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Réponses fonctionnelles des communautés de pelouses calcicoles aux facteurs agro-écologiques dans les Préalpes françaises Luc Barbaro, Emmanuel Corcket, Thierry Dutoit et Jean-Paul Peltier Résumé : L’identification de groupes fonctionnels dans les pelouses calcicoles du Vercors méridional (Rhône-Alpes, France) est recherchée à travers la mise en relation des traits biologiques des espèces et des facteurs agro-écologiques. Les communautés de pelouses calcicoles sont organisées selon (i) le niveau de stress édaphique (oligotrophie et xéri- cité) et (ii) le mode et l’intensité de gestion agropastorale (pâturage et entretien mécanique). Dans ces pelouses soumi- ses à des perturbations régulières, les traits de vie liés à la dissémination et à la régénération sont plus discriminants que les traits morphologiques, et les stratégies adaptatives de Grime sont les meilleurs prédicteurs de l’ordination des espèces sur les gradients de stress et de perturbation. Une classification des espèces en groupes fonctionnels sur la base de traits biologiques identiques et de réponses similaires aux perturbations est proposée, dans une perspective de ges- tion conservatoire des pelouses calcicoles par le pastoralisme. Le rôle fonctionnel du pâturage est souligné par la rela- tion existant entre la rareté ou la dominance d’une espèce et son niveau d’appétence et de dispersion par les ovins. Dans les communautés de pelouses calcicoles, les espèces dominantes sont les plus appétentes et les mieux dispersées par les ovins, tandis que les plus rares dépendent d’autres modes de dispersion, comme la pluie de graines ou les ma- chines agricoles. Mots clés : traits biologiques, groupes fonctionnels, pratiques agropastorales, gestion conservatoire, analyse RLQ. Abstract: The identification of functional groups in calcareous grasslands of southern Vercors (Rhône-Alpes, France) is investigated through relationships between biological traits of the species and agro-ecological factors. Community pat- terns are determined by (i) the level of edaphic stress (oligotrophy and xericity) and (ii) the regime and the intensity of agropastoral management (grazing and mechanical cutting). In such grasslands submitted to regular disturbance, life traits related to dispersal and regeneration processes have greater importance for the differentiation of species than mor- phological traits, and Grime’s adaptative strategies are the best predictors of species ordination on agro-ecological gra- dients (e.g., stress and disturbance). A classification of species in functional groups based on the same life traits and similar responses to disturbances is proposed, and its role in defining adequate conservation management of calcareous grassland by low-intensity livestock farming is discussed. The functional role of grazing is emphasized by the relation- ship between species dominance or rarity and their levels of consumption and dispersion by sheeps. In calcareous grassland communities, dominant species are the most palatable and the most dispersed by sheeps, while rarer species depend on other dispersal modes, such as seed rain or mowing machinery. Key words: life traits, functional groups, agropastoral practices, conservation management, RLQ analysis. Barbaro et al. 1020 Introduction La classification des espèces en groupes fonctionnels montrant des réponses semblables aux perturbations est un problème majeur en écologie des communautés (Thompson et al. 1996; Lavorel et al. 1997, 1998; Médail et al. 1998). L’influence des régimes de perturbation comme le pâturage ou la fauche sur les communautés herbacées est de plus en plus abordée en termes de groupes fonctionnels, à travers les traits biologiques ou les stratégies adaptatives des espèces (Diaz et al. 1992; Fernandez Alés et al. 1993; Smith et Rushton 1994; Mc Intyre et al. 1995; Dutoit et al. 1999). Des espèces constituent un groupe fonctionnel quand elles jouent un rôle identique dans les processus écologiques au Can. J. Bot. 78: 1010–1020 (2000) © 2000 CNRC Canada 1010 Reçu le 15 avril 1999. L. Barbaro 1 . Centre d’études du machinisme agricole, du génie rural et des eaux et forêts (Cemagref), Grenoble, Unité de recherche Agricultures et milieux montagnards, B. P. 76, 38402 Saint-Martin-d’Hères, France. E. Corcket et J.-P. Peltier. Unité mixte de recherche Écosystèmes et changements environnementaux, Université Joseph Fourier, B. P. 53, 38041 Grenoble CEDEX 9, France. T. Dutoit. Université de Provence, Institut méditerranéen d’écologie et de paléoécologie (IMEP), 13397 Marseille CEDEX 20, France. 1 Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

Réponses fonctionnelles des communautés de pelouses calcicoles aux facteurs agro-écologiques dans les Préalpes françaises

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Page 1: Réponses fonctionnelles des communautés de pelouses calcicoles aux facteurs agro-écologiques dans les Préalpes françaises

Réponses fonctionnelles des communautés depelouses calcicoles aux facteurs agro-écologiquesdans les Préalpes françaises

Luc Barbaro, Emmanuel Corcket, Thierry Dutoit et Jean-Paul Peltier

Résumé : L’identification de groupes fonctionnels dans les pelouses calcicoles du Vercors méridional (Rhône-Alpes,France) est recherchée à travers la mise en relation des traits biologiques des espèces et des facteurs agro-écologiques.Les communautés de pelouses calcicoles sont organisées selon (i) le niveau de stress édaphique (oligotrophie et xéri-cité) et (ii) le mode et l’intensité de gestion agropastorale (pâturage et entretien mécanique). Dans ces pelouses soumi-ses à des perturbations régulières, les traits de vie liés à la dissémination et à la régénération sont plus discriminantsque les traits morphologiques, et les stratégies adaptatives de Grime sont les meilleurs prédicteurs de l’ordination desespèces sur les gradients de stress et de perturbation. Une classification des espèces en groupes fonctionnels sur la basede traits biologiques identiques et de réponses similaires aux perturbations est proposée, dans une perspective de ges-tion conservatoire des pelouses calcicoles par le pastoralisme. Le rôle fonctionnel du pâturage est souligné par la rela-tion existant entre la rareté ou la dominance d’une espèce et son niveau d’appétence et de dispersion par les ovins.Dans les communautés de pelouses calcicoles, les espèces dominantes sont les plus appétentes et les mieux disperséespar les ovins, tandis que les plus rares dépendent d’autres modes de dispersion, comme la pluie de graines ou les ma-chines agricoles.

Mots clés : traits biologiques, groupes fonctionnels, pratiques agropastorales, gestion conservatoire, analyse RLQ.

