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Prise en charge masso-kinésithérapique d’une patiente présentant des troubles de l’équilibre dans les suites d’un neurinome de l’acoustique droit opéré il y a 6 ans. Travail écrit de fin d’études Réalisé en vue de l’obtention du Diplôme d’Etat de Masseur-Kinésithéapeute Guerrot Antoine 2011-2012 Institut Régional de Formation de Rééducation et de Réadaptation des Pays de la Loire 54, rue de la Baugerie 44230 Saint Sébastien sur Loire

Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

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Page 1: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

Prise en charge masso-kinésithérapique

d’une patiente présentant des troubles de

l’équilibre dans les suites d’un neurinome de

l’acoustique droit opéré il y a 6 ans.

Travail écrit de fin d’études Réalisé en vue de l’obtention du Diplôme

d’Etat de Masseur-Kinésithéapeute

Guerrot Antoine 2011-2012

Institut Régional de Formation de Rééducation et de

Réadaptation des Pays de la Loire

54, rue de la Baugerie

44230 Saint Sébastien sur Loire

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Pré séntation du céntré

Le Centre Mutualiste de Rééducation et Réadaptation Fonctionnelles de Kerpape est

un établissement sanitaire privé à but non lucratif géré par la Mutualité Française

Finistère-Morbihan : il participe au service public hospitalier. Dans le cadre du

schéma régional d’organisation de soins de Bretagne, le Centre de Kerpape

développe une double réponse :

De soins de rééducation spécifiques à vocation régionale (affections

neurologiques, brûlés, cardiaques, etc…).

De soins de rééducation polyvalents à vocation de proximité (orthopédie,

traumatologie, amputés, vasculaires…).

Près de 400 personnes (2/3 d’adultes, 1/3 d’enfants) sont accueillies chaque jour. Le

Centre regroupe sur un même lieu géographique :

Un plateau hospitalier comprenant 4 unités de soins adultes (152 lits), 1

hôpital de jour adultes (45 places), 3 unités de soins enfants/adolescents (53

lits), 1 hôpital de jour enfants (25 places).

Un plateau de Rééducation/Réadaptation regroupant 16 médecins de

Médecine Physique et de Réadaptation, 2 cardiologues, 5 plateaux de

kinésithérapie, 3 plateaux d’ergothérapie, une équipe pluridisciplinaire

(psychologues, neurologues, orthophonistes, psychomotriciens,

éducateurs…).

Un service transversal de Réadaptation Sociale et Professionnelle.

Un plateau pédagogique et scolaire.

Un atelier d’orthoprothèse.

Un laboratoire d’électrotechnique.

Une auto-école.

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Ré sumé

Mme L, 44 ans, patiente à 6 ans d’une chirurgie d’un neurinome de l’acoustique droit,

est admise le 2 janvier 2012 dans le service de neurologie adulte au centre de

rééducation de Kerpape pour une douzaine de séances de rééducation vestibulaire.

Mme L se plaint depuis environ deux mois de sensations de déséquilibre et de

vertiges ayant des conséquences dans les activités de la vie quotidienne.

La prise en charge est étalée sur 6 semaines à raison de 2 séances par semaine.

Les troubles de l’équilibre de Mme L sont objectivés par un examen de l’équilibration

statique et dynamique, mettant en évidence une dépendance visuelle chez la

patiente. La rééducation visera donc à améliorer les capacités d’équilibrations de

Mme L, en diminuant cette dépendance visuelle, ainsi qu’en proposant des exercices

adaptés à sa pathologie afin d’orienter la compensation vestibulaire, le principe étant

de la placer dans des situations de déséquilibres pour faciliter la mise en place de

stratégies posturales adaptées, dans le but de diminuer la gêne fonctionnelle qu’elle

ressent.

En fin de prise en charge, l’examen de l’équilibration montrera une amélioration des

capacités de maintien postural ainsi qu’une répercussion positive sur les activités de

la vie quotidienne. Cependant l’amélioration est faible par rapport à la dernière prise

en charge, ce qui peut s’expliquer par l’ancienneté de la pathologie et de

l’intervention.

Mots clé s

Equilibration

Compensation vestibulaire

Entrées sensorielles

Dépendance visuelle

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Sommairé

1 Introduction ..................................................................................................................................... 1

2 Donnés médicales et professionnelles ........................................................................................... 1

2.1 Neurinome de l’acoustique ..................................................................................................... 1

2.2 Anatomo-neurophysiologie de l’équilibration .......................................................................... 2

3 Anamnèse ...................................................................................................................................... 6

3.1 Antécédents ............................................................................................................................ 6

3.2 Activité professionnelle ........................................................................................................... 6

3.3 Histoire de la maladie ............................................................................................................. 6

3.4 Prescription ............................................................................................................................. 7

3.5 Traitement .............................................................................................................................. 7

4 Examen de la patiente et évaluation initiale ................................................................................... 7

4.1 Interrogatoire .......................................................................................................................... 7

4.2 Auto-questionnaire DHI .......................................................................................................... 8

4.3 Evaluation de l’équilibration .................................................................................................... 9

4.4 Examen sur fauteuil rotatoire ................................................................................................ 11

4.5 Epreuves vestibulospinales .................................................................................................. 14

5 Bilan ............................................................................................................................................. 15

5.1 Bilan diagnostic kinésithérapique.......................................................................................... 15

5.2 Objectifs kinésithérapiques ................................................................................................... 16

5.3 Moyens mis en œuvre .......................................................................................................... 16

6 Traitement .................................................................................................................................... 16

6.1 Principes de traitement ......................................................................................................... 16

6.2 Techniques rééducatives vestibulaires spécifiques .............................................................. 17

6.3 Stimulation opto-cinétique .................................................................................................... 17

6.4 Rééducation gymnique ......................................................................................................... 18

7 Résultats et évaluation terminale .................................................................................................. 23

7.1 Auto-questionnaire DHI ........................................................................................................ 23

7.2 Evaluation de l’équilibration .................................................................................................. 24

7.3 Examen sur fauteuil rotatoire ................................................................................................ 25

7.4 Epreuves vestibulospinales .................................................................................................. 26

8 Discussion .................................................................................................................................... 26

9 Conclusion .................................................................................................................................... 28

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1

Etudé dé cas cliniqué

1 Introduction

Au cours d’un stage effectué du 2 janvier 2012 au 10 février 2012 au centre de

rééducation de Kerpape dans le service de neurologie adulte, j’ai rencontré Mme L,

patiente de 44 ans ayant été opérée d’un neurinome de l’acoustique de stade 4 il y a

6 ans et présentant des troubles de l’équilibre, Mme L est admise dans le service

pour une prise en charge correspondant à une rééducation vestibulaire.

L’éloignement dans le temps de l’intervention et le fait que la patiente ait déjà

effectué une rééducation de ce type à Kerpape, de octobre à décembre 2008, m’ont

amené à un questionnement initial. En effet, suite à ce type de pathologie et

d’intervention, la prise en charge rééducative est plus efficace lorsqu’elle est

effectuée de façon précoce. Cette rééducation paraît donc, au premier abord,

compliquée du point de vue du résultat. Cependant, lors de sa venue en 2008,

l’équilibration de Mme L s’était améliorée, la prise en charge était pourtant déjà

éloignée de l’intervention, ce qui permet donc d’espérer à nouveau un effet

bénéfique au terme de la prise en charge.

2 Données médicales et professionnelles

2.1 Neurinome de l’acoustique

Définition

Les neurinomes de l’acoustique, ou schwannomes vestibulaires, sont des tumeurs

bénignes développées à partir de la gaine de Schwann du nerf vestibulaire, qui est

une branche de division du VIIIème nerf crânien, le nerf cochléovestibulaire. Il

constitue de loin la localisation la plus fréquente des neurinomes [1]. Dans 95% des

cas, le neurinome est unilatéral [2].

