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SAISoNS TUNISIeNNeS AU coeUr de lA MédITerrANée. AU cArrefoUr deS cIvIlISATIoNS. Janvier 2013 TUN IS

Saisons Tunisiennes, janvier 2013

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Tunis, Au coeur de la méditerrannée, au carrefour des civilisations

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SAISoNSTU N I S I e N N e S

AU coeUr de lA MédITerrANée.AU cArrefoUr deS cIvIlISATIoNS.

Janvier 2013

TUNIS

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SAISoNSTU N I S I e N N e S

c o n t a c t @ s a i s o n s t u n i s i e n n e s . c o m

Il était une fois La TunIsIe

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BoNNeANNée

2013

Avec ce sixième numéro de Saisons Tunisiennes nous bouclonsl’année 2012. Une occasion pour vous souhaiter une bonne etheureuse année 2013, une excellente santé et beaucoup desuccès dans tout ce que vous entreprendriez. C’est égalementl’occasion de souhaiter une très bonne année à la Tunisie avecun seul et unique mot d’ordre « Agissons de concert pour résou-dre rapidement tous nos problèmes ».

Dans ce numéro, nous parlerons de Tunis, qui offre une multitudede visages au voyageur qui prend le temps de la regarder et dela comprendre. Pour cela nous avons concocté un «SpécialTunis» pour mieux comprendre cette ville et son passé. Car Tunis,bien avant la révolution, a toujours été, au cœur de la Méditer-ranée, au carrefour des civilisations. Renate Fisseler vous inviteraà découvrir dans toute leur splendeur, les gorges de l’oued Seljaet Férid Boughedir vous racontera l’histoire du cinéma tunisienavec un hommage au premier cinéaste tunisien Samama Chikly.Enfin nous vous proposons une baguenaude par les ruelles de lamédina de Sfax, telle que l’a vécue Pierre Dumas en 1937.

Enfin, je ne dois pas oublier Cathy Segueu, première lectrice quiparticipe à notre nouvelle rubrique « Nos lecteurs ont du talent »,et qui a choisi le thème «Ambiances tunisiennes».

Nous vous souhaitons d’agréables moments de lecture,de détente, de découverte et d’émotions. Une bonne etheureuse année 2013, avec beaucoup de succès et surtout uneexcellente santé.

Raja Skandrani

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SPécIAl TUNIS

IMaGes De TunIsCité méditerranéenne par excellence, à la fois terrienneet maritime, austère et prodigue, pudique et charnelle,Tunis aime se draper de blanc : blancheur des maisons,des sefsaris – voiles légers que portaient jadis les femmes –des fleurs de jasmin assemblées en mechmoums - bou-quets... - répandant leur parfum dans l’air dense de l’été. La ville aime décliner aussi ses infinités de bleus : bleu duciel – clair et cristallin –, de la mer – dense et profond – etdes portes et fenêtres, pudiquement fermées mais tou-jours accueillantes, dont les peintres et les photographesont longtemps fait leur miel.

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GrANdS eSPAceS

QuaTRe phoTosVoyage à travers la Tunisiepour découvrir des hautslieux de la Tunisie. «Grandsespaces» vous conduira àTataouine pour visiter la mos-quée des sept dormants, àZaghouan pour admirerl’acqueduc romain dumême nom, le barrage del’oued Bezirk et enfin le fortde Tabarka. Bon voyage

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AU fIl deS PAGeS

À compter du mois de janvier 2013 une nouvelle rubrique« Nos lecteurs ont du talent» a été crée pour vous. Vous avez visité un endroit qui vous a particulièrement plu ?Vous avez pris des photos que vous aimeriez publier etpartager ? Saisons Tunisiennes vous réservera 4 pages, rienque pour vous et c’est gratuit. Pour en savoir plus écrivez nous sur notre page Facebookou envoyez nous un mail à [email protected]

NOS LECTEURS ONT DU TALENT

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BaGuenauDe paR LesRueLLes De La MÉDIna DesfaxSfax capitale du Sud Tunisienfut toujours une ville riche,puissante et convoitée, doncmilitaire et obligatoirementprotégée par des remparts.Ici les murs qui enserrent lacité forment un quadrilatèrede six cents mètres sur lesquatre cents. Les maisons setassent, s’enchevêtrent, lesunes sont accrochées auxremparts, les autres lancentsur la rue des balcons debois, les autres à l’alignementgénéral, empiètent avecleurs étalages sur les pas-sages. Dans ces rues étri-quées, quelle agitation.

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PATrIMoINeAQUArelle

CInÉMa TunIsIenLe cinéma tunisien est né surun terreau particulièrementfertile, celui de la cinéphilieet de l'admiration pour lesgrandes œuvres du 7ème artmondial. Dès 1922, le précur-seur du cinéma tunisien etgénial touche-à-tout, Sa-mama Chikly, auteur despremières prises de vuessous-marines et des pre-mières prises de vues aé-riennes en ballon, tournait uncours métrage de fictionsuivi en 1924 d'un moyen mé-trage "Aïn el Ghazel" deve-nant ainsi l'un des toutpremiers cinéastes "autoch-tones" du continent africain.