Abstract: The identification of functional groups in calcareous grasslands of southern Vercors (Rhône-Alpes, France) isinvestigated through relationships between biological traits of the species and agro-ecological factors. Community pat-terns are determined by (i) the level of edaphic stress (oligotrophy and xericity) and (ii) the regime and the intensity ofagropastoral management (grazing and mechanical cutting). In such grasslands submitted to regular disturbance, lifetraits related to dispersal and regeneration processes have greater importance for the differentiation of species than mor-phological traits, and Grime’s adaptative strategies are the best predictors of species ordination on agro-ecological gra-dients (e.g., stress and disturbance). A classification of species in functional groups based on the same life traits andsimilar responses to disturbances is proposed, and its role in defining adequate conservation management of calcareousgrassland by low-intensity livestock farming is discussed. The functional role of grazing is emphasized by the relation-ship between species dominance or rarity and their levels of consumption and dispersion by sheeps. In calcareousgrassland communities, dominant species are the most palatable and the most dispersed by sheeps, while rarer speciesdepend on other dispersal modes, such as seed rain or mowing machinery.

Key words: life traits, functional groups, agropastoral practices, conservation management, RLQ analysis.

Barbaro etal. 1020

Introduction

La classification des espèces en groupes fonctionnelsmontrant des réponses semblables aux perturbations est unproblème majeur en écologie des communautés (Thompsonet al. 1996; Lavorel et al. 1997, 1998; Médail et al. 1998).L’influence des régimes de perturbation comme le pâturage

ou la fauche sur les communautés herbacées est de plus enplus abordée en termes de groupes fonctionnels, à travers lestraits biologiques ou les stratégies adaptatives des espèces(Diaz et al. 1992; Fernandez Alés et al. 1993; Smith etRushton 1994; Mc Intyre et al. 1995; Dutoit et al. 1999).Des espèces constituent un groupe fonctionnel quand ellesjouent un rôle identique dans les processus écologiques au

Can. J. Bot. 78: 1010–1020 (2000) © 2000 CNRC Canada

1010

Reçu le 15 avril 1999.

L. Barbaro1. Centre d’études du machinisme agricole, du génie rural et des eaux et forêts (Cemagref), Grenoble, Unité derecherche Agricultures et milieux montagnards, B. P. 76, 38402 Saint-Martin-d’Hères, France.E. Corcket et J.-P. Peltier. Unité mixte de recherche Écosystèmes et changements environnementaux, Université Joseph Fourier,B. P. 53, 38041 Grenoble CEDEX 9, France.T. Dutoit. Université de Provence, Institut méditerranéen d’écologie et de paléoécologie (IMEP), 13397 Marseille CEDEX 20,France.

1Auteur correspondant (courriel : [email protected]).

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sein des communautés (Körner 1993; Gitay et Noble 1997).La conjonction de traits biologiques semblables et de répon-ses similaires aux facteurs écologiques sert de base à leurclassification en groupes ou types fonctionnels plutôt quetaxonomiques (Grime et al. 1988; Solbrig 1993).

Il existe quatre possibilités de classifications fonctionnel-les selon le niveau de prise en compte des relations entretraits biologiques et variables environnementales, d’aprèsLavorel et al. (1997) : (1) les groupes d’espèces ayant destraits semblables, (2) les stratégies d’adaptation des espècesliant des traits biologiques à la variation de la disponibilitédes ressources, (3) les types fonctionnels d’espèces montrantla même réponse à des facteurs environnementaux multiples,(4) les groupes d’espèces ayant une réponse spécifique à unfacteur environnemental particulier.

Le premier type de classification examine les corrélationsentre traits biologiques des espèces sans faire référence à unprocessus écologique particulier. Il tend ainsi à classer lesespèces essentiellement en fonction de leurs formes biologi-ques ou morphotypes (Diaz et al. 1992; Körner 1993; Tatoniet Roche 1994). Le deuxième identifie les stratégies adapta-tives des espèces en reliant les traits biologiques aux troisgrands processus écologiques que sont les niveaux de stressenvironnemental, de perturbation biotique et de compétitionsinter- et intra-spécifiques, selon une ordination tridimension-nelle des espèces en stratégies C (compétitives), S (toléran-tes au stress) et R (rudérales) (Grime et al. 1988; FernandezAlés et al. 1993). Les troisième et quatrième types de classi-fications (types et groupes fonctionnels) relient directementles traits de vie aux facteurs environnementaux. Elles diffè-rent des classifications précédentes car elles permettentd’identifier des groupes d’espèces sur des bases non plusphylogénétiques ou morphologiques, mais sur la base de ré-ponses similaires aux processus fonctionnels (Gitay et Noble1997). Il s’agit donc de relier les conditions d’habitat auxtraits biologiques des espèces, afin de déterminer si ces traitspermettent ou non à une espèce de persister dans des condi-tions environnementales données (Keddy 1992; Dolédec etal. 1996).

Les pelouses calcicoles sont des communautés herbacéesoligotrophes, soumises à différents régimes de perturbationsliées aux pratiques agropastorales (fauche, pâturage, dé-broussaillement). Les espèces dominantes sont le plus sou-vent des hémicryptophytes à croissance lente et à stratégie S,adaptées à de faibles ressources trophiques et hydriques(Grime 1990; Mitchley et Willems 1995; Thompson et al.1996). La seule prise en compte des traits de vie liés aux ca-ractéristiques biologiques et morphologiques de la planteadulte est insuffisante pour caractériser des groupes fonc-tionnels dans les écosystèmes pâturés (Lavorel et al. 1997).Il est alors nécessaire de prendre aussi en compte les traitsliés aux stratégies de régénération et aux caractéristiques desgraines (Smith et Rushton 1994; Thompson et al. 1996; La-vorel et al. 1998; Médail et al. 1998). L’importance majeuredes modes de dispersion des graines par le bétail et les ma-chines agricoles sur les phénomènes de colonisation etd’extinction d’espèces dans les pelouses calcicoles a été sou-lignée, particulièrement dans une perspective de gestionconservatoire (Fischer et al. 1996; Poschlod et al. 1996;1998). Il est clairement établi que les espèces caractériséespar de faibles populations, de courts cycles de vie et de fai-

bles amplitudes d’habitat sont plus exposées à un risqued’extinction locale que les autres (Fischer et Stöcklin 1997).

