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RENÉ GIRARD : LE DARWIN DES SCIENCES HUMAINES OU UN « ALLUMÉ QUI SE PREND POUR UN PHARE » ? DE RENÉ POMMIER Laurent Fedi Vrin | Le Philosophoire 2010/2 - n° 34 pages 117 à 122 ISSN 1283-7091 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2010-2-page-117.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Fedi Laurent, « René Girard : le Darwin des sciences humaines ou un « allumé qui se prend pour un phare » ? de René Pommier », Le Philosophoire, 2010/2 n° 34, p. 117-122. DOI : 10.3917/phoir.034.0117 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Vrin. © Vrin. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 12/04/2014 12h49. © Vrin Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 12/04/2014 12h49. © Vrin

René Girard : le Darwin des sciences humaines ou un « allumé qui se prend pour un phare » ? de René Pommier

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RENÉ GIRARD : LE DARWIN DES SCIENCES HUMAINES OU UN «ALLUMÉ QUI SE PREND POUR UN PHARE » ? DE RENÉ POMMIER Laurent Fedi Vrin | Le Philosophoire 2010/2 - n° 34pages 117 à 122

ISSN 1283-7091

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2010-2-page-117.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Fedi Laurent, « René Girard : le Darwin des sciences humaines ou un « allumé qui se prend pour un phare » ? de

René Pommier »,

Le Philosophoire, 2010/2 n° 34, p. 117-122. DOI : 10.3917/phoir.034.0117

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La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Le philosophoire, n° 34, 2010, pp. 117-122

René Girard : le Darwin des sciences humaines ou un « allumé qui se prend

pour un phare » ?

Laurent Fedi

René Pommier, René Girard, un allumé qui se prend pour un phare, Paris, éditions Kimé, collection « détours littéraires », 2010.

et iconoclaste qu’est René Pommier est connu des spécialistes de littérature pour sa réfutation méthodique de la « lecture » de Racine par Roland Barthes et pour ses

nombreuses analyses dans lesquelles il pourfend les interprétations de la « nouvelle critique » qu’il juge non seulement fausses, mais le plus souvent extravagantes et ridicules. Fin connaisseur de la littérature classique, qu’il enseignait en Sorbonne, il s’est employé à mettre en évidence les nombreux contresens que les « décodeurs » commettent chaque fois qu’ils prétendent comprendre les œuvres mieux que les auteurs eux-mêmes, au mépris du sens littéral1. C’est presque tout naturellement qu’il est remonté jusqu’à Freud2 celui-ci ayant inspiré aux

1 Voir René Pommier, Assez décodé ! Roblot, 1978 couronné par le Prix de la Critique de l’Académie française. Voir aussi Roland Barthes, ras le bol ! Roblot, 1987 et Le Sur Racine de Roland Barthes, SEDES, 1988. 2 Voir René Pommier, Sigmund est fou et Freud a tout faux, Paris, de Fallois, 2008, couronné par le Prix Joseph Saillet de l’Académie des Sciences morales et politiques.

