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Rapport du PPH de Margaux Lamourelle sur le thème de l'urbanisation d'une favela (Cantagalo-Pavao-Pavaozinho) où elle a vécu pendant un an lors de son échange académique au Brésil
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Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
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Lors de mon année d’échange au Brésil, j’ai fait le choix de vivre dans une favela de la Zona
Sul, Cantagalo - Pavão - Pavãozinho (aussi surnommée PPG), tout d’abord pour des raisons
financières, la ville de Rio de Janeiro étant très chère, mais aussi pour découvrir cet espace
dont nous entendons tant parler en Europe mais dont nous ne savons rien, ou dont nous
nous faisons une idée erronée.
Ayant toujours été attirée par la photographie, possédant mon propre reflex numérique et
ayant été impliquée dans le Club Photo de l’INSA, Graines d’Images, j’ai trouvé naturel de
réaliser mon PPH sous forme d’exposition photo. La vie de la favela a rythmé mon
quotidien, j’y ai trouvé des marques, des amis, je l’ai vue évoluer, se mobiliser. Son
urbanisation très particulière fait qu’elle est un quartier à part, différent de « l’asphalte ».
C’est ce point là qui m’a inspirée pour mon Projet Personnel en Humanités.
é ã ã
Cantagalo - Pavão - Pavãozinho (littéralement «Coq qui chante - Paon - Paonneau »), est en
vérité un complexe de 3 favelas, situé à la jonction des riches quartiers d’Ipanema,
Copacabana et Lagoa dans la zona sul de Rio de Janeiro.
Les premiers baraquements de bois furent construits dans les années 30 par des habitants
venant pour la plupart du Nordeste brésilien, fuyant la sécheresse et le manque de travail. La
favela s’est peu à peu agrandie et a profité de différents programmes publics permettant
l’amélioration des conditions de vie des habitants du morro.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
Aujourd’hui la comunidade comporte entre 10 000 et 12 000 habitants selon les sources. La
plupart des habitations sont en briques, possèdent l’électricité et l’eau courante. Les « unités
de police pacificatrices » (UPP) ont fait leur entrée dans la favela début 2010 et des
patrouilles de police sont présentes à chaque entrée de la favela ainsi que dans ses ruelles.
Comme dans tous les morros cariocas, un service de mototaxis s’est mis en place et des petits
commerces, souvent dans des maisons particulières, fleurissent de toutes parts. Des
associations et des services publics (« postes de santé ») y sont installés.
Mais les conditions de vie des habitants du morro sont loin d’être idéales. Une seule route
desservant la favela, la plupart des maisons ne sont accessibles que par de nombreux
escaliers très escarpés. Les conditions d’hygiène laissent souvent à désirer, le nettoyage étant
difficile par les services publics et les égouts pouvant être à ciel ouvert.
Les choix techniques pour une exposition photo ne sont pas anodins. Le matériel conditionne
les photos que l’on va prendre, font partie intégrante du sens de la photo. Mes photos ont été
réalisées avec un reflex numérique de gamme amateur confirmé de la marque Sony, l’alpha
700. Celui-ci est mon premier appareil photo reflex et je l’avais depuis presque deux ans
quand je suis partie au Brésil. Je maitrisais donc suffisamment mon matériel. Le boitier était
accompagné d’un objectif 28-75mm ouvrant jusqu’à f2.8, ce qui permet une plage de focale
relativement large et de nombreux choix photographiques. La focale 28mm étant parfois un
peu longue pour des photos dans la favela, où les rues sont étroites et où il y a souvent peu
de possibilités pour se reculer, j’ai profité de la visite d’un ami pour lui emprunter son
appareil photo grand angle, un Sony de la gamme Nex (hybride) couplé d’un objectif
standard 18-55mm. Deux photos de l’exposition ont été faites avec celui-ci.
Le traitement des images a été réalisé avec le logiciel Adobe Photoshop Lightroom, logiciel
que j’utilise depuis le début de ma pratique de la photographie. C’est avec ce logiciel, et juste
avant le traitement des images, que j’ai effectué la sélection des photos allant être exposées.
