximum d’une fonction f(x, y) sous unecontrainte g(x, y) = 0 (qui détermine le chemin). Supposons que la contraintepeut s’écrire sous forme explicite y − y0(x) = 0 (au moins localement). Bienentendu, on peut injecter l’équation du chemin dans f et calculer x tel que

d

dxf(x, y0(x)) =

∂f

∂x+∂f

∂y

d

dx(y0(x)) = 0 . (2.31)

La méthode de Lagrange consiste par contre à introduire un nouveau para-mètre λ appelé multiplicateur de Lagrange et à chercher l’extrémum de lafonction

f(x, y) + λ g(x, y) . (2.32)

L’annulation des dérivées par rapport à x, y donne les équations

∂f

∂x+ λ

∂g

∂x= 0 ,

∂f

∂y+ λ

∂g

∂y= 0 . (2.33)

5. Un exemple important d’une telle situation est le principe de base de la thermo-dynamique à l’équilibre : l’équilibre thermique correspond à une situation qui maximise

l’entropie compte tenu des contraintes qu’on impose sur l’énergie, le volume ... de l’échan-

tillon considéré. Ce principe sera analysé en physique statistique.

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2.4. MULTIPLICATEURS DE LAGRANGE 57

Pour les solutions (x(λ), y(λ)) de ces équations on fixe λ de façon que lacontrainte soit respectée : g(x(λ), y(λ)) = 0 .Dans ce cas simple l’équivalence des deux méthodes se voit facilement :puisque (localement) g(x, y) = 0 ⇔ y − y0(x) = 0, on obtient pour (2.33)

∂f

∂x− λ

dy0dx

= 0 (1) ,∂f

∂y+ λ = 0 (2) , (2.34)

et l’élimination de λ entre (1) et (2) revient à l’équation de départ (2.31).L’avantage de la méthode de Lagrange consiste dans le fait qu’elle ne

demande pas d’exprimer la contrainte sous forme explicite, ce qui peut êtredifficile (voir l’exemple de la corde pesante ci-dessous), surtout pour desproblèmes à plusieurs variables. Cette forme explicite est indispensable dansle procédé pédestre (2.31).

La méthode de Lagrange se généralise à une fonction f(xi) d’un nombrequelconque de variables xi, i = 1, . . . , n reliées par un nombre quelconque pde contraintes indépendantes gk(xi) = 0, k = 1, . . . , p avec p < n . Elle serésume comme suit :i) On pose

F (x1, . . . , xn, λ1, . . . , λp) = f(xi) + λ1 g1(xi) + . . .+ λp gp(xi) ,

et on cherche les extrema de F en supposant les xi indépendantes. Oncherche donc les solutions du système à n équations ∂F/∂xi = 0 . Ces solu-tions sont fonctions des p multiplicateurs λk .ii) Pour déterminer les valeurs de ces multiplicateurs on reporte la solutionx∗i (λ1, . . . , λp) dans les p contraintes gk(x∗i ) = 0 . Ce sont p équationspour les p multiplicateurs.iii) Après résolution de ces p équations on reporte le résultat dans les x∗i . Onobtient alors un extremum de f , tenant compte des contraintes gk = 0 .

Pour se convaincre de l’équivalence de la méthode de Lagrange avec la procédure explicite,on pourra procéder comme suit :Supposons que f(xi) soit extrémale en un point x∗i qui respecte les contraintes :gk(x∗i ) = 0, k = 1, . . . , p. Si les contraintes sont mutuellement indépendantes, on peutles paramétrer localement en terme de n− p coordonnées y1, . . . , yn−p , et on trouve

∂gk∂yj

= (~∇~x gk) ·∂~x

∂yj= 0 , puisque gk(~x(~y)) ≡ 0 , (2.35)

où nous avons noté ~x = (x1, . . . , xn) et ~y = (y1, . . . , yn−p) . D’autre part nous avons aussi

∂f

∂yj= (~∇~x f) ·

∂~x

∂yj= 0

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58 Mécanique analytique et calcul variationnel

pour un point extrémal x∗i ≡ ~x∗ = ~x(~y∗) . On en déduit que, dans un point extrémal,

le vecteur ~∇~x f est orthogonal (au plan tangentiel) à la surface décrite par les contraintesgk, et il peut donc s’écrire sous forme de combinaison linéaire

~∇~x f = −p∑

k=1

λk ~∇~x gk .

D’où le résultat recherché : il existe des nombres réels λk, k = 1, . . . , p , tel que

∂xi

(

f +

p∑

k=1

λk gk

)

= 0 au point extrémal ~x∗ . (2.36)

Inversement considérons les solutions de la relation (2.36) en fonction des paramètres λk .Si, pour un choix approprié des λk , une solution ~x∗(λ1, . . . , λp) vérifie les contraintes

gk(~x∗) = 0 , alors (2.36) implique l’orthogonalité de ~∇~x f à la surface des contraintes en

ce point (de coordonnées locales ~y∗ ), voir ci-dessus (2.35), et on a donc

∂f

∂yj= (~∇~x f) ·

∂~x

∂yj= 0 en ~x∗ = ~x(~y∗) ,

de façon que ~x∗ = ~x(~y∗) est un point extrémal de f respectant les contraintes.

2.5 Exemples

2.5.1 Rayons courbes

Reprenons le cas des rayons courbes de (1.1.2) muni de nos connaissancesdu calcul variationnel. Considérons l’intégrale (1.5) et supposons que l’indicede réfraction varie avec la hauteur comme n(z) = 1+νz avec ν > 0 (cette for-mule ne s’appliquant que pour des valeurs limitées de z) et que les extrémitésA et B correspondent à la même altitude : z(x = 0) = h et z(x = l) = h. Lafonction de Lagrange L(z(x), z′(x), x) est alors

L =1

c(1 + νz)

√1 + z′ 2 ,

d’où l’on déduit - de la même façon que nous avons obtenu (2.13) - l’équationd’Euler-Lagrange

(1 + νz) z′′ = ν(1 + z′ 2) . (2.37)

En effectuant le changement de fonction u = z + 1/ν et en reportant dans(2.37) on obtient

u u′′ = 1 + u′ 2 (2.38)

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2.5. EXEMPLES 59

dont la solution générale est

u = d cosh((x− b)/d) (2.39)

où b et d sont des constantes. Une façon d’aboutir à ce résultat consisteà dériver (2.38) une fois. On obtient u′′′/u′′ = u′/u dont la «solution» estu′′ = Cu, où C est une constante arbitraire. La solution de cette dernièreéquation est u = a cosh((x− b)/d), où d2 = 1/C, et en reportant dans (2.38)on trouve a = d. 6. En imposant les conditions aux limites z(x = 0) = h etz(x = l) = h, on obtient donc le résultat

z = a cosh(x− l/2

a)− 1/ν avec a cosh(

l

2a)− 1/ν = h . (2.40)

Dans ce modèle ultra-simple, le chemin du rayon lumineux est une chaînettede hauteur minimale en x = l/2 (symétrie du problème).

2.5.2 Forme d’une corde pesante

Soit une corde massive de masse linéique constante µ et de longueur Ldans le plan (xOz), placée dans le champ de pesanteur constant dirigé suivantla verticale z. La corde est fixée à ses extrémités, en A, choisi comme l’origine(x = 0, z = 0), et en B (x = a, z = z1). On se pose le problème de déterminerla forme de la corde à l’équilibre. On suppose bien entendu que a2+ z21 ≤ L2.

L’équilibre correspond à la configuration où l’énergie potentielle gravi-tationnelle de la corde est minimale. Soit z(x) une forme quelconque de lacorde. Un élément de la corde dans l’intervalle [x, x + dx] est de longueurdl2 = dx2 + dz2 = (1+ z′(x)2) dx2 et son énergie potentielle est dV = µg z dl(g est l’accélération de la pesanteur). Il s’agit donc de minimiser l’intégrale

V =

∫ a

0

µg z(x)√

1 + z′(x)2 dx (2.41)

sous la contrainte 7

L =

∫ a

0

1 + z′(x)2 dx . (2.42)

6. On obtient le résultat (2.39) de façon plus élégante en utilisant une loi de conserva-tion, voir (2.5.2)

7. La contrainte apparaît ici sous forme d’intégrale. Là encore on peut en tenir compteà l’aide d’un paramètre de Lagrange, comme on le voit par un argument de discrétisation[11], ch.3.2.2.

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60 Mécanique analytique et calcul variationnel

Il est convenable de tenir compte de cette contrainte en introduisant unmultiplicateur de Lagrange λ (voir 2.4), donc de minimiser la quantité

V + λL =

∫ a

0

µg(z − zλ)√1 + z′ 2 dx , (2.43)

où nous avons écrit λ = −µgzλ . L’équation d’Euler-Lagrange donne

(z − zλ) z′′ = 1 + z′ 2 (2.44)

qui ressemble à (2.38) et dont la solution est une chaînette

z(x) = zλ + c cosh(x− x0c

) . (2.45)

Elle dépend de 3 paramètres zλ, c, et x0 , qu’on peut exprimer en terme desconditions aux limites et de la contrainte sur la longueur L

z(0) = 0 ⇒ zλ = −c cosh(x0c)

z(a) = z1 ⇒ z1 = c(

cosh(a− x0c

)− cosh(x0c))

,

L =

∫ a

0

1 + z′(x)2 dx =

∫ a

0

cosh(x− x0c

) dx = c(

sinh(a− x0c

)+sinh(x0c))

.

Dans la solution on voit une symétrie par dilatations : si l’on multiplie toutesles quantités homogènes à une longueur par le même facteur κ on obtientune solution pour une corde de longueur κL qui passe par les points (0, 0) et(κa, κz1) . Dans ce cas c est remplacé par κ c . C’est donc c qui caractérise lesunités de longueur choisies. Cette symétrie est due au fait que le lagrangiende départ ne dépend pas d’une échelle de longueur explicite. Nous trouvonspour le rapport de z1 et de L

z1L

=cosh(a−x0

c)− cosh(x0

c)

sinh(a−x0c

) + sinh(x0c)= tanh(

a− 2x02c

) . (2.46)

Le minimum de la chaînette est situé au point x0 qui peut ou non se trouverdans l’intervalle [0, a]. De (2.46) nous tirons (pour c = 1)

x0 = a/2− arth(z1/L) , (2.47)

ce qui implique x0 → −∞ pour z1/L → 1 (corde verticale orientée versle haut), x0 = a/2 pour z1 = 0 (corde symétrique par rapport à a/2 ), etx0 → ∞ pour z1/L→ −1 (corde verticale orientée vers le bas).

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2.5. EXEMPLES 61

Utilisation d’une loi de conservation

Revenons à l’équation (2.43). Le lagrangien est (à des constantes multi-plicatives près)

L ∝ (z(x)− zλ)√

1 + z′(x)2 .

L ne dépend pas explicitement de la variable x. Par conséquent, la quan-tité pz′ − L, où p est le moment conjugué de z, est une intégrale première,constante le long de la courbe, donc une quantité « conservée ». On obtientsans difficulté

p = (z − zλ)z′/√1 + z′ 2 , et donc

pz′ − L = −(z − zλ)/√1 + z′ 2 = −c ⇒ z − zλ = c

√1 + z′ 2 ,

où c est une constante. Posons, par définition de φ(x), z′(x) = sinh φ(x) . Ilvient

z(x)− zλ = c coshφ(x) soit z′ = cφ′ sinh φ ,

d’où évidemment cφ′(x) = 1 et la solution z(x) − zλ = c cosh((x − x0)/c)donnée en (2.45). L’utilisation de cette intégrale première a ramené l’équationdifférentielle à résoudre du deuxième au premier ordre.

De façon générale, si l’on considère un lagrangien de la forme

L(z, z; t) = f(z)√1 + z2 , (2.48)

le moment conjugué de z est

p =f(z)z√1 + z2

. (2.49)

Puisque le lagrangien ne dépend pas explicitement de la variable t, il y aconservation de la quantité

A = pz − L = − f(z)√1 + z2

, (2.50)

dont la valeur est fixée par les conditions initiales. On obtient donc

A2(1 + z2) = f(z)2 soit z = ±√

(f(z)

A)2 − 1 . (2.51)

La solution générale se ramène donc à une simple quadrature (ou intégration)

±∫ z

z0

dz√

(f(z)A

)2 − 1= t− t0 . (2.52)

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62 Mécanique analytique et calcul variationnel

C’est l’analogue de la méthode usuelle d’intégration de l’équation du mou-vement lorsqu’il y a conservation de l’énergie.

2.5.3 Lois de Kirchhoff

Soit à déterminer les intensités respectives I1 et I2 du courant dans lesdeux branches, de résistance R1 et R2 du circuit représenté sur la figure 2.1.Le courant entrant a une intensité I. Le résultat s’obtient aisément par leslois d’Ohm-Kirchhoff.

Le principe variationnel consiste ici à supposer que les pertes par effetJoule sont les plus petites possibles. Autrement dit trouver le minimum de

W = R1I21 +R2I

22 avec la contrainte I1 + I2 = I

(qu’on pourra s’exercer à exprimer par l’introduction d’un multiplicateur deLagrange). En dérivant l’expression W = R1I

21+R2(I−I1)2 par rapport à I1,

on obtient sans difficulté R1I1 = R2I2 c’est-à-dire le résultat obtenu en posantque le potentiel V entre les deux noeuds est donné. Remarquons que nousnous sommes affranchis de la notion de potentiel. Nous avons remplacé lanotion locale de différence de potentiel par une condition énergétique globale,et un principe plus simple.

I 21R1I

I

I

R 2

Figure 2.1 – Elément simple de circuit électrique avec bifurcation.

Pour un circuit quelconque, le principe est que la perte globale par effetJoule

k RkI2k est minimum. On retrouve, bien entendu, les lois de Kirchhoff.

Pour un circuit relativement simple les deux approches sont équivalentes.Elles le sont moins en pratique pour un réseau de transport d’électricitécomportant, par exemple, dix millions d’éléments. Inverser en temps réelune matrice 107 × 107 est irréaliste, alors que les méthodes mathématiquesd’optimisation sont infiniment plus commodes à utiliser.

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2.5. EXEMPLES 63

2.5.4 Potentiel électrostatique

Considérons maintenant un problème un peu plus compliqué. Il s’agitde déterminer le potentiel électrostatique φ(r) créé par une distribution decharges donnée ρ(r). On sait que la forme cherchée est la loi de Poisson

∆φ = − ρ

ε0. (2.53)

Elle se déduit du principe variationnel suivant que l’on peut retrouver commecas particulier d’un principe plus général concernant les équations de Max-well, voir 3.2.3. Le champ électrostatique s’exprime à partir du potentiel parE = −~∇φ et l’énergie du champ est EE = ε0

2

E2 d3r. L’énergie potentielleélectrostatique de la distribution de charges ρ(r) dans le potentiel φ(r) estEρ =

ρ(r)φ(r) d3r. Le principe variationnel est que le potentiel φ(r) recher-ché rend minimale la différence de ces deux énergies. Considérons l’intégrale

U =

[(ε0/2)(~∇φ)2 − ρ(r)φ] d3r . (2.54)

Le problème posé est de trouver le potentiel φ(r) qui minimise cette expres-sion.

Notons les points suivants :

1. Nous supposons qu’il n’y a pas de charges à l’infini, si bien que φ peutêtre choisi comme nul à l’infini. Les intégrales portent sur tout l’espace.

2. Puisque le premier terme est positif, s’il existe un minimum de cetteexpression pour une fonction φ(r), ce minimum correspond à une situa-tion d’équilibre entre deux contributions à l’énergie totale en « compé-tition ». Tout « excès » d’une de ces deux formes de l’énergie électriquecorrespond à une situation instable.

3. Par comparaison au problèmes du rayon courbe 2.5.1 ou de la corde2.5.2, c’est ici le champ φ et son gradient ∇φ qui jouent les rôles pré-cédemment tenus par la variable z et sa dérivée z′. La variable x desproblèmes simples précédents est maintenant r ∈ R3.

Soit φ la solution recherchée, et η(r) une variation infinitésimale de cepotentiel. Dans la variation φ → φ+ η on a, au premier ordre,

(~∇φ)2 → (~∇φ)2 + 2~∇φ · ~∇η .

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64 Mécanique analytique et calcul variationnel

Par conséquent, la variation de (2.54) est

δU =

[ε0 (~∇φ · ~∇η)− ρ η ] d3r . (2.55)

En intégrant le premier terme par parties et en tenant compte de l’annulationde φ à l’infini, on obtient

(~∇φ · ~∇η) d3r = −∫

∆φ η d3r

soit

δU =

[−ε0∆φ− ρ ] η d3r . (2.56)

Le fait que δU = 0 quel que soit η(r) infinitésimal, entraîne la loi de Poisson(2.53).Un cas particulier est celui où la densité de charge est nulle. Nous entendonspar là qu’il y a un certain nombre de conducteurs chargés chacun porté àun potentiel donné V1, V2, · · · , Vn. Il y a certes une densité de charge surfa-cique mais la charge volumique ρ est partout nulle. Soient Σ1,Σ2, · · · ,Σn lessurfaces des conducteurs, l’équation (2.56) se ramène à

∆φ = 0

avec les n contraintes φ = Vi sur Σi .

2.5.5 Bulles de savon

Figure 2.2 – Bulle de savon tendue sur deux cercles.

L’énergie potentielle d’une bulle de savon d’aire A est V = σA où σ est laconstante de tension superficielle du savon. On tend une bulle de savon entre

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2.5. EXEMPLES 65

deux cercles coaxiaux de même rayon R, comme schématisé sur la figure 2.2.L’axe Oz est l’axe commun perpendiculaire aux deux cercles, qui sont centrésen z = −h et z = h respectivement. Le problème est de trouver la surfaced’aire minimale tendue entre les deux cercles en fonction de leur distanced = 2h.

Considérons l’intervalle [z, z+dz] et r(z) le rayon d’une section transversede la surface symétrique de révolution. Il s’agit de minimiser l’énergie

σA = σ

∫ h

−h2π r(z)

1 + r′(z)2 dz

avec les conditions aux limites r(−h) = r(h) = R. Le problème est semblableà celui de la corde (2.41). La solution est

r = a cosh(z/a), avec R = a cosh(h/a) .

Cette surface de révolution autour de Oz , engendrée par un chaînette, portele doux nom de caténoïde.

On pourra s’exercer à trouver les formes prises par de bulles tendues surdes supports plus compliqués. Le fait que les exemples précédents aboutissenttous à des chaînettes est dû à la simplicité de leur résolution mathématique.

Exercices

2.1 Intégrale premièreDans le calcul de rayons courbes 2.5.1, montrer par un calcule direct queΓ(x) = z(x)/

1 + z′(x)2 est une constante le long de la courbe. En déduirela solution.

2.2 BrachistochroneUn des problèmes favoris des mathématiciens et mécaniciens est celui dubrachistochrone. On considère deux points O et A dans un plan vertical, etune courbe C les joignant. On lâche en O, sans vitesse initiale, une massequi glisse sans frottement sur la courbe sous l’effet de la pesanteur. On veutdéterminer la courbe C telle que le temps nécessaire à la masse pour aller deO en A, soit minimum. (Cet exercice n’est pas facile. Une version «guidée»se trouve dans le recueil des contrôles antérieurs sous le titre «Gagner unslalom».)

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66 Mécanique analytique et calcul variationnel

Historiquement l’énoncé du problème brachistochrone en 1696 peut être consi-déré comme le vrai acte de naissance du calcul des variations. Il suscite larecherche de méthodes générales progressivement élaborées au cours d’unevéritable compétition. La première solution vient de Jean Bernoulli en 1697.Il part de son analogie au principe de Fermat et résout le problème par dis-crétisation.

2.3 Rayons courbes et super-réfraction d’ondes radio

1. On s’intéresse à la propagation d’un rayon lumineux dans un milieud’indice de réfraction variable n(x, y) ≥ 1 dans le plan xOy . Ecrirel’intégrale qui donne de le temps de propagation TAB de la lumièrepour aller du point A au point B .

2. Le plan peut être paramétré en coordonnées polaires x = r cosφ , y =r sinφ . On suppose que l’indice n n’est fonction que de la variableradiale r : n = n(r) , et que le rayon lumineux allant de A(r1, φ1) àB(r2, φ2) peut être paramétré par la variable φ. Réécrire le temps TABsous forme d’une intégrale portant sur la variable φ, dont l’intégrant estfonction de r(φ) et de r(φ) , où r = dr/dφ . On appellera cette fonctionlagrangien L .

3. Le lagrangien L ne dépend pas explicitement de la variable φ . En dé-duire l’existence d’une quantité conservée le long du rayon lumineux,et donner son expression. On appellera E cette quantité conservée.

4. Utiliser E pour exprimer r(φ) en fonction de r, n, E .

5. Dans quelle condition l’expression précédente décrit-elle une trajectoirecirculaire ? On se placera dans une situation proche de celle-ci par lasuite.

6. Déduire de l’expression pour r(φ) la relation

r = r (1 +r

n

dn

dr) , dans la situation où

n2r2

c2≃ E2 . (2.57)

Indication : dériver la relation pour r par rapport à φ, éliminer r grâceà la relation trouvée en 4., et prendre la limite n2r2

c2→ E2 à la fin.

7. Une valeur moyenne de dndr

dans les basses couches atmosphériques est

(dn

dr)moy = −0, 39 · 10−4 km−1 ,

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2.5. EXEMPLES 67

Figure 2.3 – Sous-réfraction et super-réfraction d’une onde radar émise parune antenne dans l’atmosphère terrestre

ce qui correspond au régime standard dans la Fig. 2.3. Comment sesituent les valeurs de dn

drdans les régimes de sous-réfraction et de super-

réfraction par rapport à cette valeur ?

8. Pour une onde radio émise par une antenne tel que r(0) = R et r(0) =0 (donc horizontalement), donner la valeur de dn/dr en km−1 , pourlaquelle l’onde radio suit un grand cercle autour de la terre.On peut approcher n(r) pour l’air - qui vaut ≃ 1, 0003 - par 1 . Lerayon de la terre R est de 6370 km.

2.4 Stratégie d’une régate.Un voilier avance à la vitesse v(θ) qui est fonction de l’angle θ entre la vitessedu vent et celle du bateau, et de la norme w de la vitesse du vent. On supposeque la vitesse du bateau v est proportionnelle à celle du vent w, mais dépendde l’angle θ, choisi par le capitaine du bateau. On écrit cette vitesse sous laforme

v(θ) =w

cos(θ) h(tan θ), avec h(u) =

1

2(u+

1

u) . (2.58)

On s’intéresse à la stratégie de "remontée au vent" du bateau, c’est-à-direθ ≤ π/2, comme on le représente sur la figure (2.5.5). La vitesse vx du bateaule long de Ox est opposée à celle du vent, et sa coordonnée x augmentetoujours en fonction du temps. On suppose une côte linéaire (terre = demi-plan z < 0, mer = demi-plan z > 0).On suppose que le vent est parallèle à la côte, de direction opposé à l’axe

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68 Mécanique analytique et calcul variationnel

z

Terre

wvitesse du vent de norme w

vitesse du bateau de norme v

θ

v

L x

z=z2

Figure 2.4 – Plan d’eau et schéma de la direction du bateau par rapport àcelle du vent.

Ox, et que la norme de sa vitesse w(z) ne dépend que de l’éloignement à lacôte z.

La vitesse du vent a la forme :

w(z) = w0 − w1z0

z + z0, (2.59)

où w0 est la vitesse du vent loin de la côte, qui est supérieure à la vitesse(w0 − w1) ≥ 0 au bord de la côte z = 0.

1. On note :

x =dx

dt, z =

dz

dt, z′ =

dz

dx.

Montrer que z′ = tan θ.

2. On suppose d’abord le vent uniforme (w = constante, w1 = 0). Ecrirela vitesse du bateau suivant l’axe du vent vx = x en fonction de w eth(tanθ). Pour quelle valeur de θ et de z′ cette vitesse est-elle maximum?Quelle est alors sa valeur ?

3. On suppose maintenant que w1 6= 0. Le bateau va du point de départ,l’origine (x = 0, z = 0), à un point d’arrivée au large (x = L, z = z1).On suppose que z′ ≥ 0 pour tout t (c’est-à-dire que le bateau ne virejamais de bord). On veut déterminer la trajectoire z(x) la plus rapide.Ecrire le temps dt mis, sur cette trajectoire, pour aller de x à x + dxen terme des fonctions w et h. Ecrire la valeur du temps total T pouraller du départ à l’arrivée.

