Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

Embed Size (px)

Citation preview

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    1/37

    Renaud MICHEL

    Psychologue praticien

    Charg de Cours

    Universit Paris Descartes

    Enseignement dans le cadre du D.U. dart en thrapie et en

    psychopdagogie

    Psychologie du dveloppement : de la naissance

    ladolescence

    Cours N1

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    2/37

    Cours N 1 : Introduction la psychologie du

    dveloppement. Gnralits, point de vue socio-historique

    (2h)

    Plan :

    1. Dfinitions et spcificits de la psychologie du dveloppement infanto-

    juvnile

    2. Quelques thories essentielles sur le dveloppement humain

    3. Les diffrents types de facteurs de dveloppement chez ltre humain

    4. Quelques rfrences socio-historiques sur le statut socital du bb, de

    lenfant et de ladolescent

    1. Dfinitions et spcificits de la psychologie du dveloppement infanto-

    juvnile :

    Pour amorcer cette rflexion, nous devons explorer les objectifs spcifiques

    de la psychologie du dveloppement. Cette discipline explore le fonctionnement

    humain en ciblant les cinq axes suivants :

    L'analyse des processus de changements dveloppementaux de l'tre

    humain de sa naissance l'ge adulte, jusqu' la fin de la vie.

    L'tude des multiples facteurs et de leurs interactions qui influencent le

    dveloppement humain.

    L'tude des continuits dveloppementalesqui se manifestent au cours de

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    3/37

    la vie.

    Une dmarche cherchant dterminer si ces changements et ces continuits

    sont communs aux individus de toutes les cultures, d'une mme culture, d'un

    mme groupe au sein d'une culture particulire ou, enfin, s'ils sont

    spcifiquement individuels.

    La comprhension des origines de ces changements et de ces continuits,

    c'est dire l'influence de la nature (l'inn, l'hrdit) et de la culture (l'acquis,

    l'influence du milieu)

    Chez l'enfant et l'adolescent, la notion de dveloppement est associe une

    priode de changements rapides et norms en rfrence des ges relativement

    fixes. Sa finalit renvoie globalement la notion de maturit. Celle ci implique l'ide

    d'adaptation l'environnement, ide troitement lie celle de l'autonomie du sujet.

    La progression dveloppementale passe par des stades successifs qui offrent

    au sujet de nouvelles capacits (notamment sociales, cognitives et sensorimotrices)

    qui apparaissent notamment dans la clinique du Normal- en suivant des processus

    volutifs. Ceux-ci vont rendre oprationnels les potentialits de l'individu en

    dveloppement. Ils viennent videmment favoriser les capacits dadaptation ainsi

    que lautonomie du sujet chaque phase de dveloppement.

    En rsum, la psychologie du dveloppement infanto juvnile nous incite

    nous interroger sur les continuits et les discontinuits qui rgissent les diffrentes

    tapes de la vie. Elle n'intervient jamais pour simplifier le regard du clinicien sur la

    complexit de la vie humaine : elle apporte donc de nombreuses rponses certaines

    sur le dveloppement humain mais pose galement des questions pouvant parfois

    restant ouvertes.

    ---------

    Nous pouvons ds maintenant prciser que le dveloppement humainrecouvre plusieurs domaines complmentaires :

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    4/37

    domaine des interactions avec l'environnement

    sphre sensori-motrice et aspects psychomoteurs

    sphre cognitive

    sphre psychoaffective

    Dans ces diffrents champs dapprciation, l'individu volue de faon

    complexe et rythme pour suivre sa propre ligne de dveloppement au cours du

    temps. Le regard du clinicien doit ncessairement prendre en compte ces diffrentes

    dimensions pour laborer ses apprciations et ainsi apprhender l'individu dans sa

    globalit.

    Par exemple, un enfant peut prsenter un niveau intellectuel normal

    (cognition) tout en manifestant des troubles psychoaffectifs massifs (angoisses de

    envahissantes, organisations psychotiques, troubles identitaires, etc.) ou

    d'importantes difficults se situer dans son environnement.

    L'valuation de l'harmonie ou de la dysharmonie de ces volutions conjointes

    (rythmes volutifs plus ou moins en phase entre les diffrents domaines) nous

    fournit des renseignements essentiels pour pouvoir situer le dveloppement

    individuel : on peut ainsi le positionner sur un axe allant du cadre de la normalit

    jusqu' des dimensions de porte pathologique.

    Il faut tout d'abord noter que la psychologie du dveloppement, chez l'enfant,

    a des relations troites avec la psychologie gntique (introduite par J. Piaget), qui

    est centre sur l'tude de la gense et l'volution des comportements humains. Les

    deux expressions du dveloppement ou gntique sont souvent utilises

    comme des synonymes, la premire tant nanmoins privilgie en raison de la

    confusion cre par le terme gntique , renvoyant la gense et non au

    gnome.

    La psychologie de l'enfant, qui traite des spcificits et des schmas habituels

    du fonctionnement psychologique individuel, prend bien sr une place centrale danscet enseignement. C'est l'aspect particulirement volutif et fluctuant de ce

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    5/37

    fonctionnement qui est soulign travers l'intitul psychologie du

    dveloppement .

    Selon la conception classique, le dveloppement serait en plein essor durant

    lenfance, sarrterait brusquement la fin de ladolescence, et demeurerait

    stationnaire au dbut de lge adulte pour enfin amorcer, lge mr, un dclin qui

    se prolongerait en suivant les processus neuropsychologiques, neurophysiologiques

    et psychoaffectifs propres aux phnomnes du vieillissement.

    De nos jours, les psychologues reconnaissent pourtant que le dveloppement

    ne se termine pas avec laccession la maturit physique (adolescente) mais ils

    pensent qu'il se poursuit au contraire tout au long de la vie dans des trajectoires

    distinctes.

    Les approches actuelles refusent ainsi couramment lide quun tat de

    maturit mettrait un terme au dveloppement individuel et contestent donc la vision

    dun dclin (plutt selon eux des tendances rgressives mais pas un recul)

    inluctable et gnralis des fonctions psychologiques avec lge et la fin de la vie.

    ------

    Dans le cadre de cet enseignement, nous avons limit notre rflexion

    l'enfance (vie prnatale, naissance, petite enfance, enfance) et l'adolescence :

    en passant par les modles thoriques les plus reconnus

    en essayant de donner des clefs pour comprendre le dveloppement d'une faon

    pratique et qui puisse facilement s'illustrer sur le terrain.

    Par ailleurs, nous nous focaliserons tout particulirement sur les aspects

    environnementaux, cognitifs et corporels des changements dveloppementaux.

    Concernant la sphre affective, un autre cours traite de cet axe

    dveloppemental en passant notamment par les diffrentes conceptions

    psychanalytiques.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    6/37

    Nous ne ferons donc qu'voquer brivement ce champ de rflexion sans

    dvelopper les connaissances issues de la mtapsychologie psychanalytique :

    personnalits, processus primaires et secondaires, pulsions, liens entre

    reprsentations et affects, mcanismes de dfense, phnomnes de rgression,

    intriorisation des conflits, etc.

    Enfin, nous n'aborderons le dveloppement humain que sous l'angle de la

    normalit et non celui de la psychopathologie. (Cf. autre formation complmentaire

    traitant de cet axe dans le cursus) Nous ne donnerons donc que trs peu de repres

    sur les alas ou les avatars des processus de dveloppement.

    -----

    Nous devons toujours rester prudent devant le risque d'une description trop

    normative du dveloppement. Pour justifier cette modration, une premire

    raison peut tre apporte, celle de la continuit quil existe entre le domaine du

    normal et celui du pathologique.

    La norme la plus vidente (et aussi la plus consensuelle) nous renvoie l'ide

    mme de mouvement ou de changement au cours de dveloppement, et notamment

    chez l'enfant et l'adolescent. Le signe le plus vocateurs du Pathos est en effet l'ide

    de stase , d'interruption dans la dynamique dveloppementale, l'absence de

    mouvement (exemple : un jeune de 15 ans sans aucune tendances

    adolescentes). C'est cet axe d'un quilibre dynamique ainsi que celui des

    manifestations de la souffrance qui en ralit sont reprer parmi les signes les plus

    alarmants pour le soignant ou le clinicien.