La taille de la tumeur peut être quantifiée selon la classification de Koos en quatre

stades, le stade 1 correspondant à une tumeur intraméatique et le stade 4 à une

tumeur déplaçant le tronc cérébral et le 4ème ventricule.

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2

Epidémiologie

Les neurinomes de l’acoustique représentent 8% des tumeurs intracrâniennes et

80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux

épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation de la

prévalence radiologique de 7,8 à 12,4 par millions d’habitants et par ans. L’incidence,

selon une étude rétrospective menée sur 10000 IRM cérébrales, est de 0,07% [1].

Séquelles fonctionnelles

Les séquelles fonctionnelles sont la conséquence du geste chirurgical. Il s’agit de la

paralysie faciale, des troubles de l’équilibre, de la surdité totale et des céphalées. En

ce qui concerne la paralysie facial, plus la tumeur est volumineuse et plus le risque

de lésion et donc, de séquelles à long terme, est important, allant de 1-2% pour les

tumeurs de stade 1, à 30-50% pour les tumeurs de stade 4. Dans le cas de non

récupération, une anastomose hypoglossefaciale est proposée. Les troubles de

l’équilibre sont attendus du fait de la neurotomie vestibulaire ou de la

labyrinthectomie qui accompagne le geste chirurgical d’exérèse de la tumeur.

L’importance de ces troubles est variable d’un individu à un autre et dépend des

stratégies d’équilibration mises en place, de l’âge du patient et de la compensation

vestibulaire. Ces troubles réclament une rééducation vestibulaire adaptée et si

possible très précoce. La surdité totale de l’oreille atteinte touche la grande majorité

des patients et provoque une grande gêne auditive et un déficit de perception de

l’espace sonore. Les acouphènes sont également fréquents et augmentés par

rapport à l’état préopératoire. Enfin, la fréquence des céphalées est variable et leur

traitement est souvent difficile [1].

2.2 Anatomo-neurophysiologie de l’équilibration

Définition

La fonction d’équilibration correspond à la mise en place de stratégies afin d’adapter

la posture dans différentes situations pour obtenir le maintien de la position érigée.

La posture correspond au placement des différents segments corporels entre eux à

un moment donné, ce qui nécessite une activité musculaire permanente [3][4]. Pour

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3

assurer cette fonction, des centres intégrateurs reçoivent des informations à partir

d’afférences neurosensorielles, ce qui leur permet de donner une réponse adaptée à

la situation par l’intermédiaire d’afférences neuro-motrices. L’équilibration est le fruit

d’un apprentissage, et chaque individu met en place des stratégies qui lui sont

propres en fonction de ses activités et de ses besoins. En effet, comme le dit

Semont, « un sujet normal a la liberté d’utiliser les différentes entrées avec le plus de

pertinence possible » [3].

Les afférences neurosensorielles

Les différentes informations nécessaires au maintien de la posture en réponse à des

éléments qui le perturbent sont obtenues grâce à différents capteurs périphériques,

qui correspondent à trois entrées sensorielles :

L’entrée somato-sensorielle

L’entrée visuelle

L’entrée vestibulaire

L’entrée somato-sensorielle est constituée par la proprioception des capteurs ostéo-

articulaires et des muscles squelettiques, ainsi que par les récepteurs cutanés,

sensibles aux stimulations tactiles, thermiques et nociceptives [3][4].

L’entrée visuelle correspond, d’une part, à la vision périphérique, qui sert à évaluer la

vitesse de déplacement de la scène visuelle, ainsi qu’à ramener la fovéa sur une

image aperçue dans le champ visuel et présentant un intérêt, et d’autre part, à la

vision fovéale, qui sert à regarder. L’ensemble permettant de voir et donc de donner

des informations, ce qui aboutit la mise en place des stratégies permettant

l’adaptation de la posture [3][4].

L’entrée vestibulaire est la seule entrée altérée dans le cadre de la prise en charge

de Mme L. L’organe vestibulaire, qui est dévolue à l’équilibration, forme avec le canal

cochléaire qui lui est consacré à l’audition, le labyrinthe membraneux, ce dernier

étant protégé par le labyrinthe osseux. Ce labyrinthe osseux est situé au niveau de

l’oreille interne, qui existe de chaque côté de la tête, au sein de l’os temporal. Le

labyrinthe membraneux postérieur correspond à l’organe vestibulaire et comprend

les canaux semi-circulaires, l’utricule et le saccule [5][6]. Les canaux semi circulaires

sont sensibles aux accélérations de type angulaire grâce au mouvement du fluide

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qu’ils contiennent, l’endolymphe [3][6]. Ils sont aux nombres de trois par oreille

interne, un canal antérieur, un canal latéral et un canal postérieur, chacun étant

orienté dans un plan perpendiculaire aux autres ce qui permet d’obtenir un maximum

d’informations. Chaque canal comprend à son extrémité une ampoule renfermant la

crête ampullaire qui contient l’épithélium neurosensoriel où pénètrent les fibres

nerveuses, c’est donc à ce niveau qu’est transmise l’information à partir des fibres

afférentes de chaque nerf ampullaire [5][6]. L’utricule et le saccule sont sensibles, par

l’intermédiaire d’un épithélium neurosensoriel spécialisé appelé macule otolithique,

aux accélérations de type linéaire reflétant le mouvement et à l’orientation de l’axe de

la tête par rapport au vecteur gravitaire reflétant la posture [3][6]. A partir des

macules otolithiques sortent les fibres afférentes par l’intermédiaire des nerfs

utriculaires et sacculaires. Les nerfs ampullaires, sacculaire et utriculaire se

rejoignent ensuite pour former le nerf vestibulaire qui constitue avec le nerf

cochléaire le VIIIème nerf crânien, le nerf cochléovestibulaire [5][6].

Dans le cadre de la prise en charge de Mme L, il y a donc un déficit de toutes les

informations vestibulaires du côté droit, suite à l’intervention chirurgicale qu’elle a

subie.

Les centres intégrateurs

Les centres intégrateurs sont la moelle spinale, les hémisphères cérébraux, le tronc

cérébral, le cervelet et les ganglions de la base. Les informations afférentes

provenant des trois entrées sensorielles vont donc être analysées, intégrées et

comparées par ces centres intégrateurs qui vont ensuite envoyer un ordre aux

systèmes efférents neuro-moteurs afin d’adapter la posture à la tâche envisagée [3].

Il y a donc une intégration multi-sensorielle de l’équilibre [6]. Cette régulation par le

système nerveux central est effectuée en permanence et de ce fait des ajustements

posturaux sont constamment réalisés afin de maintenir l’équilibre.

Le rôle de l’entrée vestibulaire est capital car elle interagit avec les autres entrées.

Les afférences vestibulaires se projettent sur quatre grands systèmes : la moelle

spinale, les noyaux oculomoteurs, le cervelet et le cortex. Les deux premières sont

essentielles, le vestibule ayant un rôle dans l’équilibration principalement grâce aux

boucles posturales et oculomotrices. Ainsi, les voies vestibulo-spinales permettent de

contrôler le tonus des muscles extenseurs, principalement au niveau cervical [4][6].

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5

En fonction des informations reçues, une réaction posturale compensatoire sera

obtenue de façon réflexe. Les voies vestibulo-oculomotrices ont comme objectif la

stabilisation du regard lors du mouvement. Le vestibule est l’organe du déplacement,

du mouvement de la tête et du corps dans un espace tridimensionnel. Son rôle

principal est la stabilisation de la scène visuelle, ce qui est la clé de l’équilibre :

devant un espace visuel instable, il n’est pas possible de tenir en équilibre [3]. Tout

comme pour le réflexe vestibulospinal, un mouvement oculaire compensatoire sera

obtenu de façon réflexe afin de conserver cette stabilité du regard [4][6].

