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Prise en charge masso-kinésithérapique
d’une patiente présentant des troubles de
l’équilibre dans les suites d’un neurinome de
l’acoustique droit opéré il y a 6 ans.
Travail écrit de fin d’études Réalisé en vue de l’obtention du Diplôme
d’Etat de Masseur-Kinésithéapeute
Guerrot Antoine 2011-2012
Institut Régional de Formation de Rééducation et de
Réadaptation des Pays de la Loire
54, rue de la Baugerie
44230 Saint Sébastien sur Loire
Pré séntation du céntré
Le Centre Mutualiste de Rééducation et Réadaptation Fonctionnelles de Kerpape est
un établissement sanitaire privé à but non lucratif géré par la Mutualité Française
Finistère-Morbihan : il participe au service public hospitalier. Dans le cadre du
schéma régional d’organisation de soins de Bretagne, le Centre de Kerpape
développe une double réponse :
De soins de rééducation spécifiques à vocation régionale (affections
neurologiques, brûlés, cardiaques, etc…).
De soins de rééducation polyvalents à vocation de proximité (orthopédie,
traumatologie, amputés, vasculaires…).
Près de 400 personnes (2/3 d’adultes, 1/3 d’enfants) sont accueillies chaque jour. Le
Centre regroupe sur un même lieu géographique :
Un plateau hospitalier comprenant 4 unités de soins adultes (152 lits), 1
hôpital de jour adultes (45 places), 3 unités de soins enfants/adolescents (53
lits), 1 hôpital de jour enfants (25 places).
Un plateau de Rééducation/Réadaptation regroupant 16 médecins de
Médecine Physique et de Réadaptation, 2 cardiologues, 5 plateaux de
kinésithérapie, 3 plateaux d’ergothérapie, une équipe pluridisciplinaire
(psychologues, neurologues, orthophonistes, psychomotriciens,
éducateurs…).
Un service transversal de Réadaptation Sociale et Professionnelle.
Un plateau pédagogique et scolaire.
Un atelier d’orthoprothèse.
Un laboratoire d’électrotechnique.
Une auto-école.
Ré sumé
Mme L, 44 ans, patiente à 6 ans d’une chirurgie d’un neurinome de l’acoustique droit,
est admise le 2 janvier 2012 dans le service de neurologie adulte au centre de
rééducation de Kerpape pour une douzaine de séances de rééducation vestibulaire.
Mme L se plaint depuis environ deux mois de sensations de déséquilibre et de
vertiges ayant des conséquences dans les activités de la vie quotidienne.
La prise en charge est étalée sur 6 semaines à raison de 2 séances par semaine.
Les troubles de l’équilibre de Mme L sont objectivés par un examen de l’équilibration
statique et dynamique, mettant en évidence une dépendance visuelle chez la
patiente. La rééducation visera donc à améliorer les capacités d’équilibrations de
Mme L, en diminuant cette dépendance visuelle, ainsi qu’en proposant des exercices
adaptés à sa pathologie afin d’orienter la compensation vestibulaire, le principe étant
de la placer dans des situations de déséquilibres pour faciliter la mise en place de
stratégies posturales adaptées, dans le but de diminuer la gêne fonctionnelle qu’elle
ressent.
En fin de prise en charge, l’examen de l’équilibration montrera une amélioration des
capacités de maintien postural ainsi qu’une répercussion positive sur les activités de
la vie quotidienne. Cependant l’amélioration est faible par rapport à la dernière prise
en charge, ce qui peut s’expliquer par l’ancienneté de la pathologie et de
l’intervention.
Mots clé s
Equilibration
Compensation vestibulaire
Entrées sensorielles
Dépendance visuelle
Sommairé
1 Introduction ..................................................................................................................................... 1
2 Donnés médicales et professionnelles ........................................................................................... 1
2.1 Neurinome de l’acoustique ..................................................................................................... 1
2.2 Anatomo-neurophysiologie de l’équilibration .......................................................................... 2
3 Anamnèse ...................................................................................................................................... 6
3.1 Antécédents ............................................................................................................................ 6
3.2 Activité professionnelle ........................................................................................................... 6
3.3 Histoire de la maladie ............................................................................................................. 6
3.4 Prescription ............................................................................................................................. 7
3.5 Traitement .............................................................................................................................. 7
4 Examen de la patiente et évaluation initiale ................................................................................... 7
4.1 Interrogatoire .......................................................................................................................... 7
4.2 Auto-questionnaire DHI .......................................................................................................... 8
4.3 Evaluation de l’équilibration .................................................................................................... 9
4.4 Examen sur fauteuil rotatoire ................................................................................................ 11
4.5 Epreuves vestibulospinales .................................................................................................. 14
5 Bilan ............................................................................................................................................. 15
5.1 Bilan diagnostic kinésithérapique.......................................................................................... 15
5.2 Objectifs kinésithérapiques ................................................................................................... 16
5.3 Moyens mis en œuvre .......................................................................................................... 16
6 Traitement .................................................................................................................................... 16
6.1 Principes de traitement ......................................................................................................... 16
6.2 Techniques rééducatives vestibulaires spécifiques .............................................................. 17
6.3 Stimulation opto-cinétique .................................................................................................... 17
6.4 Rééducation gymnique ......................................................................................................... 18
7 Résultats et évaluation terminale .................................................................................................. 23
7.1 Auto-questionnaire DHI ........................................................................................................ 23
7.2 Evaluation de l’équilibration .................................................................................................. 24
7.3 Examen sur fauteuil rotatoire ................................................................................................ 25
7.4 Epreuves vestibulospinales .................................................................................................. 26
8 Discussion .................................................................................................................................... 26
9 Conclusion .................................................................................................................................... 28
1
Etudé dé cas cliniqué
1 Introduction
Au cours d’un stage effectué du 2 janvier 2012 au 10 février 2012 au centre de
rééducation de Kerpape dans le service de neurologie adulte, j’ai rencontré Mme L,
patiente de 44 ans ayant été opérée d’un neurinome de l’acoustique de stade 4 il y a
6 ans et présentant des troubles de l’équilibre, Mme L est admise dans le service
pour une prise en charge correspondant à une rééducation vestibulaire.
L’éloignement dans le temps de l’intervention et le fait que la patiente ait déjà
effectué une rééducation de ce type à Kerpape, de octobre à décembre 2008, m’ont
amené à un questionnement initial. En effet, suite à ce type de pathologie et
d’intervention, la prise en charge rééducative est plus efficace lorsqu’elle est
effectuée de façon précoce. Cette rééducation paraît donc, au premier abord,
compliquée du point de vue du résultat. Cependant, lors de sa venue en 2008,
l’équilibration de Mme L s’était améliorée, la prise en charge était pourtant déjà
éloignée de l’intervention, ce qui permet donc d’espérer à nouveau un effet
bénéfique au terme de la prise en charge.
2 Données médicales et professionnelles
2.1 Neurinome de l’acoustique
Définition
Les neurinomes de l’acoustique, ou schwannomes vestibulaires, sont des tumeurs
bénignes développées à partir de la gaine de Schwann du nerf vestibulaire, qui est
une branche de division du VIIIème nerf crânien, le nerf cochléovestibulaire. Il
constitue de loin la localisation la plus fréquente des neurinomes [1]. Dans 95% des
cas, le neurinome est unilatéral [2].
La taille de la tumeur peut être quantifiée selon la classification de Koos en quatre
stades, le stade 1 correspondant à une tumeur intraméatique et le stade 4 à une
tumeur déplaçant le tronc cérébral et le 4ème ventricule.
2
Epidémiologie
Les neurinomes de l’acoustique représentent 8% des tumeurs intracrâniennes et
80% des tumeurs développées dans l’angle pontocérébelleux. Des travaux
épidémiologiques réalisés au Danemark ont montré une augmentation de la
prévalence radiologique de 7,8 à 12,4 par millions d’habitants et par ans. L’incidence,
selon une étude rétrospective menée sur 10000 IRM cérébrales, est de 0,07% [1].
