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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique Centre africain des ressources naturelles Banque africaine de développement RAPPORT PRINCIPAL

RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Centre africain des ressources naturellesBanque africaine de développement

RAPPORT PRINCIPAL

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Préparé par Richard Eba’a Atyi

Table des

matièresRésumé analytique 5

1. Contexte 11

2. Méthodologie de l’étude 11

3. Conclusions de l’étude 12

4. Conclusions 44

5. Recommandations : pertinence de l’intervention de la Banque africaine de développement 46

Références 52

Annexe 57

Liste des sigles et acronymes 72

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Le présent rapport ici présenté a pour objectif d’enclencher le processus

d’appui aux pays africains exportateurs de bois dans la lutte contre l’exploitation

forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment

à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

forestières et la gouvernance (FLEG) et à la mise en œuvre des accords de

partenariat volontaires conclus au titre du Plan d’action de l’Union européenne

pour l’application des réglementations forestières, la gouvernance et les

échanges commerciaux (APV/FLEGT de l’UE).

L’étude repose en grande partie sur un travail préliminaire qui a fait la lumière

sur le contexte mondial du secteur forestier, en décrivant les aspects techniques

et institutionnels de la conclusion des accords de partenariat volontaire (APV)

et en analysant les contraintes juridiques, financières et institutionnelles

actuelles pesant sur leur ratification. Trois pays ont fait l’objet d’une étude de

terrain (Côte d’Ivoire, Gabon et Liberia), et l’accent a été mis sur l’Indonésie,

un pays considéré comme étant le plus avancé dans le monde en matière

d’application des APV. Au total, 77 représentants de groupes d’intervenants ont

été interrogés, tandis qu’une analyse des données secondaires a été effectuées

en ce qui concerne le Cameroun et de la sousrégion d’Afrique australe.

Le travail effectué ne limite pas la gouvernance forestière à l’application des

réglementations, il fait aussi référence aux cadres politiques, institutionnels et

culturels par lesquels les divers intérêts en matière de ressources forestières

sont coordonnés et contrôlés. il inclut les règles adoptées pour organiser et

gérer des activités afin d’atteindre des objectifs sociaux élargis et de résoudre

des conflits entre groupes de parties prenantes ; le fonctionnement des

institutions et leur acceptation par le public ; et l’efficacité au sens large des

administrations publiques.

En 2013, l’Afrique a exporté pour près de 4,5 milliards de dollars américains

(USD) de produits ligneux. Les trois quarts de ces exportations étaient des

produits bruts (billes de bois, sciages et contreplaqué), le reste étant des

produits transformés.

Au cours de la même année, l’importation de produits ligneux en Afrique s’est

chiffrée à 6,5 milliards d’USD. Les importations intrarégionales en Afrique se

chiffraient à 526 millions d’USD, soit 8 % des importations totales. Les sciages

ont constitué le principal élément d’importation, à hauteur de 31 % du total, soit

deux milliards d’USD.

L’Afrique centrale (le bassin du Congo notamment) abrite les principaux

producteurs et exportateurs africains de produits ligneux, auxquels s’ajoutent

quelques pays situés en Afrique de l’Ouest et en Afrique de l’Est. En revanche,

RÉSUMÉ ANALYTIQUE

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

les pays importateurs se recensent en Afrique du Nord, de l’Ouest, de l’Est et

australe. Les marchés d’exportation et d’importation en Afrique présentent une

opportunité pour les échanges commerciaux intraafricains, pouvant générer des

dividendes importants au profit des populations africaines qui vivent dans les

pays exportateurs de bois et dans les pays qui importent cette matière première.

Une telle intégration peut être facilitée en œuvrant avec les communautés

sousrégionales telles que la Communauté économique des États de l’Afrique de

l’Ouest (Cédéao), la Communauté économique des États de l’Afrique centrale

(CEEAC), la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Est (ECEAS) et

la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) pour supprimer

les obstacles tarifaires et réduire les coûts de transaction.

Dans les pays d’Afrique de l’Ouest (à l’exception peutêtre du Liberia), la

quasitotalité des forêts tropicales fermées ont déjà subi au moins une coupe

de bois. Par contre, en Afrique centrale, les forêts facilement accessibles

ont fait l’objet de coupes à blanc. D’une manière générale, les concessions

forestières à long terme et à grande échelle gérées de façon privée dominent

la production de bois en Afrique centrale (dans le bassin du Congo). La plupart

des compagnies forestières actives sont à capitaux étrangers et sont possédées

traditionnellement par des investisseurs originaires d’Europe, mais plus

fréquemment d’Asie. C’est le même modèle qui est reproduit au Liberia. L’origine

du modèle des concessions forestières remonte à l’ère coloniale. Toutefois, le

régime de gouvernance en vigueur actuellement découle largement de deux

processus qui se sont développés au cours des deux dernières décennies :

d’une part, un ensemble d’ajustements structurels macroéconomiques ; d’autre

part, un engagement politique en faveur de la gestion durable des ressources

forestières devenu manifeste dans le programme d’action international adopté

lors du Sommet de la Terre qui s’est tenu à Rio de Janeiro au Brésil en 1992.

Les enjeux et défis liés à la gouvernance, que l’on peut étendre à la majorité des

pays d’Afrique comprennent :

• la mauvaise application des lois et réglementations forestières ;

• l’influence politique inopportune dans la formulation des politiques et la

prise de décisions en matière forestière ;

• le manque de planification de l’utilisation des terres ;

• le manque de coordination entre les divers départements ministériels

concernés ;

• un secteur informel dominant et mal contrôlé.

Outre l’impact sur la diversité biologique et l’environnement, l’exploitation

forestière illégale a un coût social élevé si l’on considère les recettes perdues par

les gouvernements des pays exportateurs de bois. Qui plus est, de nombreux

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

éléments factuels montrent les effets négatifs de la dégradation des forêts et

de l’environnement sur les conditions de vie des populations défavorisées qui

tirent leur subsistance de la forêt.

La communauté internationale a lancé plusieurs initiatives pour lutter contre

l’exploitation forestière illégale. On peut citer les conférences ministérielles

régionales sur l’application des réglementations forestières et la gouvernance

qui ont été organisées en Afrique, en Asie et en Europe de l’Est ; le Plan d’action

de la Commission européenne sur l’application des réglementations forestières,

la gouvernance et les échanges commerciaux ; la certification forestière, qui

découle du G8 sur l’exploitation illégale du bois, qui bénéficie d’un appui

massif d’organisations non gouvernementales (ONG) ; ainsi qu’une multitude

d’autres initiatives et déclarations prises ou faites par différents acteurs.

L’Initiative pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance

en Afrique (AFLEG), lancée en octobre 2003 à Yaoundé, au Cameroun, a été

quasiment abandonnée.

En 2003, l’Union européenne (UE) a défini une politique de lutte contre le

problème de l’exploitation forestière illégale du bois et le commerce qui y est

associé, dans le cadre du Plan d’action FLEGT. Une composante essentielle

de la mise en œuvre du Plan d’action FLEGT est un régime d’autorisation

volontaire proposé par la Commission européenne pour faire en sorte que seul

du bois prélevé légalement soit exporté en direction de l’UE. Six pays du monde

ont négocié des APV avec l’Union européenne, dont cinq pays africains – le

Ghana en 2009, le Cameroun en 2010, la République du Congo en 2010, le

Liberia en 2012 et la République centrafricaine en 2012 – et un pays asiatique

(l’Indonésie, en 2013). L’Indonésie est le premier pays en passe d’émettre des

autorisations FLEGT.

Les réalisations les plus importantes semblent liées à « l’équité » dans la

participation des diverses parties prenantes nationales au processus APV. Le

renforcement des capacités de la société civile et des administrations publiques

a été relativement efficace. Pour autant, la participation des parties prenantes

du secteur privé est restée faible, malgré un certain nombre d’initiatives pilotées

par des ONG internationales et des associations professionnelles. Les premières

mesures de réforme des politiques forestières ont été prises dans nombre de

pays. Mais beaucoup reste à faire, surtout pour ce qui est de l’application de la

nouvelle législation.

Deux sousrégions – l’Afrique australe avec la SADC et l’Afrique centrale avec la

Commission interministérielle des forêts d’Afrique centrale (Comifac) – ont pris

l’initiative la plus notable.

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

En 2013, la SADC a lancé son plan FLEGT qui visait à renforcer la mise en

œuvre des activités FLEGT dans chaque pays membre et dans la sousrégion,

moyennant la sensibilisation et la mobilisation de ressources, conjuguées

à une meilleure coordination et à un sens élevé des responsabilités. Outre la

lutte contre l’exploitation forestière illégale du bois et le commerce qui y est

associé, le Plan d’action FLEGT de la SADC a été établi pour s’attaquer à la

« formalisation » du commerce informel des produits forestiers.

La Comifac a été créée en 2000. Elle est l’instance politique et technique

d’orientation, de décision et de coordination des actions concernant la

conservation et la gestion durable des écosystèmes forestiers en Afrique

centrale. Cette instance harmonise et coordonne les politiques forestières

et environnementales de ses États membres. L’une des réalisations les

plus remarquables de la Comifac dans le domaine de l’application des

réglementations forestières est l’Accord sousrégional sur le contrôle forestier en

Afrique centrale. L’une des dispositions de l’accord prévoit la coopération entre

les responsables du maintien de l’ordre des pays voisins. D’autres initiatives

régionales et sousrégionales ont été mises en oeuvre par la Comifac, désormais

considérée comme un partenaire fiable en matière de gouvernance forestière.

Néanmoins, les contraintes financières qui pèsent sur la Comifac limitent son

efficacité.

La certification forestière (considérée comme le principal effort du secteur

privé), les projets d’observateurs indépendants, l’adhésion à l’Initiative pour la

transparence dans les industries extractives (ITIE) et plusieurs autres initiatives

en faveur du renforcement des capacités complètent l’éventail de mécanismes

visant au respect de la légalité dans le secteur forestier.

La réglementation FLEGT fait usage de la demande en produits ligneux sur les

marchés européens comme un levier permettant d’obtenir des réformes de la

gouvernance forestière en Afrique. Tous les systèmes en voie d’établissement

sont orientés vers le suivi des exportations de bois à l’étranger. De même,

la certification forestière qui semble stagner en Afrique est un instrument de

marché utilisé pour les marchés écologiquement sensibles en Europe, aux

ÉtatsUnis d’Amérique et au Japon.

Les principaux problèmes restent les marchés nationaux et intraafricains du

bois, qui enregistrent une forte croissance, exerçant ainsi une pression sur

les ressources forestières et la diversité biologique, ainsi que sur les moyens

de subsistance des personnes qui vivent en zone forestière. En vue d’induire

un impact décisif sur la gouvernance forestière et le bienêtre des populations

africaines, la BAD devrait appliquer un programme régional visant à promouvoir

la légalité sur les marchés nationaux et les marchés intraafricains du bois.

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Le programme régional pour la

promotion de la légalité dans le

commerce africain du bois (Proligatt)

devrait s’efforcer d’améliorer la

contribution du secteur forestier à

l’économie africaine par le commerce

de produits ligneux licites entre les

marchés sousrégionaux africains.

L’objectif général du programme

serait de contribuer à l’intégration

de l’Afrique en encourageant la

consommation intérieure et le

commerce intraafricain du bois

produit légalement et de ses produits

transformés.

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du

Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la

gouvernance (FLEG) en Afrique

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

1. CONTEXTE Objectifs

L’étude a été initiée pour soutenir les efforts des pays exportateurs de bois

qui luttent contre la récolte et le commerce illicites du bois, notamment par la

préparation des stratégies nationales FLEG et la mise en œuvre des APV/FLEGT

de l’UE. Les résultats de la consultation servent d’orientation aux interventions

futures du Carn dans ce domaine. De manière plus spécifique, l’étude visait

à documenter les systèmes et les processus pour les rendre conformes à la

réglementation des APV/FLEGT de l’UE, ainsi qu’à apporter des contributions

pour appuyer le Carn dans la mise en œuvre du Plan d’action AFLEG, grâce aux

directives pour la préparation des stratégies nationales FLEG.

Centre d’intérêt de l’étude

L’étude examine les mesures pertinentes prises à la fois dans l’Union

européenne (et sur d’autres marchés de consommateurs) et dans les pays

producteurs (pays APV et pays nonAPV), ainsi que le développement de cadres

de coopération multilatérale en vue de lutter contre l’exploitation forestière

illégale, sans oublier des initiatives mondiales telles que REDD+, ni les actions

engagées par l’OIBT, la FAO et le Forum des Nations Unies sur les forêts (FNUF).

Une attention particulière a été accordée à la mise en œuvre du Plan d’action

AFLEG. L’étude devrait par ailleurs fournir une nouvelle occasion de collaborer

avec les principaux intervenants et de compiler, évaluer et résumer les attentes

des différents pays membres régionaux de la BAD et de leurs institutions

partenaires quant aux actions à venir. L’étude fera parallèlement ressortir les

leçons apprises et formulera des recommandations. Au demeurant, l’étude était

conçue pour contribuer à une prise de décision correctement informée au Carn,

dans les pays membres régionaux et chez les parties prenantes clés sur la base

d’une analyse complète des progrès accomplis après douze années de mise en

œuvre du Plan d’action FLEGT et douze années depuis la Déclaration et le Plan

d’action AFLEG.

2. MÉTHODOLOGIE DE L’ÉTUDE L’étude se base principalement sur un tour d’horizon de la documentation

qui devrait permettre de faire la lumière sur le contexte général du secteur

forestier, décrire les aspects institutionnels de la ratification de l’APV et analyser

les contraintes actuelles (le cadre juridique, les ressources humaines et

financières, etc.).

Des voyages d’étude ont été menés dans trois pays, sur les sept initialement

prévus : un pays APV, le Liberia, et deux pays non APV, la Côte d’Ivoire et le

Gabon. Le consultant a aussi analysé les données secondaires générées par

le Cameroun et la sousrégion d’Afrique australe. Dans les trois pays visités,

en tout 77 représentants de groupes de parties prenantes ont été interrogés

(cf. tableau 1). Les perceptions et opinions des divers acteurs ont été recueillies

au moyen d’un entretien semistructuré axé sur : a) les tendances et la dynamique

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du secteur forestier et des ressources forestières ; b) les principaux problèmes

de gouvernance qui se posent dans le secteur forestier ; c) les initiatives prises

par des groupes de parties prenantes pour améliorer la gouvernance et le

respect des réglementations forestières ; d) les impacts induits jusqu’à présent

par les programmes et initiatives en matière de gouvernance forestière ; e) les

chaînes de valeur et les axes prioritaires d’intervention future visant à améliorer

la gouvernance dans le secteur ; et f) des suggestions et recommandations

pour les interventions futures de la BAD. Les rapports détaillés sur les trois

visites de pays sont présentés dans l’annexe 1, infra.

TABLEAU 01

NOMBRE DE GROUPES DE REPRÉSENTANTS DE GROUPES DE PARTIES PRENANTES INTERROGÉS DANS CHAQUE PAYS

Groupe de parties prenantes Côte d’Ivoire Gabon Liberia

Gouvernement 20 7 3

OSC 9 2 1

Secteur privé 5 3 2

Forêts communautaires 5 1 5

Organisations régionales ou internationales 5

Bailleurs de fonds/projets initiés par des bailleurs de fonds 2 1 6

Total 41 19 17

3. CONCLUSION DE L’ÉTUDE 3.1 Au sujet de la gouvernance forestière

La gouvernance a été définie comme tout effort fait pour coordonner l’action

humaine afin d’atteindre des objectifs (Rayner et al., 2010). Dans la distinction

commune entre le « gouvernement » et la « gouvernance », cette dernière

est généralement considérée comme faisant référence spécifiquement à des

mécanismes de coordination ne reposant pas sur l’autorité et les sanctions

dont se prévalent les États (Stoker, 1998). Cela traduit la reconnaissance

que l’État et son appareil bureaucratique ne sont pas suffisants en soi pour

fournir tous les biens publics (Grant et al., 2016), ni du reste tous les autres

engagements inhérents. La gouvernance forestière ne se limite pas à

l’application des réglementations forestières, mais fait référence aux cadres

politiques, institutionnels et culturels par lesquels les divers intérêts dans les

ressources forestières sont coordonnés et contrôlés (Cronkleton et al., 2008).

La gouvernance intègre : a) les règles adoptées pour organiser et gérer les

activités afin de servir des objectifs sociaux plus vastes et de régler les conflits

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FIGURE 01

PILIERS ET PRINCIPES DE LA GOUVERNANCE (BANQUE MONDIALE)

RESPONSABILITÉ

EFFICIENCE

EFFICACITÉ

EQUITÉ

PARTICIPATION

TRANSPARENCE

POLITIQUE,

CADRE

INSTITUTIONNEL

JURIDIQUE ET

RÉGLEMENTAIRE

PROCESSUS DE

PLANIFICATION

ET DE PRISE DE

DÉCISIONS

PLANIFICATION

APPLICATION

DE LA MISE

EN ŒUVRE ET

CONFORMITÉ

entre groupes de parties prenantes ; b) le fonctionnement des institutions et leur

acceptation par le public ; c) et l’efficacité de l’administration publique au sens

large (Laird et al., 2010). Certains principes de bonne gouvernance forestière

comprennent (Higman et al., 2005):

• l’État de droit, ou lorsque des cadres juridiques équitables appliqués

avec impartialité s’avèrent nécessaires ;

• la transparence, ou lorsque les décisions sont prises conformément aux

règles convenues ;

• l’équité, ou lorsque les citoyens ont le sentiment qu’ils font partie

intégrante et ne sont pas exclus de la société ;

• l’efficacité, ou lorsque les citoyens et les institutions produisent des

résultats répondant aux besoins de la société tout en faisant le meilleur

usage des ressources à leur disposition ;

• l’obligation de rendre compte, ou lorsque les institutions

gouvernementales, les entreprises du secteur privé et les organisations de

la société civile rendent des comptes à celles et ceux qui sont affectés par

leurs actions.

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3.2 Le commerce du bois en Afrique

Un rapport récent commis par l’OIBT (Erling et al., 2016) sur les échanges

commerciaux issus du secteur formel du bois (les échanges via les ports

maritimes) estime qu’en 2013, l’Afrique a exporté pour près de 4,5 milliards

d’USD de produits ligneux. Les trois quarts de ces exportations étaient des

produits non transformés (billes de bois, sciages et contreplaqué), contre un

quart de produits transformés. Les billes de bois et les sciages continuent de

représenter plus de la moitié des exportations régionales. Les exportations de

billes de bois sont restées étales, autour de un milliard d’USD, tandis que les

exportations de sciages se sont chiffrées autour de 1,4 milliard d’USD en 2013,

s’inscrivant en légère hausse. Seulement 8,3 % du total (92 millions d’USD)

étaient orientés vers les marchés intrarégionaux. Au cours de la même année,

l’importation de produits ligneux en Afrique s’est chiffrée à 6,5 milliards d’USD.

Les importations intrarégionales sur le continent africain se sont élevées à 526

millions d’USD, soit 8 % du total. Toujours en 2013, la valeur des importations

de billes de bois s’est établie à 445 millions d’USD, affichant une légère baisse.

Les sciages ont constitué la plus grande importation du pays, avec 31 % du

total, soit deux milliards d’USD.

En outre, il existe d’importants flux du volume ligneux par voie terrestre en

Afrique qui ne font pas l’objet d’un suivi systématique. Un rapport d’Eba’a Atyi

et al. (2016) estime que les exportations annuelles du Cameroun en direction des

pays voisins (principalement le Tchad et le Nigeria) se situaient à 200 000 m3 de

sciages. De la même manière, la République démocratique du Congo (RDC) et

la Côte d’Ivoire exportent respectivement 150 000 m3 et 120 000 m3 de sciages

vers les pays voisins. Par ailleurs, l’exportation par voie terrestre de bois et de

produits du bois à partir du Ghana jusqu’aux pays voisins s’établit, selon les

estimations, à 115 000 m3 (Marfo et al., 2014).

Les principaux pays africains exportateurs de produits ligneux (principalement

vers l’Europe et l’Asie) sont issus des sousrégions d’Afrique centrale et de

l’Ouest. Les pays d’Afrique centrale (Gabon, Cameroun, République du

Congo, République centrafricaine et République démocratique du Congo)

exportent annuellement près de cinq millions de m3 d’équivalent bois rond

(EBR), lorsque l’on assiste tous les produits (FAO, 2011). L’Asie (en particulier

la Chine) représente environ 50 % de ce volume. Les principaux exportateurs

vers l’Asie et l’Europe sont le Gabon et le Cameroun, dans cet ordre. Ces deux

pays fournissent également des produits ligneux aux marchés intraafricains.

Toutefois, les exportations totales vers les marchés africains ne représentent

que près de 10 % des exportations moyennes d’EBR provenant de ces deux

pays.

En Afrique de l’Ouest, trois pays – Liberia, Ghana et Côte d’Ivoire – exportent

des produits ligneux. Selon la base de données de l’OIBT, les exportations

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ghanéennes annuelles de produits transformés se situent autour de 448 000 m3.

Les rapports établis par le ministère en charge des forêts en Côte d’Ivoire

montrent que les exportations de bois vers les marchés outremer avoisinent les

350 000 m3 par an. Comme le Ghana, la Côte d’Ivoire n’exporte pas de grumes.

Les forêts du Liberia produisent entre 200 000 m3 et 250 000 m de bois chaque

année, dont l’essentiel est exporté vers la Chine et l’Europe (principalement la

France), en général sous forme de grumes.

En Afrique de l’Est et australe, le Mozambique, qui est également un pays

producteur membre de l’OIBT, exporte environ 250 000 m3 par an, principalement

vers la Chine.