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récIT de voYAGe

GoRGes De seLJaDes formations rocheusesescarpées de couleurs terreet d’une beauté particu-lière encadrent la vallée sa-blonneuse. Elles forment desmurailles de plusieurs di-zaines de mètres et don-nent un aspect grandioseaux gorges. Sur les parois leseaux ont sculpté descourbes marquant lesétiages successifs du tor-rent. Au milieu un remblaisurélevé sur lequel passe lavoie ferrée traverse lesgorges sur toute leur lon-gueur,

40Copyright 2012 by SRJ Édition. Toute reproduction intégrale ou partielle, par quelqueprocédé que ce soit, faite sans le consentement écrit et préalable de l’éditeur est illiciteet constitue une contrefaçon donnant lieu à des sanctions pénales.

[email protected]

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lA MoSQUée deSSePT dorMANTS

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En arrivant à Chenini, la route contourne deux pitons rocheux où est construit ce village ber-bère. Les habitants, tous troglodytes, logeaient dans des habitations aménagées dans les pa-rois abruptes de la falaise qui leur offraient une excellente protection thermique. En dépassantle village on doit visiter cette vieille mosquée souterraine, abritant dans une première grotte, lecénotaphe d’un saint. Elle s’ouvre sur une deuxième grotte qui abriterait les tombeaux de septdormants. La légende raconte que sept frères persécutés pour leur foi chrétienne se réfugiè-rent avec leur chien dans la grotte. Ils s’endormirent pour se réveiller deux siècles plus tardavec l’avènement du christianisme sous le règne de Théodose II. Ayant témoigné du miracle,ils s’endormirent à nouveau pour l’éternité. Ce miracle étant relaté dans plusieurs écrits saints,on trouve dans plusieurs pays musulmans des grottes des sept dormants.

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l’AQUedUc de zAGhoUAN

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Pour comprendre l’aqueduc de Zaghouan, rien de mieux que la description de PierreDumas en 1937 dans son livre « La Tunisie »...... « c’est, avec quelques brisures, le long etgrandiose déroulement de l’aqueduc par lequel l’eau était amenée de Zaghouan à Car-thage. Qui dira jamais le laborieux effort déployé pour capter les sources, créer les réser-voirs et construire, sur soixante cinq kilomètres de long, cette route de l’eau triomphantequi, par le ciment et la pierre, aérienne ou souterraine, enjambe les vallées, transperce lesmontagnes, chevauche les plaines, domine les forêts d’oliviers, surplombe les jardins, pouraboutir aux cuves cyclopéennes de la capitale... Qui dira le nombre des esclaves qu’il fallutpour construire ces milliers d’arceaux qu’aucun obstacle n’arrête dans leur marche vers lebut ? L’aqueduc de Zaghouan à Carthage est un déroulement de pierres… et de volonté.»

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le BArrAGe del’oUed BezIrk

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Un vieux panneau indique la direction à prendre pour atteindre le barrage de l’ouedBezirk, qui se trouve à l’intérieur des vergers. Une petite forêt de pins surplombe le bar-rage. Entourée d’olivettes et de belles prairies, la retenue en eau forme un grand lac quien trop plein peu atteindre une superficie de 200 hectares et retenir près de six millionsde mètres cubes d’eau. Le barrage en service depuis 1959 assure l’alimentation en eaudes localités des environs de Menzel bouzelfa dont 1500 hectares destinés à la culturedes agrumes. La grande taille de l’ouvrage facilite l’observation de plusieurs oiseaux,comme la parade nuptiale des grèbes huppés. D’autres espèces peuvent être obser-vées pendant la saison d’hivernage, comme le canard colvert, le héron cendré et lemartin pêcheur.

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le forT de TABArkA

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Ce qui a toujours constitué l'importance de Tabarca, c'est la présence dans le voisinagede bancs importants de corail d’une qualité remarquable.... Autrefois le droit de pêcheappartenait aux Espagnols. Mais en 1535, Charles Quint s ‘empara de l’île et accorda, àla répartition du butin et comme prix de sa rançon, la cession de l’île à la famille génoisedes Lomellini. Charles Quint prit sur lui de fortifier et de défendre la place et construisit àcet effet la citadelle qui existe encore. Mais en 1741, lors de la guerre qui éclata entre laFrance et la Tunisie, le Bey de Tunis s’empara de l’île à son tour. Son frère, Sidi Younès, fitdétruire tous les ouvrages de défense qui y existaient, à l'exception du fort bâti parCharles Quint et relie l'île et la terre ferme par un môle, dont il n'existe plus que quelquesrestes, qui se voient sous l'eau quand la mer est calme.

le forT de TABArkA

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IMAGeS de TUNIScité méditerranéenne par excellence, à la fois terrienne et maritime, austère et prodigue,pudique et charnelle, Tunis aime se draper de blanc : blancheur des maisons, des sefsaris– voiles légers que portaient jadis les femmes –, des fleurs de jasmin assemblées enmechmoums - bouquets... - répandant leur parfum dans l’air dense de l’été. la ville aime décliner aussi ses infinités de bleus : bleu du ciel – clair et cristallin –, de lamer – dense et profond – et des portes et fenêtres, pudiquement fermées mais toujoursaccueillantes, dont les peintres et les photographes ont longtemps fait leur miel.

Par Ridha