J’ai dû choisir parmi près de 200 clichés une sélection de 34 photos. Ce choix est long et
difficile, car chaque déclenchement a un sens pour le photographe, et il est compliqué de
mettre de côté certains aspects du sujet qu’il veut traiter. Une fois le choix fait, le moment est
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
au traitement des photos. Traitement, par opposition avec retouche, car les modifications
effectuées sont légères et ne changent pas foncièrement le sens de l’image. Balance des
blancs, contraste, exposition, vignettage et retouche locale (pour enlever une poussière ou un
halo) sont les seuls paramètres que j’ai utilisés.
28mm
f/4,5
’ 1/80s
é ISO 500
28mm
f/4,5
’ 1/200s
é ISO 500
28mm
f/2,8
’ 1/40s
é ISO 1000
Les ruelles étroites et tortueuses, les escaliers sans fin, les briques nues, parpaings ou
crépis gris sont caractéristiques de la favela. Ils reflètent sa création et son histoire, ce
quartier étant non planifié et auto construit.
75mm
f/5,0
’ 1/160s
é ISO 200
Les coqs, mascottes de Cantagalo, se
promènent librement dans la favela, entre les
tableaux électriques et les escaliers en éternelle
construction.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
75mm
f/4,5
’ 1/2000s
é ISO 500
Toutes les maisons sont desservies en électricité et en eau.
L’eau à Rio n’est accessible qu’à certaines heures ou certains
jours de la semaine. Ainsi, dès que l’eau est disponible, de
gros réservoirs d’eau se remplissent automatiquement. La
favela est tachetée de bleu par ces réservoirs posés sur les
toits.
28mm
f/2,8
’ 1/8s
é ISO 800
Les nombreux fils électriques acheminent
l’électricité jusqu’aux maisons. Dans cette
organisation anarchique, les électriciens font
figure de prestidigitateurs.
28mm
f/3,5
’ 1/125s
é ISO 200
Un camion de bouteilles de gaz est présent dans la rue
principale de Cantagalo. Les logements n’étant accessible la
plupart du temps que par des escaliers, c’est à dos
d’homme que les habitants sont approvisionnés en gaz.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
40mm
f/4,5
’ 1/400s
é ISO 500
Les services de nettoyage passent plusieurs fois par jour
récupérer les poubelles pour faire face à la très grande
quantité de déchets générés dans la comunidade. Malgré
cela, faute de points de collectes, à cause du manque
d’accessibilité des ruelles par les véhicules, les poubelles
débordent régulièrement.
28mm
f/5,6
’ 1/1000s
é ISO 200
Au bout de la seule route du morro, des
bâtiments ont été construits : le siège de l’unité
de police pacificatrice, des bâtiments
associatifs mais aussi des appartements pour
reloger les habitants subissant les remoçoes.
28mm
f/5,0
’ 1/160s
é ISO 200
« Ne pas jeter de poubelles ici ». A Rio comme
dans le reste du Brésil, une énorme
sensibilisation sur les risques
environnementaux reste à faire. La magnifique
baie de Guanabara est très polluée, entre autre
par les déchetteries improvisées et à ciel
ouvert sur les flancs des morros.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/5,0
’ 1/640s
é ISO 200
Ce grand bâtiment, où est installé le
programme social Criança Esperança, fut
d’abord un hôtel, puis une école sous le
gouvernement de Brizola.
35mm
f/5,6
’ 1/500s
é ISO 200
Le complexo Rubem Braga est aussi un vecteur de tourisme. Il
possède un mirador aménagé et permet un accès rapide au
centre du morro. Le contraste entre ce bâtiment
ultramoderne et les petites maisons aux briques apparentes
est frappant.
28mm
f/2,8
’ 1/10s
é ISO 800
Le complexo Rubem Braga a été inauguré après
la pacification de la favela, en 2010. Disposé au
centre du quartier Ipanema, il intègre
véritablement PPG au reste de la ville.
28mm
f/5,6
’ 1/125s
é ISO 200
Ascenseur public et gratuit, le complexo Rubem
Braga est vite devenu indispensable aux
habitants de PPG pour aller à l’école, au
travail, ou remonter leurs courses. Un
téléphérique a aussi été mis en place de l’autre
côté de la favela.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/5,0
’ 1/160s
é ISO 200
Des logements détruits pour la construction de routes,
transformés en décharges par le temps et le manque de
sensibilisation, jouxtent des maisons que les habitants
refusent de quitter.
