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Rép. Droit Civil Délégation

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DROIT français

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DÉLÉGATION

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DÉLÉGATION

parMarc BILLIAU

Professeur à l’Université de Paris XII Val-de-Marne

DIVISION

Généralités, 1-11.

ART. 1. – CONDITIONS DE LA DÉLÉGATION, 12-43.

§ 1. – Obligations antérieures, 13-29.

§ 2. – Un droit nouveau et direct au profit du délégataire,30-38.

§ 3. – Consentement, 39-43.

ART. 2. – EFFETS DE LA DÉLÉGATION, 44-82.

§ 1. – Sort des obligations primitives avant l’exécution dela délégation, 49-52.

§ 2. – Inopposabilité des exceptions, 53-59.

§ 3. – Extinction des obligations, 60-82.

BIBLIOGRAPHIE

AUBRY et RAU, Cours de droit civil français, t. 4, Obligations,par BARTIN, 6e éd., 1942, § 324 et s. – BAUDRY-LACANTINE-RIE, Traité théorique et pratique de droit civil, t. 3, Des obliga-tions, par L. BARDE, 3e éd., 1908, no 1743 et s. – BEUDANT etLEREBOURS-PIGEONNIÈRE, Cours de droit civil français, t. 9,Les contrats et obligations, par LAGARDE et PERROT, 1953, éd.Rousseau, no 991 et s. – M. BILLIAU, La délégation de créance(Essai d’une théorie juridique de la délégation en droit des obliga-tions), thèse, Paris I, LGDJ, 1989, préface J. GHESTIN. – H. CA-PITANT, De la cause des obligations, 3e éd., 1927, Dalloz. –COLIN et CAPITANT, Cours élémentaire de droit civil français,par JULLIOT DE LA MORANDIÈRE, t. 2, 10e éd., 1948, no 534et s. – J. FLOUR, J.-L. AUBERT, Y. FLOUR et E. SAVAUX, Droitcivil : Les obligations, 3. Le rapport d’obligation, 3e éd., 2004,A. Colin, no 430 et s. – J. FRANÇOIS, Droit civil : Les obligations,Régime général, 2000, Economica, no 504 et s. – E. GAUDE-MET, Théorie générale des obligations, 1937, Sirey, réimpres-sion, 1965, par H. DESBOIS, p. 474 et s. – C. LACHIÈZE, Lerégime des exceptions dans les opérations juridiques à trois per-sonnes en droit civil, thèse, Bordeaux, Doct. & Not. 2001, pré-face J. HAUSER. – MALAURIE, AYNÈS et STOFFEL-MUNCK,Droit civil, Les obligations, 2003, Defrénois, no 1365 et s. – MAR-TY, RAYNAUD et JESTAZ, Droit civil. Les obligations : t. 2, Lerégime, 2e éd., 1989, Sirey, no 425 et s. – H., L. et J. MAZEAUD,Leçons de droit civil : t. 2, 1er vol., Obligations, Théorie géné-rale, 9e éd., 1998, par F. CHABAS, Montchrestien, no 1233 ets. – PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil français :t. 7, Obligations, 2e éd., 1954, par ESMEIN, RADOUANT et GA-BOLDE, LGDJ, no 1271 et s. – RIPERT et BOULANGER, Traitéde droit civil, t. 2, Obligations, droits réels, 1957, LGDJ, no 1773

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A. DUPLESSIS, Étude sur la novation et la délégation en droitromain et en droit français ancien et moderne (civil, commercialet fiscal), thèse, Paris, 1869. – J. FRANÇOIS, Les opérationsjuridiques triangulaires attributives (stipulation pour autrui et dé-légation de créance), thèse, Paris II, 1994. – E. GAUDEMET,Le transport de dettes à titre particulier, thèse, Dijon, 1898. –HUBERT, Essai d’une théorie juridique de la délégation en droitfrançais, thèse, Poitiers, 1899. – C. LARROUMET, Les opéra-tions juridiques à trois personnes, thèse dactyl., Bordeaux, 1968.– R. NOURRIT, De la novation et de la délégation, thèse, Aix,1859. – RAME, Du transport de créance, des délégations et des

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subrogations en cas de payement, thèse, Rennes, 1847. – T. VA-QUETTE, De la novation et de la délégation, thèse, Douai, 1879.

Généralités.

1. En droit des obligations, la délégation est l’opération juridiquepar laquelle un débiteur, appelé délégant, propose à son créan-cier, appelé délégataire, l’un de ses débiteurs, appelé délégué,qui consent à s’obliger personnellement envers le délégataire.On a observé que l’usage qui est fait de désigner ce mécanismesous l’expression « délégation de créance » serait impropre, carsuggérant l’idée d’un effet translatif, alors que c’est toujours unepersonne, un débiteur, qui est délégué (F. TERRÉ, Ph. SIMLERet Y. LEQUETTE, Les obligations, 8e éd., 2002, Précis Dalloz,no 1440). Même si l’observation n’est pas inexacte, elle est sansportée dès lors qu’il est aujourd’hui admis tant en doctrine qu’enjurisprudence que la délégation ne réalise pas un transfert decréance ou de dette (V. infra, no 30 et s.).

2. Suivant les conceptions de l’Ancien droit (V. POTHIER, Traitédes obligations, t. 2, éd. 1821, Paris, Thomine et Fortic, no 601),le code civil en traite essentiellement dans les articles 1275 et1276 sous la rubrique consacrée à la novation. Il reproduit ainsiune confusion entre ces deux mécanismes car, en réalité, la dé-légation peut ne produire aucun effet novatoire tout en réalisantl’extinction d’obligations ; la novation, lorsqu’elle existe, n’estalors qu’une modalité de la réalisation de la délégation. Elle estseulement l’expression de la volonté du délégataire et, parfois,de celle du délégant, de libérer leur débiteur sitôt la délégationconclue, ce qui traduit une confiance accrue dans la personnedu délégué, le nouveau débiteur du délégataire.

3. La disparition ultérieure, au XIXe siècle, de la confusion entrela novation et la délégation a conduit des auteurs à distinguerdeux types de délégation en recourant à une terminologie inap-propriée. Le premier est qualifié de parfait, parce qu’il produit uneffet novatoire entre le délégant et le délégataire (novation parchangement de débiteur) et, parfois, entre le délégant et le délé-gué (novation par changement de créancier) ; le second est qua-lifié d’imparfait, parce qu’il ne réalise aucune novation. L’étudede la délégation est parfois faite en suivant cette distinction (V.,par ex., G. BAUDRY-LACANTINERIE et L. BARDE, Traité théo-rique et pratique de droit civil, Des obligations, t. 3, 3e éd., 1908,Sirey, no 1744 et s. ; F. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE,op. cit., no 1439 et s.). Cette manière d’envisager la questionn’est pas satisfaisante. Tout d’abord, il est préférable de re-tenir, sur le plan du vocabulaire, les expressions « délégationnovatoire », au lieu de « délégation parfaite », et « délégationsimple », au lieu de « délégation imparfaite », car une conven-tion n’est jamais parfaite ou imparfaite : elle est ou elle n’est pas,mais l’imprécision terminologique est sans conséquence réelleen l’état du consensus sur le sens des expressions employées.Ensuite, et cela touche ici le fond, l’exposé de la matière sui-vant le plan évoqué suggère que la délégation est une notionamphibologique – elle n’aurait pas nécessairement une fonctionextinctive dans un cas et elle n’aurait que cette fonction dansl’autre – alors que l’examen des applications de la délégation etde ses différences avec d’autres mécanismes démontre l’unitédu concept.

A. – Applications et actualité de la délégation.

4. La délégation est une opération beaucoup plus répanduequ’on ne le pense généralement. La pratique notariale l’utilisedepuis longtemps à l’occasion d’opérations immobilières. Ils’agit de la « délégation de loyers ». Il faut supposer qu’une

personne achète un immeuble en recourant à un emprunt. Elleest donc débitrice du remboursement du montant du prêt enversle bailleur de deniers, en fonction d’un échéancier. L’acheteur(délégant) loue alors l’immeuble et délègue au banquier (délé-gataire) le locataire (délégué) qui s’acquittera directement entreses mains de ses loyers. Ces règlements valent payement etdiminueront à due concurrence la dette de remboursement del’emprunt tout en emportant extinction de la dette du locataire.La délégation réalise ici une heureuse simplification des mul-tiples payements qui auraient dû intervenir individuellement, etindépendamment les uns des autres, pour libérer chacun desdébiteurs et satisfaire chacun des créanciers.

5. La délégation connaît surtout un regain d’intérêt de la part desbanquiers qui l’ont utilisé – peut-être sans le savoir – dans l’éla-boration du mécanisme de certaines cartes de payement. Ladélégation simple (imparfaite) rend ainsi compte du payementréalisé au moyen des cartes de débit, carte bancaire notamment(V. E. PUTMAN, Droit des affaires, t. 4, Moyens de payement etde crédit, 1995, PUF, no 269 ; F. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LE-QUETTE, op. cit., no 1442, p. 1329, note 1 ; pour d’autres ana-lyses, V. LUCAS DE LEYSSAC, L’utilisation de la compensa-tion en droit commercial, thèse dactyl., 1973, Paris, no 80 et s. ;TRINQUET, Payement par carte, Aspects juridiques de la fraude,Bancatique 1984, p. 163 et s.). Les pouvoirs publics n’avaientni défini les cartes, ni réglementé leur utilisation jusqu’à la loino 91-1382 du 30 décembre 1991 (D. 1992.71), si l’on exceptel’article 22 de la loi no 85-695 du 11 juillet 1985 (D. 1985.386),portant diverses dispositions d’ordre économique et financier, quiédictait le principe de l’irrévocabilité de l’ordre donné au moyend’une carte. Cette disposition, reprise par la loi précitée et ins-crite dans un article 57-2 inséré dans le décret du 30 octobre1935 (DP 1935.4.467), abrogé et devenu l’article L. 132-2 ducode monétaire et financier, interdit toute opposition autre quecelle motivée par la perte ou le vol de la carte, le redressementou la liquidation judiciaire du bénéficiaire. Désormais, l’articleL. 132-1 du code monétaire et financier (Décr. 30 oct. 1935,anc. art. 57-1) donne une définition de la carte de payement etune définition de la carte de retrait. Seule la première présenteici un intérêt. Selon l’alinéa 1er de ce texte : « constitue une cartede paiement toute carte émise par un établissement de crédit oupar une institution ou un service mentionné à l’article L. 518-1 etpermettant à son titulaire de retirer ou de transférer des fonds ».Cette définition est imprécise, car si l’expression « retirer desfonds » est univoque, il n’en est pas de même de l’expression« transférer des fonds » ; en effet, le mécanisme juridique envertu duquel les fonds sont transmis n’est pas précisé, de sortequ’une interprétation s’impose. On ne peut donc recourir à la loipour déterminer la nature juridique du mécanisme mis en œuvre.Il faut alors se tourner vers le droit commun des obligations enprécisant les caractéristiques essentielles du payement par carte(V. Rép. com., Vo Carte de crédit). Dans cette opération, unebanque affiliée au GIE Carte bancaire – l’émetteur – délivre unecarte à l’un de ses clients, obligatoirement titulaire d’un comptede dépôts ou d’un compte courant. Le commerçant ou le pres-tataire de service affichant le panonceau « CB » est lui-mêmeadhérent au système, en vertu d’un contrat appelé « contrat com-merçant », conclu avec sa propre banque, également affiliée auGIE Carte bancaire. Le titulaire de la carte occupe la positionde délégant, la banque affiliée celle de délégué et le commer-çant, celle de délégataire. Lorsque le porteur de la carte règle un

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achat en utilisant sa carte, il déclenche le mécanisme de déléga-tion, c’est-à-dire qu’il donne l’ordre – irrévocable – à l’émetteur,par l’intermédiaire de sa banque, de payer le commerçant. Le« payement par carte » procure d’abord un avantage non négli-geable au commerçant puisque, lorsque le montant est garanti –en raison du montant de la transaction ou de l’accord délivré parle Centre d’autorisation – la banque du commerçant est obligéede créditer le compte de celui-ci, quel que soit l’état du comptedu titulaire. Surtout le « payement par carte » réalise l’extinctionde deux obligations. La dette du titulaire de la carte envers lecommerçant est éteinte et la créance du titulaire sur la banqueaffiliée à l’émetteur – compte courant ou compte de dépôts – estréduite d’autant. Lorsque la bonne fin de l’opération n’est pasgarantie par l’émetteur, l’opération reste une délégation ; maiselle est conclue sous la condition résolutoire de la bonne fin del’opération.