Le but de cette recherche est de caractériser, dans les pe-louses calcicoles du Vercors, des groupes fonctionnelsd’espèces montrant à la fois des traits biologiques communset des réponses similaires aux principaux facteurs agro-écologiques que sont le stress édaphique et les pratiquesagropastorales (Barbaro et Cozic 1998). En premier lieu,nous étudions les réponses des communautés aux variablesagro-écologiques, puis nous identifions séparément des grou-pes d’espèces sur la base de leurs traits biologiques. Une or-dination simultanée des espèces, des variables agro-écologiques et des traits biologiques est ensuite produite afinde classer les espèces en groupes fonctionnels (Lavorel et al.1998). L’intérêt de la caractérisation de groupes fonctionnelspour prédire l’impact de la gestion conservatoire par le pas-toralisme dans les pelouses calcicoles du Vercors est ensuitediscutée.

Matériel et méthodes

Zone d’étudeLe Parc naturel régional du Vercors (Rhône-Alpes, France)

s’étend sur l’ensemble du massif préalpin calcaire du Vercors etsur ses piémonts ouest (Royans), sud (Diois) et est (Trièves). Ilexiste une transition bioclimatique entre la zone médioeuropéenneet la zone méditerranéenne du nord au sud du massif, entraînant ungrand contraste thermique et pluviométrique : de Villard de Lans(1040 m), au nord du massif, à Die (400 m), au sud du massif, lesprécipitations moyennes mensuelles varient de 1214 à 881 mm etles températures moyennes annuelles de 7 à 11°C.

Les pelouses et fruticées calcicoles se développent aux étagescollinéen et montagnard inférieur du massif, à des altitudes com-prises entre 300 et 1300 m. Elles correspondent aux séries de végé-tation du chêne pubescent à l’étage collinéen (série delphino-jurassienne au nord et au centre du massif, série supra-méditerranéenne au sud) et de la hêtraie mésophile à l’étage mon-tagnard (Ozenda 1985). L’appartenance phytosociologique des pe-louses calcicoles du Vercors est complexe en raison de la transitionbioclimatique. Les pelouses xérophiles et mésoxérophiles à affini-tés méditerranéennes se rattachent aux associations de l’Ononido–Carlinetum et de l’Argyrolobio–Aphyllantetum décrites par Gaul-tier (1989), celles à affinités montagnardes aux alliances du Sesle-rio–Xerobromion et du Teucrio–Mesobromion, tandis que lespelouses mésophiles et méso-acidiphiles appartiennent aux allian-ces du Mesobromion, de l’Achilleo–Cynosurion et du Thymo–Cy-nosurion.

Ces pelouses sont établies sur des sols à ressources trophique ethydrique limitantes, facteur souvent aggravé par un appauvrisse-ment lié à l’ancienneté de l’utilisation agropastorale (Barbero1981). Malgré la difficulté de classer les sols dans les Préalpes mé-ridionales en raison de leur azonalité, cinq grands types peuventêtre distingués selon le pourcentage d’éléments grossiers, la pro-fondeur des horizons A+S, le type de roche mère et l’effervescenceà HCl (Baize et Girard 1992; Corcket 2000) : (1) les Peyrosols etColluviosols (sols cailloutiques issus d’éboulis ou de grèzes collu-viales et sols colluvionnés), (2) les Régosols et Rendosols clairs(sols superficiels sur marnes), (3) les Lithosols et sols leptiques(sols superficiels sur calcaires durs), (4) les Rendosols et Calcosols(sols profonds carbonatés), (5) les Rendisols, Calcisols et Fersialli-sols (sols profonds décarbonatés).

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Échantillonnage, mesures et traits biologiquesLes pelouses calcicoles du Vercors ont été échantillonnées de

manière stratifiée dans 102 stations distribuées sur 24 communesde la moitié méridionale du massif. Le choix des stations a été dé-terminé par la variation des conditions écologiques et des modes degestion agropastorale, en particulier de l’altitude, de la lithologie,de la fréquence d’entretien mécanique et du type de troupeau (ta-bleau 1). L’unité d’échantillonnage, la station, est caractérisée pardes conditions écologiques, un mode de gestion et une compositionfloristique homogène. Chaque relevé a ensuite été effectué de ma-nière aléatoire dans la station. La composition floristique a étéétudiée par relevés linéaires de végétation de 50 points quadrats(Daget et Poissonet 1995; Bullock 1996). La fréquence d’une es-pèce dans un relevé est le nombre de points où l’espèce a étécontactée sur 50. Convertie en pourcentage, cette fréquence donneune estimation du taux de recouvrement de l’espèce dans la station.À chaque station sont associées des variables agro-écologiques,

dont huit ont été sélectionnées après analyses préliminaires (ta-bleau 1) : quatre variables géopédologiques et quatre variables degestion agropastorale. L’indice de réserve utile (RU) est calculé àpartir de la description du profil de sol établi pour chaque station(Barbaro et Cozic 1998). Les variables de gestion agropastoralesont obtenues à partir d’enquêtes auprès des éleveurs et complétéespar des observations de terrain.

Pour chacune des 118 espèces les plus fréquentes retenues pourl’analyse, un ensemble de 12 traits et caractéristiques biologiques(tableau 2) a été rassemblé à partir de la littérature. Les traits 1 à 7sont obtenus à partir de Grime et al. (1988), complété pour les es-pèces méditerranéennes par la base de données de l’IMEP (Médailet al. 1998). Les traits 8 et 9 (dispersion par les ovins et persistancedans la banque de graines) sont obtenus à partir de résultats expéri-mentaux sur la dispersion des espèces de pelouses calcicoles parles ovins (Fischer et al. 1996; Poschlod et al. 1996, 1998). Pour cesdeux traits, la catégorie « inconnue ou indétectable » rassemble lesespèces dont la taille des graines était trop faible pour que celles-cisoient détectées et les espèces absentes des sites étudiés (soit 38espèces sur 118). En raison de ce biais, une certaine réserve doitêtre émise quant à l’interprétation de leur importance dansl’ordination des espèces. Enfin, trois caractéristiques biologiquescomplémentaires ont été prises en compte dans une perspective degestion conservatoire par le pâturage. Bien qu’elles ne soient pasdes traits biologiques sensu stricto, elles ont été assimilées à ceux-ci dans l’analyse statistique. Ces caractéristiques sont l’appétencedes espèces, obtenue à partir de leur indice de valeur fourragère(Jouglet et al. 1992), et le type biogéographique et l’indice de ra-reté obtenus à partir de l’Atlas de la flore des Hautes-Alpes (Chas1994). Le nombre de mailles de présence d’une espèce dans lescartes de distribution d’un atlas peut en effet être considéré commeune estimation du degré de rareté de l’espèce (Rabinowitz et al.1986).