    Comme nous le verrons plus loin, de nombreuses normes ont t dgages

    pour dcrire les diffrents secteurs du dveloppement : capacits motrices, ouverture

    au langage, modalits de comportement, adaptation sociale, etc. Les normes sont

    des repres qu'il faut saisir avec beaucoup de souplesse et de recul (dans le temps),

    car il existe bien souvent d'importantes variations interindividuelles (entre les

    individus, qui voluent chacun leur rythme). Par exemple, si tous les bbs portentun objet la bouche peu prs au mme ge (2 ou 3 mois), les carts sont en

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    7/37

    revanche considrables pour certaines acquisitions comme la marche. Autre

    exemple : mme devant certains signes d'apparence pathognomonique (propre

    une pathologie spcifique) reprs trs tt, le diagnostic d'autisme ne peut tre

    dfinitivement pos qu' l'ge de trois ans chez l'enfant.

    Lorsque l'observation et la prise en charge d'un enfant (ou un adolescent)

    suivent des objectifs tels que la comprhension clinique ou l'adoption d'une

    dmarche et de stratgies thrapeutiques, l'analyse des donnes (quantitative et

    qualitative) apparat souvent plus complexe que pour la comprhension du

    fonctionnement psychologique adulte : en effet, il faut obligatoirement tudier les

    caractristiques individuelles de chaque enfant en rfrence des repres prcis

    (qui le situent parmi une population dite classique ) et particulirement soumis au

    changement, puisque sans cesse modifis par le dveloppement cet ge.

    Le danger qui menace souvent le plus le clinicien est celui de

    l'adultomorphisme : les classifications nosographiques adultes s'avrent

    inadquates, non pertinentes et donc inutiles en clinique infanto juvnile. S'il est vrai

    que certaines modalits de l'organisation psychique de l'enfant prdisposent et

    annoncent des configurations du psychisme adulte, cette continuit, quand elle

    existe, ne saurait s'tablir de faon linaire et gnrale.

    Chaque domaine du dveloppement (essentiellement la vie affective, les

    aptitudes cognitives et les comptences sociales) voluent au regard des autres et

    s'accordent un niveau qu'on pourrait situer entre l'harmonie (avances gales) et la

    dysharmonie. (Dcalage entre les diffrentes sphres du fonctionnement)

    Pour dsigner le fonctionnement mental et la personnalit, on parle chez

    l'enfant d'organisations psychiques (qui est par dfinition en pleine volution), et chez

    l'adulte, de structures psychiques. L'ge adulte est ainsi directement li l'ide

    (toutefois relative) de stabilit dveloppementale.

    -----

    Pour voquer ces aspects de construction du psychisme, Freud utilisait

    l'image de la cristallisation (compare au psychisme) : en formation chez l'enfant eten phase d'achvement aprs l'adolescence.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    8/37

    Freud compare ainsi la structure mentale un bloc minral cristallis. Notons

    au passage que, dans cette conception image de Freud, si la chute de ce bloc

    (illustrant la rupture du psychique, la pathologie) le fait se briser (conflit, blocage

    dveloppemental voire traumatisme), il ne se brisera pas hasard.

    En effet, daprs lauteur, le psychisme se brisera et se fragilisera alors :

    -Selon des lignes de cassures prtablies (lors des phases prcdente du

    dveloppement)

    -Selon des lignes qui sont propres sa structure interne, que l'on peut retrouver

    chez tous les individus.

    On voit donc bien travers cette mtaphore que le psychisme se dveloppe et

    se dtermine selon des trajectoires rgies par des rgles prformes (celles de la

    nature du psychisme humain en gnral) et des rgles non prvisibles que sont

    propres chaque individu. Ces rgles drivent de ses expriences, de son identit,

    de son histoire spcifique.

    Le dveloppement psychique de l'enfant et de l'adolescent se construit donc

    partir de facteurs inns, dune part, et de facteurs acquis, dautre part.

    ----

    L'analyse des donnes issues d'une relation clinique thrapeutique doit donc

    donner lieu une valuation dynamique du dveloppement, cest dire en

    considrant ses mouvements propres, dans une succession de rquilibrages

    perptuels, un rythme et des amplitudes qui sont diffrents selon les ges et les

    contextes.

    Le reprage dynamique du niveau de dveloppement chez l'enfant et

    l'adolescent passe par la prise en compte de plusieurs axes essentiels : (cf.

    Boekholt, 2003)

    liens entre le corps et la pense

    le passage de la dpendance l'autonomie le passage de la perception la mentalisation

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    9/37

    La situation de l'individu par rapport ces axes permet de saisir les donnes

    spcifiques de son dveloppement somato (le corps) psycho (l' me ) social.

    (Rapport au monde et l'altrit) L'tablissement d'un tel reprage chez un enfant

    permet de mieux comprendre les secteurs dans lesquels son fonctionnement se

    construit ou, au contraire, se dmobilisent voire se dsorganisent.

    -----

    Une distinction importante doit tre explicite : dans la discipline de notre

    cours, nous devrons la fois diffrencier et mettre en lien deux dimensions du

    dveloppement psychique de l'tre humain ; ces deux notions apparaissent

    intriques, mais s'inscrivent dans deux chelles temporelles distinctes :

    l' ontogense renvoie au dveloppement de l'individu de sa conception

    jusqu' sa mort (capacit marcher, pubert, etc.)

    la phylogense traite du dveloppement de l'espce humaine en gnral.

    (Apparition du langage, modes d'adaptation l'environnement selon ls poques,

    etc.)

    Nous verrons, au fil de notre rflexion, que ces deux modes d'apprhension du

    dveloppement peuvent se correspondre et parfois de faon trs signifiante.

    Nous pouvons, pour terminer, voquer la troisime notion de

    dveloppement microgntique , qui renvoie au dveloppement d'un individu

    dans une situation d'apprentissage donne (par exemple, l'apprentissage progressif

    de la lecture).

    ----

    Il est aussi essentiel de saisir les donnes du dveloppement dans deux

    perspectives complmentaires l'une de l'autre : quantitatives et qualitatives. Les

    changements du dveloppement peuvent en effet consister en des modifications qui

    peuvent tre repres selon ces deux modes.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    10/37

    L'accroissement de la taille, la prise en poids, le dploiement du vocabulaire

    lexical, sont autant de changements quantitatifs. Ces modifications

    dveloppementales sont graduelles (on peut situer ces donnes successivement sur

    un axe) sont assez simples et relativement faciles mesurer.

    Les changements qualitatifs sont en revanche plus complexes tudier et se

    caractrisent par des modifications en qualit (de nature ou de composition) qui ne

    peuvent tre comptabilises ou sries entre elles. Il y a ainsi un changement de

    catgorie smantique qui ne peut tre chiffrable. On peut par exemple donner

    comme illustration l'image du passage dveloppemental entre la chenille et le

    papillon.

    Les processus de changements peuvent donc tre soit quantitatifs et continus,

    soit qualitatifs et discontinus. Il faut bien comprendre que ces deux modes sont tous

    les deux indispensables et complmentaires pour saisir la complexit du

    dveloppement chez l'tre humain dans toutes ses nuances.

    ----

    A l'origine, la psychologie du dveloppement s'attachait dcrire avec

    prcision les changements observables et laborer des normes chronologiques du

    dveloppement. Nanmoins, le seul constat descriptif ne constitue pas une

    information de nature explicative.

    En conformit avec la dmarche scientifique, l'tape suivante, indispensable,

    consiste prdire le comportement en comprenant les phnomnes observs dans

    leur essence, en remontant la cause des changements pour mettre en sens leur

    chane de succession.

    Dans cette tape, il s'agit ainsi de comprendre :

    Quels sont les facteurs du dveloppement

    Comment s'articulent entre elles les volutions de chaque secteur de

    l'entit psychique individuelle Comment s'agencent et se coordonnent les comportements entre eux

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    11/37

    Quelles phases de transition il existe entre chaque tapes (on parle ainsi

    de stades du dveloppement)

    2. Quelques thories essentielles du dveloppement humain

    a) Thories psychanalytiques

    Selon Freud (1856-1939), le comportement est rgi par des motivations

    inconscientes et conscientes. Il retrace la gense de la personnalit partir du

    matriel clinique recueilli au cours des cures thrapeutiques proposes ses

    patients.

