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RAPPORT DE STAGE Rapport de Projet de Fin d’Etudes Trajectoires de conversion à l’Agriculture Biologique en élevage bovin lait : Analyse rétrospective et actuelle Niels BIZE Elève ingénieur à l’INP-ENSAT Spécialité Systèmes et Produits de l’élevage Soutenance orale le 4 septembre 2017 Encadré par : Guillaume Martin – UMR AGIR, INRA centre Occitanie Toulouse Maëlys Bouttes – UMR AGIR, INRA centre Occitanie Toulouse Goulven Marechal – FRAB de Bretagne Guillaume Michel – GAB 22 Tuteuré par : Corine Bayourthe – UMR TANDEM – Professeure ENSAT

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RAPPORT DE STAGE

Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Trajectoires de conversion à l’Agriculture Biologique en élevage bovin lait : Analyse rétrospective et

actuelle

Niels BIZE

Elève ingénieur à l’INP-ENSAT Spécialité Systèmes et Produits de l’élevage

Soutenance orale le 4 septembre 2017

Encadré par : Guillaume Martin – UMR AGIR, INRA centre Occitanie Toulouse Maëlys Bouttes – UMR AGIR, INRA centre Occitanie Toulouse

Goulven Marechal – FRAB de Bretagne Guillaume Michel – GAB 22

Tuteuré par :

Corine Bayourthe – UMR TANDEM – Professeure ENSAT

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page I

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page II

Remerciements Je tiens à remercier Guillaume Michel du GAB 22 pour son appui, son expertise des données de suivi

des conversions de 2009 et la pertinence de ses remarques concernant les fermes et leurs conduites.

Je remercie également Goulven Maréchal de la FRAB pour son suivi et son accueil dans les locaux du

pôle bio de Cesson Sévigné. Il m’a beaucoup appris sur le fonctionnement des structures du réseau

FNAB et sur l’importance et la pertinence de l’existence de ces structures qui placent au cœur de

leurs actions et de leurs réflexions, les problématiques des agriculteurs bio.

Je remercie Maëlys Bouttes de l’UMR AGIR qui m’a encadré, m’a accompagné et m’a fortement aidé

dans mes réflexions sur les travaux menés. Maëlys m'a également apporté une meilleure

compréhension du fonctionnement de la thèse et de l’unité mixte de recherche AGIR.

Je tiens à remercier Guillaume Martin de l’UMR AGIR pour son aide, notamment sur la production et

l’interprétation des résultats de cette étude. Guillaume, très réactif, s’est rendu très disponible

malgré sa charge de travail et m’a aidé à prendre du recul et à être critique envers mon propre

travail. Ses nombreuses remarques et propositions ont toujours été pertinentes et sources de

réflexions.

Mes remerciements s’adressent également à Corine Bayourthe qui m’a suivi durant ce stage en tant

que tutrice. Sa vision externe aux travaux de stage m’a aidé à déceler les éléments manquants de

clarté et de précisions.

Je remercie bien évidement l’ensemble des 14 éleveurs qui m’ont accueilli sur leur ferme. Chacune

de ces visites a été riche en discussions et apprentissage. Ils m’ont accordé du temps durant une

période où le travail est intense en production laitière.

Je salue également amicalement les équipes avec lesquelles j’ai fonctionné et échangé durant ces

travaux de stage, qu’elles soient INRA ou du réseau bio : l’équipe de la FRAB de Bretagne, L’équipe

d’AgroBio 35 et l’équipe MAGELLAN de l’UMR AGIR.

Evidemment, je n’oublie pas les stagiaires de l’INRA et du réseau GAB-FRAB qui m’ont permis

d’apprécier les pauses et de décompresser en cas de nécessité.

Pour finir, je remercie toutes personnes m’ayant aidé, de près ou de loin, à la réalisation de ce travail

et à la production de ce rapport.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page III

Table des matières

Remerciements ....................................................................................................................................... II

Table des matières ................................................................................................................................. III

Table des figures ..................................................................................................................................... IV

Table des tableaux .................................................................................................................................. IV

Résumé - Abstract ................................................................................................................................... 1

Glossaire et abréviations ......................................................................................................................... 2

Définitions ............................................................................................................................................... 3

Introduction ............................................................................................................................................. 4

Partie 1 : Contexte et présentation de l’étude ........................................................................................ 6

I. Le développement de l’Agriculture Biologique ........................................................................... 6

A. L’historique du développement de la bio ............................................................................... 6

B. Les chiffres de l’Agriculture Biologique en France en 2016 .................................................... 6

C. Le réseau GAB-FRAB, une structure de conseil et d’accompagnement .................................. 7

II. Partenariat entre l’unité de recherche et l’organisme d’accompagnement des agriculteurs .... 8

III. Enjeux et objectifs du stage .................................................................................................... 9

IV. Stratégie et organisation du travail de stage .......................................................................... 9

Partie 2 : Analyse rétrospective des profils de conversion à l’Agriculture Biologique.......................... 10

I. Présentation du contexte de conversion 2008-2009 ................................................................ 10

De nouveaux profils en apparition ................................................................................................ 11

II. Un support de travail fourni par le réseau GAB-FRAB de Bretagne .......................................... 11

A. Méthodologie de collecte des données ................................................................................ 11

B. Méthode d’échantillonnage .................................................................................................. 11

C. Résultats et interprétations des travaux du réseau .............................................................. 12

III. Définition des objectifs de travail .......................................................................................... 13

IV. Méthodologie employée ....................................................................................................... 13

A. Présentation de la méthode utilisée ..................................................................................... 13

B. Application de la méthode et sélection des indicateurs ....................................................... 15

C. Premiers résultats sur les indicateurs de performance bruts ............................................... 17

D. Premiers résultats sur les indicateurs de pratiques .............................................................. 19

E. Application de la régression linéaire aux indicateurs bruts .................................................. 21

V. Résultats et Interprétation de l’étude de la régression des moindres carrés partiels .............. 25

A. Résultats sur les indicateurs .................................................................................................. 25

B. Résultats sur les individus ..................................................................................................... 27

C. Interprétation des résultats .................................................................................................. 30

D. Comparaison des résultats .................................................................................................... 31

VI. Conclusions et discussions .................................................................................................... 32

Partie 3 : Analyse des trajectoires actuelles de conversion à l’Agriculture Biologique ........................ 34

I. Présentation du contexte de conversion de 2016 .................................................................... 34

II. Travaux engagés par le réseau en partenariat avec AgroCampus Ouest .................................. 35

III. Résultats des travaux de caractérisation des nouvelles fermes laitières .............................. 36

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page IV

IV. Définition des objectifs de travail .......................................................................................... 37

V. Méthodologie employée ........................................................................................................... 37

A. Méthode d’échantillonnage .................................................................................................. 37

B. Réalisation du guide d’entretien ........................................................................................... 38

C. Méthode d’analyse des données .......................................................................................... 39

VI. Résultats et Interprétation ................................................................................................... 39

A. Résultats généraux et stratégies d’évolution des effectifs des troupeaux ........................... 39

B. Résultats par groupe de contrainte ....................................................................................... 43

VII. Conclusions et discussions .................................................................................................... 49

Discussion générale et conclusion ......................................................................................................... 50

Bibliographie............................................................................................................................................. I

Annexes .................................................................................................................................................. III

Table des figures Figure 1: Evolution des opérateurs et des surfaces certifiées bio de 1995 à 2016. ................................ 6

Figure 2: Surfaces bio et en conversion et part dans la SAU de chaque département en 2016 ............. 7

Figure 3: Schéma de la méthode Martin et al, 2017.. ........................................................................... 14

Figure 4: Evolution des indicateurs de performance au cours de la conversion à l'AB. ....................... 18

Figure 5: Evolution des indicateurs de pratiques au cours de la conversion à l'AB. ............................. 19

Figure 6: Evolution des indicateurs économiques au cours de la période de suivi .............................. 22

Figure 7: Graphique radar des indicateurs de vulnérabilité générés à partir des indicateurs de

performance.. ........................................................................................................................................ 23

Figure 8: Graphique de la régression des moindres carrés partiels avec représentation des

indicateurs.. ........................................................................................................................................... 25

Figure 9: Graphique de la régression des moindres carrés partiels avec la représentation des individus

............................................................................................................................................................... 28

Figure 10: Evolution du développement de la production bio en Bretagne. ........................................ 34

Figure 11: Activités dominantes des fermes bios en Bretagne au 31 décembre 2016. ........................ 35

Figure 12: Evolution des pourcentages d'herbe et de maïs dans la SFP et des pourcentages de SFP et

de SCOP dans la SAU. ............................................................................................................................ 41

Figure 13: Représentation simplifiée des types de parcellaire. ............................................................ 44

Figure 14: Figure Bilan des stratégies et ressentis des fermes enquêtées. .......................................... 49

Table des tableaux Tableau 1: Les indicateurs climatiques sélectionnés pour l'étude ........................................................ 15

Tableau 2: Les indicateurs économiques sélectionnés pour l'étude .................................................... 16

Tableau 3: Les indicateurs de pratiques des éleveurs sélectionnés pour l'étude ................................. 16

Tableau 4: Les indicateurs de performance sélectionnés pour l'étude ................................................ 17

Tableau 5: Les indicateurs conservés pour l'analyse............................................................................. 22

Tableau 6: Tableau comparatif des classifications du réseau GAB-FRAB et de l'étude actuelle .......... 31

Tableau 7: Comparaison des nouveaux éleveurs laitier bio 2016 aux références régionales bio

bretonnes. ............................................................................................................................................. 36

Tableau 8: Tendances d'évolution des fermes enquêtées. . ................................................................. 40

Tableau 9: Chiffres clés de deux fermes exemples.. ............................................................................. 43

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Résumé - Abstract The objective of this study is to show whether and how the vulnerability of dairy farms can be

reduced during their conversion to organic farming by adapting the farm management practices in

spite of contextual changes (both climatic and economic). My work was divided in two parts. In the

first part, I analyzed technical and economic data on 12 dairy farms in Britany surveyed 5 years

between 2008 and 2013, from their last year of conventional farming. It appears that the orientation

towards increasing the percentage of pastures in the farmland and overall of grazing in animal feed

diets combined with a good initial economic situation of the farm are factors that reduce farm

vulnerability during the conversion. In the second part, I surveyed 14 farms that have started their

conversion to organic in 2016 and that were identified as vulnerable on the basis of these two

factors: limited area available for grazing and economic problems at the start of the conversion. Data

on farmer practices, technical and economic performances as well as farmer doubts and motivations

during the conversion were collected. Farmers engaging into an increase of grazing and a reduction

of concentrate complementation are on the way towards a reduction of their vulnerability. However

for farmers being most constrained, few internal options are available to follow this way and they

remain dependent on external solutions (e.g. field exchange) or they wait to get their milk paid at the

price of organic milk.

L’objectif de cette étude est de montrer si et comment la vulnérabilité des fermes laitières en

conversion vers l’Agriculture Biologique (AB) peut être réduite via des adaptations des pratiques

d’élevage en dépit des changements de contexte tels que le climat et l’économie. Mon travail de

stage a été divisé en deux parties. Dans une première partie, j’ai analysé les données technico-

économiques de 12 fermes laitières bretonnes suivies durant 5 années entre 2008 et 2013, de leur

dernière année en conventionnel à leur deuxième année en AB. L’étude révèle que l’augmentation

des parcelles dédiées à la pâture et l’orientation de l’alimentation des vaches laitières vers le

pâturage, combinés à de bonnes conditions économiques de départ, sont des facteurs de réduction

de la vulnérabilité lors de la conversion. Dans une seconde partie, je me suis entretenu avec les

éleveurs de 14 fermes laitières bretonnes ayant débuté leur conversion en 2016 et ayant été identifié

comme vulnérable sur la base de ces deux facteurs : surface disponible pour le pâturage limitée et

situation économique difficile au moment de débuter la conversion. Des données sur les pratiques

des fermes, leur performance technico-économique, ainsi que leurs doutes et motivations durant la

conversion, ont été collectées. Les éleveurs qui s'engagent dans une augmentation du pâturage et

une réduction de la distribution des concentrés sont en voie de réduire leur vulnérabilité. Cependant,

pour les éleveurs les plus contraints, peu d'options sont réalisables pour suivre cette amélioration et

ces options restent dépendantes de facteurs externes (par exemple, les échanges de parcelles).

D’autres éleveurs attendent que leur lait soit payé au prix du lait biologique.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 2

Glossaire et abréviations AB : Agriculture Biologique

ACO : AgroCampus Ouest

AGIR : AGroécologie Innovation et TeRritoires

CASDAR : Compte d’Affectation Spéciale pour le Développement Agricole et Rural

CETA : Centre d’Etudes Techniques Agricoles

CIVAM : Centres d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural

DPU : Droits à Paiement Unique

EBE : Excèdent Brut d’Exploitation

ENFA : Ecole Nationale de Formation Agronomique

ENSAT : Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Toulouse

FRAB : Fédération Régionale des Agrobiologistes de Bretagne

GAB : Groupement d’Agriculteurs Biologiques

GRAB : Groupement Régional d’Agriculteurs Biologiques

ha : hectare

Idèle : Institut de l’Elevage

INRA : Institut National de Recherche Agronomique

ITAB : Institut Technique de l’Agriculture Biologique

kg : kilogramme

MAE : Mesure Agro-Environnementale

MS : Matière Sèche

PB : Produit Brut

PP : Prairie Permanente

PSDR : programme de recherche Pour et Sur le Développement Rural

PT : Prairie Temporaire

Régression PLS : Régression des Moindres Carrés Partiels

SAU : Surface Agricole Utile

SCOP : Surface en Céréales, Oléagineux et Protéagineux

SD : Ecart type (Standard Deviation), permet de renseigner sur la dispersion des données.

SFP : Surface Fourragère Principale

UGB : Unité Gros Bovin

UMR : Unité Mixte de Recherche

UTH : Unité de Travail Humain

VA : Valeur Ajoutée

VL : Vache Laitière

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 3

Définitions Conversion à l’Agriculture Biologique : « La conversion à l’Agriculture Biologique correspond à la

phase de transition vers la certification en « Agriculture Biologique ». Dès le début de cette phase, les

pratiques du producteur doivent être rigoureusement conformes à la réglementation de l’agriculture

biologique. Pour chaque production, il a été défini une durée minimale de conversion des terres.

Cette période de conversion permet d’enclencher les changements des cycles de vie des animaux,

des plantes et des organismes qui vivent sur et dans le sol. La conversion des terres agricoles sert

aussi à épurer les sols d’éventuels anciens résidus chimiques. Elle permet à l’agriculteur de

commencer à se familiariser avec les méthodes de la production biologique, d’adapter ses outils de

production et de trouver de nouveaux débouchés pour ses produits » (Sud & Bio : GRAB du

Languedoc Roussillon, 2017).

Système fourrager : « un ensemble de techniques allant du choix des fourrages jusqu’au revenu de

l’éleveur en passant par l’assolement fourrager, la conduite générale de l’élevage, les

investissements et le travail à mettre en œuvre, sans négliger le niveau technique de l’éleveur, ses

goûts et ses idées personnelles », (Duru et al., 1988).

Affouragement en vert : « technique qui consiste à apporter aux animaux des fourrages frais (herbe

en culture pérenne, dérobées, couverts végétaux) et non stockés. Peut-être pratiqué tout l’année en

fonction des fourrages disponibles » (Chambre d’agriculture de Bretagne et al., 2013).

Surface accessible : Dans le cadre de ce travail, la surface accessible se définie comme la surface sur

laquelle l’éleveur est en capacité d’amener quotidiennement son troupeau laitier afin de le faire

pâturer. Cette valeur est ramenée au nombre de vaches laitières du cheptel afin d’avoir un indicateur

en « are/vl », outil de comparaison entre fermes.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 4

Introduction L’Agriculture Biologique (AB) se développe dans le monde entier. La surface mondiale cultivée

suivant le mode biologique (certifiée et en conversion) a été estimée à près de 43,7 millions

d’hectares fin 2014 (Estimation de l'Agence Bio, 2015, réalisée d’après les données de l’IFOAM et

d’autres organismes). Près de 2,3 millions de fermes certifiées AB ont été enregistrées en 2014 et 87

pays s'étaient dotés d’une réglementation pour l’AB en 2015 (Agence Bio, 2015). En Europe, fin 2015,

près de 270 000 fermes cultivaient plus de 11 millions d’hectares en AB ou en conversion dans

l’Union Européenne des 28. L’AB représentait 6,2% de la Surface Agricole Utile (SAU) européenne de

2015 (Agence Bio, 2015). En France, en 2016, ce sont 1,05 millions d’hectares (ha) qui sont engagés

en AB et 480 000 ha qui sont en conversion dont 265 000 en première année de conversion alors

que cette surface était de 226 000 en 2015 (Agence Bio, 2016; Willer and Schaack, 2015). La

Bretagne, qui de par ses caractéristiques pédoclimatiques est une zone fortement productrice de lait

conventionnel avec une grande diversité de laiteries implantées sur le territoire, est une région où les

conversions sont facilitées. Elle est d’ailleurs la 7ième région française en nombre de fermes certifiées

AB. Le nombre de fermes certifiées AB a ainsi augmenté passant de 1 050 en 2009 à 2 418 au 1er

janvier 2017. Les fermes bio représentent à présent 6,7% des fermes bretonnes contre 2.8% au 1er

janvier 2009 (Réseau GAB-FRAB de Bretagne, 2017a). Les surfaces en conversion en Bretagne

continuent d’augmenter. Alors que la Bretagne comptait 52 030 hectares de surfaces bio et en

conversion en 2011, ces surfaces dépassent actuellement les 82 000 hectares. Aujourd’hui, une

ferme bio bretonne sur quatre est un élevage de vaches laitières (Réseau GAB-FRAB de Bretagne,

2017a).

On remarque que les conversions à l’Agriculture Biologique en bovin lait et que le développement de

la filière laitière bio se sont effectués par « à-coups » au cours des 20 dernières années en France et

en Bretagne (voir Figure 1). En effet, les importantes augmentations du nombre de producteurs

engagés dans cette filière bio se sont réalisées par vagues de conversion. En 2008, par exemple, 17

éleveurs de vaches laitières étaient en conversion ou certifiés AB en Bretagne, en 2009 ils sont 78. En

2016 c’est +36% de fermes laitières certifiées ou en conversion par rapport à 2015 portant l’effectif à

188 fermes (Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne). Ces vagues de conversion

suivent des périodes de crise de la filière du lait conventionnel. Les éleveurs laitiers qui se trouvent

dans des situations économiques difficiles, souvent en lien avec le faible prix du lait conventionnel,

s’engagent dans l’AB bien que leurs profils de production soient souvent très éloignés des modes de

productions traditionnels en bio. Les structures d’accompagnement de la production laitière

biologique se posent donc la question de la vulnérabilité de ces fermes nouvellement converties.

Dans ce contexte d’expansion de la production et au cours d’un partenariat entre l’INRA d’Occitanie

et le réseau GAB-FRAB de Bretagne, nous avons décidé de nous intéresser à la vulnérabilité des

fermes laitières bovines bretonnes au cours de leur conversion à l’AB. Nous avons ciblé deux des

périodes durant lesquelles les conversions des fermes laitières bovines ont été particulièrement

importantes à l’échelle nationale et régionale. Comme expliqué précédemment, à la suite des crises

de rentabilité des éleveurs laitiers (liées au prix des intrants et du lait conventionnel) ont suivi des

vagues de conversion à l’AB des éleveurs laitiers, en 2009 et en 2016 (Agence Bio, 2016; Observatoire

de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne). Ces contextes de conversion sont parfois déclenchés

rapidement et concernent des fermes ayant des profils nouveaux, souvent plus intensifs et aux

références de production plus importantes que la moyenne des fermes déjà productrices en bio.

Notre objectif est de comprendre :

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 5

La vulnérabilité, sujet de cette étude de stage, est définie par Smit and Wandel, 2006 comme la

capacité à faire face, à s’adapter et à récupérer des effets d’un aléa. La vulnérabilité est ainsi une

fonction de l’exposition, de la sensibilité et de la capacité d’adaptation du système. Plus précisément,

l'exposition se réfère à la durée, à l'ampleur et à la fréquence des aléas qui s’appliquent au système

(Adger, 2006). La sensibilité est une mesure de la réponse du système à de tels aléas (Gallopín, 2006).

L'exposition et la sensibilité déterminent l'impact potentiel des aléas. La capacité d'adaptation est

une mesure de la capacité d’un système à s'adapter, modérer ou compenser les impacts potentiels,

ou profiter des opportunités créées par un événement donné (Scheinder et al., 2001).

Afin de répondre au questionnement central de ce travail, et suite à une présentation du contexte

d’étude, seront présenté dans ce rapport : i) l’analyse rétrospective réalisée sur un suivi de 5 ans

mené par le réseau GAB-FRAB de Bretagne et permettant de comprendre quels sont les différents

types de vulnérabilité des fermes entrées en conversion en 2009 et comment cette vulnérabilité

évolue au cours de ce suivi ; ii) les entretiens réalisés avec des éleveurs entrés en conversion en 2016

et identifiées, sur la base des résultats de la partie précédente, comme étant vulnérables afin de

dégager les pratiques qu’ils mettent en place en vue de réduire leur vulnérabilité.