Analyses multivariéesL’analyse des relations entre traits biologiques et variables envi-

ronnementales peut être effectuée, d’une part, grâce à une analysecanonique des correspondances (ACC) avec une double contraintesur les lignes et les colonnes (Lavorel et al. 1998), d’autre part, aumoyen d’une analyse de co-inertie généralisée entre trois tableauxappariés à la fois par leurs lignes et par leurs colonnes, baptiséeanalyse RLQ par ses auteurs (Dolédec et al. 1996; Chessel et al.1997). Cette dernière méthode permet une ordination simultanée detrois matrices, dans laquelle L est la matrice stations–espèces avec,aux marges des stations, la matrice stations – variables environne-mentales R et, aux marges des espèces, la matrice espèces – traitsbiologiques Q. Quand une analyse factorielle des correspondances(AFC) est effectuée sur la matrice centrale L, l’analyse RLQ maxi-mise la covariance entre combinaisons linéaires des colonnes de Ret de Q (Dolédec et al. 1996). La première étape de l’analyseconsiste à traiter séparément la matrice L stations–espèces parAFC, et les matrices R et Q par deux analyses des correspondancesmultiples (ACM), en conservant la pondération des lignes (sta-tions) ou des colonnes (espèces) de l’AFC, puis à évaluer la rela-tion statistique entre R et Q par un test de permutation (test deMonte-Carlo) (Chessel et al. 1997). L’ACM est utilisée pour traiterséparément les matrices R et Q, car elle permet d’obtenir une ordi-nation des sites en cherchant des variables de synthèse à partir d’untableau de variables qualitatives et, particulièrement, de variablesnominales (Pialot et al. 1984). Dans une ACM, la qualité de la sé-paration des modalités d’une variable sur un axe est mesurée parun rapport de corrélation entre cette variable et l’axe.

L’analyse RLQ traite alors le triplet d’analyse des correspondan-ces de R, L et Q. C’est en fait l’analyse d’inertie d’un tableau croisé,dans lequel on fait la somme de la fréquence de toutes les espècesporteuses d’une modalité d’un trait biologique dans toutes les sta-tions porteuses d’une modalité d’une variable environnementale

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Type devariable Variable Modalités

Géopédologique 1. Altitude (m) a. < 700b. 700–1000c. > 1000

2. Exposition a. Aucune (plateau)b. Nord et ouestc. Sud et sud-ouestd. Est et sud-est

3. Substrat a. Calcaires dursb. Éboulis et grèzes

colluvialesc. Calcaires marneuxd. Marnese. Colluvions et

argiles dedécarbonatation

4. RU (mm) a. < 20b. 20–39c. 40–90

Gestionagropastorale

5. Entretienmécanique

a. Régulier (annuel)b. Irrégulier (pluri-

annuel)c. Non entretenu

6. Type depâturage

a. Non pâturéb. Bovinc. Mixte avec

caprinsd. Équin ou mixte

bovin–équine. Ovin

7. Charge annuellede pâturage(j.UGB·ha–1·a–1)

a. < 50b. 50–200c. 200–400d. > 400

8. Période de miseà l’herbe

a. Non pâturéb. Avrilc. Maid. Juine. Toute l’année ou

automne–hiver

Tableau 1. Modalités des huit variables agro-écologiques.

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(Chessel et al. 1997). Les inerties totales des analyses séparées, desanalyses de co-inertie entre R et L, d’une part, et entre Q et L,d’autre part, et de l’analyse de co-inertie généralisée entre R, L et Qsont ensuite comparées. Le rapport entre la valeur propre du premieraxe de chaque analyse séparée et celle du premier axe de l’analyse

RLQ donne le pourcentage d’inertie projetée des analyses séparéespris en compte par l’analyse RLQ. En outre, on compare la corréla-tion canonique du premier axe de l’AFC avec celle de l’analyseRLQ (Dolédec et al. 1996). Finalement, la classification des espècesen groupes fonctionnels sur la base de traits biologiques semblables

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Barbaro et al. 1013

Type de trait Trait Modalités

Morphologie et stratégie(plante adulte)

1. Stratégie CSR a. CR et CSRb. SC et S/CSRc. Sd. SR et R

2. Type morphologique a. Absence de rosette basaleb. Rosette ou semi-rosette

3. Hauteur moyenne (cm) a. < 10b. 10–30c. > 30

4. Extension latérale a. Limitée (thérophytes)b. Compacte (< 10 cm)c. Phalanx (10–25 cm)d. Guerrilla (> 25 cm)

5. Phénologie de lafloraison

a. Mars–avrilb. Maic. Juind. Juillet

Régénération et dispersion(graine)

6. Mode de régénération a. Végétativeb. Végétative et par grainec. Par graine

7. Type de dissémination a. Auto- et baro-chorieb. Sémachoriec. Anémochoried. Zoo-sémachoriee. Zoochorie et zoo-

anémochorie8. Dispersion par les

ovinsa. Inconnue ou indétectableb. Non dispersée par ovinsc. Dispersée en petit nombre

(< 50 individus/ovin)d. Dispersée en grand nombre

(> 50 individus/ovin)9. Persistance dans la

banque de grainesa. Inconnue ou indétectableb. Faible (< 5 ans)c. Forte (> 5 ans)

Autres caractéristiques 10. Appétence (indice devaleur fourragère)

a. Espèce sans valeurfourragère

b. Espèce médiocre fourragèrec. Espèce moyenne fourragèred. Espèce bonne à très bonne

fourragère11. Type

biogéographiquea. Subcosmopolite et

circumboréalb. Eurasiatique et eurosibérienc. Centre-européend. Sud-européene. Méditerranéen sensu lato

12. Rareté et statut a. Taxon peu répandu, rare ouen régression

b. Taxon assez répanduc. Taxon répandud. Taxon très répandu

Tableau 2. Modalités des 12 traits biologiques.