6. La délégation sert aussi aujourd’hui de modèle à une autreopération juridique à trois personnes dont la nature et le régimeont été longtemps controversés, la cession ou substitution decontrat (V., sur cette question, J. GHESTIN, Ch. JAMIN etM. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., 2001, LGDJ, no 1024et s., spéc., no 1054 et s.), qui pourrait d’ailleurs s’appelerplus légitimement « délégation de contrat » ou « délégation decontractant » (V. M. BILLIAU, Cession de contrat ou « déléga-tion » de contrat ? [Étude du régime juridique de la prétendue« cession conventionnelle de contrat »], JCP 1994. I. 3758).La cession conventionnelle de contrat peut en effet être définiecomme l’opération par laquelle un contractant, appelé cédantou substituant, donne à l’autre partie, le cédé, un autre contrac-tant, appelé cessionnaire ou substitué, qui s’engage enverscelui-ci. La Cour de cassation soumet expressément cetteopération au régime de la délégation (Cass. civ. 12 mars 1946,JCP 1946. II. 3114, note R. C., D. 1946.268 ; Cass. 3e civ.12 déc. 2001, no 00-15627, Bull. civ., no 153, D. 2002.984,note M. Billiau et C. Jamin, Defrénois 2002, art. 37558-36, obs.R. Libchaber ; adde Ch. LARROUMET, La descente aux enfersde la cession de contrat, D. 2002, chron. 1555).

7. Toutes les opérations faisant intervenir trois personnes etréalisant un payement ne sont cependant pas des délégations.Certains ont voulu expliquer la lettre de change par la déléga-tion (V. not. THALLER, De la nature juridique du titre de cré-dit, Contribution à une étude générale sur le droit des obliga-tions [dette abstraite, acte unilatéral, délégation], extrait Ann. dr.com., 1906-1907, Paris, 1907, éd. Rousseau). Cependant, s’ilest indéniable qu’il existe une similitude entre ces deux méca-nismes (présence de trois parties, création d’une obligation nou-velle et normalement extinction de deux obligations par l’exé-cution d’une seule prestation), ils s’opposent sur de nombreuxpoints (par ex., le tireur est garant du payement de la lettre alorsque le délégant n’est pas garant envers le délégataire) de sorteque toute assimilation est impossible (V. M. BILLIAU, La déléga-tion de créance [Essai d’une théorie juridique de la délégationen droit des obligations], thèse, Paris I, 1989, LGDJ, préfaceJ. GHESTIN, no 393 et s. ; V. Rép. com., Vo Lettre de change).

B. – Spécificité de la délégation.

8. La distinction entre la stipulation pour autrui et la délégationest a priori délicate. En effet, dans la stipulation pour autrui, untiers, le bénéficiaire, dispose d’un droit nouveau et direct contreune partie à un contrat, le promettant (V. Stipulation pour autrui),de la même façon que le délégataire est titulaire d’un droit di-rect contre le délégué. En outre, la délégation et la stipulationnaissent d’un contrat. La proximité entre ces deux techniques

est telle que la pratique et les tribunaux les confondent souvent(V. H., L. et J. MAZEAUD, Leçons de droit civil : t. 2, 1er vol., Obli-gations, 9e éd., 1998, par F. CHABAS, Montchrestien, no 1251 ;P. SIMLER, J.-Cl. civ., fasc. IV, art. 1271 à 1281, no 56). On amême soutenu que la délégation serait absorbée par la stipula-tion pour autrui (V. LAMBERT, La stipulation pour autrui, de la na-ture du droit conféré au bénéficiaire contre le promettant, thèse,Paris, 1893, § 214, en ce qui concerne la délégation imparfaite).Preuve en serait, selon une formule ancienne, la délégation se-rait « contenue dans une stipulation pour autrui » (Cass. req.24 juill. 1889, S. 1892.1.296, note E. Garsonnet).

9. Cependant, il n’est pas possible d’ignorer l’existence de dif-férences importantes de régime. En premier lieu, la délégationest une convention qui requiert nécessairement le triple consen-tement du délégant, du délégué et du délégataire. Ce dernierest donc partie au contrat qui fait naître son droit, alors que dansla stipulation pour autrui le consentement du tiers bénéficiairen’est pas une condition de validité de la stipulation (V. J. GHES-TIN, Ch. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, op. cit.,no 1001), qui intervient seulement entre le stipulant et le promet-tant (V. Stipulation pour autrui). Ensuite, mais il ne s’agit qued’une conséquence du principe précédent, le droit du tiers bé-néficiaire prend naissance avant son acceptation, à la différencedu droit du délégataire. Un auteur ajoute que le promettant peutopposer au tiers bénéficiaire les moyens de nullités et excep-tions tirées de ses relations avec le stipulant, ce que ne peutfaire le délégué (SIMLER, article préc., no 59). Cette affirma-tion doit être nuancée car on a montré que le délégué pouvaitopposer au délégataire les exceptions inhérentes à son droit(M. BILLIAU, thèse préc., no 296 et s.). Enfin, ces deux mé-canismes ont des fonctions différentes : la stipulation pour au-trui, contrairement à la délégation, n’est pas une technique auto-nome d’extinction des obligations (SIMLER, article préc., no 60 ;M. BILLIAU, thèse préc., no 28 ; contra : DEMOGUE, Obliga-tions, t. 7, 1933, éd. Rousseau et Cie, no 854, p. 222 et notes2, 3 et 4), quoique dans un arrêt, pour l’heure isolé, du 14 no-vembre 1995, la 1re chambre civile de la Cour de cassation aadmis que la stipulation pour autrui pouvait avoir un effet extinc-tif (Bull. civ. I, no 404, D. 1996.436, note M. Billiau, Defrénois1996, art. 36354-59, obs. Ph. Delebecque, RTD civ. 1997.122,obs. [crit.] J. Mestre).

10. La distinction est plus facile à établir avec le mandat. Dansla délégation, le délégué souscrit un engagement direct et per-sonnel au profit du délégataire qui ne transite pas par le patri-moine du délégant. En revanche, dans le mandat, le mandataireagit au nom et pour le compte de son mandant ; il ne s’obligepas personnellement (Cass. com. 20 oct. 1980, Bull. civ. IV,no 341 ; 9 mai 1990, ibid. IV, no 137, D. 1991.488, note Y. Da-gorne-Labbe). Le mandat est donc incompatible avec la notionde délégation, pour la raison déterminante que la personnalité dumandataire s’efface devant celle du mandant. Le mandat n’estdonc pas une opération à trois personnes, contrairement à ladélégation (HUBERT, Essai d’une théorie juridique de la déléga-tion en droit français, thèse, Poitiers, 1989, no 118 ; PLANIOL etRIPERT, Traité pratique de droit civil français, t. 7, Obligations,2e éd., 1954, par P. ESMEIN, J. RADOUANT et G. GABOLDE,LGDJ, no 1272 ; la solution est identique s’agissant du mandatsans représentation, V. M. BILLIAU, thèse préc., no 115 et s.).Le délégué n’est donc pas le représentant du délégant, pas plusque le délégataire n’est le représentant de ce dernier. Dans ladélégation, chacun agit en son nom et pour son compte.

11. La délégation apparaît ainsi comme un mécanisme originalce qu’expriment ses conditions (V. infra, no 12 et s.) et ses effets

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(V. infra, no 44 et s.), sans qu’il y ait lieu de distinguer selon qu’elleproduit ou non un effet novatoire, cette modalité ayant seulementune incidence sur le régime de l’opération.

ART. 1er. – CONDITIONS DE LA DÉLÉGATION.

12. Elles sont au nombre de trois. Des obligations antérieures(V. infra, no 13 et s.) lient certaines parties, même lorsque ladélégation ne réalise aucune novation (délégation imparfaite) ;le délégué souscrit personnellement un engagement nouveau etdirect au profit du délégataire (V. infra, no 30 et s.) et le consente-ment (V. infra, no 39 et s.) des trois intervenants est nécessaire.

§ 1er. – Obligations antérieures.

13. Rompant avec une forte tradition historique remontant àl’Ancien droit (V. POTHIER, Traité des obligations, t. 2, éd.,1821, Paris, Thomine et Fortic, no 602 ; ROGUE, Jurisprudenceconsulaire et instruction des négociants, t. 1, 1773, Paris,Guillin, p. 297 ; TOULLIER et DUVERGIER, 6e éd., vol. 4,no 291 ; G. BAUDRY-LACANTINERIE et L. BARDE, Des obli-gations, t. 3, 3e éd., 1908, Sirey et journ. pal., no 1752), etsans réelle justification, la doctrine contemporaine présenteordinairement la délégation comme un mécanisme pouvant êtreutilisé aux fins les plus diverses parce qu’elle serait susceptibled’intervenir entre des personnes qui ne seraient pas liées pardes rapports juridiques antérieurs (par ex., J. FLOUR, J.-L. AU-BERT, Y. FLOUR et E. SAVAUX, Les obligations, vol. 3. Lerapport d’obligation, 3e éd., 2004, A. Colin, no 431 ; G. MARTY,P. RAYNAUD et Ph. JESTAZ, Droit civil. Les obligations, t. 2,Le régime, 2e éd., 1989, Sirey, no 425 ; H., L. et J. MAZEAUD,Leçons de droit civil : t. 2, 1er vol., Obligations, 9e éd., 1998,par CHABAS, Montchrestien, no 1234). En réalité, une telleopération se conçoit difficilement (V., par ex., M. PLANIOL etG. RIPERT, Traité élémentaire de droit civil, 3e éd., 1949, avecle concours de J. BOULANGER, no 1819, p. 590 : « cette opé-ration ne se comprend que s’il y a antérieurement des rapportsjuridiques entre les parties ». La formule a été nuancée parla suite et s’écrit : « cette opération suppose pratiquement lapréexistence de rapports juridiques entre les parties » ; RIPERTet BOULANGER, Traité de droit civil, t. 2, Obligations, droitsréels, 1957, LGDJ, no 1773, p. 641 ; V. égal. H. CAPITANT,De la cause des obligations, 3e éd., 1927, Dalloz, no 177,p. 394) ; et, en tout cas, elle ne revêtirait pas la qualification dedélégation, mais, plus certainement, celle de stipulation, pourautrui, de payement pour autrui ou d’indication de payement.

14. La délégation requiert en fait l’existence d’obligations primi-tives liant certains de ses intervenants au titre de ses élémentsconstitutifs (V. infra, no 15 et s.). Elle apparaît alors seulementcomme une technique d’extinction simplifiée d’obligations. Lefait, unanimement admis, qu’elle puisse produire un effet nova-toire est d’ailleurs un indice sérieux en faveur de cette analyse.En effet, il serait étonnant qu’un mécanisme dont l’objet ne seraitpas, par nature, l’extinction d’obligations puisse produire un effetnovatoire (effet extinctif par définition) ; à l’exception d’un auteur,on n’a jamais soutenu, par exemple, que la stipulation pour au-trui puisse engendrer une novation, parce que sa fonction n’estpas extinctive mais seulement créatrice (sauf DEMOGUE, Obli-gations, t. 7, no 854, p. 222, et notes 2, 3 et 4, qui estime que lastipulation peut produire un effet extinctif. Cette analyse trouvedésormais un écho dans la jurisprudence de la 1re chambre ci-vile de la Cour de cassation, 14 nov. 1995, préc. supra, no 9).Une modalité d’exécution d’une obligation ne peut d’ailleurs ja-mais être incompatible avec sa nature. La nature juridique de ladélégation s’affirme alors nettement : la délégation est un méca-nisme d’extinction d’obligations. Le délégant, pour se libérer en-vers le délégataire, son créancier, sollicite et obtient l’accord del’un de ses débiteurs, le délégué, qui s’oblige directement envers

le délégataire. Lorsque le délégué aura payé le délégataire, il sesera libéré envers son propre créancier, le délégant, et il aura,du même coup, libéré le délégant envers le délégataire, le toutdans la mesure du payement.