Une anomalie du système vestibulaire aura un retentissement important du fait de

ces connexions avec les autres entrées, et va perturber le fonctionnement logique

d’équilibration que l’individu avait mis en place, ce qui a été le cas pour Mme L

Les éfférences neuro-motrices

Il s’agit des muscles axiaux et périphériques, qui vont se contracter en fonction des

ordres donnés par les centres intégrateurs. Nous avons vu précédemment que, en

ce qui concerne le système vestibulaire, les effecteurs sont principalement les

muscles extenseurs du rachis, en particulier le rachis cervical, et les muscles

oculomoteurs.

La compensation vestibulaire

Selon Barona De Guzman et Garcia Alsina, «La compensation vestibulaire est

l’ensemble des phénomènes de réorganisation neurologique qui permet la

récupération de l’équilibre après une lésion vestibulaire » [7]. Chez Mme L, à la suite

de sa pathologie et de son intervention chirurgicale, les informations provenant du

système vestibulaire droit n’étaient plus transmises. Il y avait donc une asymétrie

vestibulaire, provoquant une analyse erronée de la situation par les centres

intégrateurs. Cependant, depuis la lésion datée d’il y a 6 ans, un processus s’est mis

en place afin d’atténuer l’asymétrie vestibulaire post lésionnelle, et une

réorganisation du système vestibulaire et des aires cérébrales qui y sont associées.

Ce phénomène s’étend à tout le système nerveux central et correspond à la plasticité

[4][7]. La compensation vestibulaire a également pu se mettre en place avant

l’intervention, le neurinome de l’acoustique étant une pathologie lentement évolutive.

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6

Ainsi, après une lésion vestibulaire, plusieurs mécanismes peuvent expliquer la

compensation vestibulaire. L’adaptation et l’habituation permettent de diminuer les

informations reçues ou la réponse aux informations reçues par le vestibule sain. La

substitution permet d’élaborer des stratégies à partir des entrées visuelle et

somatosensorielle pour se substituer aux réflexes vestibulooculaire et vestibulospinal

[7][8][9][10].

Ce processus de compensation est amélioré par l’exercice et par la stimulation des

autres entrées sensorielles [8][9][10]. De plus, le fait d’effectuer une rééducation

vestibulaire et de retrouver un niveau d’activité rapidement apparaît important pour

une meilleure récupération [3].

3 Anamnèse

3.1 Antécédents

En 2007, Mme L est hospitalisée pour cause de spondylarthropathies. Suite à ses

douleurs lombaires et sacro-iliaques, le diagnostic de spondylarthrite ankylosante est

évoqué mais non confirmé.

3.2 Activité professionnelle

Mme L travaille actuellement à mi-temps, le matin dans un supermarché dans lequel

elle effectue de la mise en rayon (rayons bazar et textile). Dans le cadre de son

travail, elle est suivie régulièrement au centre de Kerpape par le Docteur L et par un

ergonome en ce qui concerne l’activité au poste de travail.

3.3 Histoire de la maladie

Le 2 avril 2002, Mme L passe une IRM avec comme indication : « céphalées et

vertiges », qui ne montre aucune symptomatologie. Le 12 novembre 2005, elle

présente une otalgie droite avec acouphènes évoluant en crise depuis plusieurs

mois. Différents traitements dont des corticoïdes n’ont jusque-là rien apporté. Il est

décidé un potentiel évoqué auditif qui décèlera une asymétrie conduisant à effectuer

une IRM. Cette dernière, le 13 janvier 2006, permettra de constater la présence d’un

neurinome de l’acoustique droit de grade IV. Une intervention chirurgicale est

réalisée le 7 février 2006. Le compte rendu histologique confirmera le diagnostic de

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7

schwannome du VIII droit. Le 20 février 2006, une anastomose hypoglosse faciale

est effectuée, Mme L présentant une paralysie faciale postopératoire.

Le 10 mars 2008, Mme L présente un syndrome vestibulaire franc, une marche

entravée par des embardées et une persistance de la paralysie faciale, il lui est donc

proposé une prise en charge au centre de Kerpape en traitement ambulatoire qu’elle

démarrera le 23 octobre 2008. Cette rééducation vestibulaire aura permis d’améliorer

l’équilibration de Mme L.

3.4 Prescription

Mme L, 44 ans, patiente à 6 ans d’une chirurgie d’un neurinome droit, est vue par le

docteur L dans le cadre d’un suivi régulier au centre de Kerpape. Au cours d’un

entretien, elle signale que depuis environ deux mois, qu’elle ressent une

augmentation des sensations de déséquilibre, de vertiges, ayant des conséquences

dans les activités de la vie de tous les jours. Un déséquilibre majeur à l’occlusion des

yeux et une instabilité lors de l’appui unipodal sont constatés et il est alors décidé de

reprendre une rééducation vestibulaire pour une douzaine de séances à raison de

deux séances par semaine. Le 2 Janvier 2012, elle est admise dans le service de

neurologie adulte au centre de rééducation de Kerpape pour sa 1ère séance.

3.5 Traitement

A la suite de l’intervention chirurgicale, Mme L a présenté une paralysie faciale

conduisant à une anastomose hypoglosse faciale. Dans le cadre de la rééducation

de cette paralysie faciale qui persiste à ce jour, Mme L bénéfice de séances de

kinésithérapie en cabinet libéral, ceci afin de traiter également afin les douleurs

lombaires et sacro-iliaques dont elle se plaint.

4 Examen de la patiente et évaluation initiale

4.1 Interrogatoire

A l’interrogatoire, Mme L décrit une augmentation des sensations de vertige, depuis

quatre à cinq mois, principalement lors des changements de positions. Il ne s’agit

pas de vertige « vrai » [11]. En effet, la définition du vertige correspond à une

sensation de rotation, soit de l’environnement, soit de son propre corps. Dans le cas

de Mme L, il s’agit plus de sensation d’ébriété [3][12][13].

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8

En ce qui concerne les activités de la vie quotidienne, Mme L dit manquer

d’assurance en ce qui concerne les escaliers, principalement quand il s’agit de les

descendre. Au travail, elle décrit des sensations d’instabilité, notamment lorsqu’il est

nécessaire de monter sur un tabouret afin de travailler en hauteur.

Associée aux sensations d’instabilité, Mme L présente régulièrement des

acouphènes et céphalées qui sont, comme on l’a vu précédemment, des séquelles

possibles suite à une intervention chirurgicale du neurinome de l’acoustique.

4.2 Auto-questionnaire DHI

L’auto-questionnaire DHI (Dizzeness Handicap Inventory) ou Echelle du Handicap lié

aux Troubles de l’Equilibre et aux Vertiges en langue française (EHTEV) permet

d’évaluer le retentissement des symptômes sur la qualité de vie [10][14]. Il a été

développé dans la littérature anglo-saxonne et est l’un des questionnaires les plus

utilisés. Il s’agit d’une échelle de handicap liée aux troubles de l’équilibre et aux

vertiges, évaluant les aspects fonctionnels, émotionnels et physiques des troubles de

l’équilibre. Il possède 25 items avec cinq niveaux de réponses : jamais(0),

rarement(1), parfois(2), souvent(3), en permanence(4) (Annexe 1).

Mme L a répondu « souvent » aux trois items ci-dessous, il s’agit donc des activités

ou mouvements qui la gênent le plus:

Votre problème limite-t-il votre participation à des activités sociales comme

diner à l’extérieur, aller au spectacle, en soirée ou au dancing ?

Les mouvements brusques de la tête accentuent-ils vos troubles ?

A cause de vos troubles, éprouvez-vous des difficultés de concentration ?

Concernant le reste du questionnaire, 11 items sont cotés à 2 (parfois), 6 sont

évalués à 1 (rarement), et 5 à 0 (non jamais), le total étant de 37. Ce questionnaire

EHTEV nous permet donc d’évaluer les limitations d’activité que présente Mme L, et

nous servira ensuite à évaluer les améliorations ressenties par la patiente,

indépendamment des progrès effectués ou non en ce qui concerne son équilibration.