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imposteurs démasqués, sinon leur interprétation, du moins leur méthode, une méthode qui consiste à passer sous silence tout ce qui contredit la thèse qu’ils veulent imposer et à procéder à toutes sortes de déformations pour montrer que leur théorie s’applique. Cet infatigable polémiste ne ménage point sa patience, car comme il le répète souvent, il est très vite fait de dire n’importe quoi, mais il faut beaucoup de temps pour démontrer que quelqu’un dit n’importe quoi. René Pommier fait l’effort d’entrer dans l’argumentation de celui qu’il réfute, de relever ses fautes de raisonnement et de passer au crible ses analyses de textes afin de le prendre en flagrant délit de tricherie ou de manipulation frauduleuse. C’est ici René Girard qui est pris « la main dans le sac ». Pourquoi René Girard ? Parce qu’il prétend apporter aux hommes la vérité et que ce sceptique de René Pommier ne s’en laisse pas conter. Mais au vu de son œuvre, on se dit que René Pommier a une autre raison d’épingler René Girard, qui se découvre au fil de la lecture. C’est que l’auteur des Choses cachées depuis la fondation du monde, malgré sa posture de penseur détaché et indépendant, utilise les mêmes techniques que les structuralistes et les psychanalystes pour filouter sa clientèle. La théorie du désir mimétique, remarque René Pommier, heurte le témoignage de l’expérience. S’il nous arrive d’imiter l’autre et de désirer ce qu’il désire, il nous arrive aussi, plus souvent, d’avoir des désirs spontanés. Il n’est pas étonnant que plusieurs personnes désirent le même objet, s’ils lui trouvent les mêmes qualités et cela ne prouve pas que chacun désire l’objet pour cette raison que l’autre le désire. Qu’un industriel s’empare de l’invention de son rival, voilà qui n’est pas le résultat d’un désir mimétique inconscient, mais simplement la stratégie la plus rationnelle pour emporter le marché1. On se demande effectivement si Girard ne confond pas tout simplement le désir et la concurrence. De Girard ou de Hobbes, c’est Hobbes qui semble être dans le vrai. Mais la théorie du désir mimétique ne contredit pas seulement l’expérience, elle heurte aussi la logique élémentaire, car si l’on admet que chacun ne fait que désirer l’objet désiré par autrui, on s’engage dans une régression à l’infini qui rend impossible l’existence d’un premier désir. Cette démonstration par l’absurde rend effectivement très problématique la théorie de René Girard, sauf dans la

1 En comparant, on découvrirait sans doute une parenté entre la démarche de René Pommier et celle de Raymond Boudon : quoique travaillant dans des domaines différents, l’un et l’autre misent sur la rationalité des acteurs contre l’hypothèse de déterminations souterraines liées à une causalité invisible et dénoncent l’illusion de ceux qui croient avoir découvert, dans telle ou telle variable cachée, la pierre philosophale.

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situation où tout le monde désirerait la même chose en même temps, ce qui n’est pas invraisemblable pour les phénomènes de modes. On peut d’ailleurs se demander si la thèse de René Girard n’est pas inspirée de celle de Gabriel Tarde, simplifiée et poussée jusqu’au paroxysme. Notre critique évite de s’aventurer dans le domaine de l’histoire des idées philosophiques. Il remarque en revanche que la théorie du désir mimétique convient très mal à la théorie de la violence que René Girard lui rattache. En effet, les personnages qui illustrent de la façon la plus évidente le désir mimétique sont les snobs et les snobs sont rarement des gens violents. Si l’explication girardienne de la violence ne tient pas debout, c’est simplement parce que la conception du désir sur laquelle elle repose est totalement fausse. Contrairement à la théorie que René Girard veut imposer, le vrai désir est spontané, instinctif, individualiste et ne s’intéresse pas aux opinions des autres ; et c’est parce qu’il est foncièrement égoïste qu’il devient facilement violent dès qu’il est concurrencé ou contrarié. René Pommier ne dispose, comme il aime à le rappeler, que de deux ressources, la logique et l’attention aux textes, c’est-à-dire l’art de lire et l’art de raisonner. Après la réfutation logique vient l’examen des exemples littéraires sur lesquels René Girard s’appuie pour démontrer sa thèse. L’examen est sans appel. Non seulement ces textes ne permettent pas de corroborer la thèse que René Girard veut imposer, mais ils la contredisent presque toujours. Parmi tant d’exemples que nous laisserons au lecteur le plaisir de découvrir, celui de Racine mérite d’être cité, tant il est symptomatique de la manière dont René Girard détourne le sens des textes. Si Oreste tombe amoureux d’Hermione, ce n’est pas, contrairement à la théorie de René Girard, parce qu’il a cru que Pyrrhus était également amoureux d’elle. Oreste se résout à oublier Hermione lorsqu’il croit découvrir que Pyrrhus l’aime, et il se remet à l’aimer, inversement, lorsqu’il s’aperçoit que Pyrrhus ne s’intéresse qu’à Andromaque. De même, Hermione n’est pas amoureuse de Pyrrhus parce que Pyrrhus désire Andromaque, car elle ignore qu’il la désire et se croit au contraire aimée de lui. Quant à Pyrrhus, il tombe amoureux d’Andromaque en la voyant, et non par le fait du prétendu médiateur que serait Hector. En suivant l’examen scrupuleux de René Pommier, on se rend compte que René Girard sollicite constamment les textes pour leur faire dire ce qu’ils ne disent pas. Parfois même, le texte est transformé pour coïncider avec la théorie qu’il est censée illustrer. C’est ainsi que

