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Quand les alliés changent de camp : la protection du secret professionnel au sein de votre équipe transactionnelle ACAD ACAD É É MIE DAVIES MIE DAVIES pour la formation juridique continue DAVIES ACADEMY DAVIES ACADEMY – for continuing legal education Janet Ferrier et Cara Cameron 29 novembre, 2011

Quand les alliés changent de camp : la protection du … · Que signifie le terme secret professionnel? « [Le secret professionnel] inclut une obligation de confidentialité qui,

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Quand les alliés changent de camp : la protection du secret professionnel au sein de votre équipe transactionnelle

ACADACADÉÉMIE DAVIESMIE DAVIES – pour la formation juridique continue DAVIES ACADEMYDAVIES ACADEMY – for continuing legal education

Janet Ferrier et Cara Cameron

29 novembre, 2011

Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel pendant une transaction?

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Partie de l’autre côté :• Acheteur / vendeur• Investisseur : investisseur providentiel, capital de risque, capital

d’investissement privé• Associé

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Qu’est-ce qui a mal tourné?• rupture avant la signature• la transaction ne clôture pas• problèmes postérieurs à la clôture

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Allégations :• fausse déclaration• négligence• inexécution• mauvaise foi• fraude

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Équipes transactionnelles :• Gens d’affaires• Avocats internes• Avocats externes• Employés actuels et anciens• Consultants• Comptables• Conseillers financiers• Banques d'investissement

• Actuaires• Courtiers en assurance et experts

en sinistres• Consultants en environnement• Arpenteurs-géomètres• Ingénieurs• Autres conseillers• Autre partie à la transaction et ses

conseillers

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

• Avis juridiques• Notes de structuration fiscale• Présentations de la direction• Analyse et conseils financiers• Analyse et conseils stratégiques• Notes et commentaires sur les

projets de convention

• Documents de contrôle diligent• Rapports d’experts• Courriels!!!• Notes de réunions• Notes marginales• Souvenirs

Éléments assujettis à l’interrogatoire préalable :

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Décisions transactionnelles stratégiques :• Importance• Pertinence• Erreurs• Ambiguïté• Ne le demandez pas / ne le dites pas (don't ask, don't tell)

Discussions prises hors de leur contexte

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Autorités, p. ex. :• Agence du revenu du Canada / Ministère du revenu• Bureau de la concurrence• Commissions des valeurs mobilières• Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada -

CANAFE• Organismes gouvernementaux étrangers

Anciens employés

Tiers

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Pourquoi devrais-je penser au secret professionnel?

Comment peut survenir la perte du privilège dans le cadre d’une transaction?• Question d’affaires vs conseils juridiques – pas de secret professionnel• L’information a été communiquée aux membres de l’équipe transactionnelle

– la protection conférée par le secret professionnel pourrait être perdue• L’information a été communiquée à l’autre partie – la protection conférée par

le secret professionnel pourrait être perdue

Ce que nous n’aborderons pas aujourd’hui

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Ce que nous n’aborderons pas aujourd’hui

Le « secret professionnel » des autres professionnels

La correspondance « sous toutes réserves »

Privilège relatif au litige (Blank c. Canada (Ministre de la Justice), [2006] 2 R.C.S. 319)

Distinctions entre le droit civil et la common law

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Distinctions entre le droit civil et la common law

• Article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec• Article 2858 C.c.Q.• La Cour d’appel a déclaré que l’état du droit était différent au Québec

par rapport au reste du Canada : Poulin c. Prat, J.E. 94-450 (C.A.)

Ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Que signifie le terme secret professionnel?

« [Le secret professionnel] inclut une obligation de confidentialité qui, dans les domaines où [il] s’applique, impose à l’avocat un devoir de discrétion et crée un droit corrélatif à son silence en faveur de son client. Ensuite, à l’égard des tiers, le secret professionnel comprend une immunité de divulgation qui protège le contenu de l’information contre sa communication forcée, même dans les instances judiciaires, sous les réserves et les limites prévues par les règles et principes juridiques applicables. »

• Société d’énergie Foster Wheeler ltée c. SIGED, [2004] 1 R.C.S. 456

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Que protège le secret professionnel?

« Les communications faites par le client qui consulte un conseiller juridique ès qualité, voulues confidentielles par le client, et qui ont pour fin d’obtenir un avis juridique font l’objet à son instance d’une protection permanente contre toute divulgation par le client ou le conseiller juridique, sous réserve de la renonciation à cette protection. » [traduction]

• Wigmore, Evidence, cité dans Descoteaux c. Mierzwinski, [1982] 1 R.C.S. 860, aux pp. 872 et 873

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Qu’est-ce qui n’est pas protégé par le secret professionnel?

Exemple : BCE Inc. c. Ontario Teachers' Pension Plan Board, et al., 2010 QCCS 5662 (C.S.)

« Les questions posées concernant les commentaires fournis par les avocats externes de BCE relativement aux pourparlers avec les avocats des acheteurs, de même que les engagements d’obtenir des rapports écrits concernant ces commentaires, ne sont pas protégés par le secret professionnel. Il n’y a aucune intention de confidentialité lorsque des communications sont faites entre des parties adverses. » [traduction]

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Qu’est-ce qui n’est pas protégé par le secret professionnel?

• Les faits – Susan Hosiery Ltd. c. M.N.R. (1969), 69 DTC 5278 (Cour de

l’Échiquier du Canada)

• Le fait de conseiller la perpétration d’une fraude ou l’exception de crime– R c. Campbell, [1999] 1 R.C.S. 565

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Pendant combien de temps l’information est-elle protégée?

• L’information est protégée en permanence.• Sauf en cas de renonciation par le client.

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Qu’est-ce qui est protégé par le secret professionnel de l’avocat?

Y a-t-il des exceptions?

• Le secret professionnel couvre les documents accessoires créés pendant la relation entre le client et l’avocat.

• Le secret professionnel couvre les communications entre l’avocat et son personnel.– Descoteaux et autres c. Mierzwinski et autres, [1982] 1 R.C.S. 860

Les communications entre les avocats et les clients dans le contexte d’une transaction

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Les communications entre les avocats et les clients dans le contexte d’une transaction

« Le secret professionnel s’applique lorsqu’un avocat négocie une transaction commerciale (comme une convention cadre à base d’actions), rédige des contrats ou communique avec un client dans le cadre d’une transaction. » [traduction]

• Currie c. Symcor, [2008] O.J. No. 2987 (QL) (SCJ, Cour div.)

« Le secret professionnel de l’avocat ne s’applique pas aux conseils portant sur de pures questions d’affaires même s’ils sont donnés par un avocat. »

• R. c. Campbell, [1999] 1 R.C.S. 565

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Les communications entre les avocats et les clients : les conseils d’affaires vs les conseils juridiques

Est-ce utile?