Page 13: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

9

4.3 Evaluation de l’équilibration

Evaluation chronométrée du maintien de la posture

Les différents tests d’évaluation sont objectivés à l’aide d’un chronomètre. Ainsi on

évalue l’équilibre bipodal et monopodal dans des situations où la patiente a soit les

yeux ouverts, soit les yeux fermés (tableau 1).

Les résultats montrent que l’équilibre statique est nettement moins bien tenu lorsque

les yeux sont fermés, en unipodal.

De plus, bien que l’équilibre statique bipodal soit tenu plus de 30 secondes dans les

deux cas, on note des oscillations plus importantes les yeux fermés. Cependant,

l’équilibre statique les yeux ouverts en unipodal est également difficile à tenir, les

oscillations étant de grande amplitude.

Tableau 1 : Evaluation initiale de l’équilibre monopodal et bipodal, yeux ouverts et yeux fermés.

Equilibre bipodal Equilibre

monopodal droit

Equilibre

monopodal gauche

Yeux ouverts Plus de 30

secondes

10 secondes 10 secondes

Yeux fermés Plus de 30

secondes

1 à 2 secondes 1 à 2 secondes

Evaluation de l’équilibre sur plateforme de

posturographie SATEL.

Les troubles de l’équilibre peuvent être quantifiés sur

des plates-formes grâce aux méthodes de

posturographie statique et dynamique, permettant

une approche plus globale du patient présentant des

déséquilibres [3][7][11][12][13][15]. En situation

debout au repos, le corps n’est pas immobile, des

oscillations permanentes permettent de maintenir la

posture. La posturographie statique permet de

mesurer ces oscillations [12]. La posturographie

dynamique évalue les réponses posturales de la

Figure 1 : Equilibre sur plateforme de posturographie

Page 14: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

10

patiente en réponse à des mouvements de sa base de sustentation [11].

Concernant l’équilibre statique, Mme L est placée sur la plate-forme immobile et on

effectue deux enregistrements, un les yeux ouverts et l’autre les yeux fermés [12].

Les paramètres que nous retiendrons parmi les nombreuses informations données

sont la surface totale correspondant aux différentes positions du centre de pression,

la longueur totale parcourue par ce centre de pression durant l’enregistrement et le

quotient de Romberg qui correspond au rapport des surfaces de déplacement en

condition yeux fermés et yeux ouverts

[11][12]. En ce qui concerne les résultats, la

surface est légèrement supérieure à la

norme les yeux ouverts, tandis que

l’évaluation les yeux fermés montre une

surface et une longueur très supérieures à

la norme, tout comme le coefficient de

Romberg. Mme L utilise donc

principalement sa vue comme stratégie

d’équilibration, elle est donc dépendante

visuelle.

Concernant l’équilibre dynamique, Mme L

se tient debout sur une plate-forme mobile

placée sur la plate-forme immobile. Selon le

positionnement de la plate-forme mobile,

l’équilibre dynamique est évalué dans le

plan sagittal ou dans le plan frontal.

Au total, quatre enregistrements sont

réalisés, deux pour chacun des plans précédents, un les yeux ouverts et l’autre les

yeux fermés. Les paramètres retenus sont la longueur et l’amplitude du centre de

pression [12].

Pour le plan sagittal, la longueur et l’amplitude sont très supérieurs à la norme les

yeux ouverts, alors que l’enregistrement les yeux fermés n’a pas pu être obtenu,

Mme L ne tenant pas l’équilibre toute la durée de l’enregistrement.

Figure 2 : Equilibre dynamique sur plateforme

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11

En revanche, dans le plan frontal, les deux enregistrements ont été obtenus. Lorsque

les yeux sont ouverts, seule l’amplitude est supérieure à la norme, alors que les yeux

fermés, les deux le sont.

Cette évaluation montre également que la vue est essentielle dans l’équilibration de

Mme L. L’évaluation de l’équilibre sur plate-forme de posturographie permet de

confirmer la dépendance visuelle de Mme L en ce qui concerne ses stratégies

d’équilibration.

4.4 Examen sur fauteuil rotatoire

Observation de l’oculomotricité

Précédemment à l’examen sur fauteuil rotatoire, des mouvements oculaires verticaux

et horizontaux sont demandés à Mme L afin de vérifier qu’il n’existe pas d’asymétrie

des mouvements oculaires pouvant signifier un problème ophtalmique ou

neurologique [3]. Aucune asymétrie n’est constatée lorsque la patiente réalise ces

mouvements.

Nystagmus spontané et Head Chaking Test

L’examen à l’aide d’un appareil

de vidéo-nystagmoscopie

(Annexe 2) permet de mettre

l’œil dans le noir complet afin

de supprimer le phénomène de

fixation et donc de visualiser

plus facilement, grâce à un

écran, la réponse nystagmique

[3][11][13]. Le nystagmus

désigne les mouvements

oculaires répétés, succession d’un mouvement lent suivi d’un retour rapide. La phase

lente est créée par l’asymétrie de fonctionnement des systèmes vestibulaires, elle

peut être physiologique en cas de mouvement ou pathologique en cas de lésion

vestibulaire. La phase rapide correspond à un retour en position initiale de l’œil. La

direction du nystagmus est donnée par le sens de la secousse rapide [6][11][12].

Figure 3 : Recherche du nystagmus

Page 16: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

12

Dans un premier temps, la recherche de nystagmus spontané est effectuée, ainsi

que la manœuvre du Head Chaking Test, qui consiste à tourner rapidement la tête

de la patiente de gauche à droite pendant 20 secondes [11][13][16]. La présence

d’un nystagmus signifierait une asymétrie vestibulaire [3][7]. Dans le cas de Mme L,

qui présente une lésion vestibulaire du côté droit, un nystagmus gauche aurait pu

être observé en post lésionnel immédiat. En effet, seul le système vestibulaire

gauche envoie des informations. Un mouvement oculaire dans le sens opposé,

comme on l’a vu précédemment, donc vers la droite et correspondant à la phase

lente sera observé, suivi d’une phase rapide vers la gauche correspondant au retour

de l’œil. Cependant, aucun nystagmus n’est observé, ce qui peut s’expliquer par

l’ancienneté de la pathologie et de l’intervention, et donc de la mise en place de

compensation vestibulaire.

Epreuve rotatoire impulsionnelle

Mme L est installée sur le fauteuil rotatoire, l’appareil de vidéonystagmoscopie étant

en place [17]. Une rotation de 180° à une vitesse d’environ 20° par seconde dans le

sens horaire est effectuée, la patiente gardant les yeux ouverts et le nombre de

nystagmus per-rotatoire et post-rotatoire est noté [3][8][11][13][16]. On effectue la

même chose dans le sens antihoraire. (Tableau 2)

Tableau 2 : Nombre de nystagmus pendant et suite à des rotations horaire ou antihoraire.

Nombre de nystagmus

per-rotatoire

Nombre de nystagmus

post-rotatoire

Rotation horaire 7/8 0/1

Rotation antihoraire 0/1 0/1

Un nystagmus per-rotatoire est physiologique, en effet, lors de la rotation, le système

vestibulaire du côté de la rotation est stimulé, provoquant un mouvement oculaire en

sens opposé correspondant à la phase lente du nystagmus. En revanche, un

nystagmus post-rotatoire est pathologique, les deux systèmes vestibulaires étant en

équilibre [3][16].

Chez Mme L, l’absence de nystagmus per-rotatoire en rotation antihoraire pourrait

signaler un déficit vestibulaire gauche, ce qui n’est pas le cas puisque Mme L a subi

Page 17: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

13

une intervention du côté droit. Là encore, l’explication peut venir de la compensation

vestibulaire qui, petit à petit, a permis de modifier chez la patiente soit la quantité

d’informations envoyée par le système vestibulaire gauche, soit leur analyse par les

centres intégrateurs, permettant donc de compenser l’asymétrie vestibulaire.

