Quelle économie voulons-nous

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    Quelleconomie

    l ?

    M a u r i c e O b a d i a

    conomie

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    l ?

    Table des matires

    Vers une conomie humaine..............................................3Le poids des habitudes et la force des germes...........................................6Limmersion dans la complexit conomique............................................9conomie classique versus conomie volutive......................................!

    L"#$%&'("#"L'%%&T)'"L......................................*Limmatrialit en conomie ?.........................................25

    Le cul de sac de limmatriel+ l, immate-rien ........................................*/0ers lconomie immatrielle vritable......................................................*1

    La bioconduite de lconomie de la relation....................31Les dsquilibres relationnels comme source motrice...........................20olont dagir ou adaptation passive 3.................................................... ..!*4roduction de relation et change............................................................../La satisfaction des besoins et des dsirs relationnels..............................5*0aleurs relationnelles et nouveaux dsquilibres.....................................11

    L$($%'"'%%&T)'"LL""(&T'$(.........................99Limmatriel primaire......................................................101

    7ne rponse 8 langoisse dun monde matriel , bouch .................*conomie de linformation ou de la relation 3......................................!/

    Lconomie relationnelle au quotidien...........................168Les cinq valeurs finales des organisations conomiques......................69Les t:pes de management.........................................................................1La palette du manager................................................................................**

    our que nul ne perde au chan!e...................................205

    Les surabondances matrielles, qui se combinenttrangement avec lapprofondissement des manques,cachent ce qui compte vraiment : la relation entre leshommes. Pour la premire fois, un essai montre quil estpossible de penser lconomie autrement quen termesuniquement matriels.Nous vivons dans une socit cartele entre des

    surabondances et des manques qui saccroissentensemble ; ce qui pose la question de la valeur des chosesque nous produisons et accumulons, et celle des activitsauquelles nous occupons notre temps.La plthore de choses et de considrations matriellesocculte ce qui importe pour les hommes et pourrait leurpermettre davancer plus consciemment : la relation quiles unit ! et pas seulement celle qui va dans un senspositif " #aurice $badia sattaque dabord % leclusivitde lconomie telle quon la prsente partout : lconomie

    matrielle. &l montre que la vraie conomie comporte deufaces : la production et lchange des relationsauthentiques dune part, et celle des ob'ets dautre part.&l montre comment lconomie fonctionne rellement, etce quil faut faire pour concourir % son dveloppementpositif. Plus quoriginale, sa thse est rvolutionnaire. (llerpond % laspiration de tous ceu qui veulent rconcilierleur pratique quotidienne du travail avec leur idaldhumanit.Maurice Obadiaest docteur en conomie et consultant

    indpendant.La premire dition de ce livre t publie che; 0illage %ondial enavril *2 sous le titre Pour une conomie de lhumain. La prsente ditiona t entirement revue et corrige.

    < =roupe ":rolles+ *1'>?( @ 951-*-**-162-

    ) *roupe (+rolles

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    'ntroduction0ers une conomie humaine

    st-il choquant de parler dconomie , humaine + denrechercher le meilleur fil conducteur 3 Lconomie nest-elle

    pas forcment humaine+ puisquelle est lAuvre des hommes etdes organisations quils ont cres pour lui donner vie 3 %aiscette vidence ne rsiste pas longtemps. Lconomie constitue sedtache largement de la maBtrise des Ctres qui sont 8 son origine."lle devient un s:stme autonome+ oubliant les hommes+nhsitant pas 8 les asservir+ les transformer en de simples outilsde son expansion. 0ue sous cet angle+ elle se montre alorscarrment , inhumaine .

    "

    "n poursuivant son volution+ lconomie va au-del8 de

    lasservissement. "lle cherche 8 se passer de lhomme+ puis 8 sedbarrasser de lui si elle le peut+ et quand elle consent souscertaines conditions 8 le tolrer dans son primtre+linterrogation surgit @ pour combien de temps 3 Les entreprisesqui se vident de leur lment humain+ les ?ourses des valeursmobilires et financires qui ne sont plus quun agrgat

    dordinateurs en ligne et aux ordres+ les modles mathmatiquessophistiqus censs optimiser la gestion des flux et des risques ena:ant paramtr les comportements prvisibles+ en sont dessignes loquents. 'ls prouvent chaque Dour davantage la conditionprcaire de lhomme dans son Auvre conomique+ abandonneau c:nisme des crises priodiques pour rguler un s:stme oE loncherche lhomme+ en vainF

    #ans ce tableau pessimiste+ cet ouvrage prend le parti desintresser aux phnomnes conomiques qui se manifestent etdureront , tant quil : aura des hommes . #es Ctres quiconservent la capacit de maintenir ou de rendre lconomie, humaine + ce qui ne veut aucunement dire , idale .

    'l existe des parcours+ des , souffles + capables de maintenir delhumain dans lconomie+ ou mieux+ de rendre la prsence delhomme indispensable 8 tout un versant de lexistenceconomique. est lobDet de cet ouvrage que de rflchir sur

    litinraire qui+ 8 mon sens+ touche au plus profond des exigenceshumaines et renouvelle lapproche de la considration delhomme dans lconomie.

    La conDugaison des premiers souffles de lconomie humaine+mCme si on en trouve quelques prmisses dans les lois sociales du9e sicle+ sest rellement exprime au dbut et au cours du*esicle+ quand des humanistes+ parfois habills en hommes descience+ sont parvenus 8 , mettre de lhumain dans lconomie.Les travaux qui+ dabord aux tats-7nis puis dans tout le mondeoccidental+ ont port un regard appu: et diffrent sur le travailhumain pour empCcher quil entraBne la dchance des Ctres ouquil se retrouve , en miettes dans une pure logique deproductivit matrielle+ sont llment cl de cette irruption de

    >elon lexcellente expression de =eorges Griedmann. 0oir Le Travail en miettes,=allimard+ 95.

    ) *roupe (+rolles -

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    lhumain dans lconomie. es travaux donnrent naissance 8 desrecommandations suivies deffet+ influencrent des lois sociales+crrent de vritables , coles des relations humaines dont la

    vivacit se maintient Dusqu8 nous.%ais le nouveau souffle de lconomie humaine+ tel que De

    lentends ici+ nemprunte pas le mCme itinraire. 'l ne cherche pas8 surenchrir et 8 mettre un peu plus dhumain dans lconomie Hil se propose dclairer lconomie propre 8 lhumain. e nest paslhumain dans lconomie+ mais lconomie de lhumain. I cJtdes lois conomiques du monde matriel+ subsiste-t-il uneconomie au-del8 de largent 3 7ne conomie particulire danslentreprise ou dans nimporte quelle autre structure de la socitglobale+ qui garantisse une prsence humaine profonde etincontournable 3

    Ke soutiens ici que cette conomie particulire peut Ctre appele, conomie de la relation sans abus de langage. Les productions+ leschanges+ les investissements+ les valeurs qui en font la teneurDustifient les efforts consentis pour disposer de biens relationnelschappant 8 la dictature ou tout au moins au dterminisme delconomie matrielle.

    LobDet du propos nest pas de mettre 8 Dour des , gisements de potentiel humain que pourrait recler cette conomie de larelation+ car nous ne savons pas encore sous limpulsion de qui+

    de quelle manire et 8 quelles fins ils pourraient Ctre exploits. "tce dautant plus que lconomie de la relation nest pasncessairement celle de la relationpositive.

    Ke cherche avant tout 8 proposer une dmarche danal:se etune grille de lecture sans complaisance dune conomie humaine+quaucune discipline de savoir spcialis ne saurait prtendre 8 elle

    seule sapproprier. "n clairant et renforant les fondements decette conomie de lhumain+ en mettant en relief les piges de larelation ngative+ la voie pour faire triompher les idaux duneconomie relationnelle positive deviendra plus praticable.

    La somme de pressions et les risques dexclusion que lconomiematrielle fait peser sur les Ctres expliquent en grande partiepourquoi la demande dune conomie autre+ plus humaine ou aumoins capable de corriger ses excs+ gagne progressivement leplus grand nombre.

    ette situation nest cependant pas le fruit dune imprvisiblefatalit qui se serait abattue sur lhumanit. "lle exprimeclairement le s:ndrome de lapprenti sorcier dpass par sa

    machine+ mais elle met aussi en relief lambigutdes dsirs deshommes dans leurs Auvres conomiques.

    >il est vrai que le Deu conomique a atteint une dimensioncritique et une libert dvolution qui excdent la maBtrise de sesartisans humains+ il faut nanmoins reconnaBtre que les hommesont touDours eu lillusion de pouvoir assouvir 8 travers lconomieleurs dsirs contradictoires de rCves matriels et dereconnaissance humaine. omme si la distance entre les deuxt:pes de valeurs pouvait Ctre facilement rduite+ sans un patient

    travail tissant des liens entre le monde de la richesse monna:ableet celui de la richesse de la personneF

    'l est ds lors logique que les multiples situations rsultant decette contradiction faonnent une conomie dont la natureprofonde est double+ mais dont les deux mergences visibles sontingales @ un cJt trs en vue Mlargent+ la force+ la ncessit et

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    lattrait du matrielN H et un autre plus , ombrag Mla prsence etles exigences de ncessits humaines irrductibles au matrielN. Lerapport entre ces deux faces+ la dlimitation de leur domaine et+ a

    fortiori,leur dialogue sont difficiles.#ans un premier ouvrage M912FN+ Davais propos

    dintroduire le concept et le terme d, conomie de la relation *

    pour rendre compte des diverses manifestations du versanthumain de lconomie dans les productions et les changesrelationnels qui se crent au sein des organisations.

    Trouver des pistes danal:se+ une approche et des compromisdiffrents dans lattention que lon porte 8 chacune des deux facesde lconomie est lobDet de lconomie de la relation. Laperception du sens et lacceptation mCme du terme , conomiede la relation O autant dans son versant positif que dans les

    avances de relation ngative O ont largement progress depuisles annes 91. "n tmoigne par exemple en Grance lattributiondu , 4rix du livre dconomie *5 8 deux Deunes auteurs @ Pann

    &lgan et 4ierre ahuc pour leur ouvrage La Socit de dfiance2.%ais les dveloppements continus des activits conomiques+ leuremprise sur les socits humaines+ les schmatisations+ lesinterrogations et les revendications quelles font naBtre mincitent8 poursuivre cette voie et 8 approfondir ce qui ntait quunesimple introduction 8 lconomie de la relation dans le sens dune

    vritable ouverture.La tQche est dlicate car+ si dans une premire approximation

    Mque nous devrons dpasserN+ le matriel est assimilable 8l, avoir et lhumain 8 l, Ctre + il est clair que les hommes

    * Lconomie dsargente ntroduction ! lconomie de la relation,Toulouse+ 4rivat+ 912.2 d. )ue d7lm+ ollection , epremap *5.

    manifestent 8 lgard de lCtre une profonde rticence+ en mCmetemps quils lappellent de leurs vAux. est ce que+ dans unregistre en apparence loign de lconomie+ %ilan Rundera amagnifiquement exprim en parlant de , linsoutenable lgretde lCtre F I ce point insoutenable que les humains se sont

    souvent rfugis dans une , imperturbable lourdeur de lavoir +dont les lois et la domination ont ainsi tendu naturellement 8simposer. #ans le langage de lconomie matrielle+ les acteursmritent lattention lorsquils , psent un montant respectablede millions ou de milliards+ et la proccupation h:giniquedviter le sur-poids lui est encore largement trangre.