15. Il résulte d’une lecture littérale de l’article 1275 du code ci-vil que le délégant est préalablement débiteur du délégataire.En effet ce texte énonce : « la délégation par laquelle un débi-teur donne au créancier un autre débiteur... ». Il apparaît doncà l’évidence qu’une obligation antérieure unit ces deux parties.En outre, de sa formulation négative : « ... n’opère point de no-vation, si le créancier n’a expressément déclaré qu’il entendaitdécharger son débiteur qui a fait la délégation », on peut déduireque le lien de droit primitif subsiste lorsque la délégation ne pro-duit pas d’effet novatoire, ce qui suppose qu’un tel lien existe. Àdéfaut on peut estimer qu’il s’agit d’une stipulation pour autrui.Enfin, les qualités de créancier du bénéficiaire de la délégationet de débiteur dans la personne du délégant sont expressémentvisées et l’article 1275 fait le lien entre ces deux protagonistes :« ... si le créancier n’a expressément déclaré qu’il entendait dé-charger son débiteur... ».

16. Bien que l’article 1275 du code civil n’en fasse pas état,une obligation antérieure doit également lier le délégant au dé-légué. La jurisprudence manque cependant sur ce point de clar-té. Sur seulement quatre arrêts pouvant être recensés depuisle XIXe siècle, on peut constater aujourd’hui une divergence dejurisprudence entre la 1re chambre civile et la chambre commer-ciale de la Cour de cassation.

17. Le premier arrêt, du 9 janvier 1882 (S. 1882.1.360,DP 1882.1.66), est parfois présenté comme démontrant l’inutili-té d’une obligation préexistante entre le délégant et le délégué.Mais son examen démontre plutôt le contraire : un sieur deBeaupré (délégant), inventeur d’un produit, l’élatine, s’étaitobligé envers le docteur Déclat (délégataire), qui devait faire lapublicité de ce produit, à lui payer la somme de quinze centimespar bouteille d’élatine vendue par chaque pharmacien disposantdu privilège de vendre ce produit. L’un des pharmaciens, aprèsavoir payé pendant de longues années cette redevance au doc-teur Déclat, se refusait à continuer d’honorer cette obligation.Le docteur Déclat l’assignait et les juges du fond faisaient droit àsa prétention, sans toutefois préciser le fondement juridique dela solution qu’ils retenaient. Le pharmacien formait un pourvoien cassation qui était rejeté au motif que « le contrat [entrele délégant et le délégataire] suffisait pour établir, au sens del’article 1275 du code civil, une délégation qui faisait naîtreun lien de droit entre le bénéficiaire Déclat et les débiteurs dusieur de Beaupré qui ont accepté et fidèlement exécuté cetengagement pendant sept ans ».

18. Dans cette espèce, on peut considérer que la délégationétait conclue à l’origine sans indication du délégué, puisque se-lon le contrat originaire les délégués du docteur Déclat étaientles pharmaciens investis du privilège de vendre l’élatine. Cettefaçon de procéder est parfaitement concevable (V. M. BILLIAU,thèse préc., no 92). Elle n’implique cependant pas que le dé-légué n’était pas préalablement obligé envers le délégant. Aucontraire, il résulte de cette espèce que les pharmaciens délé-gués étaient investis du privilège de vendre le produit inventépar le sieur de Beaupré. Il existait donc une convention de dis-tribution entre le délégant et les délégués et cette conventionconstituait l’obligation primitive. Cet exemple ne peut donc êtreutilement invoqué pour établir qu’aucune obligation antérieuren’est exigée entre le délégant et le délégué. L’arrêt évoqué iraitd’ailleurs plutôt dans le sens contraire.

19. Dans la deuxième espèce soumise à la Cour de cassationla question lui a directement été posée (Cass. 1re civ. 9 déc.1981, Bull. civ. I, no 374, D. 1982.445, note J. Mestre, JCP, éd.

Rép. civ. Dalloz - 4 - septembre 2004

DÉLÉGATION

N., 1982, prat. 650). Une société, la GERPIC, avait constituéavec une seconde, la SFPGI, une société commerciale en par-ticipation afin de partager les bénéfices à naître éventuellementde la réalisation d’une opération immobilière menée en commun.La SFPGI était gérante de cette troisième société en participa-tion. En 1975, la société GERPIC était sur le point d’obtenir unprêt de la part d’un tiers, M. Fauchier-Magnan, d’un montant de400 000 F. La société GERPIC donnait alors l’ordre à la socié-té SFPGI de verser à M. Fauchier-Magnan à titre de délégationtoutes sommes lui revenant dans l’opération immobilière.

20. Par suite d’un conflit entre la GERPIC et la SFPGI, celle-cirefusa de payer à M. Fauchier-Magnan les sommes à verser envertu de cette délégation. Les juges du fond ayant fait produireà la délégation ses effets, la SFPGI introduisit un pourvoi encassation. Le second moyen de cassation soutenait : « que ladélégation est une opération triangulaire impliquant nécessaire-ment l’existence de deux rapports obligatoires, qu’en l’espèce, lacréance de la société GERPIC à l’encontre de la SFPGI n’exis-tait, en janvier 1975, qu’à l’état de « projet », les comptes de lasociété en participation formée entre elles n’étant pas apurés,et qu’une telle créance n’existait même pas dans son principe,puisque cet apurement pouvait faire apparaître une dette de lasociété GERPIC envers son associé ; que la cour d’appel auraitainsi violé les articles 1275 et 1277 du code civil ».

21. Rejetant ce moyen, la Cour de cassation a jugé : « que lacirconstance que l’engagement de la SFPGI ait été subordonnéà la condition que l’opération immobilière en cours dégageraitun solde positif permettant de rembourser M. Fauchier-Magnann’affecte pas la validité de cette délégation, et que c’est à bondroit et sans violer les articles 1275 et 1277 du code civil que lacour d’appel a considéré qu’il importait peu qu’en janvier 1975 lacréance de la société GERPIC sur la SFPGI ne fût ni liquide niexigible et n’existât, alors, que dans son principe, dès lors quela délégation intervenue ne pouvait produire d’effets que dansl’avenir et seulement au cas où la société en participation auraiteffectivement réalisé les bénéfices en vue desquels elle avait étécréée ; que le second moyen doit donc être écarté ».

22. Cette motivation permet d’abord d’affirmer deux règles, quine s’opposent en rien au droit commun des obligations, commele remarque l’annotateur de l’arrêt. En premier lieu, une déléga-tion peut être conditionnelle. En l’espèce, la « délégation interve-nue ne pouvait produire d’effets que dans l’avenir et seulementau cas où la société en participation aurait effectivement réali-sé les bénéfices... ». En second lieu, la créance primitive peut,dans une certaine mesure, ne pas être certaine ; elle peut êtreseulement constituée par une obligation en son principe.

23. Ensuite la Cour de cassation admet que l’obligation primitiveest l’une des conditions de la délégation. Dans cette espèce, laCour de cassation a recherché, alors que selon la doctrine domi-nante elle aurait pu aisément s’en dispenser, si le délégant étaitou non effectivement lié en vertu d’une obligation envers le dé-légué. C’est parce que la cour d’appel a pu, à bon droit, déduirel’existence de celle-ci, que la délégation était valable. Ainsi, pourla Cour de cassation, l’existence d’une obligation antérieure ap-paraît-elle comme une condition de fond de la délégation, aumoins lorsqu’elle est conditionnelle. Elle en contrôle la réalité.

24. Le troisième arrêt, rendu par la chambre commerciale dela Cour de cassation le 22 juin 1983 (Bull. civ. IV, no 183,RTD civ. 1984.720, obs. J. Mestre), ne fait pas état de relationsantérieures entre le délégant et le délégué. Cependant, selonJ. MESTRE on serait dans cette hypothèse incontestablementen présence d’une délégation, même si elle s’inscrivait « dansun cadre... pratiquement rare : celui où le délégant n’est pascréancier du délégué, mais lui demande néanmoins de prendre

un engagement envers son propre créancier, le délégué accep-tant de donner suite à cette invitation, soit dans une intentionlibérale, soit – comme dans le cas présent – pour rendre un ser-vice au délégant, en consentant simplement l’avance des fonds »(obs. préc.). Il est exact que, dans cette espèce, aucun rapportd’obligation antérieur ne liait le délégant au délégué, mais seule-ment un contrat dans lequel l’engagement du délégué puisait saforce. Est-ce à dire pour autant que l’opération était véritable-ment constitutive d’une délégation ? Rien n’est moins certaincar la question de l’exigence d’une obligation primitive liant ledélégant au délégué n’était pas posée à la Cour de cassation.Celle-ci n’a donc pu se prononcer sur ce point.

25. C’est dans un quatrième arrêt, daté du 21 juin 1994 (Bull.civ. IV. no 225, RTD civ. 1995.113, obs. J. Mestre, Defrénois1994, art. 35945, p. 1468, obs. D. Mazeaud, Contrats, conc.,consom. 1994, no 246, obs. L. Leveneur, JCP 1994. I. 3803,no 10, obs. M. Billiau. La portée de cet arrêt est toutefoisdiscutée par J. FRANÇOIS in Les obligations, régime général,2000, Économica, no 510, note 2, p. 380), que la chambrecommerciale de la Cour de cassation a pris nettement parti surce point, la question lui étant posée directement. Dans cette es-pèce, un sieur Dumaine (délégant) était débiteur d’une sommede 56 379,18 F envers M. Durand-Fontanelle. À la demandedu premier, M. Deneux (délégué) émettait un chèque de cemontant à l’ordre de Ano, nom de l’entreprise personnelle deM. Durand-Fontanelle, lequel l’encaissait, après quoi M. Deneuxassignait ce dernier en restitution sur le fondement des règlesde la répétition de l’indu. La Cour de Montpellier déboutaitM. Deneux, observant que le payement avait été réalisé envertu d’une délégation et qu’il importait peu que M. Deneux aitou non été débiteur de M. Dumaine dont il avait réglé la detteà M. Durand.

26. Dans son pourvoi, M. Deneux posait clairement à la Courde cassation la question de savoir si une délégation était valableen l’absence de dette du délégué envers le délégant. Il soute-nait ainsi que « la délégation de créance proprement dite ne peutservir de cadre à une simple libéralité et suppose l’existence nonseulement d’une créance du délégataire sur le délégant, maiségalement d’une créance de ce dernier sur le délégué ». La ré-ponse de la chambre commerciale est franchement négative :« mais attendu qu’après avoir retenu que l’opération litigieuseétait une délégation et que M. Deneux, délégué, s’était engagéen toute connaissance de cause à l’égard de M. Durand-Fonta-nelle, délégataire, c’est à bon droit que l’arrêt déclare qu’il im-portait peu que M. Deneux ait été, ou non, débiteur à l’égardde M. Dumaine, délégant ». Il ressort donc de cet arrêt quel’existence d’une dette du délégué envers le délégant ne par-ticipe pas de la nature juridique de la délégation (ce qui a étéapprouvé implicitement ou expressément par de nombreux au-teurs avec des raisons voisines ; V., par ex., estimant que cela« réduirait inutilement l’utilisation de la délégation », J. FLOUR,J.-L. AUBERT, Y. FLOUR et E. SAVAUX, Les obligations, vol. 3.Le rapport d’obligation, 3e éd., 2004, A. Colin, no 431. Approu-vant également, Fr. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, op.cit., no 1445) ce qui signifie qu’elle n’a pas nécessairement unbut extinctif dans ces relations.

