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DÉCOUVRIR POUR GUÉRIR & RECHERCHE SANTÉ 86/avril-mai-juin 2001 86 / 2 e trimestre / avril 2001 / 15 F / 2,29 u Fondation pour la Recherche Médicale Vos dons en action p. 20 Les maladies à prions : que sait-on aujourd’hui ? p. 26 Point de vue : Pr Edouard Zarifian p. 28 La Fondation à l’écoute p. 30 Questions-réponses p. 36 Espoirs et limites des greffes p. 8 Réparer l’homme aujourd’hui

Réparer l’homme aujourd’hui Espoirs et limites des greffes2 Fondation pour la Recherche Médicale •numéro 86 • 2e trimestre - avril 2001 S ’il est un domaine où le rationnel

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  • D É C O U V R I R P O U R G U É R I R

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    n° 86 / 2e trimestre / avril 2001 / 15 F / 2,29 uFondation pour la Recherche Médicale

    Vos dons en action p. 20Les maladies à prions :

    que sait-on aujourd’hui? p. 26

    Point de vue : Pr Edouard Zarifian p. 28La Fondation à l’écoute p. 30Questions-réponses p. 36

    Espoirs et limites des greffes

    p. 8 Réparer l’homme aujourd’hui

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  • 2 Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 2001

    S’il est un domaine où le rationnel et la sensibilité sont intime-ment liés, c’est bien celui des greffes. En effet, l’histoire etl’évolution des techniques dans ce domaine montrent que ladialectique entre science et culture est ici, plus qu’ailleurs,essentielle. Et ceci est vrai à tous les niveaux…

    En premier lieu, le don d’organe, source de toute greffe, peutposer des problèmes d’ordre psychologique. Du côté du rece-veur, les problèmes d’acceptation du greffon sont, bien sûr,d’ordre biologique, mais aussi, plus souvent qu’on ne le pense,d’ordre psychologique – vivre avec un corps étranger ne va pas de soi. Enfin, le champ exploratoire des xénogreffes (greffes de tissus, cel-lules… provenant d’une autre espèce) a suscité des espoirs, mais aussibeaucoup de réticences et de craintes, en particulier aux niveaux del’acceptation biologique de la greffe et de la contamination éventuellepar des infections d’origine animale.La communauté scientifique ne peut pas progresser en fonction deconsidérations uniquement techniques, sans tenir compte des réalitésculturelles et émotionnelles. De son côté, la communauté sociale doit aborder ces questions trèscomplexes en disposant d’une information précise, transparente ethonnête, pour que la prise de décision – qui doit toujours revenir àla personne – soit systématiquement nourrie de données fiables.C’est l’ambition de Recherche & Santé de créer ce lien dynamiqueentre ces deux mondes, pour que la recherche et ses partenaires(patients, familles, médias…) entament un dialogue fructueux.

    Pierre Joly

    Président

    Les greffes, défis scientifiques et humains

    La Fondation pour la RechercheMédicale est membre fondateur

    du Comité de la Chartede Déontologie des associations

    humanitaires.

    É D I T O R I A L Directeur de la publication :Pierre Joly,Président de la Fondation pour la Recherche Médicale,établissement reconnu d’utilité publique par décretdu 14 mai 1965Directeur général :Claire Dadou-WillmannComité de rédaction :Claire Dadou-WillmannPr Claude DreuxCarole HeurtaultJeanne LescoubletMarie-Françoise LescourretDr Carole Moquin-PatteyClaude PouvreauMarie-Christine RebourcetPériodicité trimestrielleCopyright : La reproduction des textes, même partielle, est soumise à notre autorisationsur demande écrite préalable.Ont participé au dossier :Bernard CharpentierDidier HoussinFrançois PattouMaryvonne PéardMarc PeschanskiJosé-Alain SahelCorinne SpodekGérard Torpier Ont participé à la rédaction :Denis BaudierLouise BlottièreCorinne DraultCorinne DupuyChantal GuéniotValérie GuezMartine LochouarnMarielle MayoFrançoise MoinetPhoto de couverture :Roger-Viollet, Photodisc BSIP, PhanieConception, réalisation :

    26, rue du Sentier75002 Paris

    Date et dépôt légal à parution :ISSN 0241-0338Dépôt légal n° 8117Numéro CP 62273

    Pour tous renseignements ou si vous souhaitez vous

    abonner, adressez-vous à :Fondation pour la Recherche

    Médicale54, rue de Varenne

    75007 ParisService donateurs :

    0144397576Information scientifique :

    0144397568/92Publication :0144397565

    Prix de l’abonnement pour 4 numéros :

    60 F/9,15 uChèque à l’ordre de la Fondation

    pour la Recherche Médicale

    Site Internet : www.frm.org

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  • ÉCHOS SCIENTIFIQUESLa détection sans risque de la trisomie 21, un modèlevaccinal contre la maladie d’Alzheimer, de nouvellesmolécules contre le paludisme… Tout savoir sur les espoirs que suscite la recherche médicale.

    DOSSIERLes greffes : espoirs et limitesAujourd’hui, médecins et chercheurs ne cessentd’améliorer les techniques existantes et d’explorer de nouvelles voies de réparation de l’homme.Xénogreffes, organes artificiels, cultures cellulaires…Tour d’horizon des espoirs, des enjeux et des limites d’une thérapeutique pas comme les autres.

    Greffe ou dialyse : la nécessaire implication du patientL’avis du Pr Bernard Charpentier, chef du servicede néphrologie de l’hôpital Kremlin-Bicêtre.

    La greffe de cellules : une réalité en devenirVivre la greffe au quotidien

    VOS DONS EN ACTIONDans cette rubrique, la Fondation pour la RechercheMédicale présente chaque trimestre une sélection des 700 travaux qu’elle soutient annuellement.

    Maladie de Parkinson : premiers symptômes tardifsDes antibiotiques efficaces contre la tuberculoseTroubles mentaux : lésions vasculaires cérébrales en causeDécouvrir les gènes impliqués dans le syndrome de Leigh

    Les maladies à prions : que sait-on aujourd’hui?Compte rendu de la conférence de presse organisée par la Fondation pour la Recherche Médicale, sur le thème : «Vache folle, Creutzfeldt-Jakob, où en est la recherche sur le prion?»

    POINT DE VUEGuérir : les maux ont la paroleEntretien avec Edouard Zarifian,professeur de psychiatrie et de psychologie médicaleà l’université de Caen.

    LA FONDATION À L’ÉCOUTERecherche médicale 58 : une association exemplaire!Récit d’une aventure réussie pour soutenir la recherche.

    Questions-réponsesAvec le professeur Philippe Chanson.

    Conseils juridiquesCatherine Baechelen.

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    S O M M A I R EDa

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    Page 32 - Le Pr Bernard Calvino : la douleur au cœur de la recherche.

    Page 6Thérapie cellulaire :des neuronesissus de la moelleosseuse.

    Page 20Un vaccin contre la schistosomiase,au second rang mondial des maladiesparasitaires mortelles.

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    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 2001

    Page 8 - Les greffes : comment réparer l’homme aujourd’hui?

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  • Une nouvelle méthode dedétection de la trisomie 21, pendant la grossesse, pourrait voirle jour prochainement, annoncentdes chercheurs de l’université deHongkong dans la revue médicaleThe Lancet. Mis à part un testsanguin qui permet d’évaluer dansquelle fourchette de risque se situela femme enceinte, le diagnostic de certitude repose aujourd’hui surl’analyse du profil génétique deschromosomes du fœtus, ce que leschercheurs appellent le caryotype.Pour l’obtenir, le procédé impliquede réaliser une amniocentèse ouencore un prélèvement de tissus de placenta par voie vaginale. Or, ces deux méthodes ne sont pastotalement inoffensives. Même si le risque est très faible, ellespeuvent, en particulier, entraînerune fausse couche. La nouvelletechnique de diagnostic anténatalproposée représente donc unepossibilité à la fois séduisante etrassurante. Non invasive et peucoûteuse, cette technique permetd’isoler des cellules fœtales dans un échantillon de plasmasanguin de la mère ; à l’aide d’une sonde fluorescente(technique dite «d’hybridation in situ par fluorescence»), on peut repérer dans ces cellules la présence d’un troisièmechromosome 21, aberration

    ÉCHOS SCIENTIFIQUESParce que nous souhaitons vous communiquer une informationde qualité, hors des «effets d’annonce», indépendante des intérêtsfinanciers, nous avons rassemblé, dans cette rubrique, les échosscientifiques et les faits les plus marquants de la recherche médicale

    mondiale de ces derniers mois. Une technique de détection sans risque de la trisomie 21, une génération de tests radicalement nouveaux pour le dépistage de la maladie de la vache folle, la moelle osseuse au secours des neurones, un modèle vaccinal contre la maladie d’Alzheimer, le transfertde gènes… Tour d’horizon des dernières grandes avancées médicales.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 20014

    Trisomie 21 : diagnostic sans risque

    chromosomique à l’origine de cesyndrome. Pour l’heure, le procédén’a été vérifié que sur trois femmes porteuses de fœtus atteint de mongolisme. Des essais à plus

    grande échelle doivent maintenantêtre menés afin d’apprécier saprécision. �

    Source : The Lancet, novembre 2000.

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    Actuellement, un test sanguin permet seulementd’évaluer la fourchette de risque de trisomie 21.

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  • 5Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 2001

    Progrès majeur de ces dix dernières années, l’angioplastie abouleversé le monde de la cardiologie. Cette technique estaujourd’hui largement utilisée pour rétablir la circulation sanguine

    dans les artères bouchées des personnes souffrant de maladies

    coronariennes. Elle consiste à introduire une sonde à ballonnet

    jusqu’au vaisseau obstrué. Le ballon est alors gonflé quelques

    secondes afin de dilater l’artère. Principale complication de cette

    technique : la resténose, un nouveau rétrécissement de l’artère

    pouvant survenir dans les mois ou les années qui suivent. Pour

    maintenir l’artère ouverte, les spécialistes utilisent maintenant des

    stents, petits «grillages» en forme de spirale, qui semblent donner

    des résultats plus satisfaisants. Récemment, les chercheurs ont

    imaginé une autre piste thérapeutique. «L’idée est d’introduire dans les

    stents des gènes codant des molécules empêchant la prolifération des cellules

    au niveau de la paroi, et donc la resténose», explique le Pr Laurent

    Feldman, cardiologue à l’hôpital Bichat. Mais, jusqu’à ce jour,

    aucune équipe dans le monde n’avait réussi à mettre au point un

    système de transfert de gène fiable. C’est aujourd’hui chose faite.