Les principaux pays importateurs de bois se trouvent en Afrique du Nord et

représentent environ 60 % de toutes les importations de produits ligneux

d’Afrique (Erling et al., 2016). L’Afrique australe concentre quant à elle près

de 25 % des importations totales. Les importations de bois en provenance

de l’extérieur du continent africain sont en augmentation. S’agissant de la

composition des produits, la tendance pour les billes de bois est que les pays

d’Afrique du Nord importent des billes de bois non transformées hors d’Afrique,

alors que les pays importateurs de grumes en Afrique de l’Ouest (Ghana,

Mauritanie, Nigeria) et en Afrique de l’Est et australe (Zambie, Mozambique,

Tanzanie, Rwanda, Namibie et Afrique du Sud) se ravitaillent en billes de bois

auprès d’autres pays africains.

La situation est quelque peu différente pour les produits transformés, même si

l’Égypte, le plus gros marché d’importation des produits ligneux en Afrique, tire

la plus grande partie de son approvisionnement hors d’Afrique.

Les producteurs et exportateurs africains de produits ligneux outremer et par

voie terrestre se trouvent principalement en Afrique centrale (dans le bassin

du Congo), en plus de quelques autres pays exportateurs basés en Afrique

de l’Ouest et en Afrique de l’Est (voir la figure 3). En revanche, les pays

importateurs de produits ligneux sont les pays d’Afrique du Nord, de l’Ouest, de

l’Est et australe. Si l’on excepte le Tchad (qui importe principalement le bois scié

artisanal), on peut dire que l’Afrique centrale n’est pas un marché d’importation,

du moins pour ce qui concerne les billes de bois et les produits primaires

transformés tels que le bois d’œuvre ou le contreplaqué. On peut intégrer les

marchés d’exportation et d’importation en Afrique, à condition de favoriser le

commerce intraafricain de produits ligneux qui s’effectuerait dans un cadre

plus légal et moins informel. Cela pourrait générer des dividendes importants

pour les populations africaines, qu’elles vivent dans les pays exportateurs de

bois ou dans ceux qui importent cette matière première. Une telle intégration

peut être facilitée par des communautés sousrégionales comme la Cédéao, la

CEEAC, l’ECEAS et la SADC qui pourraient œuvrer pour éliminer les entraves au

commerce et réduire les coûts de transaction.

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

FIGURE 02

PRINCIPALES DESTINATIONS DES EXPORTATIONS DE PRODUITS LIGNEUX ISSUS D’AFRIQUE

FLUX IMPORTANT

FLUX MOVEN

FLUX MOINS IMPORTANTS

TRÈS PETITS FLUX

SOUS-RÉGION DE L’AFRIQUE DU NORD

SOUS-RÉGION DE COMESA

SOUS-RÉGION DE LA SADC

SOUS-RÉGION CEEAC

SOUS-RÉGION CEDEAO

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FIGURE 03

FLUX COMMERCIAUX INTRAAFRICAINS DE PRODUITS LIGNEUX

3.3 La production industrielle de bois en Afrique : le modèle des

concessions forestières

La majeure partie des produits ligneux africains exportés vers les marchés

internationaux provient d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Ouest. En Afrique de

l’Ouest (à l’exception peutêtre du Liberia), toutes les forêts tropicales fermées

(ou tout au moins la quasitotalité d’entre elles) ont déjà subi au moins une coupe

de bois. Par contre, en Afrique centrale, les forêts faciles d’accès ont fait l’objet

de coupes à blanc, mais la sousrégion recèle toujours de vastes zones de forêts

primaires (OIBT, 2005). Dans l’ensemble, les concessions forestières à long

terme et à grande échelle gérées de façon privée dominent la production de bois

en Afrique centrale (en l’occurrence dans le bassin du Congo). La plupart des

compagnies forestières actives sont à capitaux étrangers ; leurs actionnaires

traditionnels sont des investisseurs européens, même si les investisseurs

asiatiques sont de plus en plus nombreux.

L’origine du modèle des concessions forestières remonte à l’ère coloniale

(Karsenty, 2007). Toutefois, le régime de gouvernance en vigueur actuellement

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

découle largement de deux processus qui ont eu cours deux dernières décennies :

d’une part, un ensemble d’ajustements structurels macroéconomiques ; d’autre

part, un engagement politique en faveur de la gestion durable des ressources

forestières devenu manifeste dans le programme d’action international adopté

lors du Sommet de la Terre qui s’est tenu à Rio de Janeiro au Brésil en 1992

(Cerutti et al., 2016b).

L’OIBT a une opinion plutôt positive des concessions forestières, car elles

font partie du domaine forestier permanent (DFP). Les politiques de l’OIBT

insistent sur la nécessité que les pays établissent un DFP, constitué de certaines

catégories de terre, publiques ou privées, qui doivent être conservées sous

un couvert végétal permanent afin de garantir leur contribution optimale

au développement national. Une telle permanence est l’une des conditions

requises pour une gestion durable des forêts (GDF). Trois catégories de

forêts sont incluses dans le domaine forestier permanent, à savoir : a) les

forêts de protection sur les terres fragiles ; b) les forêts mises de côté pour la

conservation des plantes, des animaux et des écosystèmes ; c) et les forêts

de production (OIBT, 2005 ; OIBT, 2011). Les concessions forestières sont

constituées de forêts de production dans un DFP. En Afrique, les concessions

forestières sont gérées pour les cycles de coupe qui varient de 25 à 40 ans.

Dans le bassin du Congo, le cycle de coupe (autrement dit l’intervalle en années

entre deux récoltes successives de bois sur la même parcelle) s’établit à 30 ans

pour les concessions forestières industrielles. Dans le bassin du Congo, les

concessions forestières répondent à des critères de gestion particuliers et à des

dénominations spécifiques pour chaque pays (voir tableau 2).

Audelà des concessions forestières du DFP et de celles qui n’en font pas partie,

on retrouve des ressources forestières dans la forêt non permanente que l’on

peut convertir en d’autres types d’exploitation des terres tels que l’agriculture.

C’est dans une telle situation que la récolte industrielle de bois s’effectue

également dans des forêts non permanentes.

Le Gabon est un exemple typique des approches de l’aménagement forestier

qui ont cours au niveau du bassin du Congo (voir l’annexe 1c). En 2001, le

Gabon a adopté le principe de la gestion durable des forêts (GDF), moyennant

des concessions forestières conformes à la nouvelle réglementation forestière.

La loi distingue quatre types de permis de coupe, à savoir : a) les permis

forestiers associés (PFA), qui couvrent jusqu’à 15 000 ha ; b) les concessions

forestières d’aménagement durable (CFAD), qui couvrent jusqu’à 200 000 ha ;

c) les forêts communautaires, pour un maximum de 5 000 ha ; et d) les permis

de gré à gré (PGG), qui sont accordés en fonction du nombre d’arbres à couper.

Les CFAD sont généralement accordées aux grandes compagnies forestières à

capitaux étrangers – asiatiques ou européens –, alors que les PFA sont octroyés

Page 19: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

TABLEAU 02

FOREST CONCESSION TYPES IN CONGO BASIN COUNTRIES

Pays Types de concessionTaille maximale

(hectares – ha)Durée du don Critères de gestion

Cameroun

Concession de bois 200 00015 ans,

renouvelable

Plan d’aménagement forestier

Cycle de coupe de 30 ans

Forêt communale Non déterminée Non déterminéePlan d’aménagement forestier

Cycle de coupe de 30 ans

Forêts communautaires 5 000 Non déterminéePlan d’aménagement simple

Cycle de coupe de 25 ans

Gabon

CFAD (concession forestière

sous aménagement durable)600 000 Non déterminée

Plan d’aménagement forestier

Plan d’industrialisation

PFA (permis forestier associé) 50 000 Non déterminéeÀ intégrer dans une CFAD, ou

Regroupement de plusieurs DFP

RCAPEA (permis d’exploitation et

d’aménagement forestier)Non déterminée Non déterminée

Plan d’aménagement forestier

Compagnie de transformation du bois

République du Congo

Concession de transformation

industrielleNon déterminée

15 ans,

renouvelablePlan d’aménagement forestier

Convention d’aménagement et

de transformationNon déterminée

25 ans,

renouvelablePlan d’aménagement forestier

RDCConcession d’exploitation de

boisPlan d’aménagement forestier

à des entreprises locales de plus petite taille (même si elles peuvent être gérées

conjointement avec des CFAD). Les PGG sont souvent accordés aux élites

locales qui vendent des arbres sur pied aux compagnies forestières ou à des

exploitants à la tronçonneuse. Les forêts communautaires se développent

lentement.

En Afrique de l’Ouest, il existe des différences majeures entre le Ghana

et la Côte d’Ivoire, d’un côté, et le Liberia, de l’autre. Au Ghana et en Côte

d’Ivoire, l’exploitation forestière à des fins de transformation industrielle et

d’exportation outremer se produit principalement dans des forêts secondaires

non permanentes. On estime que plus de 80 % du bois qui approvisionne

l’industrie forestière au Ghana est prélevé en dehors des réserves forestières

(horsréserves).

En Côte d’Ivoire, le domaine forestier est subdivisé en deux catégories : le

domaine forestier permanent et les forêts relevant du domaine rural dont les

terres peuvent être converties pour être utilisées à d’autres fins. Le domaine

forestier permanent comprend 231 forêts classées (voir l’annexe 1A) qui sont

placées sous la gestion de la Société de développement des forêts (Sodéfor),

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20

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

un organisme parapublic créé en 1966. Même si les forêts classées sont

destinées exclusivement à la production de bois et, en principe, ne peuvent pas

être converties à d’autres types d’utilisation, elles sont tout de même gravement

touchées par la recherche de terres de culture. Selon des estimations, les

taux d’empiètement varient de 50 % (selon le gouvernement) à 90 % (selon la

société civile).

Le domaine rural est constitué de forêts secondaires (à l’exclusion des

forêts galerie), qui ont été subdivisées en 387 lots boisés appelés périmètres

d’exploitation forestière (PEF) qui relèvent de l’administration centrale du

ministère de l’Eau et des Forêts (Minef). Les PEF sont octroyés aux entreprises

privées aux fins d’exploitation forestière, sur la base d’un système de quotas

mis en place par le Minef. On estime que ces PEF sont aussi très dégradés, et

les besoins des entreprises privées augmentent à mesure que le volume de bois

récoltable par zone d’opération diminue fortement.

Le Liberia compte la plus forte densité de forêts en Afrique de l’Ouest, car il recèle

environ 40 % de toutes les forêts denses de la sousrégion (annexe 1B). Certains

acteurs (en particulier la Forestry Development Authority – FDA) estiment que

50 % des forêts libériennes peuvent toujours être considérées comme des

forêts « intactes ». Certes, aucun inventaire complet des forêts n’a été effectué,

mais on estime le couvert forestier du Liberia à quatre millions d’hectares, dont

un million d’hectares d’aires protégées. Outre les accords d’aménagement

des forêts communautaires, trois types de titres d’exploitation forestière

peuvent être accordés à des compagnies ou à des particuliers, à savoir : le

contrat d’aménagement forestier (FMC), qui devrait être assujetti à un plan

d’aménagement forestier adossé sur un cycle de coupe de 25 ans minimum ;

les contrats de vente de bois (TSC) octroyés pour trois ans et couvrant une

superficie maximale de 5 000 ha (après l’exploitation, les autres zones faisant

l’objet de TSC peuvent être converties pour être utilisées à d’autres fins) ; et les

permis d’exploitation privée, qui ne sont assujettis à aucune réglementation.

Jusqu’à présent, aucun plan d’aménagement privé n’est appliqué au Liberia.

3.4 Les enjeux de la gouvernance du secteur forestier en Afrique

Les parties prenantes ont identifié un certain nombre de problèmes de

gouvernance forestière énumérés ciaprès dans tous les pays visités et par

extension dans la majorité des pays africains. Ces problèmes sont décrits

ciaprès.

La mauvaise application des lois et des réglementations forestières. Dans

certains pays africains, les cadres juridiques et réglementaires qui régissent

le secteur des forêts sont obsolètes. Quelle que soit la qualité des lois et des

réglementations en vigueur, le problème de fond semble résider dans la flexibilité

Page 21: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

au niveau de leur application. Le sentiment général est que l’application des

réglementations forestières laisse à désirer, et cette faiblesse découle des

pratiques de corruption et du trafic d’influence pratiqué par les élites politiques

et économiques des pays.

L’influence politique inopportune dans la formulation des politiques et la prise de

décisions en matière forestière. Malgré la volonté politique si souvent affichée

de lutter contre les pratiques illégales et de favoriser la durabilité dans le secteur

forestier, les ressources forestières attisent beaucoup de convoitises chez les

hommes politiques et sont un objet de pression politique dans tous les pays,

surtout lors de l’octroi de titres d’exploitation forestière. La pression politique

est donc la principale cause du manque de transparence dans la prise des

décisions concernant le secteur forestier en Afrique.

Le manque de planification de l’utilisation des terres. La pression est souvent

exercée sur les ressources forestières en dehors du secteur forestier, y compris

à partir de l’agriculture, des mines et du développement des infrastructures.

Ces secteurs ont un intérêt légitime dans l’utilisation des terres, ce qui signifie

qu’il faudrait engager un processus conscient d’aménagement des terres

pour garantir le développement de tous ces secteurs sur le territoire national.

Malheureusement, dans la majorité des pays africains, il n’existe pas de plans

d’utilisation des terres susceptibles de contribuer à l’existence continue d’un

domaine forestier permanent, concomitamment à d’autres utilisations de la

terre.

Le manque de coordination entre les départements ministériels concernés.

La majorité des pays d’Afrique se sont dotés de stratégies de développement

national pour les dix à vingt prochaines années. Dans la plupart des cas,

ces stratégies se fondent sur le développement agricole et l’utilisation des

ressources naturelles. Toutefois, la coordination entre les politiques sectorielles

par l’intermédiaire des départements ministériels reste faible. Dans bien des cas,

le ministre en charge de l’agriculture alloue les terres boisées au développement

d’agroindustries sans pour autant consulter le ministère des Forêts.

Un secteur informel dominant et mal contrôlé. D’une manière générale,

les systèmes d’exploitation forestière et de transformation du bois utilisés

dans les pays africains ont été conçus pour desservir les marchés outremer.

L’approvisionnement des marchés nationaux est assuré par le secteur informel,

dans lequel quantité de petits exploitants à la tronçonneuse abattent le bois, le

transforment et vendent des produits ligneux sans le moindre suivi. Cependant,

ces vingt dernières années, la croissance sur les marchés nationaux et régionaux

a dépassé celle des marchés internationaux malgré l’émergence de marchés en

Asie. Par conséquent, le secteur informel qui fournit des produits ligneux aux

Page 22: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

ENCADRÉ 01

RÉSUMÉ DU CAS DE L’INDONÉSIE

L’APV/FLEGT entre l’Indonésie et l’UE embraie sur

les efforts que déploie l’Indonésie pour lutter contre

l’exploitation illégale du bois, en particulier son

système de vérification de l’origine légale du bois

(SVLK). Les deux parties ont négocié l’APV entre

2007 et 2011. En septembre 2013, Bruxelles et

Jakarta ont signé un APV (connu sous l’appellation

de Loi portant régime de l’exploitation du bois) et

ratifié l’accord en 2014. L’APV est entré en vigueur

le 1er mai 2014. Il s’agit d’un accord commercial

juridiquement contraignant. Le but du processus

APV engagé entre l’Indonésie et l’UE est de

mettre en place un cadre juridique garantissant

que tous les produits ligneux (tels que couverts

par l’accord) importés dans l’espace européen à

partir de l’Indonésie aient été récoltés légalement.

En plus de la promotion du commerce légal, l’APV

s’attaque aux causes de l’illégalité en améliorant

la gouvernance forestière et l’application des

réglementations. Une force majeure de cet accord

est qu’il va audelà du commerce pour analyser les

questions environnementales et de développement,

tout comme la façon dont les politiques affectent les

populations locales.

L’APV entre l’Indonésie et l’UE décrit un système

de vérification de l’origine légale du bois capable

de garantir que le bois et les produits ligneux

générés et transformés en Indonésie proviennent

de sources légales et sont pleinement conformes

aux législations indonésiennes, tel que certifié par

un audit indépendant suivi par la société civile.

Le système de vérification de l’origine légale du

bois décrit dans l’APV est fondé sur le SVLK de

l’Indonésie.

Les autorités indonésiennes ont pris un certain

nombre de mesures importantes pour combattre

l’exploitation forestière illégale du bois et le commerce

qui y est associé, particulièrement avec la ratification

de l’APV en 2014. Le processus de négociation de

cet accord a contribué à l’introduction du SVLK et

à la clarification du cadre juridique pertinent. Il a

aussi sensiblement amélioré la collaboration avec

les parties prenantes du secteur forestier. Des

développements importants ont également eu lieu

en ce qui concerne la reconnaissance des droits de

propriété des populations autochtones sur les terres

forestières et les ressources associées. Toutefois, la

mise en œuvre et l’application restent un enjeu. En

particulier, les progrès sont entravés par un système

de gouvernance peu performant et décentralisé, la

corruption rampante et le manque de transparence

dans les informations.

Avant que les autorisations FLEGT ne puissent

démarrer, une évaluation conjointe doit confirmer

que le système de vérification de l’origine légale du

bois exploité en Indonésie fonctionne comme cela

est décrit dans l’APV. En effet, en septembre/octobre

2014, l’évaluation conjointe du système de vérification

de l’origine légale du bois exploité a identifié des

problèmes à résoudre avant l’autorisation. Le 21

avril 2016, le président indonésien et le président

de la Commission de l’Union européenne ont

convenu d’évoluer rapidement vers la réduction de

l’exploitation forestière illégale et la promotion du

commerce du bois récolté légalement entre l’UE et

l’Indonésie, dans le cadre du tout premier régime

d’autorisations FLEGT. L’annonce était fondée sur

l’évaluation conjointe qui a révélé que l’Indonésie

est fin prête pour appliquer son APV, sur la base de

l’inclusion de tous les groupes de produits pertinents

dans le champ d’application de l’accord. Avec cette

avancée probante, les deux parties sont disposées à

évoluer rapidement vers un système d’autorisations

pleinement opérationnel, ce qui fera de l’Indonésie

le premier pays à parachever cette étape finale du

processus FLEGT. L’accord stimulera le commerce

légal, modernisera et formalisera davantage le

secteur forestier indonésien et améliorera les

pratiques commerciales, permettant à de nombreux

milliers d’entreprises de combler la demande des

marchés en bois légal et produits connexes.

Page 23: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

23

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

marchés intérieurs et intraafricains a plus d’impact sur les forêts que le secteur

industriel. Ceci est particulièrement vrai parce qu’il n’existe pas de systèmes de

suivi du secteur informel, où règne l’illégalité.

3.5 L’évaluation des initiatives visant à lutter contre l’exploitation

forestière illégale et à promouvoir la gouvernance forestière en Afrique

La sensibilisation générale aux effets négatifs de la mauvaise gouvernance

forestière sur le développement économique a été étendue au secteur de

l’environnement dans les années 1990, contribuant à faire de l’exploitation

forestière illégale un enjeu politique majeur (Tacconi, 2007). En réalité,

l’exploitation forestière illégale est soupçonnée d’avoir une influence très

négative sur la diversité biologique forestière, l’habitat faunique, la qualité

des sols, l’accès à l’eau, la pauvreté et les émissions de gaz à effet de serre

(EFI, 2011). En outre, l’exploitation forestière illégale a été reconnue comme

ayant un coût social élevé compte tenu des recettes qui échappent aux pouvoirs

publics dans des pays producteurs de bois (Brown et al., 2007) tels que ceux

d’Afrique centrale. Qui plus est, de nombreux éléments factuels attestent que

l’exploitation illégale du bois a des effets négatifs sur les conditions d’existence

des populations pauvres qui tirent leur subsistance de la forêt. Ces effets

négatifs sont liés au fait que ces populations vivent dans le proche voisinage

d’une industrie non réglementée, et sont donc ainsi exposées à la dégradation

des forêts et aux dégâts environnementaux qui l’accompagnent (SAMFU, 2002).

3.5.1 Application des réglementations forestières africaines et gouvernance

L’Initiative pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance

en Afrique (AFLEG) a été lancée lors d’une conférence ministérielle qui s’est

tenue à Yaoundé au Cameroun en octobre 2003. La conférence s’est achevée

par la Déclaration et le Plan d’action AFLEG. Dans la déclaration, les États ont

exprimé leur intention, entre autres, de mobiliser des ressources financières

pour appliquer les réglementations forestières et la gouvernance ; de fournir

des opportunités économiques aux communautés qui tirent leur subsistance

des forêts afin de réduire les activités illégales ; de favoriser la coopération

entre les organismes chargés de l’application des réglementations au sein des

pays et entre eux ; d’impliquer les parties prenantes dans la prise de décision ;

de susciter une prise de conscience des questions relatives à l’application

des réglementations forestières et de la gouvernance ; et d’étudier des voies

et moyens susceptibles de démontrer la légalité et la durabilité des produits

forestiers. Ndikumangenge et al. (2016) identifient un certain nombre de

résultats positifs auxquels l’initiative AFLEG a pu contribuer, et qui comprennent

les réformes juridiques et institutionnelles du secteur forestier dans les pays

du bassin du Congo, la mise en place de nouveaux systèmes de contrôle

de l’exploitation forestière, un meilleur suivi des activités forestières et une

participation accrue des parties prenantes à la gestion forestière.