    La rencontre ambiguS et ingale entre lCtre et les lois de lavoirne doit cependant pas nous masquer la vitalit du versant humainet , ombrag de lconomie. e dernier emprunte des voies

    dexpression varies mais dont limportance nest pas touDoursproportionnelle aux rsonances mdiatiques qui lesaccompagnent.

    (ous connaissons ces cris+ ces dmonstrations bru:antes 8lchelle mondiale ou locale qui ont marqu les deux dernierssicles+ dabord dans la rsistance humaine+ secteur par secteur+ 8la duret des lois matrielles+ et de plus en plus frquemment dansles manifestations qui ponctuent les sommets conomiquesmondiaux et les rencontres entre les acteurs marquants de la

    sphre librale+ ou de ses opposantsF%ais ces moments dexplosion nergique+ malgr leur

    loquence+ leur dtresse et leur souffle+ ne sont que lune desexpressions du versant humain de lconomie. 'ls ne rendentcompte que trs imparfaitement de sa ralit profonde car ils seconstruisent en raction aux excs du versant matriel et ne

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    donnent pas limage dune vie autonome de lhumain danslexistence conomique quotidienne.

    7n autre indicateur de linsistance des attentes humainessexprime par cette quCte impatiente+ tout au long du *e et audbut du *esicle+ dune , nouvelle conomie qui viendrait

    prendre le relais de l, ancienne . Les rCves dune conomie delabondance+ associs 8 la rationalisation des organisations ou 8 larupture avec les modles passs+ ont tous t accompagns dune, nouvelle conomie politique + dun ne" deal, de la promessedune conomie nouvelle avec son lot de nouveaux conomistes.%algr les dceptions ou les checs+ la quCte continue @ entmoigne par exemple la demande pressante dun , nouveau nedeal dans le camp dmocrate de la 4rsidentielle amricaine*1+ a:ant mCme son site officiel+ (ext(e#eal.orgF

    &u-del8 des caricatures qui ont parfois fait office de nouveaut+cette demande persistante nous dit que les manques et les excslis 8 lconomie traditionnelle sont suffisamment profonds pourrendre imprieuse la dcouverte dun champ de nouveaut relle.e ne sont pas les actions de lutte contre les manques classiques+ni les dversements quotidiens de biens matriels et de servicessupposs nouveaux+ qui parviennent 8 rpondre 8 la demande derenouveau profond et , vrai . he; les riches comme che; lespauvres+ dans les grandes ou petites structures+ au travers des

    mdias ou de lhomme de la rue+ la question demeure entire.&u fil du temps+ lexigence de renouvellement est devenue

    beaucoup plus forte que celle mise en avant par les utopieslibertaires+ les programmes politiques partisans et les racolagespublicitaires pour des innovations 8 sensation. 7ne nouvelleconomie crdible ne peut se limiter 8 des intentions+ 8 des

    changements de paradigmes thoriques ou 8 la nouveaut desmo:ens et des outils O fussent-ils superficiellement fascinants."lle doit atteindre les comportements et les pratiques des acteurs+concerner le Dugement de leurs rsultats et remettre en questionleurs pJles de valeur O probablement en modifier ltendue et le

    t:peF est tout le rapport entre lhumain et le nombre qui setrouve interpell et somm dvoluer.LobDet de ce livre est dapporter un clairage sur ce qui fonde

    cette part nouvelle de lconomie et peut en assurer la prennit+en accordant une place de choix au domaine de l, immatriel .

    e domaine est sUrement lun des plus maltraits de lhistoireconomique. $r+ en explorant son espace avec un Ail diffrent decelui de lconomie classique+ on peut dcouvrir des lmentsconstitutifs dune , nouveaut conomique enfin porteuse de

    sens.

    Le poids des habitudes et la force des germes

    La premire raison de cette , maltraitance de limmatriel dpenddu poids des habitudes acquises au sein de lconomie courante. Leterme mCme d, conomie veille une srie de ractions et de

    significations souvent contradictoires+ qui vont de lavariceprcautionneuse Dusquaux rCves les plus dmesurs dedveloppement et de fortune+ mais sont toutes associes au matrielet en particulier 8 largent. Lextension gographique venant encoreexacerber la radicalisation des visions conomiques primaires+ lamondialisation et ses pratiques incitent auDourdhui 8 la

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    gnralisation dun tableau matrialiste uniforme. #ans le pa:sagemondial+ les vellits de rencontres et dchanges interculturels sontexils vers les rivages bien argents des nouveaux riches ou despauvres , assoiffs de consommation des pa:s mergents. 7nexemple asse; significatif @ celui de lentreprise arrefour en

    hine H dabord le nom @ lenseigne s: dnomme , Kia Le Gu MGamille+ Koie+ ?onheurN+ cense exprimer ladaptation ou lerespect culturelF "n mCme temps+ des bousculades pour despromotions vont Dusqu8 faire des morts+ les foules se ruant surlescalator avec un caddie dbordant+ dont la stabilit na plus rien8 voir avec le traditionnel panier chinois V

    4our autant+ un tel succs ne construit aucunement unerelation positive entre arrefour et son public chinois @priodiquement ou sous limpulsion des mdias MTibet et Keux

    ol:mpiques de 4WinFN+ lentreprise subit le choc demanifestations profondment hostiles. Lexemple est loin dCtreisol @ #anone en est autant victime+ tout comme >ue;-L:onnaiseou 0eolia "nvironnement en plusieurs points du globe. Laproduction de relation ngative prospre.

    #ans la critique de lconomie locale ou mondiale+ ce nestassurment pas ce versant immatriel qui est mis en avant.Limmatriel est loin davoir acquis une image ou un caractredterminant H cest un simple tat des choses+ dont le

    dveloppement pratique semble plutJt sinscrire dans lerenforcement de lemprise du modle conomique global+ commele montre avec une volont apparente de neutralit ladmatrialisation de largent allant de pair avec laccroissement desa puissance.

    I linverse+ il est significatif de voir que la part de m:stre+dinconnu et dattirance qui se loge dans les appels de ce que lonnomme au dbut du *esicle ,lconomie numrique ou la eb-conomie+ fait inlassablement rfrence 8 limmatriel+ unimmatriel qui transgresserait les vieux enclos et les rflexes uss

    de lconomie traditionnelle.Xue faut-il retirer de ces perceptions contradictoires delimmatriel 3

    "ne #ision conomique et des pratiques $ reconstruire

    La progression mondiale de lconomie+ qui sest opre paraDouts successifs et extensions dactivits primaires+ industrielles ettertiaires sur la quasi-totalit des territoires+ tend 8 privilgier les

    visions fourre-tout de limmatriel. %ais peu de gens encore ontune vision claire de ce qui+ sur le terrain de Deu mondial+transgresse les limites du domaine matriel et nous porte vers deschamps immatriels qui seraient une expression de la globalithumaine dans une conomie largie. La perception delimmatriel se fonde sur des intuitions 8 la fois ralistes etcontraintes.

    )alistes+ dabord @ si lconomie stend 8 un nombre croissantdCtres dont les cultures et les hori;ons diffrent+ peut-elle enrester 8 ses dterminants primaires+ peut-elle prtendre faireendosser les mCmes habits et les mCmes schmas matriels 8 unepart croissante de la socit et de lhumanit 3 Les ractionspremires que nous avons observes dans lexemple de arrefouren hine sont-elles durables 3 e nest plus lutopie+ mais bien la

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    ralit courante qui montre les limites des forces destandardisation dveloppes par le modle matriel. #ans lesrgions 8 dveloppement matriel plus ancien+ on dcouvre quelconomie matrielle , envahissante est elle-mCmeprogressivement envahie.

    Lconomie a pu+ au dpart+ reDeter hors de son giron le rCveur+le pote+ lartiste+ lintellectuel+ lhomme de science+ ltrangerF4ar la suite+ en les rcuprant et en les envahissant+ elle leur acertes appris 8 compter+ voire 8 calculer avec des outils similaires+mais elle na pas pu se prmunir elle-mCme contre la pntrationdu rCve+ de lesthtique+ de lthique+ de la sensibilit+ parfoismCme de la diffrence et de la relation vraie et coUteuseF

    &uDourdhui+ tous nos outils de production se doivent+ sinondCtre beaux+ du moins dintgrer une recherche ou un travail

    desthtique et de confort et dadaptabilit. $bservons leffortconsidrable opr sur lapparence de nos ordinateurs H le motdordre des constructeurs pour les ordinateurs portables et ultralgers est carrment quils doivent Ctre , beaux V 'l en va demCme de nos espaces de travail+ oE il serait inconcevable que lesnouvelles structures soient quipes darmoires grises sans, touche verte . &insi+ limbrication des deux t:pes dinfluenceest clairement perceptible dans la vie conomique courante @lconomie matrielle continue denvahir tout ce Met ceuxN quelle

    touche+ mais elle est continuellement envahie par les caractreshumains+ par cette lgret de lexpression humaine dont elle

    voudrait se soustraire. ela constitue lun des piliers de lacomplexit conomique et alimente limage et le contenu de lasphre immatrielle.

    ela dit+ la perception et le dveloppement de limmatriel sontaussi fortement contraints @ Les pionniers de l'nternet taientsans aucun doute mus par de vrais idaux relationnels. lesh:pothses et les revendications de libert+ de simplicit+dchange direct+ de culture dmocratise+ de transaction

    montaire au Duste prix ont t pour eux autant dobDectifs devantlibrer des archaYsmes et des contraintes asph:xiantes. Lchangede fichiers musicaux+ la lecture sans frontires+ largent et les biensobtenus aux meilleures conditions ont fait naBtre des entreprisespionnires dun monde redessin.

    %ais lpreuve de lancrage dans les ralits a t rude. #ans unpremier temps+ la proccupation maDeure hrite de tous lesrflexes antrieurs fut de parier sur la capacit de cette conomieimmatrielle 8F attirer touDours plus dargent V tait la ?ourse

    ou la mort V Lobligation de greffer un business model sur toutes lesDeunes pousses de lexplosion immatrielle sest apparente 8 unesorte de rituel+ 8 un passage ncessaire sous les fourches caudinesde la matrialit+ une conversion force dont lissue est ouverte 8lincohrence+ comme nous lont montr les crises dont lesentreprises du (et ont t lobDet aprs les euphories boursires.

