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Rechute de méningite à Escherichia coli due à un méningocèle sacré dans le cadre d’une maladie de Marfan, traitée par antibiothérapie prolongée seule Marc Bigaré, Xavier Lesaffre, Jean-Luc Delassus, Redouane Bakir, Marie-Anne Bouldouyre Centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger, service de médecine interne et de maladies infectieuses, 1, avenue Robert-Ballanger, 93603 Aulnay-sous-Bois, France Correspondance : Marie-Anne Bouldouyre, Centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger, service de médecine interne et de maladies infectieuses, 1, avenue Robert- Ballanger, 93603 Aulnay-sous-Bois, France. [email protected] Disponible sur internet le : 19 juillet 2013 Relapse of Escherichia Coli meningitidis due to sacral meningocele in Marfan syndrome, treated only with antibiotherapy La patiente de 46 ans consultait pour aphasie fébrile. Cette patiente était connue comme ayant un syndrome de Marfan depuis une dissection aortique en 1997, ayant nécessité une intervention de Benthal en urgence avec prothèse valvulaire mécanique. Elle avait ensuite bénéficié d’une cure chirurgicale d’un anévrisme thoraco-abdominal en 2009 avec mise en place d’une prothèse endovasculaire, compliquée d’une lésion de l’artère d’Adamkiewicz avec paraplégie séquellaire. L’examen trouvait un syndrome méningé avec un score de Glascow à 10. Il existait une méningite purulente hypoglycorachique (3500 éléments dont 95 % de polynucléaires neu- trophiles, glycorachie inférieure à 0,1 mmol/L) et de nombreux bacilles gram-négatifs à l’examen direct. La patiente était traitée par céfotaxime et amikacine. Les hémocultures, l’examen cytobactériologique des urines et la ponction lombaire étaient positifs au même Escherichia coli. Une tomodensitométrie abdominale montrait une dilatation de l’aorte abdo- minale sans abcès périprothétique, l’IRM cérébrale était normale et l’échographie transoeso- phagienne ne trouvait pas d’endocardite. Devant une amélioration clinique et biologique franche et rapide, l’antibiothérapie (changée pour aztreonam 6 g IVSE en raison d’une Presse Med. 2014; 43: 9395 ß 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com 93 Images en médecine tome 43 > n81 > janvier 2014 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.02.330

Rechute de méningite à Escherichia coli due à un méningocèle sacré dans le cadre d’une maladie de Marfan, traitée par antibiothérapie prolongée seule

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Presse Med. 2014; 43: 93–95� 2013 Elsevier Masson SAS.Tous droits réservés.

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Disponible sur internet le :

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Rechute de méningite à Escherichia coli due àun méningocèle sacré dans le cadre d’unemaladie de Marfan, traitée parantibiothérapie prolongée seule

Marc Bigaré, Xavier Lesaffre, Jean-Luc Delassus, Redouane Bakir,Marie-Anne Bouldouyre

Centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger, service de médecine interne etde maladies infectieuses, 1, avenue Robert-Ballanger, 93603 Aulnay-sous-Bois,France

Correspondance :Marie-Anne Bouldouyre, Centre hospitalier intercommunal Robert-Ballanger,service de médecine interne et de maladies infectieuses, 1, avenue Robert-Ballanger, 93603 Aulnay-sous-Bois, [email protected]

Relapse of Escherichia Coli meningitidis due to sacral me

ningocele in Marfan syndrome, treated only with antibiotherapy

La patiente de 46 ans consultait pour aphasie fébrile. Cette patiente était connue comme ayantun syndrome de Marfan depuis une dissection aortique en 1997, ayant nécessité une interventionde Benthal en urgence avec prothèse valvulaire mécanique. Elle avait ensuite bénéficié d’une curechirurgicale d’un anévrisme thoraco-abdominal en 2009 avec mise en place d’une prothèseendovasculaire, compliquée d’une lésion de l’artère d’Adamkiewicz avec paraplégie séquellaire.L’examen trouvait un syndrome méningé avec un score de Glascow à 10. Il existait uneméningite purulente hypoglycorachique (3500 éléments dont 95 % de polynucléaires neu-trophiles, glycorachie inférieure à 0,1 mmol/L) et de nombreux bacilles gram-négatifs àl’examen direct. La patiente était traitée par céfotaxime et amikacine. Les hémocultures,l’examen cytobactériologique des urines et la ponction lombaire étaient positifs au mêmeEscherichia coli. Une tomodensitométrie abdominale montrait une dilatation de l’aorte abdo-minale sans abcès périprothétique, l’IRM cérébrale était normale et l’échographie transoeso-phagienne ne trouvait pas d’endocardite. Devant une amélioration clinique et biologiquefranche et rapide, l’antibiothérapie (changée pour aztreonam 6 g IVSE en raison d’une