Cependant, il faut noter que selon Semont, le nystagmus post-rotatoire semble avoir

plus d’intérêt car il est étroitement lié au degré de dysfonction vestibulaire [3]. Enfin,

la rotation étant effectuée manuellement, il est difficile de maintenir une vitesse de

rotation constante de 20° comme la théorie le voudrait [6].

Epreuves rotatoires à vitesse élevée

Les épreuves rotatoires à vitesse rapide consistent à effectuer trois tours de fauteuil

à une vitesse d’environ 400° par seconde.

L’accélération et l’arrêt doivent être identiques, et la

vitesse de rotation doit être similaire dans les deux

sens [3]. L’utilisation d’un fauteuil rotatoire manuel

rend difficile le respect de ces conditions [6]. On

effectue deux séries de rotation. La première série

consiste en une mesure de la réponse en fixation :

Mme L ferme les yeux lors de la rotation, les ouvre

lors de l’arrêt du fauteuil afin de fixer une cible placée

devant elle. Elle doit signaler le moment où la cible

devient immobile. La deuxième série permet de

mesurer la réponse en vection : Mme L ferme les yeux

lors de la rotation et également lors de l’arrêt du

fauteuil. Elle doit signaler le moment où la sensation

de rotation du fauteuil s’arrête. Les deux mesures sont réalisées à l’aide d’un

chronomètre. (Tableau 3)

Tableau 3 : Résultats des tests en fixation et vection, en rotation horaire et antihoraire.

Fixation Vection

Rotation horaire 10 secondes 10 secondes

Rotation antihoraire 5 secondes 5 secondes

Figure 4 : Epreuves rotatoires

Page 18: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

14

Pendant une rotation, qu’elle soit rapide ou lente, le système vestibulaire du côté de

la rotation est stimulé. A l’arrêt, après une rotation à vitesse rapide, le système

vestibulaire du côté opposé à la rotation est stimulé donnant une impression de

rotation dans le sens opposé lorsque que les yeux restent fermés, et une impression

de mobilité d’une cible du fait du mouvement oculaire réflexe suite à la stimulation

vestibulaire. Ainsi, suite à une rotation antihoraire, c’est la réponse du système

vestibulaire droit qui est mesurée [3][8][16]

Les résultats des tests en fixation et en vection de Mme L montrent que les réponses

en rotation antihoraire sont plus faibles qu’en rotation horaire, ce qui explique une

asymétrie vestibulaire, avec un déficit du côté droit. Ces valeurs sont en concordance

avec la pathologie et l’intervention subie par la patiente. La question de la

compensation vestibulaire se pose alors. Il est possible que cette compensation

vestibulaire ne se soit pas effectuée de la même manière à des vitesses élevées, ce

qui pourrait expliquer que Mme L se plaigne de déséquilibres lors des mouvements

brusques.

4.5 Epreuves vestibulospinales

Les épreuves vestinulospinales permettent de mesurer et d’observer les latéro-

déviations statiques et dynamiques.

Test de Romberg

Le test de Romberg est effectué en demandant à Mme L de tenir debout les pieds

joints, d’abord les yeux ouverts puis les yeux fermés [3][7][12]. Les yeux ouverts, on

n’observe pas de déviation contrairement à la situation les yeux fermés même si elle

est très légère, surtout observée au niveau de la tête, vers le côté droit. Cette

déviation légère de la tête s’explique par l’asymétrie vestibulaire de la patiente, les

informations envoyées par le côté gauche provoquant, comme on l’a vu

précédemment, une réaction posturale du côté opposé, principalement au niveau

des muscles cervicaux. Cependant, cette déviation est très légère, ce qui est dû à

l’ancienneté de l’atteinte et donc à la compensation vestibulaire.

Test de Fukuda

Mme L doit effectuer un piétinement sur place, en levant les genoux d’environ 30°,

les yeux fermés en comptant 45 pas [3][11][12]. La patiente est incapable de réaliser

Page 19: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

15

ces tests, les déstabilisations étant trop importantes lors des appuis unipodaux. On

aurait pu s’attendre, pour les mêmes raisons que pour le test de Romberg, à une

déviation et une rotation du côté droit.

Epreuve de Babinski-Weil

Cette épreuve est également appelée « test de la marche en étoile ». Elle consiste à

effectuer quelques pas alternativement en avant et en arrière les yeux fermés

[3][7][12]. Là encore, les déstabilisations étant trop importantes lors des appuis

unipodaux, l’épreuve n’est pas significative. On aurait pu s’attendre à une marche

déviée vers la droite quand le déplacement se fait vers l’avant, et une déviation vers

la gauche quand le déplacement se fait vers l’arrière, formant ainsi une étoile.

5 Bilan

5.1 Bilan diagnostic kinésithérapique

Il y a 6 ans, Mme L a subi une intervention chirurgicale pour neurinome de

l’acoustique de grade IV, l’entrée vestibulaire est donc chez elle perturbée.

Cependant, l’intervention étant lointaine, des mécanismes de compensation

vestibulaire ont été mis en place. Ainsi, on ne retrouve pas de nystagmus spontané,

le Head checking test est négatif et la patiente ne décrit pas de vertige « vrai ». On

remarque cependant que le test de Romberg montre une légère déviation de la tête

vers la droite et que, lors des épreuves rotatoires à vitesse rapide en fixation et en

vection, la réactivité de l’oreille gauche est le double de l’oreille droite, il y a donc une

asymétrie vestibulaire.

L’évaluation de l’équilibre chez Mme L montre qu’il existe chez elle une dépendance

visuelle importante. Sans cette afférence elle est très déstabilisée et ne peut tenir

l’équilibre monopodal. D’ailleurs le test de Fukuda ainsi que l’épreuve de Babinski-

Weil sont impossibles à réaliser, la patiente étant déstabilisée de façon importante

lors des appuis monopodaux. Cependant, l’équilibre les yeux ouverts est également

moins performant par rapport à la norme d’après l’évaluation sur la plateforme de

posturographie SATEL, et les équilibres monopodaux les yeux ouverts ne sont pas

tenus plus de 10 secondes, ce qui montre que la vue ne suffit pas pour obtenir un

équilibre optimal.

Page 20: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

16

L’intervention chirurgicale, la dépendance visuelle et donc la sous-utilisation des

autres entrées sensorielles expliquent les difficultés d’équilibration de Mme L et donc

ses sensations d’instabilité, ce qui la gêne dans les activités de la vie quotidienne,

notamment au travail durant lequel elle éprouve des difficultés de concentration, mais

également en ce qui concerne les activités sociales, ce que montre bien le

questionnaire DHI.

5.2 Objectifs kinésithérapiques

L’objectif général est d’améliorer l’équilibration de Mme L afin de diminuer ses

sensations d’instabilité et ses déséquilibres pour atténuer la gêne qu’elle ressent

dans les activités sociales et de travail. Pour cela, différents objectifs devront être

atteints :

Diminuer la dépendance visuelle

Optimiser la stabilisation du regard

Rééquilibrer les réponses des oreilles gauche et droite

Augmenter les performances de l’entrée somato-sensorielle

Améliorer quantitativement les équilibres unipodaux et bipodaux

Diminuer la sensibilité de la patiente aux mouvements brusques

Sensibiliser la patiente sur l’importance de maintenir une activité en dehors

des séances

5.3 Moyens mis en œuvre

Les techniques de rééducation vestibulaires spécifiques. Elles comprennent le

fauteuil rotatoire et la stimulation opto-cinétique.

La rééducation gymnique : des exercices d’équilibration sont proposés et

adaptés à la pathologie vestibulaire. L’équilibre postural statique et dynamique

est travaillé à l’aide de poutres, de plans instables, de ballons et autres

accessoires.