    Dans la thorisation de Freud, l'individu apparat faonn par ses expriences

    personnelles et les relations interpersonnelles qu'il a dveloppes et en particulier

    pendant l'enfance, priode de construction psychique intense.

    Freud dfinit ainsi trois instances psychiques, la a, le moi et le surmoi, et une

    squence de cinq stades psycho sexuels :

    le stade oral (de O 2 ans)

    le stade anal (de 2 4 ans)

    le stade phallique (de 4 6 ans)

    la priode de latence (de 6 12 ans)

    le stade gnital (12 ans et plus).

    Le champ qui est tudi de faon privilgie est donc le dveloppement de la

    personnalit, notamment pendant l'enfance et l'adolescence, partir des

    observations d'adultes en cure analytique.

    -----

    Erikson (1902-1994) insiste davantage sur les forces sociales que sur les

    pulsions inconscientes comme facteurs de dveloppement.

    Son concept cl est le dveloppement de l'identit, qui passe par huit stades

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    12/37

    (ou crises ) psychosociaux au cours du cycle de la vie :

    la confiance (de 0 2 ans, dveloppant l'espoir comme une force adaptative)

    l'autonomie (de 2 4 ans, dveloppant la volont)

    l'initiative (de 4 6 ans, dveloppant les objectifs)

    la travail (de 6 12 ans, dveloppant les comptences)

    l'identit (de 12 18 ans, dveloppant la fidlit)

    l'intimit (de 18 30 ans, dveloppant l'amour)

    la gnrativit (de 30 50 ans, dveloppant la sollicitude)

    l'intgrit personnelle (50 ans et plus, dveloppant la sagesse).

    Le champ tudi est donc le dveloppement de la personnalit tout au long de

    la vie.

    b) Thories humanistes et transpersonnelles

    Selon Maslow (1908-1970) et Rogers (1902-1987), les individus cherchent

    dvelopper leur plein potentiel et expriment des besoins permanents d'auto

    actualisation ainsi que d'auto conservation. De la satisfaction de ces besoins dpend

    la sant de l'individu et l'accs une existence pleine et heureuse.

    L'enjeu dveloppemental est donc de suivre un processus de dveloppement

    qui est inhrent l'existence humaine. Le champ d'tude principal est ainsi le

    domaine des motivations normales adultes .

    c) Thories cognitivistes ou cognitivo-constructivistes

    Piaget (1896-1980) met l'accent sur le dveloppement de la pense (c'est

    dire le dveloppement de la sphre cognitive) plutt que sur le dveloppement de la

    personnalit. Sa discipline est en ralit l'pistmologie gntique, c'est dire l'tude

    des transformations de la connaissance de l'enfance l'ge adulte.

    Bien que Piaget soit l'origine de la psychologie gntique, ce n'est pasl'enfant pour lui-mme qui l'intresse mais l'enfant en tant que moyen d'accs au

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    13/37

    fonctionnement mental des adultes, point d'aboutissement du dveloppement

    humain.

    L'adaptation, compose des sous-processus d'assimilation, de

    l'accommodation et de l'quilibration, reprsente le concept cl dans la thorisation

    de Piaget.

    Le rsultat des principales quilibrations est constitu par un ensemble de

    stades regroups en quatre priodes de dveloppement qui, selon Piaget, forment

    un systme cognitif cohrent :

    priode sensori-motrice

    priode pr-opratoire

    priode des oprations concrtes

    priode des oprations formelles.

    Selon Piaget, les individus cherchent ainsi activement comprendre leur

    environnement, et cet aspect constitue le moteur principal du dveloppement humain

    : cette recherche cognitive constitue une motion (rgit le mouvement) du

    dveloppement psychique.

    d) Thories de l'apprentissage et bhaviorisme

    Le bhaviorisme est l'tude du comportement. Watson (1878-1958) est le

    promoteur de l'tude scientifique du comportement animal et humain qui se veut la

    plus objective possible, fonde sur l'observation minutieuse des comportements et

    non pas sur une connaissance introspective ou des reconstructions thoriques.

    La thorie du conditionnement classique, inaugure par les expriences de

    Pavlov (1848-1939) sur l'animal, postule que les individus apprennent de faon

    passive des associations entre plusieurs stimuli. Exemple : le chien qui salive devant

    un bout de viande dont la prsentation est associ une sonnette va ensuite saliver

    (aprs plusieurs rptitions de l'exprience initiale) sans la prsence du morceau deviande.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    14/37

    Les travaux de Skinner (1904-1990) prolongent ceux de Pavlov et de Watson.

    Sa thorie du conditionnement oprant (Skinner) considre que les individus

    apprennent rpter les comportements en slectionnant puis en privilgiant ceux

    qui mnent des consquences dsirables. Le concept de conditionnement est ainsi

    largi par la prise en compte de l'action oprante (slection) du sujet. Cette thorie

    prsente un intrt particulier pour ses implications pdagogiques multiples.

    La thorie de l'apprentissage social de Bandura (1925 aujourd'hui) postule

    que les individus se dveloppent en apprenant les comportements observs dans

    l'environnement et en passant par une phase centrale qui est l'imitation

    comportementale.

    Cet aspect ajoute donc un lment clef pour comprendre ce qui constitue les

    bases de l'apprentissage, l'imitation mais aussi, par consquent, la question de

    l'intgration des carts avec le modle imit.

    e) Thories maturationnistes

    Gesell (1880-1961) postule que le dveloppement psychologique est,

    l'image de dveloppement physique, essentiellement affaire de maturation et

    d'actualisation du potentiel gntique de l'individu, en tant que membre d'une espce

    spcifique donne.

    Dans cette approche thorique, la marge de variation par rapport au

    droulement du programme gntique est trs limit. L'environnement n'intervient

    donc que modremment dans le droulement des squences dveloppementales.

    On doit Gesell les premires descriptions des principales caractristiques

    dveloppementales prvisibles pour chaque ge et dans des domaines trs varis. Il

    faut reconnatre ces descriptions un grand intret en terme de succession de

    phases dveloppementales, beaucoup plus quen terme de repres chronologiques

    fixe considrs isolemment les uns des autres.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    15/37

    f) Thories thologiques

    L'thologie est l'origine l'tude biologique du comportement des animaux.

    Lorenz (1903-1989) reprsente le pre fondateur de cette discipline, avec ses

    travaux sur l' empreinte : celle ci correspond un apprentissage trs rapide d'un

    comportement par le jeune animal au cours d'une priode sensible (et aussi de

    proximit avec sa mre ou un substitut) pendant laquelle il se montre

    particulirement prdispos cet apprentissage.

    Dans la mme ligne, les observations faites par Harlow (1905-1995) de jeunes

    bbs singes placs dans des conditions exprimentales ont conduit l'laboration

    de la thorie de l'attachement social d'un jeune animal ou d'un bb humain. Dans

    cette approche, le besoin de contact social est considr comme une caractristique

    inne de l'espce, indpendante des besoins primaires, par exemple des besoins

    alimentaires.

    La convergence des recherches en thologie et en psychologie du

    dveloppement vers 1960 a orient les mthodes d'tude du jeune enfant en

    donnant naissance un courant qu'on peut qualifier d' thologie humaine dont

    Bowlby (1907-1990), psychiatre et psychanalyste, est le plus grand reprsentant.

    La thorie de l'attachement contredit la thorie freudienne en postulant, d'un

    part, l'innit et la primaut de ce besoin social et en dmontrant, d'autre part, le rle

    actif du bb dans l'tablissement de ce premier lien de porte interactive.

    g) Thories psycho-sociales

    L'approche de Wallon (1879-1962) fait cho celle de Piaget mais dans une

    conception bien plus vaste : il ne se limite pas l'tude de la gnse de la cognition

    mais parvient englober l'ensemble du dveloppement de l'enfant dans une

    perspective intgrant la fois les aspects cognitifs mais aussi les aspects affectifs et

    sociaux de la personnalit de l'enfant, qui selon Wallon, s'avrent tre indissociables.

    Il considre en effet l'enfant comme un tre social depuis sa naissance, un

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    16/37

    tre gntiquement social. Dans la conception de Wallon, l'environnement dans

    lequel se dveloppe l'enfant permet d'actualiser les potentiels qui rsident dans son

    programme gntique en lui apportant au fur et mesure des occasions d'exercer

    ses nouvelles capacits.

