66
Les Entretiens de Royaumont royaumont les Entretiens Croyant et Citoyen CAHIER DES ENTRETIENS VENDREDI 2 DÉCEMBRE • SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016 Abbaye de Royaumont www.entretiensroyaumont.org

royaumontentretiensroyaumont.org/wordpress/wp-content/uploads/...conception de la Cité qui prévaut en pays d’islam et l’adhésion nécessaire en France aux lois de la République

  • Upload
    haduong

  • View
    213

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Les

En

tret

ien

s de

Roy

aum

ont

royaumontles Entretiens

Croyant et Citoyen

CAHIER DES ENTRETIENSVENDREDI 2 DÉCEMBRE • SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016

Abbaye de Royaumontwww.entretiensroyaumont.org

LE RENDEZ-VOUS ANNUEL DE LA RÉFLEXION POLITIQUE

Partenaires officiels des Entretiens de Royaumont :

Partenaires de soutien :

Shower Company

Depuis treize ans désormais, les Entretiens sont devenus le premier rendez-vous annuel de la réflexion politique. Chaque année, se réunissent des hommes politiques et dirigeants de premier plan, de grands entrepreneurs, ainsi que les meilleurs experts, pour débattre, réfléchir, échanger sur les perspectives de la France et sur son rayonnement à l’étranger.

Le thème retenu pour les Entretiens 2016 est comme toujours au centre de tous les enjeux : « Croyant et Citoyen ». Comment le croyant peut-il vivre sa foi dans la république française laïque ? Comment le citoyen non-croyant appréhende-t-il et accueille-t-il la foi de l’autre ? Quelle place accorder aux religions dans l’espace public laïc ? Comment faire vivre librement le fait religieux dans la république du xxie siècle ? Comment créer les conditions d’une cohabitation sereine des religions et des croyances ? Comment s’articulent les dimensions individuelle, culturelle et politique de la religion ? Islam, judaïsme et christianisme ne s’incarnent que dans des hommes, et ce n’est que parce qu’ils sont portés par des hommes, qui par ailleurs vivent dans un certain régime politique, que la question des relations entre religion et politique se pose. Tant de contrastes, oppositions conciliables ou dilemmes, sont aujourd’hui dans l’actualité et nous questionnent, individuellement et collectivement : religion vs société/espace public, religion vs entreprise, religion vs État/République…

Cette année encore, ces deux jours de débats et d’échanges sauront encore faire émerger des débats passionnants, élevés et enlevés, susceptibles de contribuer à l’avancée du débat politique et sociétal, ainsi qu’au progrès de la réflexion collective.

royaumontles Entretiens

CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Abbaye de Royaumontwww.entretiensroyaumont.org

VENDREDI 2 DÉCEMBRE • SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016

7

EDITORIAL 9

PARTENAIRES 11

PROGRAMME 14

LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016 19

CROYANT ET CITOYEN 43

BLOC-NOTES 63

royaumontles Entretiens

8

9

Editorial

Vincent MONTAGNE Président de Média-Participations

Président de la session 2016 des Entretiens

Comment redonner dynamisme et vitalité à la République censée fidéliser et porter les valeurs du peuple français ? Notre laïcité est en crise. Ma conviction profonde est que nous ne pourrons sortir de cette crise que par le haut. Par le haut, c’est-à-dire en partant du rapport de l’homme à la transcendance, qu’on retrouve dans toutes les civilisations. Car il faut dissiper d’emblée un malentendu : la laïcité n’a pas vocation à être le refus de la dimension religieuse de l’homme. En établissant en 1905 la séparation de l’Église et de l’État, c’est-à-dire une certaine organisation des pouvoirs, la IIIe République n’a pas empêché la France de conserver et de faire vivre ses racines catholiques. La transcendance et le pouvoir politique ne se situent pas dans le même registre.

Par ailleurs nous ne devons pas oublier, dans notre société pluraliste, que la laïcité de nos démocraties modernes – et singulièrement celle de la France – est en vérité la traduction d’un fait de civilisation beaucoup plus ancien et plus fondamental. Notre civilisation judéo-chrétienne est celle de l’Alliance et de l’Incarnation. Toute son anthropologie repose sur la conscience d’une double réalité : l’autonomie des réalités terrestres (la science, la politique, l’art, etc.), mais aussi leur lien profond avec Celui qui les a voulues autonomes. Que l’on croie au Ciel ou que l’on n’y croie pas, on a chez nous une perception forte de cette autonomie du temporel et du caractère essentiel de la liberté humaine. Nous sommes héritiers d’un art de vivre fondé sur la dimension spirituelle de la personne et sur sa liberté religieuse inaliénable.

Mais aujourd’hui, dans notre pays, être « Croyant et Citoyen » ne va pas de soi. L’État laïc semble embarrassé par la transcendance, ou parfois tenté de se substituer à elle. Nombre de Français musulmans sont tiraillés entre la conception de la Cité qui prévaut en pays d’islam et l’adhésion nécessaire en France aux lois de la République. Par ailleurs, la montée du consumérisme et la mondialisation sont autant de facteurs qui fragilisent la portée du témoignage judéo-chrétien dans la société.

10

royaumontles Entretiens

Nous avons pourtant, dans notre culture française, des signes et des pistes encourageants pour bâtir ensemble une société fraternelle, respectueuse du spirituel, et pour y vivre en harmonie. Je ne citerai qu’un élément, mais il est essentiel : la place éminente de la raison dans notre littérature comme dans nos institutions. Le sens de la raison et le goût du raisonnable constituent un bon socle pour la vie commune ! Je veux croire aussi qu’une réflexion approfondie sur l’école et son devoir de transmission, sur l’entreprise et ses capacités d’intégration et de promotion des personnes, peuvent déboucher avec succès sur des actions communes au service de l’essentiel.

Aborder franchement, dans l’écoute mutuelle, les difficultés présentes est déjà un gage d’espérance. En tout cas, la France n’est fidèle à elle-même que lorsqu’elle porte à toute personne, et à toute la personne, un respect vigilant. Et quand elle le fait, sa voix transcende les frontières et porte au monde une espérance nouvelle.

Vincent MONTAGNE Président de Média-Participations

Président de la session 2016 des Entretiens

11

PARTENAIRES

royaumontles Entretiens

12

royaumontles Entretiens

Partenaires officiels des Entretiens de Royaumont :

Les ENTRETIENS DE ROYAUMONT tiennent à témoigner leur sincère reconnaissance aux fondations, associations et entreprises qui ont facilité financièrement ou matériellement l’organisation de cet événement.

13

Partenaires de soutien :

Shower Company

14

PROGRAMME

15CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

09:15 ACCUEIL — Vincent MONTAGNE président-directeur général de Média-Participations,

président de la session 2016 des Entretiens 

09:30 ECLAIRAGE La personne, la transcendance et l’État — Fabrice HADJADJ philosophe,

directeur de l’Institut européen d’études anthropologiques Philanthropos

09:50 ECHANGE Les religions, la finance et l’État

— Bertrand BADRÉ CEO de Blue Orange Capital — Hakim EL KAROUI conseiller en stratégie et fondateur du club du xxie siècle — Hubert de VAUPLANE avocat associé, Kramer Levin Naftalis & Frankel LLP

Animation : Isabelle GOUNIN LÉVY journaliste à LCI

10:30 ECLAIRAGE L’entreprise mondiale et les religions d’État

— Patrick POUYANNÉ président-directeur général de Total

10:50 TABLE RONDE La famille et l’école : l’éveil de la conscience et de la liberté

— Jean-Michel BLANQUER directeur général du Groupe ESSEC — El Hassane OUFKER directeur de l’école musulmane Averroès — Madeleine BAZIN de JESSEY doctorante — Anne COFFINIER directrice générale, Fondation pour l’école

Animation : Samuel PRUVOT rédacteur en chef de Famille Chrétienne

11:50 PAUSE

12:10 ECHANGE Croyants et citoyens

— Haïm KORSIA grand rabbin de France — Tarek OUBROU recteur de la Grande Mosquée de Bordeaux

Animation : Christophe BARBIER éditorialiste à L’Express

VENDREDI 2 DÉCEMBRE 2016Animation : Jean-François ACHILLI

16

royaumontles Entretiens

14:30 ECLAIRAGE — Bernard CAZENEUVE ministre de l’Intérieur

14:50 TABLE RONDE Le fait religieux au travail

— Claude SOLARZ vice-président du Groupe Paprec — Gianmarco MONSELLATO avocat associé et directeur général (2004-16) de TAJ — Michel EMEYRIAT président-directeur général de Servair

Animation : Olivier JAY partner à Brunswick, conseil en communication corporate

15:50 TABLE RONDE Le management et la foi

— Marwan LAHOUD directeur général délégué à la stratégie et au marketing d’Airbus Group

— Jay NIRSIMLOO président du directoire de KPMG — François VILLEROY de GALHAU gouverneur de la Banque de France

Animation : Charles JAIGU grand reporter au Figaro magazine

VENDREDI 2 DÉCEMBRE 2016

17CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

09:00 OUVERTURE — Gérard LARCHER président du Sénat

09:20 ECHANGE La République : la cité sans le Ciel ?

— Jacques ATTALI économiste, écrivain, président de Planet Finance — Valérie PÉCRESSE présidente de la région Île-de-France — Marcel GAUCHET philosophe, historien

Animation : Laurent BIGORGNE directeur de l’Institut Montaigne

10:00 TABLE RONDE La dimension spirituelle de la personne peut-elle s’épanouir

dans un État laïc ?

— Abdelkader ARBI aumônier musulman des armées en chef — François CLAVAIROLY président de la Fédération protestante de France — Jean BIRNBAUM écrivain, journaliste au Monde — Jean-François COLOSIMO historien, essayiste,

directeur général des Éditions du Cerf

Animation : Étienne GERNELLE directeur de l’hebdomadaire Le Point

10:50 ECHANGE Conscience des citoyens, conscience d’un pays

— Anouar KBIBECH président du CFCM — Nicolas BUTTET prêtre, fondateur d’Eucharistein

Animation : Jean BIRNBAUM écrivain, journaliste au Monde

11:10 PAUSE

11:30 ECLAIRAGE — Philippe BARBARIN archevêque de Lyon, primat des Gaules

SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016Animation : Jean-François ACHILLI

18

royaumontles Entretiens

11:50 TABLE RONDE La capacité d’intégration de la République en question

— François PUPPONI député-maire de Sarcelles — Bruno RETAILLEAU président du groupe LR au Sénat — Jean-Louis BIANCO président de l’Observatoire de la laïcité

Animation : Jean-Marie GUÉNOIS rédacteur en chef adjoint du Figaro

12:30 ECHANGE L’économie, vecteur incontournable de l’intégration

— Jean-Marc BORELLO président du Groupe SOS — Pierre COPPEY directeur général adjoint de Vinci,

président de l’association Aurore

Animation : Michaël DARMON chef du service Politique à Itélé

13:10 ECLAIRAGE La relation à Dieu, l’éclairage d’une vie

— Henri de CASTRIES président de l’Institut Montaigne

13:30 CLÔTURE L’église anglicane et le pouvoir politique

— Justin WELBY archevêque de Cantorbéry, primat de l’église d’Angleterre

SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016

19

LES ORATEURS

royaumontles Entretiens

20

21LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

royaumontles Entretiens

22

royaumontles Entretiens

Abdelkader ARBI Aumônier musulman des armées en chefNé en 1960, fils d’un sous-officier de l’armée de terre ayant terminé sa carrière au 39e Régiment d’Infanterie de Rouen, il grandit en Seine-Maritime où il obtient son baccalauréat en 1979. Il se lance alors dans la vie active, désireux de produire et d’apprendre, il intègre le secteur de l’industrie chimique au sein du groupe mondial Rhône-Poulenc. Membre d’un comité d’expertise technique, ses fonctions d’ingénieur chimiste le conduisent à effectuer une mission de direction en Chine, où il vit près de deux ans afin de superviser la construction et le lancement d’une unité industrielle destiné à la riziculture. Pleinement engagé dans la vie de sa commune depuis de longues années, Abdelkader ARBI devient conseiller municipal de la ville de Cléon en 2001 et occupe le poste de recteur de la mosquée d’Elbeuf pendant quinze ans. En 2003 il est élu au Conseil Régional du Culte Musulman (CRCM). En 2006, la Défense le rappelle à la tradition familiale. Nommé par le ministère, il quitte l’ensemble de ses fonctions et se consacre à sa mission d’aumônier militaire en chef du culte musulman. Il supervise aujourd’hui les missions de 39 aumôniers, répartis sur l’ensemble du territoire national.