27. Cependant, lorsque la délégation produit une novation (parchangement de créancier), il est certain que l’existence d’unedette préexistante sera nécessaire. En outre, même à admettreque cette dette ne soit pas attachée à la nature de l’opération,rien ne s’oppose à ce qu’il en existe une et que les partiesaient alors en vue son extinction, même sans novation. Cesera d’ailleurs souvent le cas. Enfin, il faut relever que, jusqu’àprésent, seule la chambre commerciale a pris aussi nettementposition, dans un arrêt isolé. Il n’est pas certain que les autreschambres la suivent sur ce terrain, spécialement la 1re chambre

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DÉLÉGATION

qui, en 1981, avait adopté une analyse différente, même si ellen’avait pas utilisé une formule aussi tranché que la chambrecommerciale. Il paraît prudent d’attendre le prononcé d’autresdécisions pour en conclure que la difficulté est définitivementrésolue en faveur de la doctrine majoritaire.

28. Enfin, il n’est pas nécessaire que le délégué soit préalable-ment obligé envers le délégataire. La Cour de cassation a, le11 décembre 1984 (Cass. com. 11 déc. 1984, D. 1985, IR 198,obs. A. Honorat, Gaz. Pal. 1985.1, panor. 119), cassé un arrêtrendu par la cour d’appel de Besançon, qui, pour écarter la qua-lification de délégation à une opération triangulaire, « a retenuque la délégation suppose nécessairement qu’il y ait eu des rap-ports juridiques antérieurs entre les parties et que, en l’espèce,aucun rapport de droit n’existait préalablement entre la sociétéFFL et les sociétés Siat et Weber ». La Cour de cassation a es-timé « qu’en se déterminant ainsi alors qu’une délégation n’estpas subordonnée à l’antériorité de rapports contractuels liant ledélégué au délégataire, la cour d’appel n’a pas donné de baselégale à sa décision ». Il résulte de cet arrêt que l’existence d’uneobligation entre le délégué et le délégataire n’est pas une condi-tion de validité de la délégation.

29. Les obligations primitives, c’est-à-dire la dette et la créancedu délégant, ne répondent pas à une nature juridique spécifique,ce qui confère à la délégation une grande souplesse d’utilisa-tion. Il peut s’agir d’obligations intuitu personae, à terme, natu-relles, éventuelles – mais seulement lorsque l’objet de ces der-nières correspond à des intérêts patrimoniaux d’ordre privé – ouen leur principe. Pour cette dernière catégorie la Cour de cas-sation a jugé que la délégation devenait conditionnelle (Cass.1re civ. 9 déc. 1981, préc. supra, no 19), ce qui est contestable(V. M. BILLIAU, thèse préc., no 55). Lorsque la dette et/ou lacréance du délégant sont conditionnelles, la délégation est né-cessairement conditionnelle si elle ne produit pas d’effet nova-toire (V. M. BILLIAU, thèse préc., no 58 et s., et no 228 et s.).Les créances incessibles en vertu de la loi ne peuvent cepen-dant faire l’objet d’une délégation car elles sont légalement af-fectées à la satisfaction du créancier et donc hors du commercejuridique.

§ 2. – Un droit nouveau et direct au profit du délégataire.

30. La délégation emporte nécessairement création d’un rap-port de droit nouveau et direct entre le délégué et le déléga-taire. Cette exigence résulte de la lettre même de l’article 1275du code civil, puisqu’il prévoit qu’un « débiteur donne au créan-cier un autre débiteur qui s’oblige envers le créancier ». Le dé-légué s’oblige ainsi personnellement envers le délégataire. Larègle signifie qu’une nouvelle obligation est créée au profit ex-clusif du délégataire ; le délégué n’est donc pas le mandatairedu délégant. La règle est certaine en jurisprudence (V. supra,no 10) ; elle est également admise en doctrine (V. B. STARCK,Droit civil : Les obligations, t. 3, Régime général, 6e éd., 1999,par H. ROLAND et L. BOYER, Litec, no 102 ; BEUDANT et LE-REBOURS-PIGEONNIÈRE, Cours de droit civil français, t. 9,Les contrats et obligations, par LAGARDE et PERROT, 1953,éd. Rousseau, no 1013 et 1020). Le délégué s’oblige égalementdirectement envers le délégataire. Ce n’est que le corollaire dela nécessité d’un engagement nouveau. Le droit positif retientainsi que la créance déléguée et ses accessoires deviennent legage spécial – le droit exclusif – du délégataire (Lyon, 12 fé-vr. 1890, DP 1891.2.247 ; Civ. 12 août 1879, Journ. not. etav. 1880, art. 2226 ; Cass. req. 8 févr. 1888, DP 1888.1.372,rapp. VOISIN, S. 1890.1.85 ; T. civ. Nantua, 17 janv. 1889,DP 1891.2.247). Elle ne peut donc être saisie par les créanciersdu délégant.

31. Ce rapport juridique nouveau, conclu directement au profitdu délégataire, est qualifié par la jurisprudence de « créancedéléguée ». Cette expression est ambiguë. En effet, elle sug-gère qu’il s’opère une transmission, alors que la délégation necomporte en principe aucune cession des obligations primitives,dette et créance du délégant. Cependant, par l’expression« créance déléguée » la jurisprudence appréhende en réalité lacréance primitive du délégant sur le délégué. En conséquence,elle estime que celle-ci est transmise au délégataire (V., enmatière fiscale, antérieurement à l’abrogation de l’article 729 ducode général des impôts [L. no 63-254 du 15 mars 1963, art. 17,D. 1963.97, rect. 165], Cass. com. 27 juin 1955, Bull. civ. III,no 228).

32. Cette solution, contestable, semblait abandonnée par unarrêt du 5 mars 1970 (Bull. civ. III, no 180) ; mais le 24 juin1986, la chambre commerciale de la Cour de cassation (Bull.civ. IV, no 141, JCP 1986. IV. 259, RTD civ. 1987.550, obs.J. Mestre) reprenait les solutions dégagées au XIXe siècle. Enadoptant cette doctrine, défendue par HUBERT (thèse préc.,no 225 et s.), selon laquelle la délégation emporterait transportde la créance du délégant sur la tête du délégataire, la cour ré-gulatrice confondait l’obligation primitive (la créance du délégantsur le délégué) et le droit nouveau né de la délégation. Il sembledésormais, depuis un arrêt du 16 avril 1996 (Bull. civ. IV, no 120,D. 1996.571, note Ch. Larroumet et somm. 333, Defrénois 1996,art. 36381, no 104, obs. D. Mazeaud, JCP 1996. II. 22689, noteM. Billiau, RTD civ. 1997.132, obs. J. Mestre, DMF 1996.563,rapp. J.-P. Rémery ; V. I. DAURIAC, Le sort de la créance du dé-légant envers le délégué au cours de la délégation - Réflexionsà propos de l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour decassation en date du 16 avril 1996, Defrénois 1997, art. 36664,p. 1169), que la chambre commerciale, revenant à l’orthodoxie,opte pour l’intransmissibilité ipso jure de la créance détenue parle délégant sur le délégué. Elle a, en effet, jugé que : « si lacréance du délégant sur le délégué s’éteint, non pas du fait del’acceptation par le délégataire de l’engagement du délégué àson égard, mais seulement par le fait de l’exécution de la dé-légation, ni le délégant ni ses créanciers, ne peuvent, avant ladéfaillance du délégué envers le délégataire, exiger paiement ».Puisque ni le délégant, ni ses créanciers ne peuvent « avant ladéfaillance du délégué envers le délégataire, exiger payement »,cela signifie vraisemblablement qu’ils retrouvent ce droit en casd’inexécution ; il faut en déduire que la créance primitive n’a pasété transmise automatiquement au délégataire ; elle n’a pas quit-té le patrimoine du délégant. Il est certain que si la créance étaittransmise, ni le délégant ni ses créanciers ne pourraient plusen exiger le payement même en cas de défaillance du déléguépuisque, précisément, elle serait transportée dans le patrimoinedu délégataire qui en deviendrait le seul titulaire, de la mêmemanière que le cédant d’une créance perd ses droits au profitdu cessionnaire (V., égal., à propos d’une délégation de loyers,Cass. com. 29 avr. 2002, no 99-15072, Bull. civ. IV, no 72, JCP2003. II. 10154, note A.-S. Barthez, D. 2002, AJ 1835, obs. F. Bet p. 2673, note D. Houtcieff, Defrénois 2002, art. 37607-63, obs.R. Libchaber).

33. En principe, et en vertu de la règle de la nouveauté, lessûretés garantissant la créance du délégant sur le délégué nedoivent pas profiter au délégataire. Une solution identique est àretenir lorsqu’une novation intervient entre le délégant et le délé-gué (délégation parfaite). En vertu des principes généraux gou-vernant la novation, les sûretés attachées à la créance primitivesont éteintes. Elles ne peuvent donc être mises en œuvre parle délégataire. Néanmoins, elles peuvent être réservées par lecréancier (délégant) et profiter au nouveau créancier qui en bé-néficiera pour garantir l’exécution de la nouvelle obligation. L’ar-ticle 1278 du code civil dispose à cet effet : « les privilèges et hy-pothèques de l’ancienne créance ne passent point à celle qui lui

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DÉLÉGATION

est substituée, à moins que le créancier ne les ait expressémentréservées ». Cette réserve doit se faire en même temps quela novation. S’il s’agit d’une hypothèque garantissant la créancedu délégant, elle sera maintenue, également avec son rang d’ori-gine. Le nouveau créancier se trouve alors dans une situationextrêmement favorable et les anciens créanciers du débiteur nevoient pas leur situation aggravée. Le délégant peut aussi exigerle maintien des sûretés personnelles avec le consentement descodébiteurs ou les cautions en vertu de l’article 1281 du codecivil.

34. On a surtout discuté de la question de savoir si l’engagementdu délégué était ou non causé parce qu’il se présente commeune promesse unilatérale de payer ne révélant pas sa cause.

35. Pour certains, l’engagement du délégué serait abstrait (CO-LIN et CAPITANT, Cours élémentaire de droit civil français, re-fondu par JULLIOT DE LA MORANDIÈRE, t. 2, 10e éd., 1948,no 178 ; C. LARROUMET, Les opérations juridiques à trois per-sonnes, thèse dactyl., Bordeaux, 1968, no 228 ; A. WEILL etF. TERRÉ, Droit civil : Les obligations, 4e éd., 1986, Précis Dal-loz, no 1065 [implicite] ; BEUDANT et LEREBOURS-PIGEON-NIÈRE, par LAGARDE et PERROT, op. cit., no 1017 ; adde,MARTY, RAYNAUD et JESTAZ, op. cit., no 440). La cause se-rait donc indifférente à la validité de l’opération, même si ellepeut être localisée dans les rapports primitifs délégant/délégué.La règle de l’inopposabilité des exceptions (V. infra, no 53 et s.)est souvent invoquée à titre de justification. La lettre de l’article1108 du code civil condamne cette analyse.

36. Pour d’autres, « l’obligation du délégué à l’égard du déléga-taire a pour cause l’extinction par le délégataire de la créance va-lable qu’avait celui-ci contre le délégant » (H., L. et J. MAZEAUD,Obligations, par CHABAS, no 1246). Un arrêt du 26 janvier 1960(Bull. civ. I, no 55) semble adopter cette analyse. Cette explica-tion ne peut toutefois rendre compte que de la cause de la dé-légation novatoire (délégation parfaite) puisque ces auteurs re-tiennent que l’existence d’obligations antérieures n’est pas unecondition de la délégation simple.

37. Selon une troisième opinion, la cause serait alternative (HU-BERT, thèse préc., no 112 et 220), c’est-à-dire qu’il suffirait quele délégant soit débiteur du délégataire ou créancier du délégué.