    Bruce Klugherz et ses collaborateurs de la faculté de médecine de

    Philadelphie ont utilisé chez des porcs un stent recouvert sur sa

    paroi externe d’un biopolymère contenant un plasmide – un petit

    anneau d’ADN servant de transporteur de gène. Les scientifiques

    ont alors observé que l’ADN nu avait été transféré dans les cellules

    de la paroi artérielle. «Cette étude prouve la faisabilité de la technique.

    Reste maintenant à déterminer si les gènes ainsi transférés sont capables

    d’empêcher efficacement la resténose», commente le Pr Feldman. �

    Source : Nature Biotechnology, novembre 2000.

    Des gènes dans les stents

    L’angioplastie consiste à introduire une sonde à ballonnet dans l’artère afin de supprimer l’obstruction.

    De nouvelles moléculescontre le paludisme

    Maladie parasitaire transmise par les moustiques, le paludisme est un véritable fléau dans les pays tropicaux. Confrontés à la progres-sion du nombre de parasites résistant à la chloroquine, l’un des principauxmédicaments antipaludéens prescrits,les médecins sont dans l’attente de nouvelles thérapies. Les moléculesrécemment commercialisées ont, malheureusement, une toxicitéimportante, ou un coût de fabricationqui les rend inaccessibles à la plupartdes pays touchés par la maladie. Dans ce contexte, la mise au pointd’une nouvelle classe de moléculespar une unité de recherche du CNRS de Toulouse, dirigée par le Dr Bernard Meunier, constitue un réel espoir. Baptisées trioxa-quines, ces molécules associent deuxfragments ayant des mécanismesd’action différents, ce qui permetd’obtenir une efficacité importante in vitro. Leur relative simplicité de synthèse devrait permettre de les obtenir à un coût avantageux. Il reste maintenant à confirmer leur potentiel thérapeutique par desessais chez l’animal, en cours de réa-lisation, et par des études cliniques. L’enjeu est majeur : le paludismeatteint 300 millions de personneschaque année et en tue un million. �

    Source : Journal of clinical chemistry andclinical biochemistry, novembre 2000.

    Frottis sanguin montrant des globules rouges infectéspar les parasites du paludisme (points jaunes).

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 200166

    ÉCHOS SCIENTIFIQUES

    Des neurones issus de la moelle osseuseLa greffe de cellules nerveusesdans le cerveau représente unoutil thérapeutique révolutionnairedans le traitement de maladiesdégénératives telles que la maladiede Huntington ou la maladie de Parkinson. Malheureusement, les neurones se multiplient mal

    Vers un vaccin contre la maladie d’AlzheimerLa maladie d’Alzheimer se caracté-rise par la présence dans le cerveaude plaques séniles, ou plaques amy-loïdes, qui seraient à l’origine de la dégénérescence des neurones. Ces plaques résultent de l’agrégationde protéines baptisées peptides ß-amy-loïdes contenant une courte région de 4 acides aminés – composants élé-mentaires des protéines – qui contrôleles processus de formation et de désagrégation des plaques. Des étudesont précédemment montré que le blocage de ce site régulateur à l’aide d’anticorps entraîne la solubilisation des plaques et l’inhibition de leur effetneurotoxique. Dernièrement, desscientifiques ont développé une nou-velle procédure de vaccination contrela formation des plaques amyloïdes. Ils ont eu recours à des virus infectantexclusivement les bactéries, appelésbactériophages. Modifiés pour exprimer à leur surface la courte régionrégulatrice du peptide ß-amyloïde,

    ces virus se sont révélé être de bonsvecteurs vaccinaux. L’immunisation de modèles animaux a ainsi conduit à la production rapide et durable degrandes quantités d’anticorps très spé-cifiques qui désagrègent efficacementles plaques amyloïdes et augmententla viabilité des neurones en culture.

    Cellules de moelle osseuse cultivées in vitro.

    et dans des conditions de culture très particulières. Pour contourner ce problème, des chercheursaméricains ont récemment montréqu’il était possible de transformer in vitro des cellules de la moelleosseuse en cellules présentantcertaines caractéristiques propres aux neurones. Ce mécanisme peut-ilêtre reproduit dans un organismecomplexe? La réponse est oui. Deux études publiées dans la revueScience viennent de démontrer que des cellules de la moelle osseusepeuvent se transformer en neurones.Dans la première expérience, EvaMezey et ses collègues du NationalInstitute of Health (Bethesda) ont injecté des cellules de moelleosseuse de souris adultes à de jeunesrongeurs incapables de développerleurs propres lignées de cellulessanguines. Quatre mois plus tard,des cellules de donneurs avaientmigré dans plusieurs régions ducerveau, notamment dans le cortexet l’hypothalamus. Résultatsconfirmés par Timothy Brazelton,

    de l’université de Stanford, enCalifornie, qui a opté pour uneapproche expérimentale différente,les «receveurs» de moelle osseuseétant dans cette étude des sourisadultes irradiées. Cette étude a montré que plusieurs mois plus tard, les cellules injectées ayantmigré dans le cerveau, notammentdans le cortex, avaient commencé à exprimer des marqueursneuronaux. Le travail ne fait quecommencer mais d’ores et déjà les cellules de moelle osseusesemblent une voie intéressante à prospecter. Elles offriraient un avantage certain chez l’homme car elles peuvent être prélevées chez le malade lui-même(autogreffe), ce qui éviterait toutphénomène de rejet. De plus, leur utilisation ne devrait pas poser de questions d’ordre éthique,comme celles soulevées parl’utilisation de cellules neuronalesembryonnaires. �

    Source : Science, décembre 2000.

    Détérioration d’un vaisseau sanguin cérébral chez une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer.

    Ce modèle vaccinal ouvre des perspec-tives très prometteuses chez l’homme. Il pourrait permettre la prévention etle traitement de nombreuses maladiescomme la maladie d’Alzheimer ou les maladies à prions. �

    Source : PNAS, octobre 2000.

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2e tr imestre - avr i l 2001 77

    Pourquoi certaines

    personnes peuvent-

    elles ingurgiter

    d’importantes

    quantités de graisses sans

    présenter la moindre hyper-

    cholestérolémie, quand

    d’autres vont voir leur taux

    de cholestérol augmenter

    dès qu’elles font des excès?

    Une équipe de chercheurs

    américains propose une expli-

    cation, après s’être penchée

    sur un trouble génétique

    rare du métabolisme

    lipidique, la sitostérolémie.

    Cette maladie, qui se

    manifeste par une hyper-

    cholestérolémie majeure responsable d’accidents cardio-

    vasculaires précoces, se caractérise par deux anomalies : une

    absorption excessive de certaines graisses (les stérols) dans

    le tube digestif et l’incapacité du foie à les éliminer, les stérols

    s’accumulant alors dans l’organisme. Les chercheurs américains

    ont découvert que cette maladie est liée à des mutations

    sur deux gènes voisins (ABCG 5 et ABCG 8) impliqués dans

    le transport du cholestérol. Ainsi, chez les personnes en bonne

    santé, ces deux gènes agiraient simultanément pour freiner

    l’absorption intestinale des stérols et stimuler leur excrétion

    dans la bile. Des mutations majeures de l’un de ces deux gènes

    seraient à l’origine de la sitostérolémie. Les auteurs estiment

    que des défauts plus subtils, dans la régulation des protéines

    codées par ces gènes, pourraient expliquer certaines variations

    dans la réponse à un régime riche en cholestérol chez des

    individus en bonne santé. En approfondissant les mécanismes

    de régulation du métabolisme des graisses, ce travail offre

    de nouvelles cibles pour des traitements hypolipidémiants. �

    Source : Science, décembre 2000.

    Un taux de cholestérol sous contrôle…

    Un taux de cholestérol élevé peut provoquer des accidents vasculaires graves.

    Le prion piégé

    Molécule du prion, ici représentée graphiquement.

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    Disposer de tests plus rapides et plus sensibles serait importantpour améliorer le dépistage de la maladie de la vache folle. La découverte d’une équipe suisse et autrichienne dirigée par le professeur Adriano Aguzzy, de Zurich, pourrait conduire au développement d’une génération de tests radicalement nouveaux.En analysant les protéines du sang,ces chercheurs ont constaté que l’une d’elles, le plasminogène, a la capacité de se lier aux protéinesprions pathologiques (agents de la maladie) et à elles seules. Il existeen effet une forme normale de la protéine prion dans l’organisme. La forme pathologique en diffère uni-quement par sa configuration dansl’espace, rendant sa détection difficile.Les tests actuels sont réalisés en deuxtemps : la protéine normale estd’abord éliminée, pour rechercherensuite la présence de la protéineanormale. En usant du plasminogènecomme d’un piège, le prion pourraitêtre détecté, même en faible quantité,dans les tissus. Si cette hypothèse se confirme, l’infection pourrait êtredépistée avant que la maladie ne sedéclare, et l’épidémie contrôlée dans le bétail. De plus, le travail decette équipe pourrait aider à résoudre le mystère de la transmission del’infection, la protéine prion patholo-gique ne semblant pas suffisante pourentraîner des dommages cérébraux.Elle agirait en interaction avec d’autreséléments cellulaires. Le plasminogèneserait-il l’un de ces cofacteurs? �

    Source : Nature, novembre 2000.

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 20018

    D O S S I E RBS

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    La greffe fait désormaispartie des thérapeutiquescourantes. Cependant,chercheurs et médecinscontinuent d’explorer différentes approchesafin d’optimiser son développement.

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 9

    Obésité :

    Quarante ans après la première greffe de rein réussie

    entre faux jumeaux hétérozygotes, médecins et chercheurs

    ne cessent d’améliorer les techniques existantes et d’explorer

    de nouvelles voies de réparation de l’homme. Cependant,

    selon qu’il s’agit d’organes, de tissus ou de cellules, issus

    de donneurs décédés ou vivants, mettant en jeu un pronostic

    vital ou non vital, d’organes vivants ou bioartificiels, le champ

    de ce que l’on appelle la «greffe» est appréhendé aujourd’hui

    de façon bien différente par les scientifiques, la société

    et les patients. Panorama d’une thérapeutique pas

    comme les autres, déjà ancienne mais aux potentiels

    d’avenir encore à explorer par la recherche.