28mm
f/5,0
’ 1/200s
é ISO 200
Une des ruelles principales de la favela, que le
gouvernement veut transformer en route
accessible aux voitures. Pour l’instant, seuls les
véhicules deux roues y accèdent.
28mm
f/5,0
’ 1/640s
é ISO 200
Une des maisons qui a du être quittée par ses habitants
pour la construction de la route. Pour s’assurer que
personne ne s’y établisse à nouveau, les services publics
l’ont démolie. Cependant les travaux n’ont toujours pas
commencé.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/5,0
’ 1/1000s
é ISO 200
PPG bénéficie d’une vue privilégiée sur la mer
et les quartiers de Copacabana et d’Ipanema,
ce qui attire les touristes et provoque la
convoitise des constructeurs et promoteurs.
28mm
f/5,6
’ 1/320s
é ISO 200
La favela est en constante évolution. Si plus aucune
nouvelle construction n’est autorisée (pour protéger la forêt
restante), les maisons se changent en petits immeubles et
des travaux ont lieu à chaque coin de rue. Ciment frais et
sacs de matériaux de construction font partie du paysage
de la favela.
75mm
f/2,8
’ 1/640s
é ISO 200
La favela, il y a encore peu de temps évitée et source
d’inquiétude pour les touristes, est devenue une véritable
attraction. Des favela tours sont organisés par la quasi-
totalité des agences de tourisme et de nombreuses auberges
y fleurissent.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/5,0
’ 1/320s
é ISO 200
Dans la rue d’accès à la favela, des grosses maisons, des
hôtels de charme sortent de terre en quelques semaines.
Cela suit la logique d’organisation du morro : les maisons
les plus riches, en bas, laissent place à des maisons de plus
en plus modestes lorsqu’on prend de l’altitude.
28mm
f/5,0
’ 1/500s
é ISO 200
Malgré l’urbanisation et la modernisation
croissante de PPG, la nature reprend ses droits
dès qu’elle le peut. Herbes folles entre les
maisons, forêt tropicale en haut du morro ou
fleurs poussant sur les fils électriques, tous les
moyens sont bons.
28mm
f/2,8
’ 1/250s
é ISO 640
En haut de la favela, dans les zones les plus modestes, on
peut encore voir des baraquements en bois.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/5,6
’ 1/40s
é ISO 640
Au détour d'une des ruelles de la Favela, une jeune femme
descend en direction de la plage. Même si les ruelles sont
étroites et le quartier sujet à la pauvreté, la vie y est sûre et
confortable.
28mm
f/3,5
’ 2s
é ISO 200
Le quartier vit 24 heures sur 24. Le week-end,
il n’est pas rare de voir des enfants jouer la
nuit ou d’entendre de la musique et des bruits
de fête jusqu’au lever du soleil.
28mm
f/6,3
’ 1/400s
é ISO 200
Pedro, 9 ans, était mon voisin du dessous à
gauche un peu au fond où il vivait avec sa
famille. Les habitants avaient eu la sensibilité
de mettre une bâche bleue au dessus de cette
cour bleue pour créer un ciel synthétique se
mêlant avec le vrai ciel. Sens poétique inné ou
simple hasard de la favela ?
28mm
f/2,8
’ 1/80s
é ISO 200
La favela est aussi un lieu d’expression
artistique. Les murs des maisons, les rues, sont
autant d’espaces de création.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
28mm
f/9,0
’ 1/320s
é ISO 200
Gravir un escalier très haut, étroit et abrupt est parfois la
seule solution pour atteindre les maisons les plus hautes de
Pavão.
75mm
f/3,5
’ 1/160s
é ISO 200
Pas de toit, les barres du béton armé dépassant : toutes les
maisons sont construites de manière à ce qu’un nouvel
étage puisse être construit, et ainsi créer un revenu
supplémentaire à la famille par la location d’un
appartement.