Comment évolue la vulnérabilité des fermes laitières bretonnes lors de leur conversion à

l’Agriculture Biologique ? Quelles stratégies de conversion à l’AB mises en place par les éleveurs

les plus efficaces pour réduire cette vulnérabilité ?

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 6

Partie 1 : Contexte et présentation de l’étude

I. Le développement de l’Agriculture Biologique

A. L’historique du développement de la bio Afin de bien comprendre les enjeux de l’Agriculture Biologique (AB) et ainsi le contexte dans lequel

s’inscrit cette étude, il semble important de retracer brièvement l’historique de ce type d’agriculture

de l’apparition du concept jusqu’à l’heure actuelle.

Si les principales idées fondatrices de l’AB prennent naissance dans les années 1930 sous l’influence

de personnages pionniers tels que Rudolf Steiner, Sir Albert Howard, et Raoul Lemaire, il faudra

attendre les années 1970-1980 pour voir la création des premières structures dédiées à l’AB telles

que la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB), la Fédération internationale des

mouvements d’agriculture biologique (IFOAM), le Groupe de Recherche en Agriculture Biologique

(GRAB) et bien d’autres.

Les années 1980-1990 marquent la reconnaissance officielle de l’AB par les autorités françaises à

travers la mise en place d’un cahier des charges encadrant les techniques de production, de

transformation des produits agricoles et leur commercialisation, la création du logo et l’officialisation

de l’appellation « Agriculture Biologique ». Face à une vague d’intérêt croissante des instances

publiques, du milieu agricole et de la société civile pour l’AB, l’Agence Bio est créée en 2002. Ce

groupement d’intérêt public regroupe plusieurs structures et a pour fonction de travailler à la

promotion de l’AB, de développer les filières et la structuration des différents secteurs, d’approfondir

les connaissances en termes de contribution environnementale de ce type d’agriculture ainsi que de

constituer un observatoire national de l’AB.

B. Les chiffres de l’Agriculture Biologique en France en 2016 En 2016, l’activité biologique concerne près de 118 000 emplois directs en France avec une

croissance annuelle moyenne de 8.4% sur 4 ans. En fin d’année 2016 ce sont 47 104 opérateurs (dont

32 264 producteurs, le reste étant des transformateurs, des distributeurs et des importateurs) qui

étaient engagés en bio, soit une augmentation de 10% du nombre d’opérateur et de 12% du nombre

de producteurs par rapport à la fin d’année 2015 (Agence Bio, 2016). En 2016, les fermes en AB

représentent 7.3% des fermes françaises, plus de 10% de l’emploi agricole et 1 538 047ha (soit une

augmentation de 17% par rapport à 2015). Ces chiffres sont illustrés par la Figure 1.

Figure 1: Evolution des opérateurs et des surfaces certifiées bio de 1995 à 2016. Source : Agence Bio, 2016.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 7

On remarque, comme évoqué en introduction, des pics de conversion de surfaces (courbe et surface

en jaune sur la Figure 1) sur les périodes qui suivent les années 2009-2010 et 2015-2016. Ces pics de

conversion sont suivis, 2 ans plus tard, d’importantes augmentations des surfaces certifiées bio

(courbe et surface en vert). Cela correspond aux fermes ayant débuté leur conversion en 2009 et en

2016 et l’ayant achevé en 2011 ou qui vont l’achever en 2018. C’est à ces périodes que sont

consacrés les travaux de ce stage. Nous verrons dans les parties suivantes les raisons expliquant ces

vagues de conversion.

La Figure 2 représente la répartition départementale de ces surfaces engagées en bio en 2016 et des

parts de la surface bio dans la SAU totale en 2016. Les parts de SAU dédiées à l’AB les plus

importantes sont concentrées dans le Sud-Est. Notre région d’étude, la Bretagne, est très équilibrée

entre ses 4 départements avec une part de la SAU totale en bio proche des 6%.

Figure 2: Surfaces bio et en conversion et part dans la SAU de chaque département en 2016 (Agence Bio/OC, Agreste, 2016)

En s’intéressant au détail des productions concernées, on remarque qu’elles sont toutes en

progression. Cependant, en production végétale, c’est dans les cultures pérennes que la bio est le

mieux représentée. 17% des surfaces plantées sont des vergers et plus de 9% sont des surfaces en

vignes. L’élevage accompagne également cette évolution. Le développement des surfaces

fourragères de 2014 à 2016 suit celui de l’élevage de ruminants laitier comme allaitant. Plus

spécifiquement en production laitière bovine, en 2016 on dénombre 3 054 fermes certifiées et en

conversion vers l’AB en France, soit 11% de plus qu’en 2015 et 152 473 animaux de production

laitières biologique et en conversion, soit 15% de plus qu’en 2015 (Agence Bio, 2016).

C. Le réseau GAB-FRAB, une structure de conseil et d’accompagnement A l’heure actuelle, il existe différentes structures de conseil en agriculture, dont certaines sont

dédiées à la production biologique et accompagnent sont développement, comme le réseau FNAB

qui regroupe les différents Groupements d’Agriculteurs Biologiques (GAB) départementaux et les

Groupements Régionaux d’Agriculteurs Biologiques (GRAB) tels que la FRAB de Bretagne.

Le réseau GAB-FRAB de Bretagne, qui est l’une des structures encadrant les travaux de stage, se

donne comme objectifs prioritaires (Réseau GAB-FRAB de Bretagne, 2017b):

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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- Le développement de la production biologique en Bretagne : via le transfert de pratiques

biologiques vers les agriculteurs conventionnels, les actions de recherche et

d’expérimentation et la promotion de la filière biologique.

- L’accompagnement des producteurs biologiques : via les formations réalisées par le réseau,

mais aussi le développement et la structuration des filières.

- L’accompagnement et l’aide à la conversion et l’installation en Agriculture Biologique.

- La représentation et la défense des agriculteurs bio de Bretagne devant les instances

publiques, les opérateurs, etc...

Le réseau est donc à la fois une structure de développement de l’Agriculture Biologique et une

structure d’accompagnement syndical des agriculteurs. L’appui technique aux agriculteurs est assuré

via les GAB, généralement sous forme de formations collectives, mais d’autres actions telles que les

partenariats de recherche, les publications, la veille réglementaire et l’appui à la structuration de la

filière sont assurées par le réseau (Réseau GAB-FRAB de Bretagne, 2017b).

II. Partenariat entre l’unité de recherche et l’organisme d’accompagnement des

agriculteurs La totalité des travaux conduits au cours de ce stage ont été menés en partenariat entre l’équipe

MAGELLAN, représentée par Maëlys BOUTTES, doctorante, et Guillaume MARTIN, chargé de

recherche, de l’UMR 1248 AGIR de l’INRA de Toulouse – Occitanie et le réseau GAB-FRAB de

Bretagne représenté par Goulven MARECHAL, chargé de missions filières à la FRAB, et Guillaume

MICHEL animateur et conseiller technique du GAB 22.

L’idée d’un tel partenariat permettait de croiser les compétences de recherche scientifique et les

connaissances techniques et de terrain. Le réseau GAB-FRAB de Bretagne conduit dans ce même

objectif des actions de recherche avec d’autres centres INRA, tel que celui de Rennes. Parmi les

nombreux avantages d’une telle collaboration, l’un d’eux est de permettre au réseau de valoriser ses

nombreuses données de terrain via l’expertise scientifique et statistique d’agents INRA. A l’inverse,

les unités de recherche de l’INRA, souvent en recherche de données de terrain, ont accès à une

grande quantité d’informations pouvant être étudiée selon différentes approches.

C’est dans cet objectif de valorisation commun que ces organismes, tous deux s’intéressant à la

question de la vulnérabilité des fermes laitières au cours de leur conversion à l’agriculture

biologique, ont formé ce partenariat. En effet la thèse de Maëlys BOUTTES, intitulée « Quelles sont

les trajectoires de conversion à l’Agriculture Biologique les moins vulnérables face à des aléas

économiques et climatiques ? », traite de la vulnérabilité lors de la conversion et s’intègre dans

divers projets tels que :

- le projet Résilait (déposé par l’ITAB et l’IDELE) « Résilience des systèmes laitiers biologiques :

optimisation des facteurs de compétitivité et mise au point de systèmes plus efficients dans

la gestion des risques à venir » (CASDAR),

- le projet ATA-RI (dont les partenaires scientifiques sont l’INRA, l’ENSAT et l’ENFA) «

Accompagnement de la transition agro écologique » (PSDR),

- et le Projet OPTIALIBIO « OPTImisation de l'autonomie et de la résistance aux aléas

climatiques des systèmes ALImentaires en élevage bovins BIOlogiques » (CASDAR).

Le stage que j’ai effectué et qui s’intitule « Trajectoires de conversion à l’Agriculture Biologique en

élevage bovin lait : Analyse rétrospective et actuelle » s’inscrit donc à la fois dans la thèse de Maëlys

BOUTTES et ses différents projets et dans les travaux d’analyse de conversion menés par le réseau

GAB-FRAB de Bretagne.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 9

III. Enjeux et objectifs du stage Le stage et les travaux menés se concentrent sur la question des trajectoires de conversion à

l’Agriculture Biologique en Bovin Lait. Ses enjeux principaux sont :

D’apporter des connaissances supplémentaires aux organismes de conseil. C’est-à-dire leur

fournir des outils d’analyse permettant de compléter et de vérifier les intuitions et les

tendances qui se dégagent de l’accompagnement technique des fermes en bio et en

conversion. Les analyses, leurs résultats et leurs interprétations sont des appuis et peuvent

servir de base à l’accompagnement de ces structures dans leur conseil.

De porter un regard biotechnique sur la phase de conversion jusqu’alors surtout étudiée en

sciences humaines et sociales. C’est-à-dire de dégager de l’étude de la phase de conversion

des éléments identifiables et techniques caractérisant les fermes et pouvant être utilisés

comme outils de comparaison inter fermes.

Suite à ces enjeux, le stage se fixe également les objectifs d’étude suivants :

Caractériser la vulnérabilité durant la phase de conversion à l’AB en élevage laitier et

l’exprimer à l’aide d’indicateurs précis

Expliquer la vulnérabilité des fermes au cours de leur conversion à l’agriculture biologique

par les stratégies et les pratiques mises en place

Analyser le détail des motivations et des stratégies développées par les éleveurs les plus

contraints en termes de structure et de trésorerie pour une conversion à l’AB

IV. Stratégie et organisation du travail de stage Afin de répondre aux différents objectifs du stage, nous avons décidé de nous concentrer sur la

région Bretagne et ses quatre départements en vue d’étudier les deux vagues de conversion qui ont

eu lieu en 2009 et en 2016. Un suivi de 5 ans, réalisé par le réseau GAB-FRAB de Bretagne de 2008 à

2013 sur des fermes laitières en conversion, a permis la constitution d’une base de données support

pour une analyse statistique. Cette analyse a pour objectif d’identifier la vulnérabilité des fermes en

conversion et de comprendre son évolution en lien avec les pratiques des fermes et leur contexte.

Sur la base des résultats de cette analyse, nous avons décidé de nous intéresser à la seconde vague

de conversion en nous focalisant sur des fermes identifiées comme étant vulnérables d’après les

critères issus de la première analyse. Nous avons effectué des entretiens avec les éleveurs de ces

fermes afin de comprendre les stratégies mises en place en vue d’améliorer leur situation.

Le détail de ces deux étapes de stage et les résultats obtenus sont présentés dans les Parties 2 et 3

de ce rapport.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Partie 2 : Analyse rétrospective des profils de conversion à

l’Agriculture Biologique

I. Présentation du contexte de conversion 2008-2009 L’application de la Loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d’orientation agricole et la mise en place du Contrat

Territorial d’Exploitation (CTE) a généré une première vague de conversion vers l’AB. Le CTE, arrêté

et remplacé par le Contrat d’Agriculture Durable depuis 2003, visait à encourager le développement

de productions de qualité et de services proches des attentes de la société en matière

d'environnement (Urbano and Vollet, 2005) mais non rétribuées par le marché, nécessitant ainsi une

participation financière de la société (Domas, 2000). Cette vague de conversion a été suivie d’une

période de crise, la production de lait biologique de 2002 ayant été trop importante par rapport à la

consommation. Ces difficultés ont provoqué un ralentissement fort des conversions jusqu’en 2007.

En 2004 l’Union Européenne a mis en place un « Plan d’action européen en matière d’alimentation et

d’agriculture biologiques » dont l’objectif était de faciliter le développement et le maintien de l’AB au

sein de l’UE. Suite à cela, en 2007, le ministre de l’Agriculture et de la pêche (Michel Barnier), met en

place un plan d’action en faveur de l’AB, intitulé «plan d’action Agriculture biologique : horizon

2012». En 2009, ce plan d’action va être conforté par les objectifs fixés par le Grenelle de

l’Environnement. Ce contexte favorable se traduit par la mise en place d’aides financières aux fermes

bovines laitières notamment les Mesures Agro-Environnementales du type Conversion à l’Agriculture

Biologique et Maintient à l’Agriculture Biologique, mais également, le Crédit d’Impôt cumulable avec

les MAE SFEI, les Aides aux Investissements matériel et les primes laiterie à la conversion.

Parallèlement à l’émergence de ces actions incitatrices à la conversion, les producteurs de lait

conventionnel entrent en 2009 dans une période de crise. Le lait est payé, au printemps 2009, 30%

moins cher que l’année précédente. La même année, les règlements CE 834/2007 et CE 889/2008

relatifs à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques entrent en application et

permettent à la fois une uniformisation au niveau européen et un assouplissement du cahier des

charges de production (notamment en terme d’alimentation du troupeau laitier, du nombre et de la

nature des traitements vétérinaires, de la mixité bio/non-bio des ateliers sur la ferme et des

techniques de fertilisation). L’un des objectifs de cette nouvelle règlementation était de faciliter la

libre circulation des produits certifiés bio entre les états membres de l’Union Européenne. Ces

modifications réglementaires sont accompagnées d’une restructuration de la filière lait bio française

et d’un engouement particulier du consommateur pour les produits certifiés Agriculture Biologique

(Agence BIO/OC, 2014).

Cette année-là, l’ensemble des déterminants décisif à l’adoption de l’agriculture biologique, définis

par (Bellon and Lamine, 2009) sont réunis. Ils concernent 1) les signaux clairs des politiques publiques

par le biais des aides financières, 2) les signaux positifs du marché tels que la structuration des filières

et la rémunération supérieure du lait bio et 3) la facilité d’accès à l’information et au conseil en lien

avec l’agriculture biologique par le biais des groupements de producteurs et des professionnels du

conseil agricole. Ce contexte fortement incitateur est grandement responsable de la vague de

conversion des fermes laitières de 2009 en Bretagne.

Ce sont, parmi les producteurs laitiers bretons, 78 nouvelles entrées en conversion vers l’agriculture

biologique que l’on décompte en 2009. A titre de comparaison, il y en avait seulement 17 nouveaux

convertis en 2008. La tendance s’est confirmée en 2010 avec 74 fermes entrées en conversion. En

comparaison avec l’année 2008, les fermes engagées en AB en 2009 ont augmenté de 28.7% et les

surfaces agricoles en conversion vers l’AB ont augmenté de 86.2% (Guet et al., 2011). La particularité

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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de ces conversions est la taille moyenne des fermes, plus importante que la référence établie jusque-

là en bio. Le quota moyen pour les convertis en 2009 était de 312 000 L par ferme, alors que le droit

à produire est de 280 000 L pour la moyenne bretonne avant 2009 (Observatoire de la bio, Réseau

GAB-FRAB de Breatagne).

De nouveaux profils en apparition Bien que les fermes nouvellement converties en 2009 aient des profils de plus en plus variés, on note

des tendances fortes concernant leurs caractéristiques. Elles ont en moyenne plus de foncier, mais

également des quotas et un cheptel plus importants que les références jusque-là établies pour la bio

(Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne, 2011). Ces profils, plus éloignés des

situations observées en bio, amènent à se questionner sur la faisabilité et la réussite de leur

conversion. Les motivations à la conversion peuvent également être très différentes de ce qui est

observé dans les fermes laitières déjà productrices de lait bio, comme observé dans d’autres pays

(Cranfield et al., 2010). Ces motivations se révèlent être davantage tractées par des aspects

économiques et la nécessité évoquée de modifier le système afin d’améliorer la valorisation du lait.

II. Un support de travail fourni par le réseau GAB-FRAB de Bretagne

A. Méthodologie de collecte des données Le réseau GAB-FRAB, dans le cadre d’un travail conjointement mené par la FRAB et le GAB 22, a

réalisé un suivi pluriannuel de 15 fermes laitières, réparties sur toute la région Bretagne et chacun de

ses départements. Ce suivi dynamique sur 5 ans avait pour objectifs :

d’aider le réseau à comprendre et à identifier les divers profils de conversion à l’agriculture

biologique ainsi que les nouveaux profils de conversion en 2009,

de mettre à jour les références techniques afin de proposer de nouvelles références aux

techniciens du réseau dans le but d’accompagner les conversions à venir,

de permettre aux agriculteurs déjà inscrits dans une démarche d’Agriculture Biologique

d’optimiser leur système en identifiant les marges de progression potentielles.

Les fermes ciblées sont entrées en conversion en 2009 et ont été enquêtées de leur campagne

laitière de 2008/2009 à leur campagne laitière 2012/2013. Cela correspondait, respectivement, à la

dernière année de ces fermes laitières en agriculture conventionnelle et à leur deuxième année en

système AB. Les données collectées concernaient l’assolement, le troupeau et sa gestion,

l’alimentation, les niveaux et la qualité de la production, les primes et produits, les charges et

amortissements, les données sociales (travail) et les motivations au passage à l’agriculture

biologique. Chacune des fermes sélectionnées étaient enquêtées une fois par an. A partir de

l’expertise des techniciens du réseau GAB-FRAB, cette étude a permis de former des groupes de

fermes aux profils de conversion semblables.

B. Méthode d’échantillonnage L’échantillon de 15 fermes a été sélectionné selon trois principaux critères : (i) la volonté de

constituer un échantillon représentatif de la région Bretagne avec une répartition homogène entre

ses 4 département ; (ii) l’inscription au contrôle laitier en début de période étudiée afin de faciliter la

collecte d’informations telles que l’alimentation et les données de production ; (iii) la diversité des

niveaux d’intensification à l’entrée en conversion calculés sur la base du pourcentage de maïs dans la

surface fourragère principale. Trois catégories étaient ainsi constituées : Les systèmes herbe-maïs à

moins de 20% de maïs dans la SFP, les systèmes maïs-herbe dont le maïs représente 20 à 30% de la

SFP et les systèmes maïs ayant plus de 30% de maïs dans la SFP.

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C. Résultats et interprétations des travaux du réseau Les résultats ont mis en évidence le développement de trois profils de conversion à l’Agriculture

Biologique se différenciant principalement par l’accès à la pâture et la nature des rations distribuées

aux vaches laitières en fin de suivi (Maréchal and Michel, 2015).

La première stratégie est basée sur la maximisation du pâturage. Elle concerne les fermes ayant un

haut potentiel d’accessibilité au pâturage (moyenne de 88 ares/vl) ce qui correspond à un parcellaire

généralement groupé avec des terres proches du corps principal de la ferme. Une fois les systèmes

en Agriculture Biologique, la ration annuelle des vaches laitières est constituée à plus de 50% par de

l’herbe pâturée. Le maïs ensilage peut rester présent dans la ration mais en faible proportion. La

conversion a engendré une modification importante du système fourrager et de son schéma

alimentaire, en s’orientant vers un système très pâturant. De plus, en réduisant significativement

leurs coûts alimentaires (92€/1000l de lait produit en conventionnel à 52€/1000l en bio), les

systèmes ayant adopté cette stratégie ont amélioré leur résultats économiques (amélioration VA/PB

de 44% et EBE/UTHf de 37%).

La deuxième stratégie dégagée par le réseau est une stratégie mixte entre stocks et pâturage. Les

éleveurs concernés ont un potentiel d’accessibilité au pâturage plus restreint (moyenne de 55

ares/vl). Une fois les systèmes en Agriculture Biologique, la ration annuelle des laitières est

constituée à plus de 50% de stocks d’herbe et de maïs, le reste étant du pâturage qui s’est finalement

peu développé durant la conversion. Les éleveurs se sont engagés dans une logique de sécurisation

du système par les stocks, parmi lesquels : le maïs ensilage. Cela concerne des profils ayant pour

objectif de produire leur référence laitière en AB. Le coût alimentaire a légèrement augmenté (de

91€/1000l en conventionnel à 103€/1000l en bio) au cours du suivi. Les charges aient globalement

augmenté, conséquence du coût de production des stocks et de l’achat de concentrés. Leurs

résultats économiques (amélioration VA/PB de 7% et EBE/UTHf de 43%) se sont améliorés grâce à la

rémunération du lait bio.

La troisième et dernière stratégie concerne des éleveurs ayant une surface accessible très réduite

(moyenne de 33 ares/vl), généralement en lien avec un parcellaire très éclaté et de multiples ilots

parcellaires souvent éloignés du corps de ferme principal. En vue d’affronter ces difficultés

structurelles, ces fermes ont développé l’affouragement en vert qui représente en AB 30% de la

ration annuelle des vaches laitières. Les systèmes ayant développé cette stratégie se sont orientés

vers l’herbe et l’affouragement constitue son principal mode de valorisation. Ces éleveurs sont ceux

ayant les couts alimentaires les plus stables et les plus élevés en fin de suivi (stabilisés à 116€/1000l).