Jacques ATTALI Économiste, écrivain, président de Planet FinanceDocteur d’État en sciences économiques, Jacques ATTALI est diplômé de l’École Polytechnique (major de la promotion 1963), de l’École des Mines, de l’Institut d’Études Politiques et de l’École Nationale de l’Administration. Professeur, écrivain, conseiller d’État honoraire, conseiller spécial auprès du Président de la République de 1981 à 1991, fondateur et premier président de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement à Londres de 1991 à 1993, Jacques ATTALI est maintenant président de A & A, société internationale de conseils en stratégie, basée à Paris, et président de PlaNet Finance, Organisation de solidarité internationale spécialisée dans le développement de la microfinance. PlaNet Finance est la plus importante institution mondiale de soutien à la microfinance. Elle conseille et finance le développement de la microfinance dans 80 pays et est à l’initiative du LH Forum, mouvement pour l’économie positive. Il est également éditorialiste à L’Express. Il est l’auteur de plus de cinquante livres, traduits dans plus de vingt langues et diffusés à plus de six millions d’exemplaires à travers le monde. Jacques ATTALI a été nommé président de la Commission pour la libération de la croissance française en 2007.

Bertrand BADRÉ CEO de Blue Orange CapitalIl est Inspecteur des Finances, diplômé d’HEC et de l’IEP de Paris. Entre 1999 et 2007, il est banquier d’affaires chez Lazard à Londres, New York puis Paris. Il rejoint l’Élysée en 2003 en tant que représentant personnel adjoint de Jacques Chirac pour l’Afrique, où il travaille avec Michel Camdessus à la préparation du sommet du G8 sur les questions de développement. De 2007 à 2013, il vit la crise financière en première ligne comme directeur financier des groupes Crédit Agricole et Société Générale. Il est nommé Directeur général de la Banque mondiale en 2013. Il se lance aujourd’hui dans la création d’entreprise.Il a écrit en 2016 Money honnie (éd. Nouveaux Débats publics).

23LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Philippe BARBARIN Archevêque de Lyon, primat des GaulesPhilippe BARBARIN est archevêque de Lyon, Primat des Gaules Chancelier de l’Université Catholique de Lyon. Membre de la Commission doctrinale de la Conférence des évêques de France (2004-2011). Membre de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des Sacrements (2004-2010). Membre de la Congrégation pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique (depuis 2004). Docteur Honoris Causa de l’Institut de Théologie St Méthode et St Cyrille de l’Université d’État de Minsk (Biélorussie) (2009). Chevalier de la Légion d’Honneur (2003), Officier de l’Ordre National du Mérite (2007), Chevalier Grand Croix de l’Ordre du Saint Sépulcre (2010), Officier de la Légion d’honneur (2012).

Madeleine BAZIN de JESSEY DoctoranteAncienne élève de l’ENS, agrégée de lettres classiques, elle est actuellement monitrice à la Sorbonne et prépare un doctorat en littérature comparée.Elle est co-fondatrice et porte-parole de Sens commun et membre du bureau national des Républicains.

Jean-Louis BIANCO Président de l’Observatoire de la laïcitéIl est ancien élève de l’École des Mines de Paris et de l’ENA, promotion « Thomas More ». Haut-fonctionnaire, il débute sa carrière en 1971 au Conseil d’État, puis occupe plusieurs postes au sein de l’administration centrale, notamment auprès du directeur de l’Action sociale au ministère de la Santé et à la sous-direction de la famille, de l’enfance et de la vie sociale du ministère de la Santé. Secrétaire général de l’Élysée de François Mitterrand entre 1982 et 1991, il devient ministre des Affaires Sociales et de l’Intégration en 1991, puis de l’Équipement, du Logement et des Transports en 1992. Jean-Louis Bianco a également été député de la 1re circonscription des Alpes-de-Haute-Provence (1997-2012) et président du Conseil général des Alpes de Haute-Provence (1998-2012). Co-directeur de campagne de Ségolène Royal pendant la campagne présidentielle en 2007, il en devient son conseiller spécial au ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, chargé des relations internationales sur le climat et représentant spécial pour les relations avec l’Algérie auprès de Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du Développement international. Il est Conseiller d’État et Officier de la Légion d’honneur. Depuis le 5 avril 2013, il préside l’Observatoire de la Laïcité.

Jean BIRNBAUM Écrivain, journaliste au MondeJean Birnbaum est rédacteur en chef du Monde des Livres. Il est notamment l’auteur du dernier entretien avec Jacques Derrida, Apprendre à vivre enfin (Galilée / Le Monde, 2005), et de deux essais sur la transmission en politique : Leur jeunesse et la nôtre. L’espérance révolutionnaire au fil des générations (Stock, 2005) et Les Maoccidents.

24

royaumontles Entretiens

Un néoconservatisme à la française (Stock, 2009). Il a également publié une anthologie intitulée Bernanos face aux imposteurs (Le Monde/Garnier, 2012). Son dernier livre, Un Silence religieux. La gauche face au djihadisme, est paru au Seuil en 2016.

Jean-Michel BLANQUER Directeur général du Groupe ESSECNé en 1964, agrégé de droit public, docteur en droit de l’université Panthéon-Assas, titulaire d’une maîtrise de philosophie, et d’un DEA de sciences politiques de Sciences Po Paris, il a aussi étudié à Harvard. Il a occupé depuis 15 ans plusieurs responsabilités administratives et scientifiques, notamment sur des projets ou missions en rapport avec l’éducation, le droit public ainsi que l’Amérique latine. Il est président du groupement d’intérêt scientifique « Institut des Amériques » associant 60 établissements, depuis 2004. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles sur le droit constitutionnel, la philosophie du droit, l’éducation et l’Amérique latine et également d’ouvrages non-universitaires. Il a été recteur de l’Académie de Guyane entre 2004 et 2006 et recteur de l’académie de Créteil entre 2007 et 2009. Il a été directeur général de l’enseignement scolaire (DGESCO) au ministère de l’Éducation nationale de décembre 2009 à novembre 2012. Il est actuellement professeur de droit public, et est depuis juin 2013 directeur général du Groupe ESSEC.

Jean-Marc BORELLO Président du Groupe SOSNé en 1957 à Aix en Provence, il est d’abord éducateur spécialisé dans un centre d’accueil pour jeunes délinquants. En 1981, il est nommé conseiller à la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie. Il occupe ensuite différents postes dans des cabinets ministériels. Il quitte définitivement la fonction publique en 1987 pour présider un groupe de PME menant des activités de communication, de restauration et d’hôtellerie.En 1997, il décide de se consacrer à plein temps au GROUPE SOS, dont il avait créé les premières associations en 1984, à titre bénévole. Avec ses 15 000 salariés et ses 405 établissements et services, le GROUPE SOS est une des premières entreprises sociales européennes. Depuis plus de 30 ans, il répond aux enjeux majeurs de la société : Jeunesse, Emploi, Solidarité, Santé, Seniors.Président du Mouvement des entrepreneurs sociaux (MOUVES) depuis sa création en 2010, Vice-président depuis juin 2013, il contribue au quotidien à rendre plus visible et crédible le modèle de l’entreprise sociale.Il a publié plusieurs livres, notamment : Manifeste pour un monde solidaire (Cherche-Midi, 2015) ; SOS, contre toute attente (Rue de l’échiquier, 2009) ;  L’entreprise du xxie siècle sera sociale ou ne sera pas (Rue de l’échiquier, 2012) ; Les pieds sur terre, la tête dans les étoiles (Rue de l’échiquier, 2013). En 2017 il publiera Pour un capitalisme d’intérêt général (éditions Débats Publics).

25LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Nicolas BUTTET Prêtre, fondateur d’EucharisteinSuisse d’origine, il a suivi des études de droit et effectué un stage d’avocat et de notaire.Engagé en politique, il a été député au Parlement du Valais, en Suisse. Il a également été vice-président des Jeunes démocrates chrétiens de Suisse, secrétaire général du PDC de la Suisse francophone et secrétaire du groupe parlementaire DC au parlement fédéral suisse.Au niveau académique, il a été assistant en Faculté de droit à l’université de Fribourg et en sociologie à l’Université de Genève. Il enseigne dans plusieurs programmes académiques et de masters en Suisse, Belgique et France. Il a participé à l’organisation du rassemblement mondial « Justice, Peace and the Integrity of Creation » à Séoul en 1990 et a travaillé au Vatican avec le Cardinal Roger Etchegaray dans le Conseil pontifical Justice et paix. Il a été à l’initiative de la création, en 2003, de l’Institut européen d’études anthropologiques à Fribourg, Philanthropos.Il a participé et animé des sessions de réflexion sur l’éthique économique, notamment un workshop dans le cadre du salon international de l’investissement, Investors, à Genève, avec le groupe Esseleadership (Québec) et dans le cadre de sessions de spiritualité et d’économie au Canada, au Mexique et au Chili, ainsi qu’avec l’INSEAD à Fontainebleau et à Singapour.Il a aussi participé, avec des chefs d’entreprises, à la création de la fondation Ecophilos qui vise à mettre la personne humaine au centre de tout.

Henri de CASTRIESPrésident de l’Institut MontaigneNé en 1954, Henri de Castries est le président de l’Institut Montaigne. Après HEC et l’ENA, il effectue pour l’Inspection des finances des missions d’audit dans les différentes administrations françaises. Il entre chez AXA le 1er septembre 1989 et rejoint la direction centrale des finances du Groupe. Nommé secrétaire général en 1991, puis directeur général d’AXA en 1993. En 1994, il prend la responsabilité de l’Amérique du Nord et de la Grande-Bretagne. En 1997, il est nommé président du Conseil d’administration d’Équitable qui deviendra AXA Financial. En mai 2000, il est président du directoire d’AXA, avant d’être nommé président-directeur général en avril 2010, jusqu’au 31 août 2016. Henri de Castries est aussi administrateur de l’Association pour l’Aide aux Jeunes Infirmes et président d’AXA Atout Cœur. Il a été élu manager de l’année en 2008 par La Tribune.

Bernard CAZENEUVEMinistre de l’IntérieurNé en 1963 à Senlis (Oise), diplômé de Sciences Po Bordeaux, il a notamment été député de la Manche (1997-2002 puis 2007-2012), maire d’Octeville (1995-2000) puis de Cherbourg-Octeville (2001-2012), conseiller général de la Manche (1994-1998) et conseiller régional de Basse-Normandie (2004-2007).

26

royaumontles Entretiens

Il a été rapporteur de la mission d’information parlementaire sur Karachi et a publié Karachi, l’enquête impossible – le combat d’un député (Calmann-Lévy, 2011). Porte-parole de François Hollande pendant la dernière campagne présidentielle, il a été ministre délégué aux affaires européennes (mai 2012-mars 2013) puis ministre délégué chargé du Budget (mars 2013-avril 2014) dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault, et est aujourd’hui ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Manuel Valls (depuis le 2 avril 2014).

François CLAVAIROLY Président de la Fédération protestante de FranceNé en 1957, issu d’une famille protestante, il a, comme son grand-père et son père, embrassé la vocation de pasteur. Après des études classiques, il suit un cursus d’études de théologie à Genève et à la Faculté de théologie protestante de Strasbourg. Il obtient un diplôme d’études approfondies à l’Institut protestant de théologie de Paris en 1992. Il enseigne de 1979 à 1981 à l’École pastorale de l’Église évangélique du Gabon.Pasteur de l’Église réformée de France, il occupe son premier poste paroissial à Rouen (1982-1988), puis à Lille de 1988 à 1994, période au cours de laquelle il s’investit également au sein de l’aumônerie des prisons, assurant la fonction d’aumônier régional de la Fédération protestante de France pour la région Nord. De 1994 à 2000, il assure la présidence du Conseil régional en Nord-Normandie de l’Église réformée de France. Il est le pasteur de la paroisse du Saint-Esprit, à Paris (8e), de 2001 à 2013.D’autres responsabilités au sein de l’Église réformée de France (devenue depuis 2012 Église protestante unie de France) l’ont conduit à contribuer au rapprochement des Églises luthériennes et réformées en France.Son engagement œcuménique et interreligieux remonte aux prémices de son ministère pastoral, au cours de son stage paroissial à Casablanca, au Maroc, où il découvre la richesse de tels dialogues en lien avec les dominicains, les juifs et les musulmans. Il préside la commission des relations de la Fédération protestante de France avec le judaïsme de 2009 à 2013 animant le groupe de travail réunissant des pasteurs et des rabbins. Il est depuis 2007 vice-président d’honneur de l’Amitié judéo-chrétienne en France. Il donne aussi un cours d’ecclésiologie à l’Institut supérieur d’études œcuméniques (Institut catholique de Paris).

