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Projet d’appui au renforcement des capacités des municipalités libanaises et du dialogue avec les autorités nationales dans le domaine de l’assainissement Mis en place en partenariat avec : Le Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne (SIAAP) La Ville de Nogent sur Marne Le Programme Solidarité-Eau (pS-Eau) La Fédération des Municipalités du Mont Rihan La Fédération des Municipalités de la Région de Jezzine La Fédération des Municipalités d’Iqlim el Touffah Et avec le soutien financier du Ministère français des Affaires Etrangères Séminaire National d’information sur les techniques d’assainissement naturel au Liban Organisé en partenariat avec l’Agence Française de Développement et la Délégation de l’Union Européenne COMPTE-RENDU

Projet d’appui au renforcement des capacités des ... · - 16 stations en phase de dimensionnement - 13 stations en attente de financement - 1400 millions de dollars nécessaires

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Projet d’appui au renforcement des capacités des municipalités

libanaises et du dialogue avec les autorités nationales dans le

domaine de l’assainissement

Mis en place en partenariat avec :

Le Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne (SIAAP) La Ville de Nogent sur Marne

Le Programme Solidarité-Eau (pS-Eau) La Fédération des Municipalités du Mont Rihan

La Fédération des Municipalités de la Région de Jezzine La Fédération des Municipalités d’Iqlim el Touffah

Et avec le soutien financier du Ministère français des Affaires Etrangères

Séminaire National d’information sur les techniques d’assainissement naturel au Liban

Organisé en partenariat avec l’Agence Française de Développement et la Délégation de l’Union Européenne

COMPTE-RENDU

Présentation du séminaire

Le séminaire a été organisé dans le cadre du projet d’appui au renforcement des capacités des municipalités libanaises et du dialogue avec les autorités nationales dans le domaine de l’assainissement, en partenariat avec le SIAAP, la ville de Nogent-sur-Marne, le pS-Eau, la Fédération des Municipalités du Mont Rihan, la Fédération des Municipalités de la région de Jezzine et la Fédération des Municipalités d’Iqlim el Touffah. Ce projet est financé par le Ministère des Affaires Etrangères français et mis en œuvre avec l’appui local des bureaux d’études Hydroconseil et Madina for Service Development.

Le séminaire s’est tenu à la demande des municipalités partenaires du projet intéressées par les techniques d’assainissement naturel et s’est articulé autour de deux temps forts :

1. La présentation de deux projets pilotes : les stations de traitement par lagunage dans trois villages du Sud, financées par la Délégation de l’Union Européenne (DUE) et la station par Filtres Plantés de Roseaux (FPR) à Bcharré, financée par l’Agence Française de Développement (AFD) ;

2. Une longue session d’échange, de débat et de partage d’expériences sur l’assainissement naturel au Liban entre les participants.

Le séminaire a été organisé et animé par les structures Hydroconseil qui assure l’assistance technique aux projets du SIAAP/pS-Eau au Liban et Madina.

Ouverture du Séminaire

Mot de bienvenue – Accueil des participants par M. Fayssal Zein, Président de la Municipalité de Rihan.

Les trois fédérations partenaires du projet ont une coopération avec le SIAAP depuis 2009 dans le domaine de l’assainissement afin d’améliorer la protection de la ressource en eau dans la région. Ce partenariat a notamment permis l’élaboration concertée de schémas directeurs de gestion des eaux usées dans les trois fédérations.

L’accent a été mis sur le rôle fondamental des municipalités dans le renforcement du secteur de l’assainissement, et l’intérêt des techniques naturelles pour les petites et moyennes municipalités : des coûts d’exploitation réduits, pas de consommation énergétique, un faible besoin de compétences techniques pour l’exploitation et un traitement des eaux efficace. Propos introductifs – Présentation de la stratégie du Ministère de l’Energie et de l’Eau (MEE) en matière d’assainissement par Mme Randa Nemer, Conseillère du Ministre de l’Energie et de l’Eau.

La stratégie de traitement des eaux usées, adoptée par le Ministère de l’Energie et de l’Eau en 2012, a pour objectifs de :

- limiter le gaspillage des eaux en réutilisant les eaux traitées pour l’agriculture, l’industrie et les espaces verts ;

- protéger l’environnement, la santé publique et les ressources hydriques en collectant et traitant toutes les eaux usées ;

- garantir la viabilité financière du secteur en assurant le recouvrement des coûts par l’application du principe pollueur-payeur.

La stratégie du MEE se fonde sur le schéma directeur pour l’assainissement en date de 1982 et mis à jour en 1994. La mise en œuvre de ce schéma directeur prévoyait la construction de douze stations d’épuration côtières et de 42 stations continentales couvrant les besoins de la population. Sept des

douze stations côtières ont été construites dont deux sont opérationnelles. Des 42 stations continentales, quatre sont construites et deux sont opérationnelles.