    LA GREFFE : UNE RÉALITÉ AUX MULTIPLES VISAGES p. 10

    GREFFE OU DIALYSE : LA NÉCESSAIRE IMPLICATION DU PATIENT p. 15

    LA GREFFE DE CELLULES : UNE RÉALITÉ EN DEVENIR p. 16

    VIVRE LA GREFFE AU QUOTIDIEN p. 18

    Réparer l’homme aujourd’hui

    ESPOIRS ET LIMITESDES GREFFES

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  • D O S S I E R

    l e s G r e f f e s

    epuis une vingtaine d’années, lagreffe, du moins celle des organesà fonctions simples comme le rein(qui agit comme un filtre) ou lecœur (comme une pompe), faitpartie des thérapeutiques cou-rantes. Cependant, l’optimisationdes sources de prélèvements,condition à son développement

    significatif, implique d’explorer des approchesvariées. Les chercheurs continuent doncd’approfondir diverses solutions, depuis lasubstitution d’organes par des organes fonc-tionnels compatibles de donneurs vivants oudécédés (ou d’origine animale, cf. encadré«Le point sur les xénogreffes», p. 12), jusqu’àla greffe de cellules souches hématopoïé-tiques (cellules de la moelle osseuse à l’originedes différentes lignées de cellules sanguines),

    en passant par des techniques chirurgicalessophistiquées d’irrigation sanguine de l’organe.Ces approches s’appuient sur une meilleuremaîtrise des réactions immunitaires, parl’amélioration des traitements antirejet, voirepar l’induction de la tolérance spécifique dugreffon par le système immunitaire, ce qui,pour l’instant, n’est obtenu que chez la souris.Les recherches sur la conservation du gref-fon sont également actives : le conservernon plus quelques heures mais quelquesjours permettrait de programmer des inter-ventions qui, aujourd’hui pratiquées enurgence, empêchent la préparation immuni-taire du receveur et augmentent donc lerisque de rejet. L’amélioration de l’accès augreffon passe également par une démarchede santé publique visant à augmenter lenombre de dons d’organes à la fois par unemeilleure organisation des services hospita-liers, une meilleure information du public etune législation mieux adaptée, autant deconditions qui, en France, sont en cours demise en œuvre. L’évolution de ce contextepasse donc par une meilleure connaissancedes contraintes, des espoirs et des limites decette thérapeutique.

    Si les premières tentatives de greffe de tissusdatent du milieu du XIXe siècle, au sortirde la Seconde Guerre mondiale, seules lesgreffes entre vrais jumeaux paraissaientenvisageables. C’est en 1958 que JeanHamburger eut l’idée de sélectionner lesdonneurs en fonction de critères de compati-bilité tissulaire fondés sur le système HLA(Human leucocyte antigens), découvert par JeanDausset. En effet, chaque individu présente àla surface de ses cellules une combinaison demolécules qui lui est propre, dont la natureest définie génétiquement ; ces «marqueurs»– les antigènes HLA – forment en quel-

    La greffe: une réalité aux multiples visages

    ● ● ●

    DDossier réal iséavec lacol laborat ion du Pr DidierHoussin,directeur del ’Etabl issementfrançais des Greffes.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 200110

    Une étape décisive grâce auxrecherches de J. Hamburger

    J ean Hamburger fut l’un des premiers à comprendreque les applications de la biologie moléculaireauraient des conséquences immenses en médecineet en chirurgie. Il travailla activement à la créationde l’Institut national de la santé et de la recherchemédicale (Inserm), et fut à l’origine, avec JeanBernard, de la création de notre Fondation, faisantappel à la générosité du public pour soutenir larecherche médicale. Jean Hamburger accomplit sa

    colossale œuvre de chercheur et de praticien à l’hôpital Necker, à Paris,où il avait ouvert en 1951 une unité de recherche en néphrologie. Il proposaune nouvelle classification des maladies rénales et participa à la miseau point des premiers reins artificiels. En 1959, Jean Hamburger, grâceaux découvertes de Jean Dausset dans le domaine des compatibilitéstissulaires, réalisa la première transplantation au monde de rein entre fauxjumeaux. En 1965, il greffa avec succès sur un patient vivant le rein d’uncadavre, ouvrant la voie à des milliers de transplantations rénales.

    DR

    La compatibilité donneur-receveur

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 11

    Cœur-poumon et poumonHypertension artérielle pulmonaire,mucoviscidose. Les transplantationsmonopulmonaires, bipulmonaires ou cardio-pulmonaires sont réalisées en grande partie en fonction de la disponibilité des greffons.

    PeauSurface brûlée (3e degré) supérieure à 50% de la surface corporelle. Cette indication est toujours vitale.

    Foie1 - Défaillance fonctionnellehépatique globale chronique(cirrhose).2 - Insuffisance hépatique aiguëgrave (hépatite fulminante).3 - Déficit enzymatique spécifique sans lésion hépatique.4 - Hépatectomie totale. Dans tous ces cas la greffe est vitale.

    ReinInsuffisance rénale chronique terminale.Traitement d’attente ou alternative : dialyse.

    VaisseauxInfection de prothèse aortique, revascularisationd’artères ou de veines, accès vasculaire pourhémodialyse, maladie de Lapeyronie. Traitements d’attente ou alternatives : prothèses,traitements anticoagulants; la greffe est toujoursvitale en cas d’infection de prothèse aortique.

    PancréasInsuffisance pancréatique endocrine de diabète

    insulinodépendant de type 1 (DID 1).Traitement d’attente ou alternative :

    insulinothérapie. Si une insuffisance rénaleau stade terminal est associée, la greffe du

    pancréas peut être couplée avec celle du rein.

    CornéeŒdèmes, abcès, lésions et affections dégénératives non

    inflammatoires ou hypervascularisées; perforations. Pas d’alternative pour restaurer la fonction.

    OsPertes de substances segmentaires,

    comblements de cavités. Traitements d’attente ou alternatives : prothèses,stabilisation de la détérioration du tissu osseux;

    la greffe est toujours vitale chez les personnes âgées.

    IntestinDéfaillance fonctionnelle de l’intestin grêle. Traitement d’attente ou alternative : nutrition

    parentérale; en cas de complicationsvasculaires, métaboliques ou hépatiques

    de la nutrition parentérale, la greffe est vitale.

    Panorama des indications des greffesIl existe aujourd’hui de nombreux traitements d’attente, voire des alternatives aux greffes. Cependant, dans de nombreux cas, la greffe reste une thérapeutique vitale.

    CœurInsuffisance cardiaque terminale.

    Traitements d’attente ou alternatives : traitementmédical, assistance circulatoire, cœur artificiel.

    Valves cardiaquesInfection valvulaire, infection de prothèse,intolérance des traitements chez l’enfant.

    Traitements d’attente ou alternatives : traitements anticoagulants, valves mécaniques;

    la greffe est toujours vitale en casd’infection de prothèse valvulaire.

    frm_5886_08-15_baf 17/03/03 9:55 Page 11

  • «immunosuppresseurs», qui diminuent ousuppriment la réponse immunitaire, a été uneavancée majeure dans le domaine des greffes.L’action des différents types d’immunosup-presseurs détruit les acteurs de la défenseimmunitaire en bloquant leur multiplicationou en les empêchant d’accomplir leurs fonc-tions. Ainsi, les corticostéroïdes, découvertsen 1950, diminuent l’ensemble des défensesde l’organisme. D’autres médicaments plus sé-lectifs, comme la ciclosporine, bloquent l’acti-vité des lymphocytes T, premiers responsablesdu rejet. La découverte de ses propriétés, en1972, par Jean-François Borel (Sandoz,Bâle), a amélioré de façon spectaculaire lepronostic des greffes. Mais l’action bénéfiquede ces traitements en ce qui concerne l’accep-tation de la greffe se double d’un effet per-vers : les patients deviennent sensibles auxinfections et risquent de développer destumeurs. Actuellement, la stratégie thérapeu-tique consiste à associer plusieurs médica-ments à faibles doses, ce qui permet d’obtenirle niveau d’immunosuppression désiré et dediminuer le risque de toxicité inévitablementassocié à chaque produit (effets secondairesau niveau des reins, du foie, de la moelle…).Fondés sur des associations en bi- ou tri-thérapie de corticoïdes, d’azathioprine et deciclosporine, ou d’autres molécules plus ré-centes, les traitements immunosuppresseurssont plus efficaces et de mieux en mieux maî-trisés, même si leurs effets secondaires restentsouvent sévères (cf. dossier «La transplanta-tion d’organes, un espoir pour la vie» surwww.frm.org, le site Internet FRM).

    P arallèlement à ces progrès, les succès desgreffes se sont multipliés. Les premièrestransplantations rénales réussies entre fauxjumeaux datent de 1959 (l’une à Paris, sousla direction de J. Hamburger, l’autre àBoston, sous la direction de J. Merril). En1967, la première greffe de cœur réalisée auCap par Christian Barnard (survie à dix-sept

    D O S S I E R

    l e s G r e f f e s

    que sorte sa «carte d’identité» tissulaire.Le rejet de greffe correspond à une réactionimmunitaire orchestrée par les globulesblancs (lymphocytes B et T) du receveur,dirigée contre des antigènes HLA reconnuscomme étrangers. Une greffe sera d’autantmieux tolérée que le donneur est un procheparent. L’introduction des traitements dits

    «L’introduction, dès 1950, des traitements dits “immunosuppresseurs” a été une avancée

    majeure dans le domaine des greffes.»

    12 Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    ●●●

    La pratique de la xénogreffe, qui correspond à une greffe entredeux individus d’espèces différentes, se heurte à des difficultéstechniques ainsi qu’à de fortes résistances éthiques et culturelles.A long terme, elle permettrait de disposer de réservoirs de greffons issus d’élevages spécialisés. Pour l’instant, les recherches portent sur la découverte de nouvelles méthodesd’induction de tolérance applicables aux maladies auto-immuneset aux allogreffes, et ouvrent des perspectives dans les domainesde la thérapie génique ou du développement d’organes desuppléance. La production d’un animal transgénique exprimantun gène humain destiné à limiter le rejet est une avancéerécente. Mais de multiples transgènes seront indispensablespour limiter le phénomène de rejet, et cette technique devra enassocier d’autres. Les recherches les plus intensives se portentsur le porc (taille des organes adéquate, facilité et faible coût dereproduction, connaissances acquises dans la reproduction delignées exemptes d’organismes pathogènes spécifiés). Les essaiscliniques chez l’homme sont encadrés par l’Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé, l’Agence françaisede sécurité des aliments et l’Etablissement français des Greffes.