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dans l’épisode de la décapitation de Jean-Baptiste, René Girard fait dire à Salomé s’adressant à Hérodiade : « Que faut-il désirer ? » alors que dans le texte Salomé dit seulement « Que faut-il demander ? »1 (Hérode lui ayant promis qu’elle aurait tout ce qu’elle demanderait). René Pommier remarque en passant que personne ne demande jamais « que faut-il désirer ? » tout simplement parce qu’on ne désire pas sur commande… La théorie du sacrifice ressemble également à un magistral coup de bluff. Rappelons le principe du sacrifice selon René Girard : on évite d’ouvrir le cycle sans fin de la vengeance en détournant la violence sur une victime qui n’est pas susceptible d’être vengée. Autrement dit, derrière la fonction religieuse du sacrifice se cache une autre fonction : celle de préserver la société de la violence qui menace de la détruire. Là encore, René Girard nous donne le sentiment d’avoir récupéré discrètement une thèse un peu ancienne et oubliée : la thèse de Paul Fauconnet sur la responsabilité dite objective2. Quoi qu’il en soit, il utilise une conception arbitrairement limitée du sacrifice puisqu’il le réduit à sa dimension sanglante, au détriment de toutes les autres manières dont les anciens avaient coutume d’adresser leurs offrandes aux dieux. En s’appuyant sur des spécialistes particulièrement compétents (Hubert et Mauss, Alfred Marx, etc.), René Pommier rappelle que l’immolation de la victime animale au cours du sacrifice n’est qu’un rite préparatoire et que le sacrifice désigne toute oblation, même végétale, du moment qu’il y a destruction totale ou partielle de la chose offerte. Sur ce thème encore, René Girard n’hésite pas à dénaturer les textes pour donner au lecteur l’impression qu’ils illustrent sa théorie.

1 Certaines traductions donnent « Que vais-je demander ? ». 2 La thèse de Fauconnet prolonge les travaux de Durkheim sur la signification sociale des sanctions. Dans les sociétés primitives, explique Fauconnet, le crime est source de souillure ou de contamination ; dans ces conditions, peu importe sur qui ou sur quoi tombe la sanction, l’essentiel est qu’elle s’exerce. La responsabilité par substitution, comme la pratique du bouc émissaire ou l’exécution en effigie, bloque les effets du crime. La responsabilité s’est peu à peu individualisée et spiritualisée ; aujourd’hui on punit à regret et l’on donne au coupable toutes les occasions de se défendre et d’échapper à la sanction. Mais l’atténuation de la responsabilité liée aux idées modernes représente une dégénérescence de la notion et non son sens authentique comme le croient à tort les philosophes. Piaget conteste le parti pris méthodologique qui privilégie une structure particulière au détriment des fonctions, et les invariants au détriment des transformations. Selon Piaget, cette définition paradoxale de la responsabilité est arbitraire dès lors qu’il existe plusieurs normativités concurrentes pouvant prétendre également à une légitimité psycho-sociale. Pommier ne mentionne pas la thèse de Fauconnet mais l’arbitraire d’une explication aussi unilatérale est un défaut qu’il dénonce dans la pensée de René Girard.