Anne COFFINIERDirectrice générale, Fondation pour l’écoleAnne Coffinier, 40 ans, mère de quatre enfants, est présidente de l’association Créer son école et directeur de la Fondation pour l’école.Ancienne élève de l’École normale supérieure et de l’École nationale d’administration, diplômée de l’Institut d’Études Politiques de Paris, elle est diplomate de formation et après un passage au Quai d’Orsay, elle a fondé l’association Créer son école (2004) destinée à soutenir la création d’écoles indépendantes en France. Elle est à l’origine de la Fondation pour l’école, fondation reconnue d’utilité publique créée en 2008, dont elle assure aujourd’hui la direction générale. En son sein, elle travaille à développer le secteur des écoles indépendantes pour favoriser le renouveau du système éducatif français.La Fondation pour l’école accueille aujourd’hui neuf fondations abritées dans le domaine de l’éducation.

27LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Jean-François COLOSIMOHistorien, essayiste, directeur général des éditions du CerfÉditeur, Jean-François Colosimo préside les Éditions du Cerf. Enseignant, il dirige un séminaire de recherche à l’Institut Saint-Serge. Écrivain, il est l’auteur de plusieurs livres et films dans lesquels il poursuit une vaste enquête sur les métamorphoses du religieux et du politique dans le monde contemporain. La série documentaire Adieu Camarades – La fin de l’Empire soviétique, diffusée par Arte en 2011, et l’essai historique Les Hommes en trop – La malédiction des chrétiens d’Orient, publié chez Fayard en 2014, figurent ainsi parmi ses dernières productions. Son attention au fond culturel des grandes questions géopolitiques fait qu’il est un invité régulier des médias.

Pierre COPPEYDirecteur général adjoint de Vinci, président de l’association AurorePierre COPPEY, 50 ans, diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Strasbourg et de l’École Nationale Supérieure des PTT, a commencé sa carrière à la Direction de la communication de La Poste. Entré dans le groupe VINCI (SGE) en 1992, il a occupé différentes fonctions avant de devenir directeur puis directeur général adjoint en charge de la communication, des ressources humaines et des synergies. Fin 2007, Pierre COPPEY devient président-directeur général de Cofiroute. En juillet 2009, il est nommé président de VINCI Autoroutes qui regroupe ASF, Cofiroute, Escota et Arcour. En avril 2014, il est nommé directeur général délégué de VINCI et il se consacre à la branche Concessions du groupe. Il est également président de l’Association des Sociétés françaises d’autoroutes depuis 2012 et président de l’association Aurore depuis 2000.

Hakim EL KAROUIConseiller en stratégie et fondateur du club du xxie siècleNormalien, agrégé de géographie, Hakim El Karoui est le fondateur de la société de conseil stratégique et financier Volentia. Ancien associé de Roland Berger, ancien directeur chez Rothschild & Cie, il a été conseiller de Jean Pierre Raffarin à Matignon. Fondateur du club xxie siècle qui milite pour la juste prise en considération de la diversité des populations françaises. Essayiste (il a écrit trois livres qui traitent de géopolitique et de l’avenir de notre système social), il est l’auteur du récent rapport de l’Institut Montaigne sur l’islam.

Michel EMEYRIATPrésident-directeur général de ServairNé en 1954 à Lyon, il est Ingénieur Civil des Mines (promotion 1973) et diplômé de l’ESSEC (promotion 1976). De 1978 à 1980, il est responsable du contrôle de gestion et planning manager de la SICA, filiale de Charbonnages de France.En 1980, il entre au groupe BP France. Jusqu’en 1984, il est chargé de l’élaboration de dossiers d’investissement dans le secteur de la diversification, jusqu’en 1986 chargé du suivi des investissements dans le domaine pétrolier, de 1986 à 1988 responsable des ventes de fuel domestique, fuel lourd. De 1988 à 1990, il est responsable des ventes de Gasoil aux Transporteurs routiers chez BP Europe.

28

royaumontles Entretiens

En 1990, entré chez Air France, il est contrôleur de gestion des escales d’Air France. En 1994, il devient Directeur économique et social des escales de Paris, puis en 1998-1999 Directeur Économique & Logistique à la Direction Exploitation d’Air France, et en 1999-2000 Directeur de l’Exploitation Sol France.En 2000, il est nommé Directeur du Hub de Roissy-Charles de Gaulle. En 2005, il est élu à la Chambre de Commerce et d’Industrie du Val d’Oise /Yvelines.De 2009 à 2013, il est directeur général adjoint exploitation sol et, depuis 2013 Président-directeur général de Servair.

Fabrice HADJADJPhilosophe, directeur de l’Institut européen d’études anthropologiques PhilanthroposNé en 1971, diplômé de l’IEP de Paris et agrégé de philosophie, il est né dans une famille de confession juive de parents militants maoïstes. Jusqu’en 1998, date à laquelle il se convertit au christianisme, il se déclare athée et anarchiste.En 1995, il fait paraître son premier ouvrage, Objet perdu, un collectif d’inspiration nihiliste auquel collabore notamment Houellebecq.À partir de 2002, il consacre la plupart de ses essais à la question de la technique, s’inspirant du philosophe Günther Anders.En 2012, après avoir vécu plusieurs années dans le Var, où il enseigne la philosophie en lycée, il s’installe à Fribourg en Suisse où il dirige l’Institut Philanthropos. Ses principaux livres sont consacrés à la critique de la technologie.Il se présente comme « juif de nom arabe et de confession catholique ».

Anouar KBIBECHPrésident du CFCMPrésident du Conseil Français du Culte Musulman, président du Rassemblement des Musulmans de France (composante majoritaire du CFCM), il est membre de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH), Chevalier de la Légion d’Honneur, Chevalier de l’Ordre National du Mérite.Né en 1961, ingénieur des Ponts et Chaussées, il a d’abord été directeur chez un opérateur en télécommunications en France.Membre fondateur de la Conférence des Responsables de Culte en France, regroupant les responsables des cultes catholique, protestant, orthodoxe, juif, musulman et bouddhiste, il est également fondateur et animateur du Forum des Cadres Chrétiens et Musulmans, permettant des échanges entre des cadres et des décideurs chrétiens et musulmans. Il est enfin l’un des initiateurs de l’Association Amitié Judéo-Musulmane en France, en partenariat avec le Consistoire Israélite de France.

Haïm KORSIAGrand rabbin de FranceHaïm KORSIA est né à Lyon le 27 septembre 1963. À 17 ans, une fois ses études secondaires achevées, il entre au Séminaire Israélite de France, où il rencontre celui qui deviendra son maître et son modèle, le grand rabbin Emmanuel CHOUCHENA. Tout en poursuivant ses études au séminaire, Haïm KORSIA assure les fonctions de rabbin

29LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

au Mans (1983-1987) et de ministre officiant à la synagogue de la rue Montevideo à Paris XVI (1982-1987). Cette expérience communautaire inspire son mémoire de fin d’études rabbiniques soutenu en juin 1985 : La fonction rabbinique vue par les Présidents de communautés. Il souligne de la sorte sa préoccupation de placer le rabbin au service de sa communauté. Principe fondamental qu’il appliquera à partir de 1988 auprès de la communauté de Reims et de sa région. Remarquant son dynamisme, le Grand Rabbin de France, Joseph SITRUK, l’appelle à ses côtés pour en faire l’un de ses plus proches collaborateurs (1993-2004). Il est élu secrétaire général de l’Association des Rabbins de France (1999-2010). Parallèlement à ses fonctions, il poursuit un cursus universitaire d’études et de recherches, associant les questions militaires et géostratégiques à celles d’éthique et de management. En 2002, il participe à la 38e session du Centre des Hautes Études de l’Armement. De 2005 à 2009, il est nommé membre du Conseil Consultatif National d’Éthique. Il présente un MBA auprès de la Reims Management School (1998-1999) puis un DEA à l’École Pratique des Entretiens Hautes Études et soutient à l’université de Poitiers un Doctorat en histoire contemporaine consacré à « la vie du Grand Rabbin Jacob KAPLAN ». Il est nommé en 2000 à la direction de l’aumônerie générale de l’armée de l’air, puis en 2007 il succède au rabbin Akoun aux fonctions d’Aumônier général israélite des Armées et de l’école Polytechnique. Dans ses publications, se retrouve l’essentiel de ses préoccupations, les questions actuelles d’éthique face à la morale juive, la place du Juif dans la citoyenneté française, le dialogue interreligieux. Le 22 juin 2014, il est élu Grand Rabbin de France.

Marwan LAHOUDDirecteur général délégué à la stratégie et au marketing d’Airbus GroupMarwan Lahoud, né le 6 mars 1966, est Polytechnicien, ingénieur en chef de l’armement, ingénieur de l’école nationale supérieure de l’aéronautique et de l’espace.Il a été nommé en 2007 Directeur général délégué à la stratégie et au marketing d’AIRBUS Group, Président d’AIRBUS Group SAS en 2012 et Président du Gifas en 2013.Il a débuté sa carrière en 1989 à la DGA au centre d’essais des Landes, successivement comme chargé de mission au service technique des systèmes de missiles tactiques, puis adjoint au directeur des missiles et de l’espace.En 1995, il est chargé de mission au cabinet du ministre de la Défense, puis conseiller pour les affaires industrielles, la recherche et l’armement, chargé des opérations de consolidation industrielle.En 1998, il rejoint Aérospatiale comme directeur du développement, puis assure le secrétariat général du Comité Aérospatiale – Matra Hautes Technologies.En 1999, il devient Directeur, adjoint au Directeur délégué en charge de la coordination stratégique de la société Aérospatiale Matra, et également adjoint au Directeur délégué aux affaires militaires.En 2000, à la création d’EADS, il est nommé senior vice-président Mergers and Acquisitions, en charge des opérations de fusions et acquisitions d’EADS (Airbus, MBDA et Astrium). Il a été de 2003 à 2007 PDG de MBDA.Il est membre du conseil de surveillance et président du comité d’audit de BPCE, président du CIDEF et membre du conseil exécutif du MEDEF.

30

royaumontles Entretiens

Gérard LARCHERPrésident du SénatNé en 1949, diplômé de l’École nationale vétérinaire de Lyon.Il a été élu maire de Rambouillet en 1983, jusqu’en 2004, puis à nouveau de 2007 à 2014. Il est devenu en 1985 conseiller régional d’Île-de-France, jusqu’en 1992.Il est entré au Sénat en 1986, jusqu’en 2004, quand il démissionne pour entrer au gouvernement ; il est de nouveau élu en 2007. De 1989 à 1995, il est secrétaire du Sénat. De 1993 à 1997, il est vice-président délégué du groupe RPR au Sénat.Il a été ministre délégué aux Relations du travail en 2004-2005, puis en 2005-2007 ministre délégué à l’Emploi, au Travail et à l’Insertion professionnelle des jeunes.Il est aujourd’hui sénateur des Yvelines, président du Sénat (2008-2011 et depuis 2014), membre du Conseil d’harmonisation et d’arbitrage de LCP et président fondateur du Cercle Santé Innovation (depuis 2013).