Séquelles fonctionnelles
Les séquelles fonctionnelles sont la conséquence du geste chirurgical. Il s’agit de la
paralysie faciale, des troubles de l’équilibre, de la surdité totale et des céphalées. En
ce qui concerne la paralysie facial, plus la tumeur est volumineuse et plus le risque
de lésion et donc, de séquelles à long terme, est important, allant de 1-2% pour les
tumeurs de stade 1, à 30-50% pour les tumeurs de stade 4. Dans le cas de non
récupération, une anastomose hypoglossefaciale est proposée. Les troubles de
l’équilibre sont attendus du fait de la neurotomie vestibulaire ou de la
labyrinthectomie qui accompagne le geste chirurgical d’exérèse de la tumeur.
L’importance de ces troubles est variable d’un individu à un autre et dépend des
stratégies d’équilibration mises en place, de l’âge du patient et de la compensation
vestibulaire. Ces troubles réclament une rééducation vestibulaire adaptée et si
possible très précoce. La surdité totale de l’oreille atteinte touche la grande majorité
des patients et provoque une grande gêne auditive et un déficit de perception de
l’espace sonore. Les acouphènes sont également fréquents et augmentés par
rapport à l’état préopératoire. Enfin, la fréquence des céphalées est variable et leur
traitement est souvent difficile [1].
2.2 Anatomo-neurophysiologie de l’équilibration
Définition
La fonction d’équilibration correspond à la mise en place de stratégies afin d’adapter
la posture dans différentes situations pour obtenir le maintien de la position érigée.
La posture correspond au placement des différents segments corporels entre eux à
un moment donné, ce qui nécessite une activité musculaire permanente [3][4]. Pour
3
assurer cette fonction, des centres intégrateurs reçoivent des informations à partir
d’afférences neurosensorielles, ce qui leur permet de donner une réponse adaptée à
la situation par l’intermédiaire d’afférences neuro-motrices. L’équilibration est le fruit
d’un apprentissage, et chaque individu met en place des stratégies qui lui sont
propres en fonction de ses activités et de ses besoins. En effet, comme le dit
Semont, « un sujet normal a la liberté d’utiliser les différentes entrées avec le plus de
pertinence possible » [3].
Les afférences neurosensorielles
Les différentes informations nécessaires au maintien de la posture en réponse à des
éléments qui le perturbent sont obtenues grâce à différents capteurs périphériques,
qui correspondent à trois entrées sensorielles :
L’entrée somato-sensorielle
L’entrée visuelle
L’entrée vestibulaire
L’entrée somato-sensorielle est constituée par la proprioception des capteurs ostéo-
articulaires et des muscles squelettiques, ainsi que par les récepteurs cutanés,
sensibles aux stimulations tactiles, thermiques et nociceptives [3][4].
L’entrée visuelle correspond, d’une part, à la vision périphérique, qui sert à évaluer la
vitesse de déplacement de la scène visuelle, ainsi qu’à ramener la fovéa sur une
image aperçue dans le champ visuel et présentant un intérêt, et d’autre part, à la
vision fovéale, qui sert à regarder. L’ensemble permettant de voir et donc de donner
des informations, ce qui aboutit la mise en place des stratégies permettant
l’adaptation de la posture [3][4].
L’entrée vestibulaire est la seule entrée altérée dans le cadre de la prise en charge
de Mme L. L’organe vestibulaire, qui est dévolue à l’équilibration, forme avec le canal
cochléaire qui lui est consacré à l’audition, le labyrinthe membraneux, ce dernier
étant protégé par le labyrinthe osseux. Ce labyrinthe osseux est situé au niveau de
l’oreille interne, qui existe de chaque côté de la tête, au sein de l’os temporal. Le
labyrinthe membraneux postérieur correspond à l’organe vestibulaire et comprend
les canaux semi-circulaires, l’utricule et le saccule [5][6]. Les canaux semi circulaires
sont sensibles aux accélérations de type angulaire grâce au mouvement du fluide
4
qu’ils contiennent, l’endolymphe [3][6]. Ils sont aux nombres de trois par oreille
interne, un canal antérieur, un canal latéral et un canal postérieur, chacun étant
orienté dans un plan perpendiculaire aux autres ce qui permet d’obtenir un maximum
d’informations. Chaque canal comprend à son extrémité une ampoule renfermant la
crête ampullaire qui contient l’épithélium neurosensoriel où pénètrent les fibres
nerveuses, c’est donc à ce niveau qu’est transmise l’information à partir des fibres
afférentes de chaque nerf ampullaire [5][6]. L’utricule et le saccule sont sensibles, par
l’intermédiaire d’un épithélium neurosensoriel spécialisé appelé macule otolithique,
aux accélérations de type linéaire reflétant le mouvement et à l’orientation de l’axe de
la tête par rapport au vecteur gravitaire reflétant la posture [3][6]. A partir des
macules otolithiques sortent les fibres afférentes par l’intermédiaire des nerfs
utriculaires et sacculaires. Les nerfs ampullaires, sacculaire et utriculaire se
rejoignent ensuite pour former le nerf vestibulaire qui constitue avec le nerf
cochléaire le VIIIème nerf crânien, le nerf cochléovestibulaire [5][6].
Dans le cadre de la prise en charge de Mme L, il y a donc un déficit de toutes les
informations vestibulaires du côté droit, suite à l’intervention chirurgicale qu’elle a
subie.
Les centres intégrateurs
Les centres intégrateurs sont la moelle spinale, les hémisphères cérébraux, le tronc
cérébral, le cervelet et les ganglions de la base. Les informations afférentes
provenant des trois entrées sensorielles vont donc être analysées, intégrées et
comparées par ces centres intégrateurs qui vont ensuite envoyer un ordre aux
systèmes efférents neuro-moteurs afin d’adapter la posture à la tâche envisagée [3].
Il y a donc une intégration multi-sensorielle de l’équilibre [6]. Cette régulation par le
système nerveux central est effectuée en permanence et de ce fait des ajustements
posturaux sont constamment réalisés afin de maintenir l’équilibre.
Le rôle de l’entrée vestibulaire est capital car elle interagit avec les autres entrées.
Les afférences vestibulaires se projettent sur quatre grands systèmes : la moelle
spinale, les noyaux oculomoteurs, le cervelet et le cortex. Les deux premières sont
essentielles, le vestibule ayant un rôle dans l’équilibration principalement grâce aux
boucles posturales et oculomotrices. Ainsi, les voies vestibulo-spinales permettent de
contrôler le tonus des muscles extenseurs, principalement au niveau cervical [4][6].
5
En fonction des informations reçues, une réaction posturale compensatoire sera
obtenue de façon réflexe. Les voies vestibulo-oculomotrices ont comme objectif la
stabilisation du regard lors du mouvement. Le vestibule est l’organe du déplacement,
du mouvement de la tête et du corps dans un espace tridimensionnel. Son rôle
principal est la stabilisation de la scène visuelle, ce qui est la clé de l’équilibre :
devant un espace visuel instable, il n’est pas possible de tenir en équilibre [3]. Tout
comme pour le réflexe vestibulospinal, un mouvement oculaire compensatoire sera
obtenu de façon réflexe afin de conserver cette stabilité du regard [4][6].
Une anomalie du système vestibulaire aura un retentissement important du fait de
ces connexions avec les autres entrées, et va perturber le fonctionnement logique
d’équilibration que l’individu avait mis en place, ce qui a été le cas pour Mme L
Les éfférences neuro-motrices
Il s’agit des muscles axiaux et périphériques, qui vont se contracter en fonction des
ordres donnés par les centres intégrateurs. Nous avons vu précédemment que, en
ce qui concerne le système vestibulaire, les effecteurs sont principalement les
muscles extenseurs du rachis, en particulier le rachis cervical, et les muscles
oculomoteurs.