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et de réponses similaires aux facteurs agro-écologiques est obtenuepar une classification ascendante hiérarchique (CAH) effectuée surles principaux axes de l’analyse RLQ. Les analyses multivariées ont

été réalisées grâce au logiciel ADE-4, du Laboratoire de biométriede l’Université Lyon I (Chessel et al. 1997).

Résultats

Réponses des communautés aux facteurs agro-écologiques

Les valeurs propres des deux premiers axes des différentesanalyses sont rassemblées dans le tableau 3. Dans l’ACM dutableau R (variables agro-écologiques), les variables liées àl’intensité d’utilisation montrent des rapports de corrélationplus élevés avec F1 (entretien mécanique, r = 0.53; chargede pâturage, r = 0.52). Les variables liées aux conditionsmésologiques sont corrélées avec F2 (RU, r = 0.51; exposi-tion, r = 0.50). Pour les deux axes, c’est le substrat géolo-gique qui montre le rapport de corrélation le plus élevé(tableau 4).

La liaison entre le tableau floristique L et le tableau desvariables agro-écologiques R est mesurée par l’analyse deco-inertie entre R et L (tableau 3). Les corrélations entre lesnouvelles ordinations obtenues pour les deux tableaux sontrespectivement de 0.864 pour F1 et de 0.836 pour F2. Untest de Monte-Carlo à 1000 permutations montre que le lienentre les deux tableaux est significatif à p ≤ 0.001.

Les modalités de substrat sont ordonnées sur F1 selon ungradient de stress édaphique croissant des calcaires durs auxcolluvions argileuses, parallèlement à une RU décroissante(fig.1). Ces deux modalités sont par contre opposées sur F2aux marnes, calcaires marneux et éboulis selon un gradientd’entretien mécanique et d’intensité de pâturage décroissants(fig. 1). Les pelouses les plus xériques et les plus oligotro-phes sont associées au pâturage mixte avec des caprins, par-ticulièrement en arrière-saison (d’août à décembre). Enrevanche, les pelouses mésotrophes sont utilisées de manièresemi-intensive, par un pâturage ovin ou bovin de printemps.

Identification de groupes d’espèces sur la base destraits biologiques

Dans l’ACM du tableau Q, les traits biologiques montrantles rapports de corrélation les plus élevés avec F1 (tableau 4)sont respectivement le niveau de dispersion par les ovins

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1014 Can. J. Bot. Vol. 78, 2000

Analyse Inertie* VarF1 VarF2 CovF1 CovF2 CorF1 CorF2

1 tableauR 3.000 0.390 0.354 — — — —L 4.991 0.454 0.333 — — — —Q 2.750 0.351 0.239 — — — —

2 tableauxR/R–L 0.323 0.348 0.339 0.326 0.277 0.864 0.836Q/Q–L 0.190 0.202 0.217 0.246 0.176 0.846 0.698

3 tableauxR/RLQ 0.021 0.299 0.373 0.103 0.082 0.430 0.299Q/RLQ 0.021 0.193 0.204 0.103 0.082 0.430 0.299

Nota : Var, variance des coordonnées factorielles pour un axe; Cov, covariance des deux jeux de coordonnéesfactorielles projetés sur les axes de co-inertie ou de l’analyse RLQ; Cor, corrélation entre les deux jeux decoordonnées factorielles résultant des analyses de co-inertie ou de l’analyse RLQ.

*Variabilité maximale projetée.

Tableau 3. Comparaison de l’inertie des analyses séparées (ACM de R, AFC de L, ACM de Q), à deuxtableaux (analyses de co-inertie de R–L et de Q–L) et à trois tableaux (analyse RLQ).

Variable agro-écologique

ACM de R ACM de Q RLQ

F1 F2 F1 F2

Altitude 0.37 0.01 — — 0.02 0.32Exposition 0.19 0.50 — — 0.32 0.26Substrat 0.61 0.65 — — 0.69 0.66RU 0.27 0.51 — — 0.42 0.25Mécanisation 0.53 0.06 — — 0.13 0.57Type de pâturage 0.45 0.49 — — 0.35 0.41Charge de pâturage 0.52 0.14 — — 0.20 0.50Période de mise à

l’herbe0.19 0.45 — — 0.48 0.09

Traits biologiques F1 F2 F1 F2Stratégie CSR — — 0.34 0.31 0.67 0.63Type

morphologique— — 0.21 0.07 0.00 0.09

Hauteur moyenne — — 0.26 0.16 0.04 0.06Extension latérale — — 0.27 0.46 0.11 0.60Phénologie de la

floraison— — 0.28 0.06 0.02 0.09

Mode derégénération

— — 0.25 0.63 0.04 0.38

Type dedissémination

— — 0.37 0.28 0.07 0.12

Dispersion par lesovins

— — 0.60 0.19 0.07 0.16

Persistance dans labanque de graines

— — 0.42 0.02 0.09 0.08

Appétence — — 0.53 0.37 0.52 0.21Type

biogéographique— — 0.32 0.31 0.73 0.17

Rareté — — 0.35 0.01 0.10 0.22

Tableau 4. Rapports de corrélation entre variables agro-écologiques et coordonnées des stations et entre traitsbiologiques et coordonnées des espèces dans les analysesséparées et dans l’analyse RLQ.

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(r = 0.60), l’appétence (r = 0.53) et la persistance dans labanque de graines (r = 0.42). Pour F2, ce sont le mode derégénération (r = 0.63) et l’extension latérale (r = 0.46).Trois groupes biologiques d’espèces peuvent ainsi être dis-tingués sur la base de leurs traits (tableau 5) : le premier axeoppose un groupe composé de graminées et de papilionacéespérennes très répandues, qui sont à la fois fortementconsommées et fortement dispersées par les ovins, à ungroupe composé de thérophytes rares ou peu répandues, nondispersées par les ovins. Le second axe oppose les espèces àreproduction par graines et à extension latérale limitée auxespèces à reproduction végétative et à morphologie « guer-rilla », isolant ainsi un troisième groupe de graminées, cypé-racées et dicotylédones pérennes, souvent sociales et degrande taille, caractérisées par leur fort pouvoir colonisateur.Les principales espèces caractéristiques de chaque groupebiologique sont indiquées au tableau 5.