38. Ces thèses ne sont pas convaincantes. On peut penserqu’en réalité la cause – qui a principalement un rôle de qualifica-tion dans une opération à trois personnes – se définit subjective-ment comme la volonté commune d’éteindre les deux obligationsprimitives. Elle est donc cumulative. D’une façon plus objective,la cause finale c’est l’extinction des deux obligations primitives.Bien que la Cour de cassation n’ait pas tranché la controverse(l’arrêt précité du 26 janvier 1960 n’est qu’une décision d’espèceet la position de la chambre commerciale sur l’existence d’uneobligation primitive est contredite par celle adoptée par la pre-mière chambre), elle a cependant jugé qu’un supplément de prixstipulé entre le délégant et le délégué, dissimulé aux yeux du fisc,en infraction aux dispositions de l’article 1793 du code généraldes impôts, imprimait à la cause de l’engagement du délégué uncaractère illicite qui la rendait nulle (Cass. 1re civ. 2 avr. 1968,Bull. civ. I, no 115). Le caractère illicite de l’opération expliquesans doute la solution retenue.

§ 3. – Consentement.

39. L’acceptation du délégant ne fait aucun doute : n’est-il pasl’initiateur de l’opération ? Son consentement n’est soumis à au-cune condition de forme lorsque la délégation n’emporte pas no-vation par changement de créancier. En revanche, lorsque le

délégant entend décharger immédiatement son débiteur primitif(le délégué), sa volonté doit résulter clairement de l’acte (C. civ.,art. 1273). Il n’est pas nécessaire qu’elle soit expresse ; l’ar-ticle 1275 ne concerne que la délégation emportant novation parchangement de débiteur (HUBERT, thèse préc., no 177).

40. L’acceptation du délégataire est indispensable (V. Cass. req.17 févr. 1857, DP 1858.1.335 ; 16 juill. 1888, DP 1888.1.372,rapp. Voisin, S. 1890.1.85 ; Cass. soc. 7 déc. 1966, Bull.civ. IV, no 926 ; Cass. com. 10 févr. 1975, ibid. IV, no 38 ;V. PLANIOL et RIPERT, t. 7, par ESMEIN, RADOUANT et GA-BOLDE, no 1279), même en cas de délégation simple. Pour-tant, étant dans cette dernière hypothèse simplement bénéfi-ciaire d’un droit, qui s’ajoute à sa créance initiale, et nullementobligé, on pourrait douter de la nécessité de son acceptation pourla perfection de l’opération. Pour justifier la nécessité du consen-tement du délégataire, on a fait valoir qu’il fallait tenir compte del’existence d’une créance antérieure de celui-ci sur le déléganten cas de délégation simple (M. BILLIAU, thèse préc., no 171).En effet, outre son effet extinctif à terme, elle modifie la créanceprimitive du délégataire au cours de la période qui précède l’exé-cution par le délégué de son obligation (V. infra, no 52). Or,conformément à l’article 1134, alinéa 2, du code civil, une obli-gation ne peut être modifiée que du consentement mutuel desparties intéressées.

41. La question de savoir si l’acceptation peut intervenir pos-térieurement au décès du délégant, lorsque celui-ci avait anté-rieurement formulé l’offre de délégation, doit se régler par réfé-rence au droit commun. En application des principes classiquesgouvernant l’offre et l’acceptation on devrait admettre que le dé-cès du délégant, antérieurement à l’acceptation du délégué del’offre de délégation, devant être ultérieurement adressée au dé-légataire, soit par le délégué soit par le délégant, interdit irrémé-diablement la formation de la délégation. L’acceptation donnéepar le délégataire serait privée de toute portée lorsqu’elle seraitdonnée postérieurement au décès du délégant. Cependant, unarrêt du 9 novembre 1983 a admis que le décès de l’offrant nerendait pas l’offre caduque (Cass. 3e civ. 9 nov. 1983, Bull. civ.III, no 222, Defrénois 1984, art. 33368, no 78, obs. J.-L. Aubert,RTD civ. 1985.154, obs. J. Mestre). On en a donc déduit quel’acceptation pouvait intervenir postérieurement au décès du dé-légant lorsque celui-ci avait antérieurement formulé l’offre de dé-légation (M. BILLIAU, thèse préc., no 171). Mais, la Cour de cas-sation semble être revenue sur sa position en jugeant, le 10 mai1989 (Bull. civ. III, no 108, D. 1990.365, note G. Virassamy), quel’offre devenait caduque par le décès de l’offrant. Néanmoins, ilfaut tenir compte d’un arrêt de la 3e chambre civile de la Courde cassation du 10 décembre 1997 (no 95-16461, Bull. civ. III,no 223, D. 1999, somm. 9, obs. Ph. Brun) qui a jugé que l’offren’était pas caduque du seul fait du décès de l’offrant lorsqu’ils’était obligé à la maintenir pendant un certain délai non expi-ré au jour de l’acceptation.

42. Il reste à déterminer les qualités du consentement du délé-gataire. En l’absence d’effet novatoire par changement de débi-teur (délégation imparfaite), une manifestation de volonté taciteou implicite suffit (Cass. req. 27 févr. 1856, DP 1857.1.104 ;Cass. 1re civ. 21 oct. 1959, Bull. civ. I, no 423). Dans le cascontraire (délégation novatoire par changement de débiteur oudélégation parfaite), l’article 1275 du code civil précise que le dé-légataire doit expressément déclarer qu’il entend décharger sondébiteur primitif. En matière commerciale, la Cour de cassationécarte souvent cette prescription (Cass. 3e civ. 15 févr. 1983,Bull. civ. III, no 44 ; Cass. com. 22 juin 1983, ibid. IV, no 183 ;contra : 8 juill. 1975, ibid. IV, no 195), alors qu’en matière ci-vile elle l’applique scrupuleusement (Cass. 3e civ. 5 juin 1970,Bull. civ. III, no 387, D. 1970.727), exigeant même, parfois, une

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DÉLÉGATION

manifestation de volonté formelle (Cass. civ. 20 juin 1939, JCP,éd. N., 1940.1381, note R. D.). Il y a donc, en raison de la na-ture civile ou commerciale de l’opération, une différence formelleavec la novation par changement de débiteur ou l’expromission.De lege ferenda l’abrogation de l’exigence d’une déclaration ex-presse de volonté du délégataire est souhaitable, la règle de l’ar-ticle 1275 pouvant être comprise comme une simple exigence depreuve (HUBERT, thèse préc., no 175).

43. Enfin, l’acceptation du délégué est également indispensable(Cass. 1re civ. 7 avr. 1998, no 96-18.210, Bull. civ., I, no 144 ;10 mai 2000, ibid., no 137) parce que, notamment, c’est luiqui s’oblige personnellement envers le délégataire. En effet,sauf lorsque la loi en dispose autrement, essentiellement eninstaurant une solidarité passive, nul ne peut être obligé sansl’avoir voulu. La question de savoir si elle peut intervenir posté-rieurement au décès du délégant lorsque l’offre de délégationa été formalisée se résout de la même façon que pour ledélégataire (V. supra, no 41). Quelles que soient les modalitésde la délégation – novation par changement de débiteur et/oupar changement de créancier -, l’acceptation du délégué n’estsoumise à aucune forme particulière. Étant seulement débiteur,son consentement, même exprimé expressément ou formelle-ment, ne pourrait avoir pour effet de le libérer immédiatementenvers son créancier primitif (le délégant).

ART. 2. – EFFETS DE LA DÉLÉGATION.

44. Dès lors que les trois conditions requises pour la formationde la délégation sont réunies, celle-ci est parfaite, c’est-à-direformée, et produit ses effets entre les parties et elle est oppo-sable aux tiers sans l’accomplissement d’aucune forme de pu-blicité analogue à celles de l’article 1690 du code civil. La juris-prudence est fixée en ce sens depuis 1889 (Cass. req. 24 juill.1889, DP 1889.1.395 ; Cass. civ. 23 nov. 1898, S. 1899.1.465,note A. W. ; Cass. req. 19 déc. 1923, S. 1924.1.111 et la note,Gaz. Pal. 1924.1.397, DP 1925.1.9, note H. Capitant). La solu-tion est logique puisque la délégation produit un effet créateur etnon un effet translatif (V. cep. supra, no 32).

45. Cependant, dans le domaine de la faillite, sous l’empiredes textes du code de commerce (art. 446 [devenu art. 477] etart. 447 [devenu art. 478]), la délégation consentie par le dé-biteur (délégant), pendant la période suspecte, était considéréepar la jurisprudence comme inopposable de droit à la masse descréanciers (Cass. civ. 29 juill. 1908, DP 1908.1.503 ; 24 juin1918, S. 1921.1.65, note G. Bourcart, DP 1922.1.147 ; Cass.com. 23 mars 1965, Gaz. Pal. 1965.2.63, Bull. civ. III, no 225,JCP 1966. II. 14853, D. 1965, somm. 102, RTD com. 1965.655,no 15, obs. Houin).

46. La loi no 67-563 du 13 juillet 1967 (D. 1967.269), réformantles procédures collectives de payement, considérait dans son ar-ticle 29-4o comme inopposable (de droit) à la masse des créan-ciers « tout paiement pour dettes échues, fait autrement qu’enespèces, effets de commerce, virements ou tout autre mode nor-mal de paiement ». Sur le fondement de ce texte, la jurispru-dence a conservé les solutions qu’elle avait dégagées sous l’em-pire de l’ancienne législation, estimant que la délégation devaitêtre considérée comme un mode de payement anormal, inoppo-sable à la masse des créanciers (Cass. com. 3 juin 1986, Bull.civ. IV, no 113 ; 15 janv. 1975, D. 1975.259 ; 12 janv. 1976, Bull.civ. IV, no 13). La Cour de cassation précisait aussi que l’inoppo-sabilité de droit de la délégation consentie au cours de la périodesuspecte était également applicable à la délégation conclue parle délégué (Cass. com. 11 déc. 1984, D. 1985, IR 198, obs.A. Honorat, Gaz. Pal. 1985.1, panor. 119).

47. Depuis la promulgation de la loi no 85-98 du 25 janvier 1985(D. 1985.147), relative au redressement et à la liquidation judi-ciaires des entreprises, désormais abrogée et codifiée dans lecode de commerce, la délégation conclue au cours de la périodesuspecte n’est plus nulle de plein droit si elle constitue un modede payement communément admis dans les relations d’affaires(art. 107-4o , devenu l’art. L. 620-107 4o C. com.), c’est-à-direconforme aux usages du commerce ou de la profession du dé-biteur défaillant (V. Cass. com. 30 nov. 1993, Bull. civ. IV,no 439, D. 1994, somm. 178, obs. A. Honorat ; 14 juin 1994,D. 1994, IR 221), étant précisé que la délégation de sous-trai-tant (L. no 75-1334 du 31 déc. 1975, art. 14, D. 1976.64) esttoujours valable quels que soient les usages (V., sur ces ques-tions, M. BILLIAU, thèse préc., no 269 et s.).

48. La question de l’opposabilité de la délégation aux tiers étantrésolue, il reste à examiner trois difficultés : déterminer le sortdes obligations primitives jusqu’à l’exécution de l’obligation dudélégué (V. infra, no 49 et s.), les exceptions que le délégué peutopposer au délégataire (V. infra, no 53 et s.) et l’effet extinctifproduit par la délégation (V. infra, no 60 et s.).

§ 1er. – Sort des obligations primitives avantl’exécution de la délégation.