La compensation vestibulaire
Selon Barona De Guzman et Garcia Alsina, «La compensation vestibulaire est
l’ensemble des phénomènes de réorganisation neurologique qui permet la
récupération de l’équilibre après une lésion vestibulaire » [7]. Chez Mme L, à la suite
de sa pathologie et de son intervention chirurgicale, les informations provenant du
système vestibulaire droit n’étaient plus transmises. Il y avait donc une asymétrie
vestibulaire, provoquant une analyse erronée de la situation par les centres
intégrateurs. Cependant, depuis la lésion datée d’il y a 6 ans, un processus s’est mis
en place afin d’atténuer l’asymétrie vestibulaire post lésionnelle, et une
réorganisation du système vestibulaire et des aires cérébrales qui y sont associées.
Ce phénomène s’étend à tout le système nerveux central et correspond à la plasticité
[4][7]. La compensation vestibulaire a également pu se mettre en place avant
l’intervention, le neurinome de l’acoustique étant une pathologie lentement évolutive.
6
Ainsi, après une lésion vestibulaire, plusieurs mécanismes peuvent expliquer la
compensation vestibulaire. L’adaptation et l’habituation permettent de diminuer les
informations reçues ou la réponse aux informations reçues par le vestibule sain. La
substitution permet d’élaborer des stratégies à partir des entrées visuelle et
somatosensorielle pour se substituer aux réflexes vestibulooculaire et vestibulospinal
[7][8][9][10].
Ce processus de compensation est amélioré par l’exercice et par la stimulation des
autres entrées sensorielles [8][9][10]. De plus, le fait d’effectuer une rééducation
vestibulaire et de retrouver un niveau d’activité rapidement apparaît important pour
une meilleure récupération [3].
3 Anamnèse
3.1 Antécédents
En 2007, Mme L est hospitalisée pour cause de spondylarthropathies. Suite à ses
douleurs lombaires et sacro-iliaques, le diagnostic de spondylarthrite ankylosante est
évoqué mais non confirmé.
3.2 Activité professionnelle
Mme L travaille actuellement à mi-temps, le matin dans un supermarché dans lequel
elle effectue de la mise en rayon (rayons bazar et textile). Dans le cadre de son
travail, elle est suivie régulièrement au centre de Kerpape par le Docteur L et par un
ergonome en ce qui concerne l’activité au poste de travail.
3.3 Histoire de la maladie
Le 2 avril 2002, Mme L passe une IRM avec comme indication : « céphalées et
vertiges », qui ne montre aucune symptomatologie. Le 12 novembre 2005, elle
présente une otalgie droite avec acouphènes évoluant en crise depuis plusieurs
mois. Différents traitements dont des corticoïdes n’ont jusque-là rien apporté. Il est
décidé un potentiel évoqué auditif qui décèlera une asymétrie conduisant à effectuer
une IRM. Cette dernière, le 13 janvier 2006, permettra de constater la présence d’un
neurinome de l’acoustique droit de grade IV. Une intervention chirurgicale est
réalisée le 7 février 2006. Le compte rendu histologique confirmera le diagnostic de
7
schwannome du VIII droit. Le 20 février 2006, une anastomose hypoglosse faciale
est effectuée, Mme L présentant une paralysie faciale postopératoire.
Le 10 mars 2008, Mme L présente un syndrome vestibulaire franc, une marche
entravée par des embardées et une persistance de la paralysie faciale, il lui est donc
proposé une prise en charge au centre de Kerpape en traitement ambulatoire qu’elle
démarrera le 23 octobre 2008. Cette rééducation vestibulaire aura permis d’améliorer
l’équilibration de Mme L.
3.4 Prescription
Mme L, 44 ans, patiente à 6 ans d’une chirurgie d’un neurinome droit, est vue par le
docteur L dans le cadre d’un suivi régulier au centre de Kerpape. Au cours d’un
entretien, elle signale que depuis environ deux mois, qu’elle ressent une
augmentation des sensations de déséquilibre, de vertiges, ayant des conséquences
dans les activités de la vie de tous les jours. Un déséquilibre majeur à l’occlusion des
yeux et une instabilité lors de l’appui unipodal sont constatés et il est alors décidé de
reprendre une rééducation vestibulaire pour une douzaine de séances à raison de
deux séances par semaine. Le 2 Janvier 2012, elle est admise dans le service de
neurologie adulte au centre de rééducation de Kerpape pour sa 1ère séance.
3.5 Traitement
A la suite de l’intervention chirurgicale, Mme L a présenté une paralysie faciale
conduisant à une anastomose hypoglosse faciale. Dans le cadre de la rééducation
de cette paralysie faciale qui persiste à ce jour, Mme L bénéfice de séances de
kinésithérapie en cabinet libéral, ceci afin de traiter également afin les douleurs
lombaires et sacro-iliaques dont elle se plaint.
4 Examen de la patiente et évaluation initiale
4.1 Interrogatoire
A l’interrogatoire, Mme L décrit une augmentation des sensations de vertige, depuis
quatre à cinq mois, principalement lors des changements de positions. Il ne s’agit
pas de vertige « vrai » [11]. En effet, la définition du vertige correspond à une
sensation de rotation, soit de l’environnement, soit de son propre corps. Dans le cas
de Mme L, il s’agit plus de sensation d’ébriété [3][12][13].
8
En ce qui concerne les activités de la vie quotidienne, Mme L dit manquer
d’assurance en ce qui concerne les escaliers, principalement quand il s’agit de les
descendre. Au travail, elle décrit des sensations d’instabilité, notamment lorsqu’il est
nécessaire de monter sur un tabouret afin de travailler en hauteur.
Associée aux sensations d’instabilité, Mme L présente régulièrement des
acouphènes et céphalées qui sont, comme on l’a vu précédemment, des séquelles
possibles suite à une intervention chirurgicale du neurinome de l’acoustique.
4.2 Auto-questionnaire DHI
L’auto-questionnaire DHI (Dizzeness Handicap Inventory) ou Echelle du Handicap lié
aux Troubles de l’Equilibre et aux Vertiges en langue française (EHTEV) permet
d’évaluer le retentissement des symptômes sur la qualité de vie [10][14]. Il a été
développé dans la littérature anglo-saxonne et est l’un des questionnaires les plus
utilisés. Il s’agit d’une échelle de handicap liée aux troubles de l’équilibre et aux
vertiges, évaluant les aspects fonctionnels, émotionnels et physiques des troubles de
l’équilibre. Il possède 25 items avec cinq niveaux de réponses : jamais(0),
rarement(1), parfois(2), souvent(3), en permanence(4) (Annexe 1).
Mme L a répondu « souvent » aux trois items ci-dessous, il s’agit donc des activités
ou mouvements qui la gênent le plus:
Votre problème limite-t-il votre participation à des activités sociales comme
diner à l’extérieur, aller au spectacle, en soirée ou au dancing ?
Les mouvements brusques de la tête accentuent-ils vos troubles ?
A cause de vos troubles, éprouvez-vous des difficultés de concentration ?
Concernant le reste du questionnaire, 11 items sont cotés à 2 (parfois), 6 sont
évalués à 1 (rarement), et 5 à 0 (non jamais), le total étant de 37. Ce questionnaire
EHTEV nous permet donc d’évaluer les limitations d’activité que présente Mme L, et
nous servira ensuite à évaluer les améliorations ressenties par la patiente,
indépendamment des progrès effectués ou non en ce qui concerne son équilibration.
9
4.3 Evaluation de l’équilibration
Evaluation chronométrée du maintien de la posture
Les différents tests d’évaluation sont objectivés à l’aide d’un chronomètre. Ainsi on
évalue l’équilibre bipodal et monopodal dans des situations où la patiente a soit les
yeux ouverts, soit les yeux fermés (tableau 1).