De même que dans la stratégie précédente, les résultats économiques s’améliorent (amélioration

VA/PB de 42% et EBE/UTHf de 47%) en raison de la hausse du prix du lait en AB.

La principale limite de cette stratégie concerne l’investissement en temps dans la conduite du

pâturage et l’impression d’un système moins sécurisé face aux aléas climatiques (conséquence

d’une forte réduction des stocks).

Bien que le système fourrager soit moins sensible aux aléas climatiques en comparaison avec la

première stratégie, ces systèmes maitrisent moins leurs couts alimentaires et sont plus sensibles

aux variations du prix du lait.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Au vu des résultats de cette étude, il ressort des compromis différents entre les performances

permises par les différentes stratégies qui ne semblent pas toutes exposées aux mêmes risques.

Nous pouvons alors nous demander quels sont les profils de conversion les moins vulnérables c’est à

dire les moins sensibles aux aléas (climatiques, économiques, etc…) et possédant la meilleure

capacité d’adaptation.

III. Définition des objectifs de travail Dans la cadre du partenariat entre l’INRA de Toulouse et le Réseau GAB-FRAB de Bretagne, nous

avons orienté la réflexion autour de cette question de vulnérabilité des systèmes en conversion vers

l’agriculture biologique.

Les objectifs de cette nouvelle étude sont :

d'identifier les profils de conversion les moins vulnérables, et comprendre dans quelle

mesure la situation de départ détermine la vulnérabilité lors de la conversion,

de confirmer, par l’analyse statistique, les conclusions de l’étude du réseau basées

principalement sur de l’expertise.

Afin de mener à bien les objectifs de cette nouvelle étude, le choix a été fait d’utiliser une méthode

statistique récente pour analyser la base de données existante.

IV. Méthodologie employée

A. Présentation de la méthode utilisée La méthodologie utilisée pour effectuer l’analyse de la base de données du réseau GAB-FRAB

correspond à celle détaillée par Martin et al., 2017. Cette méthode permet l’évaluation intégrée de la

vulnérabilité des fermes en lien avec la variabilité climatique et économique et en fonction des

pratiques des agriculteurs. Elle considère la vulnérabilité des fermes comme une fonction de mesures

brutes de variables de réponses, de la pente et des résidus de la régression linéaire de ces mesures

au cours du temps. Les mesures brutes peuvent être remplacées par les valeurs prédites ou

l’ordonnée à l’origine de la régression linéaire. Ainsi, le niveau le plus faible de vulnérabilité

correspondra à une combinaison de valeurs élevées concernant les mesures brutes ou les valeurs

prédites ou l’ordonnée à l’origine (c’est-à-dire de « bonnes » performances moyennes), une

tendance (la pente) stable ou croissante (c’est-à-dire une évolution des performances à la stabilité ou

à l’amélioration) et des résidus faibles (c’est-à-dire un faible écart entre les valeurs réelles et les

valeurs projetées) indicatifs d’une faible variabilité pour l’ensemble des variables à expliquer

considérées.

Concrètement, dans l’article évoqué, deux indicateurs étaient convertis en variables à expliquer et

utilisés pour caractériser la vulnérabilité d’une ferme :

L’avantage d’une telle orientation est qu’elle permet la valorisation d’un parcellaire éclaté et la

conservation de bonnes qualités fourragères. Cependant, le cout alimentaire reste très important

et le travail d’astreinte n’est pas négligeable.

La productivité autonome du système : c’est-à-dire la quantité de lait produit par les

ressources alimentaires produites sur la ferme, ramenée à l’hectare.

L’efficacité économique du système : c’est-à-dire la différence entre produits et charges

opérationnelles divisée par les charges.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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La régression linéaire était appliquée sur ces deux indicateurs de performance afin d’extraire trois

indicateurs de vulnérabilité (correspondant aux variables à expliquer); le niveau moyen, la pente et la

variabilité. Sur la Figure 3, chaque indicateur de performance permet de générer trois indicateurs de

vulnérabilité.

Figure 3: Schéma de la méthode Martin et al, 2017. Les indicateurs de performance sont transformés en variables à expliquer, indicateurs de vulnérabilité, via la régression linéaire. Ici les variables à expliquer renseignent sur le niveau moyen,

la tendance et la variabilité de l’indicateur en question.

Cette méthode relie ensuite les mesures, tendances et résidus des indicateurs aux variables

explicatives qui illustrent l’exposition des fermes au contexte climatique et économique, mais aussi

aux pratiques des éleveurs au cours du temps. Les variables explicatives sont ainsi produites à l’aide

d’indicateurs bruts du contexte et des pratiques d’agriculture. Ce lien entre variables explicatives et

variables à expliquer est représenté à l’aide d’une régression des moindres carrés partiels (régression

PLS), algorithme qui emprunte sa démarche à la fois à l’analyse en composante principale (ACP) et à

la régression linéaire (Vancolen, 2004). Ce fonctionnement permet de décrire les profils de

vulnérabilité et de les expliquer par des indicateurs concrets qui renseignent sur le(s) système(s) et

son(leurs) environnement(s).

Cette méthode a été retenue pour l’étude à suivre pour plusieurs raisons (Martin et al., 2017) :

1) La vulnérabilité des fermes est souvent réduite à la question de la productivité ou du revenu

en fonction des seules mesures brutes. Cette méthode permet d’aborder plusieurs

indicateurs de vulnérabilité, il est ainsi possible d’intégrer des notions telles que l’efficacité

technique et économique. Ce qui est un avantage dans le cas de ce travail puisque la base de

données utilisée permet de calculer divers indicateurs de vulnérabilité et la volonté des

partenaires de ce projet était d’en prendre plusieurs en compte. D’autres approches se

limitent aux moyennes des indicateurs, celle-ci les décompose en considérant conjointement

le niveau moyen, la tendance et la variabilité des indicateurs de performances ce qui enrichit

l’évaluation de la vulnérabilité. Il est possible d’analyser les compromis entre indicateurs de

vulnérabilité et d’identifier les sources d’amélioration.

2) Cette méthode permet une grande flexibilité dans les indicateurs de vulnérabilité considérés.

Le niveau moyen, la pente et la variabilité peuvent être remplacés et/ou accompagnés des

valeurs projetées et de l’ordonnée à l’origine par exemple. Il s’agit donc d’une méthode qui

ne contraint pas l’utilisateur à une sélection prédéfinie. Pour ce travail, l’hypothèse sur

l’importance de la situation initiale et son lien à la vulnérabilité durant la conversion font que

l’ordonnée à l’origine est plus pertinente que la moyenne des indicateurs considérés.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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3) Cette méthode permet d’analyser la vulnérabilité des fermes en lien avec la variabilité

climatique et économique et de mettre en avant les voies d’adaptations les plus

prometteuses sans en perdre la dimension dynamique. En effet, la conversion vers l’AB est

une phase de changements techniques, sociaux, etc.. Tenir compte de cette dimension

dynamique est indispensable pour cette étude.

4) Il se trouve que la régression des moindres carrés partiels est également adaptée au grand

nombre d’indicateurs, aux fortes colinéarités entre ces indicateurs et s’accommode de

quelques données manquantes, des caractéristiques que l’on retrouve dans la base de

données étudiée.

B. Application de la méthode et sélection des indicateurs La méthodologie décrite ci-dessus a été appliquée aux données collectées par le réseau. En raison de

valeurs manquantes (suite à l’impossibilité d’accéder à l’information ou de réaliser les enquêtes

pendant la période de suivi) trop nombreuses chez 3 individus sur les 15 initiaux. Ces individus ont

finalement été écartés de l’analyse.

De nombreux indicateurs, issus de la méthode détaillée plus haut, sont conservés pour l’étude. Après

discussion avec les techniciens du réseau GAB-FRAB de Bretagne sur la méthode et les indicateurs

envisagés, des indicateurs supplémentaires de performance et de pratiques ont été ajoutés.

Au final, ce sont 12 fermes laitières suivies sur 5 années qui ont fait l’objet de cette analyse. Les

critères observés sont repartis en quatre grandes catégories : indicateurs de contexte climatique et

économique, de pratiques et de performance (Tableau 1, Tableau 2, Tableau 3 et Tableau 4). Les

noms des indicateurs sont abrégés en français et en anglais dans la troisième colonne des tableaux,

de manière à ce qu’ils puissent être utilisés dans les différentes publications et autres livrables de ces

travaux.

Tableau 1: Les indicateurs climatiques sélectionnés pour l'étude

Indicateurs climatiques Le bilan hydrique printanier

Correspond au bilan hydrique (pluie moins ETP) journalier moyen sur la saison considérée

Indicateurs : BH_Print , WaterSpring

Le bilan hydrique estival

Correspond au bilan hydrique (pluie moins ETP) journalier moyen sur la saison considérée

Indicateurs :BH_Ete , WaterSummer

Le bilan hydrique d’automne

Correspond au bilan hydrique (pluie moins ETP) journalier moyen sur la saison considérée

Indicateurs : BJ-Aut , WaterAutumn

Le bilan hydrique hivernal

Correspond au bilan hydrique (pluie moins ETP) journalier moyen sur la saison considérée

Indicateurs : BH_Hiver , WaterWinter

Le nombre de jours échaudants

Correspond au nombre de jours, sur la période printemps et été (de la campagne laitière considérée), dont la température maximale dépasse la valeur de 25°C

Indicateurs : Jour_Ech , HeatStress

La précocité Correspond à la somme des températures moyennes journalières bornées (à 0°C et à 25°C respectivement en température minimale et maximale) du 1

er février au 1

er

avril de la campagne laitière considérée

Indicateurs : Precocite , Earliness

Les données météorologiques ont été récupérées dans la base de données SAFRAN-DRIAS. Ce sont

les données météorologiques journalières spatialisées pour l’ensemble de la France avec un maillage

géographique de 8 par 8 km. J’ai retravaillé ces données à l’échelle des saisons et des périodes

correspondants aux campagnes laitières de chaque ferme.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Tableau 2: Les indicateurs économiques sélectionnés pour l'étude

Indicateurs économiques Le prix de l’énergie Correspond à la somme des valeurs mensuelles de l’index

du prix de l’énergie sur la campagne laitière considérée. Indicateurs : Prix_Energie , EnergyPrice

Le prix du lait Correspond au prix du lait moyen annuel ramené aux 1000 litres

Indicateurs : Prix_Lait , MilkPrice

Le prix de l’énergie est extrait à l’aide de l’indice « IPAMPA Energie et Lubrifiant » de l’institut de

l’élevage. Le prix du lait est obtenu par consultation du grand livre comptable directement auprès

des éleveurs.

Tableau 3: Les indicateurs de pratiques des éleveurs sélectionnés pour l'étude

Indicateurs de pratiques des éleveurs L’indice de diversité de l’assolement

Correspond à l’indice de Shannon. C’est-à-dire la somme du produit de la proportion de chaque couvert dans l’assolement total (pi) et du logarithme népérien de cette proportion (lnpi). Soit ∑(pi*lnpi).

Indicateurs : Shannon_ha , ShannonLand

La part de prairie permanente dans la SFP

Correspond à la proportion de prairie permanente dans la surface fourragère principale

Indicateurs : PP_SFP , %PermPast , .PermPast

La part de prairies temporaires dans la SFP

Correspond à la proportion de prairie temporaire dans la surface fourragère principale

Indicateurs : PT_SFP , %SownPast , .SownPast

La part de maïs ensilage dans la SFP

Correspond à la proportion de maïs destinée à l’ensilage dans la surface fourragère principale

Indicateurs : Mais_SFP , %Maize , .Maize

La part de protéagineux dans la SAU

Correspond à la proportion de surfaces destinées à la production de protéagineux dans la surface agricole utile

Indicateurs : Proteag_SAU , %Legumes , .Legumes

La part de génisses dans le cheptel total

Correspond à la proportion d’UGB génisses par rapport aux UGB lait total

Indicateurs : pcUGB_genisse , %Heifers , .Heifers

L’étalement des vêlages

Correspond au nombre de mois durant lesquels ont lieu les vêlages divisé par 12

Indicateurs : Etal_velage , CalvingSpread

Le pourcentage de maïs dans la ration

Correspond au pourcentage de maïs ensilage dans la ration des vaches laitières.

Indicateurs : pc_mais_ration , SilageMaize

La quantité de concentrés

Correspond à la quantité en kg/UGB/an de concentrés distribués dans la ration des vaches laitières.

Indicateurs : Conc_UGB , ConcDistrib

Le chargement Correspond au chargement en UGB lait (génisses et laitières) par hectares de SFP

Indicateurs : CA , StockingRate

La quantité de lait produit par vache

Correspond à la quantité en nombre de litre de lait, produit par vache laitière par an

Indicateurs : Lait_VL , MilkCow

La surface accessible Correspond à la proportion de surface accessible (en hectare) par rapport à la surface agricole utile

Indicateurs : SurfAcessVL_SAU , %AccessibleArea , .AccessibleArea

La surface pâturée Correspond à la proportion de surface effectivement pâturée (en hectares) par rapport à la surface fourragère principale

Indicateurs : SurfPatVL_SFP , %GrazedArea , .GrazedArea

La surface affouragée en vert

Correspond à la proportion de la surface affouragée en vert (en hectares) par rapport à la surface fourragère principale

Indicateurs : AffVert_SFP , %GreenFeeding ,

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.GreenFeeding

Le pourcentage de pâture dans la ration

Correspond au pourcentage de pâturage dans la ration des vaches laitières.

Indicateurs : pc_paturage , %GrazingInFeeding , .GrazingInFeeding

Les données d’assolement sont en hectares. Les parts des différents couverts, la surface accessible,

pâturée, affouragée, ainsi que la part de génisses et les indicateurs de ration sont en pourcentage.

L’étalement des vêlages est une valeur comprise entre 0,25 (vêlages groupés sur une période de 3

mois) et 1 (vêlages étalés sur l’année).

Tableau 4: Les indicateurs de performance sélectionnés pour l'étude

Indicateurs de performance La productivité autonome

Correspond à la quantité totale de lait vendu ramené à la surface agricole utile en tenant compte du ratio : aliment et fourrage produit sur aliment et fourrage consommé.

Indicateurs : Lait_aut_SFP_AAMT , ProdHa

L’efficacité économique

Correspond à la différence entre le produit de l’activité et les charges opérationnelles divisé par les charges opérationnelles.

Indicateurs : EffiAlim , Effi

L’EBE par UTH Correspond à l’EBE (hors activité annexe) divisé par le

nombre d’UTH total sur la ferme.1

Indicateurs : EBE_UTH , OpSur_WorkUn

La sensibilité aux aides

Correspond à l’ensemble des aides (Aides primes lait, viande, cultures, fourrages, CTE, MAE et DPU) divisé par l’EBE (avec activité annexe)

Indicateurs : Sensi_Aides , SensiToAid

Les indicateurs de performance ont des unités différentes. La productivité autonome est exprimée en litres par hectare. L’efficacité économique et la sensibilité aux aides sont des indicateurs sans unité. L’EBE par UTH est exprimé en euros par UTH.

C. Premiers résultats sur les indicateurs de performance bruts Un premier travail de caractérisation des profils de conversion a été réalisé à partir des données

brutes. A titre illustratif, quatre fermes, aux trajectoires distinctes, ont été sélectionnées à partir de

l’échantillon total, en vue de représenter la diversité des profils de conversion en fonction des

indicateurs de performance.

1 L’EBE hors activité annexe correspond à la somme de la valeur ajoutée et des DPU (Droits à Paiement Unique)

moins les impôts, taxes, fermage et charges de main d’œuvre. Lorsque cet indicateur est utilisé, l’intérêt n’est porté que sur l’atelier lait et l’on ne tient pas compte des productions secondaires (vente de céréales par exemple) ou des prestations de service. En revanche, pour l’EBE avec activité annexe on ajoute les produits des productions secondaires et on soustrait leurs charges. Ainsi l’EBE par UTH se focalise sur ce qui reste du fonctionnement global du système pour vivre, investir et rembourser les emprunts alors que l’efficacité économique ne s’intéresse qu’au fonctionnement opérationnel sans prendre en compte les impôts, les charges salariales et de structures.

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Figure 4: Evolution des indicateurs de performance au cours de la conversion à l'AB. Les tendances observées concernent les

valeurs brutes - avant régression linéaire – et donnent des premiers résultats l’évolution et la variabilité au cours de la période d’étude.

2

Les premières observations qui peuvent être effectuées à partir des profils de ces quatre fermes sur

les douze étudiées sont les suivantes :

La ferme 13 améliore son efficacité économique de 306% (passant de 1.6 à 6.5 en 5ans) et

son EBE/UTH de 110% (passant de 25 551€/UTH à 53 845€/UTH en 5 ans) tout en diminuant

sa productivité autonome de 33% (passant de 4720l/ha à 3165l/ha en 5 ans) au cours de la

conversion. Les deux années de conversion impliquant le respect du cahier des charges bio

pour produire un lait rémunéré à un prix conventionnel sont marquées par une haute

sensibilité aux aides.

La ferme 4 est également fortement marquée en C1 et C2 par cette sensibilité aux aides

(augmentation de 356% de conventionnel à C2) et une chute de la productivité autonome de

55% sur la période totale (variant de 5677l/ha à 2579l/ha en 5 ans), cependant, ni son

EBE/UTH, ni son efficacité économique ne se sont grandement améliorés (respectivement

17 968€/UTH et 1.4 en conventionnel et 12 486€/UTH et 2 en Bio2). Ces résultats sont liés au

fait que cette ferme est passé de zéro achats de concentrés en conventionnel à 20tMS

achetés en deuxième année en bio pour une production laitière par vache finalement

globalement inchangée entre le début et la fin de la période d’étude.

La ferme 15 conserve un haut niveau de productivité (proche des 4500l/ha tout au long du

suivi) tout en améliorant son efficacité économique de 410% (passant de 1 à 5.1 en 5 ans), ce

qui la conduit à accroître son EBE/UTH de 116% (de 38 708€/UTH en conventionnel à

83 762€/UTH en Bio2) et à réduire sa sensibilité aux aides de 32% sur la période totale.

Enfin, la ferme 3, améliore son niveau de productivité de 34% de conventionnel à Bio1

(variant de 4879l/ha à 6526l/ha) et son efficacité économique de 67% sur la même période

(variant de 0.9 à 1.8). Cela s’accompagne d’un accroissement de l’EBE/UTH (de 20 265€/UTH

2 C1 et C2 sont respectivement la première et la deuxième année de conversion et Bio1 et Bio2 sont

respectivement la première et la deuxième année certifiées en Agriculture Biologique. La productivité autonome est exprimée en litres par ha, l’efficacité économique et la sensibilité aux aides sont sans unité et l’EBE/UTH est en € par UTH.

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à 41 613€/UTH) de 105% sur la période totale tout en conservant une faible sensibilité aux

aides (augmentation de 11%).

Afin de compléter ces observations il est nécessaire de les repositionner par rapport à la population

totale de l’échantillon. De manière générale, les indicateurs économiques tendent à s’améliorer en

présentant des valeurs plus importantes en fin de période. Cependant, alors que les valeurs

d’efficacité économique sont peu dispersées entre individus en conventionnel (écart type de 0.64 en

conventionnel pour des valeurs variant de 0.9 à 3.1), son amélioration moyenne de 94%

s’accompagne d’une dispersion des valeurs (écart type de 1.55 en Bio2 pour des valeurs variant de

1.5 à 6.5). Une dispersion que l’on retrouve pour l’indicateur EBE/UTH tout au long de la période

d’étude. A l’inverse, la sensibilité aux aides ne présente d’importantes variations entre individus que

durant la période de conversion pour laquelle cinq des douze fermes ont de fortes valeurs. Ce pic de

sensibilité aux aides s’explique par une importante chute de l’EBE sur la période de conversion avant

que celui-ci ne remonte avec le prix du lait payé en bio. En effet le prix du lait chute de 330

euros/1000l en conventionnel à 299 euros/1000l en C1 en moyenne sur l’échantillon total (cette

chute peut aller jusqu’à 40 – ferme 13 – voire 80 euros/1000l – ferme 4). Concernant la productivité

autonome, il n’existe pas de tendance globale fortement marquée sur l’ensemble de l’échantillon.

Certaines fermes voient leur productivité augmenter, d’autres la voient diminuer de manière plus ou

moins variable. En conventionnel la productivité varie de 2304 à 5677 l/ha (écart type :

SD=971.8l/ha), puis de 2558 à 4931l/ha (écart type : SD=834l/ha).

D. Premiers résultats sur les indicateurs de pratiques Afin de poursuivre cette première analyse sur les données brutes, il est pertinent de s’intéresser aux

pratiques d’élevage et à leur évolution au cours de la conversion et de les mettre en relation avec

l’évolution des indicateurs de performance.

Figure 5: Evolution des indicateurs de pratiques au cours de la conversion à l'AB. Les tendances observées concernent les

valeurs brutes des indicateurs de pratiques d’élevage.

La ferme 13 a fait chuter de 35% à 0% sa surface en maïs ensilage au profit de la part de la

prairie temporaire qui a augmenté passant 41 à 95%. Le concentré dans la ration a diminué

de 41% de l’année en conventionnel à la deuxième année en AB, avec un réajustement à la

hausse consécutivement à la deuxième année de conversion. Le niveau de productivité

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moyen par vache laitière a chuté de 23.5% pour se stabiliser à 5424l/vl/an environ.