54 stations d’épuration sont donc nécessaires pour traiter 95% des eaux usées. Or les petites stations sont celles qui font défaut, ce pourquoi la collaboration avec les municipalités est importante pour mettre en place ces projets nécessitant peu d’entretien.

En 2010, le secteur de l’assainissement a été évalué en vue de réaliser la stratégie du MEE. Les chiffres ci-dessous montrent la situation de l’assainissement au Liban en 2010 :

Suite à cette évaluation, les problèmes suivants ont été identifiés :

- pas de politique sectorielle claire ; - une approche fragmentée de la collecte et du traitement ; - pas de réutilisation des eaux traitées ; - pas d’encadrement réglementaire du prétraitement des eaux industrielles ; - des retards excessifs dans la réalisation des projets ; - pas de redevance d’assainissement couvrant les coûts d’exploitation et de maintenance ; - un cadre légal et institutionnel faible.

Pour répondre à ces manques, la stratégie du MEE fixe les objectifs suivants :

- le passage de 60% d’eaux usées collectées et de 8% d’eaux usées traitées à 80% d’eaux collectées et traitées d’ici 2015, et à 95% d’ici 2020 ;

- le passage de 0% de réutilisation des eaux traitées en 2010 à 20% d’ici 2015, et 50% d’ici 2020 ;

- le traitement secondaire et la réutilisation de toutes les eaux usées des zones situées à l’intérieur des terres, et le traitement secondaire des eaux usées de la zone côtière quand la réutilisation de ces eaux se justifie économiquement ;

- le prétraitement de toutes les eaux usées du secteur industriel d’ici 2020 ;

- la couverture de l’intégralité des coûts d’exploitation d’ici 2020 par la mise en œuvre du principe « pollueur-payeur ».

Cinq initiatives stratégiques ont été identifiées pour répondre à ces objectifs :

- un programme d’investissement intégré et priorisé ; - des mesures légales, réglementaires et politiques pour mettre en place et réguler des

standards nationaux ; - des mesures institutionnelles pour définir des responsabilités et créer des compétences pour

l’exécution du service ; - des mesures financières pour la viabilité et l’accessibilité des services ; - des mesures pour optimiser la participation du secteur privé dans le domaine de

l’assainissement.

Les investissements ont été découpés en court et long terme. Un résumé avec les financements attendus par acteur est présenté ci-dessous :

Le partage des coûts d’investissement entre les différents acteurs sur le court terme est représenté ci-dessous :

Un découpage de l’investissement nécessaire sur le long terme est présenté ci-dessous :

Les principales réussites suite à la mise en place de la stratégie sont :

- la réalisation des schémas directeurs d’assainissement de la Bekaa et de Beyrouth-Mont Liban ; ceux du Nord et du Sud Liban devraient être disponibles en juin 2016 ;

- vingt projets ont été mis en place, bénéficiant à 30% de la population ; - des tarifs d’assainissement ont été mis en place sur le principe de pollueur-payeur ; ils sont

prélevés sur une partie de la facture d’eau potable, soit 5000 LL par an par habitation non raccordée à une station d’épuration et 20 000 LL par an par habitation raccordée à une station d’épuration fonctionnelle ;

- la mise en place de petites stations d’épuration naturelle à faible coût, essais de nouvelles technologies permettant la réutilisation de l’énergie produite, dans une vingtaine de villages dans le pays.

La situation de l’assainissement au Liban en 2015 est la suivante :

- 340 millions de m3 d’eau usée générée - 65% d’eau usée collectée - 25% d’eau traitée ou prétraitée - 12 stations opérationnelles - 4 stations construites mais non opérationnelles - 9 stations en construction - 16 stations en phase de dimensionnement - 13 stations en attente de financement - 1400 millions de dollars nécessaires pour 54 projets supplémentaires

Présentation des deux projets pilote d’assainissement naturel

Présentation du projet de création de la station d’épuration de filtres plantés de roseaux à Bcharré, par M. Assem Fidawi, Responsable du secteur Eau et Assainissement à la division de la planification et de la programmation au Conseil du Développement et de la Reconstruction (CDR), M. Walid Abi Abdallah, ingénieur de l’entreprise ENB, Mme Nathalie Kayrouz, Directrice au sein de la Fédération

des municipalités de Bcharré et M. Samuel Lefèvre, Directeur adjoint de l’Agence Française de Développement à Beyrouth.