    3. Les diffrents types de facteurs de dveloppement chez ltre humain

    Comme nous lavons dit prcdemment, la psychologie du dveloppement

    sintresse ltude des multiples facteurs et de leur interaction- qui sont

    susceptibles dexpliquer les changements dveloppementaux.

    Trois types de facteurs principaux sont en jeu dans cette constitution du

    sujet (l'entit humaine somato- psycho sociale) : les facteurs biologiques, les

    facteurs sociaux, et enfin les facteurs cognitifs.

    -Facteurs biologiques :

    Le dveloppement du cerveau, la croissance physique (poids, taille), les

    capacits sensori-motrices (associes la posture et la tonicit du corps) ou encore

    les changements hormonaux lis aux processus pubertaires sont autant

    dillustrations de lontogense physique. La notion de maturation est frquemment

    utilise pour dcrire ces changements qui sont lis un processus squentiel

    programm au niveau gntique (au sens des gnes chromosomiques).

    Les psychologues qui considrent que le dveloppement correspond un

    processus entirement et strictement dtermin par les facteurs biologiques (ancrage

    dun gnotype fix ds la conception marquant fortement la destine humaine) sont

    appels des maturationnistes, des innistes (force prpondrante de linn) ou

    encore des pr-formistes. Selon ces thoriciens, le capital gntique dtermine en

    effet tout le dveloppement indpendamment des circonstances et des stimulations

    relatives au milieu extrieur.

    Cette conception enlve au dveloppement lide de subir des influences

    mutli-factorielles ; il affaiblit aussi la dimension dautodtermination du sujet, et sonprincipe sous jacent de libert individuelle: libert de changement, libert, souplesse

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    17/37

    et originalit de dveloppement.

    On se doit pourtant dadmettre que lenvironnement social exerce

    ncessairement une part dinfluence ; on le voit la fois un niveau ontogntique

    mais et peut encore davantage- un niveau phylogntique (Darwin : adaptation

    au milieu, slection naturelle, etc.). Ladaptation des individus (rponses extrieures

    aux besoins du bb, etc.) mais aussi de lespce (influence du climat, proximit

    d'autres espces rivales, etc..) au milieu environnemental ne peut donc tre

    ngligeable.

    Par exemple, une mauvaise nutrition peut risquer dentraver la croissance

    physique programme. Ou encore, un nourrisson voluant dans un environnement

    dpourvu de stimulations naura pas un dveloppement des connections neuronales

    (formation de la structure crbrale nerveuse) aussi important quun nourrisson

    voluant dans un environnement riche et vari en terme de simulations.

    Par ailleurs, nous devons voquer limportante de l horloge

    biologique (Pacemaker ou oscillateur). Cette notion renvoie des structures

    organiques qui dterminent et rgulent des priodes dactivit pour dautres

    structures somatiques ; ils rgissent de nombreux vnements de nature

    organique. Par exemple : les noyaux supra chiasmatique, lpiphyse et les cycles de

    mlatonine, qui fonctionnent en phase avec les rythmes circadiens (jour et nuit)

    mettent le corps en phase avec les variations extrieures pour une adaptation

    optimale celui ci.

    -Facteurs sociaux :

    En complment de lhorloge biologique, il existe aussi une horloge sociale qui

    dfinit pour sa part une suite dexpriences culturelles communes qui surviennent

    gnralement au mme ge dans une socit donne (par exemple, dbut de la

    scolarit). Contrairement aux facteurs biologiques, les facteurs sociaux sont

    uniquement initis par lenvironnement, de par ses rgles et ses lois propres

    (inventes par le socius au cours de l'histoire de la civilisation), mais aussi enpassant par les particularits complexes de chaque milieu micro-social

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    18/37

    (communauts, familles, etc.).

    En ce sens, les facteurs sociaux ne sont pas prprogramms mais largement

    organiss par le monde social et notamment par les expriences de vie. Parmi ces

    expriences, il est possible de distinguer lenvironnement biologique individuel

    (nutrition, soins de sant, survenue daccidents, etc.) et lenvironnement social

    (famille, cole, pairs, mdias, etc.). Les psychologues qui mettent en premire ligne

    les facteurs sociaux comme responsables du dveloppement appartiennent au

    courant empiriste (en opposition au courant inniste).

    -Facteurs cognitifs :

    Les changements qui seffectuent dans la pense (reprsentations du monde,

    de soi, de lautre, etc.), la notion dintelligence, laccs et le dploiement du langage

    sont des exemples de facteurs dveloppementaux de nature cognitive. Ils impliquent

    directement lide de la conscience cognitive de soi et du monde.

    Cet aspect donne au sujet un certain contrle sur la construction de lui-mme,

    des situations qui se prsentent lui, sur le traitement conscient et intentionnel de

    lexprience au cours du temps. Cela implique que lindividu doit se montrer capable

    de se reprsenter son propre pass et son propre avenir, capable de constituer des

    objectifs ( court, moyen et long terme), quil puisse aussi prendre la mesure de son

    existence, ressentir et penser sa propre solitude, se figurer, enfin sa propre finitude,

    c'est dire la limite de son existence (et son dpassement, spirituel ou religieux) : sa

    propre mort.

    Les questions existentielles de ltre humain trouvent donc leur consistance et

    leurs rponses travers le dploiement des fonctions cognitives. Le sujet doit ainsi

    progressivement cultiver une certaine conscience (subjective) et des connaissances

    (objectives) de lordre temporel, afin dinscrire du sens et des projets dans le cadre

    de son existence, partir de ses expriences interactives sur le monde. Les

    fonctions crbrales excutives (lobe prfrontal) jouent notamment ce rle de

    distanciation, d'introspection, de planification de l'existence.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    19/37

    Les facteurs cognitifs sont les plus ouverts et les moins programms. Ils sont

    aussi intimement lis aux facteurs biologiques et sociaux : sans la formation

    biologique du cortex (rendue possible par lontogense), sans connaissance stable

    ou sans une relative prvisibilit de lenvironnement, la gnralisation cognitive

    (liaisons fonctionnelles et neurophysiologiques au niveau crbral) ne peut se

    dvelopper.

    Le dveloppement est considr (par une grande majorit des psychologues)

    comme le produit rsultant de linterdpendance de ces trois facteurs. Ils sont donc

    troitement relis.

    Au cours du dveloppement, lindividu est ncessairement confront du

    prvisible et de linattendu venant de ses facteurs. Cest de cette alternance et de

    cet quilibre entre attente et surprise que lindividu trouve la fois de la scurit pour

    se dployer et de ladaptation pour pouvoir faire face et se protger tout au long de

    son dveloppement. Lenfant garde toujours au cours de son dveloppement (dans

    le cas normal) cette attirance pour ce qui se rpte et le dsir de voir venir du

    changement (Marcelli, 2000)

    Il est vident que le dveloppement est plac sous le contrle de lontogense

    biologique, plus particulirement au cours de lembryogense et au dbut de la vie.

    Mais il deviendrait de moins en moins canalis, dtermin, lors de ses phases

    successives. Les facteurs cognitifs et sociaux prendraient une place de plus en plus

    importante dans les phases plus tardives.

    La variable ge napporte donc pas la mme richesse dinformation selon

    les diffrentes priodes de la vie. Au fil du dveloppement, les donnes telles que

    ltat de sant, les capacits intellectuelles, les ressources conomiques et les

    appartenances culturelles du milieu familial sont de plus en plus capitales pour saisir

    les enjeux dveloppementaux chez un sujet.

    A chaque ge, lenfant est cens dvelopper certains aspects de ces

    aptitudes cognitives, sociales et biologiques mais aussi de nature psychoaffective ( ses diffrents degrs : gestion de la pulsionnalit, manifestations motionnelles,

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    20/37

    expression des sentiments).

    La priode de latence (vers 6 ans jusqu' l'adolescence) donne par exemple

    lieu une plus grande ouverture vers le milieu social ; les capacits intellectuelles

    subissant une stabilisation relative partir de lge de 14 ans, ralit observe dans

    lvaluation du Q.I. de Wechsler.