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2.5. EXEMPLES 69

4. En déduire l’équation qui détermine la trajectoire optimale.

5. Montrer que l’invariance du problème par translation suivant Ox en-traîne

h′(z′)z′ − h(z′)

w(z)= A

où A est une constante.

6. Utiliser le résultat précédent pour calculer la trajectoire sous la formed’une fonction x(z) (et non pas d’une fonction z(x)). Fixer la valeur dela constante A.

7. Calculer la valeur de z′ = dz/dx en fonction de z. On suppose quez1 ≪ L et z1 ≪ z0. Pensez-vous que le résultat obtenu correspondeeffectivement à la meilleure stratégie ? Sinon, quelle modification doit-on apporter ?

2.5 Pendule mobileOn considère un pendule de longueur l et de masse m2 suspendu à un pointde masse m1 qui se déplace horizontalement sur un rail (sans frottement).On note x l’abscisse de m1 et φ l’angle du pendule avec la verticale. Ecrirele lagrangien de ce système.

2.6 Propriétés de l’actiona) Calculer l’action le long de la trajectoire physique en fonction des positionset instants de départ x1, t1 et d’arrivée x2, t2

1. pour une particule libre, de lagrangien L = mx2/2

2. pour un oscillateur harmonique L = mx2/2− mω2

2x2

3. pour une force constante L = mx2/2− Fx.

b) Montrer que le moment conjugué p2 = (∂L∂x)|x=x2 au point d’arrivée x2

vaut

p2 =∂S12

∂x2.

c) Montrer que l’énergie E = px− L au point d’arrivée x2 est donnée par

E2 = −∂S12

∂t2.

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70 Mécanique analytique et calcul variationnel

2.7 Moments conjugués en coordonnées sphériques.On considère une particule non-relativiste de masse m placée dans un po-

tentiel central V (r) où r =√

x2 + y2 + z2. On note v ≡ r la vitesse et v2 soncarré. On étudie le problème en coordonnées sphériques (r, θ, φ) définies par

x = r sin θ cosφ , y = r sin θ sinφ , z = r cos θ . (2.60)

Le carré de la vitesse est alors v2 = r2 + r2 θ2 + r2 sin2 θ φ2 . (2.61)

1. Ecrire le lagrangien de la particule en coordonnées sphériques.

2. Calculer les moments conjugués pr, pθ et pφ.

3. Montrer que le moment pφ est égal au moment cinétique Lz dont l’ex-pression en coordonnées cartésiennes est Lz = xpy − ypx.

4. A quelle loi d’invariance correspond la conservation de Lz ?

5. Si la particule est chargée et que l’on plonge le système dans un champmagnétique ~B parallèle à Oz, la composante Lz est-elle conservée ?

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Chapitre 3

Théorie lagrangienne de

l’électromagnétisme

Si tous disent que tu es un âne,il est temps de braire.

Le Talmud, Baba Kamma.

Les exemples de systèmes physiques que nous avons traités jusqu’ici enformalisme lagrangien, ont été des systèmes de particules non-relativistes, eninteraction mutuelle et/ou dans un champ de force dérivant d’un potentielexterne. Il est évident que l’électromagnétisme sort de ce cadre pour plusieursraisons.

Tout d’abord, même si l’on ne considère qu’une seule particule chargéenon-relativiste dans l’approximation où le champ électromagnétique est traitécomme un champ externe fixé, nous savons bien qu’elle subit la force deLorentz

f = q (E+ v×B) . (3.1)

Cette force dépend de la vitesse et ne dérive pas d’un potentiel. La forcemagnétique q v ×B ne travaille pas.

Ensuite l’électromagnétisme est une théorie invariante de Lorentz. L’inva-riance relativiste devrait donc se manifester dans la description lagrangiennedès le départ. En effet, ce sera le principe de l’invariance relativiste qui nousservira de guide pour proposer une expression, d’abord pour le lagrangiend’une particule libre, ensuite pour celui d’une particule chargée placée dansun champ électromagnétique. Nous vérifierons, bien sûr, que la limite non-relativiste nous rendra la force de Lorentz.

71

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72 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

Enfin une théorie complète de l’électromagnétisme requiert d’intégrer leschamps électromagnétiques eux-mêmes dans le formalisme lagrangien. Unchamp qui peut prendre des valeurs a priori arbitraires dans tous les pointsde l’espace est évidemment un système à un nombre de degrés de liberté infini.Le formalisme lagrangien trouve sa pleine puissance dans ces cas. La méca-nique des milieux continus peut servir d’un autre exemple de tels systèmes.Nous allons voir comment le formalisme lagrangien se prête à la théorie deschamps. En soi, la théorie des champs est un vaste domaine qui atteint saplénitude lorsque l’on aborde la quantification des champs et les théories desinteractions fondamentales [16]. Dans ce chapitre nous ne souhaitons donnerque les principes de la théorie lagrangienne des champs et son application auchamp électromagnétique.

Dans la partie 1, nous commençons par traiter du cas d’une particulerelativiste libre. Nous nous restreindrons au cas d’une particule massive. Lefondement de notre propos sera alors l’invariance de Lorentz. Le principede moindre action ne peut avoir de sens que si il détermine le mouvementde la particule de la même façon, quel que soit le référentiel inertiel choisi.Cela nous permettra de construire un lagrangien pour la particule. Nousverrons comment l’impulsion et l’énergie d’une particule libre sont reliées àsa masse et sa vitesse. Le formalisme lagrangien permet ainsi de démontrerque l’ensemble E/c,p forme un quadrivecteur de l’espace-temps en relati-vité, alors que ni l’énergie E ni l’impulsion p ne sont définies a priori. Leurforme est dictée par le formalisme lagrangien à partir des variables cinéma-tiques position et vitesse. Ensuite nous verrons que le lagrangien d’interac-tion d’une particule chargée avec le champ électromagnétique se déduit del’invariance relativiste, de la connaissance du lagrangien d’interaction d’uneparticule chargée avec un champ électrostatique, et du fait que le poten-tiel électrostatique constitue la composante genre temps du quadrivecteurpotentiel électromagnétique. Nous découvrirons que le moment conjugué dif-fère alors radicalement de l’impulsion ou de la quantité de mouvement, quidans la limite non-relativiste, est donnée par le produit de la masse par la vi-tesse. Ce fait, intimément associé à l’invariance de jauge, a des répercussionsconsidérables en mécanique quantique et, plus généralement, dans toutes lesthéories actuelles des interactions fondamentales. Nous allons analyser leséquations du mouvement qui en découlent, leur limite non-relativiste, aussibien que leur invariance de jauge.

Dans la partie 2 nous comprendrons le principe de la forme lagrangiennede la théorie des champs en commençant par la physique d’une corde vi-

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Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme 73

brante. La démarche est relativement simple : on commence par discrétiserla corde en éléments finis en interaction auxquels on applique la théorie deLagrange. On passe ensuite à la limite du continu, ce qui fait apparaîtreune densité spatiale de lagrangien à partir de laquelle on obtient naturelle-ment l’équation d’ondes. C’est dans cette extension à la limite du continu,donc d’un nombre infini de degrés de liberté, que l’on mesure combien leformalisme lagrangien est adapté à ce problème. Ensuite nous passons à troisdimensions ainsi qu’à plusieurs champs. On y entrevoit facilement l’extensiondans l’espace-temps. Finalement nous traiterons du champ vecteur électro-magnétique et des équations de Maxwell. Dans cette partie nous donneronsaussi le lagrangien complet de l’électromagnétisme qui comprend la partieparticules (ou sources des champs), la partie champs et l’interaction des deux.

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74 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

3.1 Lagrangien d’une particule relativiste

Nous nous restreignons au cas d’une particule massive soit libre, soitplacée dans un champ électromagnétique. Le fondement de notre propos seral’invariance de Lorentz. Le principe de moindre action ne peut avoir de sensque si il détermine le mouvement de la particule de la même façon, quelque soit le référentiel inertiel choisi. Nous souhaitons procéder comme ensection 1.3. Nous nous proposons de déterminer le trajet parcouru pour allerde (t1, r1) à (t2, r2) en minimisant l’action

S =

∫ t2

t1

L(r, r; t) dt . (3.2)

3.1.1 Particule libre

Nous avons vu en 2.2, par des arguments de symétrie, que le lagrangiend’une particule libre de masse m ne devrait être fonction que de la vitesse aucarré v2 de la particule. Cherchons donc cette fonction sous une forme quirende l’action S qui s’y associe, invariante de Lorentz. En relativité, voir réf.[2], nous avons vu un invariant de Lorentz, sous forme d’une intégrale para-métré par le temps et portant sur une fonction de v2 . On l’a appelé le tempspropre τ . Il représente le temps qui s’écoule sur une montre rattachée aupoint mobile. D’ailleurs, en traitant du «paradoxe des jumeaux», nous avonsvu que parmi tous les chemins possibles, celui associé au mouvement librea pour caractéristique que le temps propre est le plus long. Ceci correspondbien à un principe d’optimisation comme nous le cherchons. Rappelons lesformules :Nous avons c dτ = ds où ds2 = c2dt2 − dx2 est l’élément de longueur in-finitésimal invariant de Lorentz. Par construction, τ est donc un invariantde Lorentz. Si dt est un interval de temps observé par un observateur devitesse relative v par rapport à la particule, le temps propre de celle-ci estdτ = dt

1− v2/c2 .

Le mouvement libre maximise donc la quantité τ =

∫ t2

t1

1− v2/c2 dt .

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3.1. LAGRANGIEN D’UNE PARTICULE RELATIVISTE 75

Pour obtenir un lagrangien homogène à une énergie, et afin de retrouver unprincipe de minimisation plutôt que de maximisation, nous posons finalement

S = −mc2∫ t2

t1

1− v2/c2 dt . (3.3)

Cette action nous fournit le lagrangien d’une particule relativiste libre

L = −mc2√

1− v2/c2 . (3.4)

L’expression√

1− v2/c2 dt est invariante de Lorentz alors que le lagrangien(3.4) ne l’est pas. Cela provient de ce que nous avons gardé une approche quiconfère un rôle particulier à la variable temps sur laquelle porte l’intégration.On peut s’affranchir de ce problème, voir (3.16) en bas. On remarque qu’à lalimite des faibles vitesses, (3.4) donne −mc2

1− v2/c2 = −mc2 +mv2/2 ,et on retrouve donc, à la constante −mc2 près, le lagrangien non-relativisteL = mv2/2.

3.1.2 Impulsion et énergie d’une particule libre

L’impulsion et l’énergie se déduisent de cette forme par les mêmes dé-marches qu’en section 2.3. Ces deux quantités nous intéressent particulière-ment car ce sont les grandeurs conservées de façon générale s’il y a homogé-néité de l’espace et du temps, et cela quel que soit le référentiel. Le momentconjugué est 1

plib =∂L∂v

=mv

1− v2/c2, (3.5)

l’énergie

Elib = plib · v−L =mc2

1− v2/c2ou encore Elib =

p2libc

2 +m2c4 . (3.6)

L’énergie et l’impulsion satisfont la relation

(Elib/c)2 − p2lib = m2c2 . (3.7)

Si nous supposons que l’ensemble (Elib/c,plib) ≡ P lib soit un quadrivecteur,nous voyons donc que son carré au sens de Minkowski est un invariant re-lativiste, proportionnel à la masse au carré de la particule, en accord avec

1. Nous écrivons Elib, plib pour indiquer que les expressions changent si la particuleest exposée à un champ électromagnétique.

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76 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

l’hypothèse. Pour la confirmer nous nous souvenons du fait que L dt est uninvariant relativiste, que nous pouvons récrire sous la forme :

−L dt =(

plib ·v−L)

dt − plib · dx = Elib dt − plib · dx = P lib · dX . (3.8)

Le produit scalaire de Minkowski de P lib avec un quadrivecteur arbitraire(genre temps, infinitésimal) dX = (c dt, dx) forme donc un invariant, ce quimontre que P lib est un quadrivecteur, du genre temps d’après (3.7) 2.Einstein a déduit les équations (3.6), (3.7) - qui sont parmi les plus connuesde toute la physique - par un raisonnement concernant le bilan energétiqued’un corps en mouvement, émettant du rayonnement électromagnétique 3 .Ici le formalisme lagrangien nous les fournit automatiquement, révélant ainsitoute sa puissance. Il nous dit aussi que l’ensemble (Elib/c,plib) forme unquadrivecteur de l’espace-temps en relativité, alors que ni l’énergie ni l’impul-sion ne sont définies a priori et que seules les variables cinématiques positionet vitesse interviennent. Cette propriété découle de l’hypothèse de départ(3.3) dont le fondement est l’invariance relativiste. La vitesse observée de laparticule est reliée à son impulsion et à son énergie par

v =c2 plibElib

. (3.9)

3.1.3 Particule chargée dans un champ électromagné-tique

Interaction avec un champ électromagnétique

Considérons maintenant une particule chargée, de charge q et de massem, placée dans un champ électromagnétique. Nous connaissons le lagrangiend’une particule libre relativiste et celui d’une particule non-relativiste exposéeà un champ purement électrostatique qui dérive du potentiel qφ . Dans cedernier cas nous avons

L = mv2/2− q φ . (3.10)

Cette forme nous indique qu’il faut chercher le lagrangien complet sous laforme d’une somme Llibre + LI , où le lagrangien d’interaction LI décrit

2. D’ailleurs, nous avons déjà vu ce quadrivecteur en relativité [2] : à la constante mprès c’est le quadrivecteur quadrivitesse U .

3. A. Einstein : Ist die Trägheit eines Körpers von seinem Energieinhalt abhängig ?,Ann. d. Phys. 18, 639-641 (1905).

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3.1. LAGRANGIEN D’UNE PARTICULE RELATIVISTE 77

l’interaction de la particule et du champ. Pour retrouver une action S, inva-riante de Lorentz, comme dans le cas d’une particule libre, nous remplaçons

q φ dt → q A · dX , (3.11)

en nous souvenant que le produit scalaire invariant des deux quadrivecteursA = (φ/c,A) et dX = (cdt, dx) se réduit à l’expression φ dt dans la conditionque le potentiel vecteur A soit nul. Notre proposition pour l’action d’uneparticule relativiste dans un champ électromagnétique est donc

S = −mc2∫ t2

t1

1− v2/c2 dt −∫ t2

t1

q (φ− v ·A) dt , v =dx

dt, (3.12)

et le lagrangien correspondant s’écrit alors

L = −mc2√

1− v2/c2 − q (φ− v ·A) . (3.13)

Moment conjugué et énergie

Pour le lagrangien (3.13) le moment conjugué p = ∂L/∂v est relié àl’impulsion plib =

mv√1−v2/c2

par

p =∂L∂v

= plib + qA . (3.14)

Le moment conjugué p est donc différent de la quantité de mouvement rela-tiviste plib . L’énergie E totale de la particule est donnée par

E = v · ∂L∂v

− L = Elib + q φ . (3.15)

Interaction minimale

Nous pouvons écrire l’action de la particule d’une manière manifestementcovariante. Pour une particule libre, d’après (3.8), son action entre deuxévénements A et B dans l’espace-temps - séparés par un quadrivecteur genretemps - se récrit de façon manifestement invariante de Lorentz

Slib = −∫ B

A

P lib · dX , (3.16)

expression qui fait intervenir le quadrivecteur P lib = (Elib/c ,plib) .

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78 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

Pour une particule chargée dans un champ électromagnétique on obtien-dra de la même façon

S = −∫ B

A

P · dX , (3.17)

c’est à dire l’action s’exprime en terme du quadrivecteur P qu’on obtient àpartir de (3.14) et de (3.15)

P = (E/c, p) . (3.18)

P s’exprime en partant de P lib par la substitution dite minimale

P lib → P = P lib + q A . (3.19)

De ce point de vue la nouvelle action s’obtient donc par une simple redéfini-tion du moment conjugué qui, effectivement, est la plus simple à faire appa-raître le potentiel électromagnétique et à maintenir l’invariance de Lorentz.L’interaction correspondante est appelée « interaction minimale » entre uneparticule chargée et le champ électromagnétique.

Equation du mouvement

L’équation du mouvement s’obtient à partir des équations d’Euler-Lagrange

d

dt

(

∂L∂v

)

=∂L∂r

. (3.20)

Le lagrangien (3.13) donne

∂L∂r

= ~∇rL = q (~∇(v ·A)− ~∇φ) , (3.21)

d’où, en utilisant (3.20) et (3.14),

dp

dt=d(plib + qA)

dt= q (~∇(v ·A)− ~∇φ)) . (3.22)

Les dérivées totales des composantes A par rapport au temps s’exprimentsous la forme

dAx(r, t)

dt=∂Ax(r, t)

∂t+ x

∂Ax(r, t)

∂x+ y

∂Ax(r, t)

∂y+ z

∂Ax(r, t)

∂zetc. (3.23)

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3.1. LAGRANGIEN D’UNE PARTICULE RELATIVISTE 79

ou en notation vectorielle

dA

dt=∂A

∂t+ (x

∂A

∂x+ y

∂A

∂y+ z

∂A

∂z) =

∂A

∂t+ (v · ~∇)A . (3.24)

D’autre part on a la relation

~∇(v ·A) = (v · ~∇)A+ v × (~∇×A) . (3.25)

En reportant dans (3.22) il vient

dplibdt

= q

(

v× (~∇×A)− ∂A

∂t− ~∇φ

)

. (3.26)

Les équations de Maxwell, et plus précisément le couple d’équations

~∇ ·B = 0 , ~∇× E = −∂B∂t

(3.27)

permettent d’exprimer les champs E et B à partir des potentiels scalaire etvecteur Φ et A

B = ~∇×A , E = −∂A∂t

− ~∇Φ . (3.28)

Cela mène à l’équation du mouvement

dplibdt

= q(E+ v ×B) , (3.29)

où l’impulsion plib et la vitesse v sont reliés par (3.5). Nous avons doncretrouvé l’équation de Lorentz (3.1), à la modification près que l’impulsionnon-relativiste a été remplacée par sa version relativiste (3.5).

En dérivant (3.6) par rapport au temps on obtient à l’aide de (3.9)

dElibdt

= v · dplibdt

. (3.30)

Reportant l’équation du mouvement (3.29) et utilisant l’égalité v · (v×B) =0, on obtient

dElibdt

= q v · E , (3.31)

où E est le champ électrique : seul le champ électrique travaille et modifiel’énergie cinétique Elib , donc la norme de la vitesse.

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80 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

Equation du mouvement sous forme covariante de Lorentz

Nous avons vu en (3.1.2) que les quantités (Elib/c,plib) forment un quadri-vecteur P lib . Par conséquent il devrait être possible de ramener les équations(3.30) et (3.29) sous une forme covariante de Lorentz qui ne fasse apparaîtreque des quantités covariantes de Lorentz, c’est à dire des quadri-vecteurs,tenseurs et scalaires lorentziens. Ceci nous garantit qu’elle gardera la mêmeforme dans tous les référentiels. On voit bien qu’on peut exprimer (3.30)et (3.29) sous forme d’une équation différentielle pour un quadri-vecteur,sous condition de remplacer le différentiel dt au dénominateur par l’élémentdifférentiel de l’invariant relativiste temps propre vu en (3.1.1), donc pardτ . Car d

dτ(Elib/c,plib) se transformera alors comme un quadri-vecteur. Ce

passage s’effectue en multipliant ces équations par un facteur γ = 1√1−v2/c2

.

Ce facteur peut être absorbé côté droit en faisant apparaître le quadrivecteurquadrivitesse U = 1

mP lib , dont les composantes spatiales sont liés à celles de

v parui = γvi .

Finalement les composantes des champs électrique et magnétique forment untenseur - le tenseur champ électro-magnétique F µν donné en (3.64), et noséquations (3.30) et (3.29) s’écrivent sous la forme covariante

dP µlib

dτ= qF µνuν , (3.32)

comme le lecteur le vérifiera sans peine après ces explications.

Limite non-relativiste

On peut passer à la limite non-relativiste dans chacune des expressionsrelativistes précédentes. La forme non-relativiste du lagrangien (3.13) s’écrit

L = −mc2 +1

2mv2 − q φ(r, t) + q v ·A(r, t) , (3.33)

où le premier terme est une constante qu’on supprimera. Le même calculque celui du cas relativiste nous donne l’équation du mouvement de Lorentznon-relativiste

mr = q (E+ v×B) . (3.34)

Le moment conjugué prend la forme

p = mv + qA(r, t) . (3.35)

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 81

On constate encore une fois que dans un champ magnétique, le moment conju-gué p ne coïncide pas avec la quantité de mouvement mv. De la même fa-çon, le moment cinétique L = r × p ne coïncide pas avec le moment de laquantité de mouvement r × mv. Pour l’énergie non-relativiste on retrouveE = mv2/2 + qΦ comme il se doit.

Invariance de jauge

Une chose, cependant, paraît surprenante. Nous exprimons le lagrangientoujours en fonction des potentiels A et Φ, et non des champs E et B. Or lespotentiels ne sont pas uniques : les champs E et B demeurent invariants parles transformations de jauge,

A → A′ = A+ ~∇χ(r, t) , Φ → Φ′ = Φ− ∂χ

∂t, (3.36)

où χ(r, t) est une fonction arbitraire. La vitesse v de la particule est uneune grandeur physique, mesurable, indépendante de la jauge. En revanche,la variable moment conjugué p = mv + qA dépend de la jauge choisie.

Pour analyser le comportement du lagrangien dans les transformations(3.36) on porte cette transformation dans l’expression (3.12) ou dans (3.33),et on obtient

L′ = L+ q (v · ~∇χ(r, t) + ∂χ

∂t) . (3.37)

La différence est une dérivée totale par rapport au temps

L′ = L+ qd

dtχ(r, t) , (3.38)

dont nous avons vu en 2.2 qu’elle n’affecte pas les équations du mouvement.Une transformation de jauge n’affecte donc pas la physique du problème.

Remarquons que l’invariance de jauge a joué un rôle clé dans la décou-verte du modèle standard de la physique des particules, qui est une théoriequantique de champs de jauge nonabéliens [16].

3.2 Théorie lagrangienne des champs

Pour obtenir le lagrangien complet de l’électromagnétisme il nous fautétendre le formalisme lagrangien aux systèmes continus, donc aux systèmes

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82 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

à un nombre infini de degrés de liberté. Le prototype de système physiquequi permet d’étudier la transition vers le continu en mécanique est la cordevibrante.

3.2.1 Corde vibrante

x=0 x=l

ψ(x,t)

Figure 3.1 – La corde discrétisée ; ψ(x, t) est l’élongation par rapport à la posi-tion d’équilibre à l’instant t .

On considère une corde élastique tendue horizontalement entre les pointsx = 0 et x = l. Sa masse linéique ρ est uniforme. On ne tient pas compte dela pesanteur, et on ne considère que les déformations de la corde dans le plantransverse (ondes transversales). On note ψ(x, t) l’élongation transverse dupoint d’abscisse x par rapport à sa position d’équilibre à l’instant t. On sup-pose, pour simplifier, que cette élongation se produit dans une seule direction(l’axe vertical). On peut, par la pensée, considérer la corde comme l’ensembled’un grand nombre d’éléments de longueur individuelle dx obéissant chacunaux lois de la dynamique. A la limite, cela se transforme en un système ànombre infini de degrés de liberté.