    Le point sur les xénogreffes

    Organes, tissus, cellules : que greffe-t-on aujourd’hui?

    La greffe de rein, actuellement la plus répandue, souffre du manque de greffons.

    BSIP

    frm_5886_08-15_baf 17/03/03 9:55 Page 12

  • 13

    jours) rencontrait un large écho médiatique.Ont suivi des transplantations de foie, depancréas, de bloc cœur-poumons… Les greffesd’organes, qui visent à restaurer le fonction-nement défaillant de l’organe (en lui substi-tuant un organe sain compatible), puis àmaintenir le bénéfice fonctionnel et, enfin, àaméliorer la qualité de la vie (restaurationdes relations socioprofessionnelles, possibilitéde grossesse…), se sont diversifiées (voirinfographie page 11). Leur taux de réussites’est amélioré : aujourd’hui, plus de 80% destransplantés du cœur ou du foie survivent àdeux ans.

    Les greffes de tissus (cornées, os, tendons,ligaments, peau, valves cardiaques ouvaisseaux) sont toujours des allogreffes (cf.glossaire). Ne provoquant pas de réactions derejet, elles sont largement utilisées depuis plu-sieurs années (le taux de réussite des greffesde cornées non inflammatoires est de 95%).L’activité liée à ce type de greffes est constituéeen entités homogènes : prélèvement, récep-tion dans une banque de tissus, préparation,validation, conservation, distribution sur labase du respect des bonnes pratiques delaboratoire et des règles éthiques (sécurité,

    traçabilité). En France, environ 15 000 greffonssont prélevés chaque année. Les greffes de cel-lules souches hématopoïétiques (cellules dusang périphérique, du sang placentaire ou de lamoelle osseuse) font partie de l’arsenal théra-peutique des maladies hématologiques et descancers. Elles sont destinées aux receveursrésistant aux autres formes de traitements.Sur un total d’environ 3 000 greffes de cellulespar an, les autogreffes représentent 80% desindications de cancers, la pratique des allo-greffes étant encore difficile et limitée. Tout segreffe donc, ou presque… Mais la procédurethérapeutique reste lourde et complexe. Sesmodalités diffèrent notamment en fonctiondu statut du donneur. A partir d’un donneurvivant, elle concerne les poumons, le foie, lesreins et la moelle osseuse, et pose essentielle-ment deux questions : celle du risque du décèsdu donneur, encore non totalement maîtrisé ;celle de la gestion de la relation entre le donneuret le greffé, mettant souvent en jeu la dépen-dance du greffé en cas de succès, ou la culpa-bilité du donneur en cas d’échec.

    Face à la pénurie d’organes, la nouvelle loiéthique en cours de préparation devraitélargir les conditions du don aux conjoints,alors qu’elles sont actuellement limitées auxparents proches. Quant au prélèvement surdonneur décédé, sa limite principale estd’ordre clinique : la mort encéphalique doitavoir été diagnostiquée. Elle entraîne l’arrêtdéfinitif de l’activité du cerveau(tronc cérébral et hémisphères) et,à très court terme, la destruction del’organisme entier. La loi de bioé-thique de juillet 1994 prévoit que,dans ce cas, le principe de consen-tement présumé doit être appliqué.Mais ce principe, par manque d’in-formations sur ce qu’est la mortencéphalique, sur l’utilité de lagreffe et les conditions médicales,sanitaires et éthiques du prélève-ment (voir «Du donneur au rece-veur», page 14), se heurte encoretrop souvent à la réticence desfamilles. Informer précisément lereceveur est tout aussi nécessai-re. Pour le patient, la décisiond’échanger un déficit grave,

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    Glossaire• Allogreffe :greffe entre deux individus de même espèce.

    • Anticorps :moléculesproduites par les lymphocytes Bdu systèmeimmunitaire, qui réagissentavec les antigènesn’appartenant pas à l’organisme.

    • Antigène :substanceidentifiée commeétrangère à l’organisme et susceptible de déclencher une réactionimmunitaire en provoquant la formationd’anticorps.

    • Autogreffe :greffe danslaquelle le greffonest prélevé sur le sujet lui-même.

    • Transplantation-greffe : dans son sens strict, la greffe s’applique auxtissus, alors que la transplantationd’un organeréclame le rétablissementdu courantsanguin, mais les deux termessont utilisésindifféremment.

    • Xénogreffe :greffe entre deux individusd’espècesdifférentes.

    ● ● ●

    BSIP

    Une procédure lourde et complexe

    La greffe d’un organe à fonctions simples comme le cœur (quiagit comme une pompe) est aujourd’hui couramment réalisée.

    CNRI

    La ciclosporine constitue aujourd’huile principal traitement antirejet.

    Une nouvelle loi éthique en cours de préparation

    frm_5886_08-15_baf 17/03/03 9:55 Page 13

  • D O S S I E R

    l e s G r e f f e s

    14 Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    parfois vital, contreune vie très contraignan-te (maladies, affaiblisse-ment du système immu-nitaire, prise médicamen-teuse à vie, modificationdu rapport au corps) n’esten rien anodine. A titred’exemple, un receveurde main à Lyon, ne sup-portant plus ni ses traite-ments ni l’idée de se ser-vir d’une main étrangère,a récemment souhaité sefaire amputer. En outre,comme le souligne DidierHoussin, le directeur del’Etablissement françaisdes Greffes (EfG), «la greffeest encore loin de représenterl’horizon d’innocence biolo-gique que l’on en attend, carles mécanismes de rejet et de récidives de maladiessur le greffon, notamment sur le foie et le rein, sontencore mal connus». Le rejet du greffon reste lerisque majeur. La réaction immunitaire dureceveur est induite par les lymphocytes T,qui reconnaissent les antigènes du greffon etprolifèrent. Les lymphocytes T CD4 produi-sent des messagers chimiques qui mobilisentles défenses de l’organisme, tandis que leslymphocytes T CD8 dits «cytotoxiques» s’at-taquent directement au greffon. Cette der-nière catégorie est responsable des rejets dits«aigus», observés au bout d’une semaineenviron dans 30% à 50% des cas. Quant aurejet chronique (dégradation progressive dela fonction de l’organe transplanté), il a pourconséquence la constitution de fibroses et delésions vasculaires qui, à terme, entraînent laperte totale du greffon.

    La transmission d’infections et de tumeurspose également un problème central. Aucours d’une greffe d’organe, les risques infec-tieux sont mineurs, le principal étant l’inductiond’un cancer à moyen terme (un à dix ans) par levirus d’Epstein-Barr (pouvant provoquer deslymphomes), par le virus Herpès 8 (respon-sable du sarcome de Kaposi) ou par lesHuman Papilloma Virus (à l’origine de cancersgénitaux). Dans le cas des greffes de cellulessouches, des infections fongiques ou des sep-

    ticémies consécutives à l’aplasiepeuvent intervenir. Parmi cesinfections, le sida et les hépatitesB et C constituent les risques lesplus importants contre lesquelsil n’existe encore aucun traite-ment satisfaisant.Dans ce contexte, l’utilisation de cellules comme matériaux dereconstruction d’organes dé-faillants constitue une voie derecherche prometteuse pour desorganes comme le foie, le rein, lavessie (ainsi que les vaisseaux)qu’on ne peut remplacer par desprothèses artificielles en raisonde la complexité et de la diver-sité de leurs fonctions. L’enjeud’organes «bioartificiels» (mi-vivants, mi-artificiels) est alorsde prolonger la vie des tissustrès endommagés en les régéné-

    rant. Le foie est l’objet des recherches les plusnombreuses, car ses affections représententun problème majeur de santé publique. Leprincipe d’un prototype à l’étude en Grande-Bretagne (1) est de recréer un circuit sanguinextracorporel qui transmette le plasma dupatient depuis les tissus endommagés de sonfoie jusqu’à un foie bioartificiel constituéd’un disque épais d’hépatocytes (cellules dufoie) en culture.

    Le plasma est introduit dans le foie bioartifi-ciel grâce à un réseau très dense de tubesperméables. Les hépatocytes du foie bioarti-ficiel recréent une structure similaire à celledu foie naturel et traitent le plasma (apportd’oxygène et de protéines, élimination d’oxydede carbone et de toxines). Une fois détoxifié, leplasma est réinjecté dans le foie du patient.Ainsi, pendant l’utilisation du foie bioartificiel,les hépatocytes du patient se régénèrent. Si lagreffe est une pratique en plein essor, renduede plus en plus fiable par une maîtrise crois-sante des traitements antirejet, la recherched’alternatives biotechnologiques à la trans-plantation d’organes représente pour lespatients en attente de greffe un réel espoir de pallier le déficit de greffons… �

    Au niveau local,l’établissement de santé autoriséassure la coordi-nation hospitalière. Au niveau régional,l’Etablissementfrançais des Greffesassure une coordi-nation interrégionale(interrogation duRegistre nationaldes refus, régulation des prélèvementsmulti-organes,répartition des greffons),une coordinationpermanente etoptimale entre les deux niveaux.

    Diagnostic de la mortencéphalique.

    ●●●

    Une alternative :les organes bioartificiels

    Pallier le déficit de greffons

    La greffe de peau, qui nécessite unemise en culture préalable, se pratiquepour traiter les brûlures.

    Greffes des receveurs.

    Information de la famille.Recherche

    de la volonté du défunt (carte de donneur, Registrede refus). Recueil de témoignages.

    Recherche desantécédentsmédicaux

    du défunt et d’uneéventuelle maladietransmissible.

    Prélèvement et restitution du corps du

    donneur à sa famille.

    Choix desreceveursinscrits sur

    la liste d’attente enfonction des priorités etde la compatibilitédonneur-receveur.

    Du donneurau receveur

    (1) Laboratoires d’Alastaire Strain, à l’hôpital Queen Elizabeth de Birmingham.