    -----

    Le dveloppement subit ainsi des influences multiples. Lorsque les individus

    accdent un nouveau statut dans leur milieu (familial ou extrafamilial), ils changent

    souvent de faon prdictible. Mais ils peuvent aussi voluer de manire inattendue.

    Le fait de distinguer les changements prdictibles et les changements non

    prdictibles amne aussi prendre en considration trois sources majeures

    dinfluences :

    - Les vnements normatifs lis lge :

    La marche, laccs au langage, le dveloppement de la pubert ou encore les

    rythmes de la scolarisation sont autant dvnements rencontrs par chaque individu

    dune culture donne au mme moment de sa vie et, enfin, un ge donn.

    Comme leur nom lindique, ces vnements sont troitement lis lge

    chronologique. Ils englobent non seulement les repres biologiques (exemples de la

    pubert ou de la mnopause chez la femme adulte) mais galement des indices

    socioculturels (dure de la scolarit obligatoire, etc.).

    Ces vnements sont responsables des diffrences intra-individuelles

    (changements des capacits chez un mme individu) et inter-individuelles (ce qui est

    lorigine des diffrences entre individus, de la diffrence entre groupes distincts).

    Ils ont tendance augmenter simultanment les similarits entre les individus, mme

    si leur intensit reste relativement variable en fonction du sexe et / ou de la classe

    sociale. Lapparition, la dure et la trajectoire de ces vnements sont ainsi

    gnralement prdictibles.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    21/37

    - Les vnements normatifs lis lpoque historique :

    Ces vnements concernent tous les individus qui vivent la mme poque et

    la mme localisation gographique. Ils regroupent des changements dordre

    conomique (crise conomique des annes 30s, premire et seconde guerre

    mondiale, etc.) et / ou des changements culturels (volution du statut et du rle de la

    femme, diversification des modles de structures familiales, dveloppement de

    linformatique et dInternet, etc.).

    Ces vnements ne sont pas corrls (pas dvolution conjointe) avec lge

    mais sont le rsultat de circonstances inscrites un moment particulier de lHistoire.

    Si leur survenue touche et affecte tout individu au moment o il survient, leurs effets

    peuvent cependant tre variables en fonction de lge de lindividu, selon ses

    capacits les comprendre, y faire face et mobiliser, en consquence, des

    ressources adaptatives adquates.

    - Les vnements non normatifs :

    Il existe enfin des vnements non prdictibles. Subir des carences

    maternelles, la sparation de ses parents, tre le tmoin de violences conjugales,

    avoir un cancer sont autant dillustrations dvnements non normatifs dans la

    mesure o ils naffectent pas tous les membres dune socit.

    Leurs consquences doivent bien sr tre repres, au mme titre que celles

    relatives aux vnements normatifs. Sils ne surviennent que sur une minorit

    dindividus, ils ont nanmoins un impact souvent massif sur les individus concerns.

    Certains de ces vnements sont de dimension physique (cancer, diabte, crises

    pileptiques, etc.) ou social (dcs accidentel des grands-parents, dmnagements

    suite une perte demploi des parents, etc.).

    Ces vnements peuvent tre ngatifs mais peuvent aussi tre heureux

    (consquences dune promotion dun parent ou dun hritage, opration augmentant

    le degr dautonomie, etc.). Quil soit positif ou ngatif, ce type dvnement risquedtre un facteur de stress plus important quun vnement normatif dans la mesure

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    22/37

    o lindividu qui le vit ne sy attend pas et ne sy est donc pas prpar ; cet individu a

    donc plus probablement besoin dune aide extrieure spciale pour sy adapter et

    vivre ensuite avec les traces mnsiques et les rpercutions de cet vnement.

    Cest donc au croisement de ces trois facteurs en interaction permanente quil

    devient lgitime et possible dapprcier la complexit et les spcificits du

    fonctionnement psychologique de lindividu en dveloppement.

    Comme nous le verrons plus loin, plusieurs approches existent pour tablir

    cette apprciation de faon sensible. Ces approches requirent la fois des

    connaissances solides en psychologie du dveloppement ainsi quun savoir-faire et

    un savoir tre cliniques, ces trois dimensions restant toujours indissociables.

    Comme nous le verrons plus loin dans ce cours, sa naissance, le nourrisson

    est trs loin dtre achev, loin d'tre prt comprendre et affronter les

    turbulences de l'environnement. Ce trs haut degr dimmaturit physiologique

    est caractristique de lespce humaine ; il renvoie la notion de notnie du

    nourrisson. Il se montre ainsi incapable de survivre par ses propres moyens suite

    sa naissance. Cette extrme dpendance du nouveau n est une donne essentielle

    pour comprendre le rle de son environnement la fois pour le protger (par de la

    constance) et le stimuler (par des mouvements, des variations) ds son arrive au

    monde.

    Le nourrisson omnipotent , son dpart, se ressent comme tant le

    monde lui tout seul car le dveloppement s'effectue grce la recherche

    permanente d'unit, d'unification perceptive et reprsentative, c'est dire une

    recherche de sens. La mre se doit ainsi de lui offrir un premier temps dillusion

    fusionnelle.

    Ce n'est que plus tard que la frontire entre lui et le monde extrieur

    commence se dessiner de faon prcise et signifiante. Ce sont les conditions

    premires (omnipotence et illusion) qui lui permettent aussi de ne pas se sentir

    dpass et menac par lextrieur, par lenvironnement lui-mme et ses

    mouvements.

    Lenvironnement pourra donc protger le nourrisson mais condition que sonpsychisme lintgre comme faisant partie de lui. Cest la conception qui prime

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    23/37

    actuellement dans le domaine de la no-natalit. Ltre humain passe ainsi par des

    priodes de vie trs sensibles et de grande vulnrabilit, priodes pendant lesquelles

    lenvironnement doit se montrer trs protecteur.

    Cependant, la reprsentation quon se fait de lenfant a toujours t

    extrmement changeante selon les poques, les circonstances culturelles et les

    zones gographiques.

    On peut donc s'interroger sur l'influence de l'environnement et de ses

    tendances selon les poques sur le dveloppement de l'enfant en prenant un point

    de vue socio-historique.

    Quelles protections de l'enfant taient alors mises en place ? Quelles

    conceptions et quelles reprsentations avait-on du nourrisson, de l'enfant, de

    l'adolescent ? Nous allons tenter de dresser un tableau concis de ses tendances en

    nous prenant l'exemple particulier de la socit et de droit Franais en mettant en

    lumire les volutions les plus flagrantes au cours de lHistoire.

    4. Quelques rfrences socio-historiques sur le statut socital du bb, de

    lenfant et de ladolescent

    Le statut des enfants, leurs rles, leurs attentes, leurs sollicitations, les

    interdictions dont ils font lobjet sont dtermines par des phnomnes biologiques

    mais aussi des donnes socio-historiques. Lenfant et lenfance sinscrivent ainsi

    dans un contexte social, technique, dmographique, mais aussi dans les variations

    historiques de ce contexte.

    Sur un plan tymologique, le terme enfant vient de infentia qui peut se

    comprendre comme la jeune anne des Hommes, des animaux et des plantes .

    Historiquement, lenfant est aussi celui qui ne parle pas (incapacit

    associe l'illgitimit), celui que lon considre sans loquence du fait quon ne lui

    donne pas la parole. Infans dsigne ainsi la personne avant la priodeprverbale, personne qui na pas dide delle-mme.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    24/37

    Pier et Liber renvoient par ailleurs aux enfants plus gs ou la ligne

    de descendance. Enfance et enfant sont donc entrs dans la langue en

    rfrence lart et lusage de la langue dune part, et un statut dinfriorit et de

    soumission vis vis de lunivers des adultes dautre part. Lenfance renvoie ltat

    dtre de l'enfant, terme compris travers les axes prcdents prendre comme une

    ralit socio-historique.

    Les thmes de lenfant et de l'enfance sont relativement modernes. Cest trs

    rcemment que lge et notamment le jeune ge- a pu apparatre comme un facteur

    didentit personnelle.

    Nous allons tenter de montrer comment a pu progressivement stablir le

    passage de lindiffrence totale une place plus dfinie, un statut de plus en plus

    labor de l'enfant et de la frontire le sparant du monde adulte.