« L’application du secret professionnel de l’avocat est très large et ne couvre pas seulement la prestation de « conseils juridiques », mais englobe aussi les renseignements factuels, financiers et administratifs fournis aux conseillers juridiques dans le but de leur permettre de fournir des conseils juridiques (dans la mesure où les conseils ne portent pas sur de pures questions d’affaires). » [traduction]

• Currie c. Symcor, [2008] O.J. No. 2987 (QL) (SCJ, Cour div.)

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Les communications entre les avocats et les clients : les conseils d’affaires par rapport aux conseils juridiques

Et que dire de celle-ci?

« La jurisprudence est claire : le secret professionnel de l’avocat n’est pas vicié simplement parce que l’avocat a soupesé des considérations commerciales lorsqu’il a fourni ses conseils juridiques. Les tribunaux ont utilisé le critère suivant pour distinguer les conseils juridiques des conseils non juridiques : une question soumise à un conseiller juridique professionnel vise à première vue l’obtention de conseils juridiques… et est donc couverte par le secret professionnel sauf si elle semble être dénuée d’aspects nécessitant des conseils juridiques. » [traduction]

• Weeks c. Samsung Heavy Industries, Ltd., 1996 U.S. Dist. LEXIS 7397, 1996 WL 288511 (N.D. Ill. 30 mai 1996)

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Les communications entre les avocats et les clients : les avocats internes

« Lorsqu’un avocat salarié donne des conseils que l’on qualifierait de privilégiés, le fait qu’il est un avocat « interne » n’écarte pas l’application du privilège ni n’en modifie la nature. »

• Pritchard c. Ontario (Commission des droits de la personne), [2004] 1 R.C.S. 809

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Les communications entre les avocats et les clients : les avocats internes

« Dans la pratique privée, certains avocats sont autant ou davantage appréciés pour leur sens inné des affaires que pour leur perspicacité juridique. […] Le secret professionnel de l’avocat s’appliquera ou non à ces situations selon la nature de la relation, l’objet de l’avis et les circonstances dans lesquelles il est demandé et fourni. »

• R. c. Campbell, [1999] 1 R.C.S. 565

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Les communications entre les avocats et les clients : l’affaire Stafford Trading

Stafford Trading, Inc. et al. c. Lovely et al., no de dossier : 05-C-4868, 2007 U.S. Dist. LEXIS 13062• Stafford Trading, Inc. a vendu une entreprise à la Banque TD en 2002, y compris une

plateforme de négociation d’options; l’entreprise a été fusionnée à TD Options, LLC.• Les défendeurs, MM. Lovely et Pokoski, avaient travaillé avec ou pour Stafford et étaient

devenus membres de TD Options, LLC après l’opération.• Trois ans plus tard, les défendeurs ont prétendu qu’ils avaient créé la plateforme de

négociation d’options, qu’ils en étaient propriétaires avec M. Stafford et qu’ils avaient droit à la moitié du produit de la vente attribuable à la plateforme.

• Litige pendant l’interrogatoire préalable sur la question de savoir si certains documents étaient protégés par le secret professionnel, y compris des documents préparés par Kirkland & Ellis (conseillers juridiques externes de Stafford), les avocats internes de Stafford et Goldman Sachs (conseillers financiers de Stafford).

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Les communications entre les avocats et les clients : l’affaire Stafford Trading

« Document 23 : Courriels entre des employés clés de Stafford et l’avocat interne sur la question de savoir si certains renseignements commerciaux doivent être communiqués à TD. Un examen de l’information indique que l’avocat interne transmet l’information de manière à ce qu’une décision d’affaires – plutôt que juridique – puisse être prise. On n’a jamais demandé à l’avocat de fournir des conseils juridiques et celui-ci n’en a jamais fournis, ne faisant que transmettre une demande de TD qui requérait ce qui semble être une décision d’affaires. Voir Urban Box, 2006 U.S. Dist. LEXIS 20648, 2006 WL 1004474, à la p. *8 (un courriel de l’avocat au conseiller financier et au client les informant de l’essence d’une communication avec l’avocat adverse n’est pas protégé par le secret professionnel.) NON PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL/DOIT ÊTRE PRODUIT. » [traduction]

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Les communications entre les avocats et les clients : l’affaire Stafford Trading

« Document 9 : Ce courriel provient de GS et transmet un projet de convention à Kirkland et à des employés clés de Stafford. […] est-ce un exemple d’un cas où on demande à l’avocat de fournir des conseils juridiques ou d’affaires? […] La convention est un projet de document commercial et contient manifestement des conseils d’affaires. Toutefois, l’avocat de Kirkland, Robert Hayward, y a apposé de très nombreuses notes, et la convention a été remise à Kirkland aux fins d’obtention de conseils juridiques relatifs à plusieurs des conditions – sollicitant que Kirkland intègre au document des termes concernant des éventualités précises et faisant des observations sur certaines questions fiscales. Par conséquent, la Cour conclut que le document est PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL. » [traduction]

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Les communications entre les avocats et les clients : l’affaire Stafford Trading

« Document 25 : Les demandeurs soutiennent que ce diagramme, préparé par Kirkland, a été créé aux fins de prestation de conseils juridiques, qu’il reflète des conseils juridiques et qu’il a été distribué à Stafford, GS et Sullivan. Dans son affidavit, l’avocat de Kirkland, Robert Hayward, explique que le diagramme est un projet de chiffrier électronique estimant les distributions potentielles en vertu d’un projet de convention, en fonction de son analyse des conditions de la convention. Le diagramme semble constituer entièrement des conseils d’affaires, mais l’affidavit de M. Kayward selon lequel le diagramme comportait une interprétation juridique des documents transactionnels de TD suffit pour convaincre la Cour que le document est protégé par le secret professionnel. PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL. » [traduction]

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Les communications entre les avocats et les clients : l’affaire CP

Les projets de convention non signés et les projets de procès-verbaux ne sont pas nécessairement protégés par le secret professionnel.

« Il me semble donc que la Banque et CP doivent se décharger du fardeau d’établir que le secret professionnel de l’avocat protège ces projets de documents et non pas qu’ils ont été écartés à des fins commerciales (dans le cas des projets de conventions) ou qu’ils ont été épurés au moyen de la suppression de certains faits (dans le cas des procès-verbaux). Encore une fois, l’avocat du client qui invoque le secret professionnel a l’avantage de vérifier la teneur des documents de manière à ce que le secret professionnel ne soit pas invoqué de façon générale et inappropriée. » [traduction]

• Canadian Pacific Ltd. c. Canada (Competition Act, Director of Investigation and Research), [1995] O.J. No. 4148

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Les communications entre les avocats et les clients

Conseils pratiques :

1. Équipe transactionnelle : Sollicitez expressément des conseils juridiques lorsque vous envoyez un document commercial à un avocat interne ou externe, c.-à-d. :

« J’aimerais obtenir votre avis juridique relativement à la pièce jointe » plutôt que « À titre d’information ».