    BSIP

    frm_5886_08-15_baf 17/03/03 9:55 Page 14

  • L’avis du Pr Bernard Charpentier, chef du service de néphrologie de l’hôpital Bicêtre(Kremlin-Bicêtre).Il existe trois stratégies thérapeutiques pour pallier la défaillance durein : la greffe, l’hémodialyse et la dialyse péritonéale. La greffe consisteà substituer au rein défaillant un rein compatible. L’hémodialyse et ladialyse péritonéale sont des techniques d’épuration extrarénale, lapremière faisant appel à des appareils de dialyse fonctionnant surcirculation extracorporelle, la seconde utilisant la membrane péritonéalecomme membrane filtrante et fonctionnant par remplissage et vidanged’un liquide de dialyse introduit dans la cavité péritonéale. Dansl’attente de greffe, l’hémodialyse et la dialyse péritonéale assurent unebonne survie. Elles sont cependant vécues comme des servitudes et desfacteurs de désocialisation : l’hémodialyse est pratiquée trois fois parsemaine à l’hôpital, à raison de quatre heures par séance, la dialysepéritonéale est effectuée à domicile sur trois cycles de cinq à six heurespar jour, tous les jours. Cette dernière méthode, qui permet cependantune plus grande autonomie du patient, puisqu’il change lui-même sespoches de liquide de dialyse et n’est pas contraint à l’immobilisation,exige en revanche d’excellentes conditions d’habitat (espace, hygiène).Quant à l’hémodialyse, elle n’est pas exempte d’effets sur l’état général(grande fatigue, vieillissement vasculaire) ; en outre, chez les femmes,elle retentit sur la qualité de vie et rend difficile la grossesse ; chez leshommes, elle entraîne une baisse de la libido. Comparativement, lagreffe assure une meilleure qualité de vie, ainsi qu’une bonne insertionaffective et socioprofessionnelle. Néanmoins, elle ne met pas totalementà l’abri du risque de mortalité (4% de décès), et sa difficulté majeurereste la gestion de la pénurie d’organes, qui se traduit par une attente degreffon qui peut excéder trois ans pour un rein. Sa deuxième limiteimportante est l’obligation, pour prévenir le rejet, de se plier à une sur-veillance régulière et de prendre des traitements immunosuppresseursà vie, traitements qui, en outre, provoquent une baisse des défensesimmunitaires pouvant entraîner une augmentation de la cancérogenèse,notamment cutanée. Chacune de ces techniques comporte donc descontraintes majeures. Si bien qu’il ne s’agit pas de choisir entre l’une oul’autre, mais, d’une part, d’en évaluer les performances en fonction del’âge et de l’état physiologique et, d’autre part, d’en présenter clairementles contraintes au patient. Pour la greffe, il est fondamental d’informersur l’attente de greffon et sur les exigences des traitements immuno-suppresseurs, pour les techniques d’épuration extrarénale, sur lesconditions de mise en œuvre et sur les incidences en termes de qualitéde vie. Dans tous les cas, la motivation du patient, son implication dansle traitement et sa totale adhérence aux contraintes qui y sont associéesfont partie des conditions fondamentales pour assurer le succès de lastratégie thérapeutique adoptée.

    O p i n i o n

    Greffe ou dialyse : la nécessaire implication du patient

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 15

    DR

    «Il ne s’agit pas de choisirentre l’une ou l’autre

    des techniques,

    mais d’en évaluer

    les performances en

    fonction de l’âge et de

    l’état général et d’en

    présenter clairement

    les contraintes

    au patient.»

    L’alternative greffe/techniques d’épuration extrarénales met en jeu la nécessaireresponsabilisation du patient face à son traitement. Une dimension déterminantedans des contextes thérapeutiques toujours très contraints.

    frm_5886_08-15_baf 17/03/03 9:55 Page 15

  • D O S S I E R

    n vingt ans, lesrecherches en génietissulaire ont réussi à franchir le pas qui séparait

    la réparation naturelle de la reconstruction de tissus en laboratoire.Avec le développementdes cultures de cellules souches, la médecine dite«régénérative» est née…

    Remplacer les neuronesAinsi, les perspectives de traitement des maladiesdégénératives se trouventtotalement relancées par la possibilité de greffer des cellulesnerveuses dans le cerveau.L’autoprélèvement decellules de moelle osseuseet la transformation de celles-ci en cellulesprésentant certainescaractéristiques neuronales

    L e s G R E F F E S

    Avec le concours du Pr Marc Peschanski, unité Inserm U.421, hôpital Henri-Mondor de Créteil, du Dr François Pattou,équipe RIT-M Inserm/université de Lille II et CHRU de Lille et du Pr José-Alain Sahel, EMI 9918 de Strasbourg.

    16

    qui a montré que le cerveauest un réseau tridimensionnelpossédant une véritablecapacité plastique, doncaccessible à des stratégiesthérapeutiques fondées sur la reconstruction neuronale»,souligne Marc Peschanski.Cependant, ce typed’approche n’est possiblequ’en autorisant les chercheurs à travailler sur un matériel biologiqueéthiquement sensible, ici les cellules fœtales.

    Soigner le diabèteDans un autre domaine,l’équipe du Dr FrançoisPattou (équipe RIT-MInserm/université de Lille IIet CHRU de Lille) amontré que la greffe d’îlotsde Langerhans pouvaitreprésenter une solutionprometteuse à l’insulino-thérapie du diabète de type 1. Ce diabète estdû à la destruction par le système immunitaire de cellules ß des îlots deLangerhans responsables,dans le pancréas, de la sécrétion régulée de l’insuline (cf. dossier«Vaincre les diabètes»,Recherche & Santé n° 84).L’objectif de la greffe est donc de transplanter de nouveaux îlotsfonctionnels, prélevéssur donneur décédé aprèsmort encéphalique. Maisla quantité et la qualité des îlots à greffer restent

    La greffe de cellules:une réalité en devenir

    en vue d’une autogreffeapparaissent une stratégieparticulièrement fructueuse(voir «Echos scientifiques», page 6). L’équipe du Pr Marc Peschanski (unitéInserm U.421, hôpitalHenri-Mondor de Créteil) a choisi une autre voie : il y a quatre ans, les chercheurs ont pratiquéune greffe de cellulesneuronales embryonnairesdans le cerveau de cinqpatients atteints de maladiede Huntington, maladieneurodégénérativegénétique menant à la démence. Aujourd’hui,trois de ces patients ont repris certaines deleurs activités. En l’absencetotale d’autre possibilité de traitement, le succès est d’importance. Plusprécisément, des neuronesembryonnaires, qui ont la capacité de fairepousser des prolongements (les axones) et de se«connecter» aux neuronesadultes, ont été injectésdans le site de localisationde la maladie (le striatum).En quelques mois, le réseau neuronal dustriatum dégradé s’estreconstitué, et les patientsont récupéré une grandepartie de leurs capacitésmotrices et intellectuelles.«Ce succès clinique estl’aboutissement d’un travailde recherche fondamentalemené depuis quinze ans,

    E

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    Pour les patientsatteints de certainesmaladies incurablesou nécessitant des traitementscontraignants,la greffe de cellulesreprésente un grandespoir. Cependant,cette technique est liée à la disponi-bilité des sourcesbiologiques, doncà la recherche desolutions alternativesau prélèvement,ainsi qu’à uneévolution de soncadre législatif.

    Les images du cerveau d’un malade greffé (à gauche par résonance magnétique nucléaire et à droite en tomographie à émission de positrons)montrent l’activité métabolique. Le centre de la croix, sur chacune des images, identifie un

    greffon caractérisépar une activitémétabolique normale alors que les structuresvoisines sonthypométaboliquesdu fait de la maladie.

    Résultats

    DR

    frm_5886_16-17_baf 17/03/03 9:57 Page 16

  • 17

    de cellules sécrétrices nesont pas mises au point,l’insulinothérapie reste la base du traitement du diabète de type 1.

    Combattre la cécitéLes recherches sur lesgreffes de cellules dans larétine sont également bienavancées. L’équipe Insermdu Pr José-Alain Sahel (EMI9918 «Physiopathologiecellulaire et moléculaire dela rétine» de Strasbourg) a ainsi montré que la pertede la vision dans le cadrede maladies rétiniennesentraînant la cécité étaitliée à la dégénérescencedes cônes, cellules responsables de la visiondes couleurs et de l’acuité

    une question préoccupante,d’autant que deux ou troisdonneurs sont nécessairespour une greffe. «Une stratégie séduisante vientd’émerger, avec la mise enévidence récente, au sein dupancréas humain, de cellulessouches capables de semultiplier et de se transformeren cellules ß ex vivo»,explique François Pattou.Mais cette perspective reste lointaine. En pratique, la greffe d’îlots peut être réalisée au prix d’un traitement immuno-suppresseur puissant,chez des patients atteintsde formes sévères, ou en association à une greffe de rein. Cependant, tantque des sources abondantes

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    Luc

    Bene

    velo

    visuelle. Cette dégénéres-cence étant elle-mêmesecondaire à celle desbâtonnets, qui assurent la détection de la lumièredans des conditions de faible luminosité. La mise en évidence de ces mécanismes a conduit,il y a quatre ans, à la miseau point de plusieursstratégies thérapeutiques,dont l’une consiste àtransplanter les bâtonnets,ce qui pourrait permettre,chez des malades ayantgardé au moins 5 ° devision centrale, de ralentirla dégénérescence des cônesde 50%. Une greffe de 5%à 10% des bâtonnets estcapable, dans des modèlesexpérimentaux, de sauver

    50% des cellules. Unedifficulté réside dans le faitque la greffe de bâtonnetsest conditionnée au don de globes oculaires, que la loi n’autorise que dansle cadre de prélèvementsmulti-organes après mort encéphalique. «Or ces prélèvements, commec’est le cas pour la cornée,pourraient être réalisés aussiaprès un décès survenu dans les conditions habituelles,puisque ces cellules surviventvingt-quatre heures après le décès», déplore le Pr José-Alain Sahel. Dans l’attented’une modification de la loi, les chercheurscontinuent d’explorerd’autres voies thérapeutiquespharmacologiques. �

    «Le cerveau est accessible à des stratégies thérapeutiques fondées sur la reconstruction neuronale.»

    Le Pr Marc Peschanski (à gauche) et le Dr Anne-Catherine Bachoud-Lévy (à droite) travaillent sur la greffe de cellules neuronales.

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  • D O S S I E R

    LES GREFFES

    Avec la collaboration de Corinne Spodek, psychologue clinicienne, service de néphrologie à l’hôpital Armand-Trousseau jusqu’en 1999, Maryvonne Péard, surveillante coordinatrice des prélèvements d’organes et de tissus au centre hospitalier du Mans, Gérard Torpier,président de l’association nationale Transhépate et enfin de la fédération France Adot.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 200118

    La vie des candidats à la greffe et des greffés est très assujettie aux contraintes de la maladie.

    La souffrance de la famille du donneur décédé est également très forte. Des expériences difficiles

    qu’un entourage hospitalier et extra-hospitalier très présent s’efforce d’accompagner.