Soit un élément de la corde de longueur dx, l’énergie cinétique de cetélément est

dEc =1

2(ρ dx)(

∂ψ

∂t)2 . (3.39)

Soit T la tension de la corde. Si l’élongation de deux éléments centrés en xet x + dx, varie par rapport à l’élongation au repos, l’énergie potentielle V ,correspondant à la loi de Hooke, varie d’après Pythagore de

dV = T(

(ψ(x+ dx)− ψ(x))2 + dx2 − dx)

= T

(√

1 + (∂ψ

∂x)2 − 1

)

dx

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 83

où, bien évidemment, (∂ψ/∂x)2 ≪ 1. L’énergie potentielle V de la corde dueà la déformation est, par conséquent,

V =1

2T

∫ l

0

(∂ψ

∂x)2 dx . (3.40)

Le lagrangien de la corde entière est la somme des lagrangiens élémentairesdL = dEc − dV , soit

L =1

2

∫ l

0

[ ρ (∂ψ

∂t)2 − T (

∂ψ

∂x)2] dx . (3.41)

Si l’on considère la corde comme un ensemble d’éléments matériels de lon-gueur dx, chacun a un lagrangien élémentaire

dL = L(ψ,∂ψ

∂t,∂ψ

∂x) dx =

1

2[ ρ (

∂ψ

∂t)2 − T (

∂ψ

∂x)2 ] dx . (3.42)

La quantité L qui apparaît dans cette expression est appelée la densité delagrangien de la corde. Dans notre cas, L ne dépend pas de ψ , mais seulementde ∂ψ

∂tet de ∂ψ

∂x. L’action de la corde est en effet

S =

L dx dt =1

2

∫ t2

t1

dt

∫ l

0

dx [ρ (∂ψ

∂t)2 − T (

∂ψ

∂x)2] . (3.43)

Nous avons affaire à un problème à deux variables (x, t) dont dépend lavariable dynamique ψ(x, t). Dans un procédé analogue à celui du chapitreprécédent nous nous donnons l’état initial ψ(x, t1) et l’état final ψ(x, t2)de la corde. D’après le principe de moindre action, il faut alors minimiserl’intégrale (3.43) avec les conditions aux bords

δψ(0, t) = 0 , δψ(l, t) = 0 , δψ(x, t1) = 0 , δψ(x, t2) = 0 . (3.44)

Les deux premières de ces équations correspondent au fait que la corde estfixée à x = 0 et à x = l. Les deux autres expriment le fait que les variationsconsidérées sont toujours telles qu’elles laissent inchangés l’état initial etl’état final du système (de la corde). En faisant varier ψ, ∂

∂tψ et ∂

∂xψ on

obtient

δS =

dx dt

[

∂L

∂ψδψ +

∂L

∂(∂ψ∂t)δ(∂ψ

∂t) +

∂L

∂(∂ψ∂x)δ(∂ψ

∂x)

]

.

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84 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

Ensuite on effectue les intégrations par parties usuelles en utilisant (3.44)

δS =

dx dt

[

∂L

∂ψ− ∂

∂t

∂L

∂(∂ψ∂t)− ∂

∂x

∂L

∂(∂ψ∂x)

]

δψ .

Vu que δψ est une fonction arbitraire de x et de t , la condition δS = 0 nousdonne l’équation d’Euler-Lagrange

∂t

(

∂L

∂(∂ψ/∂t)

)

+∂

∂x

(

∂L

∂(∂ψ/∂x)

)

=∂L

∂ψ. (3.45)

Dans notre cas, ∂L∂ψ

= 0 si bien qu’en définissant la vitesse de propagation cpar

c2 =T

ρ(3.46)

nous aboutissons à l’équation de propagation des vibrations de la corde

∂2ψ

∂t2− c2

∂2ψ

∂x2= 0 . (3.47)

On voit ainsi comment une équation d’ondes se déduit d’un principe varia-tionnel. Il faut, ici, que la différence entre l’énergie cinétique totale de lacorde et son énergie potentielle soit la plus faible possible.

On peut ajouter à la densité de lagrangien L un terme linéaire en ψprovenant d’une force extérieure F (x) dx appliquée sur chaque élément de lacorde

L =1

2[ ρ (

∂ψ

∂t)2 − T (

∂ψ

∂x)2 ] + Fψ , (3.48)

ce qui mène à l’équation du mouvement inhomogène

∂2ψ

∂t2− c2

∂2ψ

∂x2= F/ρ . (3.49)

3.2.2 Equations d’Euler-Lagrange généralisées

Le cas précédent nous a fait aborder un problème plus complexe que leséquations vues en (2.6) et (2.7). En effet, s’agissant d’un champ, la variabledynamique ψ dépend de plusieurs variables : dans l’exemple (3.47) le champψ dépend des deux variables t et x. Considérons, de manière générale, nvariables dynamiques ψk , k = 1, . . . , n, qui, elles-mêmes, dépendent de m

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 85

variables xs, s = 1, . . . , m (y compris le temps), soit ψk(xs) . Posons par

définition

ψk,s ≡∂ψk∂xs

, (3.50)

et notons [ψk,s] l’ensemble des dérivées partielles de ψk(x1, . . . , xm). La densité

de lagrangien est de la forme L(ψ1, [ψ1,s], . . . , ψn, [ψn,s]) et l’action

S =

L(ψ1, [ψ1,s], . . . , ψn, [ψn,s]) dx1 . . . dxm .

On se convaincra que la détermination de l’extrémum de l’action S sousl’ensemble des variations infinitésimales ψk → ψk + δψk, k = 1, . . . , n quis’annulent au bord du volume d’intégration, mène, après avoir effectué toutesles intégrations par parties, aux équations d’Euler-Lagrange généralisées

m∑

s=1

∂xs

(

∂L

∂ψk,s

)

=∂L

∂ψk, k = 1, . . . , n . (3.51)

En théorie des champs relativistes, il est naturel d’englober le temps t dans lesvariables (t, x, y, z) dont dépendent les champs ψk. Dans beaucoup d’autresproblèmes, il est commode de singulariser la variable temps. En définissant

ψk ≡∂ψk∂t

,

on obtient∂

∂t

(

∂L

∂ψk

)

=∂L

∂ψk−

m−1∑

s=1

∂xs

(

∂L

∂ψk,s

)

, (3.52)

dont (3.45) est un cas particulier.

Champ scalaire

Les résultats précédents nous font entrevoir le lagrangien d’un champscalaire à 3 dimensions, par exemple les ondes sonores dans un fluide com-pressible non-visqueux. En appelant ψ(r, t) la compression du fluide, et c lavitesse du son dans le fluide, la densité de lagrangien a la forme

L =1

2ρ [

1

c2(∂ψ

∂t)2 − (~∇ψ)2] . (3.53)

On obtient sans difficulté, à partir de la densité de lagrangien (3.53), l’équa-tion de propagation

1

c2∂2ψ

∂t2−∆ψ = 0 . (3.54)

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86 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

3.2.3 Champ électromagnétique

Le cas du champ électromagnétique est plus complexe. Il faut tenir comptede la nature vectorielle de ces champs, et surtout prendre en compte l’in-variance relativiste, propriété fondamentale des équations de Maxwell. Lechamp électromagnétique est inséparable des particules chargées qui en sontles sources et sur lesquelles il agit. Nous avons vu en (3.12) que l’actiond’un point matériel chargé dans un champ électromagnétique s’écrit commeSlibre + Sint où

Sint =

Lint dt =

(

q v ·A(r, t)− qΦ(r, t))

dt . (3.55)

Nous voulons généraliser (3.55) à une distribution de charge ρ(x, t) . Rappe-lons le quadrivecteur courant [2]

J = (cρ, j) , (3.56)

où ρ et j sont respectivement la densité de charge et la densité de courant.L’interaction avec un champ électromagnétique s’exprime en terme du qua-drivecteur potentiel

A = (Φ/c, A) . (3.57)

Le produit scalaire 4 J · A ≡ jµAµ au sens de Minkowski est un invariant

relativiste homogène à une densité de lagrangien. Posons donc

Sint =

(−J ·A) d3x dt (3.58)

Sint est un invariant relativiste, car J ·A et d3x dt (voir [3], chapitre 2) le sont.Pour un point matériel de charge q, de trajectoire ~x(t) et de vitesse ~v(t) , ontrouve (cρ,~j) = q

(

c δ3(~x− ~x(t)), ~v δ3(~x− ~x(t)))

, où δ3(~x) est la distributionde Dirac dans l’espace à trois dimensions (pour ceux qui la connaissent), etdans ce cas on récupère (3.55) de (3.58). La quantité

Lint = −J ·A (3.59)

est une densité de lagrangien de façon que Sint =∫

Lint d3x dt .

4. Dans cette section nous utilisons la convention d’Einstein de sommation sur lesindices répétés.

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 87

Cherchons maintenant l’action totale d’un système de particules chargéesdans un champ électromagnétique. Il nous manque encore la contributionSch =

Lch d3x dt dont se déduisent les équations du champ électromagné-

tique en l’absence de sources. Dans l’hypothèse la plus simple l’action totalesera alors de la forme

S = Spart + Sint + Sch . (3.60)

Connaissant la forme de Lint nous partons de l’hypothèse que les variables dy-namiques dont dépend la partie Sch de l’action sont toujours les composantesdu quadrivecteur potentiel A . Dans ce cas les équations d’Euler-Lagrange gé-néralisées (3.51) s’écrivent

∂xν

(

∂L

∂(∂Aµ

∂xν)

)

=∂L

∂Aµ, µ = 0, 1, 2, 3 . (3.61)

La partie Lint (3.59) du lagrangien, que nous connaissons déjà, va contribuerun terme −jµ au membre de droite de cette équation.

Pour continuer jetons encore un coup d’œil sur la forme covariante deséquations de Maxwell ([2], ch. 7.3 ou [3], ch. 6). Les champs s’expriment àpartir des potentiels Φ et A par

B = ~∇×A , E = −~∇Φ− ∂A

∂t. (3.62)

En utilisant la notation ∂µ = ∂/∂xµ et ∂µ = ηµν∂ν , on exprime le tenseurchamp électromagnétique par

F µν = ∂µAν − ∂νAµ . (3.63)

En notation matricielle ce tenseur antisymétrique s’écrit

(F ) =

0 −Ex/c −Ey/c −Ez/cEx/c 0 −Bz By

Ey/c Bz 0 −Bx

Ez/c −By Bx 0

(3.64)

en accord avec (3.62). Le couple d’équations de Maxwell homogènes (3.27)découle de la structure du tenseur F µν , qui assure les équations (ou identités)

∂µF νρ + ∂νF ρµ + ∂ρF µν = 0 . (3.65)

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88 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

On vérifiera qu’elles se réduisent pour µ, ν, ρ mutuellement différents 5 à

~∇× E = −∂B∂t

, ~∇ ·B = 0 .

Les deux équations de Maxwell inhomogènes relient les champs aux densitésde charge et de courant. Elles s’écrivent

∂νFνµ = µ0 j

µ , (3.66)

et elles se ramènent bien à

~∇ · E =ρ

ε0, ~∇×B = µ0 j +

1

c2∂E

∂t.

Au vu de (3.61) et de (3.59), les équations (3.66) nous font chercher Lch sousune forme qui donne

∂xν

(

∂Lch∂(∂νAµ)

)

≡ − 1

µ0∂νF

νµ ,∂Lch∂Aµ

= 0 . (3.67)

Pour satisfaire à cette identité l’expression pour Lch devrait donc être bili-néaire dans les variables ∂νAµ . Nous la voulons aussi invariante relativistece qui nous limite aux trois expressions (voir aussi [2], ch. 7.3) 6

Fµν Fµν = −2(

E2

c2−B2) , ∗Fµν F

µν = 4E ·Bc

, (∂µAµ)2 . (3.68)

Nous vérifions qu’en retenant le premier terme et en posant

Lch = − 1

4µ0Fµν F

µν (3.69)

on trouve la relation recherchée (3.67). En revenant à (3.68) nous constatonsd’ailleurs que le troisième terme (∂µA

µ)2 n’est pas invariant de jauge, et quele deuxième terme ∗F µν Fµν n’est pas invariant dans les transformations deLorentz de déterminant -1 (ce qui implique une brisure de la symétrie parité,symétrie pourtant respectée par l’électromagnétisme).

5. si au moins 2 indices sont égaux le membre de gauche est identiquement nul6. Nous utilisons la définition ∗Fµν = 1

2εµνρσ F

ρσ , qui fait apparaître le tenseur εµνρσ .Il est complètement antisymétrique dans une permutation de ses 4 indices et il satisfait àε0123 = 1 .

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 89

Nous avons donc trouvé une expression pour l’action totale de l’électro-magnétisme. En ajoutant (3.69), (3.58), et (3.3) adaptée à une densité conti-nue de la masse ρm(x, t) , on obtient

S =

∫(

− 1

4µ0

Fµν Fµν − J · A− ρm c

2√

1− v2/c2)

d3x dt . (3.70)

On voit à partir de (3.68), (3.69) que le champ électromagnétique physiquedans le vide, en dehors des charges, est celui qui rend extrémale la différenceE2/c2−B2, compte tenu des contraintes imposées par la présence des sourceset aux limites. Pour une onde plane cette différence s’annule. La contrainteétait explicite dans le cas simple du champ électrostatique traité en 2.5.4.

Exercices

3.1 Repère tournant et pendule de FoucaultLe lagrangien d’une particule libre nonrelativiste de masse m prend la forme

L =m

2v0

2

où v0 est la vitesse de la particule dans un référentiel inertiel S0 .

1. On se place dans un référentiel S qui est en rotation uniforme parrapport à S0 à la vitesse angulaire Ω . Quelle est la forme du lagrangiendans S ?

2. Ecrire les équations d’Euler-Lagrange dans S .

3. En partant du lagrangien déduire le moment p conjugué à r dans S .Comparer au cas d’une particule dans un champ magnétique. Montrerque l’énergie E est conservée.

4. On considère un pendule de longueur l , dans un référentiel en rota-tion lente. Dans ce cas on peut négliger le terme d’ordre Ω2 dans le

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90 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

x

ΩΩz

Ωx

θ

z

Figure 3.2 – Pendule pesant de longueur l .

lagrangien. On passe en coordonnées sphériques. Le vecteur position ~rdu pendule s’écrit alors comme

~r = l (sin θ cosφ, sin θ sinφ, − cos θ) , voir Fig. 3.2.

On choisira les axes tels que

~Ω = (Ωx, 0, Ωz) .

On se limite aux petites oscillations du pendule. Dans ce cas, montrerque le terme m~v · (~Ω× ~r) du lagrangien L dans S prend la forme

ml2(

Ωz θ2 φ+ Ωx (θ sinφ+ θ cosφ φ)

)

.

5. Le pendule est soumis au champ gravitationnel de la Terre, orientéselon l’axe z, voir Fig.3.2. Exprimer l’énergie potentielle du pendule enfonction de l’angle θ pour θ ≪ 1 .

6. En ajoutant le terme m2v2 , le lagrangien du pendule pesant dans le

repère tournant s’écrit en coordonnées sphériques comme

Lp =m

2l2(

θ2 + θ2 φ2 + 2Ωz θ2 φ+ 2Ωx (θ sinφ+ θ cosφ φ)

)

−mg lθ2

2

où nous avons négligé les termes d’ordre Ω2 ou d’ordre θ3 . Pourquoi lelagrangien simplifié

Ls =m

2l2(

θ2 + θ2 φ2 + 2Ωz θ2 φ)

−mg lθ2

2

donne-t-il les mêmes équations du mouvement que le lagrangien Lp ?

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3.2. THÉORIE LAGRANGIENNE DES CHAMPS 91

7. Déduire de Ls les moments conjugués pθ et pφ , des variables angulairesθ et φ .

8. Ecrire les équations du mouvement et montrer que pφ est conservé.

9. On choisit pφ ≡ 0 . Comment peut-on réaliser cette condition expéri-mentalement ?

10. Pour pφ ≡ 0 , donner la solution pour φ(t) .Pour le pendule de Foucault au Panthéon, voir Fig.3.3, la Terre consti-tue un référentiel tournant, dont l’axe de rotation ne passe pas par lepoint ~r = 0 . Comment doit-on modifier le terme m~v · (~Ω × ~r) du la-grangien dans ce cas ? Expliquer pourquoi cette modification ne changepas les équations du mouvement du pendule.A quelle vitesse angulaire, en degrés par heure, le plan des oscillationsdu pendule de Foucault tourne-t-il (toujours pour pφ ≡ 0 ), sachantque la latitude de Paris est de 49o ?

49o

Paris

z

Ω

Figure 3.3 – Rappel géographique

3.2 Le lagrangien de ProcaNous considérons la densité de lagrangien

Lproca = −1

4F µν Fµν +

µ2

2AµA

µ − µ0jµAµ .

L’essentielle modification par rapport à (3.70) est le terme µ2

2AµA

µ . (Nousavons supprimé la contribution Lpart qui ne nous intéresse pas ici, et nousavons introduit un facteur multiplicatif global sans importance, pour sim-plifier la notation). Ecrire l’équation d’onde pour Aµ qui se déduit de celagrangien. On utilisera la jauge de Lorentz ∂µA

µ = 0 . Pour J = 0 on trouve

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92 Théorie lagrangienne de l’électromagnétisme

des ondes planes comme solutions de cette équation. Quelle est la relationentre la pulsation ω et le vecteur d’onde k de ces ondes ? En utilisant lesrelations, de Planck-Einstein E = ~ω , et d’Einstein-de Broglie p = ~k , pourle photon, donner l’interprétation physique de la quantité ~µ/c.

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Chapitre 4

Formalisme canonique de

Hamilton

C’est dans le silence des loisque naissent les grandes actions.

Donatien, Alphonse, Marquis de Sade

Le travail de Lagrange avait été suivi par le monumental Traité de Méca-nique Céleste en 5 volumes de Laplace, publié entre 1799 et 1825. Ce traitése révéla d’une importance décisive pour l’astronomie aussi bien que pour laphilosophie. Cela nous mène à la formulation dite canonique de la mécaniqueanalytique due à Hamilton 1 qui date de 1834. Elle est plus commode pourun certain nombre de problèmes, notamment la mécanique d’ensembles depoints. Mais elle est surtout d’une richesse impressionnante tant par ses dé-veloppements mathématiques que physiques. Ce texte est avant tout orientévers les applications à la mécanique, mais nous ferons allusions à quantitéd’autres retombées des travaux de Hamilton. Dans la partie 1, nous expose-rons ce formalisme qui consiste à décrire l’état d’un système par les variablesconjuguées que sont les positions x et les moments conjugués de Lagrangep, et non par les positions et les vitesses. Autrement dit, on décrit cetétat par un point dans l’espace des phases, un système étant caractérisé parun hamiltonien dérivé du lagrangien par une transformation de Legendre.Par ce nouveau regard sur le problème qui rend les variables dans l’espacedes phases complètement indépendantes, l’étude de systèmes hamiltoniens

1. Comme au chapitre 2 on pourra se référer à Landau et Lifshitz [9], à Herbert Gold-stein [10] et à Guignoux et Silvestre-Brac [11] pour tout complément.

93

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94 Formalisme canonique de Hamilton

en mécanique, devient une étude géométrique : c’est le hamiltonien qui régitles propriétés géométriques de l’ensemble des trajectoires dans l’espace desphases.

Après avoir établi les équations canoniques de Hamilton, qui sont deséquations différentielles couplées du premier ordre en temps pour les va-riables d’état, nous abordons, dans la partie 2, avec les crochets de Poisson,une structure mathématique naturellement liée à la géométrie hamiltonienne.Les crochets de Poisson ont été inventés en 1809. Carl Gustav Jacob Jacobiconsidérait que c’était la plus grande découverte de Poisson, qui, pourtant,avait fait des contributions importantes aux mathématiques, aux probabili-tés, à la mécanique analytique, à l’électricité (sans compter ses nombreusesfonctions officielles). Cette étude nous permettra de voir les lois de conser-vation sous un angle nouveau. Elle nous permettra d’analyser les transfor-mations canoniques, qui ont de multiples applications, et qui font apparaîtreune parfaite équivalence entre les variables d’état x et p. L’espace desphases est, du point de vue mathématique, le véritable espace approprié à ladescription de l’évolution d’un système de points, contrairement à l’espace« empirique » des variables position. Nous établirons notamment le théorèmede Liouville, propriété géométrique remarquable de l’évolution d’un systèmedans l’espace des phases. Nous parviendrons ensuite naturellement à l’éton-nante découverte faite par Dirac en 1925. Il y a une symétrie entre mécaniqueanalytique et mécanique quantique si l’on fait correspondre aux crochets dePoisson classiques les commutateurs des observables quantiques.

Dans la partie 3, nous présentons quelques aspects des systèmes dyna-miques. Ce type de problème physique a, en effet, été une extraordinairesource de découvertes tant en mathématiques qu’en physique. Le fondateurde ce champ d’étude est Henri Poincaré, dès 1885, notamment quand il aétudié le problème des 3 corps. Cela mène à des problèmes fascinants : lesproblèmes limites à t = ∞, les attracteurs et les attracteurs étranges, lesbifurcations, le chaos etc. L’attracteur étrange le plus célèbre est sans doutel’attracteur de Lorenz, du nom de son inventeur Edward N. Lorenz qui ledécouvrit en 1963 à partir d’un modèle mathématique de l’atmosphère, etrelança de façon spectaculaire avec l’effet « aile de papillon » en météorolo-gie, l’intérêt pour le chaos, inventé par Poincaré 80 ans plus tôt.

La partie 4 est consacrée à l’équation de Hamilton-Jacobi, où l’on travailledirectement avec l’action et non plus le lagrangien ou le hamiltonien. Aprèsavoir établi l’équation de Hamilton-Jacobi, nous découvrirons une série im-pressionnante de résultats. Nous verrons comment, pour les systèmes conser-

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4.1. EQUATIONS CANONIQUES 95

vatifs, le flot des trajectoires est orthogonal aux surfaces d’action constante.Cela nous fera redécouvrir le Principe de Maupertuis sous une forme géomé-trique. Nous verrons alors comment l’optique géométrique apparaît commelimite de l’optique ondulatoire, comme l’avait découvert Hamilton. Cette dé-monstration fait intervenir ce que l’on nomme l’eikonal qui est l’analogueoptique de l’action. Dans l’approximation des faibles longueurs d’onde diteapproximation eikonale, l’onde se propage avec un vecteur d’onde localementperpendiculaire aux surfaces sur lesquelles l’eikonal est constant. Ces sur-faces sont les fronts d’ondes géométriques. L’approximation eikonale corres-pond exactement au principe de Fermat. L’interprétation géométrique n’estautre que le Principe de Huygens-Fresnel. Enfin, nous montrerons commentle même cadre de pensée peut être appliqué à la mécanique ondulatoire età l’équation de Schrödinger. Cela constitue la célèbre approximation semi-classique de Brillouin, Kramers et Wentzel.

Remarquons que le formalisme hamiltonien se prête moins aux problèmesrelativistes que le formalisme lagrangien. Car le hamiltonien, étant lié à l’éner-gie qui est la composante genre temps d’un quadrivecteur, n’est pas un inva-riant relativiste. Nous nous limiterons donc essentiellement à des illustrationsnon-relativistes du formalisme canonique.

4.1 Equations canoniques

De fait, la formulation (1.8) du principe de moindre action n’est pas cellede Lagrange (plus complexe). Elle est due à Hamilton, un des plus grandsgénies de la science, parfois ignoré par les mécaniciens français, qui étaitfasciné par Lagrange et par cette Mécanique analytique, qu’il qualifiait de« poème scientifique par le Shakespeare des Mathématiques ». Le formalismecanonique de Hamilton date de 1834. Il est plus commode pour un certainnombre de problèmes, et contient le germe d’une structure mathématiqueparticulièrement féconde qui mènera aux groupes de Lie, aux systèmes dy-namiques et à quantité d’autres développements. Hamilton se propose dedécrire l’état d’un système par les variables xi et pi, moments conjugués, aulieu de xi et xi.

Supposons que l’on sache inverser l’équation (2.15) et calculer xi enfonction de xi et pi, que nous prenons comme nouvelles variables d’état 2.

2. Ici nous nous limitons aux cas suivants : soit il n’existe pas de contrainte entre les xi,soit ces contraintes ont été exprimées par des multiplicateurs de Lagrange. Dans ces cas le

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96 Formalisme canonique de Hamilton

Le problème posé est d’obtenir les équations du mouvement de xi et pien termes de ces mêmes variables, en éliminant les xi. La solution consisteà effectuer ce qu’on appelle une transformation de Legendre 3. Introduisonsla fonction de Hamilton, ou hamiltonien

H(xi, pi; t) =∑

i

pixi − L . (4.1)

Considérons un problème à une dimension et écrivons la différentielle totale

dH = p dx+ x dp− ∂L∂x

dx− ∂L∂x

dx− ∂L∂t

dt . (4.2)

Si nous tenons compte de (2.15), le premier et le quatrième terme se com-pensent, et le long de la trajectoire physique, le troisième n’est autre que−p dx d’après (2.16), d’où

dH = x dp− p dx− ∂L∂t

dt (4.3)

ce qui donne les équations du mouvement

x =∂H

∂p, p = −∂H

∂x(4.4)

qu’on appelle équations canoniques de Hamilton. Pour un nombre quelconquede degrés de liberté on trouve

xi =∂H

∂pi, pi = −∂H

∂xi. (4.5)

Les équations de Hamilton (4.5) constituent un système différentiel couplédu premier ordre dans le temps. Elles sont symétriques en x et p (au signe −moment conjugué de xi «existe» toujours puisque le lagrangien contient un terme cinétiquequi est fonction nonlinéaire de xi . Dans le deuxième cas les moments conjugués pourraientfaire apparaître les multiplicateurs de Lagrange, qui généralement peuvent dépendre dutemps.