2. Avocats internes : Indiquez expressément que vous donnez des conseils juridiques, et non pas seulement des conseils d’affaires.

Les façons de perdre le secret professionnel

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Les façons de perdre le secret professionnel

Dans quels cas le secret professionnel fait-il l’objet d’une renonciation et comment?

« L’opinion juridique d'un avocat à son client est protégée par le secret professionnel. […] Le titulaire du droit au secret professionnel peut, par ses actes, renoncer tacitement à invoquer le caractère privilégié d'une communication par exemple en donnant l’information à un tiers ou en alléguant cette opinion dans ses procédures. »

• Ville de Montréal c. Cordia Ltd., J.E. 2003-1862 (C.A.)

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Les façons de perdre le secret professionnel

Les façons de renoncer au secret professionnel :• La renonciation au secret professionnel peut être explicite ou implicite. • Le secret professionnel nécessite la confidentialité, de sorte que la

divulgation d’une communication protégée par le secret peut être réputée constituer une renonciation au secret professionnel, notamment :- la divulgation à la partie adverse- la divulgation à un membre de l’équipe transactionnelle- la divulgation à un tiers non lié

• Certaines exceptions limitées.• Les tribunaux déterminent si les parties ont l’intention de préserver la

confidentialité.

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Les façons de perdre le secret professionnel : l’intention de préserver la confidentialité

Biomérieux inc. c. GeneOhm Sciences Canada inc., 2007 (C.A.Q.) QCCA 77, REJB 2007-112962 :• GeneOhm a acquis IDI, qui avait résilié un projet d’entente de partenariat avec

Biomérieux. Biomérieux a poursuivi IDI et GeneOhm pour inexécution de contrat.

• Biomérieux a sollicité l’accès à certains documents liés au contrôle diligent effectué par GeneOhm à l’égard de IDI.

• Les avocats de GeneOhm ont fourni les documents aux avocats de Biomérieux, conformément à une ordonnance judiciaire. Les documents ont été fournis sous réserve de nombreux avis, figurant dans des lettres couvertures et sur l’emballage, affirmant la nature privilégiée et confidentielle des documents.

• Biomérieux a soutenu que même si l’ordonnance judiciaire exigeant la remise des documents a été infirmée, GeneOhm avait perdu la protection du secret professionnel à l’égard des documents en les remettant à Biomérieux.

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Les façons de perdre le secret professionnel : l’intention de préserver la confidentialité

Biomérieux inc. c. GeneOhm Sciences Canada inc., 2007 (C.A.Q.) QCCA 77, REJB 2007-112962 :

• Cour d’appel du Québec : les documents ont été remis de façon confidentielle et demeurent protégés par le secret professionnel. GeneOhm n’avait pas l’intention de renoncer au secret professionnel en remettant les documents.

• « … si une information sujette au secret professionnel a été dévoilée au grand public, je vois mal comment elle pourrait être protégée par le tribunal ou autrement. Par contre, si sa divulgation a été limitée et que les circonstances ne permettent pas de conclure qu'elle résulte d'une renonciation, il me semble que le tribunal doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la protection d'un droit fondamental découlant de l'article 9 de la Charte. »

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Les façons de perdre le secret professionnel : l’intention de préserver la confidentialité

Anderson Exploration Ltd. c. Pan-Alberta Gas Ltd., [1998] A.J. no 575 (C.B.R.) :• Des documents relatifs à un projet de fusion entre Nova Corp. et Trans

Canada Pipelines Limited (TCPL) ont été remis par erreur aux requérants, qui étaient parties à un litige avec une filiale de Nova.

• Se trouvaient parmi les documents la convention de fusion, une note de service adressée par le chef du contentieux de Nova au conseil de Nova sur une question confidentielle ainsi que des documents privilégiés fournis par Nova à TCPL pendant les pourparlers de fusion.

• La Cour a ordonné le renvoi des documents à Nova et a interdit aux requérants de les utiliser.

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Les façons de perdre le secret professionnel : l’intention de préserver la confidentialité

Anderson Exploration Ltd. c. Pan-Alberta Gas Ltd., [1998] A.J. no 575 (C.B.R.) :

« En fonction des principes de l’equity », la divulgation par erreur n’entraîne pas la perte du secret professionnel.

« Il est clair que NOVA n’avait pas l’intention de renoncer au secret professionnel. »

[traduction]

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Les façons de perdre le secret professionnel : l’intention de préserver la confidentialité

La divulgation intentionnelle pourrait ne pas constituer une renonciation générale au secret professionnel si la renonciation ne vise qu’un objet limité :

« J’estime que la divulgation de documents, pour lesquels on peut valablement invoquer le secret professionnel de l’avocat ou le privilège lié au litige, à des conseillers financiers en vue de la prestation d’un avis sur le caractère équitable prescrit par la législation en valeurs mobilières constitue une renonciation uniquement pour un objet limité et ne constitue pas une renonciation générale à d’autres fins. » [traduction]

• Anderson Exploration Ltd. c. Pan-Alberta Gas Ltd., [1998] A.J. No. 575 (C.B.R.)

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Les façons de perdre le secret professionnel

Peut-il y avoir renonciation à une partie seulement des renseignements privilégiés connexes?

« Lorsque le tribunal estime qu’il y a eu renonciation à l'égard d’un document protégé par le secret professionnel, il lui est loisible de conclure que l’équité et la cohérence exigent que les documents et les communications sur lesquels sont fondés les éléments du document visé par la renonciation soient aussi produits. » [traduction]

• Hubbard et al., The Law of Evidence in Canada, à la page 11-70.22.

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Les façons de perdre le secret professionnel

Conseils pratiques :

1. Préservez la confidentialité de vos conseils juridiques.

2. Déterminez minutieusement qui a besoin d’être impliqué dans les échanges et communications, y compris les membres de votre propre organisation.

3. Déterminez les renseignements qui doivent vraiment être consignés par écrit.

4. Faites attention au terrain glissant de la divulgation.– La divulgation de la teneur de conseils juridiques peut équivaloir à une

renonciation au secret professionnel relativement à l’ensemble de la communication.

– La divulgation intentionnelle de certains renseignements protégés par le secret professionnel pourrait entraîner la divulgation non intentionnelle de bien davantage de renseignements.