Les résultats montrent que l’équilibre statique est nettement moins bien tenu lorsque
les yeux sont fermés, en unipodal.
De plus, bien que l’équilibre statique bipodal soit tenu plus de 30 secondes dans les
deux cas, on note des oscillations plus importantes les yeux fermés. Cependant,
l’équilibre statique les yeux ouverts en unipodal est également difficile à tenir, les
oscillations étant de grande amplitude.
Tableau 1 : Evaluation initiale de l’équilibre monopodal et bipodal, yeux ouverts et yeux fermés.
Equilibre bipodal Equilibre
monopodal droit
Equilibre
monopodal gauche
Yeux ouverts Plus de 30
secondes
10 secondes 10 secondes
Yeux fermés Plus de 30
secondes
1 à 2 secondes 1 à 2 secondes
Evaluation de l’équilibre sur plateforme de
posturographie SATEL.
Les troubles de l’équilibre peuvent être quantifiés sur
des plates-formes grâce aux méthodes de
posturographie statique et dynamique, permettant
une approche plus globale du patient présentant des
déséquilibres [3][7][11][12][13][15]. En situation
debout au repos, le corps n’est pas immobile, des
oscillations permanentes permettent de maintenir la
posture. La posturographie statique permet de
mesurer ces oscillations [12]. La posturographie
dynamique évalue les réponses posturales de la
Figure 1 : Equilibre sur plateforme de posturographie
10
patiente en réponse à des mouvements de sa base de sustentation [11].
Concernant l’équilibre statique, Mme L est placée sur la plate-forme immobile et on
effectue deux enregistrements, un les yeux ouverts et l’autre les yeux fermés [12].
Les paramètres que nous retiendrons parmi les nombreuses informations données
sont la surface totale correspondant aux différentes positions du centre de pression,
la longueur totale parcourue par ce centre de pression durant l’enregistrement et le
quotient de Romberg qui correspond au rapport des surfaces de déplacement en
condition yeux fermés et yeux ouverts
[11][12]. En ce qui concerne les résultats, la
surface est légèrement supérieure à la
norme les yeux ouverts, tandis que
l’évaluation les yeux fermés montre une
surface et une longueur très supérieures à
la norme, tout comme le coefficient de
Romberg. Mme L utilise donc
principalement sa vue comme stratégie
d’équilibration, elle est donc dépendante
visuelle.
Concernant l’équilibre dynamique, Mme L
se tient debout sur une plate-forme mobile
placée sur la plate-forme immobile. Selon le
positionnement de la plate-forme mobile,
l’équilibre dynamique est évalué dans le
plan sagittal ou dans le plan frontal.
Au total, quatre enregistrements sont
réalisés, deux pour chacun des plans précédents, un les yeux ouverts et l’autre les
yeux fermés. Les paramètres retenus sont la longueur et l’amplitude du centre de
pression [12].
Pour le plan sagittal, la longueur et l’amplitude sont très supérieurs à la norme les
yeux ouverts, alors que l’enregistrement les yeux fermés n’a pas pu être obtenu,
Mme L ne tenant pas l’équilibre toute la durée de l’enregistrement.
Figure 2 : Equilibre dynamique sur plateforme
11
En revanche, dans le plan frontal, les deux enregistrements ont été obtenus. Lorsque
les yeux sont ouverts, seule l’amplitude est supérieure à la norme, alors que les yeux
fermés, les deux le sont.
Cette évaluation montre également que la vue est essentielle dans l’équilibration de
Mme L. L’évaluation de l’équilibre sur plate-forme de posturographie permet de
confirmer la dépendance visuelle de Mme L en ce qui concerne ses stratégies
d’équilibration.
4.4 Examen sur fauteuil rotatoire
Observation de l’oculomotricité
Précédemment à l’examen sur fauteuil rotatoire, des mouvements oculaires verticaux
et horizontaux sont demandés à Mme L afin de vérifier qu’il n’existe pas d’asymétrie
des mouvements oculaires pouvant signifier un problème ophtalmique ou
neurologique [3]. Aucune asymétrie n’est constatée lorsque la patiente réalise ces
mouvements.
Nystagmus spontané et Head Chaking Test
L’examen à l’aide d’un appareil
de vidéo-nystagmoscopie
(Annexe 2) permet de mettre
l’œil dans le noir complet afin
de supprimer le phénomène de
fixation et donc de visualiser
plus facilement, grâce à un
écran, la réponse nystagmique
[3][11][13]. Le nystagmus
désigne les mouvements
oculaires répétés, succession d’un mouvement lent suivi d’un retour rapide. La phase
lente est créée par l’asymétrie de fonctionnement des systèmes vestibulaires, elle
peut être physiologique en cas de mouvement ou pathologique en cas de lésion
vestibulaire. La phase rapide correspond à un retour en position initiale de l’œil. La
direction du nystagmus est donnée par le sens de la secousse rapide [6][11][12].
Figure 3 : Recherche du nystagmus
12
Dans un premier temps, la recherche de nystagmus spontané est effectuée, ainsi
que la manœuvre du Head Chaking Test, qui consiste à tourner rapidement la tête
de la patiente de gauche à droite pendant 20 secondes [11][13][16]. La présence
d’un nystagmus signifierait une asymétrie vestibulaire [3][7]. Dans le cas de Mme L,
qui présente une lésion vestibulaire du côté droit, un nystagmus gauche aurait pu
être observé en post lésionnel immédiat. En effet, seul le système vestibulaire
gauche envoie des informations. Un mouvement oculaire dans le sens opposé,
comme on l’a vu précédemment, donc vers la droite et correspondant à la phase
lente sera observé, suivi d’une phase rapide vers la gauche correspondant au retour
de l’œil. Cependant, aucun nystagmus n’est observé, ce qui peut s’expliquer par
l’ancienneté de la pathologie et de l’intervention, et donc de la mise en place de
compensation vestibulaire.
Epreuve rotatoire impulsionnelle
Mme L est installée sur le fauteuil rotatoire, l’appareil de vidéonystagmoscopie étant
en place [17]. Une rotation de 180° à une vitesse d’environ 20° par seconde dans le
sens horaire est effectuée, la patiente gardant les yeux ouverts et le nombre de
nystagmus per-rotatoire et post-rotatoire est noté [3][8][11][13][16]. On effectue la
même chose dans le sens antihoraire. (Tableau 2)
Tableau 2 : Nombre de nystagmus pendant et suite à des rotations horaire ou antihoraire.
Nombre de nystagmus
per-rotatoire
Nombre de nystagmus
post-rotatoire
Rotation horaire 7/8 0/1
Rotation antihoraire 0/1 0/1
Un nystagmus per-rotatoire est physiologique, en effet, lors de la rotation, le système
vestibulaire du côté de la rotation est stimulé, provoquant un mouvement oculaire en
sens opposé correspondant à la phase lente du nystagmus. En revanche, un
nystagmus post-rotatoire est pathologique, les deux systèmes vestibulaires étant en
équilibre [3][16].
Chez Mme L, l’absence de nystagmus per-rotatoire en rotation antihoraire pourrait
signaler un déficit vestibulaire gauche, ce qui n’est pas le cas puisque Mme L a subi
13
une intervention du côté droit. Là encore, l’explication peut venir de la compensation
vestibulaire qui, petit à petit, a permis de modifier chez la patiente soit la quantité
d’informations envoyée par le système vestibulaire gauche, soit leur analyse par les
centres intégrateurs, permettant donc de compenser l’asymétrie vestibulaire.
Cependant, il faut noter que selon Semont, le nystagmus post-rotatoire semble avoir
plus d’intérêt car il est étroitement lié au degré de dysfonction vestibulaire [3]. Enfin,
la rotation étant effectuée manuellement, il est difficile de maintenir une vitesse de
rotation constante de 20° comme la théorie le voudrait [6].