Le contexte du projet

Des études financées par le Fonds Arabe d’Investissement puis par l’AFD visaient à mettre en place un schéma directeur avec une gestion intégrée des ressources en eau. C’est un outil important qui permet de définir les lieux d’implantation des stations. Le schéma directeur d’assainissement de Bcharré préconise le traitement de la moitié des eaux usées par des techniques naturelles. Son extension à toute la vallée de la Qadisha est actuellement à l’étude, il prévoit la mise en place de vingt nouvelles stations, sous financement de l’AFD et de l’Etat libanais. L’importance de ne pas se focaliser uniquement sur l’assainissement dans les zones côtières, au risque d’oublier les zones intérieures et en altitude, a également été soulignée.

La démarche menée à Bcharré faisait partie d’un projet d’adduction d’eau potable et d’assainissement des eaux usées au Liban Nord, prévoyant notamment l’extension des moyens de gestion mis en œuvre au service de l’eau de Tripoli à l’ensemble du périmètre de l’Etablissement des Eaux du Liban Nord (EELN), et un appui sur le secteur de l’assainissement avec le diagnostic et l’inventaire des ouvrages de Tripoli. Le volet institutionnel a été abandonné et le budget a été reporté à la demande du gouvernement libanais sur un projet pilote de station d’épuration par FPR, afin de convaincre les autorités et les habitants de l’intérêt de cette technique.

La finalisation des éléments administratifs et financiers de ce projet a été effectuée en 2012, le CDR a lancé les travaux en octobre 2012 et la station a été mise en fonctionnement en juillet 2013. Le montant final d’investissement pour ce projet est de 621 173,45 $, dont 297 022,34 $ pour les réseaux et 307 317,50 $ pour la station. Celle-ci fonctionne correctement, excepté pour un quartier non prévu dans le projet initial, et pour lequel il a fallu rajouter une station de pompage. Celle-ci devrait être mise en fonctionnement au mois d’avril 2016. La station est désormais gérée par la Fédération des Municipalités de Bcharré, conjointement avec l’EELN avec lequel une convention doit être signée depuis plusieurs années.

La technologie choisie

La région de Bcharré étant classée au patrimoine mondial de l’Unesco, les responsables locaux ont souhaité agir pour la protection de son environnement. Un des enjeux de cette région est donc de mettre en place des stations d’épuration qui s’intègrent au paysage pour conserver ce label.

La technologie des FPR est encore jeune puisqu’elle date de la fin des années 70 en France, et des années 50 en Angleterre. Les avantages de cette technique sont : un investissement raisonnable et un coût d’entretien peu élevés - dû notamment à l’absence de coûts d’électricité -, une technologie qui supporte les conditions climatiques hivernales, accepte les variations de population entre l’été et l’hiver et assure un traitement des eaux efficace permettant leur réutilisation en agriculture, un taux de production de boues faible et pas de dégagement d’odeur. Il est possible de la mettre en place dans des municipalités rurales, montagneuses, et à habitat dispersé. Elle est spécialement adaptée aux petites municipalités jusqu’à 2000 habitants, notamment du fait d’une exploitation simple. Enfin, elle a une bonne intégration paysagère.

La description technique de la station est présentée dans l’encart suivant. La technique étant innovante au Liban, les ingénieurs responsables de son dimensionnement ont suivi une formation spécifique en France.

Dans ce système, l’eau est épurée à travers des filtres composés de graviers et plantés de roseaux. Les graviers sont composés de basalte cassé, qui résiste au froid en montagne. Il est intéressant d’utiliser la terre naturelle quand c’est possible pour éviter des coûts supplémentaires de matériaux.

Le système est composé d’un prétraitement (1) puis de deux filtres d’une superficie de 2 à 4 m2 par habitant, répartis sur deux niveaux (2) (3), dans un terrain légèrement en pente pour obtenir un dénivelé de 2-3 m entre les deux niveaux. Les filtres sont regroupés par trois, chacun faisant 40 m de longueur et 12 m de large, avec une profondeur de 1,5 m. Chaque filtre est séparé de l’autre par un muret de béton pour que l’eau ne passe pas d’un compartiment à l’autre. Chaque semaine, on alterne l’utilisation des compartiments pour permettre au technicien d’enlever les mauvaises herbes poussant dans les filtres.

Les filtres sont composés d’une première couche en fond de bassin de 40 cm de graviers, d’une deuxième couche de 40 cm avec des graviers plus fins, puis d’une troisième couche supérieure de 30 à 40 cm de poudre fine blanche. Une fois passée à travers les différentes couches de graviers, l’eau est évacuée par un point bas du filtre puis est envoyée dans le deuxième niveau.

Une membrane imperméable est nécessaire pour éviter l’infiltration des eaux usées dans le sol, ainsi qu’une couche de géotextile pour empêcher les racines des plantes environnantes de transpercer le filtre. Des regards de 2 m3 sont disposés avant chaque filtre avec pour objectif d’accumuler l’eau pour la déverser ensuite en une seule fois sur les filtres.

Un compteur est installé pour contrôler la quantité d’eau entrant et sortant du système et savoir si des fuites ont lieu dans le système, ainsi que la quantité d’eau filtrée.