    Vivre la greffe au quotidien

    Liaison

    Développer la solidarité entre les personnes en attente de greffe et les greffés

    De nombreuses associations développent des liens entre les patientsen attente de greffe et les greffés. Par exemple, les associations de Transhépate sont présentes sur les plateaux techniques de transplantation hépatique français. En relation avec les équipeshospitalières, ses membres, tous bénévoles et malades greffés de foie,témoignent de leur expérience auprès des personnes qui viennentd’apprendre leur diagnostic, afin de les aider à surmonter ce qui esttoujours vécu comme une catastrophe. A la demande des équipeschirurgicales, ils participent aux consultations de pré-greffe.L’association sert aussi les intérêts collectifs des patients en les repré-sentant auprès des instances nationales. Sa philosophie est fondée sur l’entraide de greffés à de futurs greffés.

    Le rôle de la psychologue clinicienneest d’aider les adultes et les enfantsen attente de greffe à ne pas faire de leur maladie l’élément uniqued’identification («J’ai une maladie»n’est pas «Je suis malade») mais àl’intégrer au reste de leur vie. Tel estl’un des messages de Petites Histoires dereins du tout, une vidéo indépendanteréalisée avec la participation del’hôpital Trousseau et du CHU de Lille,où les enfants dialysés et greffésparlent de leurs angoisses, mettent enscène leurs espoirs et leur joie de vivre.Médiatrice, la psychologue cliniciennecherche avec le médecin et l’équipesoignante à organiser une viequotidienne active malgré les multiplescontraintes et à inciter la famille à construire des projets de vie avecl’enfant. L’instituteur de dialyse,l’assistante sociale (à l’hôpital) et l’instituteur scolaire (à l’école)prennent en compte les conditions devie de ces enfants sans les marginaliser(y compris par la pitié). Globalement, l’entourage de l’enfantdialysé doit s’attacher à gérer le savant dosage consistant à tenircompte d’une maladie lourde, tout en la dédramatisant.

    Psychologie

    Etre malade, c’est aussi exister en dehors de la maladie

    BSIP

    /Edw

    idge

    frm_5886_18-19_baf 17/03/03 10:05 Page 18

  • 1919

    Adresses utiles• Coordination FranceMoelle Espoir : rue des Commandeurs,73360 Les Echelles. Tél. : 0479366127.

    • Etablissement françaisdes Greffes (EfG) : 5, rue Lacuée, 75012 Paris. Tél. : 0144675550.

    • France Adot, fédérationdes associations pour ledon d’organes et de tissushumains : BP 35, 75462 Paris Cedex 10. Tél. : 0142456340.

    • Fédération française desassociations des greffésdu cœur et des poumons(FFAGCP) : 177, rue de Charonne, 75011 Paris. Tél. : 0140099188.

    • Fédération nationaled’aide aux insuffisantsrénaux dialysés ettransplantés (FNAIR) :31, rue des Frères-Lion,31000 Toulouse. Tél. : 0561625462.

    • France Transplant,Hôpital Saint-Louis -Centre Hayem : 1, av. Claude-Vellefaux,75475 Paris Cedex 10. Tél. : 0142494810.

    • Transhépate, associationnationale des déficients ettransplantés hépatiques :6, rue de l’Aubrac,75012 Paris. Tél. : 0140190760.

    • Trans-Forme, associationfédérative française des sportifs transplantéset dialysés : 66, bd Diderot, 75012 Paris. Tél. : 0143467546.

    • Une chance pour la vueCMS de santé : rueMalbec, 31000 Toulouse.Tél. : 0561057331.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 •2 e tr imestre - avr i l 2001

    L’appel du médecin réanimateur à la surveillante coordinatricedonne le coup d’envoi d’un processusintensif d’environ seize heures pour organiser le prélèvement des organes du défunt en état de mort encéphalique. L’apparence de ce défunt – il semble encorevivant – rend particulièrementdifficile la tâche du médecincoordinateur qui doit annoncer la mort à la famille. Cette longuediscussion inaugure le processus de deuil. Ce n’est que lorsque l’idéede la mort est «acceptée» que la question du prélèvement est posée par la coordinatricehospitalière. Il s’agit strictement de rechercher l’avis du défunt sur le don de ses organes à traversle témoignage de la famille, sans faire porter le poids de cettedécision sur elle. Ces momentsdifficiles sont pris en charge par des personnes expérimentées. Par la suite, tout au long duprocessus (examens, recherche de receveurs, organisation de lavenue des équipes transplanteuses,prélèvement au bloc opératoire), la coordinatrice maintient uncontact permanent avec la famille,afin de l’informer, et de l’aider dans cette épreuve douloureuse.

    France Adot, fondée en 1969 par Jean Dausset, prix Nobel de médecine et implantée à l’hôpital Saint-Louis à Paris, regroupe 95 associations départementales de donneurs, qui ont pour objectif de promouvoir, dans le respect de l’éthique, le don d’organes, de moelle osseuse, de tissus et de cellules. Cet important réseau national lui permet d’organiser des mani-festations nationales et de coordonner des actions locales en lien étroit avec les donneurs, les associations de malades, les hôpitaux, les laboratoiresd’histocompatibilité, les établissements de transfusion, l’Etablissementfrançais des Greffes et les pouvoirs publics. La fédération délivre gratuitementune carte autorisant le don d’organes et de tissus humains.

    Solidarité

    Encourager le don éclairé

    Prélèvement

    Respecter la douleur de la famille du défunt

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    . Bur

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  • VOS DONS EN ACTIONVos dons jouent un rôle capital dans l’avancement des travaux de recherche médicale. Explorer de nouvelles pistes derecherche, multiplier les échanges entre les disciplines et les chercheurs, déceler plus précocement certaines pathologies

    graves pour mettre en place plus rapidement les traitements, découvrirla meilleure prise en charge diagnostique puis thérapeutique…, tels sont les principaux objectifs que s’est fixés la Fondation pour la Recherche Médicale en multipliant ses programmes. Cette rubrique«Vos dons en action» présente quelques exemples des 700 projets que vous soutenez chaque année à travers la Fondation.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 200120

    Microparticules vaccinales : une stratégieinnovante contre les schistosomiasesAu second rang mondial des maladies parasitairesmortelles, les schistosomiases,appelées aussi bilharzioses,sont dues à des vers (les schistosomes) qui, suivant les espèces, provoquent des lésions au niveau du foie et de la rate ou au niveau du système uro-génital. Le bilan est lourd : 200 millions de personnes infectées dans lemonde et 600 000 morts par an.Pour traiter cette affection, un médicament existe mais il coûte cher pour les pays en voie de développement et n’empêche pas la réinfection.D’où l’intérêt de mettre au pointun vaccin. A l’Institut Pasteur de Lille, l’équipe du Pr Capron et du Dr Riveau s’y emploie. Son choix s’est porté sur unetechnique innovante : l’utilisationde microparticules biodégradablespour administrer un vaccinrecombinant. Cette techniqueoffre de multiples avantages pour les pays pauvres des régionstropicales et subtropicales. Tout d’abord, les microparticulesgarantiront à tous les patients une immunité durable, sans

    qu’il soit nécessaire d’effectuerdes rappels. Ensuite, le vaccinpourra être administrésimplement par voie orale car les microparticules traversentaisément les muqueuses. «L’aidede la Fondation pour la RechercheMédicale a été très importante carc’est grâce à elle que nous avons pu

    Schistosoma mansoni est un ver parasite (larve à queue fourchue) à sexe séparé, responsable chezl’homme de la schistosomiase intestinale.

    développer la microencapsulation à Lille», explique le Dr Baras, qui a mis au point cette techniqueet qui envisage de développercette nouvelle stratégie pour un autre vaccin. Les résultats sont encourageants et «les essaiscliniques débuteront prochainement»,annonce le Dr Baras.

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 21

    BSIP

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    Crise d’épilepsie, localisée par la zone rouge.

    Contre l’épilepsie,l’autocontrôle?

    Lors de la maladie

    de Parkinson,

    la dégénérescence

    des neurones

    localisés dans la substance

    noire du cerveau est associée

    à l’apparition de difficultés

    motrices et d’un tremblement

    de repos. En temps normal,

    ces neurones libèrent dans

    le striatum voisin de la

    dopamine modulant l’activité

    d’autres neurones riches en

    récepteurs dopaminergiques.

    Chez les malades, les premiers

    symptômes apparaissent

    tardivement, un peu comme si, pendant longtemps, le cerveau

    compensait la perte neuronale. L’équipe du Dr Vincent Leviel

    (CNRS, Cermep puis ERS 2019, Lyon) cherche à savoir

    comment. Grâce à une bourse de la Fondation pour

    la Recherche Médicale, Christine Dentresangle a démontré

    dans sa thèse, que chez l’animal des destructions très localisées

    de neurones dopaminergiques provoquent dans un premier

    temps une augmentation de la dopamine autour des cellules

    réceptrices. «Il semble que le cerveau mette en place un mécanisme

    compensatoire qui débute par l’activation d’une autre voie de

    transmission, celle du glutamate», explique le Dr Leviel. Dans

    ce processus, l’activité des neurones à dopamine n’est pas

    modifiée, mais la libération de ce neuromédiateur augmente

    localement. «Or, la dopamine en excès est neurotoxique, tout

    comme le glutamate. On entrerait ainsi dans un cercle vicieux de

    compensation qui accélérerait peu à peu la dégénérescence neuronale.

    S’il était possible de suivre ces modifications métaboliques précoces chez les

    patients, on pourrait certainement améliorer leur traitement», conclut-il.

    A terme, ce travail pourrait donc contribuer au développement

    de nouvelles approches diagnostiques et thérapeutiques.

    Parmi les épilepsies, celles quitouchent le lobe temporal ducerveau sont les plus fréquentes et les plus résistantes aux traitements. «Le caractère imprévisible des crises et leurs symptômes incontrôlables affectent profondément la qualité de vie de ces patients. Il est donc important de développer des thérapies qui soientaussi fondées sur la compréhension de la physiopathologie de ces crises»,souligne le Dr Reibel Foisset, dont les travaux dans le laboratoire du Pr Marescaux à la faculté de médecinede Strasbourg (unité Inserm U.398) ont bénéficié du soutien de la Fondation pour la RechercheMédicale. La crise d’épilepsieentraîne dans l’hippocampe une augmentation de la synthèsed’un facteur de croissance neuronalenommé BDNF (brain-derivedneurotrophic factor). Les chercheursont montré qu’une perfusionintracérébrale de BDNF chez le ratralentit l’apparition des crises.* Ces effets protecteurs pourraientrésulter de l’induction par le BDNFd’une augmentation de la synthèsed’une molécule, le neuropeptide Y. Il semble donc que l’organisme tentelui-même de contrôler les crises. «La possibilité de “stimuler” de telsmécanismes constitue bien sûr un enjeuthérapeutique», explique le Dr Reibel Foisset, qui resteprudente. Nos résultats apportent unnouvel éclairage sur la physiopathologie des épilepsies du lobe temporal, préalable indispensable à la mise aupoint de nouveaux traitements.»