6 Traitement

6.1 Principes de traitement

Respecter la fatigabilité de la patiente

Surveiller l’apparition de signes associés (acouphènes, céphalées).

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17

Respecter une progression dans les exercices proposés

Proposer des exercices se rapprochant de situations écologiques vécues par

la patiente

6.2 Techniques rééducatives vestibulaires spécifiques

Fauteuil rotatoire

D’après les tests à vitesse rapide en fixation et en vection ainsi que par le test de

Romberg, Mme L présente une asymétrie vestibulaire. Dans le but de rééquilibrer les

réponses de l’oreille gauche et de l’oreille droite, le fauteuil rotatoire est utilisé afin de

provoquer des stimulations répétées. Ces stimulations répétées sont effectuées dans

le sens horaire afin de diminuer la réponse du labyrinthe gauche grâce à la plasticité

neuronale [3][8][13][16]. Chaque série correspond à un test en fixation, la durée de

sensation de mobilité de la cible est chronométrée. Cet exercice sera effectué lors de

deux séances, à raison d’une dizaine de stimulations, mais on observera peu

d’évolutions. Ce type de rééducation sera donc abandonné par la suite, la non

rééquilibration des réponses pouvant s’expliquer par l’ancienneté de la pathologie.

6.3 Stimulation opto-cinétique

Le générateur opto-

cinétique (Annexe 3)

permet de stimuler tout

le champ visuel. Il

s’agit d’une boule

projetant sur les murs,

le plafond et le sol

d’une pièce des points

lumineux, l’obscurité

étant préalablement

faite dans la pièce, et

permettant de les faire défiler dans n’importe quelles directions et à différentes

vitesses [3][8][13][17]. Le mouvement de ces points lumineux va engager le réflexe

opto-cinétique, c'est-à-dire que, après un certain temps de stimulation, la patiente

aura l’impression que les points lumineux sont fixes et que c’est la pièce qui est en

mouvement, dans le sens opposé à la stimulation, ce qui provoquera une déviation

Figure 5 : Stimulation opto-cinétique

Page 22: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

18

du corps du même côté de la stimulation. Il y a donc un conflit d’informations entre

l’entrée visuelle qui donne la sensation de mouvement et les deux autres entrées qui

informent de la stabilité de la patiente. La répétition va amener à une diminution de la

déviation posturale [3][4][8].

La séance d’opto-cinétique a pour but de diminuer le poids de l’entrée visuelle et

d’opérer un transfert sur l’entrée somato-sensorielle. La patiente est debout, on lui

demande de regarder le défilement des points lumineux qui se déplacent sur le mur.

On commence par des stimulations horizontales en adaptant la vitesse de défilement

aux déséquilibres que cela provoque chez Mme L [3][13].

De même, on effectue ensuite des stimulations verticales. La stimulation opto-

cinétique sera utilisée à chaque fin de séance, mises à part celles pour lesquelles on

utilisera le fauteuil rotatoire, la durée de la séance dépendra de la saturation du

système et peut aller jusqu’à 15 minutes [3][13].

Lors des premières séances de stimulations opto-cinétiques, Mme L présente des

déviations importantes pour des mouvements horizontaux vers la gauche des points

lumineux, ainsi que pour des déplacements verticaux, que ce soit vers le haut ou

vers le bas.

Les séances consistent donc à répéter les stimulations dans ces directions, ainsi

qu’à adapter la vitesse de défilement afin d’obtenir les déstabilisations les plus

importantes. Une diminution progressive de ces déstabilisations sera observée au

cours de la prise en charge, jusqu’à ce que Mme L soit totalement indifférente aux

déplacements lumineux, quel qu’en soit le sens et la vitesse.

6.4 Rééducation gymnique

L’objectif de ces exercices est de placer la patiente dans des zones d’instabilités afin

qu’elle mette en place des stratégies compensatoires d’équilibration. Dans ses

activités de la vie quotidienne, Mme L évite autant que possible d’effectuer ces

mouvements qui lui procurent des sensations d’instabilité. Il est donc important de la

placer dans ces situations afin que son système nerveux analyse les informations

sensorielles qu’il reçoit pour fournir une réponse plus adaptée [4][7].

La patiente doit donc être mise en déséquilibre le plus souvent possible et ne pas

être stable afin de retrouver des stratégies adaptées. Pour l’ensemble des exercices

Page 23: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

19

qui vont suivre, on respectera une progression tout au long de la rééducation en

fonction des capacités et des progrès effectués par la patiente [3][4].

Ainsi, au début de la rééducation, les exercices seront effectués plutôt en statique,

en stimulant une entrée sensorielle seulement, sans ordre, les yeux ouverts.

Progressivement, on ira vers des exercices principalement en dynamique, avec

stimulations de plusieurs entrées sensorielles, en utilisant la notion de double tâche,

les yeux fermés [4][7].

Exercice d’équilibration statique

Stimulation de l’entrée proprioceptive

Des exercices de maintien de la posture sur plan

instable, mousse ou trampoline ou dans des

positions de types chevalier servant et genoux

dressés sont proposés [4][7].

La planche instable sera orientée soit dans le plan

sagittal, soit dans le plan frontal.

Lorsque la patiente a les yeux ouverts, l’équilibre

est bien tenu. Il lui est alors demandé d’effectuer,

par exemple, des exercices de calcul mental, c’est

la notion de double tâche, ainsi que de diminuer le

polygone de sustentation.

Des poussées déstabilisantes dans toutes les

directions sont appliquées par le thérapeute afin de

placer Mme L dans des situations de

déstabilisations. Mme L utilisant beaucoup sa vue

pour s’équilibrer, ces exercices

seront rapidement effectués les

yeux fermés, dans un premier

temps sans double tâche ni

poussées déstabilisantes.

Enfin, l’équilibre unipodal est

Figure 6 : Rééducation de l’équilibre

Figure 7 : Equilibre sur ballon

Page 24: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

20

également travaillé sur mousses et trampoline.

Un travail de maintien de la posture sur poutre est également effectué, les pieds

étant placés l’un devant l’autre, le polygone de sustentation est diminué.

Là encore, la double tâche est proposée afin d’augmenter la difficulté, en effectuant

par exemple des jeux de passes de ballons avec les thérapeutes. Des poussées

déstabilisantes les yeux ouverts puis les yeux fermés sont appliquées.

Une stimulation de l’entrée proprioceptive sur ballon de Klein est également

proposée. Elle est, dans un premier temps, utilisée en monopodal les yeux ouverts,

avec des déstabilisations de type lancer et rattraper de ballons, poussées

déstabilisantes, puis on ira progressivement vers un travail les yeux fermés, en

bipodal puis en monopodal, dans un premier temps sans déstabilisations, puis avec

exercices en double tâche et poussées déstabilisantes.

Stimulation de l’entrée vestibulaire

Les stimulations vestibulaires se feront par des rotations

de tête de droite à gauche, et de haut en bas [3][4][6][7].

Les rotations ne provoquent pas de déstabilisations

lorsque Mme L les effectue à vitesse lente, alors que le

maintien de l’équilibre est beaucoup plus difficile à

obtenir lors de rotations rapides de la tête.

La patiente effectuera ces exercices d’abord les yeux

ouverts, en fixant une cible de chaque côté, un rôle

important du système vestibulaire étant la stabilité du

regard, puis les yeux fermés. Ces stimulations sont donc

répétées afin que la patiente mette en place des

stratégies compensatoires.

Figure 8 : Equilibre sur plan mobile

Page 25: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

21

Stimulation vestibulaire et proprioceptive

Lorsque les stimulations d’une seule entrée provoquent peu de déstabilisations, elles

sont combinées afin de mettre la patiente dans des conditions de plus en plus

déstabilisantes [4][7].