L’efficacité économique s’est donc améliorée, comme nous l’avons vu à l’étude de l’évolution

des indicateurs de performance, principalement en raison d’une diminution des charges

opérationnelles (de 69 645€ en conventionnel à 21 410€ en Bio2) et l’EBE/UTH en raison du

départ d’un UTH entre C2 et Bio1.

La ferme 4, qui a le même profil d’évolution de productivité autonome que la 13 bien que

plus variable, a conservé un haut pourcentage de PT dans la SFP durant la période étudiée

(variations de 77% à 85%). La part de maïs dans la SFP, est restée relativement stable et

proche de la valeur initiale de 13%. La quantité de concentrés distribués (donc acheté car

cette ferme n’a pas mis en place de céréales) a augmenté de C1 à la deuxième année en bio

de 418%. La moyenne d’étable a été très variable mais se stabilise en Bio2 à

approximativement la même valeur qu’en conventionnel (respectivement 5172 et

5268l/vl/an). L’augmentation du concentré acheté et la diminution de la surface en maïs sont

responsables de la diminution de la valeur du ratio aliment produit divisé par aliment

consommé et donc de la chute de productivité autonome étudiée plus haut.

La ferme 15, qui combine haute productivité et résultats économiques intéressants, a fait

chuter sa quantité de concentrés dans la ration de 1094kg/UGB/an à 118kg/UGB/an,

expliquant en partie l’amélioration de la productivité autonome. C’est l’évolution la plus

marquée pour les pratiques de cet éleveur. Le niveau de productivité des laitières a peu

évolué avec une chute de 6,5% de l’année en conventionnel à Bio2 (où il se stabilise à

5943l/vl/an). La part PT dans la SFP évolue peu mais la part de maïs ensilage chute de 71%

entre année en conventionnel et Bio2. Comme la ferme 13, la 15 améliore son efficacité

économique majoritairement en raison d’une diminution des charges opérationnelles (de

59 229€ en conventionnel à 22 704€ en Bio2).

Enfin, chez la ferme 3, la part de maïs ensilage dans la SFP a diminué de 30ha en 5 ans (chute

de 67%) et la part de PT a augmenté de 13ha (augmentation de 31%). En Bio2, 2.5ha de

betterave étaient implantés accompagnés de 20ha d’un fourrage non spécifié pour une SAU

totale qui a augmenté de 67 à 82ha. Il s’agit visiblement d’un profil à part. La quantité de

concentrés distribués dans la ration a diminué de 1809 à 620kg/UGB/an (chute de 66%). S’en

est suivi une chute du niveau moyen de productivité par vache (stabilisé autour des

7000l/vl/an pendant 4 ans, puis chute à 6066l/vl/an en Bio2). La diminution du concentré

acheté associée à une chute de maïs ensilage dans la SFP moins importante que pour les trois

autres fermes explique l’amélioration de la productivité autonome. L’amélioration de

l’efficacité économique s’explique à la fois par une diminution des charges opérationnelles et

par une augmentation du produit (prix du lait bio) et l’EBE/UTH augmente à la fois en raison

de la diminution d’un UTH familial entre C1 et Bio1 et d’une amélioration de l’EBE. Ce qui

coïncide avec une faible sensibilité aux aides.

De même que pour les indicateurs de performance, il est nécessaire de repositionner les

observations faites sur ces quatre individus isolés par rapport à l’ensemble de l’échantillon. De

manière générale, sur l’ensemble de l’échantillon le maïs dans la SFP tend à diminuer en variant de

24.9% en moyenne en conventionnel à 6.7% en Bio2 (la valeur maximum en Bio 2 atteint 19%). Le

concentré distribué diminue de 60% et est très variable en début de période (moyenne et écart type

respectivement en conventionnel et en Bio2 : Moy=837kg/UGB/an, SD=531kg/UGB/an et

Moy=333kg/UGB/an, SD=285kg/UGB/an). La part de prairie temporaire moyenne augmente de 19%

sur la période. En revanche, le niveau de production par vache laitière est très inégal d’une ferme à

l’autre. La tendance globale est à la baisse (-10,5%), mais cette évolution est bien moins marquée

que celle des trois autres indicateurs de pratique. Cela peut s’expliquer par le fait qu’un troupeau

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ayant un niveau de productivité en croisière mettra du temps avant de se stabiliser à un nouveau

niveau. Notamment pour des races particulièrement productives comme la Prim’Hosltein.

Cependant, la race n’étant pas prise en compte dans la base de données cette hypothèse n’est pas

vérifiable.

Ces premières observations confirment la diversité des profils étudiés et des tendances et donnent

un aperçu de la variabilité au cours des différentes évolutions.

Les tendances évolutives présentées ici sont semblables concernant les évolutions globales des

pratiques (chute de la surface en maïs ensilage et du concentré distribué, augmentation de la part

d’herbe dans l’assolement). Ce sont les niveaux de départ qui semblent fortement différencier les

profils de conversion.

Ces résultats concernent uniquement les indicateurs bruts. Ils sont donc à modérer et doivent être

complétés par l’analyse de la régression des moindres carrés partiels.

E. Application de la régression linéaire aux indicateurs bruts Contrairement à la méthode employée par Martin et al. 2017, qui limite la régression linaire aux

indicateurs de performance, le choix a été fait d’appliquer une régression aux indicateurs de

performance, de contexte et de pratique. Ce choix s’explique par le fait que la conversion à la bio

implique des adaptations importantes des pratiques des éleveurs. Aussi, nous souhaitions intégrer la

situation de départ en agriculture conventionnelle et la tendance d’évolution des pratiques plutôt

que les mesures brutes annuelles relevées en ferme. De plus, avoir des informations sur la variabilité

des indicateurs du contexte climatique et économique semblait pertinent afin de vérifier si les

fermes les plus exposées à la variabilité climatique et économique sont aussi celles qui sont les plus

vulnérables durant la phase de conversion à l’AB. D’autre part, pour les variables explicatives comme

pour les variables à expliquer, nous avons retenu l’ordonnée à l’origine et la pente de la régression

linéaire.

L’analyse des premières régressions linéaires a conduit à éliminer plusieurs indicateurs représentant

le contexte climatique et économique, les pratiques des éleveurs et la vulnérabilité des fermes. Les

régressions linéaires sont réalisées sous la forme de modèles linéaires mixtes ayant des effets fixes

valables pour l’ensemble de la population et des effets aléatoires valables pour chaque individu sur la

pente et l’ordonnée à l’origine. Seuls les indicateurs ayant une variance inter-individus non nulle,

susceptibles donc de discriminer les fermes, ont été conservés. Pour les autres indicateurs, lorsque la

corrélation entre la pente et l’ordonnée à l’origine de la régression linéaire était égale à -1 ou 1

(c’est-à-dire qu’il y avait anti-corrélation ou corrélation parfaite), seule l’ordonnée à l’origine a été

conservée. La régression linéaire a été réajustée sans effet aléatoire sur la pente dans la suite de

l’analyse. Ce choix vise à débruiter l’analyse statistique car si la régression PLS s’accommode de

fortes colinéarités entre indicateurs, il ne convient tout de même pas d’utiliser des indicateurs

parfaitement corrélés. Si seule l’information sur l’ordonnée à l’origine est conservée, cette dernière

étant parfaitement (anti-)corrélé à la pente, ces deux types d’indicateur peuvent être considérés

dans l’interprétation.

Dans ce cadre, n’ont été conservés pour la suite de la méthode, que les indicateurs de variabilité du

contexte suivants :

La variabilité du bilan hydrique estival notée R.WaterSummer

La variabilité du bilan hydrique d’automne notée R.WaterAutumn

La variabilité du nombre de jours échaudants notée R.HeatStress

La variabilité de la précocité de l’année notée R.Earliness

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Les autres indicateurs du contexte climatique et économique présentés dans les Tableau 1 et Tableau

2 n’ont pas été retenus car leur variance inter-individus était trop proche de zéro. Ces indicateurs

n’étaient donc pas de bons discriminants des situations individuelles des fermes. Il est possible

d’observer sur la Figure 6 les tendances des indicateurs économiques. Elles se présentent sous forme

d’une légère chute de l’année en conventionnel à la première année en conversion, puis une hausse

jusqu’en Bio1 pour ensuite se stabiliser.

Figure 6: Evolution des indicateurs économiques au cours de la période de suivi

Les indicateurs complémentaires, qui concernent les pratiques d’élevage, utilisés pour la suite de la

méthodologie sont présentés dans le Tableau 5.

Tableau 5: Les indicateurs conservés pour l'analyse. Si la corrélation entre la pente et l’ordonnée à l’origine est totale au moment de l’application du modèle linéaire, seul l’ordonnée est conservée après ajustement de la régression sans effet

aléatoire sur la pente.

Concernant les pratiques Indicateur de base Ordonné à l’origine Pente Corrélation (I.*Sl.) L’indice de diversité de l’assolement I.ShannonLand Sl. ShannonLand -0,6 La part de prairie permanente dans la SFP

I..PermPast -1

La part de prairies temporaires dans la SFP

I..SownPast Sl..SownPast -0,74

La part de maïs ensilage dans la SFP I..Maize Sl..Maize -0,92 La part de protéagineux dans la SAU I..Legumes -1 La part de génisses dans le cheptel total I..Heifers +1 L’étalement des vêlages I.CalvingSpread +1 Le pourcentage de maïs dans la ration I.SilageMaize Sl.SilageMaize -0,67 La quantité de concentrés distribués I.ConcDistrib -1 Le chargement I.StockingRate -0,96 La quantité de lait produit par vache I.MilkCow -1 La surface accessible I..AccessibleArea Sl..AccessibleArea -0,37 La surface pâturée I..GrazedArea Sl..GreazedArea -0,15 La surface affouragée en vert I..GreenFeeding Sl..GreenFeeding -0,36 Le pourcentage de pâture dans la ration I..GrazingInFeeding Sl.GrazingInFeeding -0,28

Concernant les indicateurs de performance Indicateur de base Ordonné à l’origine Pente Corrélation La productivité autonome I.ProdHa Sl.PordHa +0,42 L’efficacité économique I.Effi Sl.Effi -0,42 L’EBE par UTH I.OpSur_WorkUn Sl.OpSur_WorkUn -0,54 La sensibilité aux aides I.SensiToAid +1

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Au vu des indicateurs de performance utilisés pour cette étude, différents et plus nombreux que

ceux utilisés par Martin et al. (2017), il est nécessaire de rappeler qu’un individu est considéré

comme peu vulnérable dès lors que :

Il est dès à présent possible d’étudier les indicateurs de vulnérabilité des 4 individus préalablement

sélectionnés.

Figure 7: Graphique radar des indicateurs de vulnérabilité générés à partir des indicateurs de performance. Le graphique est

réalisé de manière à ce que les fermes qui combinent les facteurs intéressants soient sur la périphérie du graphique. Sous chaque indicateur est inscrit (arrondi au dixième) le minimum et le maximum des valeurs prises par cet indicateur sur

l’ensemble des fermes de l’échantillon. Le milieu de chaque axe correspond à la moyenne de l’échantillon total. Quatre fermes sont représentées.

La Figure 7 présente un graphique radar des quatre fermes préalablement sélectionnées selon les

valeurs des indicateurs de vulnérabilité. Notons que la pente de la sensibilité aux aides

(Sl.SensiToAid) est conservée pour faciliter la lecture de ce radar mais sera supprimée pour la suite

de l’analyse en lien avec les raisons évoquées plus haut. Les axes qui concernent l’indicateur de

sensibilité aux aides (I.SensiToAid et Sl.SensiToAid) ont été inversés de manière à avoir le minimum

sur l’extérieur et le maximum vers l’intérieur du radar. La lecture du graphique est ainsi facilitée. Les

La pente est positive ou nulle et l’ordonnée à l’origine est importante pour les indicateurs

économiques et la productivité autonome

La pente est négative ou nulle et l’ordonnée à l’origine est faible pour l’indicateur de

sensibilité aux aides.

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fermes combinant un maximum de valeurs sur la périphérie du radar peuvent être jugées comme

étant les moins vulnérables selon notre hypothèse.

La ferme 13 présente des pentes des indicateurs de performance économique

(OpSur_WorkUn : +2971€/UTH et Effi : +0.544) au-dessus de la moyenne mais un faible

niveau de départ (respectivement -13 137€/UTH et -0.369). Ses valeurs de sensibilité aux

aides sont moyennes car proches de zéro. Comparativement aux trois autres cas, le point de

départ de la productivité est légèrement bas (-52l/ha) et la tendance est en légère chute (-

73l/ha). La vulnérabilité de cette ferme est en lien avec sa situation de départ puisqu’elle est

fortement vulnérable économiquement en début de période. Cependant, son évolution

économique tend à améliorer la situation au cours du suivi. La sensibilité aux aides de cette

ferme est dans les normes de l’échantillon, concernant la pente et l’ordonnée à l’origine. En

revanche, la productivité autonome, bien que proche de la moyenne en début de période,

pourrait être améliorée.

La ferme 4, comparativement à l’échantillon total, regroupe la majorité de ses valeurs des

indicateurs de vulnérabilité au centre du graphique. Au vu de l’hypothèse que nous avons

développé, cette ferme présente une grande vulnérabilité. La situation de cette ferme en

conventionnel, et l’orientation prise durant la conversion sont en lien avec cette forte

vulnérabilité. En effet, ses valeurs de départ d’efficacité économique et d’EBE/UTH sont

parmi les plus faibles de l’échantillon (respectivement -0.160 et -16 133€/UTH) et la situation

ne tend pas à s’améliorer au vu des pentes (-0.364 et -3 235€/UTH). La sensibilité aux aides

de cette ferme est également marquée par de fortes contraintes (ordonnée : 0.044, pente :

+0.005) tout comme la productivité autonome qui ne s’améliore pas (pente minimale de

l’échantillon : -108.5l/ha).

Au contraire, la ferme 15 est visiblement la ferme la moins vulnérable des quatre

représentées sur le graphique. Combinant à la fois, des valeurs positives de pente et

d’ordonnée à l’origine – hormis I.Effi – des indicateurs de performance économique et de

productivité autonome en comparaison aux autres fermes (pentes : +4 263€/UTH, +0.482 et

+95,7l/ha ; ordonnées : 17 284€/UTH, -0.152, 587.8l/ha), et de faibles valeurs de sensibilité

aux aides (pente de -0.004 et ordonnée à l’origine de -0.031), cet individu présente des

valeurs majoritairement positionnées sur la périphérie du radar.

La ferme 3, la plus productive de la sélection est également la moins sensible aux aides.

L’EBE/UTH est en voie d’amélioration (+2 355€/UTH) mais les niveaux de départ des

indicateurs économiques (-8 824€/UTH et -0.374) sont responsables du fait que cette ferme

reste économiquement vulnérable durant la conversion.

La forte colinéarité entre les valeurs de l’ordonnée à l’origine et la pente de la sensibilité aux aides

est confirmée par le radar. Les positions des fermes considérées sur ces deux axes sont identiques

entre individus.

Les résultats de ce graphique en radar viennent confirmer ceux apportés par l’étude des données

brutes. Il ressort en outre qu’il n’y a pas une mais des formes de vulnérabilité différentes.

Productivité autonome et résultats économiques peuvent être parfaitement soit dissociés, soit

associés. Raison pour laquelle certaines fermes sont productives mais n’évoluent pas

convenablement économiquement (ferme 3) et d’autres sont faiblement productives mais tendent à

être efficaces économiquement (ferme 13). Il n’est pourtant pas impossible de combiner des

tendances identiques, positives (ferme 15) ou négatives (ferme 4), à la fois des indicateurs de

performances économiques et de productivité. La vulnérabilité peut également être étudiée en

observant conjointement niveaux de départs et évolutions. Le radar met en avant que des

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combinaisons intéressantes entre situation en conventionnel et évolution en conversion peuvent

exister (ferme 15), la réciproque étant également exposée avec des fermes en mauvaise posture de

départ et qui ne s’améliorent pas lors du passage en bio en comparaison avec les autres individus de

l’échantillon (ferme 4). Mais ces valeurs peuvent également être dissociées. On retrouve ainsi les cas

où les niveaux de départ des indicateurs économiques sont faibles, mais leur évolution est

intéressante (ferme 13). Une vulnérabilité marquée par la situation avant conversion de la ferme

étudiée peut être compensée dans certains cas par des évolutions positives. La situation inverse –

situation de départ peu vulnérable et évolution négative – n’est pas représentée sur ce graphique, on

peut se questionner quant à son existence.

Les résultats de la régression des moindres carrés partiels a pour rôle de relier les niveaux de

vulnérabilité avec les pratiques et le contexte.

V. Résultats et Interprétation de l’étude de la régression des moindres carrés

partiels

A. Résultats sur les indicateurs La régression des moindres carrées partiels, de manière semblable à l’analyse en composante

principale, projette sur un espace à deux dimensions l’ensemble des indicateurs utilisées, nous

permettant d’étudier les tendances et corrélations qui existent entre ces différents indicateurs.

Figure 8: Graphique de la régression des moindres carrés partiels avec représentation des indicateurs. En orange sont

présentées les variables à expliquer issues des indicateurs de performance et en bleu sont présentées les variables explicatives issues des indicateurs de contexte et de pratiques.

L’une des premières observations qui peut être faite au vu des résultats de la régression des

moindres carrés partiels sur les indicateurs est qu’il n’existe visiblement pas de combinaison

d’indicateurs permettant d’identifier des individus faiblement vulnérables d’après nos critères

d’analyse. Concrètement, il n’existe pas de zone du graphique où l’on retrouve à la fois les

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indicateurs de l’évolution et du niveau de départ des performances économiques et de productivité

en opposition à l’indicateur de sensibilité aux aides. Ce qui correspondrait à la transcription sur

graphique des conditions d’absence de vulnérabilité comme nous les avons présentées plus haut.

Les variables à expliquer Sl.ProdHa, I.ProdHa, Sl.OpSur_WorkUn, I.OpSur_WorkUn et I.Effi sont bien

représentées sur la composante horizontale 1, cependant, hormis pour I.Effi ce n’est pas le cas pour

la composante verticale 2. A l’inverse, l’indicateur Sl.Effi est principalement représentée par la

composante verticale 2 et très faiblement sur la composante horizontale 1. Elle est orthogonale aux

indicateurs précédents donc évolue indépendamment de ceux-ci. Concernant l’indicateur de

sensibilité aux aides, c’est sur les composantes 3 et 4, qui n’apparaissent pas ici, qu’il est le mieux

projeté. La sensibilité aux aides évolue donc, également, indépendamment des autres indicateurs.

Les indices de projections des variables sur les différentes composantes sont présentés en Annexe 1.

Au vu des projections des différents indicateurs de vulnérabilité, nous pouvons déduire du

positionnement des indicateurs de vulnérabilité que :

La pente de la productivité autonome et de l’EBE/UTH ainsi que le niveau de départ de la

productivité autonome sont corrélés. Une amélioration importante de l’EBE/UTH est à priori

liée à un haut niveau de départ et une amélioration de la productivité autonome.

Le niveau de départ de l’efficacité économique et de l’EBE/UTH sont corrélés entre eux et

corrélé négativement au groupe d’indicateurs ci-dessus, ce qui signifie que les fermes ayant

les niveaux économiques en conventionnel les plus intéressant sont ceux qui auront la moins

grande capacité d’amélioration de l’EBE/UTH. Ce sont également les fermes les moins

productives et celles qui auront les évolutions de productivité autonome les moins

importantes.

La sensibilité aux aides, qu’il s’agisse de son évolution – non représentée mais parfaitement

corrélée à l’ordonnée à l’origine – ou de son niveau de départ, est dissociée des autres

indicateurs, donc indépendante. La sensibilité aux aides, qu’elle soit importante ou non, ne

permet pas de caractériser un système sur son niveau de productivité ou sur sa performance

économique.

L’évolution de l’efficacité économique est peu liée à l’évolution de la productivité et à sa

valeur initiale. Ce qui signifie que, à priori, les fermes auront des évolutions de leurs

efficacités économiques indépendantes de leur productivité automne (niveau de départ et

tendance).

Il est important noter que l’indicateur d’évolution « Sl. » ne présente pas nécessairement une

augmentation brute de l’indicateur considéré. Il s’agit de tendances relatives entre individus. A titre

d’exemple, les individus positionnés proche de l’indicateur Sl.ConcDistrib ne sont pas ceux ayant le

plus augmenté la quantité de concentrés dans la ration mais bien ceux ayant, comparativement à

l’échantillon total, le moins diminué la quantité de concentrés dans la ration. En effet, I.ConcDistrib

et Sl.ConcDistrib sont parfaitement anti corrélés. Si ces individus démarrent avec de faibles quantités

de concentrés distribués en conventionnel (donc opposé à I.ConcDistrib sur la régression PLS) il est

normal qu’ils le diminuent en moins grande proportion, comparativement à ceux qui en utilisaient

plus en conventionnel.

Cette précision étant faite, il est à présent possible d’identifier visuellement des groupes de variables

explicatives distincts et anti corrélés sur ce graphique.