Gianmarco MONSELLATOAvocat associé et directeur général (2004-16) de TAJIl est le Directeur Général de Taj (2004-2016), société d’avocats membre de Deloitte Touche Tohmatsu Limited. Il assume aussi la responsabilité mondiale clients & marchés pour Deloitte Tax & Legal.Avec plus de 20 ans d’expérience dans les domaines de la fiscalité internationale et des prix de transfert, il est le conseil stratégique de grands groupes français et étrangers. Il sécurise et défend en France la politique fiscale de nombreuses entreprises internationales, notamment asiatiques et américaines. À ce titre, il a été consulté à plusieurs reprises par le gouvernement français et a publié plusieurs livres et articles en France, au Japon, en Grande-Bretagne, aux États-Unis et en Suisse.Il a été désigné à plusieurs reprises comme l’un des avocats les plus éminents en prix de transfert, fiscalité internationale et contentieux fiscal. Par ailleurs, il est  Président de la commission fiscale de la Chambre de Commerce Internationale (ICC).De plus, il a été distingué, en mars 2013, par l’ONU, pour sa contribution exceptionnelle à la parité au sein du monde professionnel.

Vincent MONTAGNE Président-directeur général de Média-Participations, président de la session 2016 des EntretiensNé en 1959, titulaire d’une Maîtrise de Sciences de Gestion et du DESS Affaires Internationales de l’Université Dauphine, il commence sa carrière au Canada dans le groupe Weston Foods. Puis il entre aux Éditions du Lombard à Bruxelles en 1987 comme Contrôleur de gestion peu après le rachat de la maison d’édition par le groupe Média-Participations. Il en devient directeur financier en 1988, puis directeur général adjoint. En 1990, il rejoint l’équipe de direction du Groupe à Paris. Au décès de son père Rémy Montagne, il a 31 ans et prend la direction de Média-Participations, devient Président-directeur général, fonction qu’il occupe depuis 25 ans. Il préside le Syndicat National de l’Édition depuis juin 2012.

31LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Il est aussi administrateur du Cercle de la Librairie depuis 2006. Par ailleurs, il est descendant d’Édouard Michelin, fondateur du groupe Michelin. Il est devenu en 2009 Président de Mage-Invest, la holding familiale et Vice-président de l’associé commandité de Michelin, la SAGES. Il est le président de la session 2016 des Entretiens de Royaumont.

Jay NIRSIMLOO Président du directoire de KPMGJay NIRSIMLOO est président du directoire de KPMG France et membre du board mondial. Diplômé de la London School of Economics et de Wharton School, il est Chartered Accountant, expert-comptable et commissaire aux comptes. Il a exercé pendant plusieurs années à Londres avant de rejoindre KPMG à Paris. Jay NIRSIMLOO a une double expérience d’audit et de conseil de grands groupes français et internationaux.

Tarek OUBROU Recteur de la Grande Mosquée de BordeauxÉcrivain et imam français, recteur de la Grande Mosquée de Bordeaux, il est connu pour ses prises de position publiques en faveur d’un islam libéral. Il est né au Maroc de parents enseignants et francophones, arrivé à 19 ans à Bordeaux. Après une dizaine d’années passées « au chevet de la communauté » à Nantes, Limoges ou Pau, il est revenu à Bordeaux pour s’y installer durablement et diriger les prières et les sermons, au sein de la mosquée al Houda, dans le quartier Saint-Michel. Il a entamé alors une vaste réflexion théologico-canonique sur les conditions de l’expression et de la pratique musulmane en prenant en considération le contexte historique et culturel. Il a fondé l’AMG (Association des musulmans de la Gironde) affiliée à l’Union des organisations islamiques de France (UOIF). Au début des années 1990, il contribue à faire construire la mosquée El-Houda de Bordeaux. L’Institut de découverte et d’étude des mondes musulmans est créé sous son impulsion et il décide d’ouvrir les portes de la mosquée aux visites scolaires. Après l’attentat contre Charlie Hebdo en janvier 2015, le ministre de l’Intérieur l’a choisi comme interlocuteur privilégié des pouvoirs publics dans sa volonté de relancer le dialogue avec les représentants musulmans.

El Hassane OUFKER Directeur de l’école musulmane AverroèsNé en 1970, arrivé en France en 1980, il fait des études en mathématiques. Devenu professeur de mathématiques, il enseigne dans le public durant plusieurs années, puis démissionne en 2005 pour rejoindre le secteur privé. Il est nommé à la tête du lycée Averroès, premier établissement privé musulman sous contrat avec l’État depuis 2008. Membre fondateur de la FNEM, Fédération Nationale de l’Enseignement privé Musulman, il est également représentant des chefs d’établissement privés musulmans faisant partie du bureau exécutif de la FNEM depuis 2013. En plus de ses responsabilités professionnelles, il est acteur depuis les années 90 dans le domaine éducatif au sein de nombreuses associations musulmanes locales.

32

royaumontles Entretiens

Valérie PÉCRESSE Présidente de la région Île-de-FranceNée en 1967, elle commence sa carrière en tant qu’auditeur au Conseil d’État, commissaire du gouvernement, spécialisée en droit de l’internet, droit des personnes handicapées et en responsabilité hospitalière. En 1995, elle entre au cabinet de Jacques Chirac en tant que conseillère technique en charge des études, de la prospective et des technologies de l’information. À l’Assemblée nationale, où elle est élue députée des Yvelines pour la première fois en 2002, elle se spécialise sur les sujets relatifs à la famille, à l’éducation et à la recherche. Elle s’investit également dans le fonctionnement de l’UMP en tant que secrétaire générale adjointe en charge des études (2002-2004), puis porte-parole (2004-2007). En 2007, elle devient ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et mène la réforme de l’autonomie des universités et la réforme de la recherche. En 2011, elle est nommée ministre du Budget, des Comptes publics et de la Réforme de l’État, porte-parole du gouvernement de F. Fillon. Elle assure la réduction du déficit et des dépenses publiques et fait voter la TVA anti-délocalisation. Elle est réélue députée en 2007 et 2012. Élue pour la première fois au Conseil régional d’Île-de-France en 2004, elle est de 2010 à 2015 la présidente du groupe d’opposition, puis élue présidente en décembre 2015.

Patrick POUYANNÉ Président-directeur général de TotalDiplômé de l’École Polytechnique et de l’École des Mines de Paris. De 1989 à 1996, il occupe divers postes dans l’administration du ministère de l’Industrie et dans des cabinets ministériels (conseiller technique pour l’Environnement et l’Industrie auprès du Premier ministre de 1993 à 1995, directeur de cabinet du ministre des Technologies de l’Information et de l’Espace de 1995 à 1996). En janvier 1997, il rejoint Total au sein de la branche Exploration & Production en tant que secrétaire général en Angola puis, en 1999, il devient représentant du groupe au Qatar et directeur général de la filiale exploration-production au Qatar. En août 2002, il est nommé directeur Finances, Économie, Informatique de la branche Exploration & Production. En janvier 2006, il devient directeur Stratégie, Croissance, Recherche de la branche Exploration & Production et devient membre du Comité directeur du groupe en mai 2006. En mars 2011, Patrick POUYANNÉ est nommé directeur général adjoint, Chimie et directeur général adjoint, Pétrochimie. En janvier 2012, il est nommé directeur général de la branche Raffinage-Chimie et membre du Comité exécutif du Groupe.Le 22 octobre 2014, il succède à Christophe de Margerie comme directeur général du Groupe Total.

François PUPPONI Député-maire de SarcellesNé en 1962, il est député-maire de Sarcelles, membre du Parti socialiste. Il est entré au conseil municipal de Sarcelles en 1995, élu premier adjoint de Dominique Strauss-Kahn. Il lui succède à la tête de la mairie en 1997 et devient conseiller général du canton de Sarcelles-Nord-Est l’année suivante. Il est réélu maire en 2001.

33LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

En 2007, il est élu député de la 8e circonscription du Val-d’Oise. Il siège dans la commission de la Défense nationale et des Forces armées, il est vice-président du groupe d’études sur les vols de nuit et nuisances aéroportuaires, et membre des groupes d’études « Pauvreté, précarité et sans abri » et « Voies navigables et transports multimodaux ».Il a été réélu député en 2012, et réélu maire de Sarcelles en 2008 et 2014.En novembre 2014, il succède à Michel Delebarre à la présidence de l’ANRU.

Bruno RETAILLEAU Président du groupe LR au SénatNé en 1960, diplômé de l’IEP de Paris, il est élu sénateur de la Vendée en 2004. Il est membre de plusieurs groupes d’études sénatoriaux (Artisanat et services, Littoral et mer, Économie agricole alimentaire, Élevage, Énergie, Médias et nouvelles technologies, Postes et communications électroniques).En 2009, il s’est vu confier une mission portant sur les mesures qui permettraient d’augmenter le nombre des entreprises de taille intermédiaire en France et d’accroître leur contribution à la réindustrialisation du pays. Il a présidé la mission d’information sur les conséquences de la tempête Xynthia.Il a été président du conseil général de la Vendée, élu en 2011, il est actuellement président du groupe Les Républicains au Sénat et président du Conseil régional des Pays de la Loire.

Claude SOLARZ Vice-président du Groupe PaprecAutodidacte, Claude Solarz a créé sa première société de recyclage de vieux papiers en 1960 (www.cdirecyclage.com). Il a rejoint Paprec Group et Jean-Luc Petithuguenin en 2000 et est aujourd’hui vice-président du Groupe PAPREC.

Hubert de VAUPLANE Avocat associé, Kramer Levin Naftalis & Frankel LLPIl est avocat au barreau de Paris au sein du cabinet américain Kramer Levin, après avoir travaillé dans différentes banques (Banques Populaires, BNP Paribas, Crédit Agricole) ou entreprise d’investissement (Oddo & Cie) pendant plus de 25 ans, en y exerçant des activités différentes.Précédemment à Kramer Levin Naftalis & Frankel, il a exercé les fonctions de Directeur juridique des activités de la Banque de Financement et d’Investissement de BNPP, puis Directeur juridique et Conformité du Groupe Crédit Agricole.Il est ou a été expert auprès de différentes institutions (AMF, Banque d’Angleterre, Haut Comité Juridique de Place, Banque Centrale Européenne et Commission Européenne).Après avoir été professeur associé à l’Université de Paris 2 Panthéon – Assas pendant 18 ans, il enseigne aujourd’hui à Sciences Po Paris.Il est l’auteur de nombreux ouvrages de droit bancaire et financier, notamment d’un Traité de droit des marchés financiers, couronné par l’Académie des Sciences Morales et Politiques. Il tient différents blogs, en particulier sur le site du journal Alternatives Économiques.

34

royaumontles Entretiens

François VILLEROY de GALHAU Gouverneur de la Banque de FranceNé à Strasbourg en 1959, il puise ses racines familiales en Lorraine et en Sarre. Il est marié et père de cinq enfants.Ancien élève de l’ENA et inspecteur des finances, il entre en 1988 à la direction du Trésor puis devient de 1990 à 1993 conseiller européen du ministre des Finances, puis du Premier ministre Pierre Bérégovoy. Il occupe ensuite diverses responsabilités à la Direction du Trésor, puis à Bruxelles comme conseiller financier à la représentation permanente de la France. De 1997 à 2000, il est directeur de cabinet du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie (Dominique Strauss-Kahn, puis Christian Sautter). Il est nommé directeur général des Impôts de 2000 à 2003.En 2003, il devient PDG de Cetelem, puis responsable de la banque de détail de BNP Paribas en France (2008). Il a été directeur général délégué du groupe BNP Paribas, en charge des marchés domestiques et de la RSE de 2011 jusqu’en mai 2015, date à laquelle le gouvernement lui confie une mission sur le financement de l’investissement des entreprises.Après avoir reçu l’approbation du parlement, il a pris ses fonctions de gouverneur de la Banque de France le 1er novembre 2015.Il a publié notamment 18 leçons sur la politique économique (Seuil, 2003 et 2006) et L’espérance d’un Européen (Odile Jacob, 2014).