Ainsi, on demandera à Mme L d’effectuer des rotations

de tête les yeux ouverts, alors qu’elle est placée sur un

sol instable, comme les mousses, planches instables et

trampoline.

Ces situations sont très déstabilisantes pour la patiente,

elles seront donc reproduites tout au long de la

rééducation en respectant la fatigabilité de Mme L.

Exercices d’équilibration dynamique

Là encore, le principe de progression sera respecté.

Dans un premier temps les stimulations seront peu

nombreuses, puis augmentées en fonction des progrès

réalisés par la patiente.

Equilibre dynamique sur poutre

Ces exercices sont effectués les yeux ouverts, étant

impossibles à réaliser les yeux fermés pour Mme L.

La double tâche est très utilisée: calcul mental, passer

un ballon derrière la tête et le dos, passer un ballon de

part et d’autre de la poutre avec les pieds, ou tenir un

cône sur lequel est placé une balle de ping-pong.

Le fait de venir attraper des cônes permet de se

rapprocher des situations dans lesquelles la patiente se

retrouve au travail, en se baissant et se relevant

souvent.

Figure 9 : Equilibre sur poutre

Figure 10 : Equilibre dynamique sur poutre

Page 26: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

22

Ce sont des situations dans lesquelles la patiente est instable, provoquant des

accélérations de type linéaire de haut en bas [3][6].

Exercices de montée et descente sur une planche

Cet exercice est effectué dans le but de reproduire une

situation dans laquelle Mme L dit être en difficulté, ce qui

correspond à l’action de monter et descendre sur un

tabouret, ce qu’elle fait régulièrement au travail.

La descente et la montée d’escaliers sont également des

actions qu’elle appréhende.

La progression consistera à augmenter la vitesse à

laquelle la patiente monte est descend. Dans un premier

temps, l’exercice sera réalisé les yeux ouverts, puis les

yeux fermés en fin de rééducation.

Exercice postural à partir des NEMS

Le passage de la position genoux dressés à celle du

chevalier servant correspond à un niveau d’évolution motrice.

Il permet d’effectuer des accélérations de type linéaire

de haut en bas, et donc de stimuler l’entrée vestibulaire,

ainsi que de faire varier la surface d’appui, stimulant

ainsi l’entrée proprioceptive. Dans un premier temps

l’exercice est réalisé les yeux ouverts, le regard à

l’horizontal, puis les yeux fermés.

Exercices de marche

Ces exercices seront utilisés de plus en plus au cours de

la rééducation. Un travail de l’équilibration pendant la

marche les yeux ouverts est effectué et il est demandé à

Mme L de réliser, sur ordre, diverses actions :

Figure 11 : Rééducation posturale genoux dressés

Figure 12 : Rééducation posturale chevalier servant

Page 27: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

23

tourner la tête rapidement à droite et à gauche,

s’arrêter rapidement,

effectuer des demi-tours, afin de stimuler l’entrée

vestibulaire.

La progression visera ensuite à réaliser cet exercice les

yeux fermés.

Cependant, la difficulté et la fatigue qu’éprouve la

patiente à réaliser cet exercice dans ces conditions font

qu’ils sont réalisés durant une courte durée.

Enfin, des parcours de marche sont régulièrement

proposés, permettant de stimuler l’entrée

proprioceptive, en utilisant les différents moyens de

progression précédemment cités, comme la double

tâche, la vitesse, le nombre et la nature des obstacles.

La réalisation de ces parcours les yeux fermés est

difficile, cette situation est donc mise en place

régulièrement en fin de prise en charge [4][7].

7 Résultats et évaluation terminale

7.1 Auto-questionnaire DHI

Mme L a de nouveau rempli le questionnaire permettant

d’évaluer le retentissement des troubles de l’équilibre

sur la qualité de vie en fin de prise en charge. Bien que

Mme L dise ne pas avoir ressenti d’amélioration nette,

le score est passé d’un total de 37 à un total de 27, la

majorité des items diminuant de 1 point. La prise en

charge paraît donc avoir eu un bénéfice concernant les

activités de la vie quotidienne.

Figure 13 : Parcours de marche les yeux ouverts

Figure 14 : Parcours de marche les yeux fermés

Page 28: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

24

7.2 Evaluation de l’équilibration

Evaluation chronométré de maintien de la posture

Tout comme en début de prise en charge, l’équilibre bipodal est tenu facilement, que

ce soit les yeux ouverts ou les yeux fermés. En revanche, l’équilibre monopodal est

amélioré, que ce soit en condition les yeux ouverts ou les yeux fermés. En effet,

lorsque Mme L a les yeux ouverts, l’équilibre est maintenu plus de 30 secondes,

contre 10 secondes en début de prise en charge. Les yeux fermés, l’équilibre

monopodal est encore difficile à tenir, bien qu’une progression soit constatée,

passant de 1 à 2 secondes, à 5 à 6 secondes. Le maintien de la posture est donc

amélioré par rapport au début de prise en charge.

Tableau 4 : Evaluation terminale de l’équilibre monopodal et bipodal, yeux ouverts et yeux fermés

Equilibre bipodal Equilibre

monopodal droit

Equilibre

monopodal gauche

Yeux ouverts Plus de 30

secondes

Plus de 30

secondes

Plus de 30

secondes

Yeux fermés Plus de 30

secondes

6 secondes 5 secondes

Evaluation de l’équilibre sur plate-forme de posturographie SATEL

Concernant l’équilibre statique les yeux ouverts, les résultats sont sensiblement

équivalents à ceux obtenus en début de prise en charge, c'est-à-dire proches de la

norme. En revanche, les yeux fermés, les résultats sont nettement améliorés, la

longueur (de 2691 à 802 mm) est dans la norme, tout comme le coefficient de

Romberg (de 10.73 à 1,30) et la surface est proche de la norme (de 4347 à 667 mm)

(Annexe 4 et 5). Ces résultats montrent que la dépendance visuelle constatée en

début de prise en charge a nettement diminué, et que Mme L a mis en place des

stratégies afin d’améliorer l’équilibre en condition les yeux fermés.

Cette amélioration est également constatée en équilibre dynamique. Dans le plan

sagittal, la longueur (de 650 à 414 mm) et l’amplitude (de 60 à 37 mm) sont dans la

norme en condition les yeux ouverts. Lorsque les yeux sont fermés, les valeurs sont

très supérieures à la norme, mais l’enregistrement est réalisable, ce qui n’était pas le

cas en début de prise en charge. Dans le plan frontal les yeux ouverts, une légère

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25

amélioration est constatée et les valeurs sont dans la norme. Les yeux fermés, les

résultats sont très supérieurs à la norme bien que légèrement améliorés pour la

longueur (de 1770 à1667 mm) et la surface (de 190 à149 mm).

Une amélioration de l’équilibration de Mme L est donc mise en évidence par la plate-

forme de posturographie, dans toutes les conditions, et principalement lorsque les

yeux sont fermés.

7.3 Examen sur fauteuil rotatoire

Epreuve rotatoire impulsionnelle

L’épreuve rotatoire impulsionnelle ne montre pas de différence par rapport au début

de la prise en charge. Ces résultats ne sont pas surprenants, étant donné

l’éloignement dans le temps de l’atteinte, et le fait que la rééducation sur fauteuil,

dans le but de symétriser les réponses des deux oreilles, ait été effectuée seulement

sur deux séances, aucune amélioration n’étant constatée.

Tableau 5 : Nombre de nystagmus pendant et suite à des rotations horaire ou antihoraire.