Epreuves rotatoires à vitesse élevée
Les épreuves rotatoires à vitesse rapide consistent à effectuer trois tours de fauteuil
à une vitesse d’environ 400° par seconde.
L’accélération et l’arrêt doivent être identiques, et la
vitesse de rotation doit être similaire dans les deux
sens [3]. L’utilisation d’un fauteuil rotatoire manuel
rend difficile le respect de ces conditions [6]. On
effectue deux séries de rotation. La première série
consiste en une mesure de la réponse en fixation :
Mme L ferme les yeux lors de la rotation, les ouvre
lors de l’arrêt du fauteuil afin de fixer une cible placée
devant elle. Elle doit signaler le moment où la cible
devient immobile. La deuxième série permet de
mesurer la réponse en vection : Mme L ferme les yeux
lors de la rotation et également lors de l’arrêt du
fauteuil. Elle doit signaler le moment où la sensation
de rotation du fauteuil s’arrête. Les deux mesures sont réalisées à l’aide d’un
chronomètre. (Tableau 3)
Tableau 3 : Résultats des tests en fixation et vection, en rotation horaire et antihoraire.
Fixation Vection
Rotation horaire 10 secondes 10 secondes
Rotation antihoraire 5 secondes 5 secondes
Figure 4 : Epreuves rotatoires
14
Pendant une rotation, qu’elle soit rapide ou lente, le système vestibulaire du côté de
la rotation est stimulé. A l’arrêt, après une rotation à vitesse rapide, le système
vestibulaire du côté opposé à la rotation est stimulé donnant une impression de
rotation dans le sens opposé lorsque que les yeux restent fermés, et une impression
de mobilité d’une cible du fait du mouvement oculaire réflexe suite à la stimulation
vestibulaire. Ainsi, suite à une rotation antihoraire, c’est la réponse du système
vestibulaire droit qui est mesurée [3][8][16]
Les résultats des tests en fixation et en vection de Mme L montrent que les réponses
en rotation antihoraire sont plus faibles qu’en rotation horaire, ce qui explique une
asymétrie vestibulaire, avec un déficit du côté droit. Ces valeurs sont en concordance
avec la pathologie et l’intervention subie par la patiente. La question de la
compensation vestibulaire se pose alors. Il est possible que cette compensation
vestibulaire ne se soit pas effectuée de la même manière à des vitesses élevées, ce
qui pourrait expliquer que Mme L se plaigne de déséquilibres lors des mouvements
brusques.
4.5 Epreuves vestibulospinales
Les épreuves vestinulospinales permettent de mesurer et d’observer les latéro-
déviations statiques et dynamiques.
Test de Romberg
Le test de Romberg est effectué en demandant à Mme L de tenir debout les pieds
joints, d’abord les yeux ouverts puis les yeux fermés [3][7][12]. Les yeux ouverts, on
n’observe pas de déviation contrairement à la situation les yeux fermés même si elle
est très légère, surtout observée au niveau de la tête, vers le côté droit. Cette
déviation légère de la tête s’explique par l’asymétrie vestibulaire de la patiente, les
informations envoyées par le côté gauche provoquant, comme on l’a vu
précédemment, une réaction posturale du côté opposé, principalement au niveau
des muscles cervicaux. Cependant, cette déviation est très légère, ce qui est dû à
l’ancienneté de l’atteinte et donc à la compensation vestibulaire.
Test de Fukuda
Mme L doit effectuer un piétinement sur place, en levant les genoux d’environ 30°,
les yeux fermés en comptant 45 pas [3][11][12]. La patiente est incapable de réaliser
15
ces tests, les déstabilisations étant trop importantes lors des appuis unipodaux. On
aurait pu s’attendre, pour les mêmes raisons que pour le test de Romberg, à une
déviation et une rotation du côté droit.
Epreuve de Babinski-Weil
Cette épreuve est également appelée « test de la marche en étoile ». Elle consiste à
effectuer quelques pas alternativement en avant et en arrière les yeux fermés
[3][7][12]. Là encore, les déstabilisations étant trop importantes lors des appuis
unipodaux, l’épreuve n’est pas significative. On aurait pu s’attendre à une marche
déviée vers la droite quand le déplacement se fait vers l’avant, et une déviation vers
la gauche quand le déplacement se fait vers l’arrière, formant ainsi une étoile.
5 Bilan
5.1 Bilan diagnostic kinésithérapique
Il y a 6 ans, Mme L a subi une intervention chirurgicale pour neurinome de
l’acoustique de grade IV, l’entrée vestibulaire est donc chez elle perturbée.
Cependant, l’intervention étant lointaine, des mécanismes de compensation
vestibulaire ont été mis en place. Ainsi, on ne retrouve pas de nystagmus spontané,
le Head checking test est négatif et la patiente ne décrit pas de vertige « vrai ». On
remarque cependant que le test de Romberg montre une légère déviation de la tête
vers la droite et que, lors des épreuves rotatoires à vitesse rapide en fixation et en
vection, la réactivité de l’oreille gauche est le double de l’oreille droite, il y a donc une
asymétrie vestibulaire.
L’évaluation de l’équilibre chez Mme L montre qu’il existe chez elle une dépendance
visuelle importante. Sans cette afférence elle est très déstabilisée et ne peut tenir
l’équilibre monopodal. D’ailleurs le test de Fukuda ainsi que l’épreuve de Babinski-
Weil sont impossibles à réaliser, la patiente étant déstabilisée de façon importante
lors des appuis monopodaux. Cependant, l’équilibre les yeux ouverts est également
moins performant par rapport à la norme d’après l’évaluation sur la plateforme de
posturographie SATEL, et les équilibres monopodaux les yeux ouverts ne sont pas
tenus plus de 10 secondes, ce qui montre que la vue ne suffit pas pour obtenir un
équilibre optimal.
16
L’intervention chirurgicale, la dépendance visuelle et donc la sous-utilisation des
autres entrées sensorielles expliquent les difficultés d’équilibration de Mme L et donc
ses sensations d’instabilité, ce qui la gêne dans les activités de la vie quotidienne,
notamment au travail durant lequel elle éprouve des difficultés de concentration, mais
également en ce qui concerne les activités sociales, ce que montre bien le
questionnaire DHI.
5.2 Objectifs kinésithérapiques
L’objectif général est d’améliorer l’équilibration de Mme L afin de diminuer ses
sensations d’instabilité et ses déséquilibres pour atténuer la gêne qu’elle ressent
dans les activités sociales et de travail. Pour cela, différents objectifs devront être
atteints :
Diminuer la dépendance visuelle
Optimiser la stabilisation du regard
Rééquilibrer les réponses des oreilles gauche et droite
Augmenter les performances de l’entrée somato-sensorielle
Améliorer quantitativement les équilibres unipodaux et bipodaux
Diminuer la sensibilité de la patiente aux mouvements brusques
Sensibiliser la patiente sur l’importance de maintenir une activité en dehors
des séances
5.3 Moyens mis en œuvre
Les techniques de rééducation vestibulaires spécifiques. Elles comprennent le
fauteuil rotatoire et la stimulation opto-cinétique.
La rééducation gymnique : des exercices d’équilibration sont proposés et
adaptés à la pathologie vestibulaire. L’équilibre postural statique et dynamique
est travaillé à l’aide de poutres, de plans instables, de ballons et autres
accessoires.
6 Traitement
6.1 Principes de traitement
Respecter la fatigabilité de la patiente
Surveiller l’apparition de signes associés (acouphènes, céphalées).