Relations entre traits biologiques et facteurs agro-écologiques

Le résultat du test de Monte-Carlo à 1000 permutations del’analyse RLQ montre que la relation statistique entre R et Qest significative à p ≤ 0.001. Le premier axe de l’analyseRLQ prend en compte 77% de l’inertie de l’ACM de R (va-riables agro-écologiques), comme l’indique le rapport desvariances de leurs premiers axes (soit VarF1(R/RLQ)/VarF1(R) = 0.299/0.390, tableau 3). Pour l’ACM sur le ta-bleau des traits biologiques, cette part n’est que de 55% (soitVarF1(Q/RLQ)/VarF1(Q) = 0.193/0.351, tableau 3), puisqueles traits biologiques ne sont pas structurés à priori comme

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Fig. 1. Ordination des modalités des huit variables agro-écologiques dans le plan factoriel F1–F2 de l’analyse RLQ. Chaque modalitéest placée au barycentre des stations porteuses de cette modalité. Pour le code des modalités des variables agro-écologiques, voir letableau 1.

Groupe biologique Espèces caractéristiques

Groupe I : graminées etpapilionacées pérennes dominantes,fortement consommées etdispersées par les ovins

Bromus erectusFestuca curvulaAvenula pratensisFestuca rubraFestuca gr. ovinaTrifolium repensTrifolium pratenseDactylis glomerata

Groupe II : thérophytes rares ou peurépandues, non dispersées par lesovins et non fourragères

Bombycilaena erectaTrifolium scabrumAira caryophylleaBupleurum baldenseSherardia arvensisPetrorhagia proliferaCerastium pumilumCentaurium erythraea

Groupe III : graminées, cypéracéeset dicotylédones pérennes etsociales, à fort pouvoircolonisateur et à morphologieguerrilla

Hieracium pilosellaBrachypodium pinnatumBriza mediaCarex flaccaThymus serpyllumEryngium campestreGalium mollugoTeucrium chamaedrys

Tableau 5. Principaux groupes biologiques isolés par l’ACM dela matrice des traits biologiques.

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le sont les variables environnementales, en raison del’utilisation d’un échantillonnage stratifié. Les corrélationsentre les coordonnées normalisées des stations et des espè-ces sur le premier axe de l’AFC et sur le premier axe del’analyse RLQ sont respectivement r = 0.737 pour les sta-tions et r = 0.648 pour les espèces, ce qui indique qu’unepart importante de l’ordination floristique est reconstituéepar les variables agro-écologiques et les traits biologiques(Chessel et al. 1997).

Les variables agro-écologiques ayant les plus forts rap-ports de corrélation avec F1 sont le type de substrat (r =0.69), la saison principale de pâturage (r = 0.48) et la RU(r = 0.42) (tableau 4). Les traits biologiques montrant lesplus fortes corrélations avec F1 ne sont plus les mêmes quedans l’ACM de Q : ce sont, respectivement, le type biogéo-graphique (r = 0.73), la stratégie adaptative (r = 0.67) etl’appétence (r = 0.52) qui reconstituent le mieux l’ordinationdes espèces sur le gradient de stress édaphique (tableau 4).Les pelouses les plus oligotrophes et les plus xériques mon-trent un plus grand nombre d’espèces à distribution méditer-ranéenne ou sud-européenne, à stratégie S ou SC (toléranteau stress–compétitive) et à valeur fourragère faible ou nulle,tandis que les formations mésophiles et mésotrophes abritentdes espèces à distribution subcosmopolite, à stratégie CR(compétitive–rudérale) ou CSR (compétitive–tolérante austress–rudérale) et à bonne ou très bonne valeur fourragère(fig. 2).

Sur F2, on retrouve le gradient de perturbation lié à la ré-gularité de l’entretien mécanique (r = 0.57) et à l’intensitéde pâturage (r = 0.50), et les traits biologiques reconstituantle mieux l’ordination des espèces sur ce gradient sont lastratégie adaptative (r = 0.63), l’extension latérale (r = 0.60)et le mode de régénération (r = 0.38). Les pelouses forte-ment pâturées et régulièrement fauchées ou débroussaillées,indépendamment du niveau trophique, abritent des espèces àstratégie R ou SR (tolérante au stress–rudérale), à extensionlimitée et à reproduction par graine tandis que les formationspeu ou pas pâturées et non débroussaillées sont coloniséespar des espèces sociales à stratégie SC, à forte extension la-térale (guerrilla ou « phalanx ») et à reproduction végétative.L’indice de rareté, malgré de faibles rapports de corrélations,augmente selon un gradient combiné de stress édaphique etde perturbation anthropique (fig. 2).

Classification des espèces en groupes fonctionnelsCinq groupes fonctionnels ont été identifiés dans les pe-

louses calcicoles du Vercors, selon les niveaux de stress éda-phique et de perturbation par les pratiques agropastoralesauxquels ils sont associés (fig. 3 et tableau 6).

Le premier groupe fonctionnel est constitué de thérophytesde petite taille, à stratégie SR ou R, comme le Bombycilaenaerecta, le Trifolium scabrum, le Rhinanthus alectorolophus, leTrifolium campestre et le Sherardia arvensis. Ces espècessont associées à un niveau de perturbation élevé et à un ni-

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Fig. 2. Ordination des modalités des 12 traits biologiques dans le plan factoriel F1–F2 de l’analyse RLQ. Chaque modalité est placéeau barycentre des espèces porteuses de cette modalité. Pour le code des modalités des traits biologiques, voir le tableau 2. Les diverstypes de stratégies sont : CR, compétitive–rudérale; CSR, strategie intermédiaire; R, rudérale; S, tolérante au stress; SC, tolérante austress–compétitive; SR, tolérante au stress–rudérale.

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veau de stress fort à moyen. Elles sont favorisées par la com-binaison d’un entretien mécanique régulier (fauche oudébroussaillement annuel) et d’une charge de pâturage supé-rieure à 400 journées unités de gros bétail (j.UGB) par hec-tare par année, de préférence par des bovins.

Le deuxième groupe se compose d’espèces bonnes fourra-gères, à stratégie CR ou CSR, dispersées en grand nombrepar les ovins et à distribution subcosmopolite, parmi lesquel-les on trouve le Trifolium repens, le Trifolium pratense, lePoa pratensis, le Lolium perenne et le Cynosurus cristatus.Elles sont associées à des conditions édaphiques favorables(colluvions argileuses, RU > 40 mm) et à une utilisation as-sez intensive (charge de pâturage > 400 j.UGB·ha–1·a–1, miseà l’herbe précoce en avril).