Le premier groupe, sur la gauche et que nous notons trajectoire A, concerne les fermes caractérisées

principalement par leur situation initiale du point de vu des pratiques (hormis pour l’évolution du

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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maïs dans la SFP qui est fortement négativement corrélé au groupe), leur fort niveau de productivité

autonome et leur faible EBE/UTH en début de suivi et l’évolution positive de ces deux indicateurs de

performance. Il s’agit des systèmes que l’on pourrait présenter comme étant les plus intensifs de

l’échantillon en conventionnel. En effet, La zone étudiée du graphique correspond aux fermes qui, en

conventionnel, distribuaient le plus de concentrés en association avec une forte part de maïs dans la

ration (et donc dans l’assolement). Ce type d’alimentation en bovin lait permet d’importants niveaux

de chargement, de forts niveaux de productivité par vache et correspondent à des systèmes en

vêlages étalés (repartis sur toute l’année). Le contexte est marqué par une forte variabilité du bilan

hydrique d’automne. Ces systèmes ont évolué vers l’herbe et sont ceux ayant le plus fait diminuer la

part de maïs ensilage dans l’assolement comparativement à l’échantillon total. Cette trajectoire

correspond aux fermes les moins vulnérables sur des critères de productivité autonome. En revanche

les niveaux économiques de départ sont en lien avec des situations financières initiales compliquées.

Le second groupe, noté trajectoire B, opposé au premier et présent sur la droite de la Figure 8

correspond donc aux fermes les moins intensives en conventionnel, les fermes ayant de forts

EBE/UTH en conventionnel et de faibles évolutions de l’EBE/UTH et de la productivité autonome. Ce

sont les fermes qui distribuaient le moins de concentrés en conventionnel. Plus orienté vers des

systèmes herbagers, la productivité des laitières était moins importante et la part d’herbe dans la

ration ainsi que la part de surface pâturée dans la SFP était plus importante que la moyenne de

l’échantillon total en début de période. Il s’agit également de la trajectoire pour laquelle le maïs

ensilage dans la SFP a le moins diminué, les fermes en possédant déjà très peu en début de période.

Cette trajectoire correspond aux individus les moins vulnérables en ce qui concerne leur situation

économique de départ. Cependant, leur productivité autonome de départ et son évolution ne sont

pas parmi les meilleures de l’échantillon total.

Un groupe supplémentaire, que nous noterons trajectoire C, se distingue sur le bas du graphique. Les

fermes de cette trajectoire sont celles ayant le plus mis en place de surface en prairie temporaires et

destinées à la pâture. Leur indice de diversité de l’assolement était le plus important de l’échantillon

total en conventionnel. Ces fermes intègrent durant la conversion d’importantes parts de pâture et

diminuent fortement le maïs ensilage dans la ration et sont exposées à une forte variabilité du

nombre de jours échaudants. La vulnérabilité de cette trajectoire est caractérisée par une tendance à

l’amélioration de la situation économique et peu par sa situation économique de départ ou sa

productivité autonome (que ce soit tendance ou niveau de départ).

Ces trois trajectoires dégagées par la seule interprétation des regroupements et oppositions entre

indicateurs doivent être confirmées par l’analyse des résultats sur la projection des individus.

B. Résultats sur les individus Le graphique de projection des individus suite à la régression des moindres carrés partiels est

présenté sur la Figure 9.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Figure 9: Graphique de la régression des moindres carrés partiels avec la représentation des individus. Les trajectoires sont

notées sur le graphique de manière à simplifier la lecture de l’analyse.

Le block X représente la projection des individus dans le plan des variables explicatives, c’est-à-dire

les indicateurs de contexte et de pratiques. Le block Y représente la projection de ces mêmes

individus dans le plan des variables à expliquer, soit les indicateurs de vulnérabilité.

On retrouve dans la zone correspondant à la trajectoire A sur le graphique des indicateurs,

principalement les individus 3 et 9 (en haut à gauche). Nous avions déjà noté que la ferme 3 possède

les caractéristiques d’un système intensif (initialement orienté en système maïs avec distribution de

concentrés et une importante productivité par vache). Il en est de même pour la ferme 9 qui avait en

conventionnel d’importantes quantités de concentrés distribués (1669kg/UGB/an, la moyenne de

l’échantillon étant à 837kg/UGB/an), et parmi les plus hauts pourcentages de SFP dédié à la culture

de maïs ensilage (51%). Des valeurs qui ont grandement chuté pour arriver à 0% de maïs ensilage

dans la SFP et 677kg/UGB/an. Les fermes 3 et 9 ont également augmenté leur productivité autonome

au cours du suivi alors que les niveaux de départ étaient parmi les plus importants. Ces hausses

représentent +36% de l’année en conventionnel à l’année en Bio2 pour la ferme 9 et + 33% de

conventionnel à Bio1 pour la 3. Une ferme, au profil de vulnérabilité différent, semble s’approcher

des pratiques de la 3 et la 9, il s’agit de la 2. Ce système a vu sa surface en maïs ensilage dans la SFP

passer de 41% en conventionnel, à 50% en C1 puis 10% en Bio2. La quantité de concentrés après

avoir augmenté en C1 (472kg/UGB/an) et C2 (541kg/UGB/an) a chuté à une très faible valeur en Bio2

(10kg/UGB/an). La ferme 2 se différencie de la 3 et la 9 principalement sur son utilisation des

concentrés et l’évolution de la part de PT dans la SFP. Bien que la part de maïs ensilage dans

l’assolement était importante en conventionnel, les quantités de concentrés étaient faibles

comparativement aux deux autres fermes. Les niveaux de productivité des laitières, comme la part

de PT, varient fortement durant la période de suivi (augmentation entre C1 et C2 de la part de PT

accompagné d’une chute de la part de maïs et de la productivité des laitières et d’une augmentation

de concentrés). Les quantités de concentrés ont suivi l’évolution du maïs dans l’assolement avec une

année de décalage et la part de PT a fortement augmenté en conversion pour finalement revenir à sa

valeur initiale en Bio2. Ce décalage entre les évolutions du concentré, du maïs et de la PT est

responsable d’une productivité autonome finalement assez constante (proche de 3500l/ha) sur la

période de suivi. De plus, à la différence des fermes 3 et 9, la ferme 2 ne pratique pas

Trajectoire A

Trajectoire A

Trajectoire B

Trajectoire B

Trajectoire C Trajectoire C

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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l’affouragement en vert. L’ensemble de ces différences expliquent le positionnement de cette ferme

par rapport aux deux autres sur le Block Y.

Cette trajectoire A est en lien avec des caractéristiques de vulnérabilité limitées concernant la

productivité autonome. Les indicateurs économiques, initialement parmi les plus bas de l’échantillon

évoluent à la hausse, particulièrement pour l’EBE/UTH qui varie de 18 040€ en conventionnel à

38 807€ en Bio2. Il n’y a pas de tendance marquée sur la sensibilité aux aides permettant de mettre

en lien son évolution et les pratiques d’élevage de ces trois fermes.

Dans la zone correspondant au groupe B on retrouve les fermes 7 et 8 sur le Block Y et les fermes 4,

5, 7 et 8 sur le Block X. Ce qui semble signifier qu’avec des pratiques proches, la vulnérabilité n’est

pas la même, le cas échant, l’EBE/UTH en conventionnel n’est pas le même (33 278€ en moyenne

pour la 4 et la 5 et 56 167€ pour la 7 et 8). Cela correspond aux fermes ayant le moins diminué leur

surface en maïs ensilage car les pourcentages étaient déjà faibles en début d’étude. La ferme 4 est

passé de 13% de maïs dans la SFP à 8%, la 5 de 7% à 9%, la 7 de 7% à 8% et la 8 de 16% à 0% entre

conventionnel et deuxième année en bio. Une tendance que l’on retrouve pour le niveau d’étable

avec une production par vache qui évolue chez les individus du groupe, en moyenne de 5600 l/vl à

5030/vl. Les taux de prairie temporaire dans la SFP sont parmi les plus hauts de ceux de l’échantillon

avec une moyenne de groupe de 85% en conventionnel et de 70% pour l’ensemble des individus.

C’est finalement la gestion du concentré et le nombre d’UTH qui différencient les fermes 4 et 5 et les

fermes 7 et 8. En Bio2, en moyenne les fermes 4 et 5 distribuent 512kg de concentrés par UGB et par

an alors que les fermes 7 et 8 en distribuent 40kg. De plus, les fermes 7 et 8 embauchent du

personnel salarié en Bio2 ce qui provoque une importante chute de l’EBE/UTH la dernière année. Il

semble que ces deux facteurs soient responsables des différences de positionnement de ces deux

lots d’individus sur le Block Y.

Cette trajectoire B est en lien avec une situation économique en conventionnel robuste. Cependant,

la gestion de la distribution du concentré et l’embauche durant la période étudiée sont déterminants

et peuvent déstabiliser les fermes, les rendant plus vulnérables économiquement. Notons toutefois

qu’il est très probable que les fermes de ce groupe soient passées en AB afin de conforter leurs

résultats économiques et de faciliter l’embauche. Ce ne serait pas l’unique critère mais possiblement

l’un des principaux. Il n’y a pas de tendance particulière dégagée sur la sensibilité aux aides en lien

avec les pratiques d’élevage de cette trajectoire. Ces fermes sont cependant celles ayant la plus

faible productivité autonome en début de suivi et celles qui la font le moins progresser.

La troisième zone, celle de la trajectoire C, regroupe les fermes 13 et 14 sur le Block X et 13, 14 et 15

sur le Block Y. Ce qui semble cette fois-ci signifier que des pratiques différentes peuvent mener à des

niveaux de vulnérabilité semblables. Dans ce cas, l’amélioration conjointe des deux indicateurs

économiques : l’efficacité et l’EBE/UTH. En effet l’EBE/UTH s’est amélioré de 113% variant de

30 370€ à 64 588€ par UTH et l’efficacité économique s’est améliorée de 358% variant de 1.2 à 5.5 en

moyenne sur les 3 fermes. Au niveau des pratiques, le concentré distribué a diminué de

860kg/UGB/an à 244kg/UGB/an en moyenne. La part de maïs a diminué de 91% (de 27% de la SFP en

conventionnel à 2% en Bio2) et la part de PT a augmenté de 41% (de 65% de la SFP à 91%). Ce qui

différencie les fermes 13 et 14 de la 15, c’est l’évolution de la surface pâturée et la dimension du

cheptel. Restée quasiment inchangée pour la 15, la surface pâturée a plus que doublée entre C2 et

Bio1 pour les fermes 13 et 14. Le troupeau est constitué de près de 80 vaches laitières chez les

fermes 13 et 14 alors qu’il est de 55 chez la 15.

A la différence des trajectoires A et B principalement définies à partir de caractéristiques initiales de

leur pratiques d’élevage, la trajectoire C est définie sur des caractéristiques d’évolution. Ce sont

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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majoritairement des informations sur les tendances que l’on retrouve dans la zone correspondant à

ce groupe d’individus. Les pratiques engagées par la trajectoire C ont peu d’influence sur la

productivité autonome mais influent fortement les performances économiques avec une

amélioration de son efficacité et de l’EBE/UTH. Il n’y a pas de tendance spécifique de la sensibilité

aux aides en lien avec cette trajectoire.

Deux fermes s’isolent des trois trajectoires présentées. La première, la 12, correspond certainement à un parcellaire fortement contraint et peu accessible aux vaches laitières. En effet les parts de PT et de maïs dans la SFP sont restées stable. L’affouragement en vert a été mis en place dès la deuxième année de conversion. Ces pratiques sont en lien avec une réduction de 31% de la quantité de concentrés distribués aux laitières. La productivité autonome de cet individu est resté inchangée, son efficacité économique a augmenté jusqu’en Bio1 pour finalement rechuter à une valeur initiale en Bio2. L’EBE/UTH a augmenté de 64% sans modification du nombre d’UTH et la sensibilité aux aides, après un pic en C1, est de même valeur en conventionnel et en Bio2. La seconde ferme, la 6, a employé de la main d’œuvre salariée dès la deuxième année de conversion, l’EBE/UTH en conventionnel et en AB est donc finalement très proche mais l’efficacité économique a plus que doublé.

C. Interprétation des résultats Trois trajectoires principales se sont dégagées de l’étude de la projection des indicateurs et ont été

confirmées par l’étude des individus. On remarque que la situation de départ – pré-conversion – des

fermes impacte les trajectoires de conversion et joue sur leurs vulnérabilités. Deux de ces trajectoires

sont d’ailleurs fortement caractérisées par la situation des fermes en début de période ainsi que par

l’évolution du maïs dans l’assolement. Ces trajectoires opposent ainsi les fermes orientées maïs et les

fermes orientées herbe pâturée en conventionnel. Les pratiques initiales des fermes et l’évolution du

maïs et des surfaces pâturées définissent fortement leur type et niveaux de vulnérabilité,

principalement aux niveaux des performances économiques et de productivité autonome.

Les fermes de l’échantillon reposant le plus sur le maïs, la distribution de concentrés, la

productivité des vaches laitières et un chargement élevé la première année d’étude sont

vulnérables économiquement en début de période. Cependant, l’évolution vers l’herbe, via une

importante réduction du maïs dans l’assolement, s’accompagne de tendances à l’amélioration de

l’EBE par UTH. La conversion à l’AB est donc un levier de réduction de leur vulnérabilité

économique par les changements de pratiques qu’elle induit.

Les fermes initialement orientées herbe, déjà fortement pâturantes, ont une situation

économique de départ très robuste en comparaison avec les autres individus. Ces fermes,

initialement performantes, voient leur efficacité économique croitre mais leur EBE par UTH

diminuer en raison de l’embauche de personnel salarié. La conversion à l’AB est donc un levier de

réduction de leur vulnérabilité économique du fait d’un prix du lait davantage rémunérateur.

Cette amélioration pourrait toutefois être vaine si la part de concentrés distribués continue à

augmenter.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 31

D. Comparaison des résultats Nous avons détaillé en introduction de cette partie les trois stratégies mise en avant par le réseau

GAB-FRAB de Bretagne. Il s’agit d’une caractérisation principalement réalisée sur la contrainte

d’accessibilité au pâturage et l’alimentation des vaches laitières en fin de période (présentée au II C

de cette partie 2) alors que la caractérisation menée ici est réalisée sur des critères en lien avec la

situation initiale des fermes et leurs évolutions durant la période de suivi. Ce sont donc deux analyses

complémentaires. Il est intéressant de faire une comparaison des groupes réalisés par ces deux

analyses.

Tableau 6: Tableau comparatif des classifications du réseau GAB-FRAB et de l'étude actuelle

Classification du réseau GAB-FRAB

Fermes concernées Fermes concernées

Classification suite à l’étude actuelle

Stratégie maximisation du pâturage

4, 6, 7, 8, 13, 14 et 15

13, 14 et 15 Trajectoire C : forte évolution vers l’herbe

4, 5, 7 et 8 Trajectoire B : initialement orienté herbe

Stratégie mixte : Stocks/Pâturage

1, 2 et 5

2, 3 et 9 Trajectoire A : initialement orienté maïs

Stratégie affouragement en vert

3, 9, 11 et 12

Non classées 10 12 et 6 Non classées

Non étudiées 1, 10 et 11 Non étudiées

Au vu de cette comparaison, il est intéressant de visualiser que les trajectoires C et B sont incluses

dans la stratégie maximisation du pâturage. Ce qui signifie que des fermes aux caractéristiques

initiales éloignées peuvent se rejoindre en une période limitée de 5 ans puisque la classification du

réseau se base sur les valeurs des indicateurs en fin de période. Au cours de cette étude nous nous

sommes finalement peu intéressés à l’accessibilité au pâturage mais à l’indicateur d’évolution de la

surface pâturée. Il est donc possible d’isoler les fermes ayant mis en place d’importantes surfaces

dédiées au pâturage durant le suivi (trajectoire C) mais nous n’avons pas intégré dans l’analyse les

indicateurs révélant les raisons qui peuvent expliquer la faible mise en place de parcelles dédiées à la

pâture (trajectoire A). Il se trouve que, en étudiant conjointement les deux classifications du Tableau

6, les fermes caractérisées par de faibles surfaces dédiées à la pâture sont également les fermes

inscrites dans la stratégie de l’affouragement en vert. En effet ces fermes n’ont que peu de surface

accessible en comparaison avec l’échantillon total. Ces fermes, fortement orientées vers le maïs en

Une troisième et dernière trajectoire se caractérise majoritairement par les adaptations des

pratiques mises en place au fil de la conversion. Il s’agit d’un groupe de transition entre le premier

et le second. Ce sont les fermes qui ont engagé les modifications de pratiques les plus

importantes de l’échantillon total. L’importante orientation vers l’herbe pâturée s’est

accompagnée d’importantes améliorations économiques. Dans ce cas aussi, la conversion à l’AB

est donc un levier de réduction de leur vulnérabilité économique par les changements de

pratiques qu’elle induit.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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début de période, correspondent à celles qui ont conservé une stratégie de stocks (d’herbe ou de

maïs ensilage) et développé l’affouragement en vert. Ces fermes les plus contraintes

économiquement, au vu de la vulnérabilité économique de départ des fermes de la trajectoire A,

seraient donc les fermes ayant de faibles possibilités d’accès au pâturage. Il existe visiblement un lien

fort entre accessibilité au pâturage et vulnérabilité économique.

L’utilisation de la méthode statistique définie par Martin et al., 2017 a permis de compléter l’étude

menée par le réseau GAB-FRAB de Bretagne en intégrant le lien entre de nombreux indicateurs de

pratiques d’élevage et de contexte et la vulnérabilité des fermes. Cette méthode a également permis

de prendre en compte de nouveaux éléments tels que la tendance et le niveau de départ des

indicateurs, ce qui valorise l’analyse de ce suivi sur 5 ans. Les deux classifications réalisées, la

première par l’expertise des conseillers et techniciens d’élevage du réseau et la deuxième par la

robustesse de l’analyse statistique, sont finalement très complémentaires pour faciliter

l’accompagnement des futurs éleveurs en conversion à l’AB en élevage laitier.

VI. Conclusions et discussions Sur l’ensemble des individus, on retrouve des tendances communes. En Bio2 la part de surface en

maïs ensilage par rapport à la SFP est de 6.7% (SD=6.2), et la part de PT est de 83,4% (SD = 14,3 en

raison des fermes 2 et 3 qui sont respectivement à 59.2% et 54.4%). La conversion à l’AB a tendance

à réduire les différences inter-fermes en ce qui concerne leur assolement. Cependant, il reste

d’importants écarts sur les quantités de concentrés distribués et sur la production des vaches

laitières avec une moyenne en Bio 2 de 332kg/UGB/an (SD=285kg/UGB/an) et de 5444l/vl

(SD=852l/vl).

Les situations initiales, sont très variables. Elles contribuent fortement à définir la vulnérabilité des

fermes en conversion. Les fermes orientées vers des systèmes maïs seront économiquement

vulnérables en début de conversion alors que les fermes orientées vers des systèmes herbagers

seront moins productivement autonomes au départ. La réduction de vulnérabilité la plus importante

a lieu pour les fermes reposant fortement sur le maïs en conventionnel et qui mettent en place

d’importantes surfaces destinées au pâturage au fil de la conversion à l’AB, bien que leur productivité

autonome chute durant le suivi. Il est cependant nécessaire d’apporter une précision concernant

l’indicateur de performance de la productivité autonome.

La réalisation de cet indicateur prend on compte le ratio entre ce qui est produit sur la ferme et ce

qui est consommé sur la ferme. Le calcul est réalisé à partir des poids de fourrages et de concentrés

produits et consommés. Le même indicateur de productivité autonome construit sur la base d’un

ratio surface apporterait certainement des valeurs très différentes. En effet, convertir les quantités

de fourrages et de concentrés en surface via des indicateurs de rendements pertinents serait

certainement un meilleur indicateur de la quantité de lait produite en autonomie sur la ferme. Il est

en effet fort probable que l’indicateur utilisé dans l’étude soit biaisé par les rendements du maïs bien

supérieurs à ceux de l’herbe, déséquilibrant ainsi le ratio d’autonomie. Cela explique pourquoi une

ferme s’orientant vers l’herbe diminue en productivité autonome. La quantité totale produite chute

car l’herbe offre des rendements à l’hectare moins importants que le maïs. Le ratio aliments produits

sur aliments consommés chute et avec lui la productivité autonome diminue. Pour citer Guillaume

Michel, animateur technique en polyculture-élevage au GAB 22, « 1kg de matière sèche de maïs

ensilage dans la ration c’est 175g de soja ». C’est en tenant compte de cette idée de déséquilibre

entre concentrés et fourrages qu’il faudrait améliorer l’indicateur de productivité autonome. Une

modification possible serait de remplacer les quantités de fourrages et de concentrés produites et

consommées par leurs coûts respectifs, pour calculer l’autonomie alimentaire sous l’angle

économique et corriger ainsi la productivité laitière. C’est la méthode utilisée par le réseau Chambre

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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d’agriculture et l’Institut de l’élevage afin d’améliorer la pertinence de la productivité autonome et

de s’affranchir des écarts de poids et de rendements.