    'l reste que les entreprises qui ont survcu et qui en sontsorties plus fortes sont celles dont le tissu relationnel interne etexterne avait t suffisamment travaill pour rsister aux alas de

    la bonne fortune exclusivement matrielle H celles oE les lienshumains taient capables de vivre et de rester suffisammentconvaincants pour tout observateur extrieur+ en dpit de la fuitede largent.

    ) *roupe (+rolles

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    %ompre a#ec les cercles #icieu&

    >ortir de lenfermement dans les schmas rducteurs delconomie matrielle conduit 8 poser au moins deux sries dequestions @

    >il existe un domaine reprsentatif de lmergence dunevraie conomie immatrielle+ quel est-il 3 "st-il simplementdpendant de la conscience et de limplication humaines+ oufaut-il recourir 8 des mo:ens dterminants+ tels 'nternet et lefourmillement dactivits quil gnre+ pour sa dcouverte etson dveloppement 3

    e domaine peut-il manifester une spcificit affirme etune autonomie relativement 8 lemprise de lconomiematrielle 3 Xue reste-t-il 8 conserver de la notion et de la

    pratique de lconomie hors de lattrait et des Dustificationsmatrielles+ hors de largent en final 3 4lus encore+ si lonadmet que les dshrits de la terre+ absents du , festin matriel+ sont la proie des cro:ances les plus fantaisistes surlaccession au bien-Ctre+ doit-on concentrer tout leffort deDustice sur le partage de la sphre matrielle 3 Le risque dedrive dmagogique et de crispation des nombrilismes estsuffisamment prsent pour que lon tente dinsrer dans lesrapports entre les riches et les pauvres une part dconomie

    immatrielle qui profiterait aux uns et aux autres.es questions exigeantes sont immerges dans une ralit

    conomique que lon qualifie couramment de , complexe .#onner un sens prcis 8 la complexit conomique devient alorsune condition imprative 8 la construction de notre propos.#autre part+ la ralit conomique tant elle-mCme , volutive +

    il importera den fixer les traits dominants 8 travers les cartsentre lconomie qui se vit et les reprsentations modlises outhoriques qui ont voulu en rendre compte.

    Limmersion dans la complexit conomique

    La rencontre difficile+ parfois mCme la collision+ entre leshommes et les nombres+ donne le ton de la complexitconomique+ lui confre ce caractre c:cloth:mique MdhumeurinconstanteN oE chaque avance conomique+ chaque propos oupromesse dactivit contiennent tous les germes de leur rfutationou de leur inversion rapide. (ous le vo:ons dans le cas des

    entreprises publiques ou prives+ dont la vitrine sociale estpourtant affirme+ qui font tomber des couperets sur leurspersonnels H nous le constatons dans la fragilit de la crationdentreprise+ dont plus de la moiti dfaille durant leur premireanne dexistence+ mais aussi dans des perspectives plusmondiales avec les volte-face des politiques dchange oudentraide+ le reniement des engagements qui concernent lavenirdu monde+ le pitinement+ voire lchec des ngociations au longcours de l$%+ les retournements brutaux et les revers de

    fortune financireF Gort heureusement+ linversion Doue aussidans le sens positif+ quand des rgions ou des populationsapparemment condamnes par lhistoire forcent les barrires 8lentre+ tonnent par leur d:namisme local ou mondial+ etremettent en cause les positions acquises par les acteurs existants+

    ) *roupe (+rolles

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    comme le font sans tat dQme les , ?)' M?rsil )ussie 'ndehineN+ 8 la suite des , #ragons de la fin du sicle dernier.

    est aussi le Deu risqu de lconomie et de la socit globaledans la perspective de l, envahisseur envahi qui donne unr:thme 8 cette complexit. Xuand lconomie envahissante se

    sent un peu trop envahie par la sensibilit ou le sentimenthumain+ elle peut ragir comme une bCte blesse+ oprer debrusques retours en arrire vers les principes les plus durs delconomie , prhistorique dans laquelle lhomme nest plusquune nergie 8 utiliser ou reDeter+ un coUt quil importe deminimiser. Le r:thme de la complexit est alors celui dubalancier @ on chasse lhomme tant que la rduction des coUtssemble produire de lordre+ Dusqu8 ce que lon saperoive quelon ninvente plus rien dans le silence des nombres et quil faut 8

    nouveau repartir 8 la chasse de lhomme+ : compris sil le fautavec des , chasseurs de tCtes F V%ais la complexit conomique trouve son expression

    quotidienne la plus caractristique sur un plan de rencontre plusprofond+ qui intgre les observations prcdentes tout en lesdpassant @ le plan de la confrontation du neuf et de lancien.

    La collision entre le neu' et lancien

    >i+ par exemple+ lopposition que lon avait voulu instaurer 8 la findu *e sicle entre , nouvelle conomie et , conomietraditionnelle sest rapidement rvle peu pertinente+ cest quela ligne de fracture entre le neuf et lancien nobit passervilement aux apparences. Tout en persistant dans une culture

    et des attitudes maDoritairement conservatrices+ lconomietraditionnelle se rvle parfois capable de gnrer ou dintgrer de

    vraies innovations+ techniques mais aussi managriales ethumaines+ lesquelles peuvent srieusement bousculer lescomportements et les acquis. est en particulier le cas pour la

    libert rellement ngocie du temps de travail+ pour les t:pes demanagement qui ne confondent pas le participatif et lemanipulatoire+ ou encore pour les chartes dthique interne etexterne qui restent attentives 8 la vie quotidienne et necroupissent pas au fond dun placardF

    #un autre cJt+ toutes les ouvertures et les champsdapplication qui se dessinent dans les activits conomiquesnouvelles ou dans les entreprises Deunes sont loin dliminer leurstraits archaYques. (ous avons dD8 voqu lexubrance des

    passions boursires et les m:thes de la fortune rapide et m:ope+auxquelles nous nous nous devons daDouter la communication etlchange trafiqus+ ainsi que les ententes au dtriment desconsommateurs. (ombre dentreprises a:ant pignon sur rue ont

    voulu se montrer plus attirantes+ plus profitables+ plus honnCtesquelles ne ltaient en ralit. Les entreprises de tlphoniemobile ont t condamnes pour cela 8 de lourdes amendes+ sansque lon ait le sentiment dune efficacit profonde de la sanction.Les entreprises qui+ avec les facilits des techniques de

    , communication + ont maquill leurs comptes+ tromp leursactionnaires forment une liste trop longue 8 citerF Xuant 8 la viequotidienne dans les activits modernes+ lapparentedcontraction et la Deunesse de leurs acteurs ne parvient pas 8masquer le renouveau dun ta:lorisme dans lapplication desprocess des services standardiss et dans les conditions de travail

    ) *roupe (+rolles

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    qui sont en vigueur. Les cadences+ les automatismes verbaux etadministratifs des centres dappels 8 lchelle plantaire sont de cepoint de vue difiants. (ous sommes contraints de nous rendre 8lvidence @ les nouvelles activits conomiques sont loin desextraire de la , soupe conomique primitive V

    $n se rend compte avec beaucoup de retard du dlaincessaire pour prendre conscience de ces ralits. Lillustrationde notre incapacit historique 8 concevoir et+ a fortiori+ 8 anticiperla complexit conomique+ sest exprime de faon clatantedurant les annes qui ont clJtur le *esicle et ouvert le suivant.

    &cte ' @ Lconomie traditionnelle est morte H &cte '' @ La, nouvelle conomie doit prendre les commandes H &cte ''' @ Lanouvelle conomie est morte H &cte '0 @ )etour 8 la vie des seules

    valeurs solides+ celles de lconomie traditionnelleF &cte 0 @

    'nsuffisance de lconomie traditionnelle pour rpondre aux dfisplantaires @ conomie traditionnelle et nouvelles activitsconomiques doivent trouver un terrain de complmentaritFqui demeure difficilement praticable. (ous en sommes l8.

    ette premire , ondulation + probablement plus culturelleque naturelle+ traduit une tendance lourde+ une sorte dacquisgntique qui veut que nous interprtions les faits de lvolutiondavantage en termes depouvoirquen termes de liens. Xui devientle guide+ le leader+ qui peut prtendre 8 dominer lautre+ 8 le faire

    disparaBtre 3 >pontanment+ la ngation de la complexitsexprime par la recherche dune ligne+ ou mieux dune ligne quilimine les connexions+ les ,parasites + censs la nuancer en luidonnant la forme dun rseau. 'l faut admettre que les schmasdu dterminisme historique marxiste O selon lequel une forcematrielle constitue en classe prend ncessairement le relais et le

    pouvoir de lautre O ne nous ont pas aids 8 nous en dgager Hmais linterdiction absolue+ dans la concurrence librale pure etparfaite+ de communiquer entre les acteurs Deunes ou vieux+ tousconsidrs comme des , atomes adDacents+ na pas davantagefavoris ces connexions entre le neuf et lancien qui forment la

    complexit.ette imbrication+ cette collision entre le neuf et lancien danstous les genres dactivit conomique+ est non seulement lamanifestation maDeure de la complexit conomique+ mais aussi laplus tendue+ car elle touche autant le domaine matriel que ledomaine immatriel couramment admis+ ou tel que nous lereconsidrons.

    ?ien plus que la multiplication des acteurs dans le Deuconomique+ bien plus que lavalanche dinformations+ de

    procdures et de produits nouveaux 8 intgrer+ cest bien laconfrontation du neuf et de lancien et les interactions quelleinduit quil importe maintenant de scruter dans toutes lesorganisations et situations conomiques. >i+ dans une production+un change+ une quipe+ voire une entreprise+ tout est neuf outout est vieux+ quand par exemple un manager a pu choisirlibrement chacun des membres de son quipe ou+ 8 linverse+conserver tous les plans de carrire tablis+ alors les choses sontsimplesF %ais ce genre de situation est devenu trs rare.

    4our anal:ser la complexit conomique+ laccompagner+ lavivre+ le premier mouvement est de reprer puis de suivre leslignes de partage entre le neuf et lancien. >e dfier des signauxde linformation courante nest pas chose aise. "t pour parodierlhumoriste+ on doit se rendre 8 lvidence @ ce qui est vraimentnouveau ne , vient pas forcment de sortir V est notamment le

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    cas des cultures biologiques+ du respect entre client et fournisseur+de lattention au dveloppement rellement durable+ delapprentissage de la communication praticableF+ qui plongentleurs racines tant dans la permanence historique que dans lesremous du prsent.