Justin WELBY Archevêque de Cantorbéry, primat de l’église d’AngleterreNé en 1956, il est un ecclésiastique et théologien anglican de nationalité britannique. Il a été intronisé archevêque de Cantorbéry et primat de l’Église d’Angleterre en 2013.Il a travaillé dans l’industrie pétrolière pendant 11 ans. Il a pris sa retraite de son poste de direction en 1989 quand il a senti que Dieu l’appelait à Son service. Éduqué tout d’abord à l’université de Cambridge, il entame de nouvelles études après avoir quitté l’industrie pétrolière, et obtient une licence de théologie à l’université de Durham en 1992. Dans les années 2000, il est codirecteur du Centre international pour la réconciliation, et travaille dans ce cadre au Nigeria.Il était le doyen de Liverpool depuis décembre 2007 avant de devenir évêque de Durham en 2011.Membre de droit de la Chambre des lords, il s’y est fait remarquer pour ses questions concernant l’éthique des banquiers, critiquant les prêteurs à court terme utilisant de hauts taux d’intérêt.

35LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

ILS ANIMERONT LES DÉBATS :

Jean-François ACHILLIJournaliste politique, éditorialiste à France Info

Christophe BARBIER Éditorialiste à l’Express

Laurent BIGORGNE Directeur de l’Institut Montaigne

Jean BIRNBAUM Écrivain, journaliste au Monde

Michaël DARMON Chef du service Politique à Itélé

Étienne GERNELLE Directeur de l’hebdomadaire Le Point

Isabelle GOUNIN LÉVY Journaliste à LCI

Jean-Marie GUÉNOIS Rédacteur en chef adjoint du Figaro

Charles JAIGU Grand reporter au Figaro magazine

Olivier JAY Partner à Brunswick,

conseil en communication corporate

Samuel PRUVOT Rédacteur en chef de Famille Chrétienne

36

royaumontles Entretiens

Jean-François ACHILLIJournaliste politique, éditorialiste à France InfoNé en 1962, il est diplômé de l’École supérieure de journalisme de Paris en 1989.Il a commencé sa carrière au sein de Radio France en Corse, en 1989, sur l’antenne de Radio Corse Frequenza Mora à Bastia. Puis de 1992 à 1998, il présente la matinale sur Radio France Provence.Il rejoint la rédaction de France Inter en 1998, d’abord comme présentateur de journaux du matin, il intègre le service politique à partir de 2000. Devenu chef de service adjoint en 2006, il a suivi pour France Inter la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007, puis a été nommé chef de service en 2008. À partir de 2008 et jusqu’en 2011, il interviewe une personnalité politique dans Dimanche Soir Politique, diffusé le dimanche soir sur la chaîne d’information en continu iTélé et France Inter en partenariat avec Le Monde. Cette émission deviendra durant la saison 2009/2010 Les Questions du mercredi. À partir de 2011, il présente Radio France Politique, l’émission politique commune des rédactions de Radio France, le dimanche à 18 h 10. La même année, Jean-François Achilli présente un Journal de campagne quotidien à 7 h 13 dans le 7/9 de Patrick Cohen. Cette chronique est maintenue depuis la rentrée 2012 sous la forme d’un éditorial, et l’émission politique du dimanche change de formule pour devenir Tous politiques en partenariat avec Le Monde et l’Agence France Presse.Il rejoint RMC comme directeur de la rédaction en décembre 2012, et signe un édito politique tous les matins à 7 h 25 dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin, dont il est le remplaçant officiel. Il participe également à BFM Politique d’Olivier Mazerolle, le dimanche, en assurant l’after RMC. Il remplace Olivier Mazerolle, jusqu’en août 2013.Jean-Francois Achilli retourne à Radio France en septembre 2013 pour assurer l’édito politique de France Info. À partir de la rentrée 2014, il a présenté l’interview politique de la station à 7 h 45. Il présente également Place aux idées, sur LCP.Il a écrit : Sarkozy, carnets de campagne – la Firme Sarkozy, Éditions Robert Laffont, 2006 ; Jusqu’ici tout va bien ; Nicolas Sarkozy, chronique d’une partie de campagne, Éditions Ramsay, 2007 ; Le Serment de Bastia, de Charles Pasqua, 2016.

Christophe BARBIERÉditorialiste à l’ExpressNé en 1967, journaliste, il est conseiller éditorial de la direction du Groupe L’Express, éditorialiste à L’Express, éditorialiste politique pour l’ensemble du groupe SFR Média, notamment à BFM TV. Ancien étudiant diplômé de l’ENS Ulm et titulaire d’une maîtrise d’histoire, il est également diplômé du MS Média de l’ESCP Europe. Journaliste politique passé par Le Point (1990) et Europe 1 (1995), il est devenu rédacteur en chef du service politique de L’Express en 1996, puis directeur adjoint de la rédaction en 2001 et en 2006 directeur de la rédaction. Il a animé Affaires publiques en compagnie de Denis Jeambar (La Cinquième) et participé de 2003 à 2006 à l’émission Ça se dispute sur I-Télé en compagnie d’Éric Zemmour.

37LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Depuis septembre 2011, il fait la matinale (6 h-9 h) sur I-télé (interview politique…).Il a écrit en 2012 Maquillages. Les politiques sans fard (Grasset) et en 2015 un Dictionnaire amoureux du théâtre (Plon). En 2016, il a mis en scène Présents parallèles, pièce écrite par Jacques Attali.

Laurent BIGORGNE Directeur de l’Institut MontaigneAgrégé d’histoire, il a débuté sa carrière dans l’enseignement. Il a rejoint la direction de Sciences Po en 2000, au sein de laquelle il a notamment exercé les fonctions de directeur des études et de la scolarité puis de directeur adjoint. Il a également passé une année détaché à Londres auprès de la direction de la London School of Economics. Après en avoir pris la direction des études en 2009, il est le directeur de l’Institut Montaigne depuis 2010.

Jean BIRNBAUM Écrivain, historien, essayiste, journaliste au MondeJean Birnbaum est rédacteur en chef du Monde des Livres. Il est notamment l’auteur du dernier entretien avec Jacques Derrida, Apprendre à vivre enfin (Galilée / Le Monde, 2005), et de deux essais sur la transmission en politique : Leur jeunesse et la nôtre. L’espérance révolutionnaire au fil des générations (Stock, 2005) et Les Maoccidents. Un néoconservatisme à la française (Stock, 2009). Il a également publié une anthologie intitulée Bernanos face aux imposteurs (Le Monde / Garnier, 2012). Son dernier livre, Un Silence religieux. La gauche face au djihadisme, est paru au Seuil en 2016.

Michaël DARMON Chef du service Politique à ItéléNé en 1962, journaliste au service économie et politique de TF1 de 1990 à 1993, il est le correspondant de la RTBF à Jérusalem de 1993 à 1994. En 1994, il entre à France 2, au sein du service politique. Il suit l’actualité du Front national de 1995 à 2004 puis l’actualité de l’Union pour un mouvement populaire de 2004 à 2010.Début 2011, il rejoint la chaîne d’information en continu I-Télé pour devenir éditorialiste politique et intervieweur.

Étienne GERNELLE Directeur de l’hebdomadaire Le PointNé en 1976, il est journaliste. Il a travaillé à Libération, puis au service étranger du Figaro et entre au Point en 2001. Il a d’abord été journaliste au service économie, puis traite successivement des questions sociales, d’aéronautique, de défense et d’énergie, avant d’être nommé adjoint à la direction de la rédaction en 2008, puis directeur de la rédaction en 2010. En 2014, il devient le nouveau patron du Point, et succède à Franz-Olivier Giesbert.Il interviewe sur BFM TV différentes personnalités et intervient dans LCI matin.

38

royaumontles Entretiens

Isabelle GOUNIN LÉVY Journaliste à LCIDiplômée de l’Institut d’Études Politiques d’Aix en Provence et titulaire d’une Maîtrise de Droit Public, elle débute sa carrière dans la presse écrite, au Dauphiné Libéré puis au Figaro. Très rapidement elle s’oriente vers les sujets économiques, et travaille successivement au Revenu Français et à La Tribune. Elle se spécialise alors dans les domaines de la banque et de l’assurance. Elle collabore avec Europe 1 pour les flashs boursiers avant de participer à l’aventure de LCI. Sur LCI, elle est à la fois présentatrice, pour le Journal de l’éco et l’Invité de l’éco, reporter et animatrice de débats menés avec la chaîne et ses partenaires. Elle devient également productrice-réalisatrice de rubriques destinées aux PME (Impressions d’entrepreneurs) ou de programmes courts (Mon Premier Job).

Jean-Marie GUÉNOIS Rédacteur en chef adjoint du Figaro55 ans, journaliste. Il est depuis 2008 rédacteur en chef au Figaro chargé des questions religieuses, France, international, Vatican. Il est présentateur de l’émission littéraire mensuelle L’Esprit des Lettres sur KTO et consultant religion sur RTL. De 1998 à 2008 il était chef du service « religion » à La Croix et présentateur de l’émission Midi moins sept du Jour du Seigneur sur France 2. De 1989 à 1998, il a été fondateur et directeur de l’agence de presse I.Media à Rome, spécialisée sur le Vatican, chef de l’édition française de la revue internationale 30 Giorni à RomeIl a écrit : Jusqu’où ira le pape François ? et Benoît XVI le pape qui ne devait pas être élu (J.-C. Lattès).

Charles JAIGU Grand reporter au Figaro magazineAncien normalien et agrégé de philosophie, il a d’abord été journaliste politique au Point puis au Figaro depuis 2005. Il a suivi notamment l’Élysée sous Nicolas Sarkozy et publié un livre intitulé Sarkozy, du Fouquet’s à Gaza, sur les débuts ratés du président et son rattrapage par la politique étrangère et la gestion des crises. Il a rejoint la rédaction du Figaro Magazine où il est grand reporter. Il tient une chronique tous les jeudis dans le quotidien sur les essais dans les pages Idées & Débats.

Olivier JAYPartner à Brunswick, conseil en communication corporateAprès avoir été journaliste pendant plus de 25 ans, Olivier Jay est depuis avril 2013 partner (associé) chez Brunswick, société de conseil en communication corporate.Il a notamment été directeur de la rédaction du Journal du Dimanche (2007-2012), des Enjeux Les Échos (1990-2000) et de l’Usine Nouvelle (2005-2007). Il a dirigé les activités numériques de Bayard et présidé la filiale Bayardweb (2000-2005). Il a également collaboré à Europe1, LCI et I-Télé, France Culture et La Croix.

39LES ORATEURS DES ENTRETIENS DE ROYAUMONT EN 2016

Croyant et Citoyen

Entre 1982 et 1987, il a été chargé des relations extérieures auprès du Cardinal Lustiger, archevêque de Paris et directeur de Radio Notre-Dame.Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Nos chers privilèges (Grasset, 1998), Internet, petit manuel de survie (Flammarion, 2000) et Génération Pigeons (Michalon, 2013).

Samuel PRUVOTRédacteur en chef de Famille Chrétienne47 ans, marié, père de 5 enfants. Il a commencé sa carrière dans la publicité au sein de l’agence Marston-Nicholson. Il est aujourd’hui rédacteur en chef du magazine Famille Chrétienne, chargé de la politique.Il a écrit plusieurs livres : Le Mystère Sarkozy (Rocher, 2016), François Hollande, Dieu et la République (2013). En préparation : Les candidats 2017 à confesse (Rocher).

40

41

42

43

CROYANT ET CITOYEN

royaumontles Entretiens

44

45CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

La laïcité : définition officielle…

La laïcité repose sur trois principes : la liberté de conscience et la liberté de culte, la séparation des institutions publiques et des organisations religieuses, et l’égalité de tous devant la loi quelles que soient leurs croyances ou leurs convictions.

La laïcité garantit aux croyants et aux non-croyants le même droit à la liberté d’expression de leurs convictions. Elle assure aussi bien le droit de changer de religion que le droit d’adhérer à une religion.

Elle garantit le libre exercice des cultes et la liberté de religion, mais aussi la liberté vis-à-vis de la religion : personne ne peut être contraint par le droit au respect de dogmes ou prescriptions religieuses.

La laïcité suppose la séparation de l’État et des organisations religieuses. L’ordre politique est fondé sur la seule souveraineté du peuple des citoyens, et l’État – qui ne reconnaît et ne salarie aucun culte ne se mêle pas du fonctionnement des organisations religieuses.

De cette séparation se déduit la neutralité de l’État, des collectivités et des services publics, non de ses usagers.

La République laïque assure ainsi l’égalité des citoyens face au service public, quelles que soient leurs convictions ou croyances.