Le troisième groupe fonctionnel isolé par la CAH est ca-ractérisé par des espèces thermophiles (sud-européennes), àstratégie S, peu communes, non fourragères et non disper-sées par les ovins, comme le Trinia glauca, le Dianthus syl-vestris, le Thesium divaricatum et le Linum tenuifolium.Leur habitat préférentiel est constitué par des pelouses oligo-trophes à stress hydrique élevé (RU < 20 mm), souvent surcalcaires durs, soumises à un régime de perturbation moyen(pâturage mixte avec des caprins, en arrière-saison et en hi-ver, charge de pâturage = 50–400 j.UGB·ha–1·a–1).

Les espèces caractéristiques du quatrième groupe sont leGenista cinerea, le Genista pilosa ssp. jordani, le Buxussempervirens et l’Argyrolobium zanonii, soit des chaméphy-tes ou phanérophytes pionniers, à stratégie SC, distributionméditerranéenne et médiocre valeur fourragère. Ces espèces

sont liées aux formations peu perturbées (non débroussail-lées, non pâturées ou pâturées moins de 50 j.UGB·ha–1·a–1)et à un stress hydrique moyen à élevé (éboulis et grèzes col-luviales, RU = 20–40 mm).

Enfin, le dernier groupe fonctionnel se caractérise par desespèces de grande taille (> 30 cm), sociales (stratégie guer-rilla), à reproduction végétative et à distribution eurasiatique,comme le Brachypodium pinnatum, l’Origanum vulgare, leCarex flacca, le Galium mollugo. Elles sont associées auxpelouses d’ourlets mésophiles sur marnes ou calcaires mar-neux, sous-utilisées (charge de pâturage < 50 j.UGB·ha–1·a–1,débroussaillement absent ou irrégulier, pâturage ovin).

Discussion

L’ordination des stations par les variables agro-écologiques souligne le fort déterminisme géopédologiquedes pelouses calcicoles et l’existence d’une relation entresubstrat et mode d’utilisation. La situation topographique etla nature du substrat déterminent les possibilités de mécani-sation, et le niveau trophique induit par le substrat déterminela charge annuelle de pâturage autorisée par la productivitédes pelouses. Comme c’est fréquemment le cas en agro-écologie, on observe une interpénétration des facteurs écolo-giques et agronomiques sur les gradients de stress édaphiqueet de perturbation agropastorale (Alard et Poudevigne 1997).D’autre part, la réponse des communautés de pelouses calci-coles à l’intensité de cette perturbation est complexe en rai-son d’effets cumulatifs et interactifs entre perturbation par le

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Fig. 3. Ordination des espèces dans le plan factoriel F1–F2 de l’analyse RLQ. Les cinq groupes fonctionnels isolés par la classificationascendante hiérarchique sont indiqués.

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pâturage et perturbation mécanique (fauche ou débroussail-lement) (Mc Intyre et al. 1995; Mitchley et Willems 1995).

L’apport majeur d’une approche fonctionnelle dansl’analyse de la réponse des communautés aux perturbationsest de pouvoir élucider, dans une certaine mesure, les méca-nismes de coexistence des espèces dans des communautés àtrès forte richesse spécifique, comme les pelouses calcicoles(Grime 1990; Thompson et al. 1996; Dutoit et al. 1999).Dans un premier temps, l’ordination des espèces par leurstraits biologiques montre la prépondérance de ceux liés auxprocessus de dispersion et de régénération (attributs biologi-ques de la graine) sur ceux liés à la morphologie de la planteadulte (à l’exception de l’appétence et de la capacité à

l’extension latérale). Comme le soulignent les résultatsd’autres approches fonctionnelles (Thompson et al. 1996;Lavorel et al. 1998; Poschlod et al. 1998), ce sont les méca-nismes de recrutement (opportunités de régénération et dis-persabilité des graines) qui expliquent la coexistence desespèces dans les milieux oligotrophes comme les pelousescalcicoles, plutôt que les différences de niche écologique desplantes adultes (Van der Maarel et Sykes 1993).

Trois groupes biologiques ont été distingués dans les pe-louses calcicoles du Vercors (tableau 5). Ils correspondent aupremier type de classification de Lavorel et al. (1997), baséesur des corrélations entre traits biologiques sans faire réfé-rence à un processus écologique particulier. Un premier

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Groupe fonctionnel Facteur agro-écologique Trait biologique Espèces caractéristiques

Groupe I : P ++ Pâturage > 400 j.UGB·ha–1·a–1 Stratégie SR ou R Bombycilaena erectaEntretien mécanique régulier Extension limitée ou compacte Trifolium scabrumPâturage bovin Reproduction par graine Rhinanthus alectorolophus

Hauteur < 10 cm Trifolium campestreBupleurum baldensePetrorhagia proliferaAira caryophylleaSherardia arvensis

Groupe II : P +, S – Colluvions argileuses Bonne fourragère Trifolium repensRU > 40 mm Stratégie CR ou CSR Vicia craccaPâturage > 400 j.UGB·ha–1·a–1 Subcosmopolite Poa pratensisPâturage d’avril Fortement dispersée par ovins Agrostis capillaris

Répandue Trifolium pratensePlantago lanceolataLolium perenneCynosurus cristatus

Groupe III : P +, S + Calcaires durs Sud-européenne Trinia glaucaRU < 20 mm Rare ou peu commune Polygala calcareaPâturage mixte avec caprins Stratégie S Dianthus sylvestrisPâturage d’automne et d’hiver Non fourragère Dianthus monspessulanus

Non dispersée par ovins Teucrium montanumThesium divaricatumLinum tenuifoliumGlobularia punctata

Groupe IV : P –, S + Non débroussaillé Méditerranéenne Genista cinereaNon pâturé Médiocre fourragère Genista pilosa ssp. jordaniPâturage < 50 j.UGB·ha–1·a–1 Stratégie SC Quercus pubescensÉboulis et grèzes colluviales Reproduction végétative Lavandula angustifolia

Buxus sempervirensCoronilla minimaDorycnium pentaphyllumArgyrolobium zanonii

Groupe V : P –, S – Non débroussaillé ou irrégulier Eurasiatique Brachypodium pinnatumPâturage < 50 j.UGB·ha–1·a–1 Guerrilla Carex flaccaMarnes Hauteur > 30 cm Origanum vulgarePâturage ovin Reproduction végétative Galium mollugo

Vincetoxicum hirundinariaOnonis spinosaLeontodon hispidusHieracium pilosella

Tableau 6. Classification en groupes fonctionnels d’après l’analyse RLQ. P représente l’intensité et le régime de perturbation, Sle niveau de stress édaphique associés à chaque groupe fonctionnel.