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Même si elle a pu inspirer certaines réformes des politiques forestières

sousrégionales (surtout en Afrique centrale et australe) et nationales, l’AFLEG

a été purement et simplement abandonnée car la volonté politique ne s’est pas

traduite en mobilisation de ressources financières.

3.5.2 Le Plan d’action pour l’application des réglementations forestières, la

gouvernance et les échanges commerciaux (FLEGT)

La politique de l’Union européenne visant à régler le problème croissant posé

par l’exploitation forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé a

été définie en 2003, dans le cadre du Plan d’action FLEGT. Le plan a abouti à

l’élaboration de deux instruments clés (CE, 2011), à savoir :

• la publication 2005 de la réglementation FLEGT, qui régule l’entrée dans

l’espace européen du bois provenant des pays ayant négocié des APV/

FLEGT avec l’UE ;

• la réglementation du bois 2010, une mesure phare prise par l’Union

européenne pour interdire le placement du bois et de produits ligneux

illicites dans les marchés internes de l’Union.

a) Contexte et justification du Plan d’action FLEGT

Le Plan d’action FLEGT met sur pied un processus et un ensemble de mesures par

lesquelles la Commission européenne se propose de lutter contre l’exploitation

forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé (CE, 2003). La

Commission européenne a considéré le plan comme l’une des priorités dans

le cadre du suivi du Sommet mondial de 2002 sur le développement durable.

Le Plan d’action FLEGT met l’accent sur la réforme de la gouvernance et le

renforcement des capacités et inclut des mesures axées sur la demande,

destinées à réduire la consommation du bois récolté illégalement dans l’UE et

à travers le monde. Le plan d’action a été adopté pour traiter uniquement de la

question de la légalité, même si l’objectif plus large de l’UE est d’encourager

la gestion forestière durable. L’on espère qu’une meilleure application des

réglementations aboutira dans l’absolu à une gestion forestière plus durable,

conformément à la recommandation formulée lors du Sommet de la Terre qui

s’est tenu à Rio en 1992.

Le plan d’action comprend des dispositions sur l’appui aux pays exportateurs

de bois, la lutte contre le commerce illicite de bois, les politiques de passation

de marchés publics pour les États membres de l’UE, le soutien aux initiatives du

secteur public fondées sur les principes de la responsabilité sociale d’entreprise,

le financement et l’investissement, ainsi que les liens avec les instruments

législatifs existants dans l’espace de l’UE et le « bois de la guerre ».

Une composante essentielle de la mise en œuvre du Plan d’action FLEGT est un

régime d’autorisation volontaire proposé par la Commission européenne. Les

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

exportations de bois de chaque pays partenaire devraient être accompagnées

d’un permis d’exportation émis si le bois a été récolté conformément à la

législation nationale en vigueur. Le bois issu d’un pays partenaire FLEGT qui arrive

à un point d’importation de l’UE ne devrait pas être autorisé à circuler librement

dans l’espace européen sans un tel permis. En 2005, la Commission européenne

a adopté une réglementation sur la création d’un régime d’autorisations FLEGT

pour les importations de bois en direction de l’espace européen (CE, 2005). La

réglementation définit les produits couverts, décrit le permis ou l’autorisation

nécessaire pour vérifier que le bois a été prélevé légalement, et précise la nature

tout comme le mandat de tout organisme consultatif ou de gestion mis en place

pour assister la Commission européenne.

b) Application de l’APV/FLEGT

Le processus APV/FLEGT se déroule en quatre phases essentielles, à savoir la

prénégociation, la négociation, la mise en œuvre de l’APV/FLEGT et le pilotage,

le suivi et l’évaluation de l’émission des autorisations FLEGT (Comifac, 2016).

La prénégociation regroupe l’ensemble des actions nécessaires pour créer des

conditions propices au lancement de négociations. La phase de prénégociation

est caractérisée par des consultations informelles. Cette phase est constituée

d’un certain nombre d’études et de diagnostics visant à déterminer le statut de

la gouvernance forestière et l’application des réglementations forestières dans le

pays partenaire FLEGT potentiel de l’UE, à identifier les groupes d’intervenants

potentiels en vue de la constitution de plateformes de négociation et à informer

toutes les parties du Plan d’action FLEGT afin de trouver un consensus national

préalablement aux négociations avec l’UE. Souvent, le résultat principal de la

prénégociation est une lettre d’intention que le pays partenaire FLEGT potentiel

envoie à la Commission européenne, ainsi que la signature d’une déclaration

commune pour le lancement des négociations formelles.

La phase de négociation. Les négociations se déroulent aux niveaux politique

et technique. Au niveau politique, les points discutés concernent les principes

de base de l’accord, la mise en place d’institutions de négociation au sein

desquelles tous les groupes de parties prenantes doivent être représentés, les

mécanismes de fonctionnement interne et l’élaboration de feuilles de route et

de chronogrammes pour les négociations. Au niveau technique, les principaux

points comprennent la définition d’une grille de légalité et la mise en place des

systèmes de vérification de la légalité (SVL). La deuxième phase devrait se

traduire par la signature de l’accord, qui pourrait être ratifié plus tard..

La phase de mise en œuvre commence par les organes d’exécution de

l’APV et l’institution des SVL. En outre, des mesures habilitantes sont prises

en vue d’émettre des autorisations FLEGT dans un environnement crédible.

Les conditions propices concernent les aspects techniques, administratifs,

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juridiques et éthiques. La troisième phase devrait aboutir à l’émission des

autorisations FLEGT et des procédures connexes à l’accès aux marchés du

bois de l’UE.

Le suivi et l’évaluation comprennent un audit indépendant du système mis en

place, le suivi des institutions créées pour l’application conjointe de l’accord et

l’évaluation des impacts des accords, ainsi que les enseignements tirés et les

recommandations formulées dans le but d’améliorer le système.

c) L’évaluation générale du Plan d’action FLEGT

Le processus FLEGT a fait l’objet de multiples évaluations internes et externes

ces dernières années. L’un des rapports d’évaluation les plus récents et les

plus complets a été publié par TERREA en avril 2016. Depuis le lancement

de FLEGT en 2003, six pays ont conclu des APV avec l’UE : il s’agit de cinq

pays africains – le Ghana (en 2009), le Cameroun (en 2010), la République

du Congo (en 2010), le Liberia (en 2012) et la RCA (en 2012) – et d’un pays

asiatique (l’Indonésie, en 2013). Malgré le fait que les pays africains étaient

les premiers à négocier des APV avec l’UE, l’Indonésie est en bonne voie pour

devenir le premier pays à émettre des autorisations FLEGT (encadré 2). Outre

les pays qui ont signé des APV, neuf autres ont entamé des négociations avec

l’Union européenne, à savoir la Malaisie (depuis 2006) ; le Gabon, la RDC et le

Vietnam (depuis 2010) ; Guyana et le Honduras (depuis 2012) ; la Côte d’Ivoire,

la République démocratique populaire lao, ainsi que la Thaïlande (depuis 2013).

L’évaluation globale effectuée par TERREA (en 2016) montre que, dans les

pays producteurs, le Plan d’action FLEGT a effectivement contribué à une

« meilleure gouvernance », même si la grande diversité des pays rend difficile

toute généralisation. Les réalisations les plus importantes semblent liées à

« l’équité » dans la participation des diverses parties prenantes nationales au

processus APV. Cependant, Eba’a Atyi et al. (2013) ont fait observer que les

petits aménagistes forestiers pourraient être réduits à la faillite si les APV étaient

appliqués de façon stricte sans bénéficier d’un concours complémentaire des

pouvoirs publics ou des autres partenaires.

L’opinion globale de TERREA (2016) sur l’impact de l’initiative FLEGT est reflétée

dans l’affirmation que de nombreux pays ont réalisé des progrès remarquables

sur le front de la transparence, même si les travaux effectués sur le système de

vérification de la légalité ont été moins efficaces. Le renforcement des capacités

de la société civile et des administrations publiques a été relativement efficace,

mais la participation effective des parties prenantes du secteur privé est

restée faible, en dépit d’un certain nombre d’initiatives menées par des ONG

internationales et des associations professionnelles. Dans nombre de pays,

les premières mesures de réforme des politiques forestières ont été prises,

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ENCADRÉ 02

RÉSUMÉ DE L’INITIATIVE APV/FLEGT AU CAMEROUN

Les négociations de l’APV entre le Cameroun et l’Union

européenne ont démarré en novembre 2007 et se sont

poursuivies pendant plus de deux ans. L’APV/FLEGT

entre la République du Cameroun et l’UE a été signé le

6 octobre 2010. L’objectif de cet accord est de renforcer

la gouvernance forestière et promouvoir le commerce du

bois légal vérifié. Cet accord prévoit l’établissement d’un

régime d’autorisation FLEGT qui s’appuie sur un ensemble

de critères définis dans la législation camerounaise et

applicables au secteur forestier, ainsi que les processus de

contrôle et de vérification renforcés, en plus du mécanisme

d’audit indépendant dont l’objectif est de garantir la

légalité du bois et de ses produits dérivés exportés vers

l’UE. L’accord est entré en vigueur le 1er décembre 2011.

Il établit également les mesures à prendre pour assurer la

participation des principales parties prenantes dans sa mise

en œuvre et formule les engagements visant à renforcer la

transparence et à faire en sorte que le public soit mieux

informé. L’APV est un accord commercial juridiquement

contraignant qui établit les engagements et les mesures

que les autorités camerounaises prendront pour combattre

l’exploitation illicite du bois et le commerce qui y est

associé, afin de renforcer la gouvernance forestière et de

promouvoir la gestion durable des forêts. Toutefois, la mise

en œuvre de l’APV au Cameroun a rencontré un certain

nombre de défis auxquels il faut répondre avant la mise

en œuvre du système de validation de la légalité. L’entrée

en vigueur du Règlement bois de l’Union européenne rend

une telle réflexion encore plus urgente, pour les raisons

suivantes :

• Les procédures de vérification de la légalité. La

garantie de la conformité légale des bois exportés

dans le territoire de l’UE dès le début effectif du

régime d’autorisation FLEGT constitue l’un des

défis majeurs auxquels les parties à l’accord doivent

faire face. Ainsi, l’Accord prévoit la mise en place

d’un système de vérification de la légalité (SVL)

entièrement décrit dans son annexe IIA et dont le but

est d’assurer la crédibilité des autorisations FLEGT.

En outre, le système de traçabilité, sur lequel repose

le SVL des bois et des produits dérivés, est encore en

cours d’élaboration.

• La définition de la légalité et évolution de la

réglementation. L’APV a pour objet de fournir un

cadre juridique permettant de s’assurer que seuls des

bois et produits dérivés légalement produits ou acquis

sont importés par l’UE à partir du Cameroun. L’accord

prévoit que des réformes juridiques et réglementaires

à court et moyen terme soient réalisées dans l’optique

d’assurer une meilleure cohérence du cadre juridique

applicable au secteur forestier. Ces réformes sont

encore en préparation.

• Le marché intérieur du bois. Le marché intérieur du

bois a été créé afin de mieux organiser et canaliser la

chaîne d’approvisionnement du marché local par un

cadre formel. Au cours de l’année 2014, le ministère

des Forêts et de la Faune a déployé d’importants

efforts pour rapprocher le marché intérieur du bois

des opérateurs de la chaîne d’approvisionnement du

marché local.

• Commerce de bois autorisé FLEGT. L’Accord de

partenariat volontaire vise à établir un commerce

exclusivement légal en bois et produits dérivés entre

le Cameroun et l’Union européenne. On ne peut parler

de commerce de bois FLEGT sans faire allusion aux

autorisations FLEGT dont la délivrance n’est pas

encore effective au Cameroun en raison du niveau de

développement et de mise en place des composantes

du régime d’autorisation FLEGT.

• Renforcement institutionnel. L’APV/FLEGT entre le

Cameroun et l’Union européenne instaure un système

de vérification de la légalité (SVL) dont l’efficacité

est tributaire non seulement de la mise en place de

structures, mais aussi de la disponibilité de moyens

humains, matériels et financiers appropriés pour sa

mise en œuvre.

• Implication des parties prenantes et communications.

L’APV/FLEGT est un processus multiacteurs. Par

conséquent, sa mise en œuvre devait être participative

et transparente, et s’adosser sur la disponibilité des

informations et l’accès facile et continu à cellesci.

L’APV est officiellement en cours de mise en œuvre, mais

le pays reste confronté à de nombreux obstacles et défis.

Il est dès lors raisonnable de conclure que le Cameroun se

trouve encore dans la phase préparatoire.

Page 28: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

28

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

mais beaucoup reste à faire, particulièrement sur le plan de l’application de la

nouvelle législation.

L’organisation non gouvernementale Fern a réalisé une évaluation plus

systématique de l’initiative FLEGT, en utilisant les cinq piliers de la bonne

gouvernance (à savoir l’obligation de rendre compte, la transparence, la

coordination, la participation et les capacités) qui sont aussi en cohérence avec

le cadre FAOPROFOR institué pour l’évaluation et le suivi de la gouvernance

forestière (FAO, 2011). L’évaluation a mis en évidence les résultats suivants

(Fern, 2016) :

• la société civile considère l’APV comme une partie intégrante des

améliorations de la gouvernance forestière dans les pays, dont la

portée va audelà du processus APV (notamment la réforme juridique, la

responsabilisation et la coordination) ;

• la société civile décrit le rôle de l’APV dans l’amélioration de la gouvernance

forestière comme consistant à fournir la marge de manœuvre politique et

les structures dans lesquelles les organisations de la société civile (OSC)

étaient mieux outillées pour être des agents du changement ;

• le renforcement des capacités et de la participation des OSC génère les

améliorations les plus marquantes ;

• le changement marquant le moins perçu réside dans la coordination

gouvernementale.

Une analyse plus critique a été faite par Mediapart, un média en ligne français,

qui estime qu’avec l’initiative FLEGT, l’Europe a échoué à lutter contre le trafic

illégal de bois (Pigeaud, 2016). L’article de Médiapart estime que la Commission

européenne et les États membres de l’UE ont dépensé environ un milliard

d’euros (en fait 935 millions d’euros entre 2003 et 2014) au titre de FLEGT. Pour

l’auteur de l’article, l’argent dépensé n’a pas permis d’atteindre les objectifs

ciblés. L’article de Mediapart s’inspire largement du rapport publié par la Cour

des comptes européenne (2015), qui a conclu que :

• le soutien de FLEGT aux pays producteurs de bois n’était pas suffisamment

bien pensé ;

• le soutien de l’UE aux pays producteurs de bois n’était pas assez efficace.

La Cour des comptes européenne a ensuite fait quatre recommandations

principales concernant le plan de travail 20162020 : a) il doit être plus clair pour

ce qui est de ses objectifs, de ses échéances et de son budget ; b) la mise en

œuvre de la réglementation forestière de l’UE doit être plus stricte dans tous les

États membres de l’Union ; c) les régimes de certification privés peuvent être

mieux utilisés ; d) et l’allocation des ressources doit tenir compte des scénarios

dans lesquels existe une probabilité d’un impact majeur.

Page 29: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

29

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

d) Leçons tirées du processus APV/FLEGT en Afrique

Le processus FLEGT a été lancé quasiment au même moment que l’AFLEG, mais

avec de meilleures perspectives financières, ce qui a peutêtre eu pour résultat

l’engagement pris par certains pays africains d’entamer des négociations en

vue d’un APV avec l’UE. Jusqu’à présent, cinq pays africains ont conclu des

APV avec l’UE. Aucun de ces cinq pays n’a achevé la troisième phase, ce qui

signifie qu’aucune autorisation FLEGT n’a été délivrée par les pays partenaires

FLEGT en Afrique. Néanmoins, en s’appuyant sur l’achèvement des deux

premières phases du processus et sur les efforts déployés dans le cadre de la

troisième phase, on peut tirer un certain nombre d’enseignements.

Pour la phase de prénégociation, les principaux enjeux sont les suivants :

• veiller à ce que toutes les parties prenantes aient des informations exactes

et une bonne compréhension des objectifs et des impacts ciblés du

processus APV/FLEGT ;

• obtenir le consentement de tous les groupes de parties prenantes avant

que le pays ne s’engage dans le processus APV/FLEGT ;

• obtenir l’accord des représentants de tous les groupes d’intervenants

sur les modalités organisationnelles et de fonctionnement, en vue de

négociations justes et équitables pour toutes les parties impliquées ;

• avoir une vue d’ensemble claire de la situation de la gouvernance forestière

et de l’application des réglementations forestières dans le pays partenaire

FLEGT potentiel concerné ;

• élaborer, de concert avec tous les groupes d’intervenants, une approche

méthodologique et un calendrier pour les négociations.

L’expérience des pays africains partenaires FLEGT a montré que les activités

suivantes sont essentielles pour définir une approche efficace, participative et

inclusive dans la préparation des négociations de l’APV :

1. recenser tous les groupes d’acteurs concernés par le processus APV/

FLEGT ;

2. renforcer les capacités des acteurs dans chaque groupe d’intervenants

identifié ;

3. créer des plateformes pour permettre à chaque groupe de parties

prenantes de choisir librement ses représentants en vue des négociations

et encourager la communication au sein de chaque groupe, ainsi qu’entre

les plateformes ;

4. réquisitionner des personnes ressources ayant une meilleure connaissance

du Plan d’action FLEGT pour qu’elles s’occupent du volet technique du

processus ;

5. élaborer une stratégie de communication sociale constructive qui utilise

différents canaux adaptés aux divers groupes de parties prenantes ;

Page 30: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

30

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

6. promouvoir la transparence et l’équité entre les acteurs institutionnels

nationaux ;

7. adopter le consensus comme principale méthode de prise de décisions

entre les parties prenantes ;

8. appliquer le principe de la bonne gouvernance dans la prise de décisions.

Concernant la phase de négociation, les principaux enjeux sont les suivants :

• maintenir la dynamique, l’intérêt et la participation de tous les groupes

d’intervenants ;

• miser sur les forces et le potentiel des différents acteurs institutionnels ;

• parvenir à un accord final qui prend en compte toutes les conditions

juridiques nationales applicables requises dans le secteur forestier et

assigner des responsabilités claires aux autres administrations publiques

sectorielles (travail, environnement, commerce, industrie, transport, forces

de l’ordre, etc.) ;

• garantir l’appropriation de l’accord et ses annexes par tous les groupes de

parties prenantes ;

• répondre aux deux questions suivantes : 1) Quels sont les avantages de

l’APV pour le pays ? et 2) Quels sont les objectifs poursuivis par l’UE :

développement ou commerce ?

Afin de relever ces défis, l’élément clé utilisé a été la préservation et le renforcement

de l’approche participative établie au cours de la phase de prénégociation et

l’accroissement de l’intérêt des acteurs politiques. Suite à une analyse plus

scientifique du processus de négociation de l’APV au Cameroun (encadré 1),

Wodschow et al. (2016) ont recommandé que l’on accorde davantage d’attention

: a) aux personnes chargées d’identifier les parties prenantes ; b) au processus

d’identification de ces acteurs ; c) et à la manière dont ces acteurs devraient

participer. En outre, le processus de participation devra être adapté au contexte

précis. Par exemple, il doit s’appuyer sur les réseaux existants. Les responsables

du processus doivent tenir compte du fait que les ONG ne représentent pas

toujours de manière légitime des groupes sociaux précis tels que les populations

indigènes, et d’autre part elles n’adoptent pas systématiquement des méthodes

culturellement appropriées pour impliquer et soutenir les parties prenantes. Il

est important, au cours de la phase de négociation, de tenir compte des coûts

et du temps, en particulier lorsque l’on sait que la plupart des pays tropicaux

producteurs de bois disposent de ressources limitées. De plus, l’accès aux

informations pertinentes est primordial afin de permettre aux parties prenantes

de participer et d’exprimer leurs opinions.

Même si aucun pays africain n’a achevé une phase de mise en œuvre en

délivrant des autorisations FLEGT, pour ladite phase, les points suivants sont

les principaux problèmes qu’il convient de résoudre :

1 Accord sousrégional sur le contrôle forestier en Afrique centrale

Page 31: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

31

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

TABLEAU 03

SUPERFICIES DE FORÊTS CERTIFIÉES PAR LE SYSTÈME FSC EN AFRIQUE

Pays Superficie certifiée (ha) Nombre de certificats

Afrique centrale

Cameroun 940,945 4

République du Congo 2,625,003 4

Gabon 2,033,627 3

Total, Afrique centrale 5,559,575 11

Afrique de l’Ouest

Ghana 3,367 1

Total, Afrique de l’Ouest 3,367 1

Afrique australe

Madagascar 1,298 1

Mozambique 49,132 2

Namibie 147,851 4

Afrique du Sud 1,477,119 23

Swaziland 56,556 3

Total, Afrique australe 1,731,956 33

Afrique de l’Est

Tanzanie 172,052 3

Ouganda 38,975 3

Total, Afrique de l’Est 211,027 6

Total, Afrique 7,545,925 51

Page 32: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

32

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

• Développer, consolider et opérationnaliser tous les outils du système de

vérification de l’origine légale du bois (SVL), qui comprennent la grille

de légalité, le système de traçabilité, un système de suivi des activités

forestières fondé sur une base de données informatisée, un système

de contrôle forestier national avec des contributions d’observateurs

indépendants, un système de délivrance d’autorisations FLEGT et le

système d’audit du SVL.

• Mettre en œuvre des mesures de facilitation pour l’APV, y compris des

mécanismes de financement, les réformes nécessaires, le suivi du

fonctionnement du SVL, la publication d’informations, le suivi des impacts

de l’APV et un cadre institutionnel de mise œuvre de l’APV.