La laïcité n’est pas une opinion parmi d’autres mais la liberté d’en avoir une. Elle n’est pas une conviction mais le principe qui les autorise toutes, sous réserve du respect de l’ordre public.

LA LAÏCITÉ : NOTION INTEMPORELLE OU EN CRISE ?

46

royaumontles Entretiens

… et des sens multiples dans le pays

Rappelons en premier lieu les racines du mot « laïcité ». Si l’on distingue une sphère de la religion et une sphère de la cité, c’est parce que la tradition chrétienne a posé une différenciation nette, en grec, entre le laikos, membre du peuple (laos) chrétien, et le klerikos, le clerc. Employer le mot « laïc » revient donc, originellement, à reconnaître l’existence – pas nécessairement l’autorité ou le magistère – d’un clergé. Par définition, celui-ci porte une parole publique.

Or, c’est précisément là que naît l’équivoque fondamentale qui est comme un fil rouge de notre histoire républicaine. La proclamation de la laïcité est-elle une manière d’interdire la parole cléricale – et même religieuse – dans tout l’espace public, ou bien consiste-t-elle en une distinction entre la parole commune à tous, la parole politique, et la parole religieuse ?

Les deux visions cohabitent en France.

D’un côté, on trouve, entre autres, Émile Combes, attaché au tout début du xxe siècle à maintenir le concordat, contre l’idée de séparation, car il permet de mieux cantonner les prêtres, les rabbins et les pasteurs dans leurs églises, synagogues ou temples. Seule la République, et la mystique unificatrice qu’elle porte, est considérée comme légitime dans la sphère publique. Seule la République est une communauté autorisée, vectrice d’émancipation de la raison de ses membres. Les religions, surtout la catholique, sont vues comme des forces de dilution de l’esprit républicain, d’enfermement intransigeant et exclusif dans le dogme et le rite. La République, une et indivisible comme l’est l’Église concurrente, lui succède dans la revendication du monopole de la parole publique.

De l’autre côté, on trouve, par exemple, Michel Debré. En 1959, il porte une loi qui fera date : les écoles religieuses ont un « caractère propre », elles ne sont pas subventionnées par la République, mais reconnues, enfin elles contribuent, de concert avec l’école publique, à l’effort d’éducation nationale. Ainsi, la sphère religieuse est reconnue comme ayant un rôle social légitime. La laïcité permet de dessiner un espace commun dans la discussion politique et dans l’acte d’enseignement, crucial pour honorer la liberté de conscience, mais ne chasse pas le religieux comme un danger en soi.

On peut ainsi comprendre que la République refuse par là la fiction selon laquelle elle serait le seul motif d’appartenance commune mais s’efforce d’être le bien commun, qui ordonne et couronne, dans l’ordre civique, les autres appartenances. Elle fixe un cadre pour que le rôle public des religions soit paisible et profitable, mais n’entend pas l’éradiquer.

47CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Que disait vraiment la loi de 1905 ?

Elle est souvent mal comprise aujourd’hui : elle a institué la neutralité religieuse de l’État, mais elle prévoyait aussi le libre exercice des cultes et des pratiques religieuses.

Un peu partout dans le monde au cours du xixe siècle, la construction de l’État moderne s’est accompagnée d’une remise en question des liens entre le religieux et le politique. La France n’est ni une exception, ni une pionnière en la matière : l’Allemagne bismarckienne ou le Mexique avaient déjà mis en œuvre des principes de séparation des Églises et de l’État, variables selon chaque tradition nationale.

En France, les relations entre l’État et l’Église catholique sont alors régies par le régime du Concordat de 1802, sous Napoléon Bonaparte. L’État reconnaît la religion catholique comme celle de « la majorité des Français » et salarie ses prêtres, choisis d’un commun accord par l’Église et l’État. Dans les années suivant son adoption, trois autres religions, luthérienne, calviniste et israélite sont « reconnues » dans les mêmes conditions.

Mais à l’approche du xxe siècle, les relations avec l’Église de Rome se tendent (l’affaire Dreyfus, le fait qu’une bonne proportion des hommes politiques de la IIIe République sont éloignés de l’Église…). En 1901, les dirigeants français passent à l’offensive : interdiction d’enseigner aux congrégations, puis en 1904 rupture des relations diplomatiques avec le Vatican.

La loi de 1905 n’instaure pas un nouveau régime d’exclusion, mais inclut dans la laïcité toutes les croyances et les non-croyances. Les articles de la loi disent que c’est « la République » qui affirme son identité laïque, pérennisée jusqu’à aujourd’hui par la Constitution de la Ve République. Assurant la liberté de conscience, au sens de liberté pour chacun de choisir sa foi, d’être croyant, gnostique ou athée, la République ne fait pas pour autant de la religion une affaire purement privée : elle en garantit l’expression publique dans le cadre des lois de la République.

La loi de 1905 est portée par Aristide Briand et soutenue par la gauche, qui veut qu’on en finisse avec la question religieuse pour consacrer l’énergie des gouvernements à la question sociale, elle est considérée par les uns comme une loi d’apaisement, par les autres comme une mise à mort de la catholicité française.

48

royaumontles Entretiens

Au début des années 1920, les relations diplomatiques sont renouées avec le Vatican, et l’Église acceptera la séparation.

La République continue d’appliquer l’ancien Concordat aux trois départements de l’Est, Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle qui, en 1905, étaient annexées par l’Allemagne. Les 1 400 ministres des cultes y sont des salariés de l’État, et un enseignement religieux y est assuré dans les écoles publiques. En Guyane, une ordonnance royale de 1828 permet à la religion catholique d’être la seule reconnue et financée.

Aujourd’hui, la laïcité serait-elle en crise ?

La loi de 1905 et les textes qui régissent notre laïcité seraient-ils trop flous pour qu’ils donnent lieu à des interprétations si différentes ?

En tout cas, le mot de laïcité ne figure même pas dans la loi de 1905, qui constitue la clef de voûte de notre séparation des Églises et de l’État – c’est dire à quel point la pratique a précédé la théorie, et cela dès les années 1880. Certes, cette absence de définition claire et univoque a l’avantage de la souplesse dans l’application, mais elle crée également l’inconvénient d’une certaine confusion dans l’idée. Ainsi, on confond la laïcité avec la tolérance, ou avec une belle valeur.

Pourtant, la laïcité n’est pas la tolérance. La tolérance, c’est l’aimable condescendance d’un supérieur avec un inférieur, comme elle pouvait exister sous l’Ancien Régime.

La laïcité ne se réduit pas non plus à une valeur, notion morale qui n’engage à rien de précis, qui relève finalement du libre arbitre de chacun (« des goûts et des couleurs, on ne dispute pas ») et dont la violation n’est assortie d’aucune sanction pénale. Si quelqu’un manque de fraternité envers un autre, on peut le considérer comme inhumain, mais on ne peut le faire condamner par un tribunal.

La laïcité relève d’abord du droit. C’est « une exigence de la raison inscrite dans la loi », écrit Régis Debray.

49CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Doit-elle ne demeurer qu’un simple cadre juridique ou doit-elle également constituer un rempart au prosélytisme religieux ? Bref, a-t-on besoin d’une laïcité de combat face à la poussée des revendications islamistes ?Le cadre juridique est le plus fiable des boucliers, et son objectivité constitue une garantie d’égalité pour tous les justiciables. La solution la plus évidente serait donc d’avoir le courage de l’appliquer, et même de l’imposer en cas de besoin.

Aujourd’hui, écrit encore Régis Debray, « l’éclatement identitaire et le réveil tous azimuts du religieux font reculer partout l’indépendance du temporel, même là où elle était au départ : Israël, Égypte, Inde, Indonésie, Mexique ». Le nombre d’États laïques dans le monde semble se réduire comme peau de chagrin. « Il est donc normal que la République française se défende sans sectarisme ni préjugé avec les armes de la loi, qu’elle tient de son histoire propre. Aucune appartenance particulière n’est porteuse de droits particuliers, et encore moins d’un droit à faire exception à la loi générale. Il y a un code civil, approuvé par la nation, et c’est le même pour tous ».

Où placer le curseur entre le permis et l’interdit ?

Ainsi faut-il augmenter le nombre d’aumôniers musulmans ? Ajouter des jours fériés au calendrier pour faire droit à toutes les pratiques religieuses ? Autoriser l’installation d’une crèche dans une mairie ?

Les hommes, quand ils agissent, ne font pas leur histoire arbitrairement : ils le font dans des conditions non pas choisies par eux, mais directement données et héritées du passé. Un culte multiséculaire sédimente la culture des peuples, et s’incruste dans les esprits, dans le calendrier et dans le paysage. Quand le dimanche est devenu le jour du repos hebdomadaire, en 1906, il est devenu une conquête laïque du mouvement ouvrier.

Aujourd’hui, la France compte 11 jours fériés légaux, qui en intègrent 4 d’origine chrétienne, Pâques, l’Ascension, l’Assomption et Noël. Si la France fait droit à d’autres pratiques religieuses, auxquelles ? Aux pratiques musulmanes et juives, mais alors pourquoi pas aux pratiques orthodoxes, bouddhistes, évangéliques, hindoues ? Où s’arrêter ?

50

royaumontles Entretiens

Écoutons Régis Debray : «  L’enfer est pavé de bonnes intentions et, si l’histoire n’est pas notre code, un code qui fait fi du “poids des générations mortes” finit par rendre ce passé encore plus virulent et même appétissant. » C’est ce qu’a montré la Turquie d’après Kemal : le théocratique y revient en boomerang. Installer une crèche dans une mairie ne sera-t-il pas interprété comme une volonté d’exclure symboliquement les non-catholiques ? Et cela risque de susciter des réclamations d’autres traditions religieuses.

La laïcité pourrait-elle tenir lieu de religion civile ?

Telle est la question de fond, celle de Rousseau au xviiie siècle, celle de Jaurès aussi, qui disait : « Je ne conçois pas une société sans religion, sans des croyances communes qui relient toutes les âmes en les rattachant à l’infini d’où elles procèdent et où elles vont ». Le souci du début du xxe siècle est également le nôtre au commencement du xxie siècle. Les États-Unis ont en quelque sorte une religion biblico-patriotique, et leur transcendance est constituée par Dieu, le drapeau et quelque chose qui tient du libéralisme et de leur puissance économique. La France se définit comme la république « indivisible, laïque, démocratique et sociale ». Laïque n’est qu’un attribut, porteur et porté par les trois autres adjectifs. Une république divisible, oligarchique et antisociale aurait du mal à rester laïque, adjectif qui ne doit pas s’accoler à société, mais à État.

La société civile, qui en France est plus incivile que réellement civile, est par nature le lieu des obédiences religieuses ou idéologiques, des intérêts communautaires et des intérêts des uns contre ceux des autres. Seul un État totalitaire peut avoir la volonté de laïciser la société. C’est l’État qu’il faut rendre laïque, c’est son existence qui donne un corps à ce mot, et il n’existe pas d’exemple d’une puissance publique mise à bas qui ne voie la remontée des clergés. L’État doit nous protéger, et garder sa hauteur par rapport aux intérêts des groupes.

Seul ce qui nous dépasse peut nous unir, et l’État doit tenir bon, sinon notre respect ira ailleurs, et le risque de guerre civile guette. La nation civique, et non pas ethnique, peut donner une âme à un peuple, composé d’un legs de souvenirs et d’un désir de vivre ensemble comme le disait Ernest Renan. Une législation seule est incapable de donner une âme à un peuple.

51CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Ce n’est pas à la laïcité de nous fournir la part d’irrationnel et d’imaginaire qu’exige l’émotion religieuse, et peut-être même toute fraternité, explique R. Debray. « Elle n’est pas faite pour la mystique, ni même pour la croyance. Je ne connais pas d’équivalent laïque au Requiem de Fauré ou au kaddish des endeuillés. Si l’homme est quelque chose qui doit être dépassé, la grandeur d’un régime laïque concilie humanisme et optimisme : elle consiste à laisser à chaque individu le soin de choisir en conscience, sans pression ni soumission, ce qu’il estime devoir dépasser sa pauvre vie individuelle. »

Il n’est toujours pas apparu un « islam de France ». Pourquoi ?