Nombre de nystagmus

per-rotatoire

Nombre de nystagmus

post-rotatoire

Rotation horaire 10/12 0/1

Rotation antihoraire 0/1 0/1

Epreuves rotatoires à vitesse élevée

Concernant les épreuves rotatoires à vitesse élevée, les résultats sont encore une

fois similaires au début de prise en charge, bien que l’écart entre la rotation horaire et

antihoraire ait légèrement diminué. Cette légère diminution pourrait signifier un

rééquilibrage des réponses, cependant ces améliorations n’avaient pas été

constatées lors de la rééducation, et il faut pondérer les résultats, dépendants des

sensations de la patiente à un moment précis, et à la vitesse de rotation réalisée

manuellement, qu’il est difficile à maintenir constante [6].

Tableau 6 : Résultat des tests en fixation et vection, en rotation horaire et antihoraire.

Fixation Vection

Rotation horaire 8 secondes 12 secondes

Rotation antihoraire 5 secondes 8 secondes

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7.4 Epreuves vestibulospinales

Les épreuves vestibulospinales sont encore une fois peu significatives, étant difficiles

à réaliser par la patiente du fait de déstabilisations trop importantes. Pour le test de

Romberg, une légère déviation vers la droite est de nouveau constatée, et les

épreuves de Fukuda et de Babinski-Weil, bien que moins difficiles à réaliser qu’en

début de prise en charge, ne sont pas significatives.

8 Discussion

En fin de prise en charge, l’équilibration de Mme L est donc améliorée,

principalement en ce qui concerne le maintien de la posture en situation les yeux

fermés. Ces améliorations ont une répercussion concernant les activités de tous les

jours, avec une diminution de la gêne fonctionnelle due aux sensations de

déséquilibres. Cependant, cette gêne reste importante, tout comme les

déséquilibres, et les progrès ne sont pas importants en comparaison à la dernière

prise en charge.

Lors de cette rééducation les exercices visant à rééquilibrer les réponses des deux

oreilles ont été rapidement interrompus, n’ayant pas d’effets positifs. Une des

particularités de la prise en charge est l’ancienneté de l’atteinte, un mécanisme de

compensation vestibulaire s’est mis en place depuis 6 ans, ce qui peut expliquer

l’absence de bénéfices de ces exercices [7]. De plus, la réalisation de tests

caloriques n’a pas été réalisée, ce qui aurait permis d’évaluer de manière précise et

séparément la réponse de chaque canal, et ainsi éviter les biais que comporte

l’examen sur fauteuil rotatoire. En effet, la théorie explique que la rotation du fauteuil

doit être effectuée à une vitesse précise et constante, tout comme l’accélération et la

décélération. Le fauteuil utilisé étant manuel, ces conditions n’ont pas été respectées

[6][11][12]. Une amélioration de l’exploration vestibulaire aurait pu permettre une

meilleure évaluation de l’asymétrie vestibulaire et de l’efficacité des exercices.

Durant cette prise en charge et compte tenu du bilan effectué, les exercices utilisés

ont eu pour objectif principal de diminuer la dépendance visuelle de Mme L.

Cependant il ne faut pas oublier qu’une des fonctions du système vestibulaire est

d’assurer la stabilité du regard [3]. Dans ce but, des mouvements de saccades et de

poursuites oculaires auraient pu être proposés à l’aide d’une barre de diodes

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électroluminescentes dont ne disposait pas l’établissement [3][4][8][11][12][13]. Les

mouvements oculaires de poursuites vont de 10 à 90°/seconde, et les saccades sont

aléatoires en temps et en amplitude. Cette barre permet les mouvements conjugués

de la tête et des yeux. Ces mouvements ont été intégrés dans des exercices aux

cours de la rééducation, notamment les saccades, mais n’ont pas été travaillés

spécifiquement.

La plate-forme SATEL, utilisée pour l’évaluation de l’équilibration de Mme L est une

plate-forme de posturographie statique. Il existe des plates-formes dynamiques

comme par exemple l’Equitest, qui permettent d’évaluer comment le patient utilise les

trois entrées sensorielles afin de maintenir la posture [3][7][11][17]. Cette plate-forme

peut perturber l’environnement visuel et somato-sensoriel en fonction du

déplacement du centre de gravité du patient. Ainsi, si le centre de gravité se déplace

à une vitesse donnée, la plate-forme basculera selon les mêmes paramètres,

donnant des informations erronées au patient. Le test d’organisation sensorielle

(SOT) comporte six situations [7][11]. Les deux premières correspondent à ce qui a

été réalisé avec le logiciel SATEL, la plate-forme et l’environnement visuel sont

immobiles et l’enregistrement est réalisé, soit les yeux ouverts, soit les yeux fermés.

Pour les 3ème et 4ème situations, l’enregistrement est effectué les yeux ouverts. Une

seule entrée est perturbée, soit l’entrée visuelle, dans ce cas l’environnement visuel

est asservi au déplacement de centre de gravité, soit l’entrée somato-sensoriel, et

dans ce cas c’est la plate-forme qui est asservie. Les 5ème et 6ème situations

permettent d’évaluer la participation de l’entrée vestibulaire, en perturbant les deux

autres entrées. Dans les deux cas la plate-forme est mobile, et soit l’enregistrement

est effectué les yeux fermés, soit l’environnement visuel est également mobile. Ce

type de plate-forme permet une évaluation plus précise sur la façon dont le patient

s’équilibre, et donc de mieux orienter la rééducation. La posturographie dynamique

peut apporter une aide importante à une prise en charge, mais sa principale limitation

est son coût onéreux qui la rende peut accessible [11].

La rééducation vestibulaire est contraignante pour les patients. Elle consiste à mettre

les patients dans des situations dont ils n’ont pas l’habitude, qui leur demandent un

coût énergétique important. C’est une des difficultés rencontrées au cours de cette

prise en charge. En effet, le respect de la fatigabilité est un principe important, mais il

est cependant impératif de placer le patient dans ces situations difficiles afin de

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mettre en place des stratégies permettant de compenser le déficit. Ainsi, tout au long

de la prise en charge, une attention particulière a été portée sur cet aspect afin

d’adapter au mieux la rééducation à la fatigabilité de la patiente, qui était variable

d’une séance à l’autre ainsi qu’au cours d’une même séance.

9 Conclusion

La prise en charge rééducative de Mme L a permis l’amélioration globale de ses

capacités d’équilibration, diminuant nettement la dépendance visuelle et par

conséquent la gêne fonctionnelle. Cependant, les difficultés restent réelles et les

répercussions dans la vie de tous les jours encore importantes.

Lors de la visite de fin de prise en charge avec le Docteur L, en plus de la gêne

fonctionnelle et des difficultés d’équilibration, la patiente se plaint également de

problèmes de concentration et d’oublis dans la vie quotidienne. Une nouvelle IRM est

donc décidée dans les mois à venir, et un travail avec un ergonome concernant

l’aménagement des conditions de travail va être effectué.

Cette prise en charge m’aura permis d’évaluer la différence de symptômes et de

traitement qu’il peut y avoir pour une même pathologie, du fait de l’éloignement dans

le temps ou non de l’atteinte, et des mécanismes de compensations pouvant être mis

en place, ce qui va au-delà de la prise en charge vestibulaire. Cette expérience me

permettra ainsi de proposer une prise en charge la plus adaptée à une situation

précise et spécifique.

Cette prise en charge m’aura également permis d’approfondir mes connaissances en

ce qui concerne la rééducation vestibulaire qui est un sujet que je trouve

particulièrement intéressant. Cependant, la rééducation vestibulaire est un sujet

complexe et a comme indication de nombreuses pathologies. De plus, elle nécessite

l’utilisation de matériels spécifiques. Des formations complémentaires me semblent

donc nécessaires à effectuer, ainsi qu’un suivi attentif des évolutions à venir

concernant cette rééducation.

Page 33: Prise en charge masso-kinésithérapique80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation

Ré fé réncés

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Annéxé 1

Questionnaire EHTEV

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Annéxé 2

Appareil de vidéo-nystagmoscopie

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Annéxé 3

Générateur opto-cinétique

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Annéxé 4

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Annéxé 5