3. Les transformations de Legendre sont d’un usage courant lorsque l’on souhaite fairedes changements de variables. On choisit tel ou tel couple (ou ensemble) de variablespar commodité suivant le problème considéré. Un exemple simple est celui des fonctionsou potentiels thermodynamiques. A partir de l’énergie interne U qui est commode sil’on travaille avec le volume et l’entropie dU = −PdV + TdS, on passe à l’énergie libreF = U − TS si l’on travaille avec le volume et la température dF = −PdV − SdT etc.

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4.1. EQUATIONS CANONIQUES 97

près, sur lequel nous reviendrons). Elles présentent le gros avantage techniqued’exprimer directement l’évolution dans le temps des variables d’état commefonction de ces mêmes variables.La valeur de la fonction de Hamilton le long de la trajectoire physique esttout simplement l’énergie (2.23). Si le lagrangien ne dépend pas explicitementdu temps : ∂L/∂t = 0 , on a d’après (4.2) ∂H/∂t = 0 , et par conséquentl’énergie est conservée :

∂H

∂t= 0 =⇒ d

dtH = 0 . (4.6)

Exemple : Hamiltonien d’une particule en champ électromagné-tique

Dans le cas non-relativiste nous partons du lagrangien (3.33) et de l’ex-pression du moment conjugué (3.35). La transformation de Legendre donnele hamiltonien non-relativiste. A l’aide de (3.35) on l’exprime en fonction dep et de r :

H =∂L∂v

· v − L =1

2m(p− qA(r, t))2 + qΦ(r, t) . (4.7)

En partant du lagrangien relativiste (3.13) et de l’expression du momentconjugué (3.14) on obtient de la même manière le hamiltonien relativiste

H =√

m2 c4 + c2 (p− qA)2 + qΦ , (4.8)

où l’on retrouve encore une «prescription minimale» pour introduire l’inter-action électromagnétique : on part de l’expression (3.6) pour l’énergie d’uneparticule libre relativiste, on exprime plib comme p − qA , et on remplacel’énergie Elib par Elib + q φ . Le long de la trajectoire physique H prend doncla valeur Elib + q φ .

C’est cette prescription que Schrödinger appliquait à l’équation d’ondelibre des ondes de de Broglie pour calculer les niveaux de l’atome d’hydro-gène. Après quelques méandres imprévus, cela le fit aboutir à sa célèbrissimeéquation.

On retrouve (4.7) aussi, à la constante mc2 près, par la limite non-relativiste de (4.8). Et (4.7) s’obtient encore par la règle de substitutionminimale, en partant du hamiltonien nonrelativiste libre Hlib =

12m

p2lib .

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98 Formalisme canonique de Hamilton

Nous avons constaté en 3.1.3 que les équations du mouvement sont inva-riantes de jauge (voir aussi l’exercice 4.1), même si le hamiltonien en dépend.Ce point est moins évident lorsque l’on considère la transposition quantiquedu résultat 4. Dans l’expérience d’Aharonov et Bohm 5 on peut mettre enévidence que le hamiltonien s’exprime à partir des potentiels, et non pas deschamps.

4.2 Crochets de Poisson ; Espace des phases

Pour un système à N degrés de liberté l’espace des phases est définicomme l’espace à dimension 2N qui est donné par l’ensemble des points(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) . Considérons deux grandeurs physiques f et g, fonc-tions des variables d’état (xi, pi), i = 1, . . . , N et éventuellement du temps.On appelle crochet de Poisson de f et g la quantité

f, g =N∑

i=1

(

∂f

∂xi

∂g

∂pi− ∂f

∂pi

∂g

∂xi

)

. (4.9)

Les crochets de Poisson ont les propriétés suivantes, que l’on établit directe-ment

f, g = −g, f , f1 + f2, g = f1, g+ f2, g (4.10)

f1f2, g = f1f2, g+ f1, gf2 . (4.11)

Pour les variables d’état (xi, pi) on a les relations importantes

xi, xj = 0 , pi, pj = 0 , xi, pj = δij , (4.12)

et

xi, f =∂f

∂pipi, f = − ∂f

∂xi. (4.13)

On établira sans difficulté l’identité de Jacobi

f, g, h+ g, h, f+ h, f, g = 0 . (4.14)

4. Voir J.-L. Basdevant et Jean Dalibard, Mécanique quantique Edition 2001, Chapitre15, § 5.3.

5. A. Tonomura et al., Phys. Rev. Lett. 56, 792, (1986).

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4.2. CROCHETS DE POISSON, ESPACE DES PHASES 99

4.2.1 Evolution temporelle, constantes du mouvement

Calculons maintenant l’évolution temporelle d’une quantité physique quel-conque f(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN ; t) . On a

f =df

dt=∑

i

(∂f

∂xixi +

∂f

∂pipi) +

∂f

∂t. (4.15)

En utilisant les équations de Hamilton (4.5), on obtient

f = f,H+ ∂f

∂t. (4.16)

En particulier, les équations canoniques (4.5) s’écrivent de façon symétrique

xi = xi, H , pi = pi, H . (4.17)

Dans le formalisme canonique, le hamiltonien gouverne l’évolution dans letemps du système. Si une grandeur physique f ne dépend pas explicitementdu temps, c’est-à-dire ∂f/∂t = 0, alors son évolution dans le temps estobtenue à partir du crochet de Poisson de f et du hamiltonien

f = f,H . (4.18)

Nous avons donc établi le résultat : Si le crochet de Poisson avec le ha-miltonien d’une fonction f(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) s’annule, alors f est uneconstante du mouvement.Plus précisément une grandeur f(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN ; t) est nommée inté-grale première si elle satisfait f,H = 0 . On l’appelle constante du mouve-ment si df/dt = 0 . Les deux notions sont équivalentes si ∂f/∂t = 0 .

Théorème de Poisson : Si f et g sont deux intégrales premières, alors leurcrochet de Poisson est aussi une intégrale première.Ce théorème, dû à Poisson, découle de l’identité de Jacobi (4.14)

H, f, g+ f, g,H+ g, H, f = 0 . (4.19)

Par hypothèse g,H = 0 et H, f = 0. Par conséquent,

H, f, g = 0 ,

et f, g est une intégrales première.

Ce théorème peut permettre de trouver de nouvelles constantes du mouve-ment.

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100 Formalisme canonique de Hamilton

4.2.2 Transformations canoniques

Dans le formalisme lagrangien, les équations d’Euler-Lagrange gardentla même forme dans tout changement de coordonnées xi −→ Xi(x1, . . . , xn)(par exemple dans le passage de coordonnées cartésiennes (x, y, z) en coor-données polaires (r, θ, φ)). Ces changements de coordonnées dans l’espace desconfigurations sont appelés des transformations ponctuelles. Dans le forma-lisme hamiltonien, il existe une classe encore plus large de transformations quilaissent invariantes les équations du mouvement. On peut, en effet, mélangerles variables d’état que sont les positions xi et les moments conjugués pi .On appelle transformation canonique une transformation de coordonnées

Xi(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) , Pi(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) (4.20)

telle que les équations de Hamilton gardent la même forme dans ces nouvellesvariables. Elle préserve donc les équations du mouvement :Soit H ′(X1, . . . , XN , P1, . . . , PN) la fonction de Hamilton exprimée dans lesvariables Xi, Pi , alors, dans une transformation canonique,

Xi =∂H ′

∂Pi, Pi = −∂H

∂Xi. (4.21)

Le théorème suivant est d’une grande importance pratique.

Théorème : Une transformation (x1, . . . , pN) → (X1, . . . , PN) qui préserve lescrochets de Poisson des variables canoniques (4.12), est une transformationcanonique. Une transformation canonique préserve les crochets de Poisson.

Le critère du théorème signifie que les crochets de Poisson exprimés dansles nouvelles variables soient les mêmes que ceux exprimés dans les variablesinitiales, c’est-à-dire

Xi, Xj = 0 , Pi, Pj = 0 , Xi, Pj = δij . (4.22)

Donnons une démonstration directe. Pour la simplifier, considérons un seulcouple de variables (x, p) et une transformation (x, p) → (X(x, p), P (x, p)),tel que X,P = 1 . Notons H(x, p) et H ′(X,P ) l’expression de la fonctionde Hamilton dans ces deux systèmes de variables. L’évolution temporelle deX et P s’écrit dans les variables (x, p) comme X = X,H et P = P,Hsoit, par exemple,

X =∂X

∂x

∂H

∂p− ∂X

∂p

∂H

∂x. (4.23)

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4.2. CROCHETS DE POISSON, ESPACE DES PHASES 101

La fonction de Hamilton s’exprime dans les nouvelles variables comme

H ′(X,P ) = H (x(X,P ), p(X,P )) , (4.24)

et son inverseH(x, p) = H ′ (X(x, p), P (x, p)) . (4.25)

Si l’on différencie H par rapport à x et à p dans l’expression précédente, onobtient

∂H

∂x=∂H ′

∂X

∂X

∂x+∂H ′

∂P

∂P

∂x;

∂H

∂p=∂H ′

∂X

∂X

∂p+∂H ′

∂P

∂P

∂p. (4.26)

En reportant dans (4.23), on obtient sans difficulté

X =

(

∂X

∂x

∂P

∂p− ∂X

∂p

∂P

∂x

)

∂H ′

∂P≡ X,P∂H

∂P,

P =

(

∂P

∂x

∂X

∂p− ∂P

∂p

∂X

∂x

)

∂H ′

∂X≡ −X,P∂H

∂X.

Puisque, par hypothèse, X,P = 1, on obtient bien les équations canoniques

X =∂H ′

∂P, P = −∂H

∂X. (4.27)

Pour l’opposé, c’est à dire qu’une transformation canonique préserve les cro-chets de Poisson entre les Xi et les Pj, nous nous limitons encore à un sys-tème à un degré de liberté. Dans ce cas l’équation ci-dessus X = X,P ∂H′

∂P

montre que X,P = 1 , vu que pour une transformation canonique X =∂H′

∂P.

(a) Remarques

1. L’extension à un nombre quelconque N de variables

(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) → (X1, . . . , XN , P1, . . . , PN)

ne pose pas de problème.Il est même possible d’élargir la notion de transformation canonique enincluant des transformations (4.20) dépendant explicitement du temps :

Xi(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN ; t) , Pi(x1, . . . , xN , p1, . . . , pN ; t) .

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102 Formalisme canonique de Hamilton

Dans ce cas le théorème précédent reste vrai, sous condition d’ajouterle terme

N∑

i=1

(

Pi∂Xi

∂t−Xi

∂Pi∂t

)

au hamiltonien H ′(X1, . . . , XN , P1, . . . , PN) .

2. On voit que puisque les transformations canoniques mélangent coordon-nées et impulsions, il n’y a pas de différence fondamentale entre ces va-riables d’état. Dans le formalisme hamiltonien, les notions de coordon-nées d’espace et d’impulsions (assimilée à une quantité de mouvement)perdent de leur sens intuitif premier. Pour cette raison, on a coutumed’appeler ces variables des variables canoniquement conjuguées que l’onnote (qi, pi) avec les relations qi, pj = δij , qi, qj = pi, pj = 0.La transformation canonique très simple (X = p, P = −x ) montre"l’interchangeabilité" de ces variables en ce sens. Les variables canoni-quement conjuguées caractérisent l’état du système par un point dansl’espace des phases.

3. Pour tout point (x1, . . . , xn, p1, . . . , pn) de l’espace des phases on peutconsidérer son évolution temporelle entre les temps t et t′ sous l’in-fluence du hamiltonien H . Ceci définit une transformation dans l’espacedes phases qu’on écrit sous la forme

(x1(t), . . . , pN(t)) → (x1(t′), . . . , pN(t

′)) .

On se convainc 6 qu’il s’agit bien d’une transformation canonique, sa-chant que les équations de Hamilton gardent leur forme sous une trans-lation dans le temps. Le mouvement hamiltonien apparaît donc commeréalisant à chaque instant une transformation canonique des variablesd’état.

4. Plus généralement, on nomme grandeurs canoniquement conjuguées qet p deux grandeurs physiques telles que q, p = 1. Un exemple est, encoordonnées sphériques, l’angle azimutal φ et la projection du momentcinétique suivant l’axe polaire Lz (voir l’exercice 2.7 du chapitre 2).

6. Tout point (x1, . . . , pN ) dans l’espace des phases peut être vu comme un point d’unetrajectoire hamiltonienne au moment initial t. La transformation lui associe alors le point(x′1, . . . , p

N ) par lequel passe la même trajectoire au moment t′. Evidemment les équationsde Hamilton sont valables aux deux moments t et t′.

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4.2. CROCHETS DE POISSON, ESPACE DES PHASES 103

(b) Exemple : oscillateur harmonique à une dimension, variablesangle-action.

Soit un oscillateur harmonique à une dimension de hamiltonien

H =1

2mp2 +

mω2

2x2 ,

où, bien entendu, x et p sont canoniquement conjugués. La transformation

x = X/√mω , p = P

√mω

est une transformation canonique : X,P = 1 , et le hamiltonien s’écrit avecces variables

H = ω(P 2 +X2)/2 .

La rotation dans l’espace des phases

ξ = X cos θ + P sin θ , Π = P cos θ −X sin θ , (4.28)

où θ est un angle fixe quelconque, est encore une transformation canonique :

ξ,Π = X,P = 1 .

L’expression de la fonction de Hamilton reste de même forme :

H = ω(Π2 + ξ2)/2 .

Il s’agit là d’un exemple important de symétrie dynamique d’un système.C’est, en l’occurrence, une des nombreuses symétries de l’oscillateur harmo-nique. Cet argument s’étend à N degrés de liberté. La méthode de Diracdes opérateurs de création et d’annihilation en mécanique quantique 7 reposedirectement sur cette symétrie.

Cette symétrie peut être exploitée de façon plus poussée. Dans l’espacedes phases, ici à deux dimensions (X,P ), passons en coordonnées polaires enintroduisant des variables (A,ϕ) définies par

X =√2A cosϕ , P =

√2A sinϕ , (4.29)

soit

A =X2 + P 2

2, ϕ = arctan(

P

X) . (4.30)

7. Voir J.L. Basdevant et J. Dalibard, Mécanique quantique chapitre 7, section 5.

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104 Formalisme canonique de Hamilton

Les variables (A,ϕ) sont canoniquement conjuguées, comme on le vérifierasans difficulté :

A,ϕ = X1

1 + ( PX)2

1

X− P

1

1 + ( PX)2

(− P

X2) = 1 .

Dans ces variables, le hamiltonien s’écrit simplement

H = ω A ,

d’où les équations du mouvement

H = ωA , A,ϕ = 1 ⇒ A = 0 , ϕ = −ω , (4.31)

dont la solution est évidente

A = E/ω = Cte , ϕ = −ωt+ ϕ0 , (4.32)

où E est l’énergie de l’oscillateur (constante du mouvement). L’intérêt decette opération est de ramener le problème à une seule variable dépendant dutemps, l’angle ϕ. Puisque l’énergie, proportionnelle à l’action A, est conser-vée, seule la variable angulaire ϕ évolue. La variable ϕ est une variable cy-clique 8. Elle ne figure pas dans la fonction de Hamilton, ce qui entraîne laconservation de la variable conjuguée A.

L’interprétation géométrique dans l’espace (X,P ), qui ici est l’espace desphases, est simple. Le mouvement se fait sur un cercle de rayon A = E/ω quidépend de l’énergie E, constante du mouvement. Sur ce cercle, le mouvementdu point (X,P ) est uniforme, de vitesse angulaire ω : ϕ = −ωt+ ϕ0.

Nous avons évoqué les variable cycliques au 2.3.2. La recherche de va-riables cycliques, c’est-à-dire de variables qui ne figurent pas explicitementdans la fonction de Hamilton ou de Lagrange, joue un rôle important, no-tamment dans l’investigation des systèmes intégrables.

4.2.3 Théorème de Liouville

L’évolution dans l’espace des phases (x1, . . . , xN , p1, . . . , pN) donne unereprésentation géométrique particulièrement utile en mécanique. Un pointde l’espace des phases correspond à un état du système. Lorsque le système

8. La notion de variable cyclique s’applique de la même manière au formalisme hamil-tonien que dans le formailsme lagrangien.

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4.2. CROCHETS DE POISSON, ESPACE DES PHASES 105

évolue, ce point se déplace dans l’espace des phases. On définit l’élément devolume dans l’espace des phases par

dΩ = dx1 . . . dxN dp1 . . . dpN . (4.33)

Soit un volume quelconque Ω de l’espace des phases, Ω =∫

dΩ, nous affir-mons que ce volume est invariant par rapport aux transformations canoniques

dx1 . . . dxN dp1 . . . dpN =

dX1 . . . dXN dP1 . . . dPN . (4.34)

En effet, dans le changement de variables, on a∫

dX1 . . . dXN dP1 . . . dPN =

|J | dx1 . . . dxN dp1 . . . dpN

où J est le jacobien de la transformation. Or, le jacobien d’une transformationcanonique est égal à un.

C’est évident sur le petit exemple 4.2.2 (b) ci-dessus. Si l’on considère lecas simple d’un seul couple de variables canoniquement conjuguées (x, p) →(X,P ) comme en 4.2.2, la démonstration est simple. En effet, le jacobienn’est autre que le crochet de Poisson X,P

J =∂X

∂x

∂P

∂p− ∂X

∂p

∂P

∂x= X,P = 1 (4.35)

égal à un, pour une transformation canonique, comme nous l’avons vu en4.2.2. Pour N variables canoniquement conjuguées x1 . . . xN , p1 . . . pN l’argu-ment devient techniquement plus lourd, tout en se basant toujours sur lescrochets de Poisson.

Considérons maintenant un volume Ω de l’espace des phases. Chaquepoint de ce volume se déplace suivant les équations de Hamilton. Le mouve-ment peut se comprendre, nous venons de le dire, comme réalisant à chaqueinstant une transformation canonique des variables d’état dans l’espace desphases. Nous aboutissons ainsi à un résultat important, notamment en phy-sique statistique :

Théorème de Liouville : Un volume de l’espace des phases reste inchangé lorsd’une évolution hamiltonienne.

Cette propriété géométrique remarquable est indépendante de la formeparticulière du hamiltonien. Elle découle de la structure des équations deHamilton.

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106 Formalisme canonique de Hamilton

4.2.4 Flot hamiltonien

Une autre propriété géométrique intéressante est la suivante. La fonctionde Hamilton H(x, p) est définie dans l’espace des phases. Considérons, danscet espace, le champ de vecteurs de composantes (x, p) c’est-à-dire

x =∂H

∂p, p = −∂H

∂x.

On appelle flot de ce champ de vecteurs l’ensemble des courbes dont la tan-gente en chaque point est colinéaire au vecteur (∂H

∂p,−∂H

∂x) en ce point. On

remarque que le flot de (x, p), encore appelé flot hamiltonien, est en chaquepoint orthogonal au gradient du hamiltonien en ce point

~∇H =

(

∂H

∂x,∂H

∂p

)

.

Dans l’exemple 4.2.2 (b) ci-dessus, le résultat est tout simple : les trajectoiresdans le plan (X,P ) sont des cercles centrés à l’origine et le gradient deH = (P 2 + X2)/2 est porté par les droites passant par l’origine. Cela peutêtre énoncé réciproquement : le gradient de H = (P 2 +X2)/2 est porté parles droites passant par l’origine, les trajectoires sont donc des cercles centrésà l’origine.

Ce résultat se généralise à un nombre quelconque de variables (x,p), dansle sens que le mouvement reste limité au surfaces H = cste, orthogonales entout point à ~∇H = (~∇xH, ~∇pH) . On peut ramener les lois de conservationde l’impulsion et du moment cinétique à des considérations géométriques dumême type .

4.2.5 Lien entre mécanique analytique et mécanique quan-tique

Les formules ci-dessus nous font entrevoir une chose étonnante : il y aune forte analogie de structure entre la mécanique analytique, et la méca-nique quantique. On démontre en mécanique quantique 9 ce qu’on appelle lethéorème d’Ehrenfest : la dérivée temporelle de la valeur moyenne 〈a〉 d’une

9. Voir par exemple J.L. Basdevant et J. Dalibard, Mécanique quantique chapitre 7,Section 3.

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4.3. SYSTÈMES DYNAMIQUES 107

grandeur A est reliée au commutateur de l’observable A et du hamiltonienH par la relation

d

dt〈a〉 = 1

i~〈[A, H]〉+ 〈∂A

∂t〉 . (4.36)

Mis à part le fait qu’en mécanique quantique on considère des valeurs moyennesdans un état donné, (4.36) a la même structure que (4.16) si l’on remplaceles crochets de Poisson par les commutateurs, divisés par i~, des observablesquantiques. Cette même remarque s’applique aux relations de commutationcanoniques de Heisenberg des observables conjuguées de position x et d’im-pulsion p

[xj , pk] = i~δjk , (4.37)

que l’on rapprochera de (4.12). En effet Heisenberg avait introduit ces rela-tions en 1925 pour rendre compte des niveaux d’énergie discrets des atomes,et Dirac quelques semaines plus tard, à la suite d’une conférence de Heisen-berg, avait découvert cette identité de structure des deux mécaniques. Tousles deux avaient 23 ans. Bien entendu, la nature mathématique et l’interpréta-tion physique des êtres manipulés sont différentes dans les deux cas, mais leséquations qui les relient sont les mêmes à condition de faire la correspondanceentre les crochets de Poisson en mécanique analytique et les commutateurs -divisés par i~ - en mécanique quantique 10. Dans des problèmes complexes enmécanique quantique la relation entre crochets de Poisson et commutateurspeut servir de guide pour la quantification du système.

4.3 Systèmes dynamiques

Considérons un système dans l’espace des phases à 6N dimensions. Sil’on note X(t) = (ri(t), pi(t)) la position du système dans l’espace desphases à l’instant t, les équations de Hamilton sont de la forme X = F(X),

10. Cependant, en mécanique quantique, il faut faire attention à ce que les relations(4.37), valables pour des coordonnées cartésiennes, ne conservent pas toujours leur formedans un changement de variables canonique. Par exemple l’énergie cinétique à deux dimen-sions p2/2m s’exprime en terme des moments pr et pϕ, conjugués aux coordonnées polairesr, ϕ comme p2r/2m+p2ϕ/(2mr

2) où pr = mr et pϕ = mr2ϕ. Le hamiltonien correspondanten mécanique quantique s’écrit −~

2/2m[∂2/∂r2 + (1/r)∂/∂r + (1/r2) ∂2/∂ϕ2] . Au vu duterme (1/r)∂/∂r , ceci montre qu’on ne peut pas simplement remplacer pr → (~/i)∂/∂rpour maintenir (4.37) entre r et pr. Par contre le remplacement pϕ → (~/i)∂/∂ϕ est lebon, voir J.L. Basdevant et J. Dalibard, Mécanique quantique, chapitre 7, Section 4.

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108 Formalisme canonique de Hamilton

c’est-à-dire une équation différentielle du premier ordre pour l’évolution duvecteur à 6N composantes X(t), ce que l’on nomme un système dynamique.Ce type de problème a été une extraordinaire source de découvertes tant enmathématiques qu’en physique ; on pourra se référer à [11], [12], [13]. Le fon-dateur de ce champ d’étude est Henri Poincaré, en 1885, quand il a étudiéle problème des 3 corps. Une pléiade de mathématiciens célèbres ont étudiéce problème, qui est toujours un sujet d’étude de premier plan en mathéma-tiques : J.-C. Yoccoz a obtenu la médaille Fields en 1994 pour ses travauxsur le sujet, qu’il avait abordé avec Michael Herman, au Centre de Mathé-matiques de l’Ecole Polytechnique. On étudie l’ensemble des mouvementspossibles, ce qu’on appelle le flot de ces vecteurs. Cela mène à des problèmesfascinants : les problèmes limites à t = ∞, les attracteurs et les attracteursétranges ; les bifurcations, changements brusques de la nature de ces flots àcertaines valeurs des paramètres de F(X), et les comportements chaotiques.