49. En l’absence d’effet novatoire (délégation imparfaite), lesobligations primitives subsistent jusqu’à l’exécution par le délé-gué de l’obligation qu’il a souscrite envers le délégataire (V., ence qui concerne le maintien de l’obligation antérieure entre le dé-légant et le délégataire, Cass. 1re civ. 21 oct. 1959, Bull. civ. I,no 423 ; Cass. com. 12 juin 1965, ibid. III, no 367 ; 1er déc.1975, ibid. IV, no 283 ; Cass. 1re civ. 15 juin 1983, ibid. I,no 175, D. 1984, IR 268, obs. M. Vasseur, JCP 1984. II. 20123,note J.-P. Lévy, RTD civ. 1984.720, obs. J. Mestre ; en ce quiconcerne le maintien de l’obligation fondamentale entre le dé-légant et le délégué, V. Cass. 3e civ. 5 mars 1970, Bull. civ.III, no 180 ; Cass. com. 16 avr. 1996, préc. supra, no 32 et29 avr. 2002, préc. supra, no 32). Cependant, on se demandes’il convient ou non d’accorder à chaque débiteur – délégué etdélégant – le bénéfice d’une exception dilatoire en vertu de la-quelle ils pourraient s’opposer aux poursuites de leur créancierjusqu’à l’arrivée du terme affectant la nouvelle obligation.

50. La doctrine est divisée. Certains estiment que seul le délé-gué doit bénéficier de cette exception (par ex., HUBERT, thèsepréc., no 183 et 193). Au contraire, d’autres pensent que le délé-gant pourrait également s’opposer aux poursuites prématuréesdu délégataire (E. GAUDEMET, Le transport de dettes à titre par-ticulier, thèse, Dijon, 1898, p. 275-276 ; M. BILLIAU, thèse préc.,no 218 et s.).

51. La Cour de cassation n’a pas tranché de façon claire lacontroverse. Un arrêt du 1er décembre 1952 (Bull. civ. I, no 313)refuse au délégant le droit d’invoquer la suspension des pour-suites accordée par le délégataire au délégué. Mais, en l’es-pèce, le consentement du délégué à la délégation semblait fairedéfaut ; la qualification de délégation était alors sujette à cau-tion. L’arrêt n’est donc pas probant. Un second arrêt du 12 juin1965 (Bull. civ. III, no 367), ayant refusé au délégant le bénéficede cette exception dilatoire, n’est pas plus convaincant. Quant àla relation délégué/délégant, la doctrine de la Cour de cassationne semble pas définitivement fixée. En effet, dans un premier ar-rêt, sa 3e chambre civile n’a pas affirmé péremptoirement que ledélégué pouvait se soustraire aux poursuites du délégant avantl’arrivée du terme affectant la délégation. Le 5 mars 1970 (Bull.civ. III, no 180), elle a fondé sa décision sur l’intention des par-ties et non sur la nature de la délégation. En revanche, dans

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DÉLÉGATION

son arrêt remarqué du 16 avril 1996 (préc.) la chambre com-merciale a jugé que : « si la créance du délégant sur le délégués’éteint, non pas du fait de l’acceptation par le délégataire del’engagement du délégué à son égard, mais seulement par le faitde l’exécution de la délégation, ni le délégant ni ses créanciers,ne peuvent, avant la défaillance du délégué envers le déléga-taire, exiger paiement ». Toutefois, cette solution semble remiseen cause par la même chambre dans son arrêt du 29 avril 2002(préc.). En effet, après avoir retenu que la délégation simple lais-sait subsister la créance primitive du délégant sur le délégué, ellea autorisé le Trésor public, créancier du délégant, à se prévaloirsur cette créance de l’effet attributif d’avis à tiers détenteurs no-tifiés au délégué. Cet effet n’écarte pourtant pas la règle selonlaquelle le Trésor public ne peut avoir plus de droit à l’égard dudébiteur de son débiteur que ce dernier à l’égard du premier. Enconséquence, en statuant comme elle l’a fait, la chambre com-merciale paraît reconnaître au délégant le droit d’agir contre ledélégué avant le terme affectant la délégation.

52. Il est cependant permis de penser qu’en raison de sa fonctionla délégation implique la neutralisation des obligations primitivesjusqu’à la date d’exécution de l’obligation nouvelle (C. civ., arg.art. 1135). En effet, la délégation est une technique d’extinc-tion des obligations réalisée par une simplification des relationscontractuelles. En un mot, cette fonction est sa cause. Il enrésulte qu’elle est un mécanisme unitaire auquel s’attache unefonction précise et invariable. Ce serait faire obstacle à cettefonction que de reconnaître au délégataire ou au délégant le droitde poursuivre leur débiteur primitif antérieurement à l’arrivée duterme de l’obligation souscrite par le délégué. La délégation de-vrait donc emporter nécessairement modification des termes af-fectant les obligations antérieures.

§ 2. – Inopposabilité des exceptions.

53. Cette règle signifie que le délégué ne peut se soustraire àl’exécution de son obligation envers le délégataire en invoquantdes causes touchant à la formation ou à l’exécution de l’une oul’autre des dettes primitives ; elle est une conséquence du ca-ractère nouveau de l’engagement du délégué envers le déléga-taire. En effet, puisque le délégué prend un engagement directet nouveau, celui-ci ne puise pas sa force dans les obligationsantérieures existantes entre les parties, même s’il a pour finalitéleur extinction. On a pu expliquer cette règle par le principe del’effet relatif du contrat (M. BILLIAU, thèse préc., no 321 et s.).En principe, il n’y a pas lieu de distinguer selon que la déléga-tion est simple ou novatoire. Dans cette dernière situation, elleemporte d’ailleurs l’extinction immédiate de la dette novée. Il nepeut donc logiquement être tirée de celle-ci le prétexte d’une in-exécution, sauf dans un cas. S’agissant d’une délégation simple,la portée de la règle est la plus discutée.

A. – En cas de délégation parfaite ou novatoire.

54. Dans un arrêt du 24 janvier 1872 (DP 1873.1.75,S. 1872.1.31 ; Les grands arrêts de la jurisprudence civile,t. 2, 11e éd., 2000, Dalloz, par H. CAPITANT, Fr. TERRÉ etY. LEQUETTE, no 239), la Cour de cassation a posé le principeen décidant : « qu’un créancier ayant, de bonne foi et duconsentement de son débiteur, accepté aux lieux et place decelui-ci, qu’il a libéré, une autre personne capable de s’obli-ger et qui s’est engagée envers lui sans aucune condition, adésormais action contre le nouveau débiteur ainsi substituéau premier, qu’elle que fut la nature des rapports juridiquesqui eussent existé entre l’ancien et le nouveau débiteur ; quecelui-ci ne pourrait donc s’affranchir de son engagement enversle créancier sous le seul prétexte que, par erreur, il se seraitcru obligé lui-même envers le délégant, ou que son obligation

envers celui-ci aurait été reconnue et déclarée nulle par unedécision passée en force de chose jugée... ». Cet arrêt, souventprésenté comme la décision de principe ayant consacré la règlede l’inopposabilité des exceptions, concerne seulement unehypothèse de délégation novatoire par changement de débiteur.La solution devrait être identique en cas de délégation novatoirepar changement de créancier, c’est-à-dire lorsque le délégatairedécide de libérer le délégant sitôt la délégation conclue etlorsque deux novations interviennent.

55. Dans cet arrêt, la Cour de cassation a réservé le cas où ledélégué aurait assorti son engagement de certaines conditions,ce qui tend à montrer que la règle de l’inopposabilité des ex-ceptions est seulement relative. Il s’en déduit qu’elle n’est pasd’ordre public. Elle comporte d’ailleurs une exception d’originelégale : lorsque l’obligation novée était nulle, c’est-à-dire judi-ciairement annulée puisque la novation ne se comprend qu’enfonction d’une obligation préexistante valable. La 1re chambrecivile a ainsi expressément jugé, le 7 novembre 1995 (Bull. civ.I, no 387, Defrénois 1996, art. 36272, obs. Ph. Delebecque) :« qu’il résulte de la combinaison de ces textes [les art. 1271 et1131 C. civ.] que la novation n’a lieu que si l’obligation ancienneà laquelle est substituée la nouvelle est valable ». Elle a ainsicensuré une cour d’appel au motif que « si la première obligationétait nulle, la seconde était dépourvue de cause et ne produisaitaucun effet ». Ce qui est vrai pour la novation devrait l’être éga-lement pour la délégation qui réalise un effet identique car elleemprunte alors son régime. La portée du principe posé en 1872est ainsi atténuée, l’exception de nullité étant désormais oppo-sable au délégataire.

B. – En cas de délégation imparfaite ou simple.

56. La règle de l’inopposabilité des exceptions peut être exa-minée en distinguant la dette du délégué envers le délégant decelle de ce dernier à l’égard du délégataire. Il faut aussi réserverl’hypothèse de la fraude.

57. S’agissant des exceptions rattachées à la dette du délégué,on peut se référer en premier lieu à un arrêt du 26 janvier 1960rendu à propos d’une exception tirée de l’obligation du déléguéenvers le délégant (Bull. civ. I, no 55). La 1re chambre civile dela Cour de cassation a ainsi jugé qu’un constructeur d’avions quis’est engagé à livrer au délégataire un appareil qui lui avait étécommandé par le délégant, ne peut se soustraire à son obliga-tion en objectant que ce dernier ne lui en a pas versé le prix. Ledélégué ne peut ainsi opposer au délégataire l’exception d’in-exécution qu’il pourrait opposer au délégant en vertu de l’obli-gation initiale. Plus récemment, le 22 avril 1997 (Bull. civ. IV,no 98, JCP 1998. II. 10050, note Ch. Lachièze, Defrénois 1997,art. 36634, obs. D. Mazeaud), la chambre commerciale de laCour de cassation a jugé que « dans la délégation de créance,le délégué ne peut opposer au délégataire les exceptions néesde ses rapports avec le délégant ». Elle a toutefois réservé lecas de la collusion frauduleuse entre le délégant et le déléga-taire qui aurait déterminé l’engagement du délégué. Cependant,puisque le principe de l’inopposabilité des exceptions n’est pasd’ordre public, on admet qu’il puisse être totalement ou partielle-ment écarté par une stipulation contraire (V. déjà, au XIXe siècle,HUBERT, thèse préc., no 146 ; H. CAPITANT, De la cause desobligations, 3e éd., 1927, Dalloz, no 178).

58. Au titre des exceptions rattachées à la dette du délégant en-vers le délégataire, la portée du principe est appréciée différem-ment selon la 1re chambre civile et la chambre commerciale de laCour de cassation en l’état d’une divergence de jurisprudence.En effet, pour la 1re chambre civile (17 mars 1992, Bull. civ. I,no 84, RTD civ. 1992.765, obs. J. Mestre, D. 1992.481, note

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DÉLÉGATION

L. Aynès) : « Sauf convention contraire, le délégué est seulementobligé au paiement de la dette du délégant, et qu’il se trouve dé-chargé de son obligation lorsque la créance de ce dernier estatteinte par la prescription ». Cette formule revient à exclurel’inopposabilité de principe des exceptions puisque le déléguépeut invoquer l’inexistence de la dette du délégant, en raison deson extinction par le jeu de la prescription. En revanche, pourla chambre commerciale (25 févr. 1992, JCP 1992. II. 21922,note M. Billiau) : « en cas de délégation de paiement impar-faite, le délégué ne peut, sauf clause contraire, opposer au dé-légataire les exceptions dont le délégant pouvait se prévaloir àl’égard de celui-ci ». Si, pour les deux chambres de la Courde cassation, les parties demeurent libres d’adopter le régimequ’elles souhaitent, faisant ainsi application du principe de liber-té contractuelle, elles posent chacune une règle supplétive ensens contraire. Pour la chambre commerciale, la règle est l’inop-posabilité des exceptions, à défaut de stipulation contraire, alorsque pour la 1re chambre, la règle est celle de l’opposabilité desexceptions, sauf si les parties l’écartent. Cette contradiction jus-tifierait l’intervention d’une chambre mixte ou d’une assembléeplénière.