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Les façons de perdre le secret professionnel

Existe-t-il des exceptions à ces règles dans le contexte d’une transaction commerciale?

Les intermédiaires et le secret professionnel

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Règle générale concernant les tiers :

« Manifestement, une fois révélé, un secret n’en est plus un; le secret professionnel est perdu lorsque l’information, confidentielle pour le professionnel et le client, est divulguée à un tiers; et le tiers est libre d’utiliser légitimement comme il l’entend l’information qui n’est plus confidentielle. » [traduction]

• Chevrier c. Guimond, [1984] R.D.J. 240 (C.A.)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple d’un cas où le secret professionnel a été perdu : Pfieffer et Pfieffer Inc. c. Javicoli, [1994] R.J.Q. 1 (CA)

« Girouard et Javicoli n'avaient pas d'intérêt commun lorsqu'ils ont consulté Me Robichaud. […] Girouard n'avait aucun intérêt personnel dans ces REER. Il n'était pas le client de Me Robichaud comme il l'a souligné dans son témoignage. Sa présence au bureau de Me Robichaud n'était ni utile ni nécessaire dans le cadre de la consultation que Javicoli voulait avoir. Son rôle en était un d'accommodation. »

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exceptions relatives à certains intermédiaires :

• Les intermédiaires qui agissent à titre de « mandataires » de la partie• General Accident Assurance Co. c. Chrusz (1999), 45 O.R. (3d) 321

• Les intermédiaires qui agissent à titre de « véhicules » d’information• Susan Hoisery Limited c. Minister of National Revenue (1969), 69 DTC 5278

(Cour de l’Échiquier du Canada)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Canadian Pacific Ltd. c. Canada (Competition Act, Director of Investigation and Research), [1995] O.J. No. 4148, (C.J.O.)

« Je souligne qu’à cet égard, il ne s’agit pas de déterminer si la partie était membre de l’équipe, mais plutôt si la protection du secret professionnel couvre seulement la question de savoir si la partie agissait à titre de mandataire dans l’obtention des conseils juridiques. À cet égard, il n’est pas nécessaire que la partie soit seulement le véhicule; j’estime que c’est admis si la partie joue un rôle indispensable que ne peut jouer raisonnablement le client dans ses affaires internes, et si, pour l’exécution de ce rôle, la partie doit s’inscrire dans le processus de sollicitation et d’obtention des conseils juridiques. Il ne suffit donc pas d’être membre de l’équipe du client; il doit y avoir le « besoin de savoir ». Par conséquent, CP devrait justifier la mise en copie de tiers pour les documents afin de préserver le secret professionnel. Je ne vois pas comment le conseiller en relations publiques pourrait respecter cette exigence. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

• Les intermédiaires qui agissent comme « traducteurs » pour les avocats• General Accident Assurance Co. c. Chrusz (1999), 45 O.R. (3d) 321

(C.A.O.)

• Les intermédiaires qui agissent comme « experts »• Susan Hoisery Limited c. Minister of National Revenue (1969), 69

DTC 5278 (Cour de l’Échiquier du Canada)• Pfieffer et Pfieffer Inc. c. Javicoli, [1994] R.J.Q. 1 (CA)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

« Le secret professionnel de l'avocat est un élément important de notre système de justice. […] Toutefois […] il ne peut s'étendre au-delà des personnes qu'il vise : le client bénéficiaire du privilège et son avocat. Mais il arrive aujourd'hui que certaines matières offrent une telle complexité, pour un client donné, qu'il devient nécessaire que d'autres personnes s'immiscent dans la consultation pour informer complètement l'avocat de façon à permettre que son avis ou conseil soit vraiment adéquat et utile. »

• Pfieffer et Pfieffer Inc. c. Javicoli, [1994] R.J.Q. 1 (CA)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

« Il est clairement reconnu que, dans la communication avec l’avocat aux fins de l’obtention de conseils juridiques dans de tels contextes, le client doit nécessairement se fier à l’expertise de ses comptables pour expliquer à l’avocat les subtilités de sa situation, qu’il ne serait peut-être pas en mesure d’expliquer lui-même. Le comptable s’exprime donc à titre de mandataire ou de représentant du client parce que :a) il applique son expertise au nom du client pour communiquer les subtilités de la situation du client à l’avocat en vue d’obtenir des conseils juridiques pour le client; b) ce faisant, il agit dans le cadre d’une relation de confiance avec le client qui découle de sa relation professionnelle avec le client. » [traduction]

• Long Tractor Inc. c. Canada (Deputy Attorney General), 1997 CanLII 11172 (C.B.R.S.)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Conclusion :

« Le privilège du secret professionnel de l’avocat vise à faciliter la sollicitation et la prestation de conseils juridiques. Si un client autorise un tiers à ordonner à un avocat d’agir en son nom ou s’il autorise le tiers à solliciter des conseils professionnels auprès de l’avocat en son nom, le tiers exerce une fonction essentielle pour la relation entre le client et l’avocat. Dans de tels cas, il faut considérer que le tiers se trouve dans les souliers du client aux fins des communications visées par ces parties des services fournis par le tiers. » [traduction]

General Accident Assurance Co. c. Hiusy (1999), 45 OR (3d) 321 (C.A.O.)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

« Si le tiers est autorisé seulement à recueillir des renseignements de la part de sources externes et à les transmettre à l’avocat de manière à ce que l’avocat puisse conseiller le client, ou si le tiers est chargé d’agir suivant les instructions juridiques de l’avocat (présumément données après que le client a donné ses instructions à l’avocat), la fonction du tiers n’est pas essentielle au maintien ou au déroulement de la relation entre le client et l’avocat et ne doit pas être protégée. » [traduction]

• General Accident Assurance Co. c. Chrusz (1999), 45 O.R. (3d) 321 (C.A.O.)