    Pendant de nombreux sicles, on parlait de lge de la vie avec des priodes

    trs vagues : enfance, jeunesse, vieillesse. Lenfance ntait pas distingue de

    ladolescence. Si, les divisions du cours de lexistence ont toujours t relies aux

    divisions biologiques et sociales des Hommes et aux divisions des activits et des

    rles de chacun dans un groupe social, lenfant a toujours t caractris par son

    tat de dpendance et par sa fonction sociale le plus souvent servile, du fait dune

    conception adultomorphique qui a longtemps t trs majoritaire.

    Dans la socit traditionnelle, la conscience de la particularit infantile tait

    ainsi quasiment nulle. On considrait le plus souvent que lenfant appartenait la

    socit adulte ds quil pouvait se passer de la prsence maternelle, cest dire

    environ vers lge de 7 ans. La frontire entre les enfants et le monde des adultes

    tait donc peu tablie ; une grande proximit rgnait entre enfants et adultes.

    Les choses de la vie ntaient pas vraiment caches, les enfants taient

    mls la vie adulte, se livrant des jeux souvent purils. Les enfants taient mme

    initis sexuellement par les adultes. Une fois la priode de forte mortalit infantiledpasse (au del de 6 ans), lenfance venait ainsi se confondre en grande partie

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    25/37

    avec des modes de penser et de vie adultes.

    Dans la socit traditionnelle, le premier des sentiments attribus l'enfant

    tait appel le mignotage ; ce terme renvoie une forme de sentiment superficiel

    rserv aux enfants en bas ge. Mignoter est synonyme de btifier : l'enfant tant

    presque vu comme un petit animal , sans pudeur et sans morale.

    La sphre familiale n'avait aucune vritable fonction affective ou sentimentale

    auprs de l'enfant, avec trs peu d'expressions et d'attachement amoureux entre les

    poux.

    Les relations parents-enfants taient donc plutt pauvre en expressions

    affectives, caractrises aussi par une trs importance accorde la capacit de

    subvenir aux besoins de la famille par le travail. La famille traditionnelle avait ainsi

    pour mission la conservation des biens, l'entraide mutuelle et quotidienne, la

    protection de l'honneur et des vies.

    La pratique d'un travail commun correspondait la trajectoire familiale idale,

    trs fortement valorise socialement. Le modle de la famille tait alors en rfrence

    permanente au lignage , soutenant l'ide d'une forte appartenance, d'une

    souche commune dont taient issus plusieurs parents. Il s'agissait des liens de

    sang chez les nobles ou des liens communautaires entre villageois chez les paysans.

    Le modle traditionnel soutenait le droit d'anesse (hritages, responsabilits

    morales, etc.). L'apprentissage chez les enfants tait effectu par les proches de la

    famille ou les matres. Il s'agissait d'un systme caractris aussi par des ingalits

    sociales considrables, avec un dterminisme social profondment rigide et enracin

    dans les valeurs et le fonctionnement social.

    Cette socit tait donc pour de nombreuses raisons en complet dcalage

    avec notre socit actuelle qui tente de rduire les ingalits (ide toutefois relative

    et qui fait l'objet de nombreux dbats actuellement).

    A partir du 17me sicle, un deuxime sentiment est mis en relief pour

    qualifier l'enfant : l'enfant devient un tre humain dit ducable . Cette tche devantporter le reflet de la socit et de ses normes, elle doit tre effectue par les hommes

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    26/37

    d'glises et les moralistes, soucieux des murs polices et raisonnables.

    Progressivement, on attribue ainsi l'enfant l'image d'une fragile crature de Dieu

    qui il faut donner des repres et des directions socialement valorises.

    Dans la conception religieuse, trs influente cette poque, l'enfant se

    rapproche davantage du dmon que de l'ange. Il fallait en priorit lui apprendre

    dominer ses passions . Pas encore mr pour la vie, on doit ainsi le soumettre un

    rgime spcial avant qu'il ne puisse rejoindre la socit adulte.

    Une grande opposition rgnait alors entre la responsabilit morale des matres

    et l' infirmit des enfants ( infirme en terme d'adaptation aux rythmes et aux

    modes de pense du monde adulte). La transmission des connaissances devient

    une priorit tout en restant un privilge (ingalits devant l'accs au savoir).

    Il faut donc former l'esprit de l'enfant, l'duquer autant que l'instruire, lui

    inculquer ds le plus jeune ge les vertus de l'existence humaine.

    L'ducation et l'instruction des enfants sont des tches reconnues comme

    associes une forte autorit, trs exigeante, passant par la correction physique des

    mauvaises attitudes (devoir de correction). Ces disciplines taient assumes par les

    collges pour les garons, par les couvents pour les filles.

    Dans ces univers taient fortement valoriss la surveillance constante entre

    les lves au profit des matres, le recours la dlation et aux chtiments corporels

    (toutes les catgories confondues et pour toutes les priodes de l'enfance). Cette

    conception reflte une autorit du pouvoir excessive. Dans cette socit, chaque

    enfant doit tre humili pour devenir un soumis, soumis devant le monde social et sa

    hirarchie, soumis aussi devant la force du savoir.

    Pendant cette priode, la mortalit infantile tait trs leve. Un bb sur

    quatre dcdait avant un an. Le taux de mortalit juvnile tait aussi lev. Le risque

    de voir dcder son enfant avant la maturit adulte tait de 50 pour cent. Ce

    paramtre est aussi essentiel pour comprendre le type d'investissement adopt par

    les parents envers leurs enfants.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    27/37

    Le placement en nourrice tait quasiment systmatique et cela jusqu'au dbut

    du 20me sicle (premire guerre mondiale). Cette nourrice faisait partie de la

    maison dans les milieux des nobles. Jusqu' 5 ans, ils taient gards par elle. Il

    arrivait souvent qu'on envoie l'enfant chez sa nourrice trs loin de sa famille, avec

    peu de retour au domicile.

    A cette poque, le taux d'abandon tait trs lev ; l'attachement envers

    l'enfant tait quasiment inexistant. Le fort taux de mortalit plaait les parents dans

    un positionnement particulier cet gard ; ils pouvaient trs vite remplacer l'enfant

    dcd et raisonnait avec cette ralit en tte.

    Cette absence d'attachement constituait en somme la fois la

    consquence et la cause d'un taux de mortalit trs lev.

    Sous la pression des ducateurs et des moralistes, les enfants sont

    progressivement spars des adultes et ils sont alors regroups par classes d'ge.

    L'cole du 17me sicle va allonger la priode de l'enfance. Les collges sont

    strictement rservs aux garons.

    Les filles ne recevaient aucune ducation en dehors de l'ducation

    domestique. D'aprs Fenlon (1687 : de l'ducation des filles), il tait inutile d'duquer

    les filles. Elles demeuraient au couvent de 7 ans jusqu 20 ans.

    Au 17me sicle, la puissance paternelle tait double d'une autorit maritale

    trs marque (autorit du mari envers sa femme). La socit reposait

    essentiellement sur ce principe rgissant les relations familiales et conjugales : le

    Pater Familias . Il s'agit pour le pre d'une autorit qui lui permet de rgner en

    matre absolu sur l'ensemble de la famille et de la ligne. Dans cette perspective, le

    pre avait aussi le droit de mort sur ses propres enfants.

    A un niveau plus global, les degrs de maltraitance et d'exclusion sociale,

    pour l'enfant, taient des plus levs. Elles taient plus souvent releves chez les

    populations de filles ou les enfants prsentant des malformations physiques.

    Jusqu' la rvolution franaise, il existe pour le pre un droit fondamental decorrection. Le pre peut aussi sans difficult demander l'enfermement ou la

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    28/37

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    29/37

    dans cette optique, l'enfant dtient une bont originelle. Au centre de sa conception,

    se dploie l'ide que cest la socit et le monde des adultes qui menace sans cesse

    de corrompre l'enfant.

    Selon Rousseau, c'est l'ducation qui permet la bont d'tre prserve

    et de perdurer vers l'ge adulte. A chaque ge, un stade de connaissance est

    dtermin et le pdagogue doit suivre de prs l'enfant tout en restant son coute. Il

    le prpare tre un bon citoyen, dans la libert, en passant par le savoir, la manire

    de penser le monde (les Hommes et la Nature) et la morale qui met les individus en

    lien tout en restant libres, prservs d'une socit qui risquerait de briser ce qui

    constitue son essence originelle, sa bont.