    Maladie de Parkinson :premiers symptômes tardifs

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    Le Dr François Leviel étudie l’activité neuronaledu cerveau dans la maladie de Parkinson.

    * Neuroscience, octobre 2000.

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 200122

    V O S D O N S E N A C T I O N

    L’athérosclérose en IRM

    Inst

    itut P

    aste

    ur

    Infarctus du myocarde, angine de poitrine et accident vasculairecérébral ont une même origine :l’athérosclérose, formation deplaques riches en lipides obstruantpeu à peu les artères. Fréquenteaprès 50 ans, l’athérosclérose estresponsable de plus de 30% desdécès dans les pays riches. Le risquede rupture des plaques et deformation de caillots dans l’artèreest déterminé par leur compositionen cellules fibroblastiques, encalcaire et en lipides. Evaluer cettecomposition in vivo permettraitde repérer les sujets à risque etde suivre l’évolution de cesplaques sous l’effet de médicamentsqui, comme les statines, diminuent leur richesse en lipides. L’imageriepar résonance magnétique (IRM),basée sur la composition en eaudes tissus, offre la meilleurerésolution et le meilleur contrasteentre lipides, fibres et calcaire.«Nous en sommes encore au stade de la recherche», explique le Dr GérardHelft, qui a pu, aidé par la Fondation pour la RechercheMédicale, se perfectionner auxEtats-Unis. De retour à l’hôpitalNecker, il précise : «Après avoirbeaucoup travaillé sur modèle animal, nous commençons à évaluer la méthode chez l’homme pour affinerles corrélations entre les images IRM et la structure histopathologique des plaques.» Pour se développer,cette technique très prometteuse,non invasive, nécessitera uneaugmentation de l’équipementfrançais en appareils d’IRM.

    Dépots lipidiques dans une artère (coupe longitudinale).

    Des antibiotiques efficacescontre la tuberculose

    En ce début de XXIe siècle, la tuberculose pose encore unproblème mondial de santé puisqu’elle touche 1,7 milliardde personnes et est responsable de 3 millions de morts par an.

    Depuis une quinzaine d’années, cette pathologie est en

    recrudescence en France et de plus en plus de souches du bacille

    tuberculeux résistent aux antibiotiques. La Fondation

    pour la Recherche Médicale a donc décidé d’apporter son soutien

    à l’équipe du Dr Daffé (laboratoire des Prs Cros et Amalric,

    Institut de pharmacologie et de biologie structurale, Toulouse),

    qui travaille au développement de nouveaux antituberculeux.

    L’isoniazide, l’un des principaux antibiotiques utilisés, empêche

    le bacille de Koch de se multiplier en entravant la construction

    de son enveloppe (une gangue protectrice). Le Dr Daffé et

    son équipe ont d’abord étudié précisément le mode d’action de

    l’isoniazide. Ils ont ainsi découvert que ce médicament bloquait

    l’activité d’une enzyme intervenant dans la synthèse d’acides

    gras, constituants essentiels de l’enveloppe. D’autres enzymes

    participent à cette synthèse et constituent donc autant de cibles

    potentielles pour de nouveaux antibiotiques. La recherche

    de ces enzymes a commencé et a déjà conduit à l’identification

    des protéines Hma (1) et MabA (2) : de nouvelles cibles pour

    développer des antituberculeux efficaces.

    1. Molecular Microbiology, janvier Issue 2, 1997. 2. Microbiology, février 2000.

    Bacille tuberculeux : comprendre sa biologie pour trouver de nouveaux antibiotiques.

    Inse

    rm

    frm_5886_20_23_baf 17/03/03 10:07 Page 22

  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 23

    Développer denouveaux agentsantibactériensResponsables d’infectionsdiverses (diarrhées, infectionsurinaires, septicémies, etc.), lesbactéries pathogènes ont un impactmajeur en santé publique et ensanté animale. «La connaissance dudialogue moléculaire qui s’installe lorsde l’interaction hôte-bactérie pathogèneest essentielle pour la maîtrise desinfections», explique le Dr Oswald,de l’équipe Pathogénie colibacillaire(UMR 960 Inra-ENVT). D’où lanécessité d’étudier les éléments clésde ce dialogue, comme certainescytotoxines bactériennes. «Notre équipe a ainsi démontré que les cytotoxines CDT sont capables de bloquer le cycle cellulaire des celluleseucaryotes (1)», indique le Dr Oswald.Les résultats de ces recherchespermettront d’élaborer de nouvellesclasses de molécules palliant les limites de la vaccination et de l’antibiothérapie classiques. Ce travail, auquel s’est associée la Fondation pour la RechercheMédicale, est d’autant plus important que l’impact des bactéries pathogènes en santépublique ne se limite pas auxinfections aiguës. «Nous sommesconvaincus que la présence dans la floreintestinale de souches produisant des toxines capables de modifier le cyclecellulaire des cellules eucaryotes a des conséquences sur la prédisposition de l’hôte à développer certains cancersou maladies inflammatoires chroniques»,conclut le Dr Oswald.

    1. Dotées d’un noyau.

    Troubles mentaux : les lésionsvasculaires cérébrales en cause

    L’imagerie par résonancemagnétique (IRM) estune technique indiquéedans le diagnostic desaffections du système nerveuxcentral. Elle permet de mettre en évidence, en particulier chez les sujets âgés, des anomaliesbaptisées «hypersignaux de la substance blanche» (HSB), dont la fréquence augmente avecl’âge. Ces anomalies seraient lamarque d’une souffrance cérébrale liée au mauvais fonctionnement des vaisseaux sanguins irriguant la substance blanche. Dès 1998, la Fondation pour la RechercheMédicale a soutenu le travail menépar Fernando Pico à l’unité InsermU.360 (hôpital Pitié-Salpêtrière),dirigée par le Dr AnnickAlpérovitch, portant sur l’étude du vieillissement artériel (EVA).

    A partir d’une cohorte de 800 sujets âgés de 65 ans à 75 ans,Fernando Pico a d’abord montréque la présence d’HSB était liée à des lésions des artères carotides. On sait aussi que, chez lespersonnes présentant un niveauélevé d’HSB, les performancescognitives sont diminuées. Dans le prolongement direct de l’étude EVA, la Fondation pourla Recherche Médicale soutientl’étude 3C, dans le cadre de sonprogramme Action RechercheSanté 2000. Cette étude porte sur 10000 sujets âgés de 65 ans etplus et 2500 IRM ont été réalisées.Objectif : déterminer la proportionde démences dues aux lésionscérébrales et identifier des groupesde sujets à haut risque, quipourraient à moyen terme être la cible d’actions de prévention.

    Fernando Pico,hôpital Pitié-Salpétrière, Paris

    Escherichia coli, bactérie parfois pathogène.

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    frm_5886_20_23_baf 17/03/03 10:07 Page 23

  • Découvrir les gènes impliquésLe syndrome de Leigh est une maladie rare (1 cas sur 40000 naissances en Europe)qui génère des lésions au niveau du thalamus et du tronc cérébral et entraîne des symptômesneurologiques mortels à brèveéchéance. La cause de cettepathologie est connue : il s’agitd’une déficience d’origine génétiquedans la production en énergie des cellules. Reste à identifier le ou les gènes responsables. C’est à ce travail que se sont attelésle docteur Catherine Godinot et ses collaborateurs du Centre degénétique moléculaire et cellulairede l’université Claude-Bernard de Lyon (UMR 5534 du CNRS).Processus fondamental pour la vie,chaque cellule produit l’énergie (ou ATP : adénosine triphosphate)dont elle a besoin pour fonctionnergrâce à des organites spécialisésdans cette tâche : les mitochondries.«Pour donner une idée de l’importancedu phénomène, on considère qu’unadulte sédentaire doit synthétiser chaque jour l’équivalent de son proprepoids d’ATP. On comprend bien qu’undéficit des capacités de synthèse d’ATP puisse entraîner des déficiences graves»,précise le docteur Godinot. A l’intérieur des mitochondries, la «chaîne de production»

    de l’ATP est assurée par différentesenzymes, parmi lesquelles la cytochrome C oxydase (COX),dont la déficience peut causer le syndrome de Leigh. L’équipe du docteur Godinot cherchele ou les gènes responsables de cette pathologie, mais les gènes«candidats» sont nombreux. En effet, l’enzyme COX est enréalité un complexe constitué de treize protéines (ou sous-unités)différentes. Trois de ces sous-unités sont codées par l’ADN de la mitochondrie – celle-ci possède, en effet, sa propre informationgénétique – tandis que les dixautres sont codées par l’ADN du noyau de la cellule. De plus,d’autres protéines servent à l’assemblage de ces sous-unités.La première étape de ce travailconsistait donc à définir la localisation – mitochondriale ou nucléaire – du gène défectueux.Répondre à cette question a étél’une des missions de KarineBuchet, qui réalisait sa thèse dans l’équipe du docteur Godinot. C’est grâce à vos dons que la Fondation pour la RechercheMédicale a permis de mener à bien ce projet. Karine Buchet a fusionné des cellules humaines ne présentant pas à l’origine dedéfaut de COX, mais dans lesquellesl’ADN mitochondrial avait étédétruit, avec des cellules de patients,débarrassées de leur ADN nucléairemais contenant l’ADN mitochondrial.Après fusion, les cellules hybridesobtenues étaient normales. Karine Buchet en a conclu quel’ADN mitochondrial du patient étaitnormal et que l’origine génétiquede la déficience était nucléaire. La localisation précise, sur le chromosome 9, du gèneincriminé a été découverte

    V O S D O N S E N A C T I O N

    24

    Syndrome de Leigh

    Maladie neuro-dégénérative, le syndrome de Leighprovoque des troublesneurologiques et moteurs qui apparaissent dans la petite enfance puis s’aggraventprogressivement,causant la mort de l’enfant quelquesannées plus tard. Le Dr Godinot et sonéquipe cherchentl’origine génétique de cette maladie.