17
Respecter une progression dans les exercices proposés
Proposer des exercices se rapprochant de situations écologiques vécues par
la patiente
6.2 Techniques rééducatives vestibulaires spécifiques
Fauteuil rotatoire
D’après les tests à vitesse rapide en fixation et en vection ainsi que par le test de
Romberg, Mme L présente une asymétrie vestibulaire. Dans le but de rééquilibrer les
réponses de l’oreille gauche et de l’oreille droite, le fauteuil rotatoire est utilisé afin de
provoquer des stimulations répétées. Ces stimulations répétées sont effectuées dans
le sens horaire afin de diminuer la réponse du labyrinthe gauche grâce à la plasticité
neuronale [3][8][13][16]. Chaque série correspond à un test en fixation, la durée de
sensation de mobilité de la cible est chronométrée. Cet exercice sera effectué lors de
deux séances, à raison d’une dizaine de stimulations, mais on observera peu
d’évolutions. Ce type de rééducation sera donc abandonné par la suite, la non
rééquilibration des réponses pouvant s’expliquer par l’ancienneté de la pathologie.
6.3 Stimulation opto-cinétique
Le générateur opto-
cinétique (Annexe 3)
permet de stimuler tout
le champ visuel. Il
s’agit d’une boule
projetant sur les murs,
le plafond et le sol
d’une pièce des points
lumineux, l’obscurité
étant préalablement
faite dans la pièce, et
permettant de les faire défiler dans n’importe quelles directions et à différentes
vitesses [3][8][13][17]. Le mouvement de ces points lumineux va engager le réflexe
opto-cinétique, c'est-à-dire que, après un certain temps de stimulation, la patiente
aura l’impression que les points lumineux sont fixes et que c’est la pièce qui est en
mouvement, dans le sens opposé à la stimulation, ce qui provoquera une déviation
Figure 5 : Stimulation opto-cinétique
18
du corps du même côté de la stimulation. Il y a donc un conflit d’informations entre
l’entrée visuelle qui donne la sensation de mouvement et les deux autres entrées qui
informent de la stabilité de la patiente. La répétition va amener à une diminution de la
déviation posturale [3][4][8].
La séance d’opto-cinétique a pour but de diminuer le poids de l’entrée visuelle et
d’opérer un transfert sur l’entrée somato-sensorielle. La patiente est debout, on lui
demande de regarder le défilement des points lumineux qui se déplacent sur le mur.
On commence par des stimulations horizontales en adaptant la vitesse de défilement
aux déséquilibres que cela provoque chez Mme L [3][13].
De même, on effectue ensuite des stimulations verticales. La stimulation opto-
cinétique sera utilisée à chaque fin de séance, mises à part celles pour lesquelles on
utilisera le fauteuil rotatoire, la durée de la séance dépendra de la saturation du
système et peut aller jusqu’à 15 minutes [3][13].
Lors des premières séances de stimulations opto-cinétiques, Mme L présente des
déviations importantes pour des mouvements horizontaux vers la gauche des points
lumineux, ainsi que pour des déplacements verticaux, que ce soit vers le haut ou
vers le bas.
Les séances consistent donc à répéter les stimulations dans ces directions, ainsi
qu’à adapter la vitesse de défilement afin d’obtenir les déstabilisations les plus
importantes. Une diminution progressive de ces déstabilisations sera observée au
cours de la prise en charge, jusqu’à ce que Mme L soit totalement indifférente aux
déplacements lumineux, quel qu’en soit le sens et la vitesse.
6.4 Rééducation gymnique
L’objectif de ces exercices est de placer la patiente dans des zones d’instabilités afin
qu’elle mette en place des stratégies compensatoires d’équilibration. Dans ses
activités de la vie quotidienne, Mme L évite autant que possible d’effectuer ces
mouvements qui lui procurent des sensations d’instabilité. Il est donc important de la
placer dans ces situations afin que son système nerveux analyse les informations
sensorielles qu’il reçoit pour fournir une réponse plus adaptée [4][7].
La patiente doit donc être mise en déséquilibre le plus souvent possible et ne pas
être stable afin de retrouver des stratégies adaptées. Pour l’ensemble des exercices
19
qui vont suivre, on respectera une progression tout au long de la rééducation en
fonction des capacités et des progrès effectués par la patiente [3][4].
Ainsi, au début de la rééducation, les exercices seront effectués plutôt en statique,
en stimulant une entrée sensorielle seulement, sans ordre, les yeux ouverts.
Progressivement, on ira vers des exercices principalement en dynamique, avec
stimulations de plusieurs entrées sensorielles, en utilisant la notion de double tâche,
les yeux fermés [4][7].
Exercice d’équilibration statique
Stimulation de l’entrée proprioceptive
Des exercices de maintien de la posture sur plan
instable, mousse ou trampoline ou dans des
positions de types chevalier servant et genoux
dressés sont proposés [4][7].
La planche instable sera orientée soit dans le plan
sagittal, soit dans le plan frontal.
Lorsque la patiente a les yeux ouverts, l’équilibre
est bien tenu. Il lui est alors demandé d’effectuer,
par exemple, des exercices de calcul mental, c’est
la notion de double tâche, ainsi que de diminuer le
polygone de sustentation.
Des poussées déstabilisantes dans toutes les
directions sont appliquées par le thérapeute afin de
placer Mme L dans des situations de
déstabilisations. Mme L utilisant beaucoup sa vue
pour s’équilibrer, ces exercices
seront rapidement effectués les
yeux fermés, dans un premier
temps sans double tâche ni
poussées déstabilisantes.
Enfin, l’équilibre unipodal est
Figure 6 : Rééducation de l’équilibre
Figure 7 : Equilibre sur ballon
20
également travaillé sur mousses et trampoline.
Un travail de maintien de la posture sur poutre est également effectué, les pieds
étant placés l’un devant l’autre, le polygone de sustentation est diminué.
Là encore, la double tâche est proposée afin d’augmenter la difficulté, en effectuant
par exemple des jeux de passes de ballons avec les thérapeutes. Des poussées
déstabilisantes les yeux ouverts puis les yeux fermés sont appliquées.
Une stimulation de l’entrée proprioceptive sur ballon de Klein est également
proposée. Elle est, dans un premier temps, utilisée en monopodal les yeux ouverts,
avec des déstabilisations de type lancer et rattraper de ballons, poussées
déstabilisantes, puis on ira progressivement vers un travail les yeux fermés, en
bipodal puis en monopodal, dans un premier temps sans déstabilisations, puis avec
exercices en double tâche et poussées déstabilisantes.
Stimulation de l’entrée vestibulaire
Les stimulations vestibulaires se feront par des rotations
de tête de droite à gauche, et de haut en bas [3][4][6][7].
Les rotations ne provoquent pas de déstabilisations
lorsque Mme L les effectue à vitesse lente, alors que le
maintien de l’équilibre est beaucoup plus difficile à
obtenir lors de rotations rapides de la tête.
La patiente effectuera ces exercices d’abord les yeux
ouverts, en fixant une cible de chaque côté, un rôle
important du système vestibulaire étant la stabilité du
regard, puis les yeux fermés. Ces stimulations sont donc
répétées afin que la patiente mette en place des
stratégies compensatoires.
Figure 8 : Equilibre sur plan mobile
21
Stimulation vestibulaire et proprioceptive
Lorsque les stimulations d’une seule entrée provoquent peu de déstabilisations, elles
sont combinées afin de mettre la patiente dans des conditions de plus en plus
déstabilisantes [4][7].
Ainsi, on demandera à Mme L d’effectuer des rotations
de tête les yeux ouverts, alors qu’elle est placée sur un
sol instable, comme les mousses, planches instables et
trampoline.
Ces situations sont très déstabilisantes pour la patiente,
elles seront donc reproduites tout au long de la
rééducation en respectant la fatigabilité de Mme L.
Exercices d’équilibration dynamique
Là encore, le principe de progression sera respecté.
Dans un premier temps les stimulations seront peu
nombreuses, puis augmentées en fonction des progrès
réalisés par la patiente.