    A partir du 19me sicle, l'amour maternel est reconnu comme inn ; il

    correspond dans cette optique un instinct. (Rq : Elisabeth Badinter, notre poque,

    pense qu'il s'agit plutt d'un faux instinct, d'une nature acquise : c'est pour elle une

    construction entirement sociale).

    La dynamique familiale va encore profondment changer lorsque le sentiment

    de l'intimit va s'y introduire. La mre qui ne possde pas l'amour maternel ou qui ne

    l'exprime pas est considre comme un monstre ou une incomptente ; cette

    lourde responsabilit de donner l'amour prend alors une place premire,

    devenant donc un signe de normalit chez la mre.

    La mre revt par ailleurs une triple fonction qu'elle se doit d'assumer dans la

    prise en charge de ses enfants :

    Une fonction nourricire : le poupart devient le bb

    Une fonction ducative : la mre se charge ainsi de plus en plus de l'instruction de

    ses enfants

    Une fonction plus autoritaire : la mre prend plus couramment le rle de

    leadership au sein de la famille ; le rle du pre devient plus tourn vers des

    investissements et des enjeux extrieurs, la reconnaissance, la russite, la force

    protectrice de la famille globale, l'acquisition de ressources, etc..

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    30/37

    Cette transformation du comportement maternel va contribuer la forte baisse

    du taux de moralit infantile cette priode. L'allaitement, l'amlioration des soins et

    de l'hygine vont avoir un rle majeur dans cette volution.

    Le 19me sicle est appel le sicle de l'enfant . La socit voit se

    dployer une rvolution de la conception ducative.

    La pense pdagogique va ainsi se dtacher d'un savoir brut pour plutt

    se centrer sur l'enfant lui-mme, sa faon d'apprendre et de se dvelopper.

    L'enfance devient une priode de la vie propre elle-mme, spcifique et de plus en

    plus dcisive pour l'avenir. Dans cette ligne de pense, il faut soutenir dans le mme

    temps l'enfant de l'avenir et l'avenir de l'enfant.

    C'est cette poque que va tre mise en place une exprience tout fait

    unique : Victor, un enfant trouv, sauvage , va devenir l'objet d'une pdagogie

    spcialise, mettant en vidence cette occasion certains traits

    psychopathologiques.

    L'exprimentation qui a t mene aboutit un constat partag par la grande

    majorit des scientifiques : Victor est idiot , incurable, car toute tentative

    d'apprentissage apparat vaine ; Victor est sauvage mais certains troubles

    pathologiques vont pouvoir tre rpars .

    L'enfant va finalement pouvoir s'attacher sa gouvernante, il va

    progressivement se sociabiliser, sans jamais pouvoir parler. Cette exprience va

    avoir de grandes consquences dans les domaines psychiatriques, de l'ducation

    dite ordinaire et de l'ducation dite spcialise .

    La question qui se pose est alors de savoir s'il est ncessaire de proposer

    aux enfants dits dbiles un suivi de porte psychologique , une ducation

    particulire et des investissements complmentaires pour combler leurs carences

    vcues. Des dcisions sont alors prises dans cette direction.

    Cette tape est aussi marque par la volont d'largir les connaissances sur

    l'ducation, de rendre l'cole efficace et ses orientations productives.

    Des mesures sont galement prises pour rduire la mortalit infantile et pourencourager la natalit ; elles rpondent notamment un besoin militaire puisque la

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    31/37

    France souhaite augmenter le nombre de ses soldats pour renforcer sa politique

    guerrire.

    Dans les milieux ducatifs, les nourrices sont dsormais places sous

    surveillance et de nombreuses crches sont cres dans le pays. On choisit aussi de

    redfinir et de revaloriser le statut des enfants ns en dehors des contextes de

    mariage.

    Au cours du 19me, la toute puissance paternelle s'attnue progressivement

    sous l'impulsion d'une prise de responsabilit de l'Etat. La toute puissance paternelle

    volue ainsi vers une valeur d'autorit : l' autorit paternelle , mettant le pre

    devant de nouvelles responsabilits (des droits et des devoirs) introduites par l'Etat.

    L'Etat porte dsormais un regard et assure une surveillance devant les

    responsabilits paternelles. On assiste alors la cration d'institutions spcialises

    qui se substituent la fonction du pre lorsque celui ci se montre incapable

    d'assumer son rle d'ducateur.

    En 1833, la loi GUIZOT instaure l'enseignement public primaire, avec une

    participation obligatoire de l'Etat.

    En 1882, la loi Jules FERRY, suite des dbats particulirement tumultueux,

    impose et dclare l'cole comme tant obligatoire, laque et gratuite en France.

    A partir du 19me sicle, la convention des droits de l'enfant est instaure en

    France, avec de nombreuses volutions par la suite, au fil des 19me et 20me

    sicles.

    Au cours du 20me sicle, la conception sociale et juridique de l'enfance subit

    de nettes volutions. Nous avons choisi d'en prsenter les plus essentielles :

    En 1914, des lois sont promulgues pour interdire certaines activits

    professionnelles aux femmes et aux enfants (l'enfant avant l'ge de 12 ans, puisqu'il

    est ensuite considr comme un adulte). Les activits risques sont places en

    premire ligne.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    32/37

    En 1912, la protection judiciaire des enfants est assure, associe la

    cration dun tribunal pour enfants dans le pays. A cette priode, de nombreux

    dbats se dploient propos des enfants dlinquants : faut-il punir ou duquer ces

    populations spcifiques ?

    Le droit de correction paternelle est par ailleurs supprim en mme temps

    que l'instance de protection judiciaire de l'enfance est introduite dans la socit

    franaise. Des dlgus sont alors chargs de surveiller les conduites de ses jeunes

    dlinquants. En parallle, les mineurs sortent dsormais du droit pnal : les enfants

    de moins de 13 ans sont ainsi considrs comme des irresponsables pnaux. Des

    dispositions ducatives sont prises dans ces cas de figure.

    En 1945, le Gnral De Gaulle incite la justice prendre des mesures

    dcisives. L'ordonnance du 2 fvrier 1945 instaure une prise en charge spcifique de

    la jeunesse dlinquante. Elle aboutit aussi la cration de l' ducation surveille

    (mesures ducatives et non pnitentiaire) et la juridiction spciale des juges pour

    enfants. Notons au passage que le dernier bagne pour enfants a t supprim en

    1934, Belle Ile en Mer.

    En 1958, des tapes supplmentaires sont franchies dans le domaine de la

    protection judiciaire. Le juge est dsormais charg d'une mission d'assistance

    ducative en complmentarit de la tche du magistrat qui assure la protection de

    l'enfance. Le juge met donc en oeuvre une double comptence, de nature ducative

    mais aussi rpressive. Il a le droit et le devoir d'intervenir dans toutes les situations

    susceptibles de mettre en danger la sant, l'hygine et la moralit de l'enfant.

    En 1974, la majorit est fixe l'ge de 18 ans.

    En 1993, l'autorit paternelle est abandonne au profit de l'autorit parentale.

    En cas de divorce, les parents assurent alors une autorit parentale conjointe, dans

    les cas (majoritaires) o ils peuvent tous les deux assurer leur mission ducative

    parentale. Le mme principe est appliqu dans les situations o il n'y a pas eu de

    mariage, mais condition que les parents montrent les signes d'une vie commune.L'autorit parentale se caractrise ainsi par le droit et le devoir de garde

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    33/37

    (donner un domicile l'enfant avec des conditions minimales de confort), le droit et le

    devoir de surveillance (responsabilit de l'enfant devant les dangers qui pourraient se

    prsenter), et enfin le devoir d'ducation et d'entretien.

    A l'oppos des problmes dus la toute puissance paternelle, la question de

    l'autorit (paternelle puis parentale) n'a jamais t une notion vidente et s'imposant

    par nature dans la structure familiale.

    ------

    Dans certaines familles, en effet, les relations peuvent n'tre parfois fondes

    que sur l'affectivit, toute autorit venant se confondre avec cette affectivit. L'enfant

    est alors peru comme un troisime adulte. Les questions de responsabilits et de

    rpartition des rles (non confusionnelle) au sein de la famille perdent alors

    beaucoup de leur cohrence et de leur consistance.