    Les choi& dans la comple&it

    4rogresser dans le reprage de la complexit est une premiretape. 0ivre la complexit nous place devant des choix difficiles @choisir ce qui dans limmensit des prcdents et des habitudes, reste 8 conserver + et ce qui dans la multitude de la nouveaut, mrite dCtre accueilli + le reste tant momentanment oudfinitivement mis de cJt. >i lon se place du point de vue despa:s+ il est clair que celui qui avait le mieux relev le dfi de ceschoix difficiles Dusquau dbut du *e sicle tait les tats-7nis.#e faon parfois brutale+ ils avaient su se sparer de quantit deprcdents bloquants et accueillir des nouveauts risques dont lapertinence a t par la suite prouve. %ais il serait faux de croireque les tats-7nis nexcellent que dans leur capacit 8 liminerlancien. I linverse de l"urope+ ils ont souvent et Dusqu8auDourdhui conserv des emplois de proximit rputsimproductifs @ on : trouve encore beaucoup de pompistes+ degardiens dimmeubles ou de parWingF #oE la faiblesse de leurtaux de chJmage+ mCme si elle est en partie due 8 des emploisquon qualifierait ici de prcaires. Les choix effectus relventdonc bien dune ligne de partage entre le neuf et lancien+ quinobit pas servilement 8 la chronologie mais exprime une culture

    qui navigue entre pragmatisme et transformation du monde. Lesfilms futuristes ou de science-fiction qui en mergent sont de cepoint de vue particulirement rvlateurs. Xuand ils ne sontquune accumulation de nouveauts O fussent-elles fascinantes O+ils demeurent simplistes et peu crdibles. eux qui retiennent

    lattention sont ceux dont la complexit offre un tonnantmlange de neuf et dancien. #es films comme La Plan#te dessinges+ Star $ars+ %inorit& 'eport ou ()! vu excellent dans laconfrontation ou la collision des structures et des habitudes dumonde ancien Marchitectures+ organisations hirarchiques+ t:pes deraisonnement+ Deux+ nourriture+ coins de natureFN et de lanouveaut la plus radicale Mtransformations biologiques+cologiques+ mutations irrversibles+ changement duniversFN.est ce qui produit leffet de vrit complexe. Lune des pistes les

    plus fcondes pour expliquer la renaissance des tats-7nis dansla dernire dcennie du *esicle Malors quon les prdisaitdclinants dix ans plus tJtN nous conduit 8 leur gestion de ce quenous dfinissons ici comme la complexit. "n revanche lebasculement opr au dbut du *e sicle dans le sens duMnoNconservatisme Mqui revoit le rapport neufZancien plutJt 8 labaisseN a certainement affaibli la capacit de ce pa:s 8 affronter lacomplexitF Les rsultats de llection de novembre *1 nousen diront davantage sur la suite prvisible.

    La difficult des choix dans la complexit O qui concernentautant les fermetures dusines+ les prretraites+ les volutions et lanotion mCme de carrire+ que la cration demplois+ la mobilit+ lerisque dentreprendreF O mrite sUrement que viennent saDouteraux dterminants de lconomie matrielle ceux dune conomieimmatrielle rinvente. Le mariage d'nternet avec les activits

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    traditionnelles+ limpratif dintgrer dans les start-up les valeurshumaines de lentreprise qui ont travers les Qges et de tisser desliens entre les impulsions cratrices des pionniers+ les conseils desmodrateurs et le savoir-faire des hommes dexprience sont desdfis caractristiques de la conduite de la complexit.

    La confrontation entre le neuf et lancien npargnevidemment pas le langage du mouvement conomique. 'l estDudicieux de qualifier de , classique lconomie qui sest vcuemaDoritairement dans le pass+ celle que lon a thorise de la findu 1e sicle Dusquau milieu du *esicle+ et plutJt modliseensuite. ette conomie classique comporte des prolongements

    vivaces dans toutes nos organisations. "lle se situefondamentalement sur le versant matriel qui fait la part belle aunombre+ en exaltant la rduction des coUts et lobligation de

    business models+ et ne voit limmatriel que dans une notion de, services qui nchappe aucunement aux lois du matriel.%ais la complexit veut qu8 cJt de cette premire conomie

    se vive aussi une conomie au mouvement plus libre et plusd:namique+ plus rebelle aux modlisations+ car tirant sonvolution exclusivement de son vcu et daucun principeidologique prtabli ou souverain+ comme la , concurrence pureet parfaite + la , dictature du proltariat + la socitd, abondance ou des , loisirs + la , cration de valeur pour

    lactionnaireFKe propose de la nommer , conomie volutive . volutive+parce quelle avance grQce au pragmatisme de ses acteurs+ et quaulieu de partir de concepts thoriques descendants et parfois, assommants Mcar la tho-rie pse touDours au-dessus de nostCtesFN+ elle cre ses propres concepts , remontant du vcu .

    &insi des entreprises vont rellement communiquer tout enrestant fortement concurrentes+ et pratiquer ce que Dai appel la, communication concurrentielle !H des $(= vont srieusementtravailler avec les entreprises quelles dnoncent H 7nilevercontinue son travail avec le [[G depuis plusieurs annes+ de

    mCme que (iWe avec =lobal &lliance et Lape:re avec=reenpeace. 4lus tonnant @ deux puissants fondsdinvestissement amricains+ RR) et T4=+ ont entrepris deracheter le groupe nergtique texan T\7+ non seulement pourune somme colossale M!! milliards de dollarsN+ mais surtout enexigeant lannulation de 1 des centrales lectriques au charboninscrites dans les plans dinvestissement+ ce qui devrait empCcherlmission de plusieurs di;aines de millions de tonnes dmissionde carbone+ en dclarant @ , RR) et T4= veulent faire cesser le

    combat avec la communaut cologique et travailler de concertavec lorganisation "nvironmental #efense du TexasF Laquestion cologique est devenue un problme financier quetoutes les entreprises mettrices de carbone devront prendre encompte . #ans un autre registre+ mais touDours selon le mCmeprincipe+ des s:ndicats ralistes vont construire lavenir avec unepartie des pouvoirs publics et des patrons non moins ralistes @une dmarche de , dialogue conomique entre le %edef et lesorganisations s:ndicales mene depuis *6 a par exemple abouti

    8 un texte commun de rflexion sur la politique industrielle de laGranceF &vance modeste+ mais qui eut t impensable par lepass.

    #pendante de la , ressource humaine + lconomie volutivevise la prennit plus que la performance blouissante. Les

    ! #ans louvrage Sortir de la prhistoire conomi*ue+ 4aris+ "conomica+ 995.

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    exemples que nous venons de citer la situent proche des principesdu vivant oE lalliance entre espces apparemment antagonistesnest pas rare. Les acteurs mettent en Auvre des comportementset des stratgies qui forment ce que lon pourrait appeler une, bioconduite + cest-8-dire une conduite des affaires

    conomiques plus relie aux rgles de la vie quaux rapports deforce mcaniques. 4our en arriver l8+ lconomie volutive imposeaussi une vision+ un traitement et une intgration de limmatrielqui transgressent rsolument lenclos de lconomie classique.

    4our reprendre notre vision de la complexit+ nous dirons queles collisions brutales et les dialectiques subtiles entre conomievolutive et conomie classique savrent capitales pour affronterla complexit conomique de notre temps et le domaine delimmatriel.

    Lexplosion de lconomie des services+ et particulirement desservices en ligne+ est-elle reprsentative de ce domaineimmatriel 3 Le virtuel renouvelle-t-il le champ de lconomieimmatrielle 3 La confusion entre information+ communication etrelation noblige-t-elle pas 8 un claircissement radical 3 (e faut-ilpas admettre que ceux qui travaillent sur lconomie delinformation nont pas encore entam de travail rel surlconomie de la relation 3

    es questions seront encore plus lgitimes si nous nous

    portons au cAur de la distinction entre conomie classique etconomie volutive.

    conomie classique versusconomie volutive

    Xuel est le trait dominant de lconomie classique 3 est sansconteste la notion dquilibre @ quilibre de loffre et de la

    demande+ prix dquilibre+ revenu dquilibre+ quilibre duconsommateur ou du producteur+ quilibre financier+ quilibregnralF Toutes les facettes de lquilibre fondent ou Dustifientles comportements et les situations optimales de lconomieclassique.

    Lattrait de lquilibre

    Lquilibre nest que trs rarement une donne initiale+ cest une

    recherche+ un hori;on 8 atteindre+ une sorte de situation idale quiimplique que certaines conditions soient respectes ou mises enplace. Les acteurs conomiques+ gnralement confronts 8 dessituations de dsquilibre+ en particulier de raret+ supportent destravaux quotidiens pour les liminer et atteindre un , quilibre qui apparaBt comme le but ultime de leffortF Le rconfort enquelque sorte.

    &insi+ la recherche de lquilibre correspond autant 8 unemotivation des acteurs qu8 un aboutissement des forces et des

    intrCts contradictoires qui sentrechoquent dans les situations dedsquilibre.

    4renant appui sur ce socle+ la promesse de lquilibre remplitdans les rapports socio-conomiques une fonction importante de, scurisation et dacceptation de lattente . Les investisseurspromettent lquilibre 8 un hori;on acceptable pour les

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    apporteurs de fonds+ ltat promet les grands quilibres+ lesorganismes internationaux+ lquilibre des changes+ et lesredresseurs dentreprise+ lquilibre au terme desrestructurationsF

    Xui pourrait a priori sen plaindre 3 La proccupation

    dquilibre de lhomme de la rue reDoint celle du chercheur+ dudcideur et des instances politico-conomiques. Les tableauxremplis dquations du thoricien conomique 8 la recherche delquilibre et de ses conditions semblent recouper lesproccupations courantes et leur apporter la caution scientifiquedun quilibre possible.

    ette alliance obDective de la rflexion pousse et de lademande commune nest pas sans effet sur le rel @ le chefdentreprise+ le manager+ le dcideur local ou national acquirent

    non seulement le rflexe de recherche de lquilibre+ mais tendent8 en prcipiter la venue et 8 s: accrocher quand il paraBt atteint.7ne incursion rapide dans lhistoire de la pense conomique

    nous confirme lattachement 8 ce critre souverain. Le dbat surlquilibre na Damais t pouss asse; loin pour remettre en causeles vertus ou linluctabilit dun quilibre en final+ un peu commesi la recherche et latteinte de cet hori;on allaient de soi.