4.3.1 Poincaré et le chaos dans le système solaire

Poincaré avait démontré que, dans un système gravitationnel impliquantplus de deux astres, il existe des régions dans l’espace des phases, où des tra-jectoires aussi proches que l’on veut initialement, s’éloignent l’une de l’autrede façon exponentielle avec le temps. 11. Cet effet est ce que l’on appelle lechaos. Il se rencontre dans quantité d’autres problèmes physiques. Suivantle système considéré, le temps caractéristique est très variable. Le systèmesolaire est donc un système dynamique très compliqué où ces comportementschaotiques existent. Il semble que pour certains aspects concernant la terre,l’échelle de temps pour la multiplication par e de l’incertitude sur les condi-tions initiales est de l’ordre de 10 millions d’années, de façon que la dyna-mique devient impredictible à partir de la centaine de millions d’années. Ceciest à mettre en relation avec l’âge du système solaire d’environ cinq milliardsd’années [13].

Un exemple simple de système chaotique est le jeu de dés. En poussant leschoses a l’extrême, dans le cadre de la mécanique classique, si l’on connaissaittrès précisément toutes les données du problème (conditions initiales, façonde lancer le dé, géométrie de celui-ci, etc...), on pourrait en principe prévoir

11. Au XIXe siècle, sous l’impulsion de Laplace, le développement en série des per-turbations avait donné des résultats extraordinairement précis en mécanique céleste. Aupassage, Poincaré montrait que ce développement ne convergeait pas ! Ce n’était qu’undéveloppement asymptotique.

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4.3. SYSTÈMES DYNAMIQUES 109

le résultat (la face sur laquelle il va retomber), et le phénomène n’aurait pasde caractère probabiliste. Toutefois, il est bien évident qu’à des conditionsinitiales extrêmement voisines correspondront des résultats d’expérience dif-férents, et qu’il nous faudrait donc posséder une information considérable surle système pour effectuer cette prévision. Typiquement on se limite donc àune description probabiliste du phénomène, dans laquelle on s’impose unecertaine ignorance des conditions initiales, qui sont choisies «au hasard». Cephénomène se retrouve dans la mécanique céleste, et bien d’autres problèmes,pour des conditions initiales qui sont voisines sans l’être de façon infinitési-male, pourvu que le temps d’évolution soit suffisamment long.

Le cas de 3 planètes de masses inégales gravitant autour d’un «Soleil» entenant compte de leurs interactions mutuelles est montré sur la figure 4.1. Onvoit que, si au début de l’évolution, tout se passe de façon relativement douce,la plus légère des planètes est tout simplement éjectée au bout d’un certaintemps. En faisant tourner l’ordinateur suffisamment longtemps, on s’aperçoitque l’ensemble des 2 autres, qui semble tout à fait tranquille après l’expulsionde la troisième, adopte des configurations elles-mêmes inattendues.

4.3.2 L’effet aile de papillon ; l’attracteur de Lorenz

On considère l’évolution d’une tranche d’air rectangulaire chauffée pardessous et refroidie par dessus. Les variables sont au nombre de trois : x estproportionnel à l’intensité du mouvement de convection, y est proportionnelà la différence de température entre les courants ascendants et les courantsdescendants, et z est proportionnel à la distortion du profil du gradient detempérature par rapport à la linéarité. Peu nous importe le détail de laphysique du problème. Dans le modèle de Lorenz, l’évolution temporelle estdonnée par le système différentiel non-linéaire à 3 variables

dx

dt= σ(y − x) ,

dy

dt= ρx− y − xz ,

dz

dt= xy − βz , (4.38)

où σ est la constante de Prandtl, qui caractérise la viscosité et la conducti-vité thermique du fluide, ρ est un paramètre de contrôle, qui représente ladifférence de température entre le bas et le haut du réservoir, et β mesure lerapport entre hauteur et largeur du système de convection.

Lorenz résolvait ces équations pendant la nuit avec des heures et des heuresd’ordinateur, par la méthode de pas discrets (xi, yi, zi) → (xi+1, yi+1, zi+1).Cela générait, à l’époque, des kilogrammes de papier (appelés «listings»).

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110 Formalisme canonique de Hamilton

Figure 4.1 – Evolution de 3 planètes, autour d’un soleil, en tenant compte de leursinteractions mutuelles. Le déroulement temporel des images doit se lire de gaucheà droite et de bas en haut. L’intervalle de temps entre deux images est constant.On voit qu’à la onzième étape, la troisième planète, plus légère et initialementproche de la deuxième, est expulsée du système. Image due à Jean-François Co-lonna, [email protected], http ://www.lactamme.polytechnique.fr ;tous droits réservés.

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4.3. SYSTÈMES DYNAMIQUES 111

A titre d’exemple des performances informatiques du début des années 60,son premier ordinateur, nommé Royal McBee, était capable de faire 60 mul-tiplications par seconde. Un jour, il eut l’idée de refaire un calcul dont ilavait la solution en prenant comme point de départ une valeur intermédiaire(xi, yi, zi) obtenue dans son calcul de la veille. A sa stupéfaction, les valeurssuivantes devenaient, après un nombre relativement faible d’itérations, com-plètement différentes de celles de la veille. Il venait de redécouvrir le chaos,dû, en l’occurrence, aux erreurs d’arrondi des nombres manipulés : la sensi-bilité des résultats aux conditions initiales provoque l’écart considérable dedeux solutions initialement voisines. Lorenz appela cela l’effet «aile de pa-pillon». En fait le titre d’une de ses conférences était : Le battement d’une ailede papillon au Brésil peut-il déclencher une tornade au Texas ? Coïncidenceou non, l’«attracteur de Lorenz» a une forme d’ailes de papillon.

On peut voir sur les figures 4.2 et 4.3 le résultat d’une itération deséquations (4.38). On voit que l’évolution du point (x, y, z) en fonction dutemps a un aspect tout à fait tranquille : le point tourne sur une des nappesde l’attracteur, sauf que, de façon imprévue, à certains instants il «saute»d’une nappe (ou d’une aile) à l’autre. C’est imprévu dans le temps, c’estégalement imprévu dans l’espace dans le sens où les trajectoires de deuxpoints initialement très proches dans l’espace des phases peuvent devenircomplètement différentes à un instant ultérieur. Les deux positions peuventnotamment se retrouver, à un instant donné, sur deux nappes différentes del’attracteur.

Soulignons en concluant que le système de Lorenz est du type le plussimple qui montre ce comportement chaotique : un système dynamique chao-tique doit être non-linéaire et comporter au moins 3 variables. Un théorèmecélèbre de Poincaré et Bendixson interdit ce genre de comportement aux sys-tèmes à seulement 2 variables indépendantes, comme par exemple un systèmehamiltonien dans un espace des phases à 2 dimensions. Ce théorème interditégalement le comportement chaotique de systèmes dynamiques dans un es-pace des phases à N dimensions, si il existe en même temps N −2 quantitésconservées indépendantes, qui limitent le mouvement à un espace des phases«effectif» bi-dimensionnel 12.

12. L’interdiction d’un comportement chaotique dans un espace des phases bi-dimensionnel est liée au fait topologique, qu’une courbe fermée dans un espace bi-dimensionnel sépare l’espace en deux parties disjointes d’une part, et d’autre part au faitque deux trajectoires distinctes dans l’espace des phases ne se croisent jamais (pourquoid’ailleurs ?).

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112 Formalisme canonique de Hamilton

Figure 4.2 – Attracteur de Lorenz vu sous deux angles différents. Les pointscorrepondent à une résolution de (4.38) par une méthode de discrétisation. Onpeut suivre ces points et voir la transition, imprévisible une quasi-période plus tôt,d’une nappe vers l’autre de l’attracteur.

Figure 4.3 – Projection de l’attracteur de Lorenz sur le plan (x,z). Images duesà Jean-François Colonna, tous droits réservés.

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 113

4.4 L’action et l’équation de Hamilton-Jacobi

Le principe de moindre action consiste à trouver les équations du mouve-ment en minimisant l’action définie en fonction du lagrangien et des pointsde départ et d’arrivée par (1.8). L’action elle-même doit donc déterminerles trajectoires physiques. En quelles variables doit-on l’exprimer ? Il semblenaturel, à un degré de liberté, de calculer les valeurs de S le long de l’en-semble des trajectoires physiques, c’est-à-dire comme une fonction du pointet de l’instant d’arrivée (x, t) , le point et l’instant de départ étant fixés. Defaçon équivalente, nous voulons caractériser les diverses trajectoires issues de(x1, t1) et arrivant en (x, t) par la valeur de l’action S(x, t; x1, t1). L’actionest définie par

S =

∫ t

t1

L(x, x; t′) dt′ , (4.39)

les variables (x(t), x(t)) prenant par hypothèse dans cette expression leursvaleurs physiques, qui satisfont les équations d’Euler-Lagrange.

4.4.1 L’action comme fonction des coordonnées et dutemps

Reprenons la variation de l’action écrite en (2.4)

δS =

∫ t

t1

(

∂L∂x

δx(t) +∂L∂x

δx(t)

)

dt . (4.40)

Nous intégrons le deuxième terme par parties, mais nous n’imposons plusd’arriver au même point x(t) mais en un point voisin x(t) + δx(t) (en main-tenant δx(t1) = 0). Le terme tout intégré ne s’élimine donc plus, et l’onobtient

δS =∂L∂x

δx(t) +

∫ t

t1

(

∂L∂x

− d

dt

(

∂L∂x

))

δx(t) dt = p δx(t) (4.41)

car, par hypothèse, la trajectoire est physique, si bien que l’intégrale s’annule.De façon plus générale, on a pour N variables

δS =

N∑

i=1

pi δxi . (4.42)

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114 Formalisme canonique de Hamilton

Par conséquent, les dérivées partielles de l’action par rapport aux coordon-nées sont tout simplement les moments conjugués

∂S

∂xi= pi , soit encore

∂S

∂qi= pi (4.43)

si l’on travaille avec un ensemble quelconque [qi, pi] de variables canonique-ment conjuguées. De même, on peut calculer la variation de l’action si l’onvarie l’instant d’arrivée t. On a, de façon évidente,

dS

dt= L . (4.44)

Mais, si nous considérons l’action comme fonction des coordonnées et dutemps, on a

dS

dt=∂S

∂t+

N∑

i=1

∂S

∂xixi =

∂S

∂t+

N∑

i=1

pi xi . (4.45)

En réunissant ces deux égalités, on obtient que la dérivée partielle de l’actionpar rapport au temps est, au signe près, le hamiltonien

∂S

∂t= L −

N∑

i=1

pi xi = −H , (4.46)

et la différentielle totale de l’action s’écrit en fonction des coordonnées et dutemps

dS =N∑

i=1

pi dxi −H dt . (4.47)

On obtient alors l’expression suivante pour l’action

S =

(

N∑

i=1

pi dxi −H dt

)

(4.48)

où l’intégrale est évaluée le long de la trajectoire physique à x1, t1 fixés.Le principe de moindre action, sous la forme exprimé par Hamilton, s’écrit

δS = 0 à x1, t1 et x2, t2 fixés, et (4.48) donne alors

δS = δ

(

N∑

i=1

pidxidt

−H

)

dt ≡ δ

L dt = 0 , (4.49)

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 115

qui est bien la forme (1.8) qui nous a servi de point de départ au chapitresprécédents. Si nous travaillons avec les variables conjuguées (x, p) et nonles variables (x, x) du chapitre 2, les équations canoniques de Hamilton sedéduisent directement de l’expression (4.48) de l’action. En effet, considéronsles variables x et p comme indépendantes, et prenons le cas simple d’un seuldegré de liberté, l’action est

S =

∫ (2)

(1)

(p dx−H dt) . (4.50)

Si l’on fait varier x de δx et p de δp , en imposant comme au chapitre 2,δx(2) = δx(1) = 0, la variation de S est

δS =

∫ (2)

(1)

(

δp x + p δx − ∂H

∂xδx − ∂H

∂pδp

)

dt . (4.51)

où l’on a choisi de paramétrer l’intégrale par le temps. Le deuxième termedans l’intégrale peut être intégré par parties. Le terme tout intégré (p δx)s’annule puisque par hypothèse δx(2) = δx(1) = 0, et l’on obtient

δS =

∫ (2)

(1)

(

δp [ x− ∂H

∂p]− δx [p +

∂H

∂x]

)

dt , (4.52)

qui s’annule pour toute variation (δx, δp) si et seulement si les intégrants sontidentiquement nuls soit

x =∂H

∂p, p =

∂H

∂x,

où l’on reconnaît les équations canoniques de Hamilton.En résumé on obtient le hamiltonien aussi bien que les équations hamil-

toniennes directement de l’action.

4.4.2 Equation de Hamilton-Jacobi

L’équation de Hamilton-Jacobi se lit sur (4.46) et (4.43). Nous pouvonsremplacer dans la fonction de Hamilton les moments pi par les dérivées par-tielles de l’action, pour aboutir à

∂S

∂t+H(x1, . . . , xN ,

∂S

∂x1, . . . ,

∂S

∂xN; t) = 0 . (4.53)

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116 Formalisme canonique de Hamilton

L’équation de Hamilton-Jacobi est une équation aux dérivées partielles non-linéaire, du premier ordre. Elle permet de calculer le mouvement de la mêmefaçon que les équations d’Euler-Lagrange ou les équations canoniques. L’em-ploi de tel ou tel de ces formalismes est une affaire de commodité ou de struc-ture mathématique du problème. L’équation de Hamilton-Jacobi est parti-culièrement adaptée à la séparation des variables et au choix de variablesappropriées à la symétrie d’un problème.

(a) Action réduite

Par la suite de 4.4.2 nous supposons que la fonction de Hamilton H nedépend pas explicitement du temps. Alors, l’énergie est conservée. Soit E lavaleur de l’énergie du problème considéré, l’équation (4.46) se traduit par

∂S

∂t= −E , (4.54)

soit

S = −Et + S0(x1, . . . , xN) . (4.55)

La quantité S0 est appelée l’action réduite. Elle satisfait l’équation

H(x1, . . . , xN ,∂S0

∂x1, . . . ,

∂S0

∂xN) = E . (4.56)

De façon générale, en se reportant à (4.48) on définit l’action réduite S0 par

S0 =

(

N∑

i=1

pi dxi

)

, (4.57)

et, pour un système isolé, en se limitant aux variations qui laissent invariantel’énergie E , on voit que le principe variationnel porte sur cette quantité S0 :δS0 = 0 .

(b) Interprétation géométrique

Dans ce cas la relation (4.43) peut également s’écrire en fonction de l’ac-tion réduite

∂S0

∂xi= pi . (4.58)

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 117

Cette forme fait apparaître une propriété géométrique simple qui nous serautile pour faire le lien avec l’optique. Plaçons nous en coordonnées carté-siennes pour plus de clarté et considérons le cas simple où les impulsions seconfondent avec les quantités de mouvement pi = mixi. Considérons dansl’espace des coordonnées (x1, x2, . . . , xN), les surfaces sur lesquelles l’actionréduite est constante S0 = Cte. La relation (4.58) signifie que le vecteurP ≡ (p1, p2, . . . , pN) est en tout point orthogonal à ces surfaces. En d’autrestermes, le flot des trajectoires est orthogonal aux surfaces S0 = Cte. A uninstant donné, cette propriété vaut également pour l’action S.Dans le cas simple d’une particule dans l’espace à 3 dimensions, on voitdonc que la trajectoire est en tout point de l’espace orthogonale à la surfaceS0 = Cte passant par ce point : si l’on note dr un vecteur élémentaire tangentà la surface S0 = Cte au point r, on a par définition

~∇S0 · dr = p · dr = 0 . (4.59)

(c) Principe de Maupertuis

Pour une particule de masse m dans un potentiel V (r), l’équation (4.56)s’écrit

1

2m(~∇S0)

2 + V (r) = E , ou encore (~∇S0)2 = 2m(E − V (r)) . (4.60)

Dans ce problème, le moment conjugué est simplement égal à la quantité demouvement p = m r . L’action réduite (4.57) s’écrit donc

S0 =

p · dr =∫

m r · dr . (4.61)

Nous avons (dr)2 = dx2 + dy2 + dz2 = (dℓ)2 d’où r · dr = ℓ dℓ . D’autre part

ℓ = v =√

2(E−V )m

. En reportant dans (4.61) on obtient donc

S0 =

2m(E − V ) dℓ . (4.62)

D’où la forme simple du principe de Maupertuis donnée en 1.2

δ

2m(E − V ) dℓ = 0 . (4.63)

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118 Formalisme canonique de Hamilton

(d) Exemple : potentiel à symétrie sphérique

Contentons-nous ici, à titre d’exemple de l’utilisation de l’équation deHamilton-Jacobi, d’un problème qui englobe le problème de Kepler 13. Encoordonnées sphériques (r, θ, φ) le hamiltonien s’écrit

H =1

2m

(

p2r +p2θr2

+p2φ

r2 sin2 θ

)

+ V (r, θ, φ) . (4.64)

On peut séparer les variables si le potentiel est de la forme

V = V0(r) +f(θ)

r2(4.65)

(en toute généralité on peut ajouter un terme en g(φ)/r2 sin2 θ). L’équationde Hamilton-Jacobi s’écrit alors

1

2m

(

∂S0

∂r

)2

+ V0(r) +1

2mr2

[

(

∂S0

∂θ

)2

+ 2mf(θ) +1

sin2 θ

(

∂S0

∂φ

)2]

= E

(4.66)où E est la valeur constante de l’énergie. La variable φ est cyclique, notonsℓ = Lz la valeur constante de pφ. Autrement dit,

(

∂S0

∂φ

)2

= ℓ2 . (4.67)

En portant cela dans (4.66) on réduit le problème à

1

2m

(

∂S0

∂r

)2

+ V0(r) +1

2mr2

[

(

∂S0

∂θ

)2

+ 2mf(θ) +ℓ2

sin2 θ

]

= E . (4.68)

En multipliant par 2mr2 on constate que cette équation se sépare en la sommede deux termes, l’un portant sur la variable θ, l’autre sur la variable r. Onrecherche par conséquent une solution de la forme

S0 = ℓ φ+ S1(θ) + S2(r) . (4.69)

13. Pour d’autres exemples on pourra se référer au livre réf.[9] Mécanique Chapitre VII,§ 48.

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 119

On obtient

(

dS1

)2

+ 2mf(θ) +ℓ2

sin2 θ= a (4.70)

1

2m

(

dS2

dr

)2

+ V0(r) +a

2mr2= E , (4.71)

où a est, comme E et ℓ, une constante du mouvement, déterminée par lesconditions initiales. L’intégration de ces équations donne

S = −Et+ ℓ φ+

+

(

2m(E − V0(r))−a

r2

)

dr +

(

a− 2mf(θ)− ℓ2

sin2 θ

)

dθ .

(4.72)Ici, (E, ℓ, a) sont des constantes d’intégration arbitraires.

Pour obtenir les équations du mouvement, on utilise le Théorème de Ja-cobi, que nous allons expliquer sur le cas le plus simple à une dimension.

Théorème : Soit a une constante d’intégration, et supposons que nous connais-sons l’action S(q, t; a) 14. Alors β = ∂S/∂a est une constante du mouvement.

Démonstration : On a par définition

β =∂S

∂asoit

d

dtβ =

∂t

∂S

∂a+ q

∂2S

∂q ∂a. (4.73)

Or, q est, par définition, la dérivée de q le long de la trajectoire physique, parconséquent

q =∂H

∂p, et

d

dtβ =

∂t

∂S

∂a+∂H

∂p

∂2S

∂q ∂a.

Par ailleurs, on a

∂aH(q,

∂S(q, t; a)

∂q) =

∂H

∂p

∂2S

∂a∂q. (4.74)

14. On se souvient que nous considérons S à positions et temps initiaux fixés. Ces don-nées peuvent s’exprimer à travers des constantes d’intégration a.

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120 Formalisme canonique de Hamilton

En reportant dans (4.73), on obtient le résultat souhaité

d

dtβ =

∂a

(

∂S

∂t+H(q,

∂S(q, t; a)

∂q)

)

= 0 , (4.75)

en raison de l’équation de Hamilton-Jacobi (4.53). CQFD

Reprenons le résultat (4.72) et considérons les trois constantes d’intégra-tion (E, ℓ, a). A partir de l’expression (4.72) de l’action, on définit les troisconstantes βE , βℓ, βa par

βE =∂S

∂E, βℓ =

∂S

∂ℓ, βa =

∂S

∂a.

La valeur de ces constantes est fixée par les conditions initiales du problème.On obtient donc la trajectoire à partir des trois équations obtenues en déri-vant (4.72) par rapport à E, ℓ et a.

4.4.3 Limite géométrique de l’optique ondulatoire.

Les considérations précédentes permettent de comprendre comment l’op-tique géométrique se présente comme la limite à petites longueurs d’onde del’optique ondulatoire.

(a) Onde scalaire

Considérons l’équation de propagation d’une onde scalaire Φ dans unmilieu d’indice de réfraction variable n(r). On suppose que le milieu estinhomogène, mais isotrope : l’indice n dépend du point considéré mais pasde la direction de propagation.

Le cas général de la propagation des ondes électromagnétiques dans unmilieu non-conducteur de susceptibilités électrique et magnétique ε et µ,en tenant compte d’éventuelles discontinuités entre deux milieux et de lapolarisation, est traité dans le livre de Born et Wolf Principles of Opticsréf.[14], Chapitre III et Appendice I. Il suffit pour notre propos de considérerun milieu isotrope non-magnétique.

L’équation de propagation d’une onde scalaire Φ(r, t) est

n2

c2∂2Φ

∂t2−∆Φ = 0 . (4.76)

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 121

On étudie une onde périodique en temps de pulsation ω soit Φ(r, t) =ϕ(r)e−iωt, ce qui, reporté dans l’équation précédente mène à

n2 ω2

c2ϕ+∆ϕ = 0 . (4.77)

Cherchons une solution de cette équation de la forme 15

ϕ = ϕ0(r)eik0 S(r) , (4.78)

k0 =ω

c=

λ(4.79)

est le module du vecteur d’onde. La quantité S dans (4.78) est appelée l’ei-konal (du grec ει

κ ′ων image). Reportons (4.78) dans (4.77), nous obtenons,après simplification par eik0S(r) et en divisant par (−k20),

ϕ0(~∇S)2 − i

k0

(

2~∇ϕ0 · ~∇S + ϕ0∆S)

− 1

k20(∆ϕ0) = n2ϕ0 . (4.80)

Dans cette équation, le terme imaginaire proportionnel à 1/k0 peut s’écrire,en multipliant par ϕ0,

~∇ · (ϕ20~∇S) = 0. (4.81)

C’est là une équation de conservation, en l’occurrence liée à la conservationde l’énergie. L’onde se propage dans la direction de ~∇S et la densité d’énergieest proportionnelle à ϕ2

0. On trouvera l’interprétation complète en termes duvecteur de Poynting dans le livre de Born et Wolf réf.[14].

Considérons maintenant la partie réelle. Supposons que la longueur d’ondesoit très petite, c’est à dire que l’indice n ne varie pas sur une longueur d’ondeet que la taille d’instruments (par exemple des diaphragmes) soit beaucoupplus grande que λ défini en (4.79). Cette hypothèse peut également s’exprimersous la forme λ → 0 par conséquent k0 → ∞ et s’appelle l’approximationeikonale. Nous négligeons alors le terme en 1/k20 ce qui mène à l’équation del’eikonal

(~∇S)2 = n2 (4.82)

qui est l’équation fondamentale de l’optique géométrique. Dans cette approxi-mation, l’onde

Φ(r, t) = ϕ0(r)ei(k0S(r)−ωt) , (4.83)

15. l’idée étant que le premier facteur ne que varie faiblement dans l’espace par rapportau deuxième

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122 Formalisme canonique de Hamilton

se propage avec un vecteur d’onde localement perpendiculaire aux surfacesS(r) = Cte , définies par (4.82). Ces surfaces sont les fronts d’ondes géomé-triques.

(b) Optique géométrique et mécanique classique

Bien entendu, on note l’extrême similitude de l’équation de l’eikonal (4.82)et de l’équation de Hamilton-Jacobi (4.60) pour un point matériel. L’actionréduite S0 de ce dernier et l’eikonal S pour une onde lumineuse suivent lamême loi si l’on fait la correspondance

n(r) ⇐⇒√

2m(E − V (r)) . (4.84)

Nous avons vu que (4.60) mène au principe de Maupertuis pour un pointmatériel

δ

2m(E − V (r)) dℓ = 0 .