• Dans le cas du Cameroun, par exemple, Wodschow et al. (2016) ont noté

que cinq ans après la signature et la ratification de l’APV, le pays n’a

toujours pas mis en œuvre les réformes du cadre juridique promises dans

l’APV. Il manque également le système global de traçabilité du bois qui

constitue pourtant un élément clé du système de vérification de la légalité.

L’on a relevé que, depuis la clôture des négociations, les acteurs externes

à l’administration forestière ont éprouvé bien des difficultés à avoir voix au

chapitre dans les processus de prise de décisions pertinentes pour ces

questions particulières.

e) Contraintes du processus APV en Afrique

Dans la période qui a suivi la signature, la mise en œuvre de l’APV s’est avérée

plus complexe que prévu. Les pays africains partenaires FLEGT qui ont signé

les APV ont été confrontés à des difficultés de plusieurs ordres (Bigombe, 2016),

notamment technique, structurel, institutionnel et financier. Ces contraintes les

ont empêchés d’achever la troisième phase du processus qui inclut la délivrance

des autorisations FLEGT.

Contraintes techniques

Les difficultés techniques portent sur trois points : i) difficultés à mettre en place

des systèmes nationaux de traçabilité fiables et adaptés ; ii) les insuffisances

des limites des tests des grilles de légalité ; et iii) l’absence des systèmes de

compilation, de centralisation et d’archivage des informations et des données.

L’échec dans l’élaboration des systèmes nationaux de traçabilité des bois.

Dans tous les cas, des cabinetsconseil internationaux issus d’Europe, tels que

la Société générale de surveillance (SGS) ou Helvetas, ont été recrutés pour

élaborer des systèmes de traçabilité du bois, qui se sont avérés difficiles à

opérationnaliser dans la majorité des pays.

Les consultants ont développé des systèmes compliqués et inadaptés aux

besoins et aux réalités locales. De plus, les systèmes conçus ne prenaient pas

Page 33: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

33

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

en compte toutes les exigences des systèmes de vérification de la légalité (SVL).

Les systèmes mis en place en République du Congo et au Cameroun n’étaient

pas entièrement adossés sur les systèmes existants et les composantes de

la légalité ont été traitées de façon isolée dans l’ensemble du système, par

exemple la gestion des titres d’exploitation forestière qui n’était pas liée à la

fiscalité forestière. Les consultants internationaux se sont engagés à instituer

des systèmes entièrement électroniques, sans tenir compte de l’environnement

technologique du pays, qui peut éprouver des problèmes d’électricité. Les

opérateurs économiques locaux se sont sentis frustrés de n’avoir jamais vu

fonctionner effectivement sur le terrain les systèmes pour lesquels ils avaient

pourtant été formés.

Les insuffisances des tests des grilles de légalité. Des tests à blanc des grilles

de légalité ont été réalisés dans plusieurs pays, notamment dans le bassin du

Congo. Ces tests ont permis d’apporter des ajustements aux grilles de légalité

et d’identifier les indicateurs qui n’ont aucune importance sur le terrain. Ils ont

aussi permis de vérifier le niveau de légalité des compagnies forestières actives

dans les pays partenaires FLEGT et d’évaluer la capacité des administrations

forestières à assurer la vérification de la légalité sur le terrain. Toutefois, dans

tous les cas, les tests n’ont pas couvert tous les titres d’exploitation forestière

concernés par l’APV. Pour le Gabon, lors des négociations de l’APV, les tests de

terrain de la grille de légalité n’ont pas été effectués, faute de moyens financiers.

L’absence de systèmes de gestion d’informations et de données. La mise en

œuvre de l’APV va générer beaucoup d’informations et de données qui devront

être partagées entre les différentes administrations et entre les différentes parties

prenantes. Par conséquent, la disponibilité des données et des informations

est déterminante pour atteindre les objectifs de transparence définis dans les

accords. Les APV prévoient la création et la gestion des bases de données.

À ce jour, aucun pays ne dispose d’une base de données centralisée sur les

activités forestières, même si tous ces pays collaborent avec des cabinets

internationaux.

Contraintes structurelles

Les contraintes structurelles sont de deux ordres, à savoir : le fonctionnement

des systèmes nationaux de vérification de la légalité ; et la mauvaise organisation

des marchés intérieurs du bois.

Le fonctionnement des systèmes nationaux de vérification de la légalité.

Le système de vérification de la légalité est le principal pilier de la mise en

œuvre de l’APV. Il est l’outil qui permet d’identifier, de suivre et de délivrer les

autorisations pour le bois produit légalement, et de veiller à ce que seul le bois

légal soit exporté vers, ou importé par, l’UE. Toutefois, tous les APV négociés

jusqu’à présent vont audelà de cette conditionnalité, en couvrant tout le bois

Page 34: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

2 Origine légale du bois.

destiné à l’exportation (sans égard à la destination) et certains APV couvrent

tout le bois, y compris celui qui est destiné à l’usage domestique (Cooney et al.,

2012). Le SVL est un outil qui distingue le bois légal du bois illégal. Il repose sur

cinq éléments principaux, à savoir : i) la définition du bois produit légalement,

ii) le contrôle de la chaîne de surveillance, iii) la vérification, iv) l’émission des

autorisations FLEGT, v) et l’audit indépendant du système.

La mise en œuvre efficace du SVL nécessiterait la contribution d’administrations

publiques autres que l’administration forestière. La plupart du temps,

l’administration forestière jouit d’une expérience suffisante en ce qui concerne

le SVL sur lequel sera fondé l’APV. C’est moins le cas pour les administrations

publiques concernées. Dans bien des cas, les manuels sur la mise en œuvre

des SVL sont élaborés et testés sans tenir compte des contributions d’autres

administrations publiques. La nécessaire coordination entre l’administration

forestière et d’autres administrations publiques n’est pas encore fluide. Il ne s’agit

pas d’une question de technologie de l’information ou de la communication,

mais plutôt d’une nouvelle approche et d’un changement de mentalités dans le

fonctionnement des administrations publiques.

La faible organisation des marchés domestiques du bois. Les marchés

domestiques du bois, principalement alimentés par les filières de production

artisanale, représentent une part importante du secteur du bois. Cette affirmation

ne s’appuie pas seulement sur les quantités des produits du bois concernés,

mais également sur le nombre d’acteurs impliqués, la couverture géographique

de l’activité et la complexité de la structure de la chaîne de valeur. Dans certains

pays, il existe des liens entre le soussecteur de l’exploitation artisanale du bois

et celui de l’exploitation industrielle formelle du bois qui pourraient intégrer les

produits du bois venant du soussecteur artisanal. De plus, les produits du bois

issus du soussecteur artisanal sont souvent exportés par voie terrestre vers les

pays voisins (Eba’a Atyi et al. 2016).

Sur les cinq pays africains ayant signé des APV avec l’UE (Ghana, Cameroun,

République du Congo, République centrafricaine, Liberia), seule la République

centrafricaine n’a pas inclus le marché intérieur dans son APV (pour simplifier

la mise en vigueur des APV). Toutefois, cela pourrait également être considéré

comme une occasion manquée de résoudre des problèmes de gouvernance

dans le pays. En outre, il pourrait ne pas être aisé de distinguer les produits du

bois provenant du soussecteur artisanal et ceux issus du soussecteur industriel

à l’entrée et à la sortie de chaque usine de transformation de bois.

Pour les quatre autres pays qui ont choisi d’intégrer le marché intérieur dans

l’APV, on note que le marché continue de pâtir du commerce illégal de bois. Il

est difficile de savoir comment concevoir un système de suivi fiable pouvant

aider à formaliser les activités de la chaîne de valeur des marchés intérieurs du

bois.

Page 35: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

35

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Contraintes institutionnelles

Les difficultés institutionnelles sont de deux types, à savoir les contraintes liées

au pilotage politique et stratégique du processus APV ; et les difficultés relatives

aux retards accusés dans la réforme du secteur forestier et la révision du cadre

juridique régissant le secteur forestier.

Le pilotage politique et stratégique du processus APV. Les APV sont des

accords bilatéraux conclus entre deux parties : l’UE d’une part ; le pays africain

partenaire FLEGT signataire d’autre part. C’est donc dire que ces accords

engagent la responsabilité des États signataires et de leurs gouvernements,

et pas seulement celle des administrations en charge des forêts. Toutes les

administrations publiques œuvrant dans les domaines de la récolte, du transport

et de la transformation des produits du bois doivent partager les responsabilités

liées à l’exécution de l’APV.

Dans les pays signataires et ceux dans lesquels les négociations sont en cours,

ce sont les autorités gouvernementales de premier plan, telles que les services

du Premier ministre, qui généralement pilotent les négociations. Toutefois,

lorsque l’accord est conclu, le pilotage de la mise en œuvre est transféré à

l’administration en charge du secteur forestier, qui n’a aucun pouvoir sur les

autres administrations publiques et ne participe pas à la définition des priorités.

Des incompréhensions, des conflits d’autorité et le manque de coordination

entre les différentes administrations publiques rendent encore plus difficile la

mise en œuvre des APV. La prise en main politique et stratégique du processus

doit incomber à une autorité gouvernementale de premier plan telle que le chef

du gouvernement. Un tel positionnement politique et stratégique doit pouvoir

faciliter la prise de décisions concernant l’exécution de l’APV.

Les retards dans la réforme du secteur forestier et la révision du cadre juridique

régissant le secteur forestier. Les négociations de l’APV menées dans les pays

partenaires FLEGT ont mis en évidence la nécessité de réformer le secteur

forestier, ainsi que le besoin de réviser les législations et réglementations

forestières. En fait, dans la plupart des pays ayant conclu un APV, il importe

même de réviser la déclaration de politique forestière au cas où il en existe, ou

d’en rédiger une dans le cas contraire. Dans de nombreux cas, les intervenants

du secteur forestier, sous la conduite de l’administration forestière, ont élaboré

les versions révisées des législations et réglementations forestières, mais

ils n’ont pas pu les faire promulguer par les autorités gouvernementales et

législatives appropriées. Par conséquent, plusieurs décisions administratives

de niveau inférieur doivent être prises pour faire avancer le processus.

Contraintes financières

Les contraintes financières se posent à deux niveaux : l’insuffisance des moyens

financiers affectés à la mise en œuvre du processus APV actuel ; et le manque

d’un mécanisme de financement conjoint durable des APV.

Page 36: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

36

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

L’insuffisance des moyens financiers affectés à la mise en œuvre des APV

actuels. De manière générale, les accords prévoyaient des mécanismes de

financement et des mesures d’accompagnement de la mise en œuvre des

accords. Il en ressort que les parties ont identifié les domaines dans lesquels

des ressources techniques et financières complémentaires sont plus que jamais

nécessaires. Les ressources financières supplémentaires sont assujetties aux

mécanismes classiques de l’aide au développement de l’UE, ainsi qu’aux

mécanismes relatifs au budget public des pays partenaires FLEGT. De plus, les

ONG internationales ont contribué à la mobilisation des financements afin de

soutenir le processus APV. Toutefois, toutes les ressources financières affectées

au processus APV se sont avérées insuffisantes pour combler les besoins sur le

terrain. Au Gabon, par exemple, les négociations ont été interrompues à cause

de l’insuffisance des fonds nécessaires à la réalisation des tests de terrain des

grilles de légalité.

L’absence d’un mécanisme conjoint de financement durable de la mise

en œuvre des APV. Dans la plupart des cas, la question d’un mécanisme

de financement durable pour les APV à court, moyen et long terme n’a pas

été examinée en substance. Aucune estimation du volume des ressources

financières nécessaires n’a été faite. Sur le terrain, on découvre progressivement

les nombreuses activités qui auraient dû être financées. Aucun pays partenaire

FLEGT ne dispose de données chiffrées sur les besoins financiers pour les cinq

à dix prochaines années.

3.5.3 Initiatives sousrégionales de promotion de l’application des réglementations

forestières et de la gouvernance en Afrique

Des groupes de pays ou des sousrégions en Afrique ont lancé plusieurs projets et

programmes en vue d’encourager l’application des réglementations forestières

et de la gouvernance en Afrique. Néanmoins, deux sousrégions, notamment

l’Afrique australe avec la SADC et l’Afrique centrale avec la Comifac, ont pris les

initiatives les plus remarquables.

Initiative régionale pour l’application des réglementations forestières,

la gouvernance et les échanges commerciaux de la SADC (FLEGT/

SADC)

La SADC regroupe 15 pays africains dans la partie la plus au sud de l’Afrique,

incluant Madagascar et les Seychelles. Sa mission est de promouvoir une

croissance économique durable et équitable, ainsi que le développement

socioéconomique en passant par des systèmes de production efficaces, une

coopération et une intégration plus importantes, la bonne gouvernance, une

paix et une sécurité durables entre ses États membres.

Page 37: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

37

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

La SADC a lancé l’initiative FLEGT/SADC en 2013 afin de renforcer la mise

en œuvre des activités du processus FLEGT aux niveaux national et régional,

moyennant la sensibilisation et la mobilisation des ressources, tout comme

l’amélioration de la coordination (SADC, 2013). En plus de la lutte contre

l’exploitation forestière illégale et le commerce illégal du bois, l’initiative FLEGT/

SADC s’est engagée à traiter de la « formalisation » du commerce informel des

produits forestiers.

L’objectif déclaré de l’initiative FLEGT/SADC est de s’assurer que les produits

forestiers sont récoltés et commercialisés avec et au sein de la région SADC

et d’autres pays en s’appuyant sur un cadre juridique conjoint convenu

conformément aux principes de gestion durable des forêts, avec la participation

de toutes les parties prenantes, y compris les communautés, et avec des

agences d’application des réglementations efficaces, indépendantes et

transparentes. Plus spécifiquement, l’initiative FLEGT/SADC vise à harmoniser

la politique FLEGT et le cadre réglementaire dans un délai de cinq ans afin de

promouvoir la récolte et le commerce légaux des produits forestiers au profit

durable des États membres de la SADC.

Par rapport au Plan d’action FLEGT de l’UE, l’initiative FLEGT/SADC va audelà

de la promotion de la légalité de la récolte et du commerce du bois pour intégrer

le domaine plus vaste de la gestion durable des forêts. L’initiative FLEGT/SADC

ne privilégie pas spécifiquement le commerce du bois avec l’UE, même si elle

a reçu le soutien financier des États membres de l’Union et du programme

FLEGT FAOACP (également financé par l’UE). L’initiative FLEGT/SADC met

plutôt l’accent sur le commerce dans la sousrégion SADC et ensuite au sein du

continent africain.

La Commission des forêts d’Afrique centrale (Comifac)

La Comifac a été créée en 2000, à la suite du sommet des chefs d’États et de

gouvernement d’Afrique centrale sur les forêts, qui s’est tenu à Yaoundé au

Cameroun, et après la signature de la Déclaration de Yaoundé. La Comifac était

à l’origine la Conférence des ministres en charge des forêts d’Afrique centrale,

avant de devenir une institution intergouvernementale sousrégionale suite à la

signature du traité éponyme en 2005. La Comifac est constituée de dix États

membres, à savoir le Burundi, le Cameroun, la République centrafricaine, le

Tchad, la République du Congo, la République démocratique du Congo, la

Guinée équatoriale, le Gabon, le Rwanda et Sao ToméetPrincipe.

Dirigée par le Conseil des ministres, la Comifac est l’organe politique et

technique en charge de l’orientation, de la coordination et la prise de décisions

concernant la conservation et la gestion durable des écosystèmes forestiers

d’Afrique centrale. Elle harmonise et coordonne les politiques forestières et

Page 38: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

38

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

environnementales de ses États membres. La Comifac possède un plan de

convergence qui définit les stratégies communes d’intervention des États et

des partenaires au développement de l’Afrique centrale.

Le premier Plan de convergence de la Comifac a été officiellement adopté en

2005, et une version révisée a été publiée en 2015. Le Plan de convergence

comprend six domaines de priorité : i) l’harmonisation des politiques forestières

et environnementales ; ii) la gestion et la valorisation durables des ressources

forestières ; iii) la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique ;

iv) la lutte contre les effets du changement climatique et la désertification ;

v) le développement socioéconomique et la participation multiacteurs ;

vi) et les financements durables. En outre, le plan comporte des priorités

transversales, à savoir : i) la formation et le renforcement des capacités ; ii)

la recherchedéveloppement ; iii) et la communication, la sensibilisation,

l’information et l’éducation.

L’une des réalisations les plus remarquables de la Comifac dans le domaine

de l’application des réglementations forestières est l’élaboration de l’Accord

sousrégional sur le contrôle forestier en Afrique centrale1, qui a été signé en

2008 par huit des dix pays membres de la Comifac (à l’exception notable du

Rwanda et de Sao ToméetPrincipe). L’accord sur le contrôle forestier de la

Comifac s’applique à l’abattage, à la transformation, au suivi, à l’évaluation et

au transport des produits forestiers de la sousrégion au plan national comme à

l’échelle sousrégionale. L’une des dispositions de l’accord prévoit la coopération

entre les responsables du maintien de l’ordre des pays voisins, ce qui suppose

des activités mixtes d’application des réglementations en vigueur.

Une autre initiative se trouve être la gestion des aires protégées transfrontalières

et des paysages tels que le paysage DjaOdzalaMinkebe entre le Cameroun, le

Gabon et la République du Congo. Il existe aussi un paysage d’aires protégées

géré communément entre le Cameroun, la République du Congo et la République

centrafricaine, dénommé la Trinationale de la Sangha. Les experts d’accordent

à dire que la Comifac a joué un rôle primordial dans la facilitation, la gestion et

la coordination de ces paysages transfrontaliers (Grant et al., 2013).

La Comifac a pu asseoir son autorité et sa légitimité en renforçant sa réputation

auprès des partenaires du réseau et en s’imposant comme une organisation

fiable qui représente les intérêts régionaux et prend au sérieux l’activité de

gouvernance forestière. Les fortes caractéristiques organisationnelles de

la Comifac lui ont permis de prendre des décisions avisées et d’avoir des

interactions positives avec des acteurs étatiques et non étatiques dans les

instances appropriées (Grant et al., 2013). Les parties prenantes membres de

la Comifac se sont engagées à mettre en place un dispositif de financement

Page 39: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

39

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

autonome susceptible de garantir la viabilité des opérations sans avoir recours

à des financements externes. Toutefois, les promesses non tenues ou tardives

entravent l’efficacité de la Comifac.

3.5.4 Autres initiatives de gouvernance forestière

Un certain nombre d’autres initiatives prônent la légalité et la durabilité dans le

secteur des forêts en Afrique. On peut notamment citer la certification forestière

(considérée comme le principal effort mené par le secteur privé), les projets

d’observateurs indépendants, l’adhésion à l’ITIE et plusieurs autres initiatives

en faveur du renforcement des capacités ciblant les collectivités locales et

les organisations de la société civile. Deux de ces initiatives – la certification

forestière et les observateurs indépendants – sont reconnues internationalement

pour leur impact sur la gouvernance du secteur forestier et mises en œuvre

dans la majorité des pays africains producteurs de bois.

Certification forestière

La certification forestière a été initialement conçue comme une réponse au

déboisement et aux impacts sociaux, économiques et environnementaux du

secteur forestier (Rametsteiner et Simula, 2003). La certification forestière traite

des externalités sociales et environnementales liées aux pratiques non durables

de gestion environnementale dans le cadre de la régulation du secteur privé.

Cette régulation est appliquée par le marché, soit par des incitations offertes par

le marché soit par la menace de boycotts brandie par des groupes d’acheteurs

et de consommateurs (Cornelis van Kooten et al., 2005). La certification

forestière vise à s’assurer que la gestion des forêts est conforme aux principes

socioéconomiques et environnementaux qui sont renforcés par les audits

conduite par des tierces parties. Grâce à l’utilisation d’un label ou d’un logo,

la certification forestière entend donner aux consommateurs des garanties

crédibles que les produits sont issus d’une gestion forestière respectueuse de

l’environnement, socialement bénéfique et économiquement viable (Araujo et

al., 2009 ; Cashore et al., 2004). De nombreuses ONG, en particulier le Fonds

mondial pour la nature (WWF), plaident pour la certification, considérée comme

une solution idoine à la gouvernance limitée et souvent inefficace des ressources

forestières et halieutiques dans les pays en développement (Cashore et al.,

2006).

La certification forestière comprend trois principales composantes : les normes

de gestion forestière, la certification et les processus d’accréditation. Toutes les

normes de gestion forestière prévoient la conformité aux lois et réglementations

nationales, infranationales et locales des pays dans lesquelles les activités de

gestion forestière sont menées. La certification forestière favorise la légalité et

l’application des réglementations forestières, qui figurent au demeurant parmi

les questions fondamentales abordées par le Plan d’action FLEGT. Trois types

de certification sont appliqués dans le secteur forestier :

Page 40: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

40

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

• la légalité permet de s’assurer que la gestion forestière se déroule dans le

plein respect de toutes les lois et réglementations forestières pertinentes

en vigueur dans le pays concerné. Dans ce cas, les normes de certification

comprennent uniquement les exigences juridiques couvrant les différents

aspects des activités de gestion forestière ;

• la gestion forestière exige que la gestion des forêts soit conforme aux

principes de « bonne gestion forestière » en plus de respecter les critères

définis par la loi. Dans certains cas, ce type de certification promeut les

pratiques de gestion durable des forêts ;

• la chaîne de contrôle garantit la traçabilité des produits des forêts

certifiées jusqu’au consommateur final. Elle permet aux consommateurs

écologiquement sensibles de choisir dans les marchés les produits

provenant des forêts certifiés.