50mm
f/2,8
’ 1/5000s
é ISO 200
Les petites maisons accrochées au morro
regardent, souvent avec fierté, les grands
immeubles de Copacabana. La grande
majorité des habitants de PPG a construit sa
propre maison, possède une vie sociale
remplie et ne quitterait son quartier pour rien
au monde.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
18mm
f/8,0
’ 1/125s
é ISO 800
18mm
f/5,0
’ 1/200s
é ISO 200
Dans cet environnement où chaque parcelle de terrain est construite, où les familles
s’entassent dans des pièces uniques et où chaque maison est habitée, les seuls espaces
publics respectés sont les terrains de foot, sport national au Brésil.
28mm
f/6,3
’ 1/160s
é ISO 200
De nombreux bars tenus par des habitants de PPG sont
installés dans les ruelles. Ils sont des lieux incontournables
de la vie de quartier. Tous s’y retrouvent pour discuter,
voir des matchs de foot ou tout simplement y boire un
verre.
28mm
f/9,0
’ 1/320s
é ISO 200
Les rues de la comunidade, ses escaliers, sont des lieux de
rencontre. Il est courant d’y voir des enfants y jouant ou des
personnes en conversation animée autour d’un verre.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
Le Projet Personnel en Humanités est l’occasion pour les élèves de l’INSA d’explorer des
champs très différents de ceux que l’on aborde en général, et surtout de laisser s’exprimer
une certaine créativité. Il était important pour moi de traiter un sujet qui m’était proche, qui
me permettre d’apprendre et d’évoluer. Faire une exposition photographique était l’occasion
d’allier un thème passionnant et une forme qui me corresponde. L’appareil photo est
souvent un objet-lien avec les personnes. Suscitant la curiosité, il permet d’entrer en contact
et d’échanger plus facilement. Ayant arpenté les ruelles sinueuses de la favela de
nombreuses fois à la recherche de clichés, ce projet m’a permis de mieux connaitre le lieu où
j’ai vécu, les personnes y habitant et faisant de ce quartier un endroit unique.
Techniquement, j’ai aussi appris et me suis rendue compte de certaines erreurs. La
réalisation de mon PPH, échelonnée sur près de 8 mois, a été une expérience enrichissante et
formatrice.
Carioca Habitant de la ville de Rio de Janeiro
Comunidade Littéralement « communauté », est aussi un synonyme de favela, mettant
l’accent sur ses habitants
Morros Mornes, collines où sont placées la plupart des favelas de Rio de Janeiro
Zona Sul Zone Sud de Rio de Janeiro, regroupant la quasi-totalité des quartiers riches
de la ville, dont Ipanema et Copacabana
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
Merci à tous ceux qui m’ont aidé tout au long de ce projet.
Merci à ma tutrice, Danielle Faucheux, d’avoir suivi ce projet malgré la distance, et à mon co-
tuteur d’avoir accepté de former le jury.
Merci à la médiathèque Marie Curie pour le lieu d’exposition et de soutenance ainsi que les
supports d’affichage.
Merci à Mélina pour l’inspiration et les informations, à Arnaud pour l’appareil photo.
Merci aux habitants du morro de Cantagalo - Pavão - Pavãozinho, à Carol pour m’avoir fait
découvrir et aimer ce quartier.
Merci à ma famille, la PUC-Rio et l’INSA de Lyon pour avoir rendu possible ce voyage au
Brésil.
Tutrice : D. Faucheux
Co-Tuteur : P. Pinsard
Melina Echivard, Mémoire : La favela de Cantagalo - Pavão – Pavãozinho : histoire urbaine, histoires
humaines, 2012
Rafael Soares Gonzalves, Le droit, la politique et l'évolution des favelas à Rio de Janeiro, la précarité
juridique du discours officiel, 2002 in Ville visible, ville invisible, col. La Jeune Recherche en
Europe, Ed. l'Harmattan
Juliana Blasi Cunha, O PAC e a UPP no « Complexo Pavão – Pavãozinho – Cantagalo » : Processo
de implementação de políticas públicas em uma favela da Zona Sul da cidade do Rio de Janeiro, 2011
Camille Goirand, Politique des favelas, 2003, Ed. Karthala, Coll. Recherches internationales
Carolina Thibau, Estudo das intervençoes urbanisticas e de infraestrutura na favela Morro do
cantagalo e seus impactos nas praticas cotidianas e modo de vida de seus habitantes, 2011
http://www.favelatemmemoria.com.br
http://upprj.com