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Le rôle des intermédiaires dans le contexte des transactions : l’importance de la distinction entre les conseils juridiques et les conseils d’affaires

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Société aurifère Barrick c. Goldcorp Inc., 2011 ONSC 1325 (CanLII)

« Les documents indiquent clairement les observations particulières d’un nombre relativement faible de non-avocats qui n’appartenaient pas aux sociétés et dont les observations étaient nécessaires et appropriées pour l’examen, la structuration, la planification et la mise en œuvre de transactions très complexes dans un délai très court.Je reconnais que les personnes se considéraient tenues de préserver la confidentialité et je reconnais aussi que cela ne suffit pas en soi pour préserver le secret professionnel de l’avocat. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Société aurifère Barrick c. Goldcorp Inc., 2011 ONSC 1325 (CanLII) (suite)

« Après examen des documents, on peut voir et comprendre la nécessité d’obtenir des conseils juridiques et des connaissances pour les considérations juridiques globales relatives aux transactions. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Stafford Trading, Inc. et al. c. Lovely et al., no de dossier : 05-C-4868, 2007 U.S. Dist. LEXIS 13062

« Document 17 : Un document provenant [des banques d’investissement] et destiné [aux avocats externes]. Le courriel résume certaines questions liées à la […] transaction. Une fois de plus, cette communication se situe à la frontière entre les conseils d’affaires et les conseils juridiques, mais la Cour estime que le document a été envoyé essentiellement aux fins de la sollicitation de conseils juridiques. Par exemple, le document sollicite les conseils juridiques de Kirkland concernant des questions de réglementation et les incidences juridiques de la structuration particulière d’un versement. PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Stafford Trading, Inc. et al. c. Lovely et al., no de dossier : 05-C-4868, 2007 U.S. Dist. LEXIS 13062 (suite)

« Document 20 : Un courriel provenant [de la banque d’investissement] et transmettant [à l’avocat externe] des listes de conditions aux fins de comparaison. Puisque [la banque d’investissement] agissait à titre de mandataire de Stafford, sollicitant des conseils juridiques nécessaires pour faciliter la transaction, la Cour estime que le document est protégé par le secret professionnel. PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Exemple : Stafford Trading, Inc. et al. c. Lovely et al., no de dossier : 05-C-4868, 2007 U.S. Dist. LEXIS 13062 (suite)

« Documents 7 et 8 : Le document 7 est un courriel daté du 27 février 2002, qui transmettait un courriel daté du 26 février 2002. Les deux communications sont intervenues entre l’avocat interne de Stafford et les employés de Stafford. Toutefois, le courriel du 26 février a été envoyé à Brian Sirois, que les demanderesses n’ont pas entièrement identifié. Le document 8 est un courriel du 12 décembre 2001, qui transmettait un courriel précédent, daté du 11 décembre 2001. Les communications semblent être intervenues entre l’avocat interne de Stafford et Stafford, mais aussi entre M. Sirois (non identifié) et un dénommé Brent Andrews, qui est qualifié seulement d’« employé » de Stafford. Puisque les demanderesses ne se sont pas déchargées du fardeau de démontrer que ces communications étaient limitées à des employés clés, le secret professionnel ne s’applique pas. NON PROTÉGÉ PAR LE SECRET PROFESSIONNEL/DOIVENT ÊTRE PRODUITS. » [traduction]

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Les intermédiaires et le secret professionnel

Conseils pratiques :

1. Pour chaque communication, déterminez de façon minutieuse et réfléchie les membres de l’équipe transactionnelle qu’il y a lieu de faire participer.

2. Sensibilisez vos intermédiaires et ceux avec qui ils traitent à l’importance de la confidentialité.

3. Intégrez des dispositions relatives au maintien de la confidentialité dans les conventions aux termes desquelles vous retenez les services de conseillers externes ou traitez avec eux.

4. Méfiez-vous des courriels, notamment de la transmission de chaînes de courriels et de la fonction « Répondre à tous ».

5. Rappelez-vous que la plupart des documents préparés par des conseillers qui ne sont pas des avocats ne seront pas protégés par le secret professionnel.

Le privilège d’intérêt commun dans le contexte d’une transaction

75

Le privilège d’intérêt commun

« À mon avis, les valeurs économiques et sociales intrinsèques à la promotion des transactions commerciales justifient la reconnaissance d’un privilège auquel on ne renonce pas lorsque des documents préparés par des conseillers professionnels, en vue de donner des conseils juridiques, sont échangés dans le cours des négociations. Les participants à des transactions commerciales doivent être libres d’échanger de l’information privilégiée sans crainte de miner la confiance essentielle à l’obtention de conseils juridiques. » [traduction]

• Fraser Milner Casgrain LLP c. Canada (Minister of National Revenue), [2002] B.C.J. No. 2146

76

Le privilège d’intérêt commun

Éléments :

• Un document privilégié contenant des conseils juridiques• Partagé entre des parties adverses dans une transaction• Attente de confidentialité par rapport aux tiers• Pour le bénéfice de l’intérêt mutuel ou commun des parties à l’égard de la

clôture de la transaction• Aucune intention de renoncer au privilège

Ne protège que contre les tiers

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Le privilège d’intérêt commun : limites

Exceptionnel dans le contexte commercial :

« Cependant, les arrêts ne disent pas, selon mon interprétation, que la simple existence d’une transaction commerciale suffit en soi à protéger toutes les communications échangées entre le client et l’avocat contre les tentatives de les obtenir. Il se pourrait bien que, dans certains cas, les parties à une transaction commerciale divulguent des documents privilégiés dans des circonstances qui donnent à penser qu’il y a bien eu une perte du privilège ou une renonciation à ce dernier. » [traduction]

• Pitney Bowes of Canada Ltd. c. Canada, 2003, CFPI 214 (CFC)

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Le privilège d’intérêt commun : exemples

Anderson Exploration Ltd. c. Pan-Alberta Gas Ltd., [1998] A.J. No. 575 (C.B.R.) :

• Des documents relatifs à un projet de fusion entre Nova Corp. et Trans Canada Pipelines Limited (TCPL) ont été remis par erreur aux requérants, qui étaient parties à un litige avec une filiale de Nova. La Cour a ordonné le renvoi des documents à Nova et a interdit aux requérants de les utiliser.

• Se trouvaient parmi les documents la convention de fusion, une note de service adressée par le chef du contentieux de Nova au conseil de Nova sur une question confidentielle ainsi que des documents privilégiés fournis par Nova à TCPL pendant les pourparlers de fusion.

• Les requérants soutiennent que Nova avait renoncé au secret professionnel, en partie parce que les documents avaient été divulgués à TCPL dans le cadre du projet de fusion.

• Cour : la divulgation n’a pas entraîné renonciation au privilège.

79

Le privilège d’intérêt commun : exemples

Motifs dans Anderson Exploration Ltd. c. Pan-Alberta Gas Ltd., [1998] A.J. No. 575 (C.B.R.) :

– « Aucun élément de preuve n’indique une attente selon laquelle l’échange d’informations entre NOVA et TCPL entraînerait la renonciation au privilège. Le témoignage des dirigeants de NOVA et de TCPL indique plutôt le contraire, en ce sens que l’échange avait lieu sous réserve d’une entente de confidentialité. » [traduction]

– « Si ce type de divulgation était interprété comme constituant une renonciation au privilège, les conséquences pour le milieu des affaires seraient très importantes. Il est difficile d’imaginer comment les exigences d’une divulgation complète et véridique imposée par la législation en valeurs mobilières du Canada pourraient être respectées si une telle divulgation dans le cadre des négociations de fusion entraînait la perte du privilège à l’égard de renseignements sensibles et exclusifs. Une telle issue aurait un effet paralysant sur la divulgation et compromettrait les négociations. » [traduction]

80

Le privilège d’intérêt commun : exemples

Pitney Bowes of Canada Ltd. c. Canada, 2003, CFPI 214 (CFC) :• Plusieurs parties prenaient part à une transaction assujettie au droit

canadien et au droit anglais.• Les parties ont convenu d’utiliser un avocat du R.-U. pour obtenir des

conseils dans des domaines où leurs intérêts n’étaient pas opposés.• Deux avis juridiques préparés par l’avocat du R.-U. ont été communiqués à

plusieurs parties.• L’ARC a sollicité l’accès aux avis.• Question en litige : le privilège avait-il été perdu par renonciation et/ou

divulgation aux autres parties?• Cour : le privilège n’a pas été perdu.