Une seconde limite se situe sur l’indicateur de performance EBE par UTH. En effet cet indicateur

considère la main d’œuvre familiale et salariale. Hors, certaines fermes (les fermes 2, 5, 6, 7, 8 et 11)

embauchent de la main d’œuvre salariale et cela parfois dès la première année en bio ce qui fait

fortement chuter leur indicateur de performance. C’est pourquoi deux indicateurs économiques sont

conservés pour l’étude. De plus, l’efficacité économique permet de conserver un indicateur du

fonctionnement économique de la production seule, c’est-à-dire du fonctionnement opérationnel de

l’atelier lait, alors que l’EBE/UTH renseigne sur la création de richesses permise par le

fonctionnement de la ferme en tenant compte de nombreuses charges supplémentaires (notamment

les impôts, taxes, fermage et charges de main d’œuvre). Ces deux indicateurs économiques sont

donc complémentaires pour éclairer l’accompagnement des éleveurs en conversion à l’AB.

Au-delà des situations initiales, les tendances et stratégies développées ont également de forts

impacts sur la vulnérabilité lors de la conversion. La situation économique des fermes initialement

orientées en système maïs peut être grandement améliorée via une orientation vers l’herbe.

Cependant, il ressort de l’étude qu’il doit s’agir de systèmes pâturant et non uniquement basés sur

l’herbe stockée ou affouragée.

Plusieurs pratiques d’élevage semblent être en lien avec une forte vulnérabilité économique lors de

la conversion. Parmi ces pratiques on note la quantité de concentrés distribués aux laitières, la faible

part de prairie temporaire par rapport à la SAU (souvent en lien avec un parcellaire éclaté et des

pratiques d’affouragement), la faible diminution de la part de maïs ensilage et des objectifs de

productivité par vache importants.

Une situation économique stable et robuste en début de conversion réduit également fortement la

vulnérabilité lors de la transition. Nous pouvons être amenés à nous questionner sur les conversions

à l’agriculture biologique engagées par des fermes fortement contraintes par leur parcellaire –

notamment des parcellaires très éclatés et éloignés du corps de ferme principal – et les fermes en

situation économique difficile en conventionnel.

Au final, peu d’interprétations ont pu être faites sur la sensibilité aux aides dont les variations sont

majoritairement dues aux variations des valeurs d’EBE.

Pour finir, il est très important de tenir compte du faible nombre d’individus considérés dans cette

étude – 12 fermes étudiées sur un total de 78 conversions en 2009 en Bretagne - lors de la lecture

des interprétations. Ces dernières sont cependant confortées par l’expertise acquise au fil des

années par le réseau GAB-FRAB de Bretagne.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Partie 3 : Analyse des trajectoires actuelles de conversion à

l’Agriculture Biologique

I. Présentation du contexte de conversion de 2016 La fin des quotas laitiers, datant du 1er avril 2015, a été suivie d’une augmentation de la production

laitière en Europe de +2% (France Info, 2016). Le prix du lait a alors baissé sous l’effet de la fin de ces

quotas, mais aussi suite à l’embargo russe qui a privé l’Europe d’une partie de ses débouchés pour

les fromages et la réduction de l’importation de poudre de lait en Chine (De la Robertie et al., 2016).

Au final, avec plus de production mais moins de demande, le prix du lait conventionnel a chuté d’une

trentaine d’euros la tonne en France fin 2015, soit 10% de moins en un an pour les éleveurs français.

Dans le même temps la demande en lait bio est en croissance sur les marchés intérieurs et

extérieurs. La collecte de lait bio progresse de 7.3 % en janvier 2016 par rapport à janvier 2015

malgré des conditions climatiques défavorables, notamment un hiver 2015-2016 très peu arrosé en

France et des températures moyennes dépassant la normale de 2.6°C (Conjoncture laitière

biologique, CNIEL, 2016).

Plus spécifiquement en Bretagne, la production bio totale continue de croitre avec 2418 fermes

certifiées Agriculture Biologique en 2016, soit une augmentation de 18.6% par rapport à 2015.

Figure 10: Evolution du développement de la production bio en Bretagne. Toutes fermes confondues, données de 2006 à 2016 sur les quatre départements bretons (Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne)

Parmi les fermes nouvellement converties on dénombre 43% de fermes en bovins lait au 31

décembre 2016. Ce qui équivaut à 188 fermes entrées en conversion en 2016 et spécialisées dans la

production de lait de vache.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 35

Figure 11: Activités dominantes des fermes bios en Bretagne au 31 décembre 2016. Répartition par type de production. Valeurs en pourcentage des nouvelles fermes bio de 2016 (Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne.).

On peut être amené à se questionner sur la vulnérabilité de ces fermes qui entrent en conversion en

2016 alors que le contexte économique et climatique a été peu favorable et a possiblement

déstabilisé ces systèmes issus de l’agriculture conventionnelle. En effet, au prix du lait conventionnel

s’ajoute un déficit de 50 % de pluviométrie en moyenne sur la France du 1er juillet au 31 août

(Conjoncture laitière biologique, CNIEL, 2016.). La pluviométrie cumulée de ces deux mois est la plus

faible enregistrée sur la période 1959-2016. De plus, il a été perçu par les structures

d’accompagnement de l’agriculture durable (CIVAM, CETA, GAB) que ces fermes en conversion sont

globalement plus éloignées de ces structures et des réseaux de producteurs d’une manière générale,

ce qui les rend plus isolées (Réseau GAB-FRAB de Bretagne, 2017a).

II. Travaux engagés par le réseau en partenariat avec AgroCampus Ouest La FRAB a engagé en décembre 2016 / janvier 2017 un travail de caractérisation de ces nouvelles

fermes entrées en conversion en 2016. Une enquête a été réalisée. Son questionnaire a été transmis

à l’ensemble des fermes référencées et entrées en conversion en 2016 sur la région Bretagne. Des

relances téléphoniques ont ensuite été effectuées en collaboration avec un groupe de cinq

étudiantes de l’institut national supérieur des sciences agronomiques : AgroCampus Ouest, dans le

cadre d’un projet tutoré intitulé : « Caractérisation des nouvelles fermes laitières biologiques

bretonnes » (Caractérisation de nouvelles fermes laitières biologiques bretonnes, 2016).

L’objectif était, principalement, d’étudier les résultats obtenus sur les caractéristiques des nouvelles

fermes converties, de collecter des références sur les objectifs de leur futur système en AB et de

comparer ces données aux références régionales afin d’identifier les différences et les tendances

apportées par ces nouvelles fermes bio. Les objectifs secondaires concernaient l’obtention de

références actualisées, y compris sur les causes de la conversion, mais aussi l’estimation des volumes

supplémentaires produits et le détail des laiteries concernées par la collecte de ce surplus de lait bio.

Les relances téléphoniques ont permis d’avoir les résultats de 96 fermes sur les 175 nouvelles fermes

identifiées par la FRAB, soit un taux de réponse de 55%. L’enquête portait sur 5 volets :

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 36

Les informations générales de la ferme : nombre d’UTH, âges de la main d’œuvre, date et

type de conversion

L’assolement avant et après conversion : dont la surface accessible

Le cheptel avant et après conversion

Les niveaux de production et débouchés avant et après conversion

Les données socio-économiques : avec l’EBE de l’année avant conversion, l’estimation du

niveau de revenu, la satisfaction exprimée en lien avec ce revenu et les motivations à la

conversion

Les données après conversion sont relatives aux objectifs que se fixent les éleveurs pour leur

système en bio.

III. Résultats des travaux de caractérisation des nouvelles fermes laitières Les données obtenues suites aux enquêtes ont fait l’objet d’une étude de comparaison avec les

références régionales. Les principaux écarts que l’on trouve entre la référence et les nouveaux

convertis concernent les objectifs de productivité en bio. Il s’agit bien d’objectifs puisque cela

correspond aux résultats que les éleveurs enquêtés pensent et veulent obtenir une fois leur

production certifiée AB.

Les résultats sont présentés sur le Tableau 7.

Tableau 7: Comparaison des nouveaux éleveurs laitier bio 2016 aux références régionales bio bretonnes (Caractérisation des nouvelles fermes laitières biologiques bretonnes, 2016; Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne).

On remarque qu’il y a un écart de production de près de 100 000 litres par an entre la référence et

les nouveaux convertis. Il faut cependant tenir compte de la diversité que cache la moyenne de

345 555 litres par an exprimée par les nouveaux éleveurs bio, l’écart type étant de 143 158 litres par

an. On retrouve cet objectif ambitieux sur la production par hectares de SFP qui augmente de près de

500 litres par hectare entre la référence du département Ille-et-Vilaine et les nouveaux éleveurs bio.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 37

Cet écart est lié au fait que les nouveaux convertis pensent conserver plus de maïs dans la SFP que la

référence. Bien que la SAU soit comparable, le nombre de laitières moyen par ferme est plus

important.

La tendance de cette évolution est proche de celle des conversions de 2009. En effet, L’importante

vague de conversion des éleveurs laitiers bios bretons est en lien avec une crise de rentabilité de

l’élevage laitier (lié au prix des intrants en 2009, à celui du lait conventionnel en 2016) du prix du lait

conventionnel et concerne des fermes dont la taille moyenne et les objectifs de productivité

(notamment par vache et par hectare de SFP mais aussi en production laitière totale annuelle) sont

plus importants que la référence.

IV. Définition des objectifs de travail Sur la base des travaux menés par la FRAB, il a été décidé d’utiliser la base de données issue de la

collecte d’informations sur les nouveaux convertis à l’agriculture biologique en 2016 pour répondre à

des questionnements qui subsistent à l’issue de l’étude des conversions de 2009. Nous avons

effectivement conclu dans la partie de ce rapport consacrée à l’étude des conversions réalisées en

2009 que la vulnérabilité économique peut être fortement réduite par une orientation des fermes

vers des systèmes pâturants. Nous avons également mis en avant que les fermes en situation

économique robuste en agriculture conventionnelle seront moins vulnérables économiquement lors

de la conversion. A contrario, les systèmes contraints par des problèmes d’accès au pâturage ou

commençant leur conversion avec une situation économique difficile ressortaient comme étant les

plus vulnérables.

L’objectif de cette seconde étude est d’approfondir l’analyse du fonctionnement des systèmes passés

en bio en 2016 et étant contraints en terme d’accessibilité au pâturage et marqués par une situation

économique difficile avant la conversion.

V. Méthodologie employée

A. Méthode d’échantillonnage L’échantillon d’étude constitué pour l’analyse des conversions de 2016 de fermes présentant des

défis techniques et économiques à relever a été réalisé en tenant compte de plusieurs critères : (i) la

volonté de constituer un échantillon représentatif de la région Bretagne avec une répartition entre

ses 4 départements et de manière à ce que les différents contextes pédoclimatique bretons soient

représentés ; (ii) la nécessité d’être dans un cas de figure de contrainte économique et/ou de

contrainte parcellaire ; (iii) la disponibilité de ces fermes pour un entretien d’une durée

approximative de deux heures ; (iv) la validation de la sélection par les techniciens du réseau GAB-

FRAB de Bretagne de chaque département ; (v) la possibilité de s’entretenir avec tous les éleveurs de

l’échantillon sur une période réduite à deux mois (juin-juillet 2017) de présence en Bretagne.

La sélection des fermes répondant aux deux premiers critères a été réalisée à partir de la base de

données issue des enquêtes des 96 fermes. Ayant des informations sur le parcellaire accessible –

c’est-à-dire le nombre d’hectares proches du corps principal de ferme et étant potentiellement

pâturable par le troupeau laitier dans la limite des rotations culturales effectuées – une première

sélection des fermes a été réalisée. Les fermes sélectionnées sont celles possédant une surface

accessible de moins de 30 ares par vaches laitières avant conversion. Cette limite a été fixée à l’aide

des techniciens de la Commission Elevage et des agriculteurs du réseau GAB-FRAB de Bretagne. Cette

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 38

valeur tient compte des rendements et de la pousse de l’herbe en Bretagne et représente le

minimum de surface accessible par vache à posséder pour un système orienté vers une maximisation

du pâturage.

Suite à cette sélection, et en complément, ont été ajoutés à l’échantillon d’étude des éleveurs s’étant

déclarés, au cours de l’enquête menée par la FRAB et les étudiantes d’AgroCampus Ouest,

insatisfaits, voire très insatisfaits, de leur revenu en conventionnel. Il a finalement été décidé de

porter l’échantillon à 15 fermes de manière à être en capacité de s’entretenir avec tous les éleveurs,

sur la période dédiée à ce travail. Au final, ce sont 14 éleveurs qui m’ont reçu sur leur ferme et qui

ont accepté de partager leurs informations. Parmi ces 14 éleveurs, 8 étaient en situation de

contrainte d’accessibilité au pâturage en conventionnel et 11 étaient en situation économique

difficile en conventionnel (5 éleveurs combinent les deux contraintes). Sachant que sur l’échantillon

total des 96 fermes, 13 éleveurs avaient moins de 30 ares accessibles par vache laitière, 29

considéraient leur situation économique « moyennement satisfaisante » en conventionnel, 15 la

considéraient « insatisfaisante » et 9 « très insatisfaisante ». Ainsi, 25% des éleveurs répertoriés par

l’enquête FRAB/ACO étaient insatisfaits de leur situation économique en conventionnel et 13,5%

étaient en situation de contrainte parcellaire en conventionnel.

B. Réalisation du guide d’entretien Un guide d’entretien a été réalisé en se basant sur le guide d’entretien utilisé pour la collecte

d’informations des fermes en conversion en 2009 suivies par le réseau GAB-FRAB, sur le

questionnaire utilisé par la FRAB et les étudiantes d’AgroCampus Ouest pour l’étude de

Caractérisation des nouvelles fermes laitières biologiques bretonnes et sur le guide d’entretien utilisé

par Maëlys Bouttes dans le cadre de son suivi de thèse de 3 ans des fermes en conversion en

Aveyron.

Une fois la première version achevée, le guide d’entretien a été testé avec un premier éleveur des

Côtes d’Armor. Suite à ce premier entretien, le guide a été définitivement validé et est resté

inchangé au cours des treize entretiens suivants. Le guide3 est constitué :

1) D’une partie de caractérisation générale de la ferme. Soit son nom, son statut juridique, sa

localisation, le type de conversion et le détail de la main d’œuvre

2) D’une partie assolement subdivisée en trois catégorie : l’assolement en place la dernière

année en conventionnel, l’assolement en place au moment de l’entretien – c’est-à-dire en

deuxième année de conversion -, et l’assolement objectif pour le système en agriculture

biologique.

3) D’une partie sur le cheptel et son évolution sur les trois périodes considérées : nombre

d’UGB par catégories, conduites de reproduction, races et autres animaux présents

4) D’une partie alimentation tenant compte également des trois périodes (situation en

conventionnel, situation actuelle et objectif vous les années à venir), elles-mêmes divisées en

période hivernale et période printemps-été.

5) D’une partie achats et débouchés : quantités alimentaires achetées sur les trois périodes,

niveau de production, laiterie concernée et relation avec cette laiterie

3 Le guide est réalisé pour des éleveurs en conversion. Ces éleveurs ne sont donc pas en bio et les informations qu’ils

donnent pour leur système prochainement en AB sont des projectifs et des objectifs qui peuvent varier durant la conversion elle-même. Trois périodes sont étudiées : Avant la conversion, Pendant la conversion (période en cours) et Après la conversion (Projection).

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 39

6) D’une partie accessibilité au pâturage et son évolution en détaillant les stratégies employées

7) D’une partie organisation et satisfaction du travail sur les trois périodes : robotisation,

nombre de traites, transformation à la ferme. Les stratégies envisagées et en cours pour

améliorer la satisfaction du travail sont détaillées dans cette partie

8) D’une partie sur les données socio-économiques : résultats économiques, lien au conseil en

agricultures, structures de conseil concernées, type de conseil apporté et attentes par

rapport au conseil

9) D’une partie sur les doutes et motivations à la conversion de la ferme à l’agriculture

biologique

10) D’une partie conclusion libre afin que les éleveurs puissent apporter des compléments. Si

aucun complément n’est nécessaire, ils sont encouragés à formuler un conseil qu’ils

aimeraient donner aux autres éleveurs qui pense s’engager dans l’agriculture biologique.

Une telle organisation du questionnaire avait pour but d’instaurer une relation d’échange

d’informations durant les premières parties de manière à faciliter les réponses aux dernières parties

souvent plus sensibles. De plus, les premières parties étaient généralement rapidement évoquées

puisque de nombreuses informations étaient disponibles via l’Observatoire de la production

biologique en Bretagne (FRAB). Les premières parties du questionnaire étaient donc pré-remplies au

moment de l’entretien et vérifiées avec l’éleveur questionné.

C. Méthode d’analyse des données L’analyse des conversions de 2009 permet d’établir des relations entre des trajectoires techniques et

des évolutions de performance. C’est à partir des conclusions issues de cette étude que l’on aborde

l’analyse des projets de trajectoire des éleveurs actuellement en conversion. L’analyse statistique

utilisée dans la partie précédente n’est donc pas réutilisée dans cette partie. Mis à part les biais

qu’engendrerait une telle analyse sur des données de suivi de 3 ans – les informations recueillies

concernent la situation en conventionnel, la situation actuelle et la situation à venir –, établir de

telles relations entre trajectoires et performances sur des projets de conversion n’aurait que peu de

sens dans la mesure où l’on n’est pas en capacité de vérifier leur faisabilité (les objectifs ne sont que

des projections). De plus, il était intéressant d’intégrer des données qualitatives, notamment sur les

doutes et les motivations à la conversion, à l’interprétation des trajectoires.

La typologie a été constituée par expertise selon les deux types de contraintes étudiées : faibles

possibilités de pâturage et difficultés économiques avant conversion. Un rapprochement par type de

trajectoires selon la contrainte initiale a ensuite permis de constituer des groupes d’élevage ayant

emprunté des stratégies de conversion semblables au plan technique ou économique, de dégager

des tendances communes et de les analyser.

VI. Résultats et Interprétation

A. Résultats généraux et stratégies d’évolution des effectifs des troupeaux Parmi l’ensemble des résultats des entretiens, une partie des informations a été exportée sous forme

de tableau. Le Tableau 8 permet ainsi d’avoir une vue d’ensemble des caractéristiques des fermes de

l’échantillon bien qu’il ne répertorie qu’une faible portion des informations récoltées. On y retrouve

l’ensemble des 14 fermes reparties sur les quatre départements bretons et quelques tendances

d’évolution avec notamment les situations des fermes en conventionnel et les objectifs que se fixent

les éleveurs pour le système en bio. Ce tableau présente ainsi les trajectoires d’évolutions

empruntées par les éleveurs, la situation finale de la ferme n’étant pas encore atteinte.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Tableau 8: Tendances d'évolution des fermes enquêtées. Les fermes sont numérotées de 1 à 14 selon l'ordre dans lequel se sont déroulés les entretiens. Les contraintes sont précisées : « Accessibilité » étant l’accessibilité au pâturage et « Economique » étant la situation économique en conventionnel.

Identifiant ferme

Département

Contrainte étudiée

Evolution du troupeau (effectif en conventionnel – en bio) race sélectionnée

Evolution du maïs fourrage (surfaces en

conventionnel – en bio)

Surface accessible (ares

par vaches laitières en conventionnel – en bio)

Evolution de la production Collecteur client du lait

bio

Satisfaction du revenu en

conventionnel

1 22 Accessibilité 65 UGB → 65 UGB Vers race croisée

18 ha ↘ 10ha 29 ares/vl → 29 7500l/vl ↘ 6700 500 000l vendu ↘ 400 000l

Biolait Satisfait

2 22 Accessibilité et économie

75 UGB ↘70 UGB Vers race croisée

24ha ↘ 0ha 24 ares/vl ↗ 43 7500l/vl ↘ 4200 520 000l vendu ↘275 000l

Biolait Très Insatisfait

3 35 Accessibilité et économie

140 UGB → 140 UGB Vers Brune des Alpes

21ha ↘ 14ha 22 ares/vl ↗ 24 5000l/vl → 5000 600 000l vendu ↗ 700 000l

Biolait Très Insatisfait

4 35 Economie 30 UGB ↗ 37 UGB Vers race croisée

7ha ↘ 3.5ha 100 ares/vl ↘ 86 7500l/vl ↘ 6000 200 000l vendu → 200 000l

Biolait Très Insatisfait

5 35 Economie 55 UGB ↗ 65 UGB Vers Montbéliarde

22ha ↘ 7ha 43 ares/vl ↗49 6800l/vl ↘ 6500 340 000l vendu ↗400 000l

Lactalis Insatisfait

6 35 Economie 82 UGB ↗ 90 UGB Vers race croisée

25.5ha ↘ 9ha 53 ares/vl →52 7000l/vl ↘ 5500 560 000l vendu ↘440 000l

Biolait Très Insatisfait

7 35 Economie 60 UGB ↗ 73 UGB Vers race croisée

22ha ↘ 5ha 52 ares/vl →53 7800l/vl ↘ 7000 430 000l vendu ↗ 500 000l

Eurial Insatisfait

8 56 Accessibilité 100 UGB ↗ 115 UGB Vers Montbéliarde

35ha ↘ 14ha 33 ares/vl →34 8500l/vl ↘ 6000 800 000l vendu ↘650 000l

Biolait Satisfait

9 35 Accessibilité et économie

40 UGB ↗ 50 UGB Vers race croisée

12ha ↘ 4ha 20 ares/vl ↘16 8000l/vl ↘ 6500 290 000l vendu → ?l

Lactalis Insatisfait

10 56 Accessibilité et économie

45 UGB ↗ 50 UGB Vers race croisée, Normande

15ha ↘ 10ha 24 ares/vl ↗40 6000l/vl → 6000 250 000l vendu → 250 000l

Sodiaal Insatisfait

11 56 Accessibilité et économie

100 UGB ↘ 80 UGB Vers race croisée

30ha ↘ 16ha 27 ares/vl ↗ 34 8500l/vl ↘ 6000 720 000l vendu ↘ 550 000l

Clal St Yvi Insatisfait

12 29 Economie 65 UGB ↗ 90 UGB Inchangé : Prim’Holstein

14ha ↗ 20ha 42 ares/vl ↘ 30 8000l/vl → 8000 470 000l vendu ↗630 000l

Sill le Gall Très Insatisfait

13 22 Accessibilité 55 UGB ↗ 80 UGB Vers race Jersiaise

0ha ↗ 10ha 24 ares/vl ↘ 17 8000l/vl ↘6000 430 000l vendu ↘400 000l

Sodiaal Moyen

14 29 Economie 75 UGB ↗ 80 UGB Inchangé : Prim’Holstein

20ha ↘ 11ha 85 ares/vl ↘ 80 8000l/vl ↘ 6800 550 000l vendu ↘ 490 000l

Clal St Yvi Insatisfait

Moyennes et écarts type de l’échantillon

70,5UGB↗77,5UGB (SD : 27,5 et 25,6 UGB)

19ha ↘ 9,5ha (SD : 8,7 et 5,2 ha)

41,3ares/vl →41,9 (SD : 23,5 et 20,2 ares/vl)

7435l/vl ↘ 6157 (SD : 936 et 877 l/vl)

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 41

De nombreux résultats n’apparaissent pas dans ce tableau. Il a été décidé en comité de pilotage des

travaux de cette étude de conversion que l’analyse de ces retours d’entretien ferrait l’objet d’autres

études complémentaires à celle qui est présentée dans ce rapport. Le travail décrit ici se focalise sur

les trajectoires globales qui se dégagent lors du regroupement de tendances d’évolutions identiques.