    Il y a en effet de nombreuses situations dans lesquelles les parents ne doivent

    laisser la possibilits d'un consensus vis vis de l'enfant, condition sans laquelle le

    marquage de l'autorit (mis en chec) devient la fois incohrent ambivalent, et

    dstructurant pour l'enfant.

    Les limites pose sont saines dans la mesure o elles permettent l'enfant

    d'tre protg, stimul tout en tant envelopp dans un systme intermdiaire entre

    lui et le monde, la Loi parentale, l'ducation.

    Dans un cadre consensuel permanent, aucun membre de la famille ne

    peut y trouver son compte. Il faut donc ncessairement fixer des barrires (rflchies,

    lgitimes, suffisantes, comprhensible par l'enfant) et des frontires entre le monde

    des adultes et l'enfant pour qu'il puisse suivre les diffrentes phases volutives de

    son dveloppement sans excs d'angoisse ou d'excitation (renvoyant un tat

    psychoaffectif et une sant dite normale en clinique infantile : par exemple

    Winnicott et la capacit de jouer chez lenfant).

    ------

    Le 20me sicle va de pair avec une profonde remise en cause du contrat demariage napolonien, caractris par l'ingalit des sexes, et la maternit des

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    34/37

    femmes. On assiste une dliaison des trois axes couple-filliation-parentalit, qui

    taient jusqu'alors indissociables. En effet, le lien de conjugalit subit une

    transformation, avec la possibilit du divorce par consentement mutuel.

    Le lien de filiation prend ainsi une autre signification : ce lien se dcline alors

    en trois composantes :

    La composante biologique du parent (origine de sang)

    La composante domestique du parent : le parent domestique est celui qui lve

    l'enfant dans son foyer

    La composante gnalogique du parent : le parent gnalogique est celui qui inscrit

    l'enfant dans sa ligne.

    La filiation actuelle est cependant caractrise par une certaine inscurit

    aujourd'hui. Le droit n'offre pas toujours la garantie totale d'une scurit affective

    pour l'enfant. La volont prive reste la premire assurance d'un dveloppement

    somato-psycho-affectif satisfaisant pour l'enfant.

    Si le lien de conjugalit apparat parfois trs prcaire, le lien de filiation et le

    rle de parentalit doivent ncessairement rester solides et cohrent, au service de

    la sant de l'enfant.

    C'est en effet le lien de filiation qui institue et qui inscrit l'enfant dans

    l'ordre social. Mais la socit et le systme familial sont passs d'un modle travers

    lequel les relations affectives n'taient pas ncessaires un modle dans lesquelles

    elles sont devenues compltement essentielles.

    On assiste ainsi aujourd'hui une forme de crise du lien de filiation avec

    une profonde remise en question des logiques de montage gnalogique (l'exemple

    flagrant des familles recomposes, etc.). La socit a aussi subit une profonde

    mutation dans le rapport de l'individu au groupe : affaiblissement des communauts

    et de la religion, interactivit informatique, rapport l'autre modifi par un rapport au

    temps pris dans l'urgence, l'urgence et le modle de l'efficacit immdiate (Aubert,

    2003), etc.

    Depuis le 20 novembre 1989, la Convention des Droits de l'Enfant est adopte

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    35/37

    par l'Organisation des Nations Unies. Elle a force de loi depuis le 6 septembre 1990.

    Il faut noter qu'une convention est beaucoup plus contraignante qu'une

    dclaration : avec une convention signe par toutes les parties, une socit a

    dsormais un devoir de rendre des comptes une institution ses donnes sur sa

    ralit sociale. Tous les pays doivent s'y conformer jusque dans ses moindres

    dtails, et ils sont dans l'obligation d'harmoniser leur fonctionnement et leur

    lgislation en fonction de cet accord commun.

    Si une dclaration lie les tats membres de manire morale, une

    convention implique des engagements juridiques et politiques entre les pays

    signataires, travers une triple obligation (articles 2, 4, et 44) :

    respecter les droits de ce texte

    runir les conditions de leur mise en oeuvre

    rendre des comptes quant au respect des obligations en ajustant les donnes

    lgislatives en fonction de ce rfrentiel

    La convention des droits de l'enfant (CDDE) constitue le premier texte global,

    cohrent et universel sur la protection de l'enfance. Il dtermine l'ensemble des droits

    civils, sociaux, conomiques, culturels et politiques de l'enfant.

    Cette convention a t accueillie de faon mitige : des professionnels ont t

    septiques quant aux engagements pris et au contrle ncessaire pour assurer le bon

    respect de ce texte. La France a fait une grande campagne en lien avec cette

    convention, notamment sur la lutte contre l'enfance maltraite (numro vert, dfense

    spcifique par un avocat dsign, etc.).

    Il rside cependant dans ce texte quelques questions pineuses.

    En guise d'exemple, la France et le Luxembourg rendent possible

    l'accouchement sous X. Et, pourtant, l'article 7 de la CDDE voque le droit de l'enfant

    connatre ses origines, engendrant l une importante contradiction.

    Dans la ralit, la mre qui accouche sous X a la possibilit de laisser des

    informations transmettre l'enfant dans le cadre du procs verbal. Elle a un dlai

    de deux mois pour prendre dfinitivement sa dcision (garder ou non l'enfant), ce

    dlai correspondant aussi la dure minimale avant de permettre l'adoption d'unenfant n sous X.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    36/37

    Quelques chiffres peuvent tre mentionns : d'une part, environ une

    naissance sur mille est associe un accouchement sous X ; d'autre part, environ

    7000 enfants sont adopts en France chaque anne.

    Depuis la loi Mattei de 1996, on ne parle plus d'abandons d'enfants mais

    d'accouchements sous X. Les femmes qui accouchent sous X n'ont pas de profil

    type, ni en terme d'ge, ni en terme de statut ou d'appartenance socioculturels. Elles

    ne sont pas forcment isoles socialement ou professionnellement.

    Mme s'il reprsente un geste trs charg au niveau motionnel,

    l'accouchement anonyme est ainsi devenu aux yeux de la Loi un droit essentiel pour

    la femme, et non pas le signe d'une monstruosit ou d'une dfaillance.

    En 1999, la loi impose un entretien enregistr (vido ou audio) auprs des

    enfants souponns d'tre victime d'agressions sexuelles. Le but tant de ne pas

    demander plusieurs reprises l'enfant de faire le rcit des faits, afin de le protger

    d'une trop grande souffrance lie la rptition. Ceux qui recueillent les donnes

    durant l'entretien sont aussi de mieux en mieux forms, afin d'viter les traumatismes

    dits cumulatifs .

    Pour conclure, la filiation est une construction minemment sociale. Elle

    n'tablit pas un lien avec les seuls parents mais une appartenance un groupe

    social que le nom symbolise. C'est l'enfant qui se place au cur du systme de

    filiation, c'est le vecteur d'unit de la filiation.

    Les liens biologiques ou affectifs ne suffisent pas pour l'inscription de l'enfant

    dans sa famille, dans un systme de filiation. Le droit a pris aujourd'hui une place

    essentielle pour qu'il puisse se positionner dans le temps de la filiation mais son bon

    dveloppement ne peut tre assur que par la conjonction de facteurs multiples.

    La lgislation, dans ce domaine, est une organisation fluctuante, adaptative,

    qui se modifie selon les vnements qui surgissent. Les modles qui sont aujourd'hui

    tolrs et considrs comme des rfrences normales taient des anti-modles dansdes priodes passes.

  • 8/10/2019 Psychologie Du Developpement de La Naissance a l Adolescence

    37/37

    Encore aujourd'hui, dans les cas o le droit et la morale ne rpondent pas

    toujours aux problmes actuels de faon efficace et relativement vidente, les

    professionnels doivent souvent faire appel un questionnement thique.

    De faon gnrale, lorsque la morale, le droit et l'ordre social subissent des

    phases de crise et d'impasse, le questionnement thique devient alors ncessaire. Il

    se doit en effet d'intervenir pour :

    Pouvoir penser avec distanciation les situations complexes et mouvantes

    Faire des propositions et prendre des dcisions qui soient adquates, lgitimes

    et, par ailleurs, promouvoir des ides des plus novatrices.