Pour la Station de Bcharré, une surface de 2000 m2 a été nécessaire pour construire la station, celle-ci desservant 40 maisons, soient environ 300 personnes. 1750 m de réseaux ont été construits.

L’entretien repose sur un désherbage régulier des filtres les premières années. Au bout de la troisième année, le désherbage n’est plus nécessaire et le jardinier qui s’occupe des filtres ne vient qu’une fois par semaine pour ouvrir et fermer les tuyaux d’alimentation des filtres. Les roseaux sont

également coupés trois fois par an. Une attention particulière doit être portée sur le traitement des boues d’épuration qui doivent être évacuées tous les 4-5 ans, et sur la réutilisation des déchets de coupe des roseaux, en compostage par exemple. L’exploitation a dans un premier temps été appuyée par le constructeur, avec quelques problèmes recensés comme une inondation ou le fort développement d’algues.

L’implication des acteurs

La mise en place du projet a nécessité de nombreuses réunions de suivi avec les municipalités, les Présidents de fédérations et l’Etablissement des Eaux du Liban Nord. La totalité des 22 villages de la région ont participé à la concertation, même ceux qui ne sont pas dotés de municipalités. Sa réussite doit beaucoup à la collaboration entre tous les acteurs, dont les municipalités, qui y ont pris part même si elles n’ont pas d’obligation légale au regard de l’assainissement.

Les parties prenantes du projet étaient motivées et un travail important de sensibilisation a été fait auprès des habitants pour favoriser l’acceptation de l’implantation d’une station d’épuration près de chez eux. Les premières réunions ont été faites au niveau du Caza puis, une fois que la zone d’implantation a été identifiée, elles se sont limitées aux habitants desservis par la station. Celles-ci se sont déroulées à la municipalité en présence d’un ingénieur du CDR qui a expliqué la technique aux usagers. Durant six mois, des experts français sont venus présenter les avantages et les limites que la technique rencontre en France. Les habitants ont ensuite donné leur accord de principe, sous condition d’arrêt en cas de problème. Après trois ans de fonctionnement, les habitants sont satisfaits et plusieurs autres villages souhaitent mettre en place le même système.

Présentation du projet de création de station d’épuration de lagunages dans le Sud Liban, par M. Assem Fidawi, Responsable du secteur Eau et Assainissement à la division de la planification et de la programmation au Conseil du Développement et de la Reconstruction, M. Samar Nsouli, ingénieur chez Arab Contractors, M. Kassem Oleik, Maire de Yohmor et M. Cyril Dewaleyne, Chargé de programme Infrastructures, Eau et Energie à la Délégation de l’Union Européenne

L’historique du projet

Le projet de stations d’assainissement par lagunage dans la région de Nabatiyeh a été conçu suite à la guerre de 2006 pour appuyer le Liban dans son développement et protéger la rivière Kasmieh dont l’eau est utilisée pour l’agriculture. Le site est situé à 80 km de Beyrouth dans une région montagneuse entre 120 et 700 m d’altitude. Le projet, financé à partir de 2012 par la DUE au Liban, a été mis en œuvre par le CDR.

Le projet a subi un retard considérable suite au changement du site d’implantation d’une des stations, refusée par la population locale, ce qui a également présenté une charge financière supplémentaire importante. La nécessité de déminer une des zones choisies a aussi eu pour conséquence une accumulation de retard.

La première phase de travaux a commencé en mars 2011 avec la pose des réseaux de collecte pour les villages de Yohmor et Kfarsir puis celui de Zaoutar en décembre de la même année. Le projet a été prolongé jusqu’en mars 2016, son coût total est de 10,59 millions d’euros dont 490 000 € au niveau local. Les réseaux ont coûté 665 000 €, 740 000 € et 995 000 € pour Yohmor, Zaoutar et Kfarsir respectivement, et les stations 2 400 000 €, 3 050 000 € et 2 780 000 € respectivement.

La technologie choisie

La description technique est présentée dans l’encart suivant. Le lagunage est une technique efficace permettant de réutiliser les eaux traitées pour l’irrigation, option vitale pour la région, et ayant des coûts de construction et d’exploitation faibles.