La gouvernance est principalement axée sur les deux premiers types de

certification forestière. En Afrique, la certification de la légalité est mise en œuvre

en particulier par deux organismes de certification : SGS, par son programme

« Légalité et traçabilité du bois » (TLTV) ; et Veritas, grâce à son programme

« Origine légale du bois » (OLB)2. En ce qui concerne la certification de la

gestion forestière, il existe deux principaux systèmes au niveau international :

le Forest Stewardship Council (FSC) ; et le Programme de reconnaissance des

certifications forestières (PEFC). Même si le PEFC prétend être le plus grand

système de certification forestière au monde (PEFC, 2016), la certification FSC

est la plus utilisée en Afrique. Au total, il existe plus de 7,5 millions d’hectares de

forêts certifiées FSC en Afrique, dont la plupart se trouvent en Afrique centrale

(tableau 3).

Il ressort d’une évaluation scientifique récente des impacts sociaux de la

certification FSC dans le bassin du Congo (Cerutti et al. 2016a) que les

entreprises d’aménagement de forêts certifiées :

• offrent de meilleures conditions de vie et de travail aux ouvriers des

compagnies forestières et à leurs familles ;

• possèdent des institutions inclusives et mieux gouvernées pour les

négociations entre la population locale et les compagnies forestières, sauf

en ce qui concerne les mécanismes de résolution de conflits ;

• disposent de mécanismes de résolution de conflits mieux gérés et plus

efficaces ;

• utilisent des façons plus innovantes d’aborder les problèmes relatifs aux

pratiques coutumières, souvent illégales.

Page 41: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

41

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Les entreprises d’aménagement forestier qui exportent une grande partie de

leurs produits ligneux sont plus disposées à obtenir une certification (Cornelis

van Kooten, 2004). Toutefois, leur potentiel à améliorer la gouvernance dans

l’ensemble du secteur forestier, ou même dans la filière bois, reste plutôt

limité. La certification forestière en Afrique tend à stimuler la création de petits

groupes de compagnies forestières « vertueuses », qui exportent les produits

ligneux vers des marchés sensibles sur le plan environnemental en Europe,

en Amérique du Nord et au Japon, tandis que la majorité des compagnies

forestières continuent à mener leurs activités sans gêne. De plus, la certification

forestière étant un instrument de marché, les entreprises du secteur privé

seraient motivées à s’engager dans la procédure de certification s’il existait

des avantages financiers évidents. Par contre, la certification peut s’avérer être

une procédure onéreuse, et les retombées économiques pourraient ne pas

être perceptibles dès le départ. Les trois avantages les plus importants de la

certification forestière pour les entreprises du secteur privé sont : l’accès aux

marchés, l’amélioration de l’image de marque ; et les bonifications. Toutefois,

les bonifications se sont révélées difficiles à réaliser (Chen et al., 2010).

Observation indépendante

Des initiatives d’observation indépendante (OI) ont été menées en Afrique, surtout

depuis le début des années 2000. Le principe de base est qu’une organisation

non gouvernementale (un observateur indépendant) travaille en collaboration

avec les services gouvernementaux en charge de la surveillance des activités

forestières et de l’application des réglementations forestières. L’objectif de l’OI

est d’améliorer la crédibilité des activités d’application des réglementations

forestières à travers l’identification transparente et indépendante des lacunes

systématiques dans le système de gouvernance forestière. Le Cameroun est

l’un des premiers pays à avoir lancé une initiative d’OI, en s’inspirant des

réussites enregistrées dans le cadre de l’OI menée au Cambodge. Par la suite,

la République du Congo, la RDC et la Côte d’Ivoire ont également lancé des

initiatives d’observation indépendante dans le secteur forestier.

Dans la majorité des cas en Afrique, les observateurs indépendants sont choisis

parmi les ONG internationales œuvrant dans le secteur de l’environnement.

Sur la base de leur analyse de la situation au Cameroun, Fomete et Cerutti

(2008) justifient l’implication des observateurs indépendants dans les efforts

d’amélioration de la gouvernance forestière et présente les leçons à tirer pour

réussir. Le recours aux ONG internationales pour l’observation indépendante a

été fondé sur l’affirmation que ces organisations, contrairement aux secteurs

public et privé, n’auraient aucun intérêt direct dans les résultats du processus

et auraient des idéaux à défendre en termes de bonne gouvernance. Elles ont

également une réputation à maintenir et sont généralement considérées comme

étant plus crédibles par la communauté internationale. Cependant, la nécessité

Page 42: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

42

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

de choisir parmi le très petit nombre d’ONG pouvant assurer ce service souligne

les limites du marché.

De plus, plusieurs accusations ont été lancées, surtout de la part des ministères

et des entreprises d’exploitation forestière, selon lesquelles le choix d’une

ONG conduit à une utilisation abusive des informations et au nonrespect des

conditions contractuelles. Toutefois, ces plaintes sont difficiles à apprécier

puisqu’il n’existe pas de système d’agrément professionnel des observateurs

indépendants des forêts ni de mécanisme institutionnel par lequel une évaluation

pourrait avoir lieu.

Une leçon que l’on peut tirer de l’expérience camerounaise est que les systèmes

de contrôle et de vérification doivent s’appuyer sur des procédures objectives

assorties de dispositions juridiques claires en matière de prise de décisions

en des points clés du système. En l’absence de critères objectifs, on observe

d’énormes frustrations chez les fonctionnaires, ce qui pourrait compromettre

l’efficacité de l’ensemble du système de vérification. La subjectivité concernant

ces sujets d’importance peut se traduire par un traitement peu équitable

des entreprises d’exploitation forestière, et, en fait, par des phénomènes de

corruption.

Un autre enseignement important est que si le ministère n’adhère pas au

processus de réforme ou si les réformes sont réalisées en posant des conditions,

même l’application de critères objectifs ne permettra pas nécessairement

d’aboutir à de véritables améliorations sur le plan de la gouvernance.

3.6 Évaluations de l’impact des initiatives de promotion de l’application

des réglementations forestières et de la gouvernance.

Même si aucune autorisation FLEGT n’a été délivrée à ce jour par un pays

africain, le processus FLEGT et d’autres initiatives de promotion de l’application

des réglementations forestières et de la gouvernance ont eu un impact sur le

secteur forestier africain. Les effets les plus évidents sont les suivants :

La participation accrue de tous les groupes de parties prenantes dans la prise

de décisions concernant le secteur forestier et le dialogue entre les intervenants

du secteur. L’implication du secteur privé et des OSC dans les négociations

FLEGT a marqué le démarrage d’une nouvelle approche dans laquelle tous les

groupes de parties prenantes participent et ont voix au chapitre dans la prise

de décisions et l’élaboration de politiques concernant le secteur forestier. Dans

tous les pays visités, les représentants du secteur privé et des OSC travaillent

en étroite collaboration avec les responsables gouvernementaux pour réviser

les lois et réglementations forestières, selon les besoins. Le dialogue instauré

a permis de réduire les conflits entre différents groupes d’intervenants.

Page 43: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

43

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Malheureusement, ce dialogue n’a presque jamais impliqué les intervenants

extérieurs au secteur forestier qui ont un impact considérable sur les ressources

et terres forestières.

L’accroissement de l’intérêt politique accordé au secteur forestier. Dans de

nombreux pays africains (à l’exception du Liberia), la contribution du secteur

forestier au produit intérieur brut (PIB) ne dépasse pas 5 %, même si la plupart

du temps ces estimations ne prennent en compte que le secteur industriel du

bois. Le secteur forestier n’est généralement pas considéré comme prioritaire

dans le monde politique, il est plutôt perçu comme une source de recettes qui ne

nécessite aucun investissement. L’implication de la communauté internationale

dans plusieurs initiatives de promotion de la gouvernance forestière a permis

d’attirer l’attention des responsables politiques nationaux sur l’importance du

secteur.

La mobilisation de fonds pour soutenir le secteur forestier. La mise en œuvre du

Plan d’action FLEGT a permis de mobiliser des ressources financières auprès

de l’UE pour appuyer les réformes dans le secteur forestier. Chaque pays ayant

signé un APV avec l’UE a reçu dix millions d’euros pour soutenir ce processus.

De plus, dans tous les cas, un soutien bilatéral a été obtenu de pays comme le

RoyaumeUni, la France et l’Allemagne pour renforcer les initiatives en matière

forestière. En Afrique centrale, par exemple, l’Allemagne a décaissé plus de

10 millions d’euros pour appuyer la certification forestière.

L’identification des faiblesses dans les cadres techniques et juridiques du

secteur forestier. Le grand nombre d’analyses conduites pendant la phase

des négociations de l’APV ont souvent permis aux pays africains concernés

d’identifier des lacunes dans leurs cadres techniques et juridiques. Ceci a donné

lieu à des révisions des lois et réglementations dans le nouveau contexte et à

la conception des nouveaux systèmes techniques, par exemple pour satisfaire

aux attentes du système de vérification de la légalité et de la traçabilité.

Les meilleures pratiques de gestion forestière sur le terrain et l’amélioration de

l’impact social de l’exploitation forestière. La certification forestière a favorisé

de meilleures pratiques d’exploitation forestière dans le domaine de la durabilité

et permis d’améliorer l’impact social de l’exploitation forestière, moyennant

le renforcement des régimes de partage des avantages à proximité des

concessions forestières. Néanmoins, cet impact demeure limité parce que la

certification forestière FSC ne couvre que 10 % de l’ensemble des concessions

forestières en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest.

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Le renforcement des capacités des acteurs forestiers. Toutes les initiatives

de gouvernance forestière comprenaient une composante « renforcement

des capacités » ciblant non seulement les responsables gouvernementaux,

mais aussi les OSC et les communautés locales. D’une manière générale, le

renforcement des capacités a porté sur la gestion, le suivi et la légalité des

activités forestières.

4. CONCLUSIONS Le secteur forestier continue à jouer un rôle déterminant pour l’économie

africaine dans l’ensemble, et pour certains pays et sousrégions en particulier.

Certains pays africains peuvent améliorer leurs balances des paiements grâce

aux exportations de produits ligneux vers les marchés internationaux, alors

que d’autres importent des produits dérivés du bois (en particulier d’Europe)

pour des valeurs considérables. Si les questions relatives aux potentiels de la

demande et de l’offre des produits entre différentes régions en Afrique sont

réglées, non seulement le secteur forestier augmentera sa contribution à

l’amélioration de la qualité de vie des populations africaines, mais il contribuera

aussi à une intégration accrue du continent sur le plan politique à la faveur du

commerce intraafricain des produits ligneux.

La demande de produits ligneux exprimée par les marchés africains est en

augmentation, alors que la demande de produits dérivés des bois tropicaux

exprimée par les pays développés d’Europe, d’Amérique du Nord et du Japon

est en baisse. Malheureusement, l’offre des marchés africains en produits

ligneux provenant des pays africains est largement dominée par les chaînes

de valeur informelles via les flux commerciaux terrestres qui, à ce jour, ont

été contrôlés avec très peu d’efficacité. L’impact de la récolte de bois sur la

demande des marchés intérieurs des pays africains et des marchés régionaux

est difficile à estimer, en particulier quand on en vient à la dégradation des forêts

et à la capacité de production future de bois.

La production de bois provenant du secteur industriel dans le bassin du Congo

se caractérise par le modèle des concessions. Les concessions forestières sont

accordées aux entreprises étrangères, certes, mais le modèle de concession

a le potentiel de garantir le domaine forestier permanent et de contribuer à

l’instauration d’une industrie durable.

Le secteur forestier conserve le potentiel d’apporter un concours appréciable

à l’industrialisation de l’Afrique. Pour que le secteur puisse augmenter sa

contribution aux économies africaines et au bienêtre des populations du

continent, il doit surmonter un ensemble de problèmes de gouvernance. Au

sein du secteur, les deux problèmes majeurs sont l’application inappropriée des

réglementations et lois forestières, et le secteur informel non contrôlé et peu

surveillé. Le secteur forestier est confronté à des enjeux encore plus grands,

Page 45: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

45

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

notamment : l’influence inopportune que les responsables politiques exercent

sur la politique forestière et la prise de décisions ; le manque de planification de

l’utilisation des terres ; et le manque de coordination entre les ministères.

Plusieurs initiatives visant à améliorer la gouvernance forestière en Afrique ont

été mises en œuvre à partir de l’Afrique, en collaboration avec des partenaires

internationaux. L’un des efforts les plus remarquables menés à ce jour est le

processus FLEGT de l’UE, enclenché à l’initiative de l’Union européenne et mis

en œuvre dans le monde entier. Le Plan d’action FLEGT propose un cadre aux

pays producteurs de bois pour combattre conjointement, en partenariat avec

l’UE, l’exploitation forestière illicite et le commerce des produits ligneux récoltés

illégalement, grâce à la signature des APV et à leur mise en application. Sur les

six accords de partenariat volontaire qui ont été conclus dans le monde, cinq

l’ont été avec des pays africains. Toutefois, aucun pays africain n’est jusqu’ici

parvenu à la phase de mise en œuvre de l’APV. Des contraintes techniques,

structurelles et institutionnelles ont empêché les pays africains d’avancer dans

le processus. Globalement, le Plan d’action FLEGT de l’UE n’a pas encore

permis d’atteindre l’étape de délivrance d’autorisation FLEGT après plus de dix

années d’activités.

Néanmoins, le processus FLEGT de l’UE a facilité la mobilisation de financements

importants (se chiffrant autour d’un milliard d’euros) pour appuyer les efforts

de lutte contre l’exploitation forestière illégale dans les pays producteurs de

bois tropicaux par le biais du renforcement des capacités, de l’amélioration

technique des systèmes de vérification de légalité, de l’amélioration de l’équité

entre les parties prenantes et du renforcement de la transparence des activités

forestières.

Les pays africains ont lancé d’autres initiatives telles que la Comifac en Afrique

centrale la FLEGT/SADC en Afrique australe. Le secteur privé a également joué

un rôle actif à travers la certification forestière volontaire. De manière générale,

on note une amélioration de la gouvernance forestière en Afrique.

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

5. RECOMMANDATIONS :

PERTINENCE DE L’INTERVENTION

DE LA BANQUE AFRICAINE DE

DÉVELOPPEMENT

Les réglementations FLEGT, grâce aux APV et à d’autres initiatives de

gouvernance forestière, y compris la certification forestière, ont permis

d’enregistrer des améliorations dans la mise en place des systèmes d’application

des réglementations forestières et de la gouvernance en Afrique. Toutefois, le

Plan d’action FLEGT s’appuie sur la demande en bois tropicaux exprimée par

les marchés européens comme principal levier. Dans certains cas, les APV

ont pris en compte les marchés nationaux. Toutefois, le doute plane encore

sur la manière dont le régime d’autorisation sera appliqué pour les marchés

nationaux. Tous les systèmes en cours d’élaboration sont orientés vers le suivi

des exportations de bois vers les marchés d’outremer. De même, la certification,

en pleine stagnation en Afrique, est un outil utilisé pour les marchés sensibles

aux questions environnementales en Europe, aux ÉtatsUnis et au Japon.

Un écart subsiste entre les marchés nationaux du bois et les marchés

intraafricains du bois, qui connaissent une croissance remarquable caractérisée

par un impact accru sur les ressources forestières et la diversité biologique,

ainsi que sur les moyens de subsistance des populations vivant dans les

zones forestières. Il serait nécessaire de mener des études sur les flux de bois

à l’intérieur des pays, ainsi que sur les exportations terrestres des produits

ligneux entre les pays africains.

Pour avoir un impact décisif sur la gouvernance forestière et le bienêtre des

populations africaines, la BAD doit exécuter un programme régional visant à

promouvoir la légalité dans les marchés nationaux et intraafricains du bois. Le

programme régional pour la promotion de la légalité dans le commerce du bois

en Afrique (Proligatt) viserait à améliorer la contribution du secteur forestier aux

économies africaines par l’intermédiaire du commerce des produits ligneux

légaux entre les marchés sousrégionaux africains. La figure 4 présente la

théorie de changement à travers laquelle le programme Comifac produirait des

résultats et des impacts.

L’objectif global du programme serait de contribuer à l’intégration de l’Afrique.

Le programme viserait trois principaux objectifs, à savoir : 1) promouvoir

l’approvisionnement des marchés intérieurs du bois en produits légaux ; 2)

définir les conditions qui facilitent le commerce des produits du bois licite

entre les pays africains et les sousrégions africaines ; et 3) faciliter le dialogue

politique de haut niveau sur le commerce du bois et produits dérivés entre les

pays africains et les sousrégions.

Le premier objectif spécifique serait axé sur l’élaboration de systèmes de

surveillance fiables pour les marchés intérieurs du bois et leurs impacts sur les

stocks de ressources forestières et l’environnement ; et sur la formulation de

politiques publiques d’approvisionnement en bois au sein des pays participants.

Page 47: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

47

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Le deuxième objectif serait centré sur le renforcement des capacités des

organisations régionales (notamment la Comifac) et des communautés

économiques régionales (Cédéao, CEEAC, SADC et ECEAS) en tant que

facilitateurs commerciaux afin de mieux intégrer le continent africain. Le

troisième objectif serait poursuivi dans le cadre des conférences ministérielles

régionales qui visent à inciter les gouvernements à harmoniser les politiques

relatives au commerce du bois et à éliminer les écueils que rencontrent les

négociants en bois.

En vue de réaliser ce programme, il convient d’adopter une démarche

progressive, en commençant par deux sousrégions, notamment l’Afrique

centrale et l’Afrique de l’Ouest. Le programme Proligatt serait dans un premier

temps mis en œuvre en collaboration avec deux communautés économiques, à

savoir la CEEAC et la Cédéao. Toutefois, le programme serait coordonné avec

le cadre de l’Union africaine pour une gestion durable des forêts africaines. Une

première étape consisterait à réviser les cadres juridiques des pays participants

afin d’atteindre un certain niveau d’harmonisation. La valeur ajoutée du

programme Proligatt viendrait de l’inclusion des petites et moyennes entreprises

(PME) de commercialisation du bois dans ce processus.

Page 48: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

FIGURE 04

THÉORIE DU CHANGEMENT ET CHEMIN D’IMPACT POUR LE PROLIGATT

Raisonnement

La bonne gouvernance et l’application de la

loi réduisent l’exploitation illégale.

Des processus d’octroi de licences clairs

facilitent / renforcent les marchés du bois

intra-africain et améliorent la biodiversité

et les moyens de subsistance des

communautés locales.

Groupes d’intervenants impliqué

Gouvernements

Organisations de la société civile

Secteur privé

Forêts communautaires

Organisations régionales / internationales

Donateurs

Activités

Activités de coproduction de connaissances

• Pratiques de gestion forestière

• Mécanisme de résolution de conflit

• Système de traçabilité du bois

• Systèmes de surveillance

• Développement de politiques

d’approvisionnement public en temps

différé

Renforcement des capacités des ONG

locales, des organisations de la société civile

et des organisations régionales

Facilitation des forums multipartites

Plateforme politique pour assurer une prise

de décision inclusive avec les OSC et les

gouvernements

Facilitation des réunions des communautés

économiques régionales :

• Sensibilisation au rôle du commerce

des produits forestiers / minuteur

• Sensibilisation au rôle du commerce

« régional »

Facilitation des réunions interministérielles,

ciblant les gouvernements :

• Harmonisation du commerce du bois

et des politiques commerciales et

élimination des obstacles

Facilitation des parties prenantes pour,

ciblant les partenaires financiers et le secteur

privé :

• Amélioration de la collecte de fonds et

des initiatives du secteur privé

Assumptions

Mauvaise application des lois et règlements

forestiers

Influences politiques envahissantes sur la

politique forestière et la prise de décision

Manque de planification d’aménagement du

territoire

Secteur informel important et mal contrôlé

Contraintes VPA : (a) techniques : pas

de systèmes de traçabilité du bois , tests

limités des grilles de légalité ; (b) structure l:

système de vérification , faiblesse des

marchés intérieurs du bois ; (c) institutionnel :

pilotage stratégique de l’APV , retards dans

les réformes (d) insuffisances financières

pour l’APV , pas de structure de joint-venture

durable

ÉNONCÉ DU PROBLÈME UNE GOUVERNANCE FAIBLE CONTRIBUE À LA MONTÉE DE L’EXPLOITATION ILLÉGALE EN TANT QUE

PROBLÈME POLITIQUE MAJEUR, CE QUI A UN IMPACT SUR LA BIODIVERSITÉ FORESTIÈRE, L’HABITAT FAUNIQUE, LA QUALITÉ DU

SOL, L’ACCÈS À L’EAU ET LA PAUVRETÉ / MOYENS DE SUBSISTANCE DES COMMUNAUTÉS. LE FLEGT ET D’AUTRES INITIATIVES

(CERTIFICATION FORESTIÈRE) ONT ÉTÉ INSUFFISAMMENT CONÇUS ET LE SOUTIEN DE L’UE ÉTAIT INSUFFISAMMENT EFFICACE

OBJECTIFS INITIER LE PROCESSUS DE SOUTIEN AUX PAYS AFRICAINS EXPORTATEURS DE BOIS DANS LA LUTTE CONTRE

L’ILLÉGALITÉ DANS LA RÉCOLTE ET LE COMMERCE DU BOIS, À TRAVERS LA PRÉPARATION DES STRATÉGIES NATIONALES FLEG ET LA

MISE EN ŒUVRE DE L’APV UE-FLEGT

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Intermédiaire résultats

CONNAISSANCES Coproduction et forums

multipartites :

Acteurs engagés

• Apprendre les compétences, les

méthodes et les outils

• Intérioriser la valeur du bois et le rôle du

commerce régional du bois

• Comprendre comment les preuves

peuvent soutenir la prise de décision

Résultats à long terme

Les acteurs utilisent des informations, des

outils et des analyses pour:

1. Créer des conditions favorables pour

2. Concevoir et mettre en œuvre

3. Surveiller et renforcer FLEGT,

certification forestière et autres

initiatives.