Parmi les résultats communs à l’ensemble des fermes, aucune ferme ne fonctionne avec un robot de

traite et un seul éleveur – celui de la ferme 12 – pense en mettre un en place en bio. Ensuite aucune

ferme ne pratique la transformation à la ferme ou ne compte mettre en place un tel projet en bio. On

retrouve globalement sur l’ensemble de l’échantillon une spécialisation en production laitière avec

une diminution – voire une disparition pour 11 fermes – des surfaces en céréales de vente (de 17ha

en moyenne à 2,5ha en moyenne) et malgré une chute de la productivité par vache de 7435l/vl/an

en conventionnel à 6157l/vl/an comme objectif en bio, objectif toujours éloigné de la référence qui

est de 5360l/vl/an (Observatoire de la bio, Réseau GAB-FRAB de Bretagne, chiffres d'Agrobio 35, GAB

d'Ile-et-Vilaine). Les fermes s’orientent vers des systèmes herbagers – 12 fermes sur 14 – présentent

des chutes des surfaces en maïs fourrager de 21ha en moyenne en conventionnel à 8.5ha en

moyenne soit une chute de près de 60% de la surface de ces 12 fermes consacrée au maïs fourrager.

Ces informations sont présentées en Figure 12.

Figure 12: Evolution des pourcentages d'herbe et de maïs dans la SFP et des pourcentages de SFP et de SCOP dans la SAU.

La majorité des fermes, soit 11 sur 14, sont en vêlages étalés en conventionnel. C’est-à-dire que les

vêlages ont lieu tout au long de l’année. Seule une de ces fermes a l’intention de grouper ses vêlages

sur la période hivernale/printanière de manière à synchroniser les forts besoins alimentaires du

troupeau, reflet du pic de lactation des vaches laitières, avec l’importante production d’herbe

printanière. Parmi les 3 fermes en vêlages groupés en conventionnel, une ferme est synchronisée sur

l’automne est projette de continuer sur ce fonctionnement. Une ferme est synchronisée sur

l’automne également mais décale actuellement cette période de vêlage vers le printemps pour les

raisons évoquées plus haut. Enfin, la dernière ferme fonctionne avec deux périodes de vêlages, au

printemps et en automne, afin de profiter des périodes de croissance de l’herbe et de repartir la

charge de travail due aux vêlages sur deux saisons.

71,2%

83,5% 85,7%

27,4%

12,4% 10,8%

75,5%

89,5% 90,8%

23,2%

10,1% 8,9% 0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

Conventionnel C2 Obj Bio

Evolution moyenne de l'assolement

Herbe/SFP maïs/SFP SFP/SAU SCOP/SAU

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 42

Concernant le rythme de traite, 8 fermes réalisent 2 traites par jour (matin et soir) et pensent

continuer ainsi en bio. 2 réalisent 13 traites par semaine, c’est-à-dire qu’ils ne traient plus le

dimanche soir, depuis qu’ils sont en conventionnel et pensent continuer ainsi en bio. Parmi les 4

éleveurs restant, ils pratiquent également 2 traites par jour. Cependant, l’un d’eux pense évoluer à

13 traites par semaine et les trois autres désirent fonctionner avec une seule traite par jour en bio.

Ensuite, en s’intéressant aux débouchés, on remarque que près d’une ferme sur deux a décidé de

vendre sa production au collecteur spécialisé dans le lait biologique : Biolait. Le reste, soit 8 éleveurs

sur 14, conservent leur partenariat avec les laiteries qui les collectaient en conventionnel et signent

alors un nouveau contrat dans lequel ils s’engagent à leurs fournir la production durant les deux ans

de conversion et cinq ans de plus dans une fois certifié AB.

Il y a finalement peu de tendances communes entre les 14 fermes de l’échantillon concernant les

évolutions de cheptel, de la surface accessible au pâturage et des niveaux de production.

Plusieurs stratégies, menées via des adaptations du cheptel, sont employées pour atteindre les

objectifs de productivité et le volume de lait vendu au collecteur.

Stratégie 1 : Le troupeau est stable ou diminue et la ferme s’oriente vers un système herbager

en réduisant sa surface en maïs et ses cultures de vente. C’est le cas des fermes 1, 2, 3 et 11 qui

tendent à se spécialiser en production laitière. Cette évolution tend à augmenter la surface

accessible par vache et est en lien avec une diminution du volume vendu. Hormis pour la 3 qui se fixe

comme objectif d’augmenter le volume vendu en améliorant sa gestion de la reproduction (lactation

moins longues, moins de veaux consommateurs de lait conservés).

Stratégie 2 : Les effectifs du cheptel sont augmentés afin de compenser la chute de

production par vache attendue en bio. C’est le cas des fermes 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 14. Ces fermes

sont en train de diminuer leur surface en maïs fourrage et leur surface en céréales de vente mais

mettent en place des surfaces en céréales et protéagineux qui seront récoltées en grain ou en

ensilage pour l’alimentation du troupeau laitier ou des génisses. L’augmentation du cheptel est liée

au besoin de produire une certaine quantité de lait à l’année, hormis pour l’éleveur de la ferme 9 qui

ne souhaite pas se fixer d’objectif chiffré. Cette augmentation du cheptel peut être une contrainte

importante en termes de surface accessible par vache laitière, notamment pour les fermes 8, 9 et 10

qui étaient déjà en situation de contrainte structurelle. Cependant, les éleveurs des fermes 8 et 10

ont évolué dans leur perception du pâturage en décidant d’emmener les laitières vers des parcelles

plus éloignées, augmentant ainsi la surface accessible. Cette stratégie sera détaillée plus bas.

Stratégie 3 : Les effectifs du cheptel sont en augmentation, de même que la surface en maïs

ensilage de manière à compenser la chute de productivité attendue en bio. Cette stratégie est

développée par les fermes 12 et 13, quitte à réduire de manière importante la surface accessible par

vache laitière. L’ambition de ces éleveurs est de stabiliser la production totale, voire de l’augmenter

pour la 12.

Toutes les fermes non concernées par la contrainte parcellaire mettent en place des stratégies

d’augmentation du cheptel laitier (fermes 4, 5, 6, 7, 12 et 14). On les retrouve dans les stratégies 2 et

3. Il semble donc que, lorsque les éleveurs ont suffisamment de surface accessible, ils mettent

systématiquement en place des augmentations des effectifs du troupeau.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 43

Pour la suite de l’interprétation, une analyse par groupes de contraintes et de trajectoire a été

réalisée de manière à rassembler les cas semblables et étudier leurs tendances.

B. Résultats par groupe de contrainte Une première analyse de trajectoire est réalisée en départageant les fermes selon les deux groupes

de contraintes étudiés. A titre d’exemple sont présentées deux fermes aux caractéristiques

contrastées et représentatives de la diversité de l’échantillon étudiée

Tableau 9: Chiffres clés de deux fermes exemples. Les évolutions sont chiffrées en conventionnel et selon les objectifs donnés par les éleveurs pour leur système en bio. L’alimentation n’est détaillée que pour l’objectif en bio, l’herbe stockées

correspond au foin, à l’ensilage et à l’enrubannage d’herbe. La surface accessible par vache laitière une calculée en bio et en conventionnel selon les indications données sur le troupeau et le parcellaire.

Ferme 4 Ferme 13 Parcellaire et troupeau

PT : 18ha ↗ 31ha Maïs f : 7ha ↘ 3.5ha

Nbre de VL : 30 ↗ 37

PT : 52ha ↗ 72ha Maïs f : 0 ↗ 10ha

Nbre de VL : 55 ↗ 80

Evolution de l’alimentation

Système s’orientant vers de l’herbe pâturée (objectif jusqu’à 13kgMS/vl/j au printemps) et herbe stockée. 4kgMS/j de maïs fourrage sont distribué par VL en hiver et complétés par 13kg/MS/j d’herbe stockée.

Système s’orientant vers l’affouragement en vert (objectif jusqu’à 11kgMS/vl/j au printemps complété par 4kgMS de maïs f et 2kgMS d’herbe pâturée). Alimentation hivernale basée uniquement sur l’herbe stockée.

Surface accessible

En conventionnel : 100 ares/vl

En bio : 85 ares/vl

En conventionnel : 25 ares/vl

En Bio : 17 ares/vl

Relation avec la laiterie

En conventionnel : Insatisfait

En conversion : Insatisfait

En conventionnel : Satisfait

En conversion : Satisfait

Satisfaction du revenu

En conventionnel : Très insatisfait

En conversion : Insatisfait

En conventionnel : Moyen

En conversion : Satisfait

Les informations du Tableau 9 présentent deux fermes aux caractéristiques et trajectoires très

différentes. La ferme 13, concernée par la problématique d’accessibilité au pâturage augmente son

cheptel laitier ce qui accentue son manque de surface accessible par vache. A l’inverse, la ferme 4

possède un parcellaire très disponible pour le pâturage mais l’éleveur enquêté, à la différence de

celui de la ferme 13, a exprimé en entretien son insatisfaction concernant son revenu en

conventionnel et ses relations avec la laiterie responsable de sa collecte.

Contrainte d’accessibilité au pâturage en conventionnel

Les cas concernés par la problématique de l’accessibilité au pâturage représentent 8 fermes sur les

14 ciblées (les fermes 1, 2, 3, 8, 9, 10, 11 et 13). L’accessibilité au pâturage est définie par le nombre

d’hectares jugés disponibles pour le pâturage du troupeau laitier. Il s’agit donc d’un critère subjectif

laissé à la libre appréciation de l’éleveur au moment de l’entretien. L’indicateur est exprimé en ares

par vache laitière. Il a été décidé avec les techniciens du réseau GAB-FRAB qu’une ferme ayant moins

de 30 ares disponibles par vache laitière est en situation de contrainte structurelle, c’est-à-dire que

l’organisation du parcellaire complique de manière significative la gestion de la ferme. C’est donc à

ces 8 fermes ayant moins de 30 ares disponibles par vache que l’on s’intéresse ici.

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Niels BIZE Page 44

La surface accessible est donc la surface sur laquelle l’éleveur est en capacité d’amener son

troupeau.4

Une faible accessibilité au pâturage est généralement en lien avec des parcellaires éclatés, c’est-à-

dire des parcellaires constitués de plusieurs ilots de parcelles de tailles variables. Certains ilots

pouvant être éloignés de la salle de traitre de plusieurs kilomètres comme représenté sur la Figure

13.

Figure 13: Représentation simplifiée des types de parcellaire. A gauche un parcellaire groupé autour du corps de ferme central. A droite un parcellaire éclaté constitué de plusieurs ilots parfois très éloignés du corps de ferme.

Les 8 fermes en situation de contrainte structurelle sont amenées à développer des stratégies de

manière à faire face à ce défi lors de leur conversion. De manière générale, l’effectif du troupeau

laitier ne présente pas de tendance commune entre les fermes durant la période considérée, c’est-à-

dire de la dernière année en conventionnel (2015) à l’objectif que les éleveurs se fixent pour leur

première année en AB (2018) ; Une des fermes diminue actuellement son effectif de 20 vaches

laitières. Trois fermes de l’échantillon concerné l’augmentent (l’une de 100 à 115, la suivante de 40 à

50 et la dernière de 55 à 80 vaches laitières) alors que les quatre autres fermes n’ont que peu

d’évolution de l’effectif laitier (variations de moins de 5 vaches pour des troupeaux de plus de 45

vaches).

Les trois augmentations d’effectif s’accompagnent de trois stratégies différentes pour faire face à la

contrainte parcellaire. Trois stratégies également utilisées par d’autres éleveurs de cet échantillon.

La première stratégie consiste à se donner les moyens d’amener le troupeau laitier pâturer des

parcelles plus éloignées et concerne trois éleveurs sur les 8 de l’échantillon. Cela peut passer par des

investissements comme la mise en place d’aménagements pour traverser les routes tels que le

boviduc – tunnel pour bovins permettant de les faire passer sous les routes fréquentées – et la

relocalisation de salles de traites vieillissante afin de les positionner dans des zones plus propices à

un système pâturant. Ces aménagements sont généralement coûteux et demandent une période,

parfois longue, d’aménagements et de travaux. Une autre possibilité est d’allonger la distance que

4 Les rotations culturales ne sont pas prises en compte pour évaluer la surface accessible. Par exemple, si 1ha

de maïs a été semé proche du corps principal de ferme et qu’il ne sera pas destiné à la pâture lors de l’année en cours, cet hectare peut tout de même être considéré comme étant accessible au troupeau laitier.

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Niels BIZE Page 45

l’on s’autorise à parcourir avec le troupeau laitier pour l’amener aux parcelles de pâture.

Généralement, cette technique s’accompagne d’une adaptation des capacités du troupeau via un

changement de race pour faciliter la marche. Les trois fermes concernées par cette stratégie mettent

en place des changements de races et s’orientent vers des troupeaux de races croisées (type

Prim’Holstein * Normande et Prim’Holstein * Rouge Scandinave) pour deux d’entre eux. Les éleveurs

qui s’engagent dans cette pratique sont en moyenne à 28 ares accessibles par vache laitière en

conventionnel et ont pour objectif d’être à 36 ares par vache laitière une fois en bio. Ces éleveurs ont

expliqué en entretien qu’une telle stratégie leur semble être cohérente avec le projet de passer à

l’AB puisqu’elle conduit le système vers une alimentation orientée pâturage. Pâturage qui, durant la

période printemps et été, devra représenter entre 70 et 80% de l’alimentation fourragère des

laitières, une valeur qu’ils atteignent actuellement en conversion et qui variait de 67 à 88 % en

conventionnel.

La seconde stratégie, développée par trois éleveurs sur les 8 de l’échantillon, est l’affouragement en

vert. Ces fermes aux parcelles éclatées et dispersées ayant majoritairement diminué la surface en

maïs dans la SFP, ont investi dans du matériel du type autochargeuse afin d’affourager l’herbe

fraichement récoltée directement à l’auge. Deux des éleveurs pratiquant cette stratégie augmentent

leurs effectifs et diminuent ainsi leur accessibilité au pâturage de 24 ares par vaches laitières en

moyenne en conventionnel à 21 ares par vaches laitières pour l’objectif en bio sur l’ensemble des

trois fermes. Cette chute de la surface accessible est considérée comme un accroissement de la

vulnérabilité au vue des conclusions mises en avant dans la Partie 2. L’herbe affouragée sur la

période printemps et été représente, selon les fermes, de 23 à 44% de l’alimentation fourragère

visée en bio et l’herbe pâturée de 12 à 67 % (l’herbe pâturée variait de 43 à 67% en conventionnel).

La stratégie d’affouragement en vert est cependant présentée par les éleveurs comme un travail

d’astreinte supplémentaire à assurer.

La dernière stratégie évoquée en entretien avec les éleveurs est celle de l’augmentation de la

surface accessible via des échanges parcellaires. Bien évidemment, la difficulté de cette stratégie est

que l’éleveur n’a aucun pouvoir décisionnel quant à la disponibilité du parcellaire qui entoure sa

ferme. Il s’agit uniquement d’opportunités qu’ils s’empressent de saisir lorsqu’elles se présentent.

Opportunités qui n’intéressent pas uniquement les éleveurs ayant des parcellaires contraints. Les

deux éleveurs concernés par cette stratégie augmentent leur surface accessible de 23 ares par vache

laitière en conventionnel en moyenne à 33.5 ares par vache laitière en bio, à condition que les

prévisions d’échanges soient effectivement réalisées. L’herbe pâturée en période printemps et été

est valorisée et représente de 76 à 88% de l’alimentation fourragère des laitières alors qu’elle variait

de 64 à 76% en conventionnel.

De manière générale, la stratégie commune à ces fermes ayant des défis structurels à relever est de

diminuer la surface en maïs dans la SFP (hormis pour la ferme 13) et d’augmenter le pâturage dans la

mesure du possible, sinon la disponibilité d’herbe fraiche.

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Niels BIZE Page 46

Contraintes économiques en conventionnel

Les cas concernés par la problématique économique en conventionnel représentent 11 fermes sur

les 14 de l’échantillon (les fermes 2, 3, 4, 5, 6, 7, 9, 10, 11, 12 et 15). Cinq d’entre elles combinent

ainsi des difficultés économiques et des contraintes parcellaires avant de s’engager en bio. La

contrainte économique est évaluée via un questionnement aux éleveurs de la satisfaction de leur

niveau de revenu. Cinq réponses sont disponibles, créant une échelle de « Très insatisfait » à « Très

satisfait » en passant par « Insatisfait », « Moyen » et « Satisfait ». Les 11 fermes de cet échantillon

ont répondu « Très insatisfait » ou « Insatisfait » à ce questionnement, ce qui a permis de constituer

ce lot.

En première observation, 8 fermes sur les 11 concernées affirment ne pas être satisfaites de la

relation qu’elles entretiennent avec leur laiterie. Au mieux, parmi ces 8 fermes 4 sont moyennement

satisfaites alors que 2 sont très insatisfaite. Un des éleveurs n’a pas souhaité répondre à cette partie

du questionnaire. Les laiteries auxquelles les fermes de cet échantillon vendent leur lait sont variées.

On retrouve des coopératives (Laïta, Agrial, Sodiaal et Clal St Yvi) et des entreprises privées (Lactalis

et la Sill le Gall).

Une amélioration pour certains :

6 des 11 fermes concernées par la problématique économique en conventionnel m’ont affirmé que

la situation en deuxième année de conversion était déjà plus satisfaisante que l’année 2015,

concernant le revenu et la trésorerie disponible. Bien qu’il y ait des retards de paiement des aides de

2015 et 2016 de maintien et de conversion à l’Agriculture Biologique (Où en est-on sur les aides bio ?

Bio en Grand Est, 2017), les primes laiteries sont fortement mises en avant par ces 6 éleveurs – prime

d’un montant de 30€ les 1000 litres de lait vendus en conversion. Ces éleveurs ont également

Sur la seule caractéristique de l’accessibilité au pâturage, il est finalement assez aisé d’identifier

les fermes qui accentuent leur situation de vulnérabilité et celles qui sont en voie d’amélioration.

En effet sur les huit fermes concernées par la contrainte d’accessibilité au pâturage, deux seront,

d’après les prévisions faites sur leur ferme prochainement en bio, plus contraintes qu’en

conventionnel. Il s’agit des fermes 9 et 13 qui font le choix de s’orienter vers l’affouragement en

vert et d’augmenter leur troupeau laitier afin de compenser la chute de productivité par vache

(les valeurs des surfaces accessibles sont présentées en Tableau 8).