Pour les trois stations, 40 km de réseau ont été construits, 1050 maisons sont connectées aux réseaux de collecte et les trois stations ont une capacité maximale de 20 000 équivalent-habitants. Dans la pratique, 7000 à 8000 habitants seront desservis pour 700 m3 d’eau traitée, ce qui induit un

La première étape de traitement consiste en un prétraitement minutieux avec un dégrilleur pour se débarrasser des bois et sacs contenus dans l’eau et un dégraisseur pour enlever les huiles et le sable (1). Un dégrilleur manuel a également été installé pour les cas de panne. L’eau passe ensuite dans plusieurs bassins communiquant fonctionnant avec des bactéries aérobies et/ou anaérobies qui dégradent la matière organique, respectivement en milieu contenant et ne contenant pas d’oxygène. Les eaux passent dans un premier bassin anaérobie (2), puis dans un bassin facultatif (3) avec la couche d’eau supérieure aérobie et la couche inférieure anaérobie. Elles passent enfin dans le bassin de maturation (4) dans lequel les rayons UV du soleil finissent de stériliser les eaux. Des rayons UV sont ajoutés par moyen électromagnétique pour une meilleure épuration. Les bassins peuvent tous être by passés pour la maintenance ou l’extraction des boues.

Une membrane géotextile est mise en fond des bassins pour que les eaux ne s’infiltrent pas dans le sol. Un compteur est également mis en place pour connaître la quantité d’eau traitée. La station comprend également une route de service autour de la station, un laboratoire pour analyser les paramètres des eaux (taux d’oxygène, pH, etc.), un bureau pour les exploitants et un générateur pour l’éclairage du site.

Le critère majeur pour la mise en place de cette technique est une terre vaste et bon marché. L’exploitation ne nécessite qu’une seule personne semi-qualifiée mais l’opérateur doit être soutenu par des experts en cas de panne. Il est également nécessaire d’avoir un chimiste pour analyser les eaux chaque semaine ou deux.

surdimensionnement des ouvrages. 80% de la population du village de Yohmor sera desservie, le maire envisage donc d’étendre la couverture aux 20% des habitants restants.

Une petite portion des eaux traitées sera utilisée pour nettoyer le dégrilleur et le reste peut être réutilisé pour l’agriculture non destinée à la consommation humaine. Dans ce cas un camion sera nécessaire pour récupérer les eaux. Dans le cas contraire, elles seront rejetées dans la rivière Litani.

Les coûts de maintenance sont de 7000 à 8000 $ par an en main-d’œuvre, 500 $ en pièces de rechange, 7000 $ pour le générateur. Ce dernier coût peut être évité si le dégrilleur manuel est utilisé à la place du dégrilleur automatique.

L’implication des acteurs

La Délégation de l’Union Européenne a soutenu le projet à la demande du CDR, suite à la nécessaire révision du dimensionnement initialement prévu et à un manque de financement. Le plan financier n’était pas achevé, notamment pour l’exploitation qui doit être financée par le gouvernement libanais.

La municipalité de Yohmor a accompagné le CDR et les entrepreneurs dès les débuts du projet et va prendre la main sur l’exploitation de sa station, en coopération avec le CDR et sous la supervision de l’Etablissement des Eaux du Liban Sud. Elle sera financée pendant trois ans par le CDR, la municipalité assurant la main d’œuvre non technique. Suite à cela, la municipalité assurera seule l’exploitation.

De même, le rôle de la municipalité de Yohmor a été important pour régler la question de l’emprise foncière, les lagunes s’étendant sur une superficie importante. Les cadastres n’ayant pas pris en compte les réseaux, 5 km de réseaux passent par des terrains privés pour acheminer l’eau en gravitaire. La municipalité ne souhaitant pas lancer un plan d’expropriations, elle a donc dû impliquer les habitants et ainsi obtenir des « contrats sociaux » avec les propriétaires.

Des difficultés ont été rencontrées avec la population pendant la mise en œuvre des travaux du fait du manque d’information claire. Le manque de participation des autres municipalités au cours du projet a été soulevé, notamment pour jouer un rôle de sensibilisation et d’explication auprès des usagers, et anticiper sur leur sensibilisation à la participation financière au recouvrement des coûts d’exploitation des ouvrages grâce au paiement du service d’assainissement. L’importance de faire participer la population aux projets, et de sensibiliser les maires aux problèmes liés à l’assainissement a été soulignée pour assurer la pérennité des projets.

La DUE a souligné le manque de ressources humaines disponibles au CDR. Les compétences techniques des équipes ne font aucun débat mais le CDR est en charge de trop nombreux projets en même temps et les personnes responsables n’ont que rarement l’opportunité de se consacrer à la bonne mise en œuvre de tous les projets. Il est également nécessaire de faire pression sur les autorités nationales pour faire adopter des lois de protection de l’environnement.

Débat avec la salle

Certains éclaircissements sur les projets ont été demandés par les participants.

Le projet de lagunes

La surface nécessaire est d’environ 10 m2/hab, mais celle-ci varie en fonction de nombreuses considérations techniques. Un des désavantages de la technique est la difficulté de contrôler les odeurs, ce qui nécessite de trouver un endroit éloigné des habitations.