Niveau d’impact

Les résultats du programme contribuent aux

efforts mondiaux pour :

• La biodiversité des forêts

• Habitat faunique

• Qualité du sol et de l’eau

• Accès à l’eau et aux activités du

marché du travail

• Moyens de subsistance des

communautés forestières / rurales

• Éviter les émissions de gaz à effet de

serre

• Réduire la déforestation

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annexeAnnexe 1. RAPPORTS PORTANT SUR LES PAYS VISITÉS

1a. Rapport sur la Côte d’Ivoire 58

1b. Rapport sur le Liberia 64

1c. Rapport sur le Gabon 68

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ANNEXE 1 RAPPORTS PORTANT SUR LES PAYS VISITÉS

1a. Rapport sur la Côte d’Ivoire

Entretiens

Des discussions ont eu lieu avec 41 acteurs clés représentant

le gouvernement (au nombre de vingt), les OSC nationales

(neuf), le secteur privé (cinq), les chefs traditionnels (cinq) et les

organisations internationales (deux). La plupart des entretiens

se sont déroulés avec des groupes de deux à neuf personnes.

Perception de l’état des forêts en Côte d’Ivoire

De l’avis unanime de tous les groupes d’intervenants, le couvert

forestier de la Côte d’Ivoire a connu une réduction considérable,

passant de la superficie souvent avancée d’environ 16 millions

d’hectares au cours de la période coloniale à une estimation

actuelle de moins de deux millions d’hectares. De plus, les

parcelles de forêt restantes sont fortement dégradées. La

situation est souvent décrite comme catastrophique. En réalité,

pendant les premières années de l’indépendance, le secteur

forestier constituait l’un des piliers majeurs du développement

économique du pays et le moteur de son industrialisation.

Actuellement, la Côte d’Ivoire compte toujours près de cent

entreprises qui opèrent dans la transformation du bois, et

l’industrie du bois reste active dans plusieurs régions du pays.

Le secteur forestier est divisé en deux catégories, à savoir : le

domaine forestier permanent de l’État ; et les forêts du domaine

rural qui peuvent être converties pour être utilisées à d’autres

fins. Le domaine forestier permanent de l’État comprend 231

forêts classées (figure 1) gérées par la Sodéfor, une société

parapublique créée en 1966. Bien que les forêts classées soient

consacrées uniquement à la production de bois et qu’elles ne

puissent pas être converties pour être utilisées à d’autres fins

en principe, elles sont gravement affectées par la recherche de

terres de culture. Les taux d’empiètement estimatifs varient de

50 % (d’après le gouvernement) à 90 % (selon la société civile).

Tous les acteurs s’accordent à dire que si l’État décide d’y

consacrer les ressources nécessaires, au maximum dix forêts

classées pourraient être restaurées et protégées en tant que

forêts naturelles.

Le domaine forestier rural comprend les forêts secondaires

éloignées des galeries forestières qui ont été subdivisées en

387 exploitations forestières (également appelées PEF, pour

« périmètres d’exploitation forestière ») et qui sont gérées par

l’administration centrale du ministère des Eaux et Forêts (Minef).

Le Minef attribue des PEF aux entreprises d’exploitation forestière

privées en utilisant un système de quotas. Pour chaque PEF

attribué, un « quota » de récolte spécifique est accordé. Selon

des estimations, ces PEF sont eux aussi fortement dégradés

et les besoins des entreprises privées sont en augmentation

alors même que la quantité de bois récoltable par périmètre

est en forte baisse. La dégradation est tellement grave que

certaines espèces de bois à forte valeur comme l’iroko (milecia

excelsa) sont en voie de disparition et actuellement, les espèces

à très faible valeur, notamment le fromager (bombax spp.) qui

poussent dans des jachères sont abattues.

De même, les populations animales ont baissé de façon

notable, tout comme les forêts (habitats de plusieurs espèces),

en particulier en dehors des parcs nationaux. Les parcs sont

gérés par une agence gouvernementale spéciale, tandis que les

ressources fauniques hors parcs nationaux relèvent du Minef,

par l’intermédiaire de sa Direction de la faune. Curieusement,

selon les estimations, le braconnage et les atteintes à la faune

n’ont cessé d’augmenter depuis 1974, bien que la chasse soit

interdite en Côte d’Ivoire. Depuis l’apparition de la maladie à

virus Ebola en 2014, le braconnage a diminué, non seulement

en raison des efforts déployés par le gouvernement, mais aussi

grâce à la prise de conscience des populations ivoiriennes.

Les principaux problèmes de gouvernance

Plusieurs problèmes de gouvernance forestière ont été relevés

par les représentants des groupes de parties prenantes en Côte

d’Ivoire. Les plus évoqués, et peutêtre les plus importants, sont

énumérés ciaprès.

Le cadre réglementaire et juridique du secteur forestier et

faunique est obsolète, inadapté et inefficace. Contrairement à

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la majorité des pays africains qui ont révisé leur code forestier

après le Sommet de la Terre qui s’est tenu à Rio de Janeiro

en 1992, la Côte d’Ivoire a maintenu sa loi forestière de 1965,

jusqu’en 2014. En outre, en dépit de l’adoption d’une nouvelle

loi en 2014, les règlements d’application subséquents (décrets

et décisions) ne sont pas encore signés, ce qui signifie que la

loi ne peut pas être appliquée. Autant dire que la loi de 1965

demeure en vigueur. Compte tenu de l’aggravation de la

situation des domaines forestiers nationaux en Côte d’Ivoire

et de l’évolution de la gouvernance du secteur forestier ou

environnemental international, quelques décisions et directives

ministérielles ont été prises afin de moderniser les cadres de

gouvernance du secteur forestier. Ceci a créé une situation dans

laquelle un consensus non officiel prévaut quant à la flexibilité

de l’application de la loi. Pendant de longues années, la gestion

des ressources forestières a été perçue comme une question

d’arrangements entre les acteurs concernés au sein et en

dehors du gouvernement, au lieu d’être considérée comme une

application contraignante des lois et réglementations adoptées.

Un exemple probant en est le soussecteur faune, dans lequel la

chasse a été interdite en 1974. À ce jour, aucune réglementation

n’a été promulguée en ce qui concerne la gestion des ressources

fauniques en dehors des parcs nationaux, et chaque acteur

interprète à sa façon l’intention du gouvernement.

La flexibilité dans l’application des lois et réglementations

forestières a abouti à une corruption généralisée dans le secteur.

Tous les groupes d’intervenants interrogés ont cité la corruption

comme l’un des principaux problèmes de gouvernance

auxquels se heurte le secteur forestier en Côte d’Ivoire. Même

le ministre en charge des forêts, dans un entretien télévisé le 16

juin 2016, a soulevé la question de la corruption au sein de son

administration.

L’absence d’un plan national d’utilisation et de zonage des terres

qui limiterait l’extension des activités agricoles et protègerait

les 20 % prévus du territoire national couvert de forêts. D’une

part, la Côte d’Ivoire a basé son développement économique

sur le secteur agricole en s’appuyant sur les cultures de rente

(cacao, café, huile de palme, caoutchouc) et les cultures

vivrières. D’autre part, les activités agricoles demeurent

importantes et l’augmentation de la production signifie encore

une augmentation des superficies cultivées. Par conséquent,

les agriculteurs recherchent en permanence de nouvelles

superficies à cultiver, et ces terres ne peuvent être disponibles

que dans les zones boisées, qu’elles soient classées comme

forêts ou PEF.

Le manque de transparence dans les décisions des autorités

gouvernementales en matière de gestion forestière. Cela est

particulièrement vrai au niveau local ou décentralisé où s’effectue

la récolte du bois. Les représentants locaux de l’administration

forestière rechignent à divulguer les informations officielles ;

ils répondent aux demandes d’informations en orientant les

demandeurs vers l’administration centrale à Abidjan. Par

conséquent, au niveau local, là où le bois est récolté, il est difficile

de distinguer les activités légalement autorisées de celles qui

ne le sont pas. Pour illustrer l’importance de cette question, les

représentants d’un groupe de parties prenantes ont relevé que

l’ancien représentant de la Banque mondiale avait déclaré, lors

de la cérémonie d’adieu organisée en son honneur en présence

du Premier ministre, que la Banque mondiale n’avait pas été

encouragée à soutenir le secteur forestier faute de transparence

dans ce secteur. Il avait ajouté que cette situation devait changer.

Les responsables politiques à tous les niveaux cherchent

à influencer ou à empêcher l’application des lois et

réglementations forestières afin de protéger ou de favoriser

des acteurs spécifiques du secteur. Malgré le fait que le

secteur forestier ne soit pas une composante clé de l’économie

nationale (contribuant à moins de 1 % au produit intérieur brut),

il est considéré par plusieurs personnes comme stratégique

parce qu’il soutient la croissance économique, en particulier

dans le secteur du logement. Il est également perçu comme une

source traditionnelle pour obtenir facilement de l’argent à partir

de la récolte de grumes.

Le manque de volonté politique d’engager des réformes dans

le secteur forestier et de promouvoir la bonne gouvernance. Il

est admis par tous les groupes d’acteurs du secteur forestier

qu’il n’existe aucune véritable volonté politique d’effectuer des

réformes dans le secteur et de promouvoir la gouvernance, en

dépit de certaines déclarations publiques tendant à prouver le

contraire. C’est la raison pour laquelle les États généraux du

secteur forestier, qui se sont tenus du 16 au 19 novembre 2015,

ont invité le gouvernement à ériger officiellement le secteur

forestier au rang de priorité. Le secteur forestier est sensible

aux réformes, étant donné qu’il est largement perçu comme

étant en concurrence avec l’agriculture en ce qui concerne

les ressources foncières. Un chef traditionnel a déclaré que

« la menace la plus sérieuse à la paix et la stabilité en Côte

d’Ivoire est liée au régime foncier rural. Dans notre pays, tout le

monde (y compris les étrangers) cherche à acquérir un lopin de

terre dans une forêt, le seul endroit où il est encore possible de

trouver des terres fertiles. »

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Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

La faiblesse des capacités institutionnelles de l’administration

forestière qui manque de ressources humaines qualifiées et de

logistique nécessaires pour surveiller les activités forestières sur

tout le territoire national. L’exemple le plus probant est le fait que

la Direction centrale de la faune qui, contrairement à la Direction

de l’exploitation forestière et de l’industrie, n’est représentée

dans aucune des 31 régions du pays.

L’instabilité politique. La Côte d’Ivoire a connu plus de dix

années d’instabilité politique à partir de 2003. Pendant cette

période difficile, les institutions publiques ont été affaiblies,

tout comme la capacité du gouvernement à appliquer les lois

et réglementations forestières. En outre, les forêts classées sont

devenues des cibles privilégiées des parties au conflit armé,

certaines parties ayant élu domicile dans les forêts en utilisant

leurs ressources à des fins financières. La situation évolue

progressivement, mais le gouvernement hésite encore à mener

des opérations militaires pour déloger ces occupants qui vivent

dans les forêts classées et pillent leurs ressources.

La connaissance insuffisante des ressources forestières et

fauniques existantes. Aucun inventaire forestier n’a été mené

depuis plus de 45 ans. Par conséquent, lors de l’allocation

des ressources telles que les PEF aux opérateurs privés,

l’administration forestière ignore l’étendue des ressources

nationales, et peut sans le savoir contribuer à leur épuisement.

Initiatives menées pour traiter des questions de gouvernance

pour aborder les problèmes de gouvernance forestière, la

Côte d’Ivoire a décidé d’adhérer au processus FLEGT initié par

l’UE. Le projet d’observation indépendante (OI) lié au processus

FLEGT a permis de promouvoir la transparence dans le secteur.

Dans le secteur privé, quelques entreprises ont adopté la

certification forestière afin de démontrer leur volonté de mettre

en œuvre la loi et la réglementation forestières.

a) Le processus FLEGT en Côte d’Ivoire

La Côte d’Ivoire a entamé les négociations avec l’UE en vue

de l’adhésion du pays au processus FLEGT en juin 2013. Une

feuille de route initiale établie durant la première sessions a été

révisée un an plus tard à Bruxelles lorsque les deux parties

ont convenu de réétudier le champ d’application du processus

FLEGT en Côte d’Ivoire et de créer trois groupes thématiques :

définition de la légalité et système de vérification de la légalité

(SVL) ; marché domestique et mesures d’accompagnement ; et

stratégie de communication et informations à rendre publiques.

Le processus FLEGT a enregistré des avancées, en particulier

depuis l’adoption d’un nouveau code forestier en 2014.

Néanmoins, il est envisagé que l’APV, dont la signature était

prévue pour 2017, soit retardé principalement en raison du fait

que le décret d’application du code forestier de 2014 n’a pas

encore été finalisé (en réalité, sa rédaction n’est même pas encore

achevée). Par conséquent, la définition de la légalité (moyennant

l’élaboration de la grille de légalité) n’est pas encore possible.

Les contraintes supplémentaires comprennent : les faibles

capacités de certains acteurs impliqués dans le processus ;

des difficultés à maintenir la dynamique et l’intérêt de tous les

groupes d’acteurs pour le processus ; et des problèmes liés à la

circulation des informations parmi les intervenants.

b) Le projet observateur indépendant

Le projet observation indépendante (OI) a été financé par la

facilité FAOFLEGT dans le but d’améliorer la crédibilité des

activités d’application des réglementations forestières, par une

transparence accrue et une identification indépendante des

défaillances systémiques de la gouvernance forestière. La Wild

Chimpanzee Foundation (WFC Fondation pour les chimpanzés

sauvages) a été retenue pour exécuter le projet IP. À ce jour, le

projet OI a conduit six missions dans la forêt classée du Cavally,

en compagnie d’équipes de représentants communautaires

formés et en présence des agents de la Sodéfor. Les missions

d’observation indépendante ont identifié un certain nombre de

problèmes concernant l’application actuelle des procédures

juridiques et directives par la Sodéfor et les opérateurs privés.

Certains problèmes sont suffisamment graves pour mettre en

danger la pérennité des ressources forestières du Cavally. Par la

suite, la mission OI a fait des recommandations pour améliorer

l’application des procédures sur le terrain.

Impact de l’initiative de gouvernance forestière

La Côte d’Ivoire et l’UE n’ont pas signé d’APV et la phase de

délivrance des autorisations FLEGT est loin d’être atteinte.

Néanmoins, tous les groupes d’intervenants reconnaissent que

le simple fait d’avoir signé l’APV a eu des effets positifs sur la

gouvernance du secteur forestier. Les principaux impacts de la

signature de l’APV sont les suivants :

La participation de tous les groupes d’acteurs aux négociations

de l’APV et éventuellement aux prises de décisions sur les

politiques à mettre en œuvre dans le secteur. Un exemple

frappant est l’élaboration en cours des textes d’application du

code forestier de 2014. Par le passé, les arrêtés, les décisions

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

ministérielles et les directives officielles étaient unilatéralement

conçus et adoptés par les services publics. Aujourd’hui, même

si ces textes sont encore élaborés par le gouvernement, les

OSC, le secteur privé et les chefs coutumiers sont invités à faire

des observations et à proposer des amendements. Au cours de

la visite sur le terrain, il a été constaté que l’atelier organisé par

l’administration forestière pour examiner les projets de textes

d’application avait été reporté à une date ultérieure parce que

les représentants du secteur privé s’étaient plaints de n’avoir

pas eu suffisamment de temps pour analyser les projets de

textes élaborés par le gouvernement.

Le processus FLEGT a permis d’établir un dialogue politique sur

l’avenir des forêts de Côte d’Ivoire. Le dialogue est aujourd’hui

possible non seulement entre le gouvernement et d’autres

parties prenantes, mais aussi entre les OSC, le secteur privé

et le milieu rural traditionnel qui pourraient avoir des intérêts

contradictoires dans l’utilisation des ressources forestières.

De plus, le secteur forestier dans son ensemble est en train de

s’organiser de façon à ce que le dialogue puisse être étendu à

d’autres secteurs plus puissants tels que l’agriculture, les mines

et la construction d’infrastructures.

Le processus FLEGT a mis en exergue les faiblesses du cadre

juridique. Face à l’exigence de définir la légalité et d’élaborer

une grille de légalité, tous les acteurs du secteur forestier se

sont rendus à l’évidence que le cadre juridique nécessitait une

révision approfondie.

Le processus FLEGT a permis d’identifier les problèmes

techniques et d’engager l’autorité forestière à rechercher des

solutions à ces problèmes. Il s’agit notamment de la nécessité

de mettre en place et de maintenir une base de données

statistiques et de l’impératif d’instituer un SVL ou encore un

système de traçabilité pour les produits ligneux.

Le processus FLEGT a permis de mobiliser des ressources

financières auprès de bailleurs de fonds internationaux afin de

soutenir le secteur forestier.

Outre le financement principal fourni par la Commission

européenne, cinq nouveaux projets ont été financés en vue du

renforcement des capacités, de la promotion de la légalité, du

marché intérieur du bois, de la participation des communautés

au contrôle de la mise en œuvre des réglementations forestières

et de la collecte des statistiques relatives au secteur forestier.

Le processus FLEGT a permis d’accroître le profil politique

du secteur forestier dans le pays, grâce au soutien de la

communauté internationale.

Le processus FLEGT a contribué au renforcement des capacités.

Cette affirmation s’avère particulièrement vraie pour les OSC

et les représentants des communautés locales qui étaient

membres de la mission d’observation indépendante. Ils ont été

formés à la détection des activités frauduleuses menées par les

acteurs de l’exploitation forestière et par la Sodéfor, en utilisant

des analyses documentaires et des observations de terrain.

La certification forestière a déjà eu un impact sur les entreprises

certifiées. Leurs bois et produits dérivés ont bénéficié d’un accès

facile aux marchés européens et tous les groupes d’acteurs

forestiers reconnaissent qu’ils ont donné un exemple à suivre.

Toutefois, il paraît évident que trois entreprises représentent

uniquement une infime minorité du secteur privé. Il serait utile

que les entreprises privées élaborent un code de conduite pour

encadrer leurs pratiques professionnelles.

Chaînes de valeur prioritaires dans le secteur des forêts en vue

des interventions

La filière bois en Côte d’Ivoire comporte trois principales chaînes

de valeur, en fonction des marchés finaux vers lesquels les

produits du bois sont destinés : i) la chaîne de valeur industrielle

fournissant les marchés européens, asiatiques ; ii) les marchés

intérieurs ; iii) et les marchés régionaux. Les représentants

des groupes d’intervenants interrogés ont unanimement défini

les priorités suivantes en faveur lesquelles des interventions

pourraient être effectuées afin d’améliorer la gouvernance

forestière en Côte d’Ivoire :

La plus haute priorité est accordée au marché domestique ou

intérieur du bois,

qui est alimenté par : i) des produits de qualité inférieure

provenant d’entreprises industrielles ; ii) des déchets industriels

du bois, qui sont transformés par les ateliers de menuiserie ;

iii) et les sciages provenant d’utilisateurs de tronçonneuses,

une activité illégale en vertu des réglementations en vigueur

dans le pays. Selon une nouvelle étude réalisée par Eba’a Atyi

et al. (2016), la consommation de bois du marché intérieur de

Côte d’Ivoire est estimée à quelque 1,5 million de m3 par an,

quatre fois le volume de bois et produits dérivés expédiés à

l’étranger (350 000 m3). Sur ce volume total, la consommation

nationale de bois et de produits dérivés, soit 27 % (515 000 m3),

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

provient des scieries artisanales illégales. La majorité des

acteurs estiment que l’approvisionnement illégal représente

plus de 27 % de l’approvisionnement total. Même si la Côte

d’Ivoire envisage d’inclure les marchés intérieurs dans l’APV en

cours de négociation avec l’UE, il n’existe actuellement aucun

système de surveillance du marché national. La consommation

nationale peut être répartie en deux catégories : la souschaîne

des marchés publics ; et la souschaîne de la consommation

privée. Les intervenants ont estimé que s’il faut que la légalité

soit promue par le marché, il serait nécessaire de commencer à

concevoir une politique appropriée en matière de passation des

marchés publics, qui prévoit que seuls le bois et les produits

dérivés légaux doivent être utilisés dans les travaux publics et le

mobilier des administrations publiques.

La deuxième priorité est accordée au marché régional, qui est

approvisionné aux moyens d’exportations par voie terrestre

de la Côte d’Ivoire vers les pays voisins. Après huit mois de

contrôle minutieux, Eba’a Atyi et al. (2016) ont conclu que les

flux de bois transportés par voie terrestre chaque année, en

provenance de la Côte d’Ivoire, sont estimés à environ 113 000

m3. À peu près 70 % du volume total des exportations par voie

terrestre proviennent des scieries artisanales, pourtant interdites

en Côte d’Ivoire. Les statistiques sur les importations de bois

du Liberia vers la Côte d’Ivoire sont généralement divulguées,

mais aucun chiffre n’a été rendu public du fait qu’en 2015, la

frontière entre la Côte d’Ivoire et Liberia a été fermée en raison

de l’épidémie Ebola. Ainsi, les flux de bois entre les pays voisins

sont importants, même si les transactions illégales dominent.

On estime que la demande de bois dans les marchés régionaux

augmentera fortement à l’avenir, en raison de la croissance

démographique et économique.