De la même manière l’equation de l’eikonal (4.82) mènera alors à la relation

δ

n(r) dℓ = 0 ou aussi δT = δ

n(r)

cdℓ = 0 (4.85)

qui n’est autre que le principe de Fermat !C’est Hamilton qui fit cette découverte autour de 1830. Il avait compris

comment et dans quelle limite l’optique géométrique était une approxima-tion de l’optique ondulatoire. Fasciné par les principes variationnels, et enparticulier par la similitude entre le principe de Maupertuis en mécaniqueet le principe de Fermat en optique géométrique, il remarqua que les for-malismes de l’optique et de la mécanique pouvaient être unifiés, et (visionprophétique !) que la mécanique newtonienne correspondait à la même limiteou approximation, que l’optique géométrique par rapport à l’optique ondu-latoire.

Cette remarque fut ignorée par ses contemporains ce que déplora en 1891le célèbre mathématicien Felix Klein. Il est vrai qu’en 1830 aucune expériencene mettait en évidence le rôle de la constante de Planck.

Remarquons, finalement, que l’interprétation géométrique (4.59) qui, dansce cas revient à (4.83), n’est rien d’autre que le Principe de Huygens .Ce principe, première théorie ondulatoire de la lumière, consiste à dire quela lumière se propage comme un front d’onde. A chaque instant t, chaque

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 123

point du front d’onde peut être considéré comme une source ponctuelle. Al’instant suivant t+ δt le nouveau front d’onde est l’enveloppe des sphères derayon δr = (c/n)δt centrées en chaque point du front d’onde précédent. Ceprincipe est équivalent à l’approximation eikonale : les enveloppes constituentles surfaces d’eikonal S constant, et il est alors, comme on a vu, équivalentau principe de Fermat. L’approche de Huygens fut vivement combattue parNewton, promoteur acharné du concept corpusculaire. Toutefois, Huygens futle premier à obtenir grâce à ce principe, une théorie de la double réfractionpar les cristaux anisotropes comme le spath d’Islande.

4.4.4 Approximation semi-classique en mécanique quan-tique.

Le même cadre de pensée peut être appliqué à la mécanique ondulatoireet à l’équation de Schrödinger, où on l’appelle l’approximation semi-classiquede Brillouin, Kramers et Wentzel (BKW). On se reportera par exemple aulivre de Messiah réf.[15] Mécanique quantique, tome 1, chapitre VI pour toutdétail, notamment dans l’application pratique de cette méthode.

Considérons l’équation de Schrödinger

i~∂

∂tψ(r, t) = − ~

2

2m∆ψ(r, t) + V (r)ψ(r, t) . (4.86)

Nous séparons dans la fonction d’onde le module et la phase suivant

ψ(r, t) = A(r, t) exp

(

i

~S(r, t)

)

. (4.87)

En substituant dans (4.86) et en séparant partie réelle et partie imaginaire,on obtient

∂S

∂t+

1

2m(~∇S)2 + V =

~2

2m

∆A

A(4.88)

m∂A

∂t+ ~∇A · ~∇S +

1

2A∆S = 0 . (4.89)

La seconde équation exprime la conservation de la probabilité. Si l’on intro-duit les densités de probabilité ρ et de courant de probabilité J comme

ρ(r, t) = ψ∗(r, t)ψ(r, t) , J(r, t) =~

2im(ψ∗~∇ψ − ψ~∇ψ∗) , (4.90)

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124 Formalisme canonique de Hamilton

la conservation de la probabilité s’écrit sous forme locale

∂tρ(r, t) + ~∇ · J(r, t) = 0 . (4.91)

Avec la forme (4.87), cette équation revient à

m∂

∂tA2 + ~∇ · (A2~∇S) = 0 (4.92)

ce qui est équivalent à (4.89). On rapprochera cette équation de l’équation(4.81). L’approximation classique consiste à prendre la limite ~ → 0 dansl’équation (4.88) soit

∂S

∂t+

1

2m(~∇S)2 + V = 0 , (4.93)

qui n’est autre que l’équation de Hamilton-Jacobi classique (4.53). Par consé-quent, dans la limite classique, la fonction d’onde peut être considérée commedécrivant un fluide de particules classiques sans interactions mutuelles, sou-mises au potentiel V . La densité et la densité de courant de ces particulessont à tout instant égales à la densité de probabilité ρ et à la densité decourant de probabilité J quantiques.

Exercices

4.1 Vérifier à partir du hamiltonien (4.7) que les équations de Hamiltondonnent bien l’équation du mouvement attendue.

4.2 Oscillateurs couplésOn considère deux oscillateurs harmoniques couplés de hamiltonien

H =p212m

+p222m

+mω2x21

2+mω2x22

2+mΩ2(x1 − x2)

2

4.

1. Montrer que la transformation

X =x1 + x2√

2, P =

p1 + p2√2

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 125

Y =x1 − x2√

2, Q =

p1 − p2√2

est une transformation canonique et exprimer le hamiltonien dans cesnouvelles variables.

2. Trouver les fréquences propres du système.

3. Ecrire la forme générale du mouvement (x1(t), x2(t)).

4.3 Système hamiltonien unidimensionnelOn considère le mouvement unidimensionnel d’un point matériel de hamil-tonien

H =p2

2m− 1

2q2.

1. Pourquoi l’énergie E du système est-elle conservée ? En utilisant leséquations du mouvement, montrer que la quantité

D =p q

2−Ht

est conservée aussi. On supposera D > 0 par la suite.

2. Exprimer la vitesse q du point matériel en faisant apparaître ces deuxquantités conservées.

3. Résoudre l’équation différentielle pour q . Quel est le comportementasymptotique du point matériel pour E > 0 ? Que se passe-t-il pourE < 0 ? Interpréter.

4.4 Oscillations forcéesOn considère un oscillateur harmonique à une dimension de hamiltonien

H =p2

2m+

1

2mω2 x2 (4.94)

où x et p sont des variables conjuguées de Lagrange.

1. On pose x = X/√mω et p = P

√mω.

Ecrire l’expression du hamiltonien (4.94) en fonction de X et P , etcalculer le crochet de Poisson X,P.

2. On introduit les fonctions a et a∗, complexe conjuguée de a, definiespar

a =X + iP√

2, a∗ =

X − iP√2

.

Ecrire le hamiltonien en fonction de a et a∗ et ω.

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126 Formalisme canonique de Hamilton

3. Calculer le crochet de Poisson a, a∗.4. Ecrire l’équation de l’évolution dans le temps de a et donner sa solution

générale.Exprimer l’énergie E de l’oscillateur à partir des paramètres de cettesolution et de ω.

5. On suppose que l’énergie de l’oscillateur est nulle pour t ≤ 0, E(t ≤0) = 0. Entre t = 0 et t = T on applique à l’oscillateur une forcedérivant de l’énergie potentielle Hpot = b

√2X sin (Ωt) (Hpot = 0 si t ≤ 0

ou t > T ) où b est un paramètre. Calculer l’énergie E ′ de l’oscillateurpour t > T .

6. Discuter la variation de E ′ en fonction de la pulsation excitatrice Ω.

4.5 Chaîne fermée d’oscillateurs couplésOn rappelle que pour 1 ≤ n ≤ N et 1 ≤ n′ ≤ N

1

N

N∑

k=1

exp (2ik(n− n′)π

N) = δnn′ (δ de Kronecker).

On considère une chaîne fermée de N particules de même masse m dispo-sées régulièrement sur un cercle plan (voir figure). Ces particules ont chacuneun mouvement unidimensionnel suivant la normale (Ox) au plan. On désignepar xn, n = 1, . . . , N l’abscisse de la particule n le long de cet axe.

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 127

Ces particules forment un ensemble d’oscillateurs harmoniques couplés àleurs plus proches voisins. Le hamiltonien est

H =N∑

n=1

[p2n2m

+1

2mω2 x2n +

1

2mΩ2(xn − xn+1)

2] (4.95)

où pn est le moment conjugué de xn et où nous adoptons la conventioncyclique xN+1 ≡ x1.

1. On définit les variables complexes suivantes

yk =1√N

N∑

n=1

e2iknπ/Nxn , qk =1√N

N∑

n=1

e−2iknπ/Npn (4.96)

dont les relations inverses sont

xn =1√N

N∑

k=1

e−2iknπ/Nyk , pn =1√N

N∑

k=1

e2iknπ/Nqk . (4.97)

(a) Montrer queyk = y∗N−k , qk = q∗N−k .

(b) Montrer que

N∑

k=1

yky∗k =

N∑

n=1

x2n etN∑

k=1

qkq∗k =

N∑

n=1

p2n (4.98)

(c) Montrer que

N∑

n=1

(xn − xn+1)2 =

N∑

k=1

4 sin2(kπ

N)yky

∗k (4.99)

2. Equations du mouvement et leur solution.

(a) Ecrire le hamiltonien (4.95) en fonction de yk, y∗k, qk, q∗k.(b) Calculer les crochets de Poisson suivants

yj, qk , y∗j , q∗k , yj, q∗N−k , y∗j , qN−k . (4.100)

(c) Ecrire les équations différentielles satisfaites par les yk, y∗k, qk, q∗k.

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128 Formalisme canonique de Hamilton

(d) Ecrire l’expression générale de yk(t) ; en déduire celle de xn(t).3. On suppose qu’à l’instant t = 0 on a yN(0) = 1, yN(0) = 0 et yn(0) =

0, yn(0) = 0, ∀n 6= N. Calculer xn(t) et interpréter le résultat.

4. Propagation d’ondes.On suppose maintenant, pour simplifier, que ω = 0. On suppose aussique N ≫ 1, si bien que sin(kπ/N) ≃ (kπ/N) pour k ≪ N . On supposequ’à l’instant t = 0 on a yN−1 = 1, y1 = 1, yn = 0 si n 6= (1 ou N − 1),et yn = 0 ∀n.

(a) Calculer xn(t) et xN−n(t).

(b) Interpréter physiquement le résultat.

(c) On suppose que la distance entre deux oscillateurs adjacents est a.En posant que xn(t) est la valeur en y = na d’une fonction f(t, y),écrire l’équation de propagation (équation aux dérivées partiellesdu second ordre) satisfaite par la fonction f .

4.6 Théorème du virielOn considère, à 3 dimensions, une particule de masse m placée dans unpotentiel V (r), de hamiltonien H = p2/2m + V (r). On suppose que cetteparticule est dans un état lié d’énergie E donnée.

1. Soit la grandeur physique A = r · p ≡ xpx + ypy + zpz. Calculer le cro-chet de Poisson A,H. En déduire la forme de l’évolution temporellede A en fonction des variables r et p.

2. On suppose que la particule a un mouvement périodique, de périodeT . Soit f(r,p) une grandeur physique, on définit sa moyenne 〈f〉 par

〈f〉 = 1

T

∫ T

0

f(t) dt (4.101)

En considérant la valeur moyenne de A ≡ dA/dt, montrer que l’on a

2〈 p2

2m〉 = 〈r · ~∇V 〉 (4.102)

3. Que devient cette égalité si V est un potentiel central en puissancesV = g rn avec r = |r| ?

4. Dans le cas ci-dessus, quelle est la relation entre l’énergie totale E, lamoyenne de l’énergie cinétique 〈Ec〉 et la moyenne de l’énergie poten-tielle 〈V 〉 pour

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 129

a) un oscillateur harmonique n = 2, et pourb) un potentiel newtonien (ou coulombien) n = −1 ?

5. En général, pour un potentiel quelconque, les orbites des états liés nesont pas fermées, mais elles restent confinées dans l’espace. A toutinstant |r| ≤ r0 et |p| ≤ p0 où r0 et p0 sont fixes. Pouvez-vous trouverune généralisation de la définition (4.101) telle que le résultat (4.102)reste valable ?

4.7 Calculer les crochets de Poisson des trois composantes du moment ciné-tique L = r× p entr’elles.

4.8 Du problème de Kepler à la précession du périhélie de Mercure

I. On considère le mouvement non-relativiste d’un objet ponctuel de massem dans un potentiel coulombien V (r) = −k

r, k > 0 .

1. Ecrire le lagrangien L du système.

2. En déduire l’équation du mouvement du point matériel.

3. Ecrire le hamiltonien H . En déduire que l’énergie E du point matérielest conservée le long de la trajectoire.

4. Ecrire les équations de Hamilton pour le point matériel.

5. Evaluer les crochets de Poisson r, H et p, H du vecteur positionr et du vecteur impulsion p avec le hamiltonien. Confirmer ainsi lerésultat de la question précédente.

6. Démontrer, toujours en utilisant les crochets de Poisson, que le vec-teur moment cinétique L = r × p est conservé. En déduire que lemouvement du point matériel est planaire.

7. Le vecteur de Runge-Lenz est défini comme

A =p× L

m− k

r

r.

Utiliser les crochets de Poisson pour vérifier que ce vecteur est aussiune quantité conservée.

8. Calculer A2 et vérifier que A2 s’exprime en termes d’autres quantitésconservées déjà introduites.

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130 Formalisme canonique de Hamilton

9. Montrer que le vecteur A est situé dans le plan du mouvement para-métré par coordonnées polaires r , ϕ . On supposera que A et r sontparallèles pour ϕ = 0 (choix de l’origine des ϕ). Exprimer la quantitéA · r en terme de L2 et de r . En déduire la forme géométrique de latrajectoire. Quelle est cette trajectoire pour

A

k< 1 , pour

A

k= 1 , et pour

A

k> 1 ?

10. Quelle est la signification géométrique de l’orientation du vecteur A ?On considère A

k< 1 . Que peut-on conclure pour la trajectoire du fait

que A soit conservé ?

II. On considère la planète Mercure, prise comme objet ponctuel de masse m,dans le champ gravitationnel du soleil. La théorie actuelle de la gravitationprédit de faibles corrections au potentiel V (r) = −k

r, qui mènent à une

modification du hamiltonien de la partie I. Le hamiltonien corrigé H ′ s’écrit

H ′ = H + δH =p2

2m− k

r+ mc2

(ε2

2− 3

2β2 ε− β4

8

)

où les quantités sans dimension

β2 = (p

mc)2 et ε =

M⊙G

c21

r

sont petits et du même ordre de grandeur. Le paramètre k de la partie Iprend la valeur

k = mM⊙G .

Données numériques :M⊙ = 2 · 1030 kg , masse du soleil.G = 6, 67 · 10−11 m3

kg s2, constante gravitationnelle.

c = 3 · 108m/s , vitesse de la lumière.r = 55 · 106 km , distance moyenne de la planéte Mercure au soleil. Cettedistance ne varie que très faiblement au cours d’une révolution.

1. Calculer M⊙Gc2

1r

et vérifier qu’ ε est bien un paramètre sans dimensionet petit.

2. Pour le système de hamiltonien H ′ , les quantités E et L sont toujoursconservées. Pourquoi ?

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 131

3. On définit ∆ comme l’angle de rotation de l’orientation du périhéliede la trajectoire de la planète par révolution. Exprimer ∆ sous formed’une intégrale portant sur la variable temps. On se souviendra de lasignification géométrique de A, et on fera intervenir les crochets dePoisson de A et H ′, en utilisant le fait que δH est une perturbationfaible.

4. Le calcul du crochet de Poisson A, δH est élémentaire mais un peulong. On admettra donc le résultat de ce calcul sous la forme suivante :Pour la composante A⊥ perpendiculaire à la direction de A(t = 0) =A(ϕ = 0) dans le plan du mouvement on trouve

dA⊥dϕ

=1

ϕ

dA⊥dt

= 6A(0)M⊙G

c2rcos2 ϕ + C1 cosϕ + C2 sin2 ϕ cosϕ

où C1 et C2 sont des constantes. En déduire l’angle ∆ et la précessiondu périhélie de Mercure par siècle, en secondes d’arc.

Donnée numérique : Le période de révolution pour Mercure est de T =0, 24 ans.

4.9 Le bétatronDans un bétatron des électrons sont accélérés sur une trajectoire circulairefixée. L’adaptation du champ magnétique aux énergies des électrons est fon-dée sur la loi d’induction de Faraday . Nous allons étudier le mouvement desélectrons dans le bétatron dans le formalisme hamiltonien.

1. On considère une particule non-relativiste de masse m et de charge q(par exemple un électron) dans un champ électromagnétique. Ecrirel’expression du lagrangien L de la particule. Dans toute la suite onsupposera que le potentiel scalaire est nul : φ(x, y, z, t) = 0 .

2. L’espace peut être paramétré en coordonnées cylindriques (r, ϕ, z) ,qui sont liées aux coordonnées cartésiennes par x = r cosϕ , y =r sinϕ , z = z . Exprimer la vitesse au carré v2 de la particule et leproduit scalaire ~v · ~A en coordonnées cylindriques. Montrer que le la-grangien L en coordonnées cylindriques peut s’écrire sous la forme

L =m

2(r2 + r2 ϕ2 + z2) + q (r Ar + ϕ Aϕ + z Az) .

Déterminer le champ radial Ar et le champ tangentiel Aϕ en terme

des composantes cartésiennes de ~A , de r et de ϕ .

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132 Formalisme canonique de Hamilton

Figure 4.4 – Schéma d’un bétatron

3. Calculer les moments conjugués aux vitesses généralisées r , ϕ , z .

4. En déduire l’expression du hamiltonien H(pr, pϕ, pz, r, ϕ, z) de la par-ticule.

5. On considère un champ vecteur ~A qui dépend du temps, mais qui nedépend pas de ϕ ni de z : ~A = ~A(r, t) . En déduire l’existence dedeux quantités conservées.

Dans toute la suite on supposera que les champs radial et vertical sontnuls :Ar(r, t) = 0 , Az(r, t) = 0 .

6. On suppose qu’à t = 0 on a pϕ = 0 , pz = 0 . En utilisant ces condi-tions, écrire explicitement les équations du mouvement canoniques deHamilton pour ϕ , pϕ et pour r , pr ; en fonction de r , de pr et deAϕ .

7. Dans quelles conditions les équations du mouvement précédentes admettent-elles une solution qui décrit un mouvement circulaire de la particule ?

8. On étudiera par la suite un champ vecteur tangentiel Aϕ de la forme

Aϕ(r, t) = r√

µ2(r − a)2 + ν2t2 (ν, µ, a > 0) .

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 133

Montrer que, dans ce potentiel, la particule peut suivre une trajectoirecirculaire et donner son rayon. Quelle est la vitesse angulaire ϕ(t) dela particule sur cette trajectoire circulaire ?

La vitesse de la particule est en augmentation constante, et en pra-tique les électrons dans le bétatron atteignent rapidement des vitessesproches de la vitesse de la lumière c . Dans ce cas il faut passer à ladescription relativiste.

9. Rappeler le hamiltonien d’une particule relativiste de masse m et decharge q dans un un potentiel vecteur A = (0, ~A) . En reprenant l’ex-

pression pour (~p − q ~A)2 en coordonnées cylindriques de la question 4.,écrire le hamiltonien relativiste en coordonnées cylindriques, toujoursdans le cas ~A = ~A(r, t) avec Ar(r, t) = 0 , Az(r, t) = 0 . Les quan-tités pϕ et pz sont-elles toujours conservées ? Ecrire les équations dumouvement de Hamilton pour ϕ , et pour r , pr .

10. On revient au champ tangentiel Aϕ(r, t) du 8. Ecrire le hamiltonien re-lativiste H pour ce champ dans le cas pϕ = 0 , pz = 0 . Ce hamiltoniendépend explicitement du temps. Soit H0 la fonction dans l’espace desphases obtenue en remplaçant dans H : Aϕ(r, t) → Aϕ(r, 0) . Montrerque H0 est une quantité conservée le long de la trajectoire.On pourra utiliser les crochets de Poisson pour la démonstration. Onposera pϕ = 0 , pz = 0 dès le départ.

11. Pour pϕ = 0 , pz = 0 écrire les équations du mouvement de Hamil-ton pour ϕ , et pour r , pr pour le potentiel du 8. Pour résoudre ceséquations, on introduit un paramètre s(t) qui est fonction monotonedu temps t d’après la loi

s(0) = 0 ,ds

dt=

c2√H0 + b2t2

, b := c q ν .

On supposera que |r − a| ≪ a le long de la trajectoire de façon qu’onpeut approcher r par a dans l’équation pour ϕ . Dans cette approxi-mation, écrire l’expression pour dϕ

ds. Ecrire aussi les expressions pour

drds

et dprds

, et donner la solution r(s) de l’équation du mouvement.Dans le bétatron on veut accélérer des particules sur des trajectoirescirculaires. A quoi doit-on faire attention pour assurer cette conditionexpérimentalement avec bonne précision ? Expliquer le terme "oscilla-tions de bétatron" en partant de la solution trouvée.

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134 Formalisme canonique de Hamilton

12. Exprimer le temps t en fonction du paramètre s et vérifier que la vitessede la particule reste toujours inférieure à la vitesse de la lumière c .On négligera les petites oscillations autour de la trajectoire circulaire.

4.10 Les points de Lagrange

Considérons deux astres de masses M1 et M2 qui, sous l’effet de leur attrac-tion gravitationnelle tournent l’un autour de l’autre en gardant une distancefixe R . On se placera toujours dans un référentiel où le centre de massedes deux astres est au repos et qui est centré au centre de masse. Dans lapremière partie - questions (a) à (e) - nous choisirons un référentiel inertielqui satisfait à cette condition. Les deux astres évoluent alors sur des orbitescirculaires. On posera M = M1 +M2 pour la masse totale des deux astres,en supposant M1 ≥M2 .

1. Expliquer pourquoi le mouvement relatif des deux astres est un mou-vement planaire.

2. Donner les distances r1 et r2 des astres à leur centre de masse notéO , en fonction de leur distance R et de leurs masses. Montrer que lapulsation de rotation ω des deux astres satisfait

ω2 =GM

R3, (4.103)

où G est la constante de la gravitation.Pour le mouvement circulaire considéré, on trouve ω de la façon la plussimple en égalisant la force centrifuge et la force gravitationnelle, pourl’un ou l’autre des deux astres.

Considérons aussi un astéroïde (ou un satellite), de masse m , si faiblequ’il n’influence pas le mouvement des deux astres.

3. En admettant cette approximation, dans quelle mesure la valeur de lamasse de l’astéroïde est-elle déterminante pour son mouvement ?

4. On note ~r la position et ~p le moment conjugué (ou l’impulsion) del’astéroïde dans le référentiel inertiel considéré. On suppose qu’à unmoment t donné ~r et ~p se trouvent dans le plan déterminé par lemouvement des deux astres. Pourquoi ~r et ~p vont-ils rester dans ceplan à tout temps t′ ≥ t ?

Par la suite nous considérerons toujours le mouvement de l’astéroïderestreint à ce plan.

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 135

5. Ecrire explicitement le lagrangien L et le hamiltonien H de l’astéroïdequi régissent son mouvement en fonction de la position des deux astres.Dans le référentiel inertiel considéré on choisira comme variables cano-niques les coordonnées cartésiennes x, y de l’astéroïde dans le plan dumouvement, et leurs moments conjugués px, py . Le lagrangien et lehamiltonien dépendent explicitement du temps. Pourquoi ?

6. On veut passer à un référentiel tournant à la vitesse angulaire ω donnéeen (4.103), qui suit le mouvement rotationnel des deux astres. Commentobtient-on le lagrangien de l’astéroïde dans ce nouveau référentiel, enpartant du lagrangien L dans le référentiel inertiel ? Montrer que lehamiltonien H dans le référentiel tournant peut s’écrire

H =~p 2

2m− ω (xpy − ypx) − GmM1

|~r − ~r1|− GmM2

|~r − ~r2|. (4.104)

Ici ~p = (px, py) , et px, py sont les moments conjugués aux coordonnéescartésiennes x, y dans le nouveau référentiel ; ~r1 , ~r2 sont les vecteursposition des astres dans ce référentiel.Par la suite on choisira comme l’axe des x , la droite qui relie les deuxastres dans ce référentiel.

7. Donner une quantité conservée pour le système planaire (à deux degrésde liberté) régi par le hamiltonien H . Tenant compte de cette loi deconservation, peut-on exclure à priori un comportement chaotique dela trajectoire de l’astéroïde ?

8. Ecrire les équations du mouvement hamiltoniennes pour les variablesx, y et px, py du système régi par H .

9. Le mouvement de l’astéroïde est stationnaire dans l’espace des phases,si il existe des solutions x, y, px, py des équations du mouvement,constants dans le temps (dans le référentiel tournant choisi). Mon-trer graphiquement qu’il existe 3 solutions stationnaires pour lesquellesl’astéroïde se trouve sur la droite déterminée par la position des deuxastres. Caractériser le mouvement de l’astéroïde pour ce type de solu-tion dans le référentiel inertiel de départ.

10. Montrer aussi qu’il existe deux autres solutions stationnaires pour les-quelles l’astéroïde et les deux astres forment un triangle équilatéral.