Le projet de FPR

La coupe des roseaux n’influe pas sur la capacité de traitement des filtres car ceux-ci sont coupés à plus de 50 cm de hauteur. Les eaux entrantes et sortantes ont été analysées à Bcharré avec une

épuration de 95%. Pour les vingt stations d’épuration prévues dans la Qadisha, des économies d’échelle seront faites en employant environ trois jardiniers pour les 13-14 stations par filtres plantés, les autres stations étant à boues activées. L’investissement, réseaux compris, a représenté 1700 $/hab du fait de la mise en place d’une station de pompage non initialement prévue, contre en moyenne 900$/hab pour les stations à boues activées.

Le suivi des projets

La DUE a indiqué avoir réalisé des réunions de suivi et de coordination avec le CDR durant la phase de mise en œuvre du projet. Elle espère répliquer ces projets pilotes de lagunes s’ils s’avèrent performants et souhaite pour cela que les municipalités prennent en charge l’exploitation et transmettent les bonnes pratiques ainsi que les points à améliorer. Du côté de l’AFD, le suivi de l’exploitation de l’ouvrage a été signalé comme problématique puisqu’il est difficile d’obtenir le rapport d’exploitation complet du projet de FPR - autre que les résultats d’analyse des eaux -, qui expliquerait les difficultés rencontrées et énoncerait des éléments qualitatifs sur la répartition des rôles. Le cabinet d’études en charge du suivi propose des éléments de suivi à l’AFD, et celle-ci fait des missions de suivi pour déterminer les points d’amélioration.

Conclusion de la présentation des projets

L’analyse croisée des deux projets fait ressortir deux éléments complémentaires intéressants :

Le projet de FPR à Bcharré a été mis en œuvre en deux ans, ce qui est rapide pour un projet d’assainissement au Liban dont la durée de réalisation est généralement de l’ordre de dix ans comme c’est le cas pour le projet de lagunage dans le Sud Liban.

Le gain de temps sur la Fédération de Bcharré peut s’expliquer par l’adhésion en amont de toutes les parties prenantes au projet mais aussi par le contournement de certains blocages des riverains sur le passage des réseaux via la mise en place d’une station de pompage. Cette option a accéléré la mise en œuvre du projet mais a eu un impact sur son coût et va constituer un poids sur l’exploitation générale du système (risque de pannes, coût des pièces de rechange, coût énergétique).

Le projet de lagunage a été beaucoup plus long dans sa mise en œuvre et a dû être accepté au fil du temps par les parties prenantes locales, mais il a misé après son lancement sur la concertation avec les habitants pour faire accepter le passage de réseaux sur des terrains privés.

Dans ces deux projets, des mécanismes sont intéressants pour le Liban et peuvent servir d’exemple :

- L’obtention en amont du projet de toutes les parties prenantes concernées ; - La place de la concertation avec les populations locales.

Ils font cependant ressortir le poids des contraintes de la négociation locale sur les durées d’exécution ou sur la structuration des projets lorsque l’information et la sensibilisation des populations n’ont pas été anticipées bien en amont du démarrage des travaux.

Synthèse du débat : Quel avenir pour l’assainissement naturel au Liban ? Intervenants : M. Maroun Moussallem, PDG de l’Etablissement des Eaux de la Bekaa, M. Assem Fidawi, Responsable du secteur Eau et Assainissement à la division de la planification et de la programmation au CDR, M. Fayssal Zein, Président de la Municipalité de Rihan, M. Khalil Harfouche, Président de la Fédération de Jezzine, M. Hussam Hawwa, Directeur de Difaf, M. Samuel Lefèvre, Directeur adjoint de l’AFD à Beyrouth et Mme Silvia Naveira Campos, Chargée de programme section développement durable à la Délégation de l’Union Européenne

La collaboration entre les acteurs de l’assainissement

Le rapprochement entre les Etablissements des Eaux et les municipalités est un élément essentiel à la bonne conduite des projets d’assainissement. Le PDG de l’Etablissement des Eaux de la Bekaa a souligné l’importance d’un partenariat avec les municipalités car les Etablissements des Eaux (EE) n’ont pas la propriété des terrains disponibles pour réaliser les projets d’assainissement. Les communes faisant face à un manque de compétences techniques sur l’assainissement, un partenariat avec l’EE comblerait ce manque, tout en permettant à ce dernier de mettre en place des ouvrages d’assainissement sur des terrains communaux. De plus, pour assurer la durabilité des projets, la sensibilisation des habitants aux contraintes d’exploitation et leur participation financière au fonctionnement du service selon le principe de pollueur-payeur est nécessaire, les municipalités pourraient donc être en charge de ce volet. Il a été rappelé à ce titre que le décret 377 créant les Etablissements des Eaux ne fait pas perdre leurs prérogatives aux municipalités. La gérance des stations revient aux EE mais celles-ci peuvent la déléguer aux municipalités.