La dernière priorité en termes de besoins en gouvernance

est axée sur la chaîne de valeur des exportations de bois à

l’étranger. La Côte d’Ivoire exporte encore environ 350 000 m3

de bois à l’étranger chaque année (DEIF, 2014). Toutefois, cette

quantité représente une forte diminution par rapport au volume

estimatif de 960 000 m3 il y a dix ans. Les administrations

publiques semblent avoir mis en place un système fiable pour

contrôler les exportations à partir des ports maritimes, alors qu’il

n’existe aucun système analogue pour les marchés intérieurs

et régionaux. De plus, le règlement de l’UE sur les vérifications

d’usage dans le commerce du bois permet de s’assurer que le

bois qui entre dans les marchés de l’UE est d’origine légale. En

réalité, l’ensemble du processus FLEGT auquel la Côte d’Ivoire

adhère actuellement est conçu en premier lieu pour les marchés

de l’UE, du point de vue de l’offre comme de la demande.

Conclusion provisoire sur la Côte d’Ivoire

Les forêts de Côte d’Ivoire ont été utilisées par le passé pour

promouvoir l’industrialisation du pays. Toutefois, en raison de

facteurs tels que le développement du secteur agricole et une

faible gouvernance, le couvert forestier de la Côte d’Ivoire a été

gravement dégradé et l’on a observé un déboisement à grande

échel.

Actuellement, on observe une tendance vers une meilleure

gouvernance forestière. L’initiative la plus importante a été

l’adhésion du pays au processus FLEGT en 2012. Le processus

n’a pas encore abouti à la signature d’un APV certes, mais la

majorité des acteurs du secteur forestier sont d’avis que des

effets positifs sont déjà perceptibles en termes d’amélioration

de la gouvernance. Il s’agit notamment : i) de la participation

de tous les intervenants au processus de prise de décisions

concernant les forêts du pays ; ii) de l’établissement d’une

plateforme de dialogue politique sur l’avenir des forêts de

Côte d’Ivoire ; iii) de la dynamique observée sur la nécessité

de réviser le cadre juridique actuel, qui s’est avéré obsolète et

suranné ; iv) et de l’amélioration des outils techniques à utiliser

dans le suivi du secteur forestier et la gestion des forêts.

Toutefois, malgré ces impacts positifs du processus FLEGT, qui

est davantage axé sur les exportations de bois vers l’étranger,

il n’existe aucune initiative clairement menée pour traiter

des questions de gouvernance liées à l’augmentation de la

demande de bois des marchés intérieurs et régionaux, qui sont

les plus touchés par l’illégalité. Toute nouvelle initiative en faveur

de la gouvernance forestière en Côte d’Ivoire devrait cibler les

marchés intérieurs et régionaux.

Page 63: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

63

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

FIGURE 05

FORÊTS CLASSÉES DE CÔTE D’IVOIRE

Page 64: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

1b. Rapport sur le Liberia

Entretiens

Des discussions ont eu lieu avec 17 acteurs clés représentant le

gouvernement, notamment la Forestry Development Authority

FDA (trois entretiens), les bailleurs de fonds (un ), le secteur privé

(deux), les communautés forestières (cinq), les OSC (un) et les

projets financés par des bailleurs de fonds (cinq). La plupart

des échanges ont eu lieu avec des groupes de deux ou trois

personnes, mais également individuellement dans le cas de

deux acteurs.

Perception de l’état des forêts de Liberia

Un certain consensus s’est établi sur le fait que le Liberia possède

encore d’importantes ressources forestières par rapport aux

autres pays d’Afrique de l’Ouest. En réalité, il s’agit bien du pays

le plus densément couvert de forêts de la sousrégion, et il recèle

environ 40 % de l’ensemble des forêts d’Afrique de l’Ouest.

Certains acteurs (principalement la FDA) estiment que près de

50 % des forêts du Liberia sont encore considérées comme «

intactes ». Même si aucun inventaire exhaustif des forêts n’a

été réalisé, le couvert forestier du Liberia est estimé à quatre

millions d’hectares, dont un million d’hectares d’aires protégées.

Globalement, le pays compte actuellement dix contrats de

gestion forestière communautaire, dont la moitié porte sur la

conservation des forêts et l’autre moitié sur la production de

bois. Pendant la mission, nous avons été informés de ce que

125 demandes de gestion des forêts communautaires avaient

été reçues, et 86 avaient franchi les deux premières étapes du

processus de sélection qui en compte neuf. Les retombées

financières découlant de la gestion des forêts communautaires

sont entièrement destinées aux communautés concernées, à

l’exception des taxes qui sont reversées à l’État. De plus, les

communautés touchées par l’exploitation forestière industrielle

doivent recevoir une partie des frais de location de forêt

collectés par l’État. Par exemple, les frais de location de forêt

pour les contrats de gestion de forêt sont de 1,5 USD/ha/an.

Une part de 30 % de ce montant est versée aux communautés

par l’intermédiaire d’un fonds d’affectation spéciale. Toutefois, le

passage à la phase opérationnelle a pris du temps, mais le fonds

est déjà fonctionnel. Aujourd’hui, la question qui fait débat est

de savoir si les frais supplémentaires de location de terre que les

entreprises versent au moment du dépôt de leurs soumissions

pour les contrats de concession devraient être partagés, en

reversant 30 % du montant total aux communautés.

Les forêts du Liberia produisent entre 200 000 m3 et 250 000

m3 de bois chaque année, dont l’essentiel est exporté vers la

Chine et l’Europe (principalement la France), en général sous

forme de grumes, car l’industrie de la transformation du bois

reste au stade embryonnaire. Les exportations de billes de bois

représentent autour de 95 % de la production totale de bois

rond issue du secteur industriel formel, sans aucune valeur

économique ajoutée découlant de la filière bois. Il n’existe

aucune usine de fabrication de contreplaqué dans le pays.

Environ un million d’hectares de forêts sont actuellement

attribués pour une durée de 25 ans (à compter de 20072008) à

des entreprises privées, sous forme de concessions forestières

(figure 2) réparties en sept contrats. Au total, 13 entreprises

sont enregistrées, et seules quatre sont actives sur le terrain.

Une compagnie forestière est à capitaux européens, alors que

le reste est détenu par des investisseurs asiatiques. Outre les

accords d’aménagement des forêts communautaires, trois

types de titres d’exploitation forestière peuvent être accordés

à des compagnies ou à des particuliers, à savoir : i) le contrat

d’aménagement forestier (FMC), qui devrait être assujetti à un

plan d’aménagement forestier adossé sur un cycle de coupe de

25 ans minimum ; ii) les contrats de vente de bois (TSC) octroyés

pour trois ans et couvrant une superficie maximale de 5 000

ha (après l’exploitation, les autres zones faisant l’objet de TSC

peuvent être converties pour être utilisées à d’autres fins) ; iii) et

les permis d’exploitation privée, qui ne sont assujettis à aucune

réglementation. Jusqu’à présent, aucun plan d’aménagement

privé n’est appliqué au Liberia.

Le marché intérieur est presque entièrement approvisionné par

le bois produit clandestinement. Ce secteur illégale est surveillé

par le gouvernement grâce à un réseau de points de contrôle qui

couvre la quasitotalité de la zone forestière, et où sont perçues

les taxes publiques. Le montant de la taxe publique s’élève

à 0,60 USD/bille de bois, indépendamment de la taille ou du

prix de la bille transportée. Toutefois, aucune initiative ne vise à

quantifier systématiquement le volume concerné, même si tous

les acteurs forestiers interrogés estiment que le secteur informel

récolte à peu près le double du volume produit par l’industrie

forestière formelle.

Les principaux problèmes de gouvernance

Le Liberia est confronté à des problèmes liés à la gouvernance

de son secteur forestier. Les défis les plus évoqués sont les

suivants :

a) Les faibles capacités des acteurs forestiers

Les capacités de la FDA demeurent insuffisantes en ce qui

concerne les ressources humaines et la logistique. Les aires

Page 65: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

65

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

protégées sont envahies par des exploitants miniers et il n’y

a pas suffisamment de gardiens formés pour empêcher ces

incursions. De même, les communautés ont une grande part

de responsabilité dans la gestion et la protection des forêts du

Liberia. Pourtant, elles n’ont pas les capacités requises pour

assurer une surveillance forestière ô combien nécessaire. À

titre d’illustration, les communautés pourraient soustraiter les

activités de récolte de bois dans leurs forêts communautaires

à des compagnies forestières industrielles. Toutefois, étant

donné que les communautés sont autorisées à se regrouper,

une compagnie forestière pourrait les inciter à créer un

regroupement artificiel. Ainsi, une compagnie forestière peut

obtenir des droits de récolte d’arbres dans une vaste zone

de forêts communautaires et faire ce qu’elle veut, parce que

la plupart des communautés ne possèdent pas les capacités

nécessaires pour contrôler les activités de récolte.

b) La mauvaise application des réglementations sur le

terrain

Ces dernières années, le Liberia a pu adopter un cadre juridique

et réglementaire judicieux avec le concours de la communauté

des bailleurs de fonds. Aujourd’hui, ce cadre doit être mis en

œuvre. Certains acteurs du secteur privé estiment même que le

secteur est surréglementé. Toutefois, la pratique ne cadre pas

avec les lois et réglementations en vigueur. L’un des acteurs

interrogés a fait remarquer que « les gens ne réalisent pas que

les lois adoptées doivent être appliquées. Les lois sont plutôt

considérées comme un assortiment de produits cosmétiques,

mais ce constat n’est pas spécifique au secteur forestier. »

Par exemple, les communautés touchées devraient bénéficier

des retombées des activités prévues par la loi. Pourtant ces

avantages ne pas encore perceptibles. Par conséquent, les

communautés riveraines des concessions forestières ont parfois

recours à la violence parce que les conventions en matière de

responsabilité sociale ne sont pas respectées.

c) Le manque de coordination entre les politiques

forestières et agricoles

Un enjeu important concerne les concessions agricoles qui sont

accordées dans les zones forestières. Malgré le fait que la culture

sur brûlis demeure la principale pratique agricole et le facteur le

plus déterminant du déboisement, des concessions (figure 2)

couvrant une certaine superficie sont accordées à des sociétés

de production d’huile de palme. De plus, ces sociétés sont

censées ouvrir des exploitations de palmiers à huile uniquement

sur une fraction de la zone concédée. Elles doivent identifier les

forêts à haute valeur pour la conservation (FHVC) et éviter de les

convertir en plantations. Les opérateurs agroindustriels doivent

laisser les aires communautaires intactes, même s’ils pourraient

être autorisés à utiliser le bois des forêts dégradées. Pour mettre

en œuvre ces politiques, il est nécessaire d’établir une meilleure

coordination entre la FDA et le ministère de l’Agriculture.

Malheureusement, une telle coordination n’existe pas encore.

d) Les droits d’utilisation des terres

Il n’existe pas de système d’immatriculation foncière digne de

ce nom au Liberia. La plupart des terres sont utilisées par les

communautés, et ces dernières souhaitent devenir propriétaires

des forêts et concéder des permis d’exploitation forestière.

Toutefois, le peu de titres fonciers existants appartiennent à

des personnes extérieures aux communautés. Une loi sur la

réforme foncière est en cours d’élaboration, qui accorderait plus

de pouvoir aux communautés (tribus) sur les terres et pourrait

éventuellement aboutir au retrait des concessions, ce qui rend

cette question hautement sensible sur le plan politique.

e) Un secteur informel prédominant et mal contrôlé

Le secteur informel du bois produit environ 200 000 à 250

000 m3 de bois chaque année. On estime que le secteur informel

récolte au bas mot le double de ce qui est produit par le secteur

industriel formel. Le soussecteur du sciage de bois d’œuvre

artisanal semble être une cause de déforestation majeure,

mais il est aussi l’unique fournisseur de bois et de produits

dérivés au marché intérieur. Contrairement au secteur industriel,

le secteur artisanal n’est pas réglementé. Il est dirigé par les

communautés locales, mais nul ne sait de quelle manière. Le

sciage à la tronçonneuse n’est pas interdit et la FDA perçoit des

taxes sur les produits ligneux provenant du secteur artisanal (0,5

USD/bille de bois, quelle qu’en soit la taille) par l’entremise des

postes de contrôle disséminés à travers le pays. Il ne collecte

pas toutefois les données sur les quantités concernées.

f) Les pressions politiques sur les décisions prises dans

le secteur

Le secteur forestier du Liberia a toujours été et reste

politiquement sensible. La préservation des forêts ne semble

pas constituer une priorité pour les autorités politiques. La

FDA subit continuellement des pressions de la part des élites

politiques qui souhaiteraient concéder plus de forêts à des fins

d’exploitation, même si aucun plan d’aménagement forestier

n’existe en ce moment. De même, les forêts communautaires

subissent de fortes pressions politiques.

Page 66: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

g) Le manque de politique de passation des marchés

publics concernant les produits du bois

Le marché national des produits du bois du Liberia est

approvisionné dans son ensemble à partir de sources

informelles. En ce qui concerne la construction d’infrastructures

de développement financées par les pouvoirs publics, il

n’existe aucune stratégie pour promouvoir la légalité dans

l’approvisionnement en produits du bois utilisés par l’État. Les

bâtiments publics, les infrastructures et le mobilier acheté par

l’État utilisent dans une grande mesure les produits ligneux

illégaux.

Initiatives prises pour régler les problèmes liés à la gouvernance

forestière

Compte tenu du fait que le secteur du bois a été utilisé ces

dernières années pour alimenter la guerre civile, le secteur

forestier du Liberia a suscité un certain nombre d’initiatives

ambitieuses visant à améliorer la gouvernance, dont les plus

remarquables sont décrites ciaprès.

1. L’initiative pour la transparence dans les industries

extractives au Liberia (LEITI). L’Initiative pour la

transparence dans les industries extractives (ITIE) est

un projet mondial qui vise à instaurer la transparence

dans la gestion des industries extractives. L’ITIE est une

association fonctionnant par adhésion volontaire, basée à

Oslo en Norvège. Elle met généralement l’accent sur les

secteurs miniers et pétroliers. Le Liberia a adhéré à l’ITIE en

2007 et a créé le LEITI en tant qu’agence gouvernementale

autonome en 2009. L’agence LEITI regroupe des

représentants du gouvernement, des OSC et du secteur

privé, les organisations internationales et représentants des

communautés jouant le rôle d’observateurs. La particularité

de LEITI est que, contrairement aux autres processus

de l’ITIE, en plus des industries minières, pétrolières et

gazières, l’initiative libérienne inclut les secteurs forestier

et agricole (en particulier les concessions agricoles). Le

Liberia a intégré le secteur forestier suite à des accusations

faisant état d’activités illégales dans ce secteur et suite aux

pertes de recettes enregistrées. Dans le secteur forestier,

l’initiative LEITI divulgue des informations sur les questions

suivantes : le processus d’adjudication des marchés et

tous les droits d’accès aux ressources forestières ; les

recettes, par l’intermédiaire de la publication de rapports

de rapprochement en utilisant des données provenant des

services publics, comparées avec celles provenant des

entreprises privées ; l’affectation des recettes recueillies et

la gestion des ressources ; et la sensibilisation du public

sur les contrats.

2. Le processus APV/FLEGT. Le Liberia a démarré les

négociations sur le processus FLEGT en 2009 et a signé son

APV avec l’UE en 2011. Le pays avait initialement prévu de

délivrer les autorisations FLEGT en 2014. Le Liberia a reçu

d’importants financements pour soutenir les améliorations

dans le domaine de la gouvernance de vue de la délivrance

des autorisations FLEGT. Un exemple d’initiative liée au

processus APV/FLEGT est l’élaboration d’un système de

traçabilité de la chaîne de contrôle (CCTS) mis en œuvre

par la Société générale de surveillance (SGS). La SGS a

établi un système de contrôle des activités d’exploitation

du bois qui couvre la chaîne : des inventaires des forêts

où des arbres sur pied sont étiquetés, jusqu’à l’exportation

de bois brut. Ce système permet au gouvernement de

percevoir des recettes étant donné que la SGS délivre des

factures aux compagnies forestières en son nom sur la

base des données recueillies grâce aux CCTS. Le projet

mené en collaboration avec la SGS devrait prendre fin en

2018, mais il recèle une composante « renforcement des

capacités » qui devrait permettre à la FDA de prendre le

relais de la gestion du système de contrôle.

3. Le Forest Sector Program (programme relatif au secteur

forestier) a été récemment signé entre le Liberia et la

Norvège, pour un montant de 120 millions d’USD, avec

pour objectif de lutter contre le déboisement au Liberia. Le

fonds norvégien sera géré par la Banque mondiale et utilisé

pour : i) apporter un appui budgétaire au gouvernement

du Liberia ; ii) renforcer les capacités institutionnelles (la

principale composante gouvernance) ; iii) et soutenir la

rémunération en suivant un modèle similaire à la REDD+.

Le programme comprend deux principaux éléments

déclencheurs, à savoir un moratoire sur l’allocation des

nouvelles concessions d’exploitation de palmiers à huile et

l’intégration d’un plan d’aménagement forestier dans les

concessions forestières.

4. Les initiatives supplémentaires pour soutenir le secteur

forestier. Plusieurs autres initiatives financées par des

bailleurs de fonds, visant à améliorer la gouvernance

du secteur forestier, sont en cours. Il s’agit notamment

: du projet GIS sur la conservation transfrontalière ; le

projet d’appui à la gestion environnementale mondiale

(GEMS) de l’USAID qui fournit un soutien institutionnel

à plusieurs secteurs ; et le projet Forest Incomes For

3 Opinion tirée de l’initiative LEITI.

Page 67: RAPPORT PRINCIPAL · forestière illégale du bois et le commerce qui y est associé, grâce notamment à la préparation de stratégies nationales pour l’application des réglementations

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

Environmental Sustainability (recettes forestières pour la

durabilité environnementale) pour soutenir les activités de

conservation dans les forêts communautaires.

Impact des initiatives en faveur de la gouvernance forestière

De nombreuses initiatives mises en œuvre au Liberia pour

améliorer la gouvernance du secteur forestier semblent avoir eu

des effets perceptibles. Comme l’a relevé un acteur interrogé, les

impacts positifs du processus FLEGT et d’autres initiatives de

gouvernance forestière vont audelà du secteur, en contribuant

à l’amélioration de la gouvernance en général. Les principaux

avantages identifiés par la majorité des parties prenantes sont

les suivants :

La participation ou la consultation des acteurs. Grâce au

processus APV/FLEGT, un dialogue sur la gouvernance

forestière a été initié ; les acteurs du secteur échangent plus

fréquemment et des conflits ont été apaisés.

Le renforcement des capacités. Plusieurs initiatives en matière

de gouvernance forestière ont contribué au renforcement

des capacités des communautés sur les questions juridiques

(Client Earth, Fern, Global Witness) ; de même, les capacités

techniques de la FDA ont été renforcées grâce à la mise en

place du système de vérification de la légalité et de la traçabilité

du Liberia.

La collecte de recettes par le gouvernement. Grâce à l’initiative

LEITI et au processus FLEGT, les recettes forestières perçues

par le gouvernement ont augmenté de manière substantielle.

La transparence. Certains acteurs estiment que le secteur

forestier est devenu le secteur le plus transparent du Liberia.

Un exemple souvent cité est la suspension de certains contrats

de récolte de grumes (en particulier les permis d’exploitation

privée) qui n’avaient pas été attribués dans les règles de l’art.

L’accroissement de l’attractivité pour le Liberia3. Un plus

grand nombre d’investisseurs sont plus confiants à l’égard du

Liberia, ce qui permet d’améliorer la croissance économique

du pays. Il en est de même pour les bailleurs de fonds, qui

sont plus disposés à soutenir le secteur forestier, et même le

développement économique du pays.

Chaînes de valeur prioritaires dans la foresterie en vue des

interventions

Sur les trois chaînes de valeur pouvant être identifiées au Liberia

(marchés d’exportation, marchés régionaux, marchés intérieurs),

comme dans la majorité des pays africains, celle concernant les

exportations vers l’Asie et l’Europe a énormément bénéficié des

initiatives de gouvernance forestière menées au Liberia ces dix

dernières années. Il y a eu peu de valeur ajoutée pour un nouveau

programme de gouvernance visant à soutenir le secteur du bois

industriel formel dans le pays. Plutôt, un développement accru

du secteur industriel aurait été obtenu grâce au développement

de l’infrastructure du pays dans son ensemble.

Par ailleurs, le secteur informel qui fournit les produits ligneux

aux marchés intérieurs aurait plus d’impact sur les ressources

forestières. Il demeure cependant non structuré et non contrôlé.

La viabilité du secteur forestier dans le pays pourrait être

menacée à cause du soussecteur informel ou artisanal. Plus

d’initiatives doivent être menées en direction du soussecteur

informel.

De plus, les exportations régionales de bois par voie terrestre

sont plus ou moins connues. Elles restent néanmoins une

occasion à saisir pour l’avenir du secteur du bois libérien, à

condition qu’un dialogue régional soit lancé et que les questions

de gouvernance soient abordées par les pays de l’Afrique de

l’Ouest.

Conclusion provisoire sur le Liberia

Le Liberia est, sembletil, le pays le plus densément couvert de

forêts de l’Afrique de l’Ouest. Le secteur forestier continue de

jouer un rôle important dans l’économie nationale, car il contribue

à plus de 10 % au PIB libérien. Pendant très longtemps, le

secteur forestier était connu pour les activités illicites qui y étaient

menées et considéré comme une importante source de perte de

recettes pour le gouvernement. Depuis 2007, plusieurs efforts

sont déployés pour améliorer le secteur forestier au Liberia. Des

résultats encourageants ont été obtenus, notamment en matière

de renforcement des capacités, de transparence et de dialogue

sectoriel.

Néanmoins, des obstacles subsistent, dont les plus importants

sont : le secteur informel qui approvisionne les marchés

intérieurs ; l’interface forêt/agriculture ; l’utilisation générale des

terres et le régime foncier ; et les intérêts politiques qui exercent

des pressions sur le secteur. Ces obstacles doivent être

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

éliminés pour que le secteur forestier puisse mieux contribuer

à l’économie nationale et à une utilisation durable des forêts au

Liberia.