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a, b : IRM médullaire (coupes sagittales en T1 après injection degadolinium) retrouvant une image de méningocèle àdéveloppement central, atteignant les corticales antérieures etpostérieures, avec rehaussement net des parois après injectionde gadolinium

Figure 2

Scanner pelvien retrouvant également le méningocèle sacré

M Bigaré, X Lesaffre, J-L Delassus, R Bakir, M-A Bouldouyre

toxidermie) était arrêtée après 21 jours, sans ponction lom-baire de contrôle chez cette patiente sous antivitamine K.Mais, neuf jours après l’arrêt de l’antibiothérapie, la patienteprésentait le même tableau clinique avec une méningite puru-lente hypoglycorrachique à E. Coli (9999 éléments/mm3 dont98 % de PNN, hyperprotéinorachie à 5,16 g, glycorachie à 0 g/L). Le traitement par aztreonam était repris avec une améliora-tion rapide. Devant cette rechute de méningite à E. Coli, étaienteffectués : un examen parasitologique des selles (absenced’anguillule), une nouvelle TDM abdominopelvienne (pasd’argument pour une infection endovasculaire), et un TEP-scanner (rendu négatif, malgré une « grosse hétérogénéitéde fixation sacrée, peu spécifique chez cette patienteparaplégique »). L’IRM médullaire mettait en évidence unméningocèle au niveau du sacrum avec rehaussement péri-phérique par le gadolinium, expliquant l’absence de stérilisa-tion du LCR (figure 1), en fait déjà visible sur la TDM initiale(figure 2).Une intervention neurochirurgicale étant risquée (chez cettepatiente paraplégique déjà multi-opérée, avec une fragilitévasculaire due à sa maladie de Marfan), un traitement parantibiothérapie maximale était décidé, de façon empirique par12 semaines d’aztreonam 6 g/j en IVSE, avec dosages intrathé-caux adaptés (21,6 mg/L à j13 et 8 mg/L à S5). Les ponctionslombaires s’amélioraient progressivement, avec normalisationde la glycorachie à S5, diminution des éléments et de la

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protéinorachie à S12 sans normalisation (80 éléments/mm3 et0,92 g/L de protéinorachie). L’antibiothérapie a été arrêtée etla patiente n’avait pas eu de rechute à 14 mois d’évolution.

Les deux seuls cas de méningites récidivantes sur méningocèlerapportés dans la littérature (dont un avec maladie de Marfan)ont eu une cure chirurgicale avec succès [1,2]. À notre connais-sance, cette observation est la première rapportant une guéri-son clinique avec antibiothérapie prolongée. Cette observation

Références[1] Hatano A, Akiyama K, Nagayama M, Takagi

S. Case of Marfan’s syndrome with anteriorsacral meningocele along with recurringbacterial meningitis. Rinsho Shinkeigaku2006;46(9):658-60.

[2] Miletic D, Poljak I,

Sestan B, Troselj-Vusacral meningocele

meningitis in a preOrthopedics 2008;31(

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attire l’attention sur la possibilité de rechute de méningitebactérienne chez les patients atteints de la maladie de Marfandont l’ectasie durale allant jusqu’au méningocèle fait partie descritères majeurs du diagnostic (retrouvée dans 40 à 90 %) [3],la nécessité de ponction lombaire de contrôle pour les bacillesgram-négatifs et la possibilité d’un traitement médical parantibiothérapie prolongée.

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Déclaration d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de conflitsd’intérêts en relation avec cet article.

ja N, Valkovic P,B. Giant anteriornting as bacterial

sly healthy adult.82.

[3] Le Parc JM. Le syndrome de Marfan.Orphanet 2005, https://www.orpha.net/data/patho/Pro/fr/Marfan-FRfrPro109.pdf.

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