Equilibre dynamique sur poutre
Ces exercices sont effectués les yeux ouverts, étant
impossibles à réaliser les yeux fermés pour Mme L.
La double tâche est très utilisée: calcul mental, passer
un ballon derrière la tête et le dos, passer un ballon de
part et d’autre de la poutre avec les pieds, ou tenir un
cône sur lequel est placé une balle de ping-pong.
Le fait de venir attraper des cônes permet de se
rapprocher des situations dans lesquelles la patiente se
retrouve au travail, en se baissant et se relevant
souvent.
Figure 9 : Equilibre sur poutre
Figure 10 : Equilibre dynamique sur poutre
22
Ce sont des situations dans lesquelles la patiente est instable, provoquant des
accélérations de type linéaire de haut en bas [3][6].
Exercices de montée et descente sur une planche
Cet exercice est effectué dans le but de reproduire une
situation dans laquelle Mme L dit être en difficulté, ce qui
correspond à l’action de monter et descendre sur un
tabouret, ce qu’elle fait régulièrement au travail.
La descente et la montée d’escaliers sont également des
actions qu’elle appréhende.
La progression consistera à augmenter la vitesse à
laquelle la patiente monte est descend. Dans un premier
temps, l’exercice sera réalisé les yeux ouverts, puis les
yeux fermés en fin de rééducation.
Exercice postural à partir des NEMS
Le passage de la position genoux dressés à celle du
chevalier servant correspond à un niveau d’évolution motrice.
Il permet d’effectuer des accélérations de type linéaire
de haut en bas, et donc de stimuler l’entrée vestibulaire,
ainsi que de faire varier la surface d’appui, stimulant
ainsi l’entrée proprioceptive. Dans un premier temps
l’exercice est réalisé les yeux ouverts, le regard à
l’horizontal, puis les yeux fermés.
Exercices de marche
Ces exercices seront utilisés de plus en plus au cours de
la rééducation. Un travail de l’équilibration pendant la
marche les yeux ouverts est effectué et il est demandé à
Mme L de réliser, sur ordre, diverses actions :
Figure 11 : Rééducation posturale genoux dressés
Figure 12 : Rééducation posturale chevalier servant
23
tourner la tête rapidement à droite et à gauche,
s’arrêter rapidement,
effectuer des demi-tours, afin de stimuler l’entrée
vestibulaire.
La progression visera ensuite à réaliser cet exercice les
yeux fermés.
Cependant, la difficulté et la fatigue qu’éprouve la
patiente à réaliser cet exercice dans ces conditions font
qu’ils sont réalisés durant une courte durée.
Enfin, des parcours de marche sont régulièrement
proposés, permettant de stimuler l’entrée
proprioceptive, en utilisant les différents moyens de
progression précédemment cités, comme la double
tâche, la vitesse, le nombre et la nature des obstacles.
La réalisation de ces parcours les yeux fermés est
difficile, cette situation est donc mise en place
régulièrement en fin de prise en charge [4][7].
7 Résultats et évaluation terminale
7.1 Auto-questionnaire DHI
Mme L a de nouveau rempli le questionnaire permettant
d’évaluer le retentissement des troubles de l’équilibre
sur la qualité de vie en fin de prise en charge. Bien que
Mme L dise ne pas avoir ressenti d’amélioration nette,
le score est passé d’un total de 37 à un total de 27, la
majorité des items diminuant de 1 point. La prise en
charge paraît donc avoir eu un bénéfice concernant les
activités de la vie quotidienne.
Figure 13 : Parcours de marche les yeux ouverts
Figure 14 : Parcours de marche les yeux fermés
24
7.2 Evaluation de l’équilibration
Evaluation chronométré de maintien de la posture
Tout comme en début de prise en charge, l’équilibre bipodal est tenu facilement, que
ce soit les yeux ouverts ou les yeux fermés. En revanche, l’équilibre monopodal est
amélioré, que ce soit en condition les yeux ouverts ou les yeux fermés. En effet,
lorsque Mme L a les yeux ouverts, l’équilibre est maintenu plus de 30 secondes,
contre 10 secondes en début de prise en charge. Les yeux fermés, l’équilibre
monopodal est encore difficile à tenir, bien qu’une progression soit constatée,
passant de 1 à 2 secondes, à 5 à 6 secondes. Le maintien de la posture est donc
amélioré par rapport au début de prise en charge.
Tableau 4 : Evaluation terminale de l’équilibre monopodal et bipodal, yeux ouverts et yeux fermés
Equilibre bipodal Equilibre
monopodal droit
Equilibre
monopodal gauche
Yeux ouverts Plus de 30
secondes
Plus de 30
secondes
Plus de 30
secondes
Yeux fermés Plus de 30
secondes
6 secondes 5 secondes
Evaluation de l’équilibre sur plate-forme de posturographie SATEL
Concernant l’équilibre statique les yeux ouverts, les résultats sont sensiblement
équivalents à ceux obtenus en début de prise en charge, c'est-à-dire proches de la
norme. En revanche, les yeux fermés, les résultats sont nettement améliorés, la
longueur (de 2691 à 802 mm) est dans la norme, tout comme le coefficient de
Romberg (de 10.73 à 1,30) et la surface est proche de la norme (de 4347 à 667 mm)
(Annexe 4 et 5). Ces résultats montrent que la dépendance visuelle constatée en
début de prise en charge a nettement diminué, et que Mme L a mis en place des
stratégies afin d’améliorer l’équilibre en condition les yeux fermés.
Cette amélioration est également constatée en équilibre dynamique. Dans le plan
sagittal, la longueur (de 650 à 414 mm) et l’amplitude (de 60 à 37 mm) sont dans la
norme en condition les yeux ouverts. Lorsque les yeux sont fermés, les valeurs sont
très supérieures à la norme, mais l’enregistrement est réalisable, ce qui n’était pas le
cas en début de prise en charge. Dans le plan frontal les yeux ouverts, une légère
25
amélioration est constatée et les valeurs sont dans la norme. Les yeux fermés, les
résultats sont très supérieurs à la norme bien que légèrement améliorés pour la
longueur (de 1770 à1667 mm) et la surface (de 190 à149 mm).
Une amélioration de l’équilibration de Mme L est donc mise en évidence par la plate-
forme de posturographie, dans toutes les conditions, et principalement lorsque les
yeux sont fermés.
7.3 Examen sur fauteuil rotatoire
Epreuve rotatoire impulsionnelle
L’épreuve rotatoire impulsionnelle ne montre pas de différence par rapport au début
de la prise en charge. Ces résultats ne sont pas surprenants, étant donné
l’éloignement dans le temps de l’atteinte, et le fait que la rééducation sur fauteuil,
dans le but de symétriser les réponses des deux oreilles, ait été effectuée seulement
sur deux séances, aucune amélioration n’étant constatée.
Tableau 5 : Nombre de nystagmus pendant et suite à des rotations horaire ou antihoraire.
Nombre de nystagmus
per-rotatoire
Nombre de nystagmus
post-rotatoire
Rotation horaire 10/12 0/1
Rotation antihoraire 0/1 0/1
Epreuves rotatoires à vitesse élevée
Concernant les épreuves rotatoires à vitesse élevée, les résultats sont encore une
fois similaires au début de prise en charge, bien que l’écart entre la rotation horaire et
antihoraire ait légèrement diminué. Cette légère diminution pourrait signifier un
rééquilibrage des réponses, cependant ces améliorations n’avaient pas été
constatées lors de la rééducation, et il faut pondérer les résultats, dépendants des
sensations de la patiente à un moment précis, et à la vitesse de rotation réalisée
manuellement, qu’il est difficile à maintenir constante [6].
Tableau 6 : Résultat des tests en fixation et vection, en rotation horaire et antihoraire.