D’abord parce que les imams ne sont pas formés en France, alors que le lieu de formation des hommes de foi n’est pas anodin, et qu’il peut être dangereux pour la France de se confier à l’importation d’imams formés ailleurs, salariés par des États étrangers, dans le cadre d’accords à caractère diplomatique. Pour que puisse émerger un islam de France, le préalable n’est-il pas un institut supérieur de théologie musulmane en France, ou à tout le moins un centre de formation faisant référence ? On ne devient pas prêtre, pasteur ou rabbin sans avoir suivi de longues études, sanctionnées par des diplômes ; c’est une obligation.

52

royaumontles Entretiens

L’Église catholique et la laïcité

Lettre pastorale de Mgr Luc Ravel, évêque aux armées, Réflexion « In intensa profusione cogitationum », lettre offerte à tous les hommes de paix et en particulier à tous les militaires qui risquent leur vie pour la paix, « Sur les rapports entre les religions au sein d’un État de droit », 8 décembre 2010 :

« Je prêche pour que le phénomène religieux ne soit pas approximativement perçu et plus ou moins tenu à l’écart de la vie publique, ni rapporté purement et simplement à d’autres phénomènes sociaux infiniment moins équivoques mais aussi infiniment moins riches. À terme, ce nivellement profite aux extrémismes, il fabrique des bombes à retardement. Cette requête d’être tenue pour ce qu’elle est dans son emprise sur l’homme, c’est-à-dire générant une singularité inédite, n’autorise aucune religion à se penser au-dessus des autres dimensions de l’homme et, par voie de conséquence, au-dessus des valeurs de la société. Parler de « place à part » ne signifie pas revendiquer des prérogatives et des exceptions. Pour un catholique, la requête de l’homme religieux ne porte pas sur une soumission servile du politique au religieux, ni sur un effacement des fruits infiniment variés que portent les arts, les philosophies ou les tendresses humaines, encore moins sur une obligation religieuse qui violerait les consciences. La demande se concentre sur le respect « sacré » que la société laïque doit avoir à l’égard des principes « sacrés » de nos religions, à commencer par celui de la liberté religieuse. Je prends à dessein ce mot « sacré » pour l’appliquer au politique. À l’égard des religions et du fait religieux, il faut au politique et à tous les chefs une attitude d’autant plus mesurée, réfléchie et précautionneuse que l’homme subira encore plus fortement une violation de sa foi que toute autre atteinte faite à sa personne ou à ses idées. Pour jouer sur les mots, je dirai qu’il faut aux responsables une attitude « quasiment religieuse » pour considérer et coordonner les religions dans la vie politique et sociale de la nation. Cette attitude mesurée et justement respectueuse s’appelle la laïcité. […]

La laïcité ne surveille pas la religion : l’État s’il en est besoin peut s’arroger temporairement un droit de surveillance voire de contrainte s’il est clairement établi qu’un manquement fondamental à la dignité de la personne humaine se produit ou risque de se produire du fait de la religion. Mais, sauf ces cas d’exception, l’État veille à mettre en œuvre une laïcité solide et éclairée qui forme un socle social clair sur lequel les religions peuvent établir leur existence et leur exercice. Si elles refusent ce socle, si elles répugnent à

À CHAQUE RELIGION SON INTERPRÉTATION DE LA LAÏCITÉ ?

53CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

s’enraciner sur ce sol, alors l’État doit s’interroger sur la pertinence de leur existence en son sein. Puis il peut entrer dans une démarche d’exclusion de son sol et de sa vie sociale non pas à cause de dogmes propres qui l’incommoderaient mais en raison du non-respect de ce socle commun. […]

Le dialogue interreligieux ne s’établit sainement et paisiblement qu’en présence de l’État qui n’a pas pour vocation d’arranger les choses en gommant les différences ou en invitant à des célébrations communes religieuses incompatibles avec les doctrines des religions. L’État intervient dans le concert des religions en tant qu’établissant le socle commun de la laïcité, elle-même incarnée dans une juste autonomie vis-à-vis des religions et cependant reliée à elles par l’établissement d’une cité de l’homme fondée sur la raison.

Le dialogue interreligieux nous ouvre au respect et à la connaissance de l’autre. Mais il nous soutient aussi dans notre propre foi chrétienne. L’ancien maître général des dominicains, le père Timothy Radcliffe écrivait : « Je ne peux pas entrer seul dans la totalité du mystère du Christ. Pour ce faire, j’ai besoin de l’autre. J’ai besoin d’entrer en dialogue avec mes frères juifs, avec les musulmans, avec les bouddhistes, pour mieux comprendre tout ce qui relève de ma propre foi. »

Le point de vue de Tareq Oubrou

Tareq Oubrou prône un « Islam tolérant ». « Le siècle dernier n’est pas le siècle d’aujourd’hui. Nous ne sommes plus dans un monde bipolaire. 35 ans de recherche théologique dans le droit musulman font que ma pensée évolue bien sûr. » Quant à savoir si la laïcité doit évoluer avec ce monde qui a changé, il considère que « le principe de laïcité doit être conservé ». La loi qui gère la laïcité, c’est la loi de séparation de l’Église et de l’État. « La laïcité n’est pas définie ni par un texte ni par une définition quelconque, elle est traduite dans le droit politique. La laïcité est une production historique. Il y a des régions en France où la laïcité n’est pas appliquée. Cette laïcité, celle d’Aristide Briand, a le sens des réalités également. »

Il a pris position en faveur d’un « Islam à la visibilité discrète ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Il s’en explique ainsi. Quand on est dans un moment de crise, la revendication des droits ne suffit pas. Nous assistons à un moment chargé d’émotion, irrationnel, de peur, il faut donc que les musulmans, ou

54

royaumontles Entretiens

en tout cas les théoriciens de l’Islam, revisitent la hiérarchie des pratiques de l’Islam. À commencer par la foi, qui est intérieure essentiellement, le culte qui est aménagé en fonction du rythme social de chaque individu, et la visibilité dans l’éthique. Le foulard, par exemple, donne une visibilité démesurée par rapport à la valeur normative de cette pratique. Mais la discrétion n’est pas une disparition. Il faut savoir que le voile n’est pas inscrit dans les 5 piliers, et le halal non plus ! C’est-à-dire qu’il faut « aménager cette visibilité en faisant attention à ce qui travaille notre société, c’est-à-dire la peur. Je défends les libertés religieuses et les libertés individuelles, c’est un principe dogmatique. Ce n’est pas parce que je défends le foulard qu’il est important ! »

La laïcité devient-elle sécuritaire ? Il constate une perception de la laïcité dissuasive pour ne pas dire coercitive et punitive, à destination d’une religion particulière. « La démocratie est en train d’être fragilisée à cause d’un discours populiste. Il y a beaucoup d’identitaire dans le rapport à la religion. La loi de 1905 était une loi d’apaisement. »

Pour autant, le modèle anglo-saxon ne constitue pas pour lui un modèle, c’est un autre régime. La liberté en France, c’est la capacité de se libérer de la religion. C’est une laïcité de combat au départ. Alors que les Anglo-saxons ont fui l’Europe pour vivre leur protestantisme. Donc leur liberté est une liberté religieuse. En Angleterre, on trouve la Bible partout, comme dans les pays musulmans on trouve le Coran partout.

Il donne un message aux musulmans de France : «  Se concentrer sur l’essentiel de leur religion, la transcendance et la spiritualité, de garder le bon sens. La réalité est complexe, et nous avons besoin d’avoir une orthodoxie minimaliste et une pratique minimaliste. Il faut garder une certaine raison, et se fier parfois à son intuition. Il ne faut pas se désespérer du monde et arrêter de voir des ennemis partout. » (Respectmag, 2016, www.respectmag.com)

55CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Haïm Korsia : « La laïcité n’est pas un athéisme d’État »

À la question de savoir comment la communauté juive a vécu la polémique sur le burkini, Haïm Korsia répond qu’elle l’a vécue comme toute la société française, mais ce sujet valait-il que l’on lance un grand débat national ? « La volonté de légiférer à tout-va montre que l’on ne parvient plus à trouver un consensus entre nous sur la façon de vivre ensemble. Faut-il que l’on devienne des interprétateurs permanents de la loi ? Je ne le crois pas, car cela ruine la simplicité de la vie en commun. Et que dire des propositions terribles de l’extrême droite, qui veut bannir tout signe religieux de l’espace public ? Si les signes religieux étaient interdits dans l’espace public, la France ne serait plus la France, car la laïcité n’est pas un athéisme d’État, mais la neutralité de l’État pour garantir la vie des cultes. La négation de la foi et de la pratique religieuse dans l’espace public serait une grossière entrave à l’esprit de la loi de 1905. Je salue d’ailleurs la position équilibrée et clairvoyante du ministre de l’Intérieur, qui ne cède sur rien mais qui voit plus loin que ce que suscite l’émotion de l’immédiat. »

Pour lui, le burkini est un acte de revendication politico-religieux qui s’inscrit en opposition avec notre modèle de société. Mais assimiler le burkini à la kippa est une aberration, c’est tout confondre. « La vocation de la kippa est de partager, sans ostentation et sans jamais mettre les autres à distance. Le sens du signe religieux est de partager sans exclure l’autre. Le burkini est sans doute plutôt une façon de “tester” la République, mais, si nous étions sereins avec notre modèle laïque, on aurait ri de cette pseudo-polémique ! Le Conseil d’État a rappelé la loi : on ne peut pas empêcher quelqu’un de vivre comme il l’entend, dans la mesure où il n’y a pas de trouble à l’ordre public. »

L’arrêt du Conseil d’État ne prépare pas une culture communautariste, car il explique que notre Constitution ne peut se construire sur le contrôle du détail vestimentaire de chacun. Il faut édifier un modèle positif de société basé sur ce que nous voulons partager ensemble. C’est d’ailleurs également la thèse lumineuse défendue par Luc Ferry qui a exposé la différence entre légalité et légitimité. Tout ce qui rejette l’un contre l’autre est en contradiction totale avec la République, qui se construit par juxtaposition de personnes différentes ayant une expérience commune et la volonté d’avancer ensemble.

L’État s’implique pour aider l’islam de France. Est-ce un traitement de faveur pour l’islam ? Haïm Korsia considère que les religions ne sont pas en compétition, que chaque culte a sa tradition et son histoire particulière en France. « On ne peut pas comparer le culte catholique, avec ses dizaines de milliers d’églises, le judaïsme, qui a deux mille ans d’histoire en France, avec l’islam, récent sur notre territoire. Mais nous vivons ensemble désormais. L’État s’occupe donc légitimement de chacun non de manière égalitaire, mais équitable en fonction des besoins du moment. »

56

royaumontles Entretiens

La communauté juive n’est donc pas inquiète de la montée de l’islam en France, H. Korsia se dit davantage rassuré par l’organisation, avec le soutien de l’État, d’un islam de France. « Tout ce qui vise à prendre en main le destin de la communauté musulmane par des musulmans de France, sans pilotage de l’extérieur, va dans le bon sens. »(Le Figaro, 5 septembre 2016)

Les protestants et la laïcité

« Le protestantisme français a longtemps été comme ‘un poisson dans l’eau’ en ce qui concerne la laïcité, mais il vient aujourd’hui à manquer un peu d’oxygène. », écrivait Jean-Arnold de Clermont en 2004.

En 1905, les protestants se sont naturellement retrouvés, pour des raisons tant de fond que de stratégie, du côté « non-catholique ». Ils se félicitaient de la liberté de conscience et du libre exercice des cultes offerts par la loi ; ils pouvaient s’organiser sans peine en associations cultuelles ; ils étaient prêts à renoncer aux salaires et aux subventions jusque-là versés par l’État, même s’ils ont connu des temps difficiles… même si certains ont bien senti que la laïcité pouvait être dévoyée en arme antireligieuse, en devenant une sorte de religion contre la religion.

Plus profondément, la Réforme protestante avait préparé une telle évolution. Luther avait placé au cœur de son message la foi qui donne primauté à la conscience sur l’appartenance socio-politique et sur l’obéissance aux pouvoirs. En insistant sur le « sacerdoce universel », la Réforme décléricalisait la religion et, d’une certaine manière, conduisait à une forme de laïcisation de l’institution religieuse.