Un autre exemple de collaboration permettant la mise en œuvre de projets réussis est celle entre le CDR et la Fédération de Jezzine dans le cadre du projet de la Maison de la Forêt. Elle a permis la mise en place de filtres plantés de roseaux traitant les eaux de 50 maisons, ainsi que du schéma directeur, et a consisté en un échange d’informations entre les deux institutions. Le CDR a d’ailleurs confirmé qu’il accueillait favorablement les systèmes d’assainissement naturel qui permettent de desservir des localités trop petites pour qu’il soit économiquement intéressant de mettre en place de grands systèmes d’épuration. Ils seront pris en compte dorénavant dans les études pré-projet.

Le rôle de la sous-traitance technique a par ailleurs été jugé trop important dans les projets d’assainissement au Liban. Les maîtres d’œuvre techniques et les constructeurs sont considérés comme des piliers du projet qui doivent détenir toutes les réponses, alors qu’il faudrait investir dans un meilleur encadrement institutionnel. En effet, la vision du système d’assainissement dans son ensemble et la prise en compte de tous les aspects d’un projet sont deux éléments auxquels les sous-traitants ne répondent pas et qui permettraient d’augmenter les chances de réussite d’un projet. En ce sens, les municipalités devraient participer au monitoring des systèmes, avec le soutien du secteur privé si besoin.

Quant au rôle du Ministère de l’Environnement, il consiste à contrôler les études environnementales réalisées et de les compléter lorsque nécessaire.

Le financement de l’assainissement

Un point sur le coût de l’assainissement a été fait avec un rappel sur le fait que l’assainissement coûte 9 milliards de Livres Libanaises en facture d’électricité par an à l’EE de la Bekaa, qui ne peut s’en acquitter. Les stations utilisant des techniques naturelles seraient donc intéressantes sur le plan financier car moins consommatrices d’électricité et pourraient être privilégiées dans les régions peu densément peuplées. Il peut cependant être risqué de mettre en place du lagunage dans la Bekaa, du fait de nappes phréatiques généralement hautes. Ces projets nécessitent des études géotechniques poussées en amont.

Plusieurs maires ont souligné la difficulté pour les municipalités de trouver des financements, déplorant que certaines régions soient favorisées par l’Etat, soutenu par les principaux bailleurs de fonds. A titre d’exemple, l’AFD a pour mission de travailler avec le CDR à la demande de l’Etat libanais et ne peut pas soutenir directement des projets portés par des municipalités. La DUE tente, quant à elle, de trouver le meilleur montage institutionnel pour chaque projet. Dans ce cadre, il a été rappelé que les EE pouvaient recevoir des financements directs au même titre que le CDR. La possibilité de financer directement les municipalités est aussi une option qui pose cependant la question de leur capacité à gérer ces fonds. Dans ce cas, il serait nécessaire de travailler en

concertation avec les Etablissements des Eaux qui devront déléguer une partie de leurs prérogatives aux municipalités, ce qui impliquerait la définition d’un cadre institutionnel et d’un schéma économique clairs. Un point de vigilance toutefois : le financement complet des systèmes d’assainissement par des partenaires étrangers accélère la mise en œuvre du projet mais diminue l’implication des habitants et des autorités locales et nationales.

Ces techniques naturelles semblent être une bonne alternative pour les petites municipalités avec peu de moyens. Cependant au vu des chiffres évoqués dans les présentations, se pose d’une part la question de la réelle possibilité de financement par des municipalités, et d’autre part le besoin d’une explication de ces coûts élevés pour le lagunage. A titre de comparaison, la station par boues activées de Rihan a coûté 500 000 $ d’investissement pour un traitement de 820 m3 par jour. Dans le même sens, n’ayant pas trouvé de financements externes, la Fédération de Baalbek envisage de financer elle-même une station de lagunage en utilisant les revenus de la téléphonie mobile. Les excavations sont estimées à 150 000 $, soit 4 $ le m2 alors que les projets du ministère ont coûté 8 $ le m2. Cela tiendrait au fait que la municipalité ait contacté des entrepreneurs locaux et qu’elle connaisse les coûts réels des travaux.

Des précisions ont donc été demandées sur les coûts d’investissement des techniques naturelles. Ceux-ci sont généralement plus élevés que les techniques traditionnelles mais ont des coûts d’exploitation plus bas. Pour le système lagunaire, un coût de 300 $ au m2 peut être compté, et 200 $ au m2 pour les filtres plantés (hors réseaux). De nombreux paramètres techniques doivent cependant être pris en considération dans le calcul du coût, dont l’objectif de qualité de l’eau. Le CDR a quant à lui rappelé que les projets des municipalités et du CDR ne peuvent pas être comparés car ces derniers se font pour des volumes de traitement plus importants, à l’échelle de plusieurs municipalités.