81

Le privilège d’intérêt commun : exemples

Motifs dans Pitney-Bowes :

« [D]ans ce genres d’affaires, la véritable question consiste à savoir si le privilège qui s’appliquerait, au départ, aux documents en litige a été perdu par renonciation, par divulgation ou autre. C’est une question de fait déterminée par un certain nombre de facteurs, y compris les attentes des parties et la nature de la divulgation. » [traduction]

Les avis juridiques dans cette affaire « ont été préparés avec l’intention de les communiquer aux autres parties ayant des intérêts similaires, pour leur profit collectif. » [traduction]

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Le privilège d’intérêt commun : exemples

Maximum Ventures Inc. c. De Graaf, [2007] BCCA 510 :• Un projet d’avis juridique avait été préparé pour le groupe De Graaf dans le cadre de

pourparlers de règlement d’un litige avec M. Beruschi.• Le groupe De Graaf négociait la vente de terrains miniers en Mongolie à

Western Prospector Group Ltd., et Western négociait le financement de l’opération avec la Financière Banque Nationale et d’autres intervenants.

• Le projet d’avis a été divulgué pendant le contrôle diligent effectué par l’acheteur et le prêteur. La Cour a examiné quatre divulgations :1. De Graaf a parlé de l’avis à l’avocat de Western et lui a permis de le lire de façon

confidentielle – les parties ont convenu que cette divulgation ne constituait pas une renonciation au privilège;

2. l’avocat de Western en a discuté verbalement et par courriel avec les dirigeants de Western;

3. les avocats de De Graaf, de Western et de FBN en ont discuté en conférence téléphonique;

4. l’avocat de FBN, Charles Hotel, a pris des notes au sujet de la conférence téléphonique.

• L’ayant cause de M. Beruschi, Maximum Ventures, a sollicité l’accès au projet d’avis au motif qu’il y avait eu renonciation au privilège en raison des divulgations nos 2, 3 4, et, en particulier, de la divulgation à l’avocat de FBN.

• Cour : la divulgation n’a pas entraîné la renonciation au privilège.

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Le privilège d’intérêt commun : exemples

Motifs dans Maximum Ventures Inc. c. De Graaf, [2007] BCCA 510 :

• « La question en litige repose sur la question de savoir si les divulgations se voulaient confidentielles et si les tiers en cause avaient un intérêt commun suffisant avec le client pour que l’application du privilège soit étendue à la divulgation qu’ils avaient reçue. » [traduction]

• Les divulgations ont été faites « dans le cadre des pourparlers entre l’avocat [du vendeur], l’avocat [de l’acheteur] et l’avocat [du prêteur de l’acheteur]. » [traduction]

• « Les intérêts des clients des trois avocats n’étaient pas identiques, mais étaient communs dans la mesure où le financement de travaux d’exploration par Western aux terrains mongoliens bénéficiait à tous. Ils avaient aussi le même intérêt à l’égard de l’évaluation de la non-légitimité des prétentions de Maximum. Le partage des avis figurant dans le projet McEwan appuyait raisonnablement un contrôle diligent se rapportant au litige avec Maximum. » [traduction]

84

Le privilège d’intérêt commun

Conseils pratiques :

1. Faites attention avant de divulguer des documents privilégiés dans le cadre d’un contrôle diligent, particulièrement dans une salle de données.

2. Insistez sur la confidentialité et documenter les mesures de protection prises lorsque vous divulguez de l’information privilégiée à l’autre partie.

• Utilisez des ententes de confidentialité.• Déclarez que la divulgation ne constitue pas une renonciation au

privilège.3. Étayer par écrit le fait que l’objectif du partage de l’information privilégiée

est de favoriser la transaction.4. Intégrez dans les avis et dans les autres documents et communications

privilégiés des dispositions visant la protection de la confidentialité.

Préoccupations particulières

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Préoccupations particulières : les transactions internationales

Les transactions internationales : le droit du secret professionnel n’est peut-être pas le même!

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Préoccupations particulières : les transactions internationales

Akzo Nobel Chemicals Ltd. et autres c. Commission européenne, affaire C-550/07 P, Cour de justice de l’Union européenne, 14 septembre 2010

« En effet, nonobstant le régime professionnel applicable en l’espèce en vertu des dispositions particulières du droit néerlandais, l’avocat interne ne saurait, quelles que soient les garanties dont il dispose dans l’exercice de sa profession, être assimilé à un avocat externe, et ce en raison de la situation de salariat dans laquelle il se trouve, situation qui, de par sa nature, ne permet pas à l’avocat interne de s’écarter des stratégies commerciales poursuivies par son employeur et met ainsi en cause sa capacité à agir dans une indépendance professionnelle. » [traduction]

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Préoccupations particulières

Akzo Nobel Chemicals Ltd. et autres c. Commission européenne, affaire C-550/07 P, Cour de justice de l’Union européenne, 14 septembre 2010

« Il en résulte que, du fait tant de la dépendance économique de l’avocat interne que des liens étroits avec son employeur, l’avocat interne ne jouit pas d’une indépendance professionnelle comparable à celle d’un avocat externe. » [traduction]

90

Préoccupations particulières

Qui bénéficie du secret professionnel avant ou après une transaction?

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Préoccupations particulières : qui bénéficie du secret professionnel

Postorivo et al. c. AG Paintball Holdings Inc., 2008 Del. Ch. LEXIS 17 (Court of Chancery, Delaware) :

« Je conclus que les demandeurs jouissent de la protection du secret professionnel de l’avocat à l’égard des communications concernant les actifs et passifs exclus. Je confirme aussi la convention des parties, conformément à la jurisprudence pertinente, selon laquelle les défendeurs jouissent de la protection du secret professionnel de l’avocat à l’égard des communications concernant l’exploitation de l’entreprise avant et après la convention d’achat d’actifs, et que les demandeurs jouissent de la protection du secret professionnel quant aux communications concernant la négociation de la convention d’achat d’actifs. » [traduction]

92

Préoccupations particulières : le secret professionnel et les groupes de sociétés

Décisions américaines 2007-2008 concernant BCE, Téléglobe et les filiales américaines de Téléglobe.