    Régénération des cellules après introduction du gène SURF 1. De gauche à droite : cellules témoins,cellules de malade, cellules de malade après addition de SURF 1.

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

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  • Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 25

    chez des patients similaires par une équipe canadienne, dirigée par le docteur Shoubridge.L’examen attentif des gènes connusde ce chromosome a conduit ces chercheurs à suspecter le gèneSURF1, puis à prouver son implication dans le syndrome de Leigh (1). Une collaborationinternationale avec le docteurShoubridge a permis de prouver que le même gène était défectueux,chez les patients étudiés à Lyon (2). «La guérison des enfants nés avec cette maladie n’est pas encore d’actualité,déplore le docteur Godinot. Les méthodes de thérapie génique

    ont encore beaucoup de progrès à fairepour s’appliquer à des maladies aussirares que celle-ci.» Et tant qu’on neconnaîtra pas le rôle exact du gèneSURF1, les possibilités de traitementresteront limitées. Déterminer le rôle physiologique de la protéineSURF1 est par conséquent l’un des nouveaux axes de recherche. La connaissance des mutations du gène a cependant permis deréaliser un diagnostic prénatal, afinde permettre aux parents ayant eu un enfant atteint du syndromede Leigh de s’assurer que le nouvelenfant à venir n’était pas atteint.Un autre axe de recherche a déjà

    Le Dr Godinot (à droite) et ses collaborateurs, dont Karine Buchet (à gauche), s’attachent à découvrir le ou les gènes responsables de la déficience dans la production en énergie des cellules. Cette pathologie, considérée comme une maladie rare, concerne 1 cas sur 40000 naissances en Europe.

    porté ses fruits : «Depuis la découvertede SURF1, les déficiences de deux autresgènes – le gène COX10 et le gène SCO2 –ont aussi été identifiées comme respon-sables d’une déficience de l’enzyme COX.Il est très probable que la mise en évidencefuture d’autres gènes encore inconnuschez l’humain mais importantspour la biosynthèse de la COX permettra de résoudre les cas encore inexpliqués»,conclut le docteur Godinot. Les résultats attendus dans ces voiesseront autant d’atouts pourcombattre ou prévenir la maladie.

    1. Nature Genetics, décembre 1998.

    2. Human Genetics, janvier 2000.

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    frm_5886_24-25_baf 17/03/03 10:21 Page 25

  • Comme elle l’a toujours fait, la Fondation pour laRecherche Médicale sensi-bilise et rassemble les forcesvives capables de se mobiliser pourfaire face aux problèmes cruciaux de santé. Dans le cadre de sa politiqued’information, elle publiait, dès 1996,un dossier dans Recherche & Santé n° 68 et organisait une tribune pressesur le prion. En 1997, un dossier étaitmis en ligne sur son site Internet (1) etrégulièrement actualisé. Le 29 janvierdernier, elle faisait le point sur les maladies à prions au cours d’uneconférence de presse qui réunissaitprès de 60 journalistes. Fidèle à samission d’aide à la recherche, laFondation pour la RechercheMédicale lance une collecte de donset inaugure sur son site Internet lamise en place d’une collecte de donsen ligne sécurisée (1).

    ESST : encore beaucoup d’inconnues

    Les encéphalopathies subaiguësspongiformes transmissibles (ESST),maladies du système nerveux central,surviennent chez certains mammi-fères (bovins, ovins, chats, ruminantssauvages) et chez l’homme. Le Pr YvesAgid, neurologue à l’hôpital de laPitié-Salpêtrière, à Paris, définit huitcritères pour les caractériser : «Ellessont transmissibles, mais non conta-gieuses; leur incubation est longue et silen-cieuse; elles sont liées à une anomalie de laprotéine PrP; elles se traduisent par une spongiose; elles entraînent des dégé-nérescences du système nerveux central;elles évoluent vers la démence ; ellesaboutissent sans rémission à un décès;leur agent causal n’est pas connu.» Chezles bovins, l’encéphalopathie spon-

    Tribune presse

    giforme bovine, mieux connue sousl’appellation «maladie de la vachefolle», a été identifiée pour la pre-mière fois au Royaume-Uni, en 1985.Parmi toutes les hypothèses avan-cées sur son origine, aucune n’a étéconfirmée à ce jour. L’ESB pose unproblème diagnostique.

    De l’infection à la détection«Seul l’éleveur peut détecter les premierssymptômes de la maladie, se traduisantpar des troubles du comportement, difficilesà déceler lors de la visite vétérinaire antemortem à l’abattoir. La détection desformes moins caractéristiques est pluscomplexe (maladie subclinique ou à formesatypiques; lésions histologiques trop dis-crètes ou absentes entraînant des résultatsfaussement négatifs)», précise JeanneBrugère Picoux, professeur de patho-logie du bétail à l’Ecole nationalevétérinaire d’Alfort. L’agent infectieuxn’arrivant dans le cerveau que trèstardivement, un test négatif n’est pasforcément sécurisant, alors qu’un testpositif est toujours signifiant. C’estpourquoi le Pr Dominique Dormont,chercheur au CEA-CRSSA deFontenay-aux-Roses, insiste : «Toutesles autres mesures de précaution doiventêtre maintenues, d’autant que les cher-cheurs ne sont toujours pas en mesured’aider à la décision des pouvoirs publicssur la nécessité de l’abattage de troupeauxcontenant des animaux contaminés ou, aucontraire, sur l’opportunité de cibler descohortes d’âges ou de troupeaux.» Deschercheurs britanniques ont décrit, en1996, une nouvelle variante de lamaladie. L’hypothèse d’une contami-nation d’origine alimentaire par l’agentde l’ESB, bien que très probable, n’esttoujours pas formellement démontrée.Malgré une forte suspicion de l’inter-

    La Fondation pour la RechercheMédicale organisait,le 29 janvier 2001, une conférence de presse sur le thème : «Vachefolle, Creutzfeldt-Jakob : où en est la recherche sur le prion?» Autour du Pr Yves Agid, vice-président duconseil scientifique de la Fondation, la tribune réunissaitles professeursJeanne BrugèrePicoux, DominiqueDormont et Jean-Jacques Hauw,trois chercheursspécialistes du domaine.

    V O S D O N S E N A C T I O N

    26 Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001

    Les maladies à prions :que sait-on aujourd’hui?

    frm_5886_26-27_baf 17/03/03 10:22 Page 26

  • vention de la protéine PrP, la natureprécise de l’agent infectieux demeure,à l’heure actuelle, inconnue. Principalecaractéristique de la nouvelle variantede MCJ : l’accumulation, dans cer-tains tissus, de la protéine PrP, sousune isoforme pathologique – dite«prion» – résistante à laprotéinase K, enzyme quila détruit lorsqu’elle estnormale. Selon StanleyB. Prusiner, qui reçut leprix Nobel de médecineen 1997 pour les travauxmenant à cette hypothèse,la transmission de l’infec-tion passerait par de simples interac-tions directes entre protéines patho-logiques («prions») et protéines nonpathologiques (PrP). L’existence decofacteurs, non encore identifiés, estégalement suspectée. Le gène de la PrPne paraît pas en cause dans lapathogenèse des modèles animauxde maladies à prions. Cependant,la variabilité de ce gène au niveau ducodon 129 chez l’homme constitue unfacteur de susceptibilité génétique (oude protection) non encore élucidé.«Quatre grands domaines s’offrent aux

    chercheurs : l’épidémiologie descriptive etexplicative; la prévention et la mise enœuvre de moyens de dépistage; la décou-verte de la structure du prion; les traite-ments», conclut le Pr Jean-JacquesHauw, neuropathologiste à l’hôpitalde la Pitié-Salpétrière. Les études épi-

    démiologiques sont essen-tielles pour déterminer lesfacteurs de risque et lesvariations de la fréquencede la maladie. La préven-tion passe par la recherchede nouvelles techniquesdiagnostiques : mise aupoint de marqueurs biolo-

    giques de la destruction des neuronespour déterminer le stade d’évolutionde la maladie (tests de dépistage anté-cliniques), et amélioration des tech-niques de décontamination. Ladécouverte de la structure du prionvise à élucider les mécanismes de pro-gression des agents infectieux jusqu’ausystème nerveux central, ainsi que lesmécanismes de mort neuronale.Enfin, si le traitement a toujours éténégligé, c’est qu’il s’agit d’une maladierare chez l’homme, donc apparentée àune maladie orpheline. Et pourtant,

    un effort concernant les stratégies derecherche thérapeutique portant surce type de maladie ne serait pas sansretombées sur d’autres maladies neu-rodégénératives, beaucoup moinsrares et redoutées par tous, comme lamaladie d’Alzheimer. Les maladies àprions ouvrent d’importantes voies derecherche autour d’une infection quiconstitue un concept physiopatho-logique radicalement nouveau. A untournant de l’épidémie (2001-2002),le gouvernement présentait, le 24 jan-vier 2001, l’accélération des résultatscomme un objectif prioritaire. LaFondation pour la RechercheMédicale, aux côtés des pouvoirspublics, se positionne comme interve-nant pour accélérer la recherche dansles directions qui lui paraissent essen-tielles à la compréhension des méca-nismes. D’ores et déjà, la collecte dedons, spécifique pour la recherche surcette pathologie est mise en place.La Fondation actualisera mensuelle-ment le dossier présenté sur son site,grâce aux éléments fournis par leschercheurs, et Recherche & Santé s’enfera régulièrement l’écho.1. www.frm.org

    Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 86 • 2 e t r imestre - avr i l 2001 27

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    ie

    ESB (Encéphalopathie spongiforme bovine) : quatre grands domaines de recherche s’offrent aux chercheurs.

    Recherchesciblées

    pour desretombéesgénérales

    frm_5886_26-27_baf 17/03/03 10:22 Page 27

  • 28

    P O I N T D E V U E

    Olivi

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    arbœ

    uf

    Les progrès de la recherche fondamentale, particulièrement

    importants au cours des vingtdernières années, ne doivent

    pas faire oublier que la relationmédicale se nourrit également

    de parole et d’écoute entre le médecin, le malade et

    son entourage. C’est la positionque défend Edouard Zarifian,

    partisan d’une médecine autant qualitative que

    quantitative. A ses yeux, la parole est une composante

    forte de l’acte médical…

    Entretien avec EDOUARD ZARIFIAN, PROFESSEUR DE PSYCHIATRIEET DE PSYCHOLOGIE MÉDICALE À