La planification

La mise en œuvre du schéma directeur est quelquefois problématique. Par exemple, dans le cadre du schéma directeur de la Bekaa, la ville de Baalbek a bénéficié de la construction d’une station d’épuration mais celle-ci impose des charges conséquentes à la municipalité, et les odeurs dérangent les riverains. Cela dénote un manque de concertation avec la municipalité, qui n’est pas satisfaite de la mise en œuvre de ce schéma. Plusieurs stations ont été construites conformément à celui-ci mais elles ne sont pas opérationnelles.

Il a été suggéré qu’un plan directeur soit réalisé pour la mise en place de techniques d’assainissement naturel ; il devra prendre en compte la répartition des responsabilités entre les acteurs, notamment en termes d’exploitation. Cette remarque traduit un manque d’information des municipalités, l’actuel schéma directeur de la Bekaa proposant notamment un traitement des eaux usées par lagunage sur certains territoires.

D’autres techniques de traitement pourraient également être adoptées dans les schémas directeurs. Par exemple, les réacteurs anaérobiques exigent peu d’emprise foncière, s’intègrent au paysage et l’eau traitée peut être réutilisée pour l’irrigation. Il est cependant difficile de désigner une technique comme étant la plus appropriée, chaque choix devant être déterminé au cas par cas et soutenu par une étude de faisabilité.

Le traitement des boues

Le Ministère de l’Environnement a mis en avant l’incohérence qui consiste à investir massivement dans le traitement des eaux usées alors que les boues d’épuration sont ensuite jetées dans la nature, souvent à côté de la station. Leur traitement demandant beaucoup de terrain et de technologies, les systèmes naturels, produisant moins de boues, sont plus intéressants. La technique de traitement

des boues par FPR va d’ailleurs être mise en place dans la municipalité de Rihan pour traiter les boues d’épuration de la station. Elles seront par la suite réutilisées pour améliorer les sols en agriculture. Cette solution présente cependant un inconvénient au Liban où les eaux domestiques et industrielles sont mélangées, puisque les boues issues d’eaux usées industrielles ne peuvent pas être utilisées en compost. Le CDR a réalisé un plan directeur pour le traitement des boues d’épuration à l’échelle nationale mais celui-ci n’a pas encore été validé au niveau national.

Les limites de ces projets

Les limites de ces projets sont en grandes parties identiques à celles rencontrées dans d’autres projets d’infrastructure au Liban : manque de concertation entre les acteurs, d’ingénierie sociale, d’anticipation sur les modalités et le financement de l’exploitation et sur le traitement des boues. Pour l’instant les usagers ne payent que marginalement l’assainissement de leur eau, ce qui ne peut rendre le secteur viable. Une demande a été faite pour que les bailleurs de fonds et le CDR œuvrent dans le sens de business plans qui couvrent les coûts d’exploitation pour éviter de transmettre un projet financièrement non viable aux municipalités. De la réflexion menée, il résulte que même si un projet pilote est une réussite, tant que le cadre sectoriel national n’est pas amélioré, ce projet ne pourra pas être massivement répliqué à l’échelle nationale.

Un autre élément à prendre en compte : l’accès à l’information globale sur ces projets est limitée du fait du fractionnement de la maîtrise d’ouvrage et de la mobilité des interlocuteurs. Cela limite également la vision de l’équilibre financier d’un projet, les coûts d’investissement et d’exploitation n’étant pas mis en relation et partagés. La question du dimensionnement des stations a aussi été évoquée, les calculs de population ayant été jugés trop optimistes, ce qui conduit à la mise en place de stations surdimensionnées, qui ne fonctionnent pas à pleine charge et se détériorent tout en ayant un coût très élevé. Enfin, il a été rappelé l’importance de sensibiliser les habitants aux problématiques de l’assainissement dans ces projets.

Conclusion et clôture

Le séminaire s’est conclu par un rappel sur le fait que ces systèmes d’assainissement naturel sont innovants et intéressants pour le Liban, mais souffrent d’un manque de retour d’expérience. La maîtrise d’ouvrage fragmentée reste un facteur limitant pour les projets, empêchant d’en mener une analyse et un suivi-évaluation en profondeur. Cela doit soulever des réflexions sur l’ingénierie sociale et la viabilité économique de ces projets.

M. Khalil Harfouche, Président de la Fédération des Municipalités de la Région de Jezzine, a clôt le séminaire en évoquant les points saillants évoqués durant la journée :

- il est nécessaire de mettre en place des schémas directeurs bien pensés avant de réaliser d’autres projets d’assainissement ;

- la coordination entre les différentes parties prenantes est très importante pour la réussite des projets et il faut renforcer la communication entre les acteurs ;

- il y a un fort besoin de campagnes de sensibilisation des usagers à l’assainissement naturel.

Il a achevé le séminaire sur une question : faut-il transférer les compétences d’assainissement aux municipalités ?