• Les filiales américaines de Téléglobe qui faisaient l’objet de procédures de faillite suivant le chap. 11 au Delaware ont poursuivi BCE pour inexécution de contrat, violation de l’obligation fiduciaire et fausse déclaration relativement à la cessation par BCE du financement de Téléglobe.

• Les filiales ont sollicité l’accès aux documents de BCE concernant la restructuration de Téléglobe. BCE a invoqué le secret professionnel.

• Plusieurs décisions connexes sur les faits et le droit concernant les questions de secret professionnel.

• La Cour d’appel des États-Unis (3e circuit) a analysé le droit du secret professionnel dans les cas où l’avocat interne agit à la fois pour la société mère et les filiales dans In re Teleglobe Communications Corp., 493 F.3d 345 (3rd Cir. 2007) (« Téléglobe/BCE »).

93

Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Description de l’affaire Téléglobe/BCE par la Cour d’appel des États-Unis :

« Il s’agit d’une variante de l’histoire classique du divorce de sociétés. Elle commence en bonne partie comme une « histoire d’amour classique entre sociétés » : « Société A rencontre Société B. Elles sont attirées l’une envers l’autre et, après une brève période de fréquentations, elles fusionnent. » […] Malheureusement, cela ne dure pas. Peu après que Société A a acquis Société B, elles commencent à prendre des risques ensemble, dont certains tournent vraiment mal. Après seulement un an environ, Société B est fortement endettée, et, ce qui n’est pas étonnant, Société A commence à "ne plus ressentir d’amour". Elle quitte Société B, expliquant qu’elle doit simplement le faire afin de se protéger. Rejetée et sans argent, Société B se tourne vers le refuge pour sociétés abandonnées, soit le régime de la faillite. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Cour d’appel des États-Unis (suite) :

« Dans le cadre de la faillite, les enfants de Société B (filiales), elles aussi dans le refuge de la faillite, s’indignent et poursuivent Société A pour toutes les conséquences néfastes de la rupture. En l’espèce, nous ne traitons pas du bien-fondé de l’action, mais d’un litige antérieur au procès au sujet de documents de sociétés. Tous conviennent que le privilège du secret professionnel de l’avocat protège ces documents contre les tiers. La difficulté découle du fait qu’ils ont été produits par les avocats qui représentaient toute la famille de sociétés lorsque les sociétés s’entendaient bien. Il s’agit donc de savoir si Société A peut invoquer le secret professionnel contre les anciens membres de sa famille. » [traduction]

• In re Teleglobe Communications Corp., 493 F.3d 345 (3rd Cir. 2007)

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

1. Lorsqu’un avocat interne agit à la fois pour la société mère et les filiales, l’analyse de la représentation conjointe s’impose souvent.

- La représentation conjointe est une question de fait :« La meilleure façon de déterminer la portée d’une représentation conjointe est de s’en remettre à l’intention et aux attentes des parties… » [traduction]

- La représentation conjointe ne se présume pas :« …même dans le contexte société mère-filiale, une représentation conjointe prend naissance seulement lorsque les mêmes avocats effectuent du travail juridique pour les deux entités sur des questions d’intérêt commun. […] Une règle de portée plus large causerait des problèmes parce qu’elle signifierait essentiellement qu’en cas de litige, une ancienne filiale pourrait accéder à l’ensemble des communications protégées par le secret professionnel de son ancienne société mère parce que la filiale faisait partie, en droit, de la communauté d’intérêt de l’entité mère. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

2. La divulgation à un membre du même groupe représenté par le même avocat ne constitue pas une renonciation au secret professionnel :

« Puisque les sociétés mères centralisent souvent la prestation des services juridiques fournis à l’ensemble du groupe de sociétés au sein d’un seul service juridique interne, il est important de déterminer la façon dont la règle de la divulgation touche le partage d’informations entre les affiliés. Reconnaissant que tout autre résultat causerait des problèmes dans les bureaux des avocats de sociétés, les tribunaux concluent presque universellement que le partage d’informations à l’intérieur du groupe ne fait pas intervenir la règle de la divulgation. Ce résultat est absolument juste. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

3. Lorsqu’on conclut à une représentation conjointe, la société mère et la filiale peuvent invoquer le secret professionnel à l’encontre des tiers, mais non pas l’une contre l’autre :

« Dans les cas de représentation conjointe, le privilège du secret professionnel est subordonné à une restriction importante voulant qu’il ne protège contre la divulgation forcée que les communications destinées aux parties non représentées conjointement. Lorsque d’anciens coclients se poursuivent l’un l’autre, la règle par défaut est que toutes les communications faites dans le cadre de la représentation conjointe sont susceptibles d’être visées par l’interrogatoire préalable. Cette règle comporte deux fondements : (1) l’intention présumée des parties; (2) l’obligation fiduciaire qu’a l’avocat d’être franc envers les deux parties. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Même principe au Canada – La CSC, dans Pritchard c. Ontario (Commission des droits de la personne), [2004] 1 R.C.S. 809, a cité l’arrêt R. c. Dunbar (1982), 138 D.L.R. (3d) 221 (C.A.O.) :

« Il ressort de la jurisprudence que lorsqu’une question présente un intérêt pour deux personnes ou plus qui consultent de concert un avocat, leurs communications confidentielles avec l’avocat, même si elles leur sont connues, bénéficient d’un privilège vis-à-vis des tiers. Toutefois, en ce qui concerne les rapports entre les parties, toutes deux sont censées prendre part à toutes les communications intervenant entre elles et leur avocat et en être informées. Par conséquent, si une controverse ou un différend vient à les opposer, le privilège ne s’applique pas, et l’une ou l’autre peut exiger la divulgation de la communication. »

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

4. Un client ne peut renoncer au secret professionnel à la place de l’autre :

« Lorsque des coclients et leurs avocats communs communiquent les uns avec les autres, ces communications sont « confidentielles » aux fins du secret professionnel. Ainsi, le secret professionnel protège ces communications contre la divulgation forcée aux personnes non représentées conjointement. De plus, la renonciation au secret professionnel conjoint nécessite le consentement de tous les clients représentés conjointement. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

5. La divulgation à l’avocat commun ne constitue pas une renonciation au secret professionnel ni n’étend la représentation conjointe :

- Question en litige : « si les documents ne relevant pas de la représentation conjointe et fournis par des avocats externes sont visés par cette portée tout simplement parce qu’ils passent entre les mains de l’avocat interne qui représente conjointement la filiale et la société mère. » [traduction]

- Cour : « c’est la portée de la représentation conjointe – et non pas la question de savoir si les communications étaient partagées avec les avocats conjoints – qui est déterminante. » [traduction]

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Préoccupations particulières : les groupes de sociétés

Les principes analysés dans Téléglobe/BCE :

6. La divulgation aux administrateurs et dirigeants communs ne constitue pas une renonciation au secret professionnel ni n’étend la représentation conjointe.