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C’est ainsi par exemple qu’il déforme la bénédiction de Jacob par Isaac afin d’y trouver une improbable substitution sacrificielle destinée à tromper la violence. En relisant le texte biblique, on s’aperçoit que Rebecca demande à son fils de lui rapporter deux beaux chevreaux pour régaler Isaac, mais qu’il n’est nulle part question de sacrifice, le sacrifice s’effectuant toujours selon un rituel précis. L’académicien que certains célèbrent comme le Darwin des sciences humaines est réfuté point par point avec une facilité déconcertante et une jouissance que l’auteur nous fait partager. René Pommier n’est pas du genre à se laisser intimider et il prend toujours beaucoup de plaisir à déstabiliser ceux qui se prennent trop au sérieux, surtout s’ils n’ont rien à nous apprendre. René Girard prétend être le premier à avoir compris le vrai sens du christianisme, il prétend avoir compris le christianisme mieux que les théologiens, mieux que les pères de l’Eglise, et parfois même mieux que les évangélistes eux-mêmes. Notre critique s’amuse à le voir distribuer les bons et les mauvais points à Marc, Matthieu, Luc et Jean suivant que ce qu’ils disent s’accorde ou ne s’accorde pas avec ses théories, et c’est avec son humour habituel qu’il nous montre l’inventeur du désir mimétique s’empêtrant dans les interprétations les plus fantaisistes1. Ce livre d’un rationaliste pratiquant la clarté française nous dit des choses que nous ferions bien de méditer. Au-delà du cas particulier de René Girard, qui n’est sans doute pas capital, il nous ouvre les yeux sur la surenchère des délires interprétatifs et nous donne à réfléchir sur les courants à la mode. En effet, on ne peut qu’être frappé par la fuite en

1 Voici un exemple qui donnera un aperçu du savoureux contraste entre la critique joyeuse de René Pommier, pleine d’humour, émaillée de qualificatifs irrespectueux, et le style gourmé des personnages pontifiants qui en sont la cible. René Girard voit dans la prédiction par Jésus du reniement de Pierre une géniale intuition du principe de la contagion mimétique que lui seul, cependant, devait révéler au monde. Jésus s’adresse à Pierre en ces termes : « Cette nuit même avant que le coq chante deux fois, tu m’auras renié trois fois ». Mais si cette prédiction n’est pas, contrairement à ce qu’affirment les théologiens, un miracle résultant de la prescience divine, alors l’histoire du coq pose problème. La manière dont Girard se tire d’affaire donne lieu à ce commentaire de Pommier : « Il faut le reconnaître, la lecture de René Girard, le plus souvent assommante, est, par moments, tout à fait divertissante. C’est le cas ici. René Girard n’aime pas du tout ceux qui le contredisent, et il est tout à fait plaisant de le voir prêter à Luc, Matthieu et à Jean la profonde antipathie que lui inspire ce coq irrévérencieux qui, par son chant moqueur, semble se rire de son interprétation. Je n’ai, bien sûr, pas lu tous ceux qui, depuis deux mille ans, ont commenté les Evangiles. Mais je crois pouvoir affirmer néanmoins qu’aucun d’entre eux n’a jamais soupçonné que Matthieu et Luc auraient bien aimé régler son compte au coq et que Jean ne l’a mentionné qu’avec beaucoup de réticence » (p. 108).

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avant des penseurs contemporains dans leur course aux thèses les plus étranges, les plus étrangères au bon sens, comme si le fait de heurter le sens commun donnait aujourd’hui l’assurance d’une plus value. Certes beaucoup de gens manquent de sens critique et se laissent facilement convaincre par l’accumulation d’exemples, même quand ces exemples ne prouvent rien, mais certains lecteurs adhèrent aux thèses qui heurtent le bon sens par pur snobisme, pour avoir le sentiment d’appartenir à l’élite intellectuelle. C’est ainsi qu’un confusionnisme pédant peut facilement passer aujourd’hui pour une marque de profondeur1, malgré Descartes, Diderot, Comte ou Ruyer… On pourrait peut-être objecter que René Pommier prend le contre-pied de manière un peu abrupte, en faisant fond sur une conscience de soi, une transparence et un sens univoque qui n’existent pas toujours. Ce serait là un débat intéressant, à la fois sur le plan littéraire et sur le plan philosophique.

1 J’en ai été personnellement témoin au colloque en hommage à Philippe Lacoue-Labarthe, organisé à Strasbourg, les 22 et 23 octobre 2009.

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