    7ne partie des thoriciens a cherch 8 Dustifier les quilibresexistants+ ou sest concentre sur les conditions 8 respecter pour

    atteindre lquilibre partiel ou gnral @ Kean-?aptiste >a: avec la, loi des dbouchs + #avid )icardo au suDet de la rente foncireet de lchange international+ Lon [alras pour lquilibre gnral+

    Kohn )ichard ]icWs pour l, quilibre d:namique et+ plus prs denous+ lcole noclassique qui opre les dveloppements

    mathmatiques ncessaires aux gnralisations des approches delquilibreF

    #autres ont concentr leur anal:se sur les dsquilibres lesplus frappants 8 leurs :eux et capables dinflchir lhistoirehumaine+ mais vers un nouvel quilibre @ Thomas )obert %althus

    prend appui sur le dsquilibre entre la croissance des humains etcelle de leur nourriture pour annoncer en final latteinte dunquilibre gnral dans un tat stationnaire proche de lasubsistance+ voire de la famineF

    Rarl %arx prend appui sur les dsquilibres des rapports deproduction et de la lutte des classes rsultante pour annoncerlavnement ultime dune socit dabondance oE l, humanitnouvelle se trouve enfin libre de ses dsquilibresF

    Kohn %a:nard Re:nes est probablement celui qui va le plus

    loin car+ en prenant acte du dsquilibre durable entre productionet consommation durant la crise de 9*9+ il va proposer+ pour ensortir+ de provoquer dlibrment le dsquilibre entreinvestissement et pargne Mlinvestissement devenant suprieur 8lpargne+ en particulier sous limpulsion de ltatN. tait 8lpoque un crime de lse-maDest pour les thories dominantesde lquilibre classique. Re:nes est celui qui sest le plus approchdune remise en cause radicale de lquilibre+ en proposant unt:pe de dsquilibre salvateur. %ais+ la:ant fait+ il va ensuite

    singnier 8 nous MdNmontrer quil sagit l8 dun simple moment 8passer H par des mcanismes de multiplication dinvestissement+de revenu+ et finalement dpargne+ nous retrouverons au bout ducompte lquilibre entre linvestissement et lpargneF &insi+Re:nes lui-mCme na pu se soustraire 8 la promesse de lquilibre

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    dinvestir ou dembaucher 3 "t si une organisation se trouvespontanment en quilibre+ a-t-elle envie de se remettre en causeet de tenter quelque changement qui la dstabiliserait 3 Lespectacle mCme des structures qui , dgraissent nincite-t-il pas8 ne rien entreprendre+ ce qui gnre une ambiance de frilosit et

    dattente 3$n le voit+ le dbat sur ltat dquilibre+ Dusqualors absent+mrite bien dCtre engag. &tteindre des points dquilibre estsUrement ncessaire pour faire le bilan et souffler un peu. %ais

    vouloir des surfaces dquilibre transforme lquilibre stable enstatisme et la tranquillit en immobilit. $n comprend ainsimieux pourquoi les racines de cet attachement 8 lquilibre nous

    viennent du monde ancien+ peu suDet 8 linnovation ou au simplemouvement+ arc-bout sur des certitudes intangibles+ plus encore

    sur une conception du sens de lhistoire menant inexorablementvers un tat stable ou stationnaire+ comme le vo:ait %althusF0ision pessimiste 3 La pense classique sen dfend et invoqueplutJt le ralisme. )alisme dune histoire qui regarde avant toutle pass+ de c:cles oE rien ne se modifie profondment+ dervolutions qui ne sont que des cercles vicieuxF 7ne partie de la

    vie conomique reste arrime 8 ce socle. La sagesse populairevient dailleurs en renforcer lassise+ lorsquelle voque avecrespect la russite de celui qui , a fait son trou V >uprCme

    rcompense de leffort classique+ mais qui n: verrait pasauDourdhui de faon tout aussi raliste celui qui , creuse satombe 3

    est donc une tout autre face de la ralit qui fonde lexistencede lconomie volutive.

    Le dsquilibre comme 'orce motrice

    Lconomie volutive+ plus proche des ralits qui bougent+ dessituations qui se transforment+ des Ctres et des organisations quicheminent ailleurs et autrement+ part fondamentalement du fait

    que tout mouvement O ph:sique ou humain O prendncessairement naissance dans un ou plusieurs dsquilibres.Le dsquilibre nest plus ltat des choses ou du monde 8

    liminer ou 8 fuir+ mais au contraire ltat caractristique de la vieen mouvement+ qui nous rveille autant quelle nous fatigue+ etpeut nous briser+ ou en tout cas nous priver de toute paisseur.est le fameux , pierre qui roule namasse pas mousse quenous impose 8 nouveau le dicton populaire+ nous renvo:antimmanquablement au loup libre de courir+ mais dcharn+ de la

    fableF >auf que ces images de lgret et de mobilit nont plusles connotations ngatives quelles avaient autrefois.La ralit drangeante dauDourdhui ne permet pas de traiter le

    dsquilibre seulement comme un mal ncessaire+ unemaldiction+ un cart quil faut ramener 8 lquilibre. ertainsdsquilibres sont moteurs ou vitaux H dautres bloquants+ voiremortels+ surtout si on les laisse fuir. Laction ncessaire contre lesdsquilibres doit nous motiver+ nous faire , nous lever tJt etnous coucher tard + mais pas ncessairement pour aboutir 8 un

    quilibre. 'l sagit plutJt de parvenir 8 contrJler les dsquilibres+les empCcher de fuir au-del8 dun niveau qui les rendraitcatastrophiques et maintenir notre veil et notre vigilance dedsquilibre en dsquilibre+ tout en rencontrant ou utilisant ici etl8 quelques points fugitifs dquilibre.

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    #ans les pratiques conomiques quotidiennes+ le contrJlerussi du dsquilibre nquivaut pas franchement 8 un quilibre+il est seulement une condition de poursuite du mouvement+ destransactions et des ngociations risques+ auxquelles les , pentes conomiques nous soumettent.

    4our rflchir 8 la pertinence de la notion de dsquilibre enconomie+ une comparaison peut savrer fconde @ celle de lapratique du sWi. &prs tout+ le langage de lconomie classique adepuis longtemps intgr les termes de , Deu conomique +, comptition + , sport 8 MhautN risque F &lors pourquoi pas 3

    La comparaison pourrait Ctre dautant plus Dustifie quelconomie classique a souvent raisonn comme si les acteurs setrouvaient en terrain plat+ sur lequel ce qui compte est la positionde lun par rapport 8 lautre H un terrain oE lon peut faire son

    trou+ difier des p:ramides+ des cathdrales+ mais aussi deschaumires durables+ un terrain oE les chCnes prosprent mieuxque le chiendentF 7n terrain oE la rationalit+ linformation etles stratgies ne risquent pas dCtre emportes sur des pentesabruptes+ au-del8 du contrJle des acteurs.

    $r+ les acteurs conomiques nont plus le sentimentauDourdhui dCtre sur un terrain plat H ils se voient en terrainglissant ou sur des pentes. >ur des pentes 8 gravir ou 8 descendre+avec parfois limpression de s: comporter comme des >is:phe

    poussant leur rocher+ mais ces pentes conDuguent des doses dedcouverte+ dapprentissage+ de connaissance+ dincertitude etdinscurit+ qui caractrisent la pratique des activitsconomiques de notre temps.

    &u milieu du *e sicle+ quand les acteurs et les thoriciensconomiques dcouvrirent les phnomnes de croissance

    continue et shabiturent 8 vivre dans lambiance nouvelle quelleproduisait+ limage la plus utilise pour rendre compte du contrJledu dsquilibre tait celle de la bic:clette et du c:cliste. Lacomparaison sorienta+ soit en direction du mo:en de locomotionlui-mCme O la bic:clette ne pouvant tenir en quilibre que dans le

    mouvement des pdales O+ soit vers le suDet du c:cliste censtrouver son quilibre dans lobligation de donner des coups depdales continus+ et pour lequel tout arrCt devenait fatalF taitla voie ro:ale du , contrJle du dsquilibre par la fuite en avant +et lon peut mesurer auDourdhui lampleur desd:sfonctionnements gnrs par une telle vision+ dans lesrelations entre nations ou rgions+ dans les relations de travail+ demCme quentre le s:stme conomique global et sonenvironnement naturel.

    La comparaison est autrement moins dangereuse dans le casdu sWi+ oE il ne sagit pas de fuite en avant+ mais de connaissancedu terrain et daccrochage 8 ses caractres+ 8 ses particularits.est le lien entre le Deu et ladaptation au terrain+ donc le respectdu second qui prime.

    #ans le sWi+ comme en conomie+ le dsquilibre est lacondition du mouvement. #ans lapprentissage du sWi+ leshumains habitus au terrain plat ont souvent le rflexe de refuserla pente. 'ls ont alors tendance 8 raidir leur Dambe aval comme

    pour retrouver un semblant de terrain plat+ et cest dans une telleposture quils risquent laccident grave+ beaucoup plus que silsfont , corps avec la pente + comme le voudrait le moniteurF%ais pour cela+ il faut un minimum de technique+ dapprentissage+de chutes acceptes et dtat desprit positif permettant de

    vaincre lapprhension et de se lancer dans le Deu.

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    est parce que les champions+ comme les enfants+ sontcapables de prendre le dsquilibre maximum possible+ et de lecontrJler par des points techniques mais trs fugitifs dquilibre+quils sont en mesure de Douer le Deu pleinement+ et en mCmetemps de minimiser les risques corporels de lacteur. 4ourtant+ les

    gens qui regardent descendre les champions ou les enfantsprodiges ont gnralement le rflexe de crier admiratifs @ , Xuelquilibre V + et non pas @ , Xuel contrJle du dsquilibre V

    Le Deu auquel nous nous livrons ne va pas Dusqu8 rclamer unemaBtrise du dsquilibre+ car ni le champion ni lenfant nemaBtrisent vritablement le dsquilibre qui conditionne leursmouvements et les entraBne dans le parcours. Tout au pluspeuvent-ils contrJler leur prise de dsquilibre et sesconsquences Mvitesse+ positionFN par un apprentissage exigeant

    et un tat desprit volontaire+ qui excluent la prtention dunemaBtrise souveraine. est au fond une belle leon de modestiedont lavantage maDeur est de ne pas rserver le contrJle dudsquilibre 8 une lite+ mais de le mettre 8 la porte dun plusgrand nombre.

    4ar quels dtours culturels+ accumuls tout au long de lhistoire+les organisations et les Ctres humains ont-ils fini par nommer, quilibre ce qui est un , contrJle du dsquilibre 3 %esuredconomie 3 Tic de langage 3 %anipulation des ralits 3 hacun

    peut mesurer le travail de re-connaissance 8 entreprendre si unDour lhomme parvenait 8 emplo:er les termes , contrJle dudsquilibre et non plus , quilibre pour qualifier la maDoritdes actions conomiques fertiles.

    'l ne sagit pas dune simple question de langage+ car+ enintroduisant la fiction de lquilibre 8 propos de ralits

    d:namiques+ on se prive de travailler dans deux directionsprimordiales pour lvolution conomique @ $n vite le travail de connaissance et danal:se des

    dsquilibres moteurs+ de ceux qui nous font bouger+ Doueret vivre+ avant peut-Ctre de devenir mortels si on les ignore.

    e travail devrait constituer la premire marche de touteentreprise conomique. #ans le mCme temps( on occulte le travail de contrJle de ces

    dsquilibres H pour viter dCtre entraBns dans uned:namique brutale ou un cart devenu irrductible+comment et avec qui les contrJler 3

    La Donction permanente de ces impratifs est loin de simposerspontanment aux organisations humaines O non seulement cellesqui restent obsdes par lhori;on dquilibre+ mais aussi celles qui

    en prennent brutalement le contre-pied VLe pass nous a frquemment donn 8 voir des hommes+ des

    organisations+ des tats mCme Mpensons aux , dragons asiatiques des annes 99N+ lasss de limmobilisme ou excitspar la perspective du mouvement+ se Deter 8 corps perdu dans ledsquilibre+ sans la moindre recherche de contrJle. "t que direde lvolution de la sphre financire qui+ depuis la crise de 9*9Dusqu8 celle de *1+ sest priodiquement engouffre dans ledsquilibre incontrJl+ avec linvention de produits grisants

    gnrateurs dune ambiance , casino 3 $n se trouve alors placdevant un s:ndrome inverse de celui de lquilibre O que nousavions nomm , s:ndrome de lquilibre par le vide O+ uns:ndrome du , raider ou trader fou + de la , fivre asiatique oude celle des pa:s mergents+ de la dbQcle du spculateurF

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    7n peu 8 la manire du sWieur qui+ se lanant dans la pente sansune gale proccupation du mouvement et du contrJle+ sortirait

    violemment de la piste+ les hommes et les organisations qui sontacquis au versant du dsquilibre se laissent souvent entraBner

    vers un chaos qui devient avalanche pour tous ceux quil emporte.