« Lorsqu’ils réfléchissent à ces situations, les tribunaux doivent garder à l’esprit la définition de la divulgation. Pour l’application de la règle de la divulgation, il y a divulgation lorsque la société mère partage une communication par ailleurs confidentielle entre elle et l’avocat avec un dirigeant, un administrateur ou un mandataire d’une filiale agissant en cette qualité. […] Ne constitue donc pas un manquement à la confidentialité le fait de partager une communication entre l’avocat et la société mère avec un dirigeant de la société mère agissant en cette qualité, même si ce dirigeant est aussi administrateur ou dirigeant d’une filiale. Puisque ce type de partage d’informations ne constitue pas une divulgation pour l’application de la règle de la divulgation, les tribunaux ne doivent pas s’attacher à tenter d’appliquer une analyse fondée sur la représentation conjointe afin de préserver le secret professionnel dans ces situations, et ne devraient pas non plus utiliser de telles « divulgations » pour conclure à la représentation conjointe avec la filiale pertinente. » [traduction]

102

Préoccupations particulières

Conseils pratiques :

1. Si votre transaction ou votre entreprise comporte des éléments ou des aspects internationaux, ne présumez pas que vos communications seront protégées par les règles du secret professionnel de votre territoire.

2. Lorsque vous vendez un actif ou des actions, pensez à l’information que vous pourriez être en train de vendre ou de simplement laisser derrière vous.

3. Évaluez l’opportunité d’être explicite dans les transactions au sujet de l’information privilégiée susceptible de demeurer sur les serveurs, etc. (on ignore la mesure dans laquelle une telle approche pourrait réussir).

4. Limitez la portée de toute représentation conjointe au sein d’un groupe de sociétés. Envisagez l’utilisation de lettres d’engagement pour la prestation de conseils juridiques aux filiales.

5. Mettez fin à la représentation conjointe dès que vous constatez un conflit potentiel.

Conseils pratiques : récapitulation

105

Conseils pratiques

Faites la distinction entre les conseils juridiques et les conseils d’affaires1. Équipe transactionnelle : Sollicitez expressément des conseils juridiques

lorsque vous envoyez un document commercial à un avocat interne ou externe : « J’aimerais obtenir votre avis juridique sur la pièce jointe » plutôt que « à titre d’information ».

2. Avocats internes : Indiquez expressément que vous donnez des conseils juridiques, et non pas seulement des conseils d’affaires.

Évitez les renonciations non intentionnelles3. Préservez la confidentialité de vos conseils juridiques.4. Déterminez minutieusement quels sont les membres de votre équipe

transactionnelle qui ont besoin de participer à chaque communication, y compris les membres de votre propre organisation.

5. Déterminez les renseignements qui doivent vraiment être consignés par écrit.

6. Faites attention au terrain glissant de la divulgation.- La divulgation de la teneur de conseils juridiques peut

équivaloir à une renonciation au secret professionnel relativement à l’ensemble de la communication.

- La divulgation intentionnelle de certains renseignements protégés par le secret professionnel peut entraîner la divulgation non intentionnelle de bien davantage de renseignements.

Faites participer les intermédiaires dont la présence est essentielle7. Pour chaque communication, déterminez de façon minutieuse et réfléchie

les membres de l’équipe transactionnelle qu’il y a lieu de faire participer.8. Sensibilisez vos intermédiaires et ceux avec qui ils traitent à l’importance de

la confidentialité.9. Intégrez des dispositions relatives au maintien de la confidentialité dans les

conventions aux termes desquelles vous retenez les services de conseillers externes ou traitez avec eux.

Conseils pratiques

10. Méfiez-vous des courriels, notamment de la transmission de chaînes de courriels et de la fonction « Répondre à tous ».

11. Rappelez-vous que la plupart des documents préparés par des conseillers qui ne sont pas des avocats ne seront pas protégés par le secret professionnel.

Divulgation d’information privilégiée à l’autre partie12. Faites attention avant de divulguer des documents privilégiés dans le

cadre d’un contrôle diligent, particulièrement dans une salle de données.

13. Insistez sur la confidentialité et documentez les mesures de protection prises lorsque vous divulguez de l’information privilégiée à l’autre partie.

• Utilisez des ententes de confidentialité.• Déclarez que la divulgation ne constitue pas une renonciation

au privilège.

Conseils pratiques

14. Étayer par écrit le fait que l’objectif du partage de l’information privilégiée est de favoriser la transaction.

15. Intégrez dans les avis et dans les autres documents et communications privilégiés des dispositions visant la protection de la confidentialité.

Préoccupations particulières16. Si votre transaction ou votre entreprise comporte des éléments ou des

aspects internationaux, ne présumez pas que vos communications seront protégées par les règles du secret professionnel de votre territoire.

17. Lorsque vous vendez un actif ou des actions, pensez à l’information que vous pourriez être en train de vendre ou de simplement laisser derrière vous.

18. Évaluez l’opportunité d’être explicite dans les transactions au sujet de l’information protégée qui est susceptible de demeurer sur les serveurs, etc. (on ignore la mesure dans laquelle une telle approche pourrait réussir).

Conseils pratiques

19. Limitez la portée de toute représentation conjointe au sein d’un groupe de sociétés. Envisagez l’utilisation de lettres d’engagement pour la prestation de conseils juridiques aux filiales.

20. Mettez fin à la représentation conjointe dès que vous constatez un conflit potentiel.

Divers21. Le courriel n’est pas votre ami.22. Une fois que vous avez envoyé un courriel, il vous est impossible de

contrôler à quel autre destinataire il pourrait être envoyé.23. Prenez le téléphone. Qu’est-ce qui doit nécessairement être mis par

écrit?24. Qui participe à la conférence téléphonique? Utilisez des numéros

d’accès différents pour chaque nouvelle transaction. Dans le cadre d’une même transaction, utilisez un numéro pour les appels internes et un autre pour les appels auxquels les membres de l’autre partie prennent part.

25. Tout le monde ne doit pas nécessairement tout entendre – n’hésitez pas à exiger que des appels ou des réunions se fassent en l’absence de certains membres de l’équipe.

Conseils pratiques

Merci!

Janet [email protected]

Cara [email protected]

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