Aujourd’hui, la Fédération protestante, qui compte plus d’un millier d’associations cultuelles et entretient des relations régulières avec les pouvoirs publics, n’est pas à l’aise avec la laïcité « pacifiée » : en 2004, elle a écrit au Premier ministre pour lui dire son désir de le voir desserrer l’étreinte que ressentent les Églises protestantes en France. Car la pratique de la loi de 1905, un siècle après, est jugée trop contraignante pour les associations cultuelles. Cette limitation rigoureuse est à l’origine de difficultés (concernant le fonctionnement des services communs, les publications, notamment périodiques, l’action diaconale ou humanitaire, le soutien aux missions ou aux Églises à l’étranger).

57CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

Mais quand la Fédération protestante de France s’est prononcée en faveur d’un toilettage de la loi de 1905, elle fut soupçonnée de vouloir relancer la « guerre des deux France », alors que de son point de vue elle ne faisait que constater que la loi adoptée il y a un siècle dans un contexte d’affrontement avec l’Église catholique, pouvait être adaptée à un contexte nouveau, celui du xxie siècle où les Églises sont désormais parties prenantes d’une société civile au sein de laquelle l’autonomie du politique est définitivement acquise. La Fédération craint un climat antireligieux, qui déboucherait sur une « privatisation de la religion », sur une interdiction de toute expression publique du fait religieux, au nom de la laïcité.

Jean-Arnold de Clermont, président de la Fédération protestante de France, écrivait en avril 2004 : « en militant pour la laïcité, telle qu’elle a émergé de notre histoire, souvent conflictuelle, telle qu’elle est définie dans les deux premiers articles de la loi de séparation de 1905, qui affirme la liberté de conscience et de l’exercice des cultes, l’autonomie du politique et la neutralité de l’État à l’égard des religions, le protestantisme français défend l’idée d’une société ouverte et tolérante, où les religions prennent leur place de partenaires dans le respect des lois et l’élaboration de celles qui demain la régiront ».

58

royaumontles Entretiens

LA LAÏCITÉ AU CŒUR DE L’ÉCOLE RÉPUBLICAINE

Des collégiennes voilées à l’école aux menus de substitution en passant par les jupes d’élèves estimées trop longues… depuis des années la question de la laïcité à l’école fait débat. En plus de la loi de 1905, différents textes ont étendu le devoir de neutralité des agents publics de l’Éducation nationale (enseignants, administratifs, directeurs d’établissements…) aux élèves ou aux parents.

La loi de 2004 sur les « signes religieux dans les écoles publiques françaises » interdit le port de signes ostentatoires, mais les signes discrets sont autorisés. En 2012, la circulaire Chatel interdit elle aussi le port de signes religieux pour les parents, notamment les mères voilées, accompagnant les élèves lors des sorties scolaires. Tout cela au nom de la laïcité. Et puis il y a eu les attentats de janvier 2015 et les débordements constatés dans le rang des élèves. Le gouvernement a alors tenu à réaffirmer le besoin de promouvoir et enseigner la laïcité et les valeurs républicaines associées que sont la fraternité ou la liberté d’expression à l’école. Les onze mesures du plan de « Grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République », dont plusieurs concernent la laïcité, ont ainsi été annoncées le 22 janvier par la ministre de l’Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem.

Premièrement, ces mesures s’articulent autour de la transmission des valeurs de la République et notamment de la laïcité. Pour cela l’accent est mis sur la formation des enseignants. 1 000 personnels de l’Éducation nationale seront formés avant la rentrée 2015 à l’enseignement de la laïcité. Ils pourront, dès lors, transmettre cette pédagogie à leur tour à d’autres enseignants, administratifs ou directeurs d’établissements. Par ailleurs, des contenus pédagogiques pour l’enseignement laïque du fait religieux sont prévus, même si aujourd’hui le gouvernement n’a pas donné plus de détails. Deuxième point : la valorisation des rites républicains. Notamment, chaque 9 décembre sera désormais célébrée la journée de la laïcité.

Par ailleurs, le ministère de l’Éducation nationale propose un parcours citoyen de la primaire à la Terminale autour du nouvel enseignement moral et civique, prévu dès la prochaine rentrée 2015, d’une éducation aux médias et à l’information, ou encore de l’incitation à débattre et à argumenter dans les classes. Pour un coût de plus de 250 millions d’euros sur trois ans, le ministère assure vouloir lutter contre le « repli identitaire », les « théories du complot », la « défiance » à l’égard des médias et le « péril du relativisme généralisé ».

59CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

LA LAÏCITÉ ET L’ENTREPRISE FONT-ELLES BON MÉNAGE ?

De plus en plus de questions se posent quant aux différentes façons de vivre sa religion sur son lieu de travail. L’affaire de la crèche Baby Loup en 2008 marque le début d’une longue polémique autour de la laïcité dans le milieu professionnel.

L’association Baby Loup avait licencié une salariée qui portait le voile parce qu’elle avait interdit, dans son règlement intérieur, le port de signes religieux au sein de l’établissement. Cette affaire, aux nombreux rebondissements, a surtout révélé les difficiles frontières dans l’application de la loi sur la laïcité entre l’espace public et l’espace privé. Face à la réalité multiculturelle des entreprises, les ressources humaines doivent trouver des outils afin d’assurer le vivre ensemble des équipes, et le bon fonctionnement de l’activité professionnelle. Mais au-delà des guides de laïcité élaborés par les entreprises, comme la RATP ou l’Alliance du commerce, des chartes soumises par des entreprises à leurs salariés, sont-elles efficaces, bien comprises et légales ?

Pour la troisième année consécutive, l’Observatoire du Fait Religieux en Entreprise et l’institut Randstad ont réalisé une étude sur l’évolution de la présence du religieux sur les lieux de travail, en 2015. En 2014 puis en 2015, on observe une augmentation des tensions liées à la religion entre les murs de l’entreprise. En 2015, 23 % des managers sont régulièrement confrontés au fait religieux, ils étaient 12 % en 2014. Dans le même sens, les revendications religieuses en entreprise passent de 14 % en 2014 à 23 % en 2015. Les sujets de tension liés à la religion auxquels se confrontent le plus souvent les managers, sont les demandes d’absence pour des fêtes religieuses, puis le port ostentatoire d’un signe religieux (croix, foulard, kippa), ainsi que la demande d’aménagement horaire. On retrouve ensuite la stigmatisation d’une personne en raison de ses croyances et pratiques, puis les demandes de prières pendant les pauses et celles pendant le temps de travail, mais ces dernières ne représentent que 7 % des cas. De manière générale, les situations conflictuelles sont rares mais augmentent toutefois puisqu’il n’y avait que 3 % de cas de « blocages » en 2014 et qu’il y en a 6 % en 2015.

Dans certains cas, le problème des entreprises face au fait religieux existe. On se souvient ici de l’affaire Baby Loup qui, en 2008, a vu une employée de crèche se faire licencier pour le motif qu’elle portait le voile sur son lieu de travail. Les plaintes et les tensions se multiplient depuis lors, que ce soit du côté des employeurs comme du côté des employés. Certaines règles, parfois

60

royaumontles Entretiens

mal comprises, des communautés se sentent visées par des interdictions jugées stigmatisantes.

Pourtant, le monde de l’entreprise ne devrait pas être concerné par les principes de laïcité, tels qu’on les entend dans le domaine public. Instituée en 1905 dans le cadre de la loi séparant l’Église de l’État, la laïcité n’est applicable que relativement au respect de l’ordre public (qui s’assure de la paix, de la sécurité publique et de la sûreté). Les interdictions quant aux pratiques religieuses ne sont donc juridiquement pas viables concernant l’entreprise. Selon l’article 9 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et l’article L. 1121-1 de notre Code du Travail : « les restrictions à la liberté religieuse doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle essentielle, déterminante et proportionnée au but recherché ». C’est ainsi que la prière ou le port visible de signes religieux n’entrent pas dans ce que l’on pourrait appeler un « non-respect de la loi » ou un « non-respect de la liberté d’autrui », et que, d’un autre côté, proposer des salles de prières aux employés n’est pas une obligation. Certains organismes, comme la RATP ou l’Alliance du commerce, ont mis en place des « guides pratiques sur la laïcité en entreprise », à destination des managers. Là, ils rappellent ce qui est d’ordre discriminant et ce qui ne l’est pas, au regard de la loi.

C’est précisément l’aspect illégal de la démarche de l’entreprise Paprec qui a posé problème en février 2014, lorsque cette société de recyclage a annoncé l’intégration d’une « charte de la laïcité » dans le règlement intérieur de l’entreprise, calqué sur le modèle de la charte scolaire. Dans cette charte, l’entreprise « n’autorise pas » le port de signes religieux, et interprète la laïcité comme un principe de neutralité. Sylviane Troadec, directrice générale adjointe de Paprec, explique ainsi : « On est contre les excès, on n’est pas contre la religion. Il aurait fallu parler de charte de la diversité plutôt que de « laïcité ». Cette diversité, on la développe depuis 20 ans, on a intégré des personnes de toutes nationalités. Par ailleurs, la laïcité ne va pas à l’encontre de la religion, elle est au contraire garante du fait que chacun puisse être libre de vivre sa religion et qu’il n’y ait aucune hégémonie de l’une sur l’autre. C’est pourquoi il vaut mieux la laisser dans la sphère privée. Les principes valables dans la fonction publique n’ont jamais été contestés. Alors pourquoi ne pas l’appliquer à une entreprise privée ? L’identité ne passe pas par la religion ! Pour nous la laïcité permet la liberté. Si chacun portait le signe de sa religion, les gens ne se regarderaient pas de la même manière. Il y a 56 nationalités différentes au sein de Paprec, donc diverses religions. On préfère la neutralité et laisser tomber ce qui peut poser problème dehors. Dans nos cantines, différents plats sont proposés… et on essaye de les adapter à tout le monde. Pour les congés, les gens s’organisent, ça se fait assez naturellement… D’ailleurs les conflits liés aux congés n’ont généralement pas de rapport avec la religion. »

61CAHIER DES ENTRETIENS

Croyant et Citoyen

62

63

BLOC-NOTES

royaumontles Entretiens

royaumontles Entretiens

www.entretiensroyaumont.org

Les

En

tret

ien

s de

Roy

aum

ont

royaumontles Entretiens

Croyant et Citoyen

CAHIER DES ENTRETIENSVENDREDI 2 DÉCEMBRE • SAMEDI 3 DÉCEMBRE 2016

Abbaye de Royaumontwww.entretiensroyaumont.org

LE RENDEZ-VOUS ANNUEL DE LA RÉFLEXION POLITIQUE

Partenaires officiels des Entretiens de Royaumont :

Partenaires de soutien :

Shower Company

Depuis treize ans désormais, les Entretiens sont devenus le premier rendez-vous annuel de la réflexion politique. Chaque année, se réunissent des hommes politiques et dirigeants de premier plan, de grands entrepreneurs, ainsi que les meilleurs experts, pour débattre, réfléchir, échanger sur les perspectives de la France et sur son rayonnement à l’étranger.

Le thème retenu pour les Entretiens 2016 est comme toujours au centre de tous les enjeux : « Croyant et Citoyen ». Comment le croyant peut-il vivre sa foi dans la république française laïque ? Comment le citoyen non-croyant appréhende-t-il et accueille-t-il la foi de l’autre ? Quelle place accorder aux religions dans l’espace public laïc ? Comment faire vivre librement le fait religieux dans la république du xxie siècle ? Comment créer les conditions d’une cohabitation sereine des religions et des croyances ? Comment s’articulent les dimensions individuelle, culturelle et politique de la religion ? Islam, judaïsme et christianisme ne s’incarnent que dans des hommes, et ce n’est que parce qu’ils sont portés par des hommes, qui par ailleurs vivent dans un certain régime politique, que la question des relations entre religion et politique se pose. Tant de contrastes, oppositions conciliables ou dilemmes, sont aujourd’hui dans l’actualité et nous questionnent, individuellement et collectivement : religion vs société/espace public, religion vs entreprise, religion vs État/République…

Cette année encore, ces deux jours de débats et d’échanges sauront encore faire émerger des débats passionnants, élevés et enlevés, susceptibles de contribuer à l’avancée du débat politique et sociétal, ainsi qu’au progrès de la réflexion collective.