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groupe d’espèces fortement consommées et dispersées parles ovins et à faible persistance dans la banque de graines(e.g., le Bromus erectus), correspond aux espèces dominan-tes de chaque type de pelouse, indépendamment du niveautrophique (Barbaro et Cozic 1998). Le deuxième groupe estcelui des thérophytes rares ou peu répandues, non disperséeset non consommées par les ovins (e.g., le Bombycilaenaerecta), mais dont l’établissement et le maintien dépendentdes zones de sol nu créées et entretenues par le pâturage(Verkaar et al. 1983; Silvertown 1988). Le troisième groupeest celui des espèces sociales et compétitives, de grandetaille, à forte persistance dans la banque de graines et dontl’établissement est lié à la diminution de l’intensitéd’utilisation ou à l’abandon (e.g., le Brachypodium pinna-tum), annonçant une dynamique de recolonisation forestière(Bobbink et Willems 1987; Mitchley et Willems 1995).

L’ordination simultanée des variables agro-écologiques etdes traits biologiques des espèces permet de vérifierl’hypothèse que les réponses fonctionnelles des communau-tés à l’intensité de gestion suivent le même modèle tridimen-sionnel, constitué par les interactions biotiques entre troisgroupes biologiques principaux (modèle Bromus erectus –Bombycilaena erecta – Brachypodium pinnatum). Ce proces-sus est indépendant du niveau trophique qu’aucun attributmorphologique ou de reproduction sensu stricto ne permetde reconstituer. Ainsi, au sein des pelouses calcicoles duVercors, les groupes fonctionnels d’espèces s’organisent plusen fonction du niveau de perturbation par le pâturage etl’entretien mécanique qu’en fonction du niveau de ressourcetrophique et hydrique. Ce sont les stratégies adaptatives défi-nies par Grime et al. (1988) en combinant traits morphologi-ques et de reproduction, qui sont les meilleurs traitsprédictifs de la réponse fonctionnelle des communautés depelouses calcicoles du Vercors, tant au niveau de stress éda-phique qu’à l’intensité des perturbations anthropiques (Fer-nandez Alés et al. 1993; Smith et Rushton 1994).

Dans une perspective de conservation des pelouses calci-coles par le pastoralisme, l’intérêt de l’utilisation des grou-pes fonctionnels est montré par la relation inversementproportionnelle observée entre l’indice de rareté d’une es-pèce et son niveau de dispersion par les ovins. L’insuffisancedu pâturage ovin pour le maintien à long terme des espècesannuelles les plus rares est ainsi soulignée, leur dispersionétant assurée par la pluie de graines (Willems et Bik 1998)ou les machines agricoles (Strykstra et al. 1996). Certainesespèces comme le Sherardia arvensis ou le Trifolium cam-pestre dépendent en effet davantage du régime de perturba-tion et, en particulier, des effets cumulés du pâturage et de lafauche, que du niveau trophique et hydrique du sol. Ainsi, siles facteurs édapho-climatiques ont surtout une traductiontaxonomique et peuvent être appréhendés par l’analyse de lacomposition floristique, l’effet des perturbations comme lespratiques agricoles ou le pâturage se traduit beaucoup plusde manière fonctionnelle à travers certains traits de vie desespèces.

La relation entre certains traits biologiques et un risqueaccru d’extinction locale, pour les espèces de pelouses calci-coles, a été démontré (Poschlod et al. 1996; Fischer etStöcklin 1997). Dans le cas du Vercors, il existe un lien ma-nifeste entre la rareté d’une espèce et son appartenance à ungroupe fonctionnel particulier, les espèces rares et (ou) pro-

tégées étant pour la plupart classées dans le groupe I (ta-bleau 6). Ce lien permet ainsi de définir les priorités deconservation, ainsi que les modes de gestion agropastoraleadaptés. En effet, les pelouses xérophiles sur calcaires dursdominées par Bromus erectus et Festuca curvula sont nonseulement les plus originales d’un point de vue biologique,abritant la plus grande proportion d’espèces rares dans lespelouses calcicoles du Vercors, mais aussi d’un point de vuede la gestion pastorale (combinaison pâturage – entretienmécanique, pâturage automnal ou hivernal, mixité des trou-peaux avec des chèvres rustiques de race Rove).

La conjonction d’une originalité géomorphologique, bio-géographique et de pratiques agropastorales originales a ainsipermis le développement d’une originalité fonctionnelle ausein de ces pelouses. Celle-ci se traduit par une diversité fonc-tionnelle maximale, c’est-à-dire par une coexistence entretous les groupes fonctionnels dans la même communauté (Ta-toni et Roche 1994; Tilman et al. 1997). Les interactions bio-tiques entre les trois grands groupes biologiques définis plushaut y sont structurées et régulées de manière originale par lepâturage et la fauche, définissant ainsi un îlot fonctionnel,isolé dans un contexte écologique donné.

Remerciements

Nous remercions toutes les personnes qui ont apportés descritiques et des commentaires aux premières versions de cetravail, en particulier G. Balent (Institut national de la re-cherche agronomique (INRA) Toulouse), J. Girel, P. Choleret R. Michallet (Université de Grenoble), ainsi que P. Cozic,A. Bornard (Cemagref Grenoble) et deux réviseurs anony-mes qui ont permis d’améliorer la première version du ma-nuscrit. Nous remercions également A. Bedecarrats et F.Anthelme (Cemagref Grenoble) pour de fructueuses discus-sions sur les groupes fonctionnels et l’analyse des données.Enfin, nous sommes particulièrement reconnaissants àl’IMEP qui a permis l’accès à la base de données sur lestraits biologiques des espèces méditerranéennes. Ce travailfait partie d’une thèse de biologie financée par le Cemagrefde Grenoble et le ministère de l’Environnement (Directionde la nature et des paysages).

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