    (ous devons donc nous garder de sombrer dans deuxs:ndromes opposs+ et la difficult daffronter et dutiliser ledsquilibre moteur vient de l8. &u fond+ tout se Doue en termesde seuils.

    'l existe un seuil , infrieur de dsquilibre en dessous duquelles acteurs conomiques stagnent dans la routine+ conDuguent lasomnolence et limmobilit H et il existe aussi un seuil , suprieur de dsquilibre+ plus ou moins proche du premier selon leshommes et les organisations+ au-del8 duquel le dsquilibre

    devient incontrJlable.Lexprience dune vie conomique durable se Doue entre cesdeux seuils+ dont la connaissance et la pratique ne sont pasintuitives.

    $n comprend mieux ainsi pourquoi des masses dCtreshumains peu duqus aux nuances du mouvement conomique seportent plus naturellement vers la scurit dun tat dquilibredans limmobilit+ que vers la pratique du dsquilibre sur lequelplane le risque de basculement dans un chaos mortel.

    Tant que lon ne dpasse pas lun et lautre des deux s:ndromesque nous offrent les tenants de lquilibre statique et ceux dudsquilibre incontrJl+ il subsiste peu de chances dvoluer versune vision et des pratiques conomiques qui seraient plus prochesdune bioconduite patiente que dune lutte contre la seule raretmatrielle maille dune mcanique de rapports de force.

    $n peut ici encore revenir 8 limage du sWieur+ bonne pour lesconditions et les rgles du Deu conomique O pente+ utilisation etcontrJle du dsquilibre O+ mais critiquable aussi+ car tropindividualiste. "n conomie+ on est au moins deux O sauf 8 croireque lon pourrait bQtir une conomie sans changeF Le rCve de

    lautosuffisance+ de se construire tout seul+ a anim bien des Ctreset des nations+ mais sest touDours mal termin pour les entCts.Lchange demeure une ralit incontournable en conomie+ 8condition quil mette en Deu des acteurs avertis+ a:ant acquis lesprincipes et les mo:ens de Douer.

    est pourquoi le sWi coordonn reprsente finalement laparabole la plus adquate @ chaque acteur connaBt et contrJle sonpropre mouvement+ mais tient compte dans sa traDectoire et sonitinraire du mouvement de lautre. hacun surveille et prend

    soin de son Deu+ sans oublier celui de lautre H bien plus+ chacun sedoit de coordonner ses mouvements et son parcours avec ceux delautre+ pour lefficacit partage ou pour lesthtique de lachorgraphie densembleF Xuel programme engageant pour uneconomie sextra:ant de ses rugosits primaires V

    ) *roupe (+rolles =

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    Premi#re partie

    L" #$%&'(" #"

    L'%%&T)'"L

    vant de parler dconomie immatrielle+ il convient de

    sentendre sur le domaine de limmatriel cens donner uncorps+ des biens+ et ventuellement une Qme+ 8 une conomie quilui est propre.&

    >ans lui Ctre oppos+ limmatriel conomique ne recoupe pasexactement limmatriel philosophique+ ni celui du langagecourant. Limmatriel conomique est porteur du caractre actif

    de lconomie H son existence est tributaire dune pratique dont ildoit pouvoir rendre compte. &insi limmatriel conomique nesaurait exister sans Ctre cr+ produit par des acteurs et des, facteurs de production. >a pratique donne lieu 8 des changes+8 des investissements+ elle permet de poursuivre et datteindrecertains t:pes ou pJles de valeurF?ref V >e retrouvent ici lesingrdients maDeurs dune vraie vie conomique.

    La notion dactivit immatrielle finalise est capitale @ cest unepratique exigeante qui ne saurait longtemps rester machinale+rptitive+ , industrielle . I linverse+ elle ne saurait Ctreuniquement spontane sans vgter et stioler. "n ce sens+limmatriel conomique trouve des connexions importantes avecla , philosophie de laction et les questions quelle soulveautour de lthique et du rapport entre les mo:ens et les fins.

    >i lon aDoute que ce nest pas limmatriel dans lindividualitqui nous importe+ mais limmatriel qui rsulte du , on est au

    moins deux + tel que le postule toute existence conomique+ onaura compris que ce sont avant tout les activits de relation+ quimettent en Deu les hommes et les choses+ qui occupent uneposition centrale dans notre propos.

    eci nous conduit 8 prendre de la distance avec la dsignationcourante de lconomie immatrielle. Le langage conomiqueclassique a intgr le terme pour caractriser le domaine du non-tangible+ du non-palpable qui+ pourtant+ intresse lconomiepuisquil a acquis une valeur marchande @ de la musique+ de la

    parole ou de la pense vendables+ un fonds de commercengociable+ une ide brevetable et susceptible dCtre valoriseF$n peut : aDouter ces activits non palpables mais pa:antes+comme les services de transport+ dassurance+ de scurit+ denetto:age+ de banque+ de e-businessF La liste est longue+ ds lors

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    de poudres explosives se moquent de causer au monde matriel lemeilleur ou le pireF

    Le champ occup par limmatriel dans nos organisationsconomiques+ et qui prend sa libert par rapport auxdterminants matriels+ acquiert progressivement une dimension

    visible avec des effets marquants sur les bioconduites des acteurs.#D8 dans le court terme+ et a fortiori lorsquon le dpasse+ latoute-puissance du matriel savre limite et contrainte.

    &u dbut du *e sicle+ les soubresauts de la ralit socio-conomique viennent confirmer cette tendance+ car le retour enforce apparent des considrations matrielles+ la reprise en maindu pouvoir par lactionnaire et la brutalit des dcisions dcoulantde la seule logique financire semblent davantage sapparenter 8une sorte de raction de bCte blesse qu8 un rel pouvoir de

    coercition durable. #evant lvidence de la monte duneimmatrialit non soumise au matriel+ larrogance financireressemble 8 une tentative pour battre le rappel et exprime unultime retour aux sources dun capitalisme premier qui se saitdpass+ et dont on peut penser que lnergie faiblirainexorablement. La tourmente financire de la fin *1 en estsans doute un signal catastrophique.

    >i lon fait un retour 8 la fin du sicle prcdent+ on se souvientque des centaines de milliers demplois avaient t sacrifies sur

    lautel de lquilibre classique dans toutes les activits qui avaientmarqu leur temps @ sidrurgie+ construction navale+ armement+textile+ automobile+ mais aussi transport+ banqueF H cescharrettes humaines+ comme on les appelait+ avaient dclench lescris des militants irrductibles ou des Qmes sensibles+ vite touffs

    par lalibi du progrs+ la fuite dans la technologie et la promessede labondance ou dun bien-avoir dguis en bien-CtreF

    %ais dans la priode suivante+ les grandes entreprises qui ontannonc des licenciements brutaux et sans prparation ont etcontinuent de soulever des ractions de rprobation grandissantes

    et tenaces+ comme si cette pratique tait plus que Damais devenueintolrable+ et ce malgr lemprise et la force apparente dunefinance loigne des hommes. #ans ce registre les pa:smergents+ dont on souligne le plus souvent le mpris 8 lgarddes hommes au travail+ peuvent aussi agir brillamment @ (aresh=o:al+ le patron de la compagnie indienne Ket &ira:s+ a dcidde rembaucher les 9 salarisMVN quil avait licencis Mle plusimportant licenciement de lhistoire de laviation indienne+octobre *1N. "ntre sa , conscience et l, arithmtique + il a

    dclar choisir la premire+ et pour rendre son choix viable+ il adcid de sallier avec un concurrent de poids MRingfisherN et defaire un effort norme de ngociation avec le gouvernement.

    ela a certainement quelque rapport avec limmatrialitmontante. "n intgrant une part dconomie immatrielle+ nul nepeut plus confondre conomie et finance MarithmtiqueFN. #ansle s:stme conomique devenu global et complexe Mau sens oEnous lavons entenduN+ les diffrentes versions de la financedoivent fatalement composer avec les autres mlanges de neuf et

    dancien @ ceux du commerce plus ou moins lectronique+ de larecherche plus ou moins applique+ des transactions culturelles+des changes mettant en prsence des hommes et leursmotivations+ souvent aux antipodes de lexigence du coUtminimumF $n se demande si la crise des subprimes seraitadvenue si chaque directeur dagence bancaire avait pris le temps

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    de recevoir chacun des demandeurs de crdit+ avait examin aveclui les diffrents scnarii en fonction des volutions prvisibles+ etsils avaient bQti en commun la somme des rponses adaptes auxrisques personnels et globauxF &u fond+ rien dautre quelchange normal qui sied 8 toute activit conomique digne de ce

    nom. &u lieu de quoi+ il fut seulement question de faire , avaler 8 la multitude de clients des , prCts-fabriqus du mCme modlemathmatique dupliqu des centaines de milliers de fois @ vive laMreNproduction et adieu lchange V

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    Limmatrialit en conomie 3

    en tenir 8 la texture immatrielle des activits+ cest donc sesituer 8 lcorce des choses. est seulement faire rfrence 8

    une immatrialit , premire ou , primaire + peu significativepour le vcu conomique comme pour le bon sens commun @demande; aux gens si le cinma+ la publicit ou les grands mdiassont immatriels+ vous rcoltere; rires et sarcasmes H etargumenter sur la texture immatrielle de ces activits narrangerapas beaucoup les chosesF

    >

    Limmatrialit premire est tout au plus un point de dpartqui doit rapidement nous conduire 8 un cul de sac ou+ aucontraire+ 8 ouvrir la voie 8 une vie conomique immatrielle

    vritable.

    Le cul de sac de limmatriel+ l, immate-rien .

    #ans un monde conomique fortement marqu par les critresmatriels ou matrialistes+ le destin de limmatrialit premire detous ces biens qui ne se touchent pas du doigt peut Ctrerapidement scell.