On appelle points de Lagrange les 5 points stationnaires dans l’espacedes phases, trouvés dans les deux questions précédentes.

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136 Formalisme canonique de Hamilton

11. Pour étudier la stabilité d’un point de Lagrange, on peut regarder defaibles déviations de ~r et de ~p autour de leurs valeurs en ce point de La-grange. A l’ordre dominant on obtient alors une équation différentiellelinéarisée pour ces petites déviations de la forme

(δ~r

δ~p

)

=M(δ~r

δ~p

)

.

M est une matrice 4×4, qu’on ne calculera pas. Elle dépend des dérivéesdu hamiltonien par rapport aux variables canoniques, évaluées au pointde Lagrange considéré. Quelle est la condition aux valeurs propres dela matrice M , pour que le point de Lagrange considéré soit stable ?

Figure 4.5 – Schéma des 5 points de Lagrange L1 à L5 pour le systèmeSoleil-Terre

12. Il s’avère que les 3 configurations correspondant aux points de La-grange, situés sur la droite joignant les deux astres sont instables.D’autre part les deux configurations équilatérales sont stables à lacondition que M2

M1

≤ 0, 04 . Cette condition est vérifiée pour tous lessystèmes Soleil-planète dans le système solaire. Le rapport vaut 1/1000pour le système Soleil-Jupiter.Au vu de ces faits et de la figure expliquer :a) pourquoi on ne trouve pas d’objet naturel situé aux points L1, L2, L3

dans aucun système Soleil-planète.b) le fait que plusieurs milliers d’astéroïdes, appelés Troyens, se trouventprès des points L4, L5 du système Soleil-Jupiter.

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4.4. L’ACTION ET L’ÉQUATION DE HAMILTON-JACOBI 137

c) pourquoi on a envoyé plusieurs satellites destinés à l’observation ducosmos vers le point de Lagrange L2 (WMAP en 2001, Herschel etPlanck en 2009).d) Application numérique : Donner (à 10% près) la distance à la Terredes trois points de Lagrange instables L1 à L3 pour le système Soleil-Terre. On donne :la distance Terre - Soleil : R = 150 ·106km, et le rapport de leurs massesMS/MT = 300 000 .

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138 Solution des exercices

Solution des exercices

Chapitre 2

2.1 Intégrale première

On a directement dΓ/dx = z′(1 + z′2 − z z′′)/(1 + z′2)3/2, l’équation de lacourbe est 1 + z′2 − z z′′ = 0 d’où le résultat. On en déduit

z(x) = a√

1 + z′2(x) ,

où a est un constante. En posant z′(x) = sinh(φ(x)), il vient

z(x) = a cosh(φ(x)) soit z′ = aφ′(x) sinh(φ(x))

d’où évidemment aφ′(x) = 1 et la solution z(x) = a cosh((x− x0)/a).

2.2 Brachistochrone

Ax

O y

Figure 6 – Trajectoire optimale de O à A.

Le temps de parcours dans le plan (xOy) est donné par

T12 =

∫ A

O

ds

v

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Solution des exercices 139

où ds2 = dx2+ dy2 . La condition initiale sur v et la conservation de l’énergietotale impliquent v(x) =

√2gx , où on a posé (sans limiter la généralité)

O = (0, 0) . Donc

T12 =

∫ A

O

1 + y′2

2gxdx ,

où l’on a pris x comme variable indépendante. Le lagrangien associé L =√

1+y′2

2gxne dépend pas explicitement de la variable y. Les équations d’Euler-

Lagrange donnent alors

∂L∂y′

=y′

1 + y′21√2gx

= C = cste .

On en tire

y 2 =1

4γ21 + w

1− w,

où w = 2γ x− 1 , y = dydw

, et γ = 2g C2 . En posant w = − cos θ on arrive à

dy

dθ=

1

2γ(1− cos θ)

et finalement, en tenant compte du choix O = (0, 0) :

y(θ) =1

2γ(θ − sin θ) , x(θ) =

1

2γ(1− cos θ) .

Il s’agit donc d’un arc de cycloïde (voir figure 6)

(y − θ

2γ)2 + (x− 1

2γ)2 = (

1

2γ)2

dont le sommet est situé en O. On voit bien qu’au point d’arrivée A = (x2, y2)on a

y2/x2 =θ2 − sin θ21− cos θ2

,

de façon que θ2 → 0 si y2/x2 → 0 , et θ2 → 2π si y2/x2 → ∞ . Le caslimite y ≡ 0 correspond à C = 0.

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140 Solution des exercices

2.3 Rayons courbes et super-réfraction d’ondes radio

1. TAB =∫ B

An(x,y)c

dℓ .

2. dℓ2 = dx2 + dy2 = dr2 + r2dφ2 = (r2 + r2) dφ2 , d’où

TAB =

∫ B

A

n(r)

c

√r2 + r2 dφ .

3. Si L ne dépend pas de φ la quantité E ≡ r ∂L∂r

− L est conservée.On trouve

E = − n(r) r2

c√r2 + r2

.

4. On obtient

r = ±r√

n2r2

c2E2− 1 .

5. Pour une trajectoire circulaire r ≡ cste , d’où r ≡ 0 . La condition estdonc n2r2

c2≡ E2 .

6. En dérivant la relation pour r

r = ±

r

n2r2

c2E2− 1 + r2

1√

n2r2

c2E2 − 1

n2

c2E2r + r

1√

n2r2

c2E2 − 1

r2

c2E2ndn

drr

= r (n2r2

c2E2− 1) +

n2r2

c2E2

(

r +r2

n

dn

dr

)

≃ r

(

1 +r

n

dn

dr

)

.

7. En cas de sous-réfraction la courbure est plus grande que dans le régimestandard, on a donc

dn

dr> (

dn

dr)moy .

En cas de super-réfraction on a

dn

dr< (

dn

dr)moy .

8. La condition pour un grand cercle est r dndr

= −1 , car r est constantdans cette condition. Pour r = R on trouve dn

dr= −1, 57 · 10−4km−1 .

En accord avec la figure on est dans le régime de super-réfraction.

La réfraction d’ondes radio en fonction des conditions météorologiques et at-mosphériques est évidemment d’une grande importance pour la transmissiond’ondes radio entre stations terrestres. Voir par exemple le sitehttp ://perso.wanadoo.fr/f6crp/ba/propavu.htm, conçu par Denis Auquebon

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Solution des exercices 141

zx=L

z=z2

Terre

zx=L

z=z2

Terre

1

X

z

L x

Figure 7 – Chemin du bateau avec un virement de bord en x = L/2.

2.4 Stratégie d’une régate.

1. On a par définition x = vx = v cos θ, z = vz = v sin θ, par conséquentz′ = dz/dx = tan θ.

2. On a vx = v cos θ = w/h. Cette vitesse est maximum lorsque h(z′) estminimum, c’est-à-dire pour z′ = 1, soit θ = π/4. On a alors vx = w/2.En fait, il suffit de multiplier h par une constante pour se mettre dansla situation appropriée à un bateau donné, pour lequel vx,max = λw.

3. On a dt = dx/vx = h′(z′) dx/w(z), d’où

T =

∫ L

0

dxh′(z′)

w(z). (105)

4. Posons Φ = h′(z′)/w(z). L’équation de Euler-Lagrange qui optimise letemps total T est

∂Φ

∂z=

d

dx(∂Φ

∂z′) .

5. La fonction Φ ne dépend pas explicitement de x. Par conséquent, on a

d

dxΦ = z′

∂Φ

∂z+ z′′

∂Φ

∂z′.

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142 Solution des exercices

Par conséquentd

dx(Φ− z′

∂Φ

∂z′) = 0 ,

ce qui donne (h′(z′)z′ − h(z′))/w(z) = constante.

6. On a z′h′−h = −2/z′. On obtient donc, pour la fonction x(z), l’équationdifférentielle du premier ordre (−2/A)dx/dz = w(z). D’où le résultat :

x = Lw0z − w1z0 ln(1 + (z/z0))

w0z1 − w1z0 ln(1 + (z1/z0)), (106)

où nous avons incorporé les conditions aux limites : (x = 0, z = 0) et(x = L, z = z1).

7. On obtient

z′ =dz

dx=w0z1 − w1z0 ln(1 + (z1/z0))

w0L− w1Lz0/(z + z0).

Si z1 ≪ L et z1 ≪ z0, la vitesse du vent ne varie pas beaucoup sur letrajet, et on aura z′ ∼ z1/L≪ 1.Or, à la deuxième question, nous avons vu que la vitesse optimale pourun vent constant est atteinte pour z′ = 1. La configuration envisagéene correspond certainement pas à la meilleure stratégie. Il faut virer debord en un point (x1, Z) avec 0 < x1 < L et Z ≫ z1, comme représentésur la figure (7) pour bénéficier de façon optimale de la puissance duvent (cette hypothèse était exclue par l’énoncé).

La trajectoire représentée, avec un angle de θ = 45 degrés (|z′| = 1et un virement de bord θ → −θ en x = L/2 a une longueur totaleL√2 et une vitesse supérieure à (w0 − w1)/2. Le temps sur ce chemin

Tv = 2L√2/(w0 − w1) est, à l’évidence plus court que le temps le long

de la trajectoire sans virement de bord T ∼ 2L(z1/L)/(w0 − w1) =2z1/(w0 − w1) .

Commentaire hors problème : on voit combien dans des régates commela Course de l’America, la présence et le talent d’un bon tacticien estutile. Il doit notamment juger, et préjuger, de la vitesse du vent surtout le plan d’eau. Dans des cas plus réalistes que celui envisagé icidans l’équation (2.59), par exemple v = w(1 − cos θ)/2, on pourrase convaincre que le problème devient très vite compliqué à résoudre,il faut le faire numériquement. Si les règlements ne permettent pas

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Solution des exercices 143

d’entrer la distribution du vent automatiquement dans un ordinateur(ce qui est permis dans les courses au large), l’expérience de l’équipageest primordiale.

2.5 Pendule mobile

L =m1 +m2

2x2 +

m2

2(l2φ2 + 2lxφ cosφ) +m2gl cosφ .

2.6 Propriétés de l’action

a)

1. Particule libre

S =m

2

(x2 − x1)2

t2 − t1

2. Oscillateur harmonique

S =mω

2 sinω(t2 − t1)

(

(x22 + x21) cosω(t2 − t1)− 2x2x1)

3. Force constante

S =m

2(v0 +

F

m(t2 − t1))

2 (t2 − t1) + F x1 (t2 − t1)−1

6

F 2

m(t2 − t1)

3

où v0 = (x2 − x1)/(t2 − t1)− (1/2)(F/m)(t2 − t1) est la vitesse initialede la particule.

b) Nous partons de la variation de l’action écrite en (2.4)

δS12 =

∫ t2

t1

(

∂L∂x

δx(t) +∂L∂x

δx(t)

)

dt .

Nous intégrons le deuxième terme par parties, mais nous n’imposons plusd’arriver au même point x2 mais en un point voisin x2 + δx2 . Le terme toutintégré ne s’élimine donc plus, et l’on obtient

δS12 =∂L∂x

δx2 +

∫ t2

t1

(

∂L∂x

− d

dt

(

∂L∂x

))

δx(t) dt .

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144 Solution des exercices

Par hypothèse, la trajectoire est physique, si bien que l’intégrale de droites’annule. On obtient donc une variation de l’action

δS12 =∂L∂x

|x=x2 δx2 = p2 δx2 et donc∂S

∂x|x=x2 = p2 .

c) Nous considérons l’action comme fonction de la coordonnée d’arrivée xet du temps d’arrivée t. On a, de façon évidente, dS

dt= L , et aussi d’après

le résultat précédent dSdt

= ∂S∂t

+ ∂S∂xx = ∂S

∂t+ p x . En réunissant ces deux

égalités, on obtient ∂S∂t

= L − p x = −H , donc au signe près l’énergie aupoint d’arrivée E2.

2.7 Moments conjugués en coordonnées sphériques.

1. Le lagrangien est L = 12m(r2 + r2 θ2 + r2 sin2 θ φ2)− V (r).

2. Les moments conjugués sont

pr =∂L∂r

= mr , pθ =∂L∂θ

= mr2θ , pφ =∂L∂φ

= mr2 sin2 θ φ .

3. En dérivant (2.60) par rapport au temps, et en tenant compte du faitqu’en coordonnées cartésiennes p = mv, on obtient directement lerésultat Lz = mr2 sin2 θφ = pφ.

4. La conservation de pφ, ou de Lz, correspond à l’invariance par transla-tion en φ, c’est-à-dire à l’invariance par rotation autour de Oz.

5. Si la particule chargée est plongée dans un champ magnétique ~B pa-rallèle à Oz, il y a invariance du problème par rotation autour de Ozet la composante Lz est conservée.

En effet on ajoute à L un terme ∼ r · (B×r) ∼ Lz ·B qui est indépen-dant de φ (se rappeler (3.33) et noter que pour un champ magnétiqueconstant on peut choisir A = 1

2B× r).

Chapitre 3

3.1 Repère tournant et pendule de Foucault

1. La vitesse dans le repère tournant s’obtient de v0 par

v0 = v +Ω× r

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Solution des exercices 145

où l’origine r = 0 se trouve sur l’axe de rotation. Le lagrangien estun invariant qui détermine la trajectoire physique indépendamment durepère. Dans le repère tournant il prend donc la forme

L =m

2v2 + mv · (Ω× r) +

m

2(Ω× r)2 ,

qui s’obtient en remplaçant v0 .

2. On trouve∂L∂v

= m (v + Ω× r) ,

∂L∂r

= m (v ×Ω) + mΩ2r− m (Ω · r)Ω .

On en déduit l’équation du mouvement

mv = 2m (v ×Ω) + mΩ2r⊥ .

On reconnaît la force de Coriolis et la force centrifuge.

3. Nous avons trouvé en 2.

p = m (v + Ω× r) .

Le moment conjugué contient un terme supplémentaire qui ressembleau terme qA = q

2B × r apparaissant dans un champ magnétique ho-

mogène, voir (3.35). L’énergie est conservée puisque le lagrangien nedépend pas explicitement du temps.

4. Pour θ ≪ 1 on trouve

~r = l (θ cos φ, θ sin φ,−1) ,

~v = l (cos φ, sin φ, 0) θ + l (−θ sinφ, θ cosφ, 0) φ ,~Ω× ~r = l (−Ωz θ sinφ, Ωz θ cosφ+ Ωx, Ωx θ sin φ) ,

~v · (~Ω× ~r) = l2 (Ωx sin φ θ + Ωz θ2 φ + Ωx θ cos φ φ) .

5.

V (θ) = −mgl cos θ = mgl

2θ2 + O(θ4) + cste .

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146 Solution des exercices

6. On a

θ sin φ + θ cos φ φ =d

dt(θ sinφ) .

Les équations du mouvement restent inchangées si l’on ajoute au la-grangien la dérivée totale par rapport au temps d’une fonction quel-conque des variables position (et du temps).

7.

pθ =∂L∂θ

= ml2θ , pφ =∂L∂φ

= ml2 θ2 (φ + Ωz) .

8. Ls ne dépend pas de φ ; nous déduisons donc des équations d’Euler-Lagrange que pφ = 0 , c’est à dire, pφ est conservé.Nous avons aussi

d

dt

∂Ls∂θ

= ml2θ ,∂Ls∂θ

= ml2Ωz θ φ − mgl θ

Donc

θ = Ωz θ φ − g

lθ .

9. Pour réaliser cette condition on s’assure que le pendule passe (de façonrégulière) par la position θ = 0 , car pφ = ml2 θ2 (φ + Ωz) d’après 7.

10. Si pφ ≡ 0 , on trouve φ = −Ωz , φ(t) = φ(0)− Ωz t .

Dans le cas où l’axe de rotation du repère tournant ne passe pas parl’origine ~r = 0 , on doit modifier le terme de Coriolis m~v · (~Ω × ~r) en

m~v · [~Ω × (~r − ~r0)] , où ~r0 est un vecteur qui relie l’origine à un pointde l’axe de rotation. La modification du lagrangien

−m~v · (~Ω× ~r0) = −m d

dt

(

~r · (~Ω× ~r0))

est une dérivée totale par rapport au temps qui n’affecte pas les équa-tions du mouvement du pendule. La rotation du plan des oscillationss’obtient comme

Ωz · 1h = (360o/24) · sin(49o) = 11, 3o .

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Solution des exercices 147

3.2 Lagrangien de Proca

L’équation d’onde pour A en se servant de (3.61, 3.67). Dans la jauge deLorenz elle s’écrit

(+ µ2)Aµ = µ0jµ ,

équation qui fait apparaître un terme supplémentaire en µ2 par rapport àl’équation d’onde de l’électromagnétisme (voir [2], chapitre 7.3)

Aµ = µ0jµ .

Pour jµ = 0 on trouve comme solutions des ondes planes ∼ expiωt−k ·x ,où

ω2/c2 = µ2 + k2 .

En portant les relations E = ~ω et p = ~k ceci donne

E2 = ~2µ2c2 + p2c2 .

En comparant à

E2 = m2c4 + p2c2

on voit que la quantité ~µ/c a l’interprétation d’une masse du photon. Ac-tuellement les bornes expérimentales supérieures pour cette masse sont del’ordre de 10−51kg .

Chapitre 4

4.1

Les équations de Hamilton s’écrivent

r =∂H

∂p=

1

m(p− qA) ⇒ mv = p− q

dA

dt,

p = −∂H∂r

= q~∇(v ·A(r, t))− q~∇Φ .

En utilisant (3.24), (3.25) et (3.28) on trouve alors

mv = q (v ×B+ E) .

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148 Solution des exercices

4.2 Oscillateurs couplés

1. On obtient sans difficulté

X,P = 1 X,Q = 0 Y, P = 0 Y,Q = 1

H =P 2

2m+mω2X2

2+Q2

2m+m(ω2 + Ω2)Y 2

2.

2. Les fréquences propres du système sont donc ω1 = ω et ω2 =√ω2 + Ω2

.

3. La forme générale du mouvement se déduit immédiatement de

X = A cos(ω1t + φ) , Y = B cos(ω2t + ψ) .

4.3 Système hamiltonien unidimensionnel

1. Le hamiltonien ne dépend pas explicitement du temps. L’énergie estdonc conservée. On a D = 1

2p q + 1

2q p − H = 0 , en utilisant les

équations du mouvement p = − 1q3

et q = pm

.

2.

q =p

m=

2

mq(D + E t) .

3. L’équation précédente donne q dq = 2m

(D + E t) dt , d’oùq2 − q20 = 2

m(2D t + E t2) . Ceci donne pour q0 > 0

q(t) =

q20 +4

mDt +

2

mE t2 .

Pour E > 0 nous trouvons

q(t) ≃√

2E

mt

à t grand, ce qui correspond au mouvement libre loin de l’origine.Pour E < 0 l’expression de q s’annule pour

t0 =D

|E| +

D2

E2+mq202|E|

et devient imaginaire pure pour des temps t > t0 . La non-existenced’une solution pour t > t0 reflète la singularité du potentiel à l’origine.

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Solution des exercices 149

4.4 Oscillations forcées.

1. On obtient sans difficulté H = ω2(X2 + P 2) , X,P = 1 .

2. Dans ces variables, qui sont celles utilisées par Dirac dans la quantifi-cation de l’oscillateur harmonique, H = ω(a∗a) .

3. On obtient évidemment a, a∗ = −i.4. L’équation de l’évolution dans le temps de a est a = a,H = −iωa

dont on note que c’est une équation du premier ordre. La solutiongénérale est

a(t) = a0 exp (−iωt)où a0 est une constante complexe. L’énergie de l’oscillateur est E =ω|a0|2.

5. Pour t ≤ 0 on a donc a0 = 0. En présence de Hpot le hamiltoniendevient

H = ω(a∗a) + b(a+ a∗) sinΩt .

On a donc a = a,H = −iωa− ib sin Ωt .

Cette équation inhomogène se résout par "variation des constantes".On obtient, en tenant compte de la condition E(t < 0) = 0,

E(t > T ) = ωb2|e−i(Ω−ω)T − 1

2i(Ω− ω)+e−i(Ω+ω)T − 1

2i(Ω + ω)|2 .

6. On se trouve en présence d’un phénomène de résonance à Ω = ω ( ouà Ω = −ω ce qui est équivalent). Au voisinage de Ω = ω, l’énergieacquise par l’oscillateur est de la forme

E(t > T ) = ωb2sin2(Ω− ω)T/2

(Ω− ω)2

qui présente un pic de hauteur ωb2T 2/4 à Ω = ω.

4.5 Chaîne fermée d’oscillateurs couplés.

1. (a) Il est évident, sur la définition, que

yk = y∗N−k , qk = q∗N−k .

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150 Solution des exercices

(b) On aN∑

k=1

yky∗k =

N∑

k=1

(1√N

N∑

n=1

e2iknπ/Nxn)(1√N

N∑

n′=1

e−2ikn′π/Nx′n) (107)

La somme sur k nous donne δnn′, d’où le résultat

N∑

k=1

qkq∗k =

N∑

n=1

p2n . (108)

De même

N∑

k=1

qkq∗k =

N∑

k=1

(1√N

N∑

n=1

e−2iknπ/Npn)(1√N

N∑

n′=1

e2ikn′π/Np′n) (109)

La somme sur k nous donne δnn′, d’où le résultat.

(c) Par ailleursN∑

n=1

(xn − xn+1)2 = (110)

1

N

N∑

n=1

(

N∑

k=1

e−2iknπ/N(1− e−2ikπ/N)yk)(

N∑

k=1

e2iknπ/N(1− e2ikπ/N )y∗k)

La somme sur n nous donne δkk′, d’où le résultat.

2. Equations du mouvement et leur solution.

(a) On a donc

H =

N∑

k=1

[qkq

∗k

2m+

1

2mΩ′2

k yky∗k] avec Ω′2

k = ω2 + 4Ω2 sin2(kπ

N) .

(b)

On a : yj, qk = y∗j , q∗k = yj, q∗N−k = y∗j , qN−k = δjk .

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Solution des exercices 151

(c) On obtient :

yk = yk, H =m

2(q∗k + qN−k) = mq∗k

y∗k = y∗k, H =m

2(qk + q∗N−k) = mqk

qk = qk, H = −mΩ′2k(y

∗k + yN−k)

2= mΩ′2

ky∗k

q∗k = q∗k, H = −mΩ′2k(yk + y∗N−k)

2= mΩ′2

kyk

(d) On a donc yk(t) = ak cos(Ω′kt+ φk), d’où xn(t).

3. Si à l’instant t = 0 on a yN(0) = 1, yN(0) = 0 et yn(0) = 0, yn(0) =0, ∀n 6= N , alors yN(t) = cos(ωt) et yn(t) = 0 , ∀n 6= N . On a alorsxn(t) = (1/

√N) cos(ωt). Les oscillateurs, de même élongation à chaque

instant, sont toujours en phase et seul le mouvement global de rappelpar rapport au plan x = 0, à la pulsation ω se manifeste.

4. Propagation d’ondes.Si ω = 0, les fréquences propres sont Ω′

k = 2Ω sin(kπ/N) ∼ 2Ω(kπ/N)pour k ≪ N . Les conditions aux limites donnent y1 = cos 2Ωπt/N ,yN−1 = cos 2Ωπt/N et yn = 0 autrement.

(a) Par conséquent, on obtient :

xn = xN−n =2√N

cos(2Ωπt

N) cos(

2nπ

N) (111)

=1√N[cos(

2Ωπt+ 2nπ

N) + cos(

2Ωπt− 2nπ

N)] (112)

(b) On voit un phénomène de propagation en sens inverse de deuxondes puisque xn+m(t) = xn(t ±m/Ω) dans les termes ci-dessus.le point xn+m a la même amplitude à l’instant t + m/Ω que lepoint xn à l’instant t.

(c) En écrivant que xn(t) = f(t, y = na) la fonction f est f(t, y) =1√N[cos(2Ωπt+2yπ/a

N)+ cos(2Ωπt−2yπ/a

N)] . Elle satisfait l’équation d’ondes

1

Ω2a2∂2f

∂t2− ∂2f

∂x2= 0 .

Dans cette chaîne d’oscillateurs couplés une onde progressive devitesse Ωa se propage.

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152 Solution des exercices

4.6 Théorème du viriel.

1. On trouve sans difficulté A,H = p2

m−r· ~∇V . L’évolution temporelle

de A est tout simplement dAdt

= A,H = p2

m− r · ~∇V .