D’autres éleveurs parviennent à stabiliser leur valeur de surface accessible par vache, certain

projettent même de dépasser la valeur des 30 ares/vl fixée comme limite par le comité de

pilotage de ce travail de stage. Ainsi, les fermes 2, 8, 10 et 11 projettent d’atteindre en bio les

valeurs respectives de 43 ; 34 ; 40 et 34 ares par vache laitière via des stratégies d’augmentation

limité des effectifs du cheptel (fermes 8 et 10) ou des stabilisations et chute des effectifs (fermes

2 et 11) combinées à des augmentations de la surface accessible à l’aide d’échanges parcellaires

et d’allongement des distances menant au pâturage. Cependant, les possibilités offertes aux

éleveurs d’allonger leurs distances menant au pâturage et d’échanger ou récupérer du parcellaire

sont extrêmement aléatoires et dépendantes des systèmes, de leurs agencements et de leurs

environnements. Il apparait donc que la vulnérabilité, liée à l’impossibilité de s’orienter vers des

systèmes herbagers pâturant, et son amélioration ne dépendent pas des décisions des éleveurs

mais plutôt de leurs possibilités et opportunités. Ce sont des facteurs extérieurs à la ferme sur

lesquels les éleveurs n’ont que très peu, voire aucune emprise.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 47

évoqué, pour 4 d’entre eux, des réductions des dépenses permettant l’amélioration de la trésorerie

disponible via des diminutions d’achats d’intrants alimentaires (les concentrés alimentaires achetés

diminuent, passant de 30tMS en moyenne en conventionnel sur les 6 fermes à 2tMS pour l’objectif

en bio), phytosanitaires (arrêt des traitements phytosanitaires sur les cultures) et vétérinaires. En

effet, le cahier des charges bio interdit les produits chimiques de synthèse (Fiches réglementation

FNAB, 2014a, 2014b). Ensuite, parmi les 6 éleveurs évoquant une amélioration de la situation

économique en conversion, 5 sont en train diminuer leur surface en maïs, avec pour objectif de la

diviser par deux ou plus en bio (les surfaces en maïs fourrage variaient de 7 à 30ha en conventionnel

et devront varier de 4 à 16ha en bio, soit une diminution du pourcentage de maïs dans la SFP de 30%

en conventionnel à 10% en bio en moyenne sur les 5 fermes). Les céréales de vente disparaissent et

la surface destinée à la prairie temporaire augmente en compensation. En effet le pourcentage

d’herbe (qu’elle soit pâturée ou stockée puis distribuée) dans la ration en période printemps et été

varie de 86% en moyenne sur les 6 fermes en conventionnel à 92% en conversion et en bio. Ces

fermes s’orientent donc vers des systèmes herbagers avec des rations fourragères plus équilibrées

qu’en système maïs, nécessitant alors moins de concentrés alimentaires. Les dépenses liées aux

intrants alimentaires sont ainsi réduites allant dans le sens d’une moindre vulnérabilité, comme

évoqué dans la Partie 2. Enfin, les niveaux de productions des laitières en bio, en lien avec le

rationnement, sont moins importants que les niveaux fixés en conventionnel (le niveau moyen de

productivité par vache de ces 6 fermes en conventionnel était de 7970l/vl et a pour objectif d’être à

6720l/vl). Une affirmation selon laquelle « les vaches laitières moins orientées vers de fortes

productions nécessitent moins des traitements vétérinaires » a été citée par tous les éleveurs ayant

évoqué une réduction des coûts vétérinaires. C’est un autre élément important allant dans le sens

d’une moindre vulnérabilité à l’issue de la conversion à l’AB.

Concernant ce sentiment d’amélioration de la situation économique, il s’agit principalement d’un

ressenti exprimé par ces 6 éleveurs, basé sur la trésorerie disponible. En effet, les bilans comptables

de l’année en conversion n’étaient pas encore finalisés au moment de l’entretien, ces ressentis de

réduction des coûts n’ont donc pas pu être vérifiées par les faits. Cependant, l’optimisme de ces

éleveurs constitue un premier pas vers une moindre vulnérabilité. La conversion à l’AB les engage à

explorer de nouvelles pratiques, de nouveaux réseaux là où ils pouvaient se sentir dans une impasse

notamment technique et économique en conventionnel. Ainsi, elle les pousse à se renseigner et à

prendre contact avec le GAB de leur département, mais aussi avec d’autres organismes proposant

des formations et des groupes d’échanges sur les pratiques et la réglementation bio.

Une difficulté qui se maintien pour d’autres :

5 des 11 fermes en difficulté économique en conventionnel n’ont pas perçu d’amélioration de leur

situation financière en période de conversion. Pour ces éleveurs le prix du lait en AB doit résoudre les

problèmes économiques de la ferme. En effet, tous ont exprimé qu’un système fonctionnel et en

routine en bio, avec un prix du lait payé en bio, sera la solution qui permettra de résoudre leurs

difficultés économiques. Deux d’entre eux envisagent, en plus d’une meilleure rémunération du lait,

une réduction des charges opérationnelles et de mécanisation notamment avec des réductions des

coûts alimentaires – une stratégie finalement peu réalisable pour les 3 autres éleveurs de ce groupe

ayant un parcellaire contraint et qui sont amenés à souvent se déplacer avec le matériel, engendrant

ainsi d’important coûts de carburant et d’entretien. Dans l’attente de ce prix plus rémunérateur, ces

fermes n’entrevoient pas encore de réduction de leur vulnérabilité.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page 48

L’autonomie est fortement recherchée par ces fermes, et principalement l’autonomie alimentaire via

une orientation vers l’herbe. En effet, la part d’herbe dans la SFP varie de 64% en moyenne sur les 5

fermes en conventionnel à 89% en bio et la part d’herbe dans la ration des vaches laitières sur la

période printemps et été (qu’elle soit pâturée ou stockée puis distribuée) varie de 81% à 99%. Dans

le même temps, les surfaces en céréales de vente sont en conversion vers des surfaces de mélanges

céréaliers autoconsommés. La réduction des charges de mécanisation passe par, pour des fermes

ayant peu de contraintes d’accessibilité au pâturage, une diminution des surfaces récoltées et

mécanisées et une augmentation des surfaces pâturée.

Finalement, les fermes en difficulté économique avant d’engager la conversion du système forment

deux lots. Le premier perçoit des améliorations et a un ressenti optimiste porté par l’idée que le prix

du lait sera très prochainement celui du lait bio. La sensation d’arriver très prochainement au bout

de cette période de conversion s’accompagne d’un sentiment de vulnérabilité amoindri ce qui ouvre

des perspectives aux éleveurs de ce groupe et contraste fortement avec leur situation en

conventionnel dans laquelle ils étaient insatisfaits et se sentaient contraint à ne prendre qu’une

direction possible, celle de l’AB. Le second lot n’a pas perçu d’amélioration de la situation

économique de leurs fermes durant la conversion. Ils attendent fortement la valorisation de leur lait

au prix du lait bio et la rémunération associée. Deux des fermes de ce lot m’ont exprimé leurs fortes

craintes, m’expliquant en entretien que si la situation n’en vient pas à s’améliorer en AB, l’arrêt

complet du fonctionnement de la ferme serait envisagé.

Sur la Figure 14 est présenté le bilan des stratégies envisagées et des ressentis des éleveurs enquêtés

selon leur type de contrainte.

Être moins vulnérable est lié au ressenti et aux possibilités de s’adapter. Les éleveurs qui se

sentaient coincés en conventionnel à cause de leur situation économique et qui n’ont vu comme

seule solution que la conversion à l’AB, sont finalement plus confiants pour la moitié d’entre eux

(6 des 11 concernés). Or, avoir un sentiment d’amélioration et entrevoir des solutions alors même

que la conversion n’est pas encore achevée permet déjà de se sortir de cette situation de

vulnérabilité. C’est finalement un atout en comparaison avec les éleveurs qui ont comme seule

solution d’attendre la rémunération du lait au prix du lait bio.

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Figure 14: Figure Bilan des stratégies et ressentis des fermes enquêtées. Les groupes formés pour les stratégies ne sont pas exclusifs (par exemple : la ferme 3 est dans l’attente d’une rémunération au prix du lait bio et est en recherche d’échanges

parcellaires).

VII. Conclusions et discussions A l’issue de cette analyse il est pertinent de noter que les pratiques ne sont pas les seules voies

d’amélioration de la vulnérabilité des fermes. Les ressentis des éleveurs ont également une grande

importance dans la capacité d’adaptation des fermes et dans les possibilités et opportunités qu’elles

saisissent. C’est pourquoi prendre en compte les doutes et motivations des éleveurs en conversion

permet de compléter cette analyse de vulnérabilité. Une partie du guide d’entretien a été consacrée

à cette analyse des doutes et motivations mais les résultats obtenus ne sont que partiellement

présentés dans ce rapport (voir en Annexe 2 et Annexe 3). La FRAB projette en effet de présenter

ces résultats via d’autres modes de valorisation.

La deuxième partie de ce rapport a permis de nous éclairer sur les conditions de vulnérabilité des

fermes et cette troisième partie met en avant les différents cas de figure que l’on retrouve chez des

fermes exprimant des contraintes et des niveaux de vulnérabilité similaires. Bien que l’étude et la

formation aux agriculteurs concernant les grandes orientations permettant de réduire leur

vulnérabilité durant la période de conversion soient très importantes, considérer chaque cas de

manière individuelle reste une nécessité pour les fermes les plus en difficultés.

Nous avons pu dégager des groupes aux tendances et évolutions similaires pour chacune des

contraintes étudiées. Certains éleveurs améliorent leur situation de vulnérabilité, augmentant leur

parcellaire accessible et améliorant leurs résultats économiques, ou simplement leur ressenti quant à

leur situation économique. D’autres ne perçoivent pas encore d’amélioration, voire accroissent leur

vulnérabilité en augmentant leur cheptel et diminuant leur surface accessible. La dynamique dans

laquelle s’inscrivent les éleveurs, leurs ressentis, leurs satisfactions et leurs motivations sont autant

de voies d’améliorations possibles que la diversité des pratiques qu’ils mettent en place.

Une étude similaire à celle présentée dans cette partie est en cours de planification afin de

caractériser les nouveaux éleveurs laitiers du Grand Ouest en s’intéressant aux régions Bretagne,

Pays de la Loire et Normandie. Cette étude permettra aux structures de conseil et

d’accompagnement de ces 3 régions de mutualiser leurs moyens et d’approfondir sur les

connaissances des nouveaux convertis à l’Agriculture Biologique.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

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Conclusion générale Le travail réalisé au cours de ce stage a permis de caractériser la vulnérabilité des fermes laitières

bretonnes en conversion selon des critères de productivité autonome, des critères économiques et

des critères de sensibilité aux aides en lien avec les pratiques agricoles et le contexte climatique et

économique. Une première analyse rétrospective a permis de caractériser la possibilité de réduire la

vulnérabilité des fermes laitières en conversion à l’AB par une orientation vers l’herbe pâturée. Au

contraire, partant d’un système d’élevage éloigné des références de l’AB, une trop faible

désintensification de ce système c’est-à-dire de trop faibles diminutions des quantités de concentrés

distribuées, du maïs ensilage dans la ration des vaches laitières et de la productivité des vaches ne

permettent pas d’améliorer significativement le niveau de vulnérabilité des fermes. De plus, une

bonne situation économique de départ s’est avéré être un facteur supplémentaire favorable à la

diminution de la vulnérabilité des fermes.

Une seconde analyse sur des conversions en cours a ciblé des fermes jugées vulnérables au regard de

leurs contraintes structurelles pour s’orienter vers une alimentation des vaches laitières constituée à

majorité d’herbe pâturée ou de leur situation économique difficile avant conversion. Il ressort de

cette étude que les voies d’amélioration d’un parcellaire peu accessible sont très peu dépendantes

des décisions de l’éleveur mais fortement du contexte (possibilité d’échange de parcelles, etc.).

D’autre part, les éleveurs issus de situations économiques difficiles sont départagés en deux

groupes ; ceux qui perçoivent des améliorations et développent ou étudient les possibilités

d’adaptations techniques à mettre en place durant la conversion et ceux qui ne perçoivent pas

d’amélioration durant la conversion et qui attendent que leur produit soit certifié et valorisé au prix

du lait biologique. La dynamique de ces deux groupes est donc très différente et se reflète sur leur

capacité à s’adapter et à identifier leurs possibilités d’évolution, et ainsi que sur leur vulnérabilité.

Ces résultats se limitant à la période de conversion et à la région Bretagne sont finalement confortés

par les études menées dans le cadre de la thèse de Maëlys Bouttes sur les fermes laitières françaises

biologiques. En effet, une étude en cours de publication utilisant la base de données INOSYS-réseaux

d’élevage et centrée sur les élevages bios français et la méthode proposée par Martin et al., 2017

met en avant que les systèmes bovins laitiers bio les moins vulnérables et aux situations

économiques les plus stables sont les plus herbagers et les moins distributeurs de concentrés bien

qu’ils soient également moins productifs (Bouttes, communication personnelle). Il semble donc que

les systèmes les plus herbagers soient les moins vulnérables en conversion, mais également en bio.

Les études menées au cours du stage permettent également d’établir un lien entre vulnérabilité,

ressenti et motivations des éleveurs. En effet, bien que non détaillés dans ce rapport, les doutes et

motivations en lien avec les stratégies développées par les éleveurs en conversion ont été étudiées. Il

ressort de cette étude que la motivation économique, c’est-à-dire le passage en AB pour améliorer le

revenu de l’éleveur, peut être une motivation ancrée ou un simple déclencheur. 13 (soit 93%) des

éleveurs enquêtés actuellement en conversion relèvent en entretien que le volet économique fait

partie des éléments qui les ont poussés à franchir le pas vers l’AB alors que le nombre d’éleveurs

insatisfait de leur situation économique en conventionnel est de 11 (soit 78%). Parmi les fermes

actuellement en conversion en Bretagne, nous avons pu identifier 4 éleveurs entrés en conversion

principalement pour des raisons environnementales et des raisons de santé (liées notamment à

l’envie de complètement stopper les traitements phytosanitaires sur les cultures). Pour ceux-ci, le

facteur économique a été l’élément de prise de décision finale mais pas l’élément déclencheur. C’est

en effet à l’annonce des prix du lait de l’année 2016 par leurs laiteries que ces 4 éleveurs ont débuté

leur conversion et ont affronté leurs doutes quant à la gestion jugée plus difficile de l’itinéraire

technique des cultures biologiques. Ces 4 éleveurs ont alors diminué ou stabilisé leur cheptel tout en

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diminuant la surface en maïs fourrage, ce qui a permis d’augmenter leur surface accessible au

pâturage et de réduire leur vulnérabilité. A l’inverse, deux fermes ont augmenté les effectifs de leur

troupeau laitier parallèlement à leur surface en maïs ensilage. On remarque que pour ces deux

fermes, la motivation économique était la principale motivation pour la conversion, mais elle était

accompagnée d’une volonté d’expérimenter la mise en place d’un nouveau système et de montrer à

leur entourage leur capacité à affronter une conversion à l’AB. Malheureusement, la situation de ces

deux fermes, selon les critères de vulnérabilité pris en considération dans ce travail de stage, tend à

se détériorer.

Cette étude et sa diffusion ont permis de débuter un projet de caractérisation des fermes laitières du

Grand Ouest nouvellement converties. En outre, elle révèle l’importance d’un accompagnement des

fermes en conversion, qu’il soit collectif et/ou individuel selon les cas concernés, par des structures

telles que celle du réseau GAB-FRAB de Bretagne. Elle met également en avant la pertinence de la

considération des ressentis des éleveurs en lien avec leur pratiques d’élevage et leurs situations de

vulnérabilité.

Il me semble, à titre personnel et en tant que futur employé du réseau GAB-FRAB de Bretagne, que

l’accompagnement des agriculteurs, en conversion ou en bio, doit être effectué selon différents

modes en lien avec la situation de chacune des fermes concernées. D’où, l’importance d’une bonne

connaissance des fermes en bio et en conversion et du projet de caractérisation de ces fermes mené

par les régions du Grand Ouest. Nous avons mis en évidence que la vulnérabilité est très variables

entre fermes. Certaines, proche des références de production en bio et très herbagères, auront déjà

de nombreuses connaissances techniques sur la gestion des systèmes herbager. Le pas à franchir

sera assez limité et leur vulnérabilité sera très probablement minime. L’accompagnement technique

de ces fermes s’en trouvera possiblement plus limité. Cependant, de tels profils sont idéals pour les

échanges avec d’autres fermes aux caractéristiques plus éloignées et en demande de

renseignements pour leur évolution (échanges sous forme de visites et de cours techniques avec des

conseillers notamment comme ils ont lieu dans les GAB). D’autres fermes, telles que ces dernières et

dont les profils diffèrent fortement des références en bio, ont très souvent besoin d’un

accompagnement plus approfondi et plus régulier. Les dispositifs de projection des modifications des

pratiques en fermes (via des jeux de conception participative tels que le rami fourrager® de Martin et

al., 2011), les visites d’autres fermes pour y étudier les pratiques utilisées et les accompagnements

individuels sont alors les premières solutions et des moyens de cibler les attentes et les motivations

des éleveurs qui les poussent à s’engager dans l’AB. Motivations étudiées dans ce travail de stage et

qui peuvent être extrêmes diverses même sur un faible échantillon de 14 fermes, et sont révélatrices

de l’état de vulnérabilité des fermes. Il est vrai que les types de motivations définissent en partie

l’orientation technique que prendra la ferme en conversion et, par effet indirect, sa vulnérabilité. Je

considère donc que les profils des fermes, éloignés ou non des références, les motivations des

éleveurs et leurs ressentis, sont autant de paramètres à prendre en compte pour accompagner la

mise en place et le maintien des systèmes en bio. Des structures telles que les réseaux de

producteurs me paraissent parfaitement adaptées pour répondre à l’ensemble de ces éléments, car

proches des problématiques de terrain et réunissant de nombreux profils d’éleveurs.

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page III

Annexes Annexe 1: Indice de projection de chacun des indicateurs lors de la régression des moindres carrés

partiels. .................................................................................................................................................. III

Annexe 2: Graphique des motivations à la conversion évoquées en entretien. .................................. IV

Annexe 3: Graphique des freins à la conversion évoqués en entretien................................................ IV

comp 1 comp 2 comp 3 comp 4

R.WaterSummer 0.15838057 -0.03724978 -0.32300518 -0.13084771 R.WaterAutumn -0.21824523 0.11855941 -0.08804651 -0.12280675 R.HeatStress 0.15648634 0.35413079 -0.35484013 0.10197230 R.Earliness 0.08387713 -0.15387257 -0.26796625 0.14261748 I..PermPast -0.07846513 -0.09789397 0.23693098 -0.23231471 I..Legumes 0.05718512 0.21830145 0.20889614 0.27983995 I..Heifers -0.08101268 -0.05734740 0.28789923 0.22302572 I.CalvingSpread -0.14232731 0.08819883 0.32705546 -0.04093000 I.ConcDistrib -0.23250092 0.18264598 -0.10736625 0.23730478 I.StockingRate -0.17485538 0.11187681 -0.24935924 -0.40297945 I.MilkCow -0.18176417 0.03676722 -0.12527073 0.42029264 Sl.ShannonLand -0.05451905 0.39651270 0.10523637 -0.05451814 Sl..SownPast -0.24172780 -0.11362279 0.09528422 -0.19765872 Sl..Maize 0.27802840 -0.06536772 -0.07193527 0.08089874 Sl.SilageMaize 0.26317574 0.35560551 0.05657312 -0.08850245 Sl..GrazedArea -0.01632639 -0.19829520 0.19536377 -0.15103994 Sl..GreenFeeding 0.20739226 0.07339367 0.35925701 0.17870521 Sl..GrazingInFeeding -0.03280344 -0.38754761 -0.12104878 -0.07701489 I.ShannonLand -0.17924052 -0.35355446 -0.06632898 0.35334388 I..SownPast 0.27352401 -0.13313544 -0.08406648 0.19657561 I..Maize -0.27744666 0.17038372 0.05189145 -0.10114014 I.SilageMaize -0.29460128 -0.06299559 0.05395237 0.03596756 I..GrazedArea 0.22202016 -0.13120031 -0.06211653 -0.22501758 I..GreenFeeding -0.24134441 0.17564060 -0.23550098 0.11111884 I..GrazingInFeeding 0.33358009 0.01967167 0.15610497 -0.05399594 comp 1 comp 2 comp 3 comp 4 I.SensiToAid 0.07255445 0.32700648 0.56730878 -0.62561047 Sl.ProdHa -0.45245413 0.13521995 -0.32126994 0.49671293 Sl.Effi -0.04386625 -0.73767147 0.17682730 0.23644341 Sl.OpSur_WorkUn -0.49264564 -0.18942053 0.35546670 0.12509608 I.ProdHa -0.40485606 0.07986654 -0.54418317 0.08307062 I.Effi 0.47442728 0.51538569 0.03633356 0.18819745 I.OpSur_WorkUn 0.39548383 -0.15080424 -0.34621735 0.49801032

Annexe 1: Indice de projection de chacun des indicateurs lors de la régression des moindres carrés partiels. La partie supérieure correspond aux indicateurs du contexte et des pratiques et la partie inférieure correspond aux indicateurs de

vulnérabilité

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Rapport de Projet de Fin d’Etudes

Niels BIZE Page IV

Annexe 2: Graphique des motivations à la conversion évoquées en entretien. Le nombre d'occurrence est inscrit pour chaque motivation citée.

Annexe 3: Graphique des freins à la conversion évoqués en entretien. Le nombre d'occurrence est inscrit pour chaque frein cité.

13

10

9 6

5

4

4

3

3

5

Economie

Santé et Sécurité

Environnement

Challenge et Expérimentation

Réponse à la demande

Insatisfaction du conventionnel

Bien-être animal

Regard de l'entourage

Idéologie et Philosophie

Autres motivations

9

6 3

2

2

2

6

Difficultées techniques culturales

Gestion sanitaire du troupeau

Difficulté de la transition

Pression sociale

Chute de rendement

Manque de surface accessible

Autres freins