59. En ce qui concerne l’exception tirée de la fraude, il faut sup-poser que le délégué accepte de s’engager envers le délégataireà la suite d’une fraude ourdie par le délégant. Celui-ci sait, parexemple, que sa créance est nulle ou que sa dette l’est. Se-lon l’arrêt du 22 avril 1997 (préc.), le délégué ne peut opposercette exception tirée de la fraude du seul délégant pour refu-ser le payement. En revanche, l’existence d’un concert fraudu-leux entre le délégant et le délégataire pourrait être invoquéeutilement par le délégué, car, toujours dans son arrêt précité, lachambre commerciale a décidé que « l’engagement de la so-ciété Calberson international (délégué) n’était pas affecté par lafraude imputée à la société Trans Europe Sud (délégant) dès lorsqu’il n’était pas soutenu que la société Trans Ouest (délégataire)avait pris part à celle-ci ».

§ 3. – Extinction des obligations.

60. L’extinction des obligations primitives se réalise à desépoques différentes selon que la délégation produit ou non unou deux effets novatoires.

A. – Délégation simple ou imparfaite.

61. Lorsque aucune novation n’intervient, c’est l’exécution de lanouvelle obligation qui éteindra la dette et la créance du délé-gant (V., pour la créance de celui-ci, Cass. com. 16 avr. 1996,préc. supra, no 32), totalement ou partiellement. Le double effetextinctif ne se réalise, en effet, qu’à concurrence de la plus faiblesomme (Cass. soc. 4 juin 1971, Bull. civ. V, no 416). Mais, lors-qu’une obligation primitive a pour objet un corps certain, il fautprésumer qu’elle est éteinte pour le tout.

62. Le mécanisme de la remise de dette explique la libérationde chaque débiteur primitif (V., pour une analyse différente,MESTRE, obs. sur Cass. 1re civ. 15 juin 1983, RTD civ.1984.722). En effet, le délégataire a deux créances : une sur ledélégant et une sur le délégué ; mais il ne peut recevoir qu’unémolument car la délégation ne peut lui procurer un enrichisse-ment. Donc, en acceptant la délégation, le délégataire consentà remettre la dette du délégant – lequel accepte – lorsque ledélégué aura acquitté son obligation. Mutatis mutandis, c’est decette façon que le délégué est libéré envers le délégant. On asuggéré de fonder l’effet extinctif sur les articles 1134, alinéa 3,et 1135 du code civil, l’explication tirée de la remise paraissant« quelque peu artificielle ». « Lorsque le délégué s’engageenvers le délégataire pour ce que doit le délégant et que ladette de celui-ci n’est pas éteinte, l’équité et l’usage permettentd’interpréter l’engagement du délégué comme se substituant

à celui du délégant, à titre de paiement ou de garantie »(C. LACHIÈZE, Le régime des exceptions dans les opérationsjuridiques à trois personnes en droit civil, thèse, Bordeaux,Doct. & Not., 2001, préface J. HAUSER, no 182). Cette analyseest incompatible avec le mécanisme de la délégation, car, enpayant, le délégué n’acquitte pas la dette du délégant, mais sapropre dette directement souscrite envers le délégataire. Enoutre, ni la bonne foi, ni l’équité ou l’usage ne constituent destechniques extinctives d’obligation.

63. Si la dette originaire du délégué est nulle, celui-ci ne disposepas, en principe, d’un recours contre le délégataire (Cass. civ.24 janv. 1872, DP 1873.1.75, S. 1872.1.31 ; Cass. com. 15 oct.1979, Bull. civ. IV, no 254) ; et l’action de in rem verso dirigéecontre le délégant est irrecevable (V. cep. Cass. civ. 31 mars1852, DP 1852.1.161, qui a jugé que : « le débiteur déléguén’a qu’une action en indemnité contre le délégant dont il a payéla dette »). De la même façon si la créance du délégant estnulle, celui-ci ne dispose d’aucun recours contre le délégataire.Les règles de la responsabilité civile pourraient cependant êtreinvoquées.

B. – Délégation novatoire ou parfaite.

64. Lorsqu’une novation est conclue en même temps que la dé-légation (délégation parfaite), l’extinction de l’obligation primitiveconcernée a lieu à l’époque de la formation de la délégation.Cette extinction emporte aussi normalement extinction des sû-retés. La question se pose alors de savoir si la survenance decertains événements ne serait pas de nature à remettre en causel’effet extinctif. En principe, en raison de l’effet extinctif immédiatque produit la novation, le délégataire ne devrait disposer d’au-cun recours contre le délégant au cas d’inexécution de l’obliga-tion du délégué (V. HUBERT, thèse préc., no 196, p. 151).

65. Le législateur a tempéré la rigueur de cette règle. Le code ci-vil consacre ainsi une disposition particulière au recours éventueldu délégataire contre le délégant lorsque le délégué était insol-vable. L’article 1276 du code prévoit ainsi que « le créancier quia déchargé le débiteur par qui a été faite la délégation, n’a pointde recours contre ce débiteur, si le délégué devient insolvable, àmoins que l’acte n’en contienne une réserve expresse, ou que ledélégué ne fût déjà en faillite ouverte, ou tombé en déconfitureau moment de la délégation ».

66. Ce texte ne vise qu’une espèce de novation incluse dans ladélégation, la novation par changement de débiteur, intervenantexclusivement dans les relations délégant-délégataire. Il fautaussi souligner qu’il n’est pas applicable en cas de délégationsimple (délégation imparfaite) car l’obligation primitive subsistejusqu’à l’exécution du rapport délégué (HUBERT, thèse préc.,no 198, p. 153). Cela dit, l’article 1176 du code civil prévoit l’exis-tence de ce recours dans deux hypothèses dont les sources sontdifférentes puisque la première est de nature conventionnelle(réserve conventionnelle), tandis que la seconde est d’originelégale (déconfiture ou faillite), même si elles se rattachent toutesdeux à l’idée d’insolvabilité du nouveau débiteur. Le domainedu recours est donc limité. Le délégataire ne pourrait l’invoquerlorsque, par exemple, le délégué a pu lui opposer une exceptionpour se soustraire à l’exécution de son obligation en dehors detoute insolvabilité, ou encore en invoquant un cas de force ma-jeure ayant fait obstacle à l’exécution du rapport délégué.

67. Une importante discussion s’est instaurée sur la nature durecours dont dispose le délégataire. Selon une première opi-nion, le délégataire conserverait l’action primitive qu’il aurait puexercer contre le délégant en vertu de l’obligation primitive, tellequ’elle existait au jour de la conclusion de la délégation avecses accessoires (R. NOURRIT, De la novation et de la déléga-tion, thèse, Aix, 1859, p. 117 et s. ; A. DUPLESSIS, Étude sur la

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novation et la délégation en droit romain et en droit français an-cien et moderne [civil, commercial et fiscal], thèse, Paris, 1869,p. 360 et s. ; BAUDRY-LACANTINERIE, Traité théorique et pra-tique de droit civil, t. 3, Des obligations, par L. BARDE, 3e éd.,1908, no 1750, p. 65 ; PLANIOL et RIPERT, t. 7, par ESMEIN,RADOUANT et GABOLDE, no 1277, p. 680 et s. ; MAZEAUD,par CHABAS, op. cit., no 1243). Pratiquement, cette opinionreconnaît au délégataire le droit de remettre en cause l’effet ex-tinctif de la délégation parfaite (novatoire par changement de dé-biteur). Or, on a démontré que la novation comprise dans unedélégation avait pour effet de libérer automatiquement les cau-tions et les codébiteurs solidaires en vertu de l’article 1281 ducode civil (M. BILLIAU, thèse préc., no 282 et s., et no 287). Enadmettant que le délégataire dispose d’un recours fondé sur lacréance novée, il remettrait en cause la libération des cautions etdes codébiteurs solidaires à leur préjudice, ce qui aurait pour ef-fet d’introduire un facteur d’incertitude constitutif d’insécurité ju-ridique, même si le créancier délégataire et le délégant sont debonne foi. Les cautions et codébiteurs ont, en effet, pu croire,également de bonne foi, qu’ils étaient libérés envers le déléga-taire.

68. D’autres auteurs ont estimé qu’il convenait de privilégier lecréancier, lequel ne se serait engagé qu’en considération de lasolvabilité du délégué. La solvabilité actuelle du délégué se-rait ainsi érigée en condition. La novation serait subordonnéeà la condition tacite que le délégué soit solvable au jour de laconclusion de l’opération (PLANIOL et RIPERT, par ESMEIN,RADOUANT et GABOLDE, op. et loc. cit.). La délégation nova-toire serait toujours conclue sous condition résolutoire et ne seconcevrait pas autrement.

69. Cette conception ne paraît pas admissible. Il suffit d’obser-ver que, d’une manière générale, nul sujet de droit ne contrac-terait la moindre obligation s’il ne supposait son contractant sol-vable, ou alors il faudrait en déduire que toutes les conventions,quelle que soit leur nature, sont conclues sous la condition réso-lutoire de la solvabilité du débiteur. En outre, il a été démontréque la notion de condition tacite imposée, en quelque sorte, parla nature des choses était rejetée par le droit positif (TAISNE, Lanotion de condition dans les actes juridiques, thèse, Lille, 1977,no 361, p. 499). Il apparaît donc inexact de recourir au méca-nisme de la condition tacite pour justifier la nature du recoursdu délégataire contre le délégant en vertu de la créance primi-tive du premier contre le second. Enfin, l’article 1281 du codecivil énonce clairement que les codébiteurs solidaires et les cau-tions sont déchargés par la novation faite entre le créancier etle débiteur. Et, le délégataire n’a de recours contre eux que s’ila exigé et obtenu leur accord à la novation, lequel ne se justi-fie qu’en cas d’insolvabilité du nouveau débiteur. En définitive,même si le délégataire dispose d’un recours en cas d’insolvabili-té du délégué contre le délégant, ce recours ne peut être exercéque contre lui et lui seul, à moins qu’il n’ait érigé la solvabilité dudélégué en condition expresse. Il s’agirait alors d’une véritablecondition, voire d’une qualité convenue. La détermination de lanature juridique de ce recours se trouve ainsi privée de tout in-térêt pratique.

70. On a aussi émis l’idée selon laquelle le délégataire n’auraitconsenti à la délégation que par erreur car il croyait, certes àtort, que son nouveau débiteur serait solvable. De cette façon,ce qui expliquerait l’existence d’une action fondée sur la créanceprimitive « c’est une présomption d’erreur de la part du déléga-taire, erreur qui fait annuler la novation consentie contre lui »(COLIN et CAPITANT, t. 2, 10e éd., 1948, par JULLIOT DE LAMORANDIÈRE, no 554, p. 389). L’argument n’est pas péremp-toire. L’erreur sur la solvabilité du débiteur est souvent assimiléeà l’erreur sur la valeur. À ce titre, elle n’est généralement pas

considérée comme susceptible d’entraîner la nullité (V. Erreur).Au surplus, l’erreur du délégataire doit être prouvée et c’est àcelui qui allègue que son consentement a été vicié d’en rappor-ter la preuve conformément au droit commun de la preuve. Cesdeux considérations suffisent pour rejeter cette explication.

71. Une fraction de la doctrine a retenu une autre conception dela nature du recours du délégataire. Il s’agirait d’une action engarantie, indépendante de la créance novée (V., par ex., RAME,Du transport de créance, des délégations et des subrogationsen cas de payement, thèse, Rennes, 1847, no 107, p. 52 ; T. VA-QUETTE, De la novation et de la délégation, thèse, Douai, 1879,p. 114 ; DEMOLOMBE, Traité des contrats ou des obligationsconventionnelles en général, t. 5, 1875, no 325, p. 227 ; HU-BERT, thèse préc., no 197 et s., p. 152 et s., spéc. no 198 ;AUBRY et RAU, Cours de droit civil français, t. 4, Obligations,par BARTIN, 6e éd., 1942, § 324, spéc. note 51). Deux argu-ments sont avancés. Tout d’abord, l’article 1276 parle in limined’un recours et non de la réserve de l’action primitive. Ensuite,le recours du délégataire n’est passé dans notre code que parcequ’il avait été admis par POTHIER, lequel considérait ce recourscomme une simple action en indemnité.