2. On a évidemment 〈A〉 = (A(T ) − A(0))/T = 0. Par conséquent, enreportant le résultat précédent, on obtient l’égalité recherchée.

3. Si V = g rn, on a r · ~∇V = r ∂V∂r

= nV . On obtient donc 2〈Ec〉 = n〈V 〉 .

4. L’énergie totale est E = Ec + V . On obtient donc :a) pour un oscillateur harmonique E = 2〈Ec〉 = 2〈V 〉, résultat bienconnu ;b) Pour un potentiel newtonien E = −〈Ec〉 = (1/2)〈V 〉, résultat fa-cile à obtenir pour une orbite circulaire, mais général pour une orbiteelliptique quelconque.

5. En général, pour un potentiel quelconque, les orbites des états liés nesont pas fermées, mais restent confinées dans l’espace. La généralisationde la définition (4.101) de la moyenne est

〈f〉 = limT→∞

1

T

∫ T

0

f(t) dt .

Avec cette définition, on a 〈A〉 = limT→∞

(A(T ) − A(0))/T = 0 puisque

A(t) est borné quelque soit t. Avec cette définition de la moyenne, larelation reste valable.

4.7

Lx, Ly = ypz − zpy, zpx − xpz= ypz, zpx−zpy, zpx−ypz, xpz+zpy, xpz = −ypx−0−0+pyx = Lz .

De la même façon on montre

Ly, Lz = Lx , Lz, Lx = Ly .

4.8 Du problème de Kepler à la précession du périhélie de Mercure

1. L = T − V = mv2

2+ k

r.

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Solution des exercices 153

2. L’équation d’ Euler-Lagrange mène à l’équation de Newton bien connue

m r = −~∇V (r) = −k r

r3.

3. On a par définition

H = p · r − L =p2

2m− k

r

avec p = ∂L∂r

. La conservation de l’énergie suit du fait queH ne dépendepas explicitement du temps.

4. On a

r =∂H

∂p=

p

m, p = − ∂H

∂r= −k r

r3.

5. On déduit de la définition des crochets de Poisson

r, H =∂H

∂pet p, H = −∂H

∂r.

On trouve donc pour r = r, H et pour p = p, H les mêmesrésulats qu’en 4.

6. On a

dL

dt= L, H = r, H×p+ r×p, H = r×p+ r× (−k r

r3) = 0

parce que, dans les deux cas, les vecteurs figurant dans le produit vec-toriel sont parallèles.Pour L 6= 0 les vecteurs r et p , et donc aussi v , sont dans le planperpendiculaire à L . Si L est constant, ce plan est toujours le même.Si L = 0 le mouvement est rectiligne.

7. On calcule

p× L, H = p, H × L + p× L, H = −k r

r3× L + 0 ,

k r

r, H =

k

rr, H + r k

r, H =

k

r

p

m+ r (− k

m

r · pr3

) .

En développant le produit vectoriel de la première ligne on déduit que

A, H = p× L

m− k

r

r, H = 0 .

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154 Solution des exercices

8. On trouve

A2 =1

m2(p × L)2 − 2k

m

1

rr · (p × L) + k2 =

p2L2

m2− 2k

mrL2 + k2

=2L2

mE + k2 .

La quantité A2 est donc entièrement déterminée par les quantités conser-vées L2 et E .

9. Le vecteur A est perpendiculaire à L et donc dans le plan du mouve-ment. On a

A · r =1

m(p × L) · r − k r =

1

mL2 − k r ,

donc Ar cosϕ + k r =L2

md’où r(ϕ) =

1

1 + Akcosϕ

L2

km.

La trajectoire est donc une conique ; une ellipse pour Ak< 1 , une pa-

rabole pour Ak= 1 , et une hyperbole pour A

k> 1 .

10. Nous avons choisi l’origine des ϕ tel que ϕ = 0 correspond à la directionde A . C’est la position où la distance du point matériel au centredu potentiel est minimale. La direction de A correspond donc à laposition du périhélie de la trajectoire. Le fait que cette direction soitfixée implique dans le cas A

k< 1 que la trajectoire est périodique ou

fermée.

II.

1. On trouve M⊙Gc2 r

= 2, 7 · 10−8 ≪ 1 .

2. H ′ ne dépend pas explicitement du temps t , et H ′ est invariant parrotations. E et L sont donc conservés.

3. Dans l’approximation où ce changement est petit on a

∆ =A⊥A(0)

où A(0) = |A(0)| , et A(2π) = A|| + A⊥ , A⊥ = |A⊥| .A, H = 0 , d’où

dA

dt= A, δH , dA⊥

dt= A, δH⊥ ,

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Solution des exercices 155

∆ =1

A(0)

∫ T

0

A, δH⊥ dt .

4. Avec les données on trouve

∫ 2π

0

dA⊥dt

= 6π A(0)M⊙G

c2 r, ∆ = 6π

M⊙G

c2 r= 2π · 8, 4 · 10−8 .

Pour passer en secondes d’arc on multiplie par 360 · 60 · 60 et on di-vise par 2π . Pour passer à la révoultion par siècle on multiplie aussipar 100/0, 24 ≃ 415 . De cette manière on obtient une précession dupérihélie de Mercure par siècle de 43, 5′′ .

Les astronomes savaient dès le XIXe siècle que la théorie newtonienne était endésaccord avec les observations de la précession du périhélie de Mercure. Ledésaccord était de 35′′ d’après les calculs de Jean-Joseph Le Verrier en 1845et de 43′′ d’après les nouveaux calculs de Simon Newcomb en 1883 (qui apu se baser aussi sur des observations plus précises). On a essayé d’expliquerce désaccord par la présence d’autres masses dans le système solaire -qu’onn’a pas su trouver-, et/ou par une modification ad hoc de la loi de Newton.Einstein avait trouvé en 1915 que la relativité générale pouvait expliquercet écart quantitativement, d’après le résultat du calcul précédent. Pendantplusieurs décennies ce résulat a été la confirmation observationnelle la plusimportante de la nouvelle théorie de la gravitation d’Einstein.

4.9 Le bétatron

1. On a d’après le cours

L =m

2v2 + q v ·A − q φ

2. On a

v ·A = (r cosϕ− ϕ r sinϕ)Ax + (r sinϕ+ ϕ r cosϕ)Ay + z Az

= r (Ax cosϕ+ Ay sinϕ) + ϕ r (Ay cosϕ− Ax sinϕ) + z Az

donc

Ar = Ax cosϕ+ Ay sinϕ , Aϕ = r (Ay cosϕ− Ax sinϕ) .

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156 Solution des exercices

3.

pr =∂L∂r

= m r+ qAr, pϕ =∂L∂ϕ

= mr2 ϕ+ qAϕ , pz =∂L∂z

= m z+ qAz .

4. On obtient

H(pr, pϕ, pz, r, ϕ, z) = (m r+q Ar)r+(mr2 ϕ+q Aϕ) ϕ+(m z+q Az)z−L =

=1

2m(pr − q Ar)

2 +1

2mr2(pϕ − q Aϕ)

2 +1

2m(pz − q Az)

2 .

5. Dans ces conditions le hamiltonien ne dépend pas de ϕ ni de z . Ondéduit des équations de mouvement de Hamilton que pϕ et pz seconservent.

6. Le hamiltonien se simplifie pour Ar = 0 , Az = 0 :

H(pr, pϕ, pz, r, ϕ, z) =p2r2m

+1

2mr2(pϕ − q Aϕ)

2 +1

2mp2z .

Pour pϕ = 0 , pz = 0 les équations du mouvement de Hamiltonpeuvent s’écrire

ϕ = −q Aϕmr2

, r =prm

, pr = − ∂

∂r

(q Aϕ)2

2mr2.

7. Les deux dernières relations donnent

r = − ∂

∂r

(q Aϕ)2

2m2r2.

Les conditions se résument donc à

∂r

A2ϕ

r2|r=r0 = 0 et pr(0) = 0

pour une trajectoire circulaire de rayon r0 .

8. On vérifie que ∂∂r

A2ϕ

r2|r=a = 0 , et on trouve

ϕ(t) =−q ν tma

.

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Solution des exercices 157

9. D’après (4.8) on a H =

m2 c4 + c2 (~p− q ~A)2 ce qui se traduit en

H =

m2 c4 + c2 [p2r +1

r2(pϕ − qAϕ)2 + p2z]

en coordonnées cylindriques. Le hamiltonien relativiste ne dépend nide ϕ ni de z , pϕ et pz sont donc toujours conservées. Les équationsde Hamilton prennent la forme

ϕ =c2

H

1

r2(pϕ − qAϕ) , r =

c2

Hpr , pr = − c

2

H

∂r(1

r2(pϕ − qAϕ)

2) .

10. On obtient

H(t) =√

m2 c4 + c2 [p2r + q2µ2 (r − a)2 + ν2 t2] .

On adH0

dt= H0, H(t) =

∂H0

∂r

∂H(t)

∂pr− ∂H0

∂pr

∂H(t)

∂r

=c4

H0H

(

q2µ2(r − a) pr − pr q2µ2(r − a)

)

= 0 .

11. On a

ϕ =1√

H0 + b2t2(−c

2 q√

µ2(r − a)2 + ν2t2

r) , r =

c2 pr√H0 + b2t2

,

pr = − q2µ2 c2 (r − a)√H0 + b2t2

.

On en déduit dans l’approximation indiquée

ds= − q

ν t

a,

dr

ds= pr ,

dprds

= − q2 µ2 (r − a) .

La solution pour r(s) donne un mouvement harmonique autour de a :

r(s) = a + δr sinωs , ω = q µ , |δr| ≪ a (par hypothèse) .

C’est un mouvement oscillatoire autour de la trajectoire circulaire. Pourobtenir de petites osillations il faut injecter les particules avec pr ≃ 0 ,donc en direction tangentielle.

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158 Solution des exercices

12. On trouve

s(t) =c2√H0

∫ t

0

dt′√

1 + b2

H0

t′2=

c

qνarsh(

b√H0

t)

et donc

t(s) =

√H0

bsinh(

cs) .

En négligeant les petites oscillations la vitesse s’écrit

v(t) = adϕ

dt= a

dϕdsdtds

.

Ceci donne une vitesse inférieure à c :

v(t) = −c tanh(qνcs) = −c t

t2 + H0

b2

.

Le premier bétatron a été construit en 1940 à l’université d’Illinois par D.W.Kerst. L’énergie des électrons a rapidement dépassé les 10 MeV. Il a d’abordété un outil de la recherche fondamentale. Plus tard et jusqu’à présent lesbétratrons ont servi de source d’électrons et de rayons X pour le traitementdes cancers.

4.10 Les points de Lagrange

1. Il s’agit d’un mouvement keplérien. L’invariance par rotations limite lemouvement au plan perpendiculaire au moment cinétique conservé.

2. En égalisant les deux forces on obtient M1 ω2r1 = GM1M2

R2 , M2 ω2r2 =

GM1M2

R2 . On a aussi r1+r2 = R , et r1 =M2

MR , r2 =

M1

MR par définition

du centre de masse. D’où ω2 = GMR3 .

3. En vue de l’égalité des masses gravitationnelle et inertielle, la massede l’astéroïde apparaît comme facteur multiplicatif des deux côtés del’équation du mouvement et ne joue donc aucun rôle.Remarque : ceci n’est vrai que dans l’approximation considérée où l’onnéglige l’influence de l’astéroïde sur les deux astres de façon que lespositions des deux astres sont données indépendamment de l’astéroïde.

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Solution des exercices 159

4. La force exercée par les astres est somme de deux vecteurs dirigés de laposition de l’astéroïde vers l’un ou l’autre des astres. Le vecteur force estdonc dans le plan du mouvement. Par conséquent la dérivée temporelledu vecteur impulsion est dans ce plan, et le vecteur impulsion restealors dans ce plan. Ensuite le même argument s’applique au vecteurposition.

5. Il s’agit de décrire le mouvement non-relativiste d’une particule dansun potentiel gravitationnel qui s’obtient en fonction des positions desdeux autres particules. Le lagrangien/le hamiltonien s’obtiennent doncde la façon usuelle comme différence/somme des énergies cinétique etpotentielle. On obtient donc

L =m

2~v 2+

GmM1

|~r − ~r1(t)|+

GmM2

|~r − ~r2(t)|, H =

~p 2

2m− GmM1

|~r − ~r1(t)|− GmM2

|~r − ~r2(t)|.

Ici ~v = (vx, vy) , ~p = (px, py) = m~v , ~r = (x, y) ~r1 = (x1, y1) ,

~r2 = (x2, y2) .L et H ne décrivent que la dynamique de l’astéroïde. Celle-ci dépenddes positions des astres ~r1(t) et ~r2(t) , L et H dépendent donc expli-citement du temps.

6. En effet le lagrangien dans le repère tournant reste le même - par uni-versalité du principe de moindre action ; cependant il faut remplacer lavariable ~v par ~v+~ω×~r . En trouve alors pour le moment conjugué dansle repère tournant ~p = m(~v + ~ω × ~r). En exprimant H qui s’obtient dulagrangien par transformation de Legendre, on trouve (4.104). On peutrésumer le résultat par le fait que le hamiltonien dans le repère tournants’obtient de celui dans le référentiel inertiel par la transformation

H = H − ~ω · ~L ,

où ~L est le moment cinétique du point matériel (de l’astéroïde).

7. Dans le référentiel tournant le hamiltonien H ne dépend plus explicite-ment du temps, vu que ~r1 et ~r2 sont constants par choix du référentiel.Par conséquent H est conservé. Cette loi de conservation restreint l’es-pace des phases accessible à une variété tri-dimensionnelle. Ceci auto-rise toujours des comportements chaotiques qui ne sont a priori exclusqu’en deux dimensions (d’après le théorème de Poincaré-Bendixson).

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160 Solution des exercices

8. On obtient de (4.104)

x =pxm

+ ωy , y =pym

− ωx ,

px = ω py − (x− x1)GmM1

|~r − ~r1|3− (x− x2)

GmM2

|~r − ~r2|3,

py = −ω px − (y − y1)GmM1

|~r − ~r1|3− (y − y2)

GmM2

|~r − ~r2|3.

9. Le système d’équations précédent donne :

x = 0 ⇒ px = −mωy , y = 0 ⇒ py = mωx ,

px = 0 ⇒ py =GmM1

ω

x− x1|~r − ~r1|3

+GmM2

ω

x− x2|~r − ~r2|3

, (113)

py = 0 ⇒ px = − GmM1

ω

y − y1|~r − ~r1|3

− GmM2

ω

y − y2|~r − ~r2|3

. (114)

Si les trois objets se trouvent sur une droite, et avec notre choix del’axe des x , on trouve comme solution

y = 0 ⇒ px = 0 ,

et py = mωx implique

x =GM1

ω2

x− x1|~r − ~r1|3

+GM2

ω2

x− x2|~r − ~r2|3

=R3M1

M

x− x1|x− x1|3

+R3M2

M

x− x2|x− x2|3

, (115)

où nous avons reporté la valeur de ω . Graphiquement on voit facilementque cette équation possède 3 solutions différentes, voir Fig. 8.

Pour chacune de ces solutions, l’astéroïde suit le mouvement circulairedes deux astres, tout en restant sur la droite les reliant et à distanceconstante de chacun d’eux.

10. Pour y 6= 0 nous avons à satisfaire l’équation (115) et l’équation ana-logue provenant de (114)

y =R3M1

M

y

|~r − ~r1|3+R3M2

M

y

|~r − ~r2|3. (116)

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Solution des exercices 161

x

f(x)

x 1 x 2

Figure 8 – Les 3 points de Lagrange linéaires s’obtiennent par intersection de lacourbe donnée par le côté droit de (115) avec la diagonale f(x) = x .

En reportant (116) dans (115) on obtient après simplification

0 =R3

M

( M1 x1|~r − ~r1|3

+M2 x2

|~r − ~r2|3)

. (117)

Vu que M1 x1 +M2 x2 = 0 (définition du c.d.m.) ceci implique

1

|~r − ~r1|3=

1

|~r − ~r2|3⇒ |~r − ~r1|2 = |~r − ~r2|2 . (118)

On a |~r − ~ri|2 = (x− xi)2 + y2 , et on en tire donc

x− x1 = ±(x− x2) ⇒ x =x1 + x2

2, |x− xi| =

R

2. (119)

La relation (116) donne alors

(x− xi)2 + y2 = R2 ⇒ y = ±

√3

2R (120)

d’où

|~r − ~r1| = |~r − ~r2| = |~r1 − ~r2| , (121)

ce qui prouve que les deux configurations (119), (120) des trois corpscorrespondent bien à un triangle équilatéral.

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162 Solution des exercices

11. Une fois la matrice M diagonalisée, on obtient des solutions du systèmed’équations du type

fi(t) = eλitfi(0) ,

où les fi(t) sont des combinaisons linéaires des quantités δx(t), δy(t),δpx(t) , δpy(t) . Pour rester proche des valeurs d’équilibre il faut doncque la partie réelle de λi satisfasse à la condition

Reλi ≤ 0 .

pour toutes les valeurs propres λi .

12. a) s’explique par l’instabilité de L1 à L3 .b) est une conséquence de la stabilité de L4, L5 .c) un satellite positionné sur un point de Lagrange demande moinsd’approvisionnement en énergie que si il se trouve sur un endroit où iln’y a pas de compensation des forces. L’instablilité est moins gênantepour un satellite, vu qu’il est possible de corriger sa position à partirde la Terre. Le point L2 est beaucoup plus proche que L3. Par rapportà L1 il a l’avantage d’être écranté du Soleil par la Terre.d) Application numérique : L’équation (115) réécrite en unités de Rdonne pour le système Terre-Soleil

x = (1− ε)x+ ε

|x+ ε|3 + εx− 1 + ε

|x− 1 + ε|3 , ε = 0, 33 · 10−5 . (122)

On voit que x ≃ −1 est solution à des corrections d’ordre ε près. Ladistance de L3 à la Terre est donc de l’ordre de 3·108km . Pour x prochede x2 = 1− ε on pose x = 1− ε+ δ . On obtient alors pour δ

1−ε+δ = (1−ε) 1 + δ

|1 + δ|3 ± ε1

δ2= 1−ε−2δ+O(δ2, εδ) ± ε

δ2(123)

en fonction du signe de δ , et donc

δ ≃ ±(ε/3)1/3 ,

ce qui donne une distance de l’ordre de 1, 5 · 106km , c.a.d. 1% de ladistance Terre-Soleil.

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Bibliographie

[1] Jean-Louis Basdevant, Le principe de moindre action et lesprincipes variationnels en physique, Editions Vuibert (2010).

[2] David Langlois, Introduction à la Relativité, Ecole polytech-nique (2009).

[3] André Rougé, Introduction à la Relativité, Editions de l’Ecolepolytechnique (2004).

[4] Arthur Koestler, The Act of Creation, Hutchinson & Co.(1964).

[5] R.P. Feynman, R.B. Leighton et M. Sands, The FeynmanLectures on Physics, Addison-Wesley (1964).

[6] Wolfgang Yourgrau et Stanley Mandelstam, VariationalPrinciples in Dynamics and Quantum Theory, Dover Publi-cations (1979).

[7] Jean-Pierre Bourguignon, Calcul Variationnel, Editions del’Ecole Polytechnique (2007).

[8] Erwin Schrödinger, Statistical thermodynamics, Dover Publi-cations (1989).

[9] L. Landau et E. Lifshitz, Mécanique, Editions Mir (1970).

[10] Herbert Goldstein, Charles Poole et John Safko, ClassicalMechanics, Addison Wesley, Boston (2002).

[11] Claude Gignoux et Bernard Silvestre-Brac, Mécanique -De la formulation lagrangienne au chaos hamiltonien, EDPSciences, Grenoble (2002).

[12] Ian Percival et Derek Richards, Introduction to Dynamics,Cambridge University Press, (1982).

163

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[13] K. Alligood, T. Sauer et J. Yorke CHAOS - An introductionto dynamical systems, Springer Verlag, Heidelberg (1996).

[14] Max Born et Emil Wolf, Principles of Optics, PergamonPress, Oxford (1964).

[15] Albert Messiah, Mécanique quantique, nouvelle édition, Du-nod, Paris (1995).

[16] Pierre Fayet, Introduction à la théorie relativiste des champs,Ecole Polytechnique (2011).

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Index

action, 15, 40, 42, 113action réduite, 116approximation BKW, 123approximation eikonale, 121approximation semi-classique, 123attracteur, 110-112

brachistochrone, 65bulle de savon, 63Buridan, Jean de, 17

calcul variationnel, 45-50caténoïde, 64champ électromagnétique, 76-81, 85-

88champ scalaire, 85chaos, 107-112commutateur, 106constante du mouvement, 99corde pesante, 58corde vibrante, 82crochets de Poisson, 98-105cyclique,

variable, 52, 103-104

densité de lagrangien, 83Descartes, R., 14, 31, 32Descartes-Snell,

loi de, 32, 34Dirac, P.A.M., 24, 94, 106

Ehrenfest

théorème de, 106eikonal, 121

équation de, 121Einstein, A., 25, 41énergie, 53, 97énergie-impulsion, 75-80équation des champs, 86-88équations canoniques, 95-96équations d’Euler-Lagrange, 47, 48, 78,

84-85généralisées, 84-85

équations de Maxwell, 78, 79, 87espace courbe, 41espace des phases, 98-107Euler, L., 30, 40

Fermat, P. de, 14, 31-34Fermat,

principe de, 14, 31-34flot, 94, 105, 107flot hamiltonien, 105, 107force de Lorentz, 71formalisme canonique, 95-97

Galilée, G., 29Galilée,

transformation de, 48gamme pythagoricienne, 8-9

Héron d’Alexandrie, 16Hamilton, W.R., 20, 42, 93, 95, 122

165

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166 INDEX

Hamilton-Jacobi,équation de, 113, 115-120

hamiltonien, 96Heisenberg, W. 106-107Huygens,

principe de, 24, 122

identité de Jacobi, 98impetus, 17-18impulsion généralisée, 51-52intégrale première, 51, 53, 95interaction minimale, 77invariance de jauge, 80, 88invariance de Lorentz, 74, 75, 77invariant de Lorentz, 74, 75, 77

Jacobi,identité de, 98théorème de, 119

Klein, Felix, 20, 122

Lagrange,fonction de, 42

Lagrange, J.-L., 20, 30, 42, 46lagrangien, 42, 48-51

densité de, 83Laplace, P. S. de, 93Legendre,

transformation de, 96Leibniz, G. W., 14Liouville

théorème de,104-105loi de conservation, 51-55loi de Snell-Descartes, 31, 34Lorenz,

attracteur de, 109-112

Maupertuis, P. L. de, 15, 30, 40

Maupertuis,principe de, 15, 30, 34, 40-41, 50,

117Maxwell,

équations de, 78, 79, 87mirage, 36-40

inférieur, 36supérieur, 37

modèles économiques, 22moment cinétique, 54-55

et rotations, 54-55moment conjugué, 51-52multiplicateurs de Lagrange, 56-57

Newton, I., 22, 30

optimisation sous contraintes, 16, 29optique géométrique

et optique ondulatoire, 120-122

paradoxe des jumeaux, 74particule relativiste, 74-81Philopon, Jean, 17Poincaré, H., 23, 94Poincaré,

théorème de Poincaré-Bendixson,111

Poisson, S. D., 94Poisson,

crochets de, 98-104loi de, 62théorème de, 99

principede moindre action, 15, 20, 30, 42,

46de moindre temps, 14, 21, 31-34du meilleur, 15variationnel, 15-18d’économie naturelle, 29, 33

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INDEX 167

de Fermat, 14, 31-34, 122de Maupertuis, 15, 30, 34, 40-41,

50, 117

quadri-vecteur, énergie-impulsion, 75-80

quadri-vitesse, 80

réfraction, 32-34rayons courbes, 35-36, 57-58relations de commutation canoniques,

106relativité générale, 25, 41

sauvetage en mer, 35Schrödinger

équation de, 123symétrie dynamique, 55, 103systèmes conservatifs, 41systèmes dynamiques, 107-112

temps propre, 74théorème d’Ehrenfest, 106théorème de Liouville, 104-105théorème de Poincaré-Bendixson, 111théorème de Poisson, 99théorie des champs, 81-88Titius Bode, loi de, 12-13transformation canonique, 100-104, 124transformation ponctuelle, 100transformations de jauge, 80translation dans le temps, 53translations dans l’espace, 53-54

variable cyclique, 52, 103-104variables d’état, 42variables angle-action, 102-103variables canoniquement conjuguées,

102-103