    #ans lentreprise+ comme dans le monde ambiant+ lesstructures matrielles sont un substrat dterminant+ un socleincontournable pour qui veut pratiquer des activits ouchafauder une action future. #ans lorganisation classique+ ontrouve des bQtiments+ des installations+ des matires premires+ dumobilier+ de largent+ des Ctres humainsF #ans lentreprise, virtuelle + beaucoup moins de structures+ mais tout de mCmedes tlphones+ des ordinateurs+ du papier+ de largent, scriptural + quelques individusF

    0ue sous langle de la quantit et de la forme+ lentreprisepourrait Ctre perue comme un simple agrgat matriel faisantvoisiner ou se mlanger diffrents , tats de la matire plus oumoins travaills+ lhomme lui-mCme correspondant 8 un , tatparticulier davancement de lorganisation de la matire + commele voudraient les sciences positives V

    Limmatriel serait donc ce qui se diffrencierait de cettematire+ peut-Ctre mCme ce qui parviendrait 8 : chapper ou 8 s:soustraire.

    >i lon dit quil faut un autobus pour transporter un groupedindividus+ mais que le service de transport est un bienimmatriel non rductible 8 loutil de transport MlautobusN+ onopre une premire distinction possible entre matriel etimmatriel 8 travers la notion de , stocW et celle de , flux . LestocW de vhicules est matriel+ et le flux qui en rsulte comme

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    service de transport est immatriel. I premire vue+ la distinctionparaBt nette+ dautant que limmatriel est strictement dpendantdu matriel @ pas de vhicule en tat de marche+ pas de transport Halors que labsence de transport+ par mauvais temps par exemple+nliminera pas les vhicules. La variabilit et lincertitude lies 8

    limmatriel semblent bien plus prononces que dans le cas deschoses matrielles+ et cela apparaBt comme une premireDustification de la subordination de limmatriel+ ainsi que delattachement historique des humains 8 la lourdeur scurisante delavoir.

    #e nouvelles complications nous attendent quand on interrogeles utilisateurs sur le caractre immatriel du service. ertainsmettront immdiatement en avant le prix 8 pa:er @ , 'mmatriel 3est une plaisanterie. 0ous ave; vu le prix 3 H dautres+ qui ont

    pa: le mCme prix+ mettront plutJt en avant leur satisfaction ouleur angoisse @ , 7n beau vo:age+ trs dtendantF + , TraDetpnible+ stressantF + ce qui pourrait vouloir dire que ce sont lessatisfactions ou les angoisses retires des biens qui sontimmatrielles.

    "nfin+ si lon questionne les gens sur le service lui-mCme @, Xuel service 3 Le conducteur tait obsd par sa montre+sUrement pour faire le maximum dallers et retours dans laDourneF ou+ au contraire @ , >ervice parfait @ bien installs+

    bonne ambiance+ on nous informait des choses 8 voirF 'ci+ ilsemble que limmatriel sattacherait plutJt 8 la qualit peruequ8 la quantit reue Mle conducteur a livr tant de Wilomtres parheureN.

    4renons un autre exemple @ dans lentreprise comme ailleurs+lunion tant cense faire la force+ nous constituons une quipe de

    vendeurs devant couvrir le march par leur complmentaritintellectuelle et gographique. #ans un premier temps+ lensemblese met 8 fonctionner admirablement @ les ventes augmentent et serenouvellent+ la relation avec la clientle se dveloppepositivement+ lquipe gagne de largent et la bonne entente rgne.

    >ur la matrialit russie semble se dvelopper une immatrialitnon moins russie. %ais+ dans un second temps+ le terrain paraBtspuiser+ les positions seffritent face 8 la concurrence+ larentabilit des activits commerciales chuteF

    #eux t:pes de situations contrastes sont alors observables 8lextrieur et 8 lintrieur de lentreprise.

    La situation externe la plus rpandue affecte les relations avecles clients+ et plus largement avec les diffrents partenaires @tensions+ mfiance+ attitudes ngativesF &u contraire+ mais plus

    rarement+ les relations peuvent tonnamment ne subir aucunedgradation+ mCme si les clients reviennent moins souvent+ faisantcomprendre 8 lentreprise+ sans animosit+ quil serait bon debaisser les prix+ daccroBtre la qualit+ de dvelopper unecommunication pertinenteF

    I lintrieur de lentreprise+ le climat entre les membres delquipe devient le plus souvent dtestable+ chacun essa:ant dereDeter le mal sur lautre+ de faire cavalier seul+ attitudes qui semaintiennent mCme si des claircies reviennentF Linverse est

    plus rare @ lquipe reste soude+ parfois davantage que dans larussite matrielle+ et fait front ou mouvement face 8 ladversit.#ans les deux cas+ nous vo:ons la relation suivre la pente de la

    matrialit dclinante ou+ au contraire+ lui rsister de faonsurprenante.

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    es diffrentes situations et la multitude de celles+ micro oumacroconomiques+ que lon imagine 8 partir de ces exemples+peuvent nous permettre de cerner et de saisir la vraie notiondimmatrialit O du moins en conomie. #ans ce domaine+ oE cequi est dit ou pens ncessite une pratique pour Ctre valid+

    encore faut-il que les productions et les changes ne seconsument pas dans linstant+ mais trouvent un avenir+ un suivi+une prennit.

    #ans lexemple du transport+ le cas strict du dplacementcontre argent+ ou de la quantit de Wilomtres parcourus durant letemps de traDet+ ne saurait Ctre qualifi dimmatriel. est unservice trs matriel+ car rien ne vit dans cette transaction endehors ou au-del8 de largent et du dplacement ph:sique. "nrevanche+ la satisfaction ou langoisse qui se maintiendraient au-

    del8 de la transaction et de ses dterminants matriels peuventCtre considres comme une immatrialit positive ou ngative.4our cela+ il faut que ces sentiments puissent prendre une libertet , vivre leur vie par rapport au bien ou au service qui en ontt les supports. Le vhicule+ le traDet+ le fait daller dun point 8un autre en pa:ant sont des conditions ncessaires maistotalement insuffisantes pour rendre compte de lintgralit de lasituation cre. 'l manque les motions+ les sentiments qui sontns durant le vo:age et qui rsisteront au temps+ les relations peu

    prvisibles qui se sont instaures et ont des chances de durer au-del8 de la transaction matrielleF Xui pourrait dire+ mCme auregard de lconomie la plus mercantile+ que ces lments sontsans importance 3 ette part immatrielle quon a longtempsnglige en conomie O pour au mieux la reDeter vers dautresdisciplines+ comme la ps:chologie+ la philosophie ou

    lanthropologie O savre capitale. "lle conditionne en effetlapprciation des activits+ lestimation de la valeur des biens encause+ ainsi que les comportements futurs des acteurs.

    #ans lexemple du transport+ les passagers choisiront-ils derevenir 3 7tiliseront-ils le mCme mo:en de transport 3

    0o:ageront-ils seuls ou en groupe 3 &utant dlments capitauxpour les productions et les changes entre acteurs+ qui nedpendent pas uniquement du prix+ mais mettent en Deu lanal:seet les ressorts de la sphre immatrielle. (on seulement lessentiments et les relations cres agiront sur la poursuite ou larrCtde lactivit matrielle+ mais ces , biens immatrielsncessiteront pour Ctre , produits de faon durable lutilisationde facteurs rares+ la combinaison dnergie+ dinformation+ detemps+ comme matrice de leur conomie propre. (tant pas

    inpuisables+ ces facteurs+ qui interviennent 8 la fois dans lesproductions matrielles et immatrielles+ seront fatalementsoustraits 8 leur utilisation dans lconomie courante. est en cesens qu8 la fin dune Dourne riche en relations et peu porte surlactivit marchande+ les acteurs peuvent pourtant se sentir

    vidsF 0ids+ mais au bout du compte satisfaits ou frustrs decette , dpense + tout autant que sils staient dpenss pour

    vendre+ fabriquer des marchandises ou investir sur les marchsboursiersF

    )appelons quil nous paraBt rducteur de penser que lasatisfaction ou langoisse issues des biens sont forcmentimmatrielles+ parce quelles le sont par leur texture. >i lasatisfaction ou langoisse sont totalement lies auxcaractristiques matrielles du bien+ quelles naissent et meurentavec lui+ nous ne dirons pas ici que satisfaction et angoisse sont

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    immatrielles. 4ar exemple @ supposons que De sois satisfait de lataille+ de limage et des performances comparatives de ma voitureet que+ en mCme temps+ le risque de vol ou de sanction policireprovoque mon angoisse chaque fois que De lutiliseF %ais Deconstate que ce couple de la satisfaction et de langoisse

    seffondre ds que De vends mon vhicule. Ke ne dirais pas quesatisfaction et angoisse sont+ dans ce cas+ , immatrielles + tantelles sont lies et dpendantes du matriel qui leur a donnnaissance et mort. "n revanche+ si De continue 8 avoir dessatisfactions persistantes Met aussi beaucoup dangoissesN avec ma

    vieille guimbarde+ dont De ne me rsous pas 8 me sparer+ cestquil sest cr entre elle et moi une relation qui a largement prissa libert par rapport aux dterminants matriels Mbien que lesupport+ ici le chQssis+ soit touDours l8N+ une relation qui vit sa vie

    dans la dure pour dautres raisons que matrielles.#ans tous les cas oE limmatriel par texture ne survit pas 8labsence ou 8 la chute du matriel+ comme dans notre exemplede lquipe de vente dont les revers de fortune font que lesconstructions humaines se brisent M8 linverse de la situation oE larelation positive se maintient malgr les difficultsN+ et dans toutesles transactions de simple service contre argent+ la notiondconomie immatrielle est dnue de signification+ventuellement trompeuse Mapparence immatrielle+ ralit

    matrielleN. est un cul-de-sac de limmatriel qui nouvre aucunchamp nouveau+ qui ne cre rien+ ce qui Dustifierait peut Ctre delappeler l, immate-rien F

    Tous les services devenus , par la force des choses un peutrop industriels+ depuis le plus vieux mtier du monde Dusquauxformes sophistiques du e-business+ peuvent senfermer

    progressivement ou rapidement dans limpasse de limmatrielvide. "n revanche+ des activits qui ont touDours t considressous un aspect totalement matriel+ comme la vente ou le travail 8la chaBne+ peuvent partiellement : chapper et voir une partdelles-mCmes reDoindre limmatriel+ le vrai.

    0ers lconomie immatrielle vritable

    >i tout ce qui nous entoure peut+ dun point de vue scientiste+cest-8-dire selon la cro:ance en la suprmatie des forces de lamatire+ Ctre considr comme matriel+ et si les Ctres humainseux-mCmes tombent sous cette rgle+ oE limmatriel peut-il donc

    se trouver+ se construire 3Limmatriel rside logiquement dans lespace restant+ danslespace laiss libre par les structures matrielles. 'l est constitudes rapports entre les diffrents tats de la matire.4rincipalement+ les rapports entre les Ctres humains dans lesdiverses organisations qui les regroupent+ et+ accessoirement+entre les Ctres et les biens qui les entourent. Limmatriel seconstruit par la relation qui les lie+ une relation non finalise pardes considrations matrielles+ une relation qui peut vivre mCme

    si la matrialit ne lexige pas ou plus.Limmatrialit est ainsi constitue de la multitude des relationsqui vivent en elles-mCmes et pour elles-mCmes+ de ces relationsqui ne visent ni largent+ ni la grandeur ou la miniaturisation deschoses+ ni la consommation ou le dveloppement matriel+ mais

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    qui durent alors que le matriel est tout au plus un support ouune consquence+ Damais un but.