72. Cette analyse semble préférable ; elle se justifie au regarddes règles gouvernant la novation. La créance novée ne renaîtavec ses accessoires que dans une seule hypothèse : celle oùl’obligation nouvelle est entachée de nullité. La nullité de la nou-velle obligation entraîne la nullité de la novation et la survivancede l’obligation ancienne qui est censée n’avoir jamais été éteinte.Ce n’est que l’application de la théorie des nullités. Or, l’insolva-bilité du délégué n’est pas en soi une cause de nullité. Elle le de-viendrait cependant lorsqu’elle serait la conséquence d’une er-reur sur l’identité ou une qualité de la personne (V. Erreur). Mais,dans ce cas ce n’est plus le recours prévu par l’article 1276 ducode civil qui est mis en œuvre par le délégataire, mais l’actiondérivant de la nullité prononcée en application de l’article 1110du même code.

73. Le code civil limite le nombre des ouvertures du recours dudélégataire à deux hypothèses, la réserve expresse et la failliteouverte ou la déconfiture au moment de la délégation. La ré-serve a pour effet de garantir le délégataire contre l’insolvabilitéfuture du délégué (HUBERT, thèse préc., no 201, p. 15). Elle doitêtre expresse, mais il n’est pas utile que le délégataire utilise destermes sacramentels.

74. L’existence d’un recours du délégataire en cas d’insolvabilitéactuelle du délégué dans les autres cas – faillite ou déconfiture –distingue la délégation de la cession de créance, où le cédant negarantit pas au cessionnaire la solvabilité du débiteur cédé, maisseulement l’existence de la créance. Cette différence est justi-fiée par l’absence de caractère spéculatif de la délégation (HU-BERT, thèse préc., no 201, p. 157-158) (V. Cession de créance).

75. Le terme « faillite » est aujourd’hui désuet. Il faut entendrepar cette formule la cessation des payements du débiteur, lors-qu’il est soumis à une procédure collective. La déconfiture n’est,en revanche, pas une notion définie par le code civil ; elle estprésentée comme « l’état du débiteur non commerçant dont lepassif surpasse l’actif et qui se trouve ainsi dans l’impossibili-té de satisfaire intégralement tous ses créanciers » (V. Déconfi-ture). La question se pose de savoir si une situation de suren-dettement au sens de l’article L. 330-1 du code de la consom-mation issu de l’article 35 de la loi no 2003-710 du 1er août 2003,d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovationurbaine (D. 2003.1985), permettant, entre autres mesures, l’ou-verture d’une nouvelle procédure de rétablissement personnel(C. consom., art. L. 332-5 et s.) peut rentrer dans les prévisions

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DÉLÉGATION

de l’article 1276. Une assimilation avec la déconfiture paraît pos-sible dans la mesure où les procédures du code de la consom-mation semblent précisément se substituer à l’ancienne déconfi-ture en organisant des procédures justifiées par l’insolvabilité dudébiteur personne physique. La procédure de rétablissementpersonnel pourrait d’ailleurs être assimilée purement et simple-ment à la liquidation judiciaire du code de commerce, car sonouverture est subordonnée à la constatation de la situation « ir-rémédiablement compromise » du débiteur, ce qui n’est pas sanslien avec la cessation des payements.

76. L’article 1276 du code civil impose une seconde condition :la cessation des payements, ou la déconfiture, doit être « ou-verte au moment de la délégation ». C’est en réalité au momentoù s’opère la novation qu’il faut se placer (HUBERT, thèse préc.,no 196, p. 152 et note 1 ; BAUDRY-LACANTINERIE, par BARDE,op. cit., no 1749, p. 63). La novation peut intervenir postérieure-ment à la conclusion de la délégation. Le recours du délégatairene peut naître, et présenter d’utilité, qu’au jour où la novationintervient, puisque, dans le cas contraire, le débiteur primitif dudélégataire n’est pas libéré.

77. En tout état de cause, le délégataire doit justifier s’être aupréalable adressé au délégué avant de recourir contre le délé-gant. La doctrine accorde au débiteur primitif un véritable béné-fice de discussion (HUBERT, thèse préc., no 201, p. 157 ; CO-LIN et CAPITANT, par JULLIOT DE LA MORANDIÈRE, op. cit.,no 554, p. 389).

78. L’article 1176 précité n’envisage pas l’hypothèse du recoursdu délégant contre le délégué, lorsque la délégation emportenovation par changement de créancier. Or, deux questions seposent. D’une part, le recours du délégataire contre le délégantouvre-t-il au délégant un recours contre le délégué lorsqu’il alui-même déchargé son débiteur ? D’autre part, lorsque l’obli-gation nouvelle est nulle, sans que le délégué soit pour autantinsolvable, le délégant peut-il recourir contre le délégué en vertude la créance primitive ?

79. Dans le premier cas, il faut supposer que le délégant alui-même déchargé son propre débiteur. Autrement dit, la délé-gation est doublement novatoire (parfaite) puisqu’elle comporteà la fois une novation par changement de débiteur et une nova-tion par changement de créancier. Ainsi, le délégué est-il libé-ré envers le délégant et l’obligation primitive qui les unissait estéteinte.

80. Cependant, le délégant qui était lui-même libéré en principeenvers le délégataire est néanmoins tenu de s’acquitter de sa

dette primitive envers son créancier, celui-ci ayant pu le pour-suivre en vertu de l’article 1276 du code civil. Dans ces condi-tions le délégant devrait, à tout le moins en équité, être autoriséà poursuivre le délégué, ne serait-ce que parce que la délégationn’a pu produire les effets escomptés par toutes les parties. Tou-tefois, l’exercice d’un tel recours ne pourrait pratiquement pasaboutir au résultat recherché. En effet, si le délégué était endéconfiture, en faillite ouverte ou insolvable, le recours du dé-légant ne lui permettrait pas d’obtenir efficacement l’exécutionde l’obligation primitive, le délégataire n’ayant lui-même pu ob-tenir son payement. Cependant, dans le cas de faillite ouverte,le délégant pourrait produire à la procédure et concourir pour undividende, fût-il faible, voire même dérisoire. De la même façon,si le délégué est insolvable ou en état de déconfiture, le délégantserait en droit, lorsque son débiteur sera revenu à une meilleurefortune, de lui réclamer le paiement de son obligation.

81. Il n’existe aucune disposition légale qui permette cependantd’arriver à un tel résultat. L’article 1276 du code civil est unedisposition exceptionnelle dont le bénéfice ne peut être étenduau-delà du domaine qui lui a été assigné par le législateur. C’estdonc le droit commun de la novation qui doit régir les relationsdélégant-délégué, qui interdit au délégant de recourir contre ledébiteur qu’il a délégué pour des causes similaires à celles re-tenues par l’article 1276 du code civil, tout en le libérant. Ledélégant ne serait toutefois pas totalement démuni. Les règlesde la responsabilité civile sont susceptibles de prendre le relaiset de répondre, dans une certaine mesure, au légitime souci dudélégant. C’est ainsi qu’il pourrait reprocher au délégué d’avoircommis une faute précontractuelle en ne l’informant pas de sasituation financière antérieurement à la conclusion de la déléga-tion. La responsabilité encourue serait de nature délictuelle carc’est une faute antérieure à la conclusion de la délégation que ledélégant se proposerait de démontrer.

82. Dans le second cas, la délégation novatoire par changementde créancier entraîne l’extinction de la dette primitive du déléguéenvers le délégant. Quel que soit le sort de l’obligation nouvelle,notamment en cas d’insolvabilité du nouveau débiteur, le délé-gant ne devrait pas pouvoir recourir contre lui. Cependant, l’obli-gation nouvelle peut être entachée de nullité, entraînant l’anéan-tissement de la novation. La nullité de l’obligation nouvelle auraalors pour effet de remettre en cause l’effet extinctif de la no-vation, autorisant le délégant à poursuivre son débiteur sur lefondement de l’obligation primitive. La règle de droit rejoint icil’équité, car le délégataire recourra contre le délégant et le délé-gant sera lui-même admis à recouvrer le montant de sa créanceprimitive.

INDEX ALPHABÉTIQUEAccessoires 30, 67, 72.Action de in rem verso 63.Action en garantie 71 s.Banque 5.Bénéfice de discussion 77.Carte de payement 5 s.Cause 52.– engagement du délégué 34 s.Caution 33, 67 s.Cessation des payements 75 s.

V. Procédure collective.Cession de créance 74.Condition 22, 68.– solvabilité du délégué 68.– tacite 69.Conditions de la délégation 11 s.Consentement– délégant 39 s.

– délégataire 40 s.– délégué 43.Créance déléguée 31.Déconfiture 65 s., 73 s., 80.Définition 1 s.Délégant– consentement 39 s.– décès, conséquences sur l’offre de

délégation 41 s.– définition 1.– rapports avec : le délégataire 14 ; le

délégué 15 s., 23 s.– recours contre : le délégataire 63 ;

le délégué 78 s. [insolvable 80].Délégataire– consentement 40 s. : formes 42.– définition 1.– droit nouveau et direct 30 s.

– rapports avec : le délégant 14 ; ledélégué 28, 30 s.

– recours contre le délégant 65 s. :cas 65, 73 ; date 76 s. ; nature 67 s.

Délégation– conditionnelle 22, 29.– imparfaite ou simple 3, 5, 49, 56 s. :

extinction des obligations 61 s .– parfaite ou novatoire 3, 27, 33, 36,

42 s., 54 s. : extinction des obliga-tions 64 s.

Délégué– consentement 43.– définition 1.– engagement, cause 34 s.– insolvable, conséquence 65.– rapports avec : le délégant 15 s.,

23 s. ; le délégataire 28, 30 s.

– recours contre le délégataire 63.– solvabilité 65 s., 80.Droit commercial 42.Effets 44 s.Erreur 70, 72.Extinction des obligations 13, 38,

52, 60 s.– délégation simple ou imparfaite

61 s.– délégation novatoire ou parfaite

64 s.Faillite ou déconfiture 73. V. Pro-

cédure collectiveFiscalité 31.Fraude– du délégant 56 s., 59.Garantie 71 s.Historique 4 s.

Rép. civ. Dalloz - 12 - septembre 2004

DÉLÉGATION

Hypothèque 33.Immeuble– vente 4.Inopposabilité des exceptions 35,

53 s.– délégation imparfaite ou simple

56 s.– délégation parfaite ou novatoire 54.– fondement 53.– fraude entre délégant et délégataire

56 s., 59.– ordre public 57.Intuitu personæ 29.Lettre de change 6.Mandat 9, 30.Nature 12 s.

Novation 2 s., 13, 54 s., 67.Nullité– obligation nouvelle 72, 78, 82.Obligation– (accessoires de l’) 30, 67, 72.– antérieure 12 s. : entre délégant et

délégataire 14 ; entre délégant etdélégué 15 s.

– créance déléguée 31.– extinction 13, 38, 52, 60 s.– intuitu personæ 29.– nouvelle 30 : nullité 72, 78, 82.– primitive : fondée en son principe

22, 29 ; sort avant l’exécution de ladélégation 49 s.

– terme 49 s.

Ordre public 57.Payement 12.– pour autrui 12.– carte 4 s.– cessation des paiements 75.– indication de payement 12.– promesse unilatérale 34 s.Période suspecte 45 s.Pharmacie 16 s.Preuve 42.– erreur 70.Privilèges 33.Procédure collective 45 s., 65 s.,.– cessation des paiements 75.– faillite ou déconfiture 73, 75.Publicité 44.

Remise de dette 62.Responsabilité civile 63, 81.Rétablissement personnel 75.Saisie 30.Sous-traitance 47.Stipulation pour autrui 7 s., 12.Surendettement 75.Sûretés 33, 64.Terme 49 s.Vente– immeuble 4.

septembre 2004 - 13 - Rép. civ. Dalloz