Fixation Vection
Rotation horaire 8 secondes 12 secondes
Rotation antihoraire 5 secondes 8 secondes
26
7.4 Epreuves vestibulospinales
Les épreuves vestibulospinales sont encore une fois peu significatives, étant difficiles
à réaliser par la patiente du fait de déstabilisations trop importantes. Pour le test de
Romberg, une légère déviation vers la droite est de nouveau constatée, et les
épreuves de Fukuda et de Babinski-Weil, bien que moins difficiles à réaliser qu’en
début de prise en charge, ne sont pas significatives.
8 Discussion
En fin de prise en charge, l’équilibration de Mme L est donc améliorée,
principalement en ce qui concerne le maintien de la posture en situation les yeux
fermés. Ces améliorations ont une répercussion concernant les activités de tous les
jours, avec une diminution de la gêne fonctionnelle due aux sensations de
déséquilibres. Cependant, cette gêne reste importante, tout comme les
déséquilibres, et les progrès ne sont pas importants en comparaison à la dernière
prise en charge.
Lors de cette rééducation les exercices visant à rééquilibrer les réponses des deux
oreilles ont été rapidement interrompus, n’ayant pas d’effets positifs. Une des
particularités de la prise en charge est l’ancienneté de l’atteinte, un mécanisme de
compensation vestibulaire s’est mis en place depuis 6 ans, ce qui peut expliquer
l’absence de bénéfices de ces exercices [7]. De plus, la réalisation de tests
caloriques n’a pas été réalisée, ce qui aurait permis d’évaluer de manière précise et
séparément la réponse de chaque canal, et ainsi éviter les biais que comporte
l’examen sur fauteuil rotatoire. En effet, la théorie explique que la rotation du fauteuil
doit être effectuée à une vitesse précise et constante, tout comme l’accélération et la
décélération. Le fauteuil utilisé étant manuel, ces conditions n’ont pas été respectées
[6][11][12]. Une amélioration de l’exploration vestibulaire aurait pu permettre une
meilleure évaluation de l’asymétrie vestibulaire et de l’efficacité des exercices.
Durant cette prise en charge et compte tenu du bilan effectué, les exercices utilisés
ont eu pour objectif principal de diminuer la dépendance visuelle de Mme L.
Cependant il ne faut pas oublier qu’une des fonctions du système vestibulaire est
d’assurer la stabilité du regard [3]. Dans ce but, des mouvements de saccades et de
poursuites oculaires auraient pu être proposés à l’aide d’une barre de diodes
27
électroluminescentes dont ne disposait pas l’établissement [3][4][8][11][12][13]. Les
mouvements oculaires de poursuites vont de 10 à 90°/seconde, et les saccades sont
aléatoires en temps et en amplitude. Cette barre permet les mouvements conjugués
de la tête et des yeux. Ces mouvements ont été intégrés dans des exercices aux
cours de la rééducation, notamment les saccades, mais n’ont pas été travaillés
spécifiquement.
La plate-forme SATEL, utilisée pour l’évaluation de l’équilibration de Mme L est une
plate-forme de posturographie statique. Il existe des plates-formes dynamiques
comme par exemple l’Equitest, qui permettent d’évaluer comment le patient utilise les
trois entrées sensorielles afin de maintenir la posture [3][7][11][17]. Cette plate-forme
peut perturber l’environnement visuel et somato-sensoriel en fonction du
déplacement du centre de gravité du patient. Ainsi, si le centre de gravité se déplace
à une vitesse donnée, la plate-forme basculera selon les mêmes paramètres,
donnant des informations erronées au patient. Le test d’organisation sensorielle
(SOT) comporte six situations [7][11]. Les deux premières correspondent à ce qui a
été réalisé avec le logiciel SATEL, la plate-forme et l’environnement visuel sont
immobiles et l’enregistrement est réalisé, soit les yeux ouverts, soit les yeux fermés.
Pour les 3ème et 4ème situations, l’enregistrement est effectué les yeux ouverts. Une
seule entrée est perturbée, soit l’entrée visuelle, dans ce cas l’environnement visuel
est asservi au déplacement de centre de gravité, soit l’entrée somato-sensoriel, et
dans ce cas c’est la plate-forme qui est asservie. Les 5ème et 6ème situations
permettent d’évaluer la participation de l’entrée vestibulaire, en perturbant les deux
autres entrées. Dans les deux cas la plate-forme est mobile, et soit l’enregistrement
est effectué les yeux fermés, soit l’environnement visuel est également mobile. Ce
type de plate-forme permet une évaluation plus précise sur la façon dont le patient
s’équilibre, et donc de mieux orienter la rééducation. La posturographie dynamique
peut apporter une aide importante à une prise en charge, mais sa principale limitation
est son coût onéreux qui la rende peut accessible [11].
La rééducation vestibulaire est contraignante pour les patients. Elle consiste à mettre
les patients dans des situations dont ils n’ont pas l’habitude, qui leur demandent un
coût énergétique important. C’est une des difficultés rencontrées au cours de cette
prise en charge. En effet, le respect de la fatigabilité est un principe important, mais il
est cependant impératif de placer le patient dans ces situations difficiles afin de
28
mettre en place des stratégies permettant de compenser le déficit. Ainsi, tout au long
de la prise en charge, une attention particulière a été portée sur cet aspect afin
d’adapter au mieux la rééducation à la fatigabilité de la patiente, qui était variable
d’une séance à l’autre ainsi qu’au cours d’une même séance.
9 Conclusion
La prise en charge rééducative de Mme L a permis l’amélioration globale de ses
capacités d’équilibration, diminuant nettement la dépendance visuelle et par
conséquent la gêne fonctionnelle. Cependant, les difficultés restent réelles et les
répercussions dans la vie de tous les jours encore importantes.
Lors de la visite de fin de prise en charge avec le Docteur L, en plus de la gêne
fonctionnelle et des difficultés d’équilibration, la patiente se plaint également de
problèmes de concentration et d’oublis dans la vie quotidienne. Une nouvelle IRM est
donc décidée dans les mois à venir, et un travail avec un ergonome concernant
l’aménagement des conditions de travail va être effectué.
Cette prise en charge m’aura permis d’évaluer la différence de symptômes et de
traitement qu’il peut y avoir pour une même pathologie, du fait de l’éloignement dans
le temps ou non de l’atteinte, et des mécanismes de compensations pouvant être mis
en place, ce qui va au-delà de la prise en charge vestibulaire. Cette expérience me
permettra ainsi de proposer une prise en charge la plus adaptée à une situation
précise et spécifique.
Cette prise en charge m’aura également permis d’approfondir mes connaissances en
ce qui concerne la rééducation vestibulaire qui est un sujet que je trouve
particulièrement intéressant. Cependant, la rééducation vestibulaire est un sujet
complexe et a comme indication de nombreuses pathologies. De plus, elle nécessite
l’utilisation de matériels spécifiques. Des formations complémentaires me semblent
donc nécessaires à effectuer, ainsi qu’un suivi attentif des évolutions à venir
concernant cette rééducation.
Ré fé réncés
[1] Darrouzet V. Franco-Vidal V. Liguoro D. Neurinome de l’acoustique, EMC Oto-
rhino-laryngologie, 2006 ; 20-250-A-10.
[2] Perrin P. Vibert D. Van Neche C. Etiologie des vertiges, EMC Oto-rhino-
laryngologie, 2011 ; 20-200-A-10.
[3] Semont A. La rééducation vestibulaire, kinésithérapie scientifique, 1999 ; n°394 :
p6-26.
[4] Jacquemaud J. Costille M. Apport de la rééducation vestibulaire pour une prise en
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Annéxé 1
Questionnaire EHTEV
Annéxé 2
Appareil de vidéo-nystagmoscopie
Annéxé 3
Générateur opto-cinétique
Annéxé 4
Annéxé 5