1c. Rapport sur le Gabon

Entretiens

Des discussions ont eu lieu avec 19 acteurs clés représentant le

gouvernement et notamment les ministères chargés des forêts

et de la planification économique (sept entretiens), les bailleurs

de fonds (un), le secteur privé (trois), les représentants de

forêts communautaires (un), les OSC (deux) et les organisations

régionales ou internationales (cinq). La plupart des échanges

ont eu lieu avec des groupes de deux à trois personnes, bien

qu’il y ait eu des discussions individuelles avec deux acteurs.

Perception de l’état du secteur forestier au Gabon

Le Gabon recèle des forêts denses qui couvrent plus de

80 % du territoire national. En raison d’une très faible densité

de la population, le pays a le couvert forestier le plus élevé

par habitant en Afrique centrale, et pratiquement le taux de

déboisement le plus faible d’Afrique. Près de 13 % du territoire

national est affecté aux aires protégées, en dehors des 11 %

affecté aux parcs nationaux. Bien que l’économie nationale

repose fortement sur l’exploitation et l’exportation de pétrole

brut, le secteur forestier joue aussi un rôle important. Ce

secteur occupe actuellement le deuxième rang en termes de

recettes d’exportation du pays et reste le principal pourvoyeur

d’emplois dans le secteur privé. La politique d’industrialisation

du gouvernement gabonais repose à 90 % sur la transformation

du bois.

En 2001, avec l’adoption d’une nouvelle loi forestière, le Gabon

a adopté le principe de la gestion durable des forêts (GDF) par

l’intermédiaire des concessions forestières. La loi forestière

distingue quatre différents types de permis forestiers : le permis

forestier associé (PFA) qui peut couvrir jusqu’à 15 000 ha ; la

concession forestière sous aménagement durable (CFAD),

couvrant jusqu’à 200 000 ha ; les forêts communautaires pour

un maximum de 5 000 ha ; et le permis de gré à gré (PGG) délivré

pour les pieds d’arbres à couper. La CFAD est généralement

attribuée aux grandes sociétés détenues par des Asiatiques

ou des Européens, tandis que les PFA sont délivrés aux petites

entreprises locales (même s’ils peuvent être conjointement

gérés avec les CFAD). Les PGG sont le plus souvent délivrés aux

élites locales qui vendent des arbres debout à des compagnies

forestières ou à des exploitants forestiers à la tronçonneuse.

La foresterie communautaire se développe lentement et reste

plutôt embryonnaire.

Le code forestier de 2001 a mis l’accent sur l’attribution de

permis forestiers, mais il comprend quelques lacunes en ce

qui concerne la mise en œuvre des plans d’aménagement. Une

nouvelle législation forestière est donc en préparation, laquelle

devrait mettre l’accent sur l’aménagement des concessions

et la transformation du bois. Le code forestier en préparation

devrait également mieux intégrer les conventions internationales

signées par le Gabon au cadre juridique du pays.

En 2009, le gouvernement du Gabon a décidé d’interdire les

exportations de grumes à partir de 2010. L’interdiction des

exportations de billes de bois a eu d’importantes répercussions

tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du secteur forestier. La capacité

de transformation du bois a augmenté, mais la contribution de ce

secteur au PIB a baissé, passant de 1,4 % en 2009 pour s’établir

autour de 1 % en 2015. Le temps nécessaire à l’ajustement de

ce secteur s’est avéré plus long que prévu. Par coïncidence,

l’application de l’interdiction des exportations de grumes s’est

accompagnée d’un intérêt accru des investisseurs chinois pour

l’industrie du bois. À l’heure actuelle, ils gèrent près de 50 %

des forêts affectées à la production de bois. Les nouveaux

investisseurs chinois éprouveraient plus de difficultés à appliquer

la réglementation en matière de gestion durable des forêts. Une

récente étude de la Banque mondiale présente les faiblesses

et les atouts de l’interdiction des exportations de grumes au

Gabon. Elle propose la mise en œuvre d’un programme d’appui

dans six sections afin de renforcer la contribution du secteur

forestier à l’économie gabonaise.

Les principaux problèmes de gouvernance

L’absence d’une déclaration de politique forestière. En théorie,

avant l’élaboration et l’application des lois, il est recommandé

d’avoir une déclaration de politique forestière énonçant la

vision du pays en ce qui concerne la gestion des ressources

forestières. Cette déclaration devrait en outre guider et

déterminer les décisions et les actions actuelles et à venir dans

le secteur. Une déclaration de politique forestière élaborée

de manière participative devrait faciliter la mise en œuvre et

l’application des lois qui découlent de la politique. La législation

et la réglementation forestières sont parfois élaborées pour

satisfaire et atténuer la pression exercée par la communauté

internationale, afin d’atteindre les objectifs ciblés à court terme.

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

L’attribution des permis forestiers. Le Gabon est censé avoir

officiellement affecté 11 millions d’hectares à la production

durable de bois. Cependant, il ressort des estimations actuelles

que 15 millions d’hectares sont en concession forestière, ce qui

suscite des préoccupations au sujet de la surexploitation des

ressources forestières. La superficie allouée aux concessions

forestières est trop grande, faute de coordination entre les

administrations forestière et fiscale. L’administration forestière

est censée procéder à l’attribution et au retrait des concessions

forestières, le cas échéant. Cependant, l’administration fiscale a

été impliquée dans l’attribution des droits de coupe forestière en

octroyant un moratoire aux sociétés, à leur demande.

L’interface forêts/agriculture. Pour doper son développement

économique, le Gabon a encouragé l’ouverture de grandes

exploitations agricoles industrielles (des agroindustries) de

palmier à huile et de caoutchouc. L’administration actuelle

s’est engagée à convertir quatre millions d’hectares de forêts

en plantations agricoles industrielles. La multinationale

singapourienne Olam a reçu une concession forestière de

100 000 ha pour créer des plantations de palmier à huile

et de caoutchouc. De même, 200 000 ha ont été réservés

aux petites exploitations de palmier à huile sous la forme

de coentreprises avec Olam ou avec d’autres investisseurs

étrangers. L’attribution de concessions agricoles relève de la

compétence du ministère de l’Agriculture, qui ne travaille pas en

synergie comme il conviendrait avec le ministère en charge des

forêts. Ce manque de coordination a entraîné l’octroi de millions

d’hectares aux multinationales, au détriment du couvert forestier

et sans un aménagement judicieux du territoire. Il n’existe pas

de normes techniques ni juridiques pour guider les activités des

agroindustries.

L’application des lois et règlements au sein et en dehors du

secteur forestier est très souple et fortement influencée par les

intérêts de l’élite politique et économique. Un fait anecdotique

concerne le scandale de Kevazengo (Guibourtia spp.) qui

s’est produit en 2016. L’essence dénommée Kevazengo

(encore appelée Bubinga) est une essence forestière de très

grande valeur, très appréciée par les marchés chinois. Mais

sa régénération pose problème. Son exploitation est donc très

limitée dans la plupart des pays d’Afrique centrale. Au Gabon,

l’exploitation de Kevazengo a été interdite, mais l’exportation

de produits en bois dérivés de cette essence s’est néanmoins

poursuivie. Le réseau des personnes impliquées a été découvert,

et quelques responsables en service au ministère en charge

des forêts ont été jetés en prison pendant quelques semaines.

Finalement, ces responsables ont repris leurs fonctions, et

certains d’entre eux ont même été promus.

L’approvisionnement du marché local en bois. Le marché local

du Gabon n’est pas énorme au vu de la faible population du

pays. Cependant, la majeure partie du marché (y compris les

marchés publics) est approvisionnée par les scieries, dont les

activités ne sont pas contrôlées.

Un cadre juridique et technique insuffisant pour la gestion des

ressources fauniques. Le Gabon compte 13 parcs nationaux

bien protégés contre le braconnage et l’exploitation de la faune.

Néanmoins, dans toutes les autres parties du territoire, la

viande de brousse est chassée sans contrôle. Dans l’ensemble,

les responsables de l’administration gabonaise en charge

des forêts pensent que la gestion de la faune ne saurait être

réduite aux aires protégées et aux mesures de lutte contre

le braconnage. Selon eux, traditionnellement, l’élevage est

faible, et la population s’appuie sur le gibier comme source de

protéines animales.

Le déséquilibre entre la mission assignée aux services publics

et les moyens qui leur sont alloués. Ce déséquilibre concerne

les ressources humaines, la logistique et les moyens financiers.

Initiatives prises pour régler les problèmes de gouvernance

forestière

Le processus APV/FLEGT. Le Gabon s’est engagé dans le

processus APV/FLEGT en 2010 en lançant des négociations

avec l’UE. Cette phase a conduit à la création d’un comité

de coordination technique (CCT). Au début, l’objectif était de

signer l’APV avant décembre 2012, mais les négociations ont

été suspendues en 2012 sans que des progrès notoires aient

été réalisés. Officiellement, la suspension était mue par le fait

que le gouvernement gabonais n’avait pas alloué de ressources

financières à ce processus. À titre d’exemple, le CCT a élaboré

une grille de légalité, qui devait être testée sur le terrain, mais

il n’y avait pas de fonds pour réaliser des tests sur le terrain.

Les négociations ont été relancées en 2015 lorsque le Gabon a

bénéficié d’un concours financier de l’UE pour mettre en œuvre

le Programme d’appui à la gouvernance sectorielle (Pagos). Ce

programme permet de travailler sur le système de vérification

de la légalité. À l’heure actuelle, aucun délai n’est fixé pour la

signature de l’APV, même si le processus fonctionne sur la base

de feuilles de route de six mois.

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

La certification forestière. La certification forestière est une

initiative du secteur privé qui non seulement améliore la

gouvernance forestière, mais qui contribue également à la

gestion durable des concessions forestières. Certes, le Gabon

est le premier pays à avoir accueilli une compagnie forestière

certifiée, en 1996, mais ce certificat a été retiré quelques

semaines plus tard. À l’heure actuelle, le Gabon compte près

de 1,9 million d’hectares de forêts certifiées par le FSC pour une

gestion durable (Cerutti et al., 2014), gérées par trois compagnies

forestières. De plus, près de 600 000 ha sont certifiés selon des

systèmes de certification de la légalité, tels qu’OLB ou TLTV. La

certification FSC a fait l’objet d’une grande promotion au Gabon

de la part d’ONG internationales, notamment le WWF.

Le projet conjoint de l’Organisation africaine du bois (OAB) et

de l’Organisation internationale des bois tropicaux (OIBT) sur les

principes, les critères et les indicateurs (PCI) régissant la gestion

durable des forêts. Depuis 2003, l’OAB et l’OIBT exécutent un

projet visant à promouvoir la gestion durable des forêts dans

leurs pays membres conjoints en Afrique grâce à l’utilisation

des PCI. Les PCI offrent un cadre d’évaluation des pratiques

de gestion dans les concessions forestières (et au niveau

national) sur la base des normes de gestion durable. Le projet

conjoint OAB/OIBT a élaboré un manuel d’audit. Au Gabon, 16

concessions forestières ont été contrôlées volontairement sur

la base des normes de l’OAB/OIBT afin de faire la lumière sur

les dissimilitudes entre leurs pratiques de gestion et les normes

de GDF.

Le renforcement des capacités de la société civile et des

communautés locales. À l’initiative d’ONG internationales telles

que le WWF, il y a eu un certain nombre de projets et d’activités

visant à renforcer les capacités des organisations locales

autour de questions juridiques et de la surveillance des activités

forestières, afin d’améliorer le partage des avantages.

Impact des initiatives relatives à la gouvernance forestière

L’amélioration des pratiques de gestion durable. Peutêtre que

l’impact le plus important sur le secteur forestier au Gabon

ces 15 dernières années a été l’adoption de pratiques plus

durables (comme effets de la certification forestière et d’autres

initiatives relatives à la gouvernance forestière) dans la gestion

des concessions forestières. L’amélioration observée concerne

précisément la CFAD et le nombre de PFA. Toutes les parties

prenantes ont convenu que les concessions forestières certifiées

sont plus prédisposées à faire appliquer les lois et règlements

du Gabon et suscitent moins de conflits avec les communautés

locales. Il faut souligner que les améliorations observées dans

les pratiques de gestion forestière et la gouvernance des

concessions forestières ne sont pas liées au processus FLEGT,

mais plutôt à la certification forestière, promue par l’OIBT et des

ONG internationales (en l’occurrence le WWF). Néanmoins, la

certification forestière semble être en perte de vitesse, car de

nouvelles compagnies forestières ne souhaitent pas s’engager

dans le processus. En effet, ces sociétés approvisionnent les

marchés émergents asiatiques qui sont moins sensibles aux

problèmes environnementaux. Le WWF Chine et Le WWF Gabon

ont commencé à travailler avec les principaux importateurs

de bois tropicaux en Chine pour promouvoir la demande de

produits certifiés provenant d’Afrique centrale. La certification

forestière a un sérieux handicap : elle semble favoriser un

groupe d’entreprises vertueuses tandis que la majeure partie du

secteur privé reste en deçà du niveau de gouvernance requis.

En revanche, le processus APV/FLEGT vise à changer la façon

de faire des affaires, du moins avec les entreprises exportatrices

de bois du Gabon.

Dialogue entre les acteurs du secteur forestier. Au cours des cinq

dernières années, la prise de décision dans le secteur forestier

a considérablement changé. Le gouvernement demande

désormais aux représentants du secteur privé et de la société

civile de contribuer à la préparation de politiques publiques

destinées à façonner ce secteur. Le dialogue entre les acteurs

du secteur forestier a été particulièrement renforcé depuis

que le Gabon a commencé à négocier l’APV en 2010. À titre

d’illustration, les représentants d’entreprises privées et d’OSC

travaillent avec les agents publics pour préparer des révisions

de la loi forestière permanente. Malheureusement, le dialogue

entre les acteurs du secteur forestier n’est pas suffisant pour

s’attaquer aux facteurs extrasectoriels (pression exercée par

les industries minières ou agroindustrielles) qui pourraient avoir

un impact négatif sur les activités et les ressources forestières.

Un dialogue devrait aussi être établi entre d’autres secteurs du

développement rural afin d’aboutir à une compréhension et à

un accord communs sur les principaux problèmes d’utilisation

des terres.

Amélioration des capacités des OSC et des communautés

locales. Un certain nombre d’organisations locales ont fait

leur apparition ces deux dernières décennies, en nouant des

partenariats avec des organisations internationales en vue

du renforcement des capacités en matière de défense de

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Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

l’environnement, de la conservation des forêts et de la promotion

des populations rurales qui tirent leur subsistance de la forêt.

Les problèmes liés au partage des avantages de la gestion des

concessions forestières ont donc été mis en évidence. Des

accords ont été conclus avec le gouvernement pour mieux tenir

compte des besoins des communautés locales lors du partage

des revenus du secteur forestier.

Les chaînes de valeur prioritaires du secteur forestier devant

bénéficier d’une intervention

En raison de sa faible densité de population, l’exportation de

produits ligneux a toujours été plus importante par rapport au

marché domestique, ce qui devrait être toujours le cas dans les

années à venir. Pour cette raison, le pays a à juste titre élaboré

des politiques destinées à tirer le meilleur parti de sa chaîne de

valeur des exportations de bois. Avant 1992, le Gabon était le

seul pays d’Afrique centrale à avoir dans son gouvernement

un ministère chargé de l’économie forestière. Jusqu’à présent,

toutes les tentatives visant à améliorer la gouvernance

du secteur forestier devaient accroître les bénéfices des

exportations de bois ayant des répercussions sur les recettes

publiques. Cependant, la demande nationale de produits

ligneux doit être examinée, d’autant plus que l’illégalité prévaut

dans la chaîne de valeur et que l’impact de l’exploitation du bois

sur l’approvisionnement du marché national demeure inconnu.

Le Gabon a le potentiel pour jouer un rôle important dans le

commerce intraafricain du bois en raison de ses ressources

forestières abondantes. Cependant, un tel rôle n’a pas été

étudié, et les exportations de bois du Gabon vers d’autres pays

africains restent des cas isolés.

Conclusion provisoire sur le Gabon

Le Gabon recèle de nombreuses ressources naturelles

(y compris les ressources forestières) et sa population reste

faible (1,6 million d’habitants). Dans ces conditions, il a l’un

des revenus par habitant les plus élevés d’Afrique. L’économie

repose en grande partie sur ses ressources pétrolières, même

si la production pétrolière a diminué ces dernières années.

Compte tenu de ses revenus, le Gabon est moins éligible que

d’autres à l’aide publique au développement. Ces dernières

années, il a essayé de diversifier son économie. Le secteur du

bois joue un rôle important dans l’économie nationale, car il est

l’un des principaux pourvoyeurs d’emplois, mais il représente

aussi un pilier important de la politique d’industrialisation du

pays. Au Gabon, le secteur forestier est en grande partie axé

sur l’aménagement de concessions forestières industrielles

destinées à approvisionner des marchés internationaux de

bois. Il est par conséquent sensible aux exigences des marchés

internationaux comme l’UE. En vue de répondre aux normes des

marchés dominants, un certain nombre de sociétés forestières

au Gabon ont adopté la certification forestière, ce qui a eu

une influence positive sur la gouvernance. Cela dit, le Gabon

a adopté une interdiction des exportations de grumes en 2010

qui a eu des répercussions mitigées sur ce secteur. De même,

le Gabon a lancé l’APV/FLEGT en 2010, mais le processus a

été suspendu deux ans plus tard pour cause de contraintes

financières.

Le secteur forestier au Gabon fait face à un certain nombre de

problèmes : la mauvaise application des lois et règlements ;

la faible capacité de l’administration forestière à surveiller et à

s’acquitter de ses fonctions ; le manque de coordination entre le

secteur forestier et les autres secteurs du développement rural ;

et l’omniprésence de l’élite politique dans ce secteur.

Le Gabon doit encore réformer le secteur forestier pour que

celuici contribue plus à l’économie nationale. Le processus

APV/FLEGT doit être mené à son terme pour permettre à toutes

les entreprises de la filière bois de continuer à approvisionner les

marchés internationaux. La réforme devrait également englober

les marchés nationaux qui, s’ils sont peu importants, n’en

constituent pas moins des poches d’anarchie. Il faut renforcer le

potentiel du Gabon pour que celuici devienne un acteur majeur

du commerce intraafricain de bois.

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Liste des sigles et acronymes

ACPFLEGT Programme d’application des réglementations forestières et de la gouvernance dans les

pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique

AFLEGT Application des réglementations et gouvernance forestières en Afrique

ANRC Centre africain des ressources naturelles

APV Accords de partenariat volontaire

BAD Banque africaine de développement

CAF Contrôle de l’aménagement forestier

CCTS Système de traçabilité de la chaîne de contrôle

CE Commission européenne

CEDEAO Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest

CEEAC Communauté économique des États de l’Afrique centrale

CFAD Concession forestière d’aménagement durable

CGF Contrat d’aménagement forestier

COMIFAC Commission interministérielle des forêts d’Afrique centrale

CTC Comité technique de coordination

EBR Équivalent bois rond

ECEAS Communauté économique des États de l’Afrique de l’Est

FAO Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture

FDA Autorité de développement forestier

FLEG Application des réglementations forestières et gouvernance

FLEGT Application des réglementations forestières, gouvernance et échanges commerciaux

FNUF Forum des Nations Unies sur les forêts

FSC Forest Stewardship Council

GDF Gestion durable des forêts

GEMS Projet d’appui à la gestion environnementale mondiale

HCVF Forêt à haute valeur de conservation

ITIE Initiative pour la transparence dans les industries extractives

LEITI Initiative libérienne pour la transparence dans les industries extractives

OAB Organisation africaine du bois

OIBT Organisation internationale des bois tropicaux

ONG Organisation non gouvernementale

OSC Organisation de la société civile

PAGOS Programme d’appui à la gouvernance sectorielle

PAPPFG Projet aménagement des petits permis forestiers gabonais

PCI Principes, critères et indicateurs

PEF Permis d’exploitation forestière

PEFC Programme de reconnaissance des certifications forestières

PFA Permis forestier associé

PFE Domaine forestier permanent

PGG Permis de gré à gré

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

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PIB Produit intérieur brut

RCA République centrafricaine

RDC République démocratique du Congo

REDD Réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts

RU RoyaumeUni

SADC Communauté de développement de l’Afrique australe

SGS Société générale de surveillance

SVL Système de vérification de l’origine légale du bois

UE Union européenne

USA ÉtatsUnis d’Amérique

Rapport principal

Évaluer les progrès accomplis dans la réalisation du Plan d’action pour l’application des réglementations forestières et la gouvernance (FLEG) en Afrique

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Les points de vue exprimés dans le présent document sont ceux des auteurs et ne reflètent

pas nécessairement les opinions et politiques de la Banque africaine de développement

(BAD) ni de son Conseil des gouverneurs ni de son Conseil d’administration ni des

gouvernements qu’ils représentent.

La BAD et son Conseil d’administration ne garantissent pas l’exactitude des données

contenues dans cette publication et déclinent toutes responsabilités liées à une

quelconque conséquence de leur utilisation. En désignant ou faisant référence à un

territoire ou une zone géographique donné(e), ou utilisant le terme « pays » dans le

présent document, la BAD n’entend porter aucun jugement sur le statut juridique ou tout

autre statut d’un territoire ou d’une zone donné(e). La BAD encourage l’impression et la

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reconnaissance appropriée de la BAD. Les utilisateurs ne sont pas autorisés à vendre,

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exprès et écrit de la BAD.

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