    Limmatrialit vritable+ cest au fond la relation pour larelation+ ou mieux+ la relation pour la valeurde la relation. "t cestcette notion de valeur qui ouvre le champ de lconomie

    immatrielle+ qui peut ainsi Ctre appele , conomie de larelation .est parce que la relation O positive ou ngative O comporte+

    pour ceux qui en sont les pJles ou les termes+ une valeursusceptible dCtre atteinte+ quelle a toutes les chances de survenir+dCtre produite et de donner lieu 8 des changes en incitant sesacteurs 8 leffort+ donc 8 supporter le coUt qui en rsulte.

    #ans toutes les organisations humaines+ lactivit de relationpour la valeur de la relation elle-mCme est importante+ et les

    organisations conomiques+ avec au premier rang dentre elleslentreprise+ n: font pas exception. #ans cette dernire+ larelation cre et change au-del8 des considrations matrielles+est un produit aussi caractristique de lentreprise que sesproduits matriels et marchands. Les productions relationnelles+qui prennent leur libert par rapport aux dterminants matriels+conditionnent la culture Mne de lintrieurN+ lidentit Mconfre 8lorganisation par lextrieurN+ lambiance du milieu de vie delentreprise. >ongeons+ par exemple+ aux constructions

    relationnelles feutres des grandes banques et comparons-les 8celles+ bru:antes+ de la grande distribution+ 8 celles+ bcbg oufaussement ngliges de la pub ou de lunivers mdiatiqueF+ etpour autant positives ou ngatives+ avec une part matrielle etlautre immatrielle+ che; les unes comme che; les autres V

    (ous reviendrons longuement sur la distinction entre relationpositive et relation ngative et sur les facteurs dconomierelationnelle que lune et lautre mettent en Deu. 4our linstant+ ladistinction est seulement l8 pour prciser que les relationsconstituant lconomie relationnelle sont des , relations de

    connexion qui font intervenir principalement des Ctres humainspercevant+ choisissant+ Dugeant+ sengageant ou quittant de faonconsciente le Deu relationnel. #ans lentreprise+ comme dans lesautres structures conomiques plus modestes Mle mnageN ou plusambitieuses Ml"urope largie+ l&lena @ accord de libre changenord-amricain devant stendre vers le >udFN+ les Ctressengagent dans des relations par choix individuel ou parsolidarit avec un groupe+ et les vivent avec toute la gamme dessentiments et des rationalits qui vont de lamour 8 la haine+ et de

    la logique mathmatique 8 la rationalit sentimentale.Les pa:s qui en "urope+ et particulirement le )o:aume-7ni+nont pas fait le choix de leuro+ se sont-ils dtermins en fonctiondes critres de lconomie matrielle ou du sentiment et de la

    vision quils ont de leur propre histoire et de l"urope 3 "t dans leproDet d7nion pour la %diterrane+ les calculs lis 8 la balancecommerciale sont envahis de considrations et de rationalitsmultiples+ comme cest aussi le cas pour llargissement del"urope vers l"st ou vers la Turquie. "n revanche+ il faut

    souligner ltonnante rapidit de la conversion de l&llemagne 8leuro+ alors quon la pensait viscralement et dfinitivement lieau marW. %ais dans ce cas aussi+ le calcul ntait certainement pasdli des attraits dune solidarit europenne affirme. Lesconomistes les plus honnCtes savent comme tous les gens debon sens que+ pour inflchir leurs choix+ les ?ritanniques+ les

    ) *roupe (+rolles

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    &llemands+ les acteurs mditerranens+ doivent voir le proDeteuropen sous un angle neuf+ dun autre Ail que par le pass.est-8-dire quils tablissent avec le proDet un tout autre t:pe derelation. e travail apparaBt alors comme un facteur plusdterminant pour lconomie que toute autre considration ou

    calcul matriel+ et cest en ce sens que lconomie de la relation amaintenant acquis dans la maison entreprise+ dans la maison"urope et dans la maison monde+ un droit de cit+ un , droitdingrence + qui lui fut historiquement refus+ ou au mieuxrenvo: vers dautres disciplines.

    )appelons-nous que le mot conomie signifie en grec , la rglede la maison H la rgle de la maison comme milieu de vie+ espacede travail de groupe+ quil serait caricatural de rduire 8 ses seulscomposants matriels+ un peu comme si lanatomie tait prive de

    biologieF Xuant aux limites gographiques de cette maison+ onconoit quelles puissent Ctre bornes par la rue+ le secteur ou levillage devenu plantaire+ selon le t:pe de relation que noussommes capables d: faire vivre. La mondialisation nest en cesens aucunement une fatalit destructrice de la maison+ sitoutefois leffort relationnel est 8 la mesure du dfi des distances.

    )evenons au contenu de lconomie immatrielle @accessoirement+ mais sans en minimiser la porte+ lconomie dela relation intgre aussi les productions et les changes de relation

    entreles Ctres et les obDets+ avec ici encore toutes les gradations dela perception et de la sensibilit humaines. &u-del8 de lutilit+ Depeux progressivement aimer ou dtester un obDet+ une structurematrielle dans laquelle De vis ou De travaille. #es groupes+ voiredes collectivits+ peuvent aussi entrer dans un tel canevas+ encrant et entretenant avec des obDets une vraie relation durable+

    qui engendrera des coUts et des satisfactions propres+ 8 la mesurede lintensit relationnelle @ les liens aux monuments+ aux reliques+aux obDets et aux sites sacrs ou ordinaires constituent unimmense espace dimmatrialit quotidienne.

    Xuand lconomie nest destine qu8 assurer la subsistance

    dune collectivit+ quelle nest quun mo:en 8 la disposition ou auservice de fins qui lui sont suprieures+ comme la religion+ laguerre+ la conquCte de territoiresF+ lapprofondissement dunetelle rflexion peut paraBtre superflu. %ais si lconomie devientun phnomne maDeur dans lorganisation des socits+ rgle lesDours et les nuits des Ctres en les dotant ou les privant demploi dutemps+ assure 8 ceux quelle intgre une identit+ un parcourssocial et une volution+ alors quelle les refuse 8 ceux qui en sontexclus+ le travail sur lconomie de la relation nest plus un luxe.

    ar lconomie matrielle est dautant plus envahissante quelleest , totalitaire dans sa conception du champ de son activit. &ufond+ et paradoxalement+ la limitation des excs de lconomieclassique ne passe pas par la rduction du domaine conomique+mais au contraire par son extension au-del8 du matriel.

    Lanal:se du cheminement de lconomie de la relation et lamise en lumire de sa bioconduite peuvent nous aider 8 mieuxsituer lensemble des facteurs qui animent ou freinent les Ctresimpliqus+ contribuant ainsi 8 leur recherche dun compromis

    quitable entre les deux sphres de lactivit conomique.

    ) *roupe (+rolles -=

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    *La bioconduite

    de lconomie de la relation

    lorigine de la bioconduite de lconomie de la relation+ ontrouve la d:namique des dsquilibres relationnels. essituations de dsquilibre vont+ dans leur varit et dans leurampleur+ donner naissance 8 diffrentes phases dont lesenchaBnements et le contenu forment la consistance delconomie relationnelle.

    I

    es tapes cls concernent laction productive+ les choix+ lapoursuite de certaines valeurs et leur partage+ qui forment latrame de toute activit conomique. )egroups dans un

    cheminement global issu des dsquilibres+ ils reprsentent laDustification ultime de la notion dconomie de la relation pourcaractriser lactivit immatrielle des organisations humaines.

    Les dsquilibres relationnelscomme source motrice

    #ans le domaine matriel comme dans celui de la relation+ undsquilibre est un cart+une distance ou une disproportion+ Lesdsquilibres qui intressent lconomie en tant que s:stme

    dactivits Mqui se distingue dun s:stme didesN reprsentent descarts ou des disproportions entre diffrents t:pes de situationspratiques. 'l sagit particulirement des carts entre les situations

    voulues+ parfois mCme rCves ou idalises par les acteurs+ et lessituations subies. 0iennent s: aDouter+ plus accessoirement+ lescarts entre les situations thoriques, apprises ou imagines parles acteurs+ et les situations relles.

    >i lon se place dans une situation ponctuelle ou thoriquedquilibre+ tout cart ou toute distance par rapport 8 lquilibre

    se traduit soit par une situation de manque+ soit par une situationdexcs ou de surabondance.

    #ans le domaine relationnel+ nous dirons donc que lesdsquilibres sont perceptibles+ soit dans des situations reconnueset exprimes de manque de relation dsire ou pertinente+ soit+ aucontraire+ de surabondance de relation non pertinente. (ousentendons par pertinente @ troitement approprie aux attentes Omodestes ou extrCmes O des pJles de la relation.

    Lexpression des rarets et des surabondances relationnelles+

    qui a connu un fort dveloppement dans la seconde moiti du*esicle+ ne paraBt pas devoir flchir de nos Dours. e constatsexplique par la manire dont lconomie classique a Dug et traitlexpression relationnelle+ et par le dcalage progressif qui sestinstaur entre les fictions thoriques ou rglementaires et les

    ) *roupe (+rolles -elon harles Gourier+ ce sont des lieux oE les communauts de travailleurs donnentlibre cours 8 toutes leurs expressions et passions.

    ) *roupe (+rolles -7

  • 8/13/2019 Quelle conomie voulons-nous

    36/207

    /(LL(01$N$#&(2$/L$N34N$/35

    dsordre+ les rvolutionnaires ne croient pas un seul instant 8 latransformation de la relation existante+ mais 8 sa destruction Oventuellement cratrice dautres modles. Xuant aux hommes decAur+ ils rservent la , vraie relation pour la vie extrieure 8lentreprise et 8 lconomie. Lentreprise peut ainsi continuer 8

    stagner dans ses schmas relationnels passs+ autant 8 lintrieurque par rapport 8 son environnement.I lextrieur de lentreprise+ le client+ qui se trouve

    progressivement confront 8 davantage de biens et services+commence 8 prendre conscience dun monde matriel enmouvement et 8 exprimer ses satisfactions+ ses incertitudes et desdsirs qui vont au-del8 des besoins classiques. trangement+ ilreprsente lui aussi un facteur de dsordre+ tout au moins unfacteur dinfluence risque.

    #ans cette priode+ que certains ont appel , conomie deproduction+ oE loffre continue de rgner en maBtresse devantune demande Deune+ peu avertie et souvent fascine+ lentreprisese permet des , caricatures de relation externe. "n sappu:antsur des h:pothses de raret ou de retour 8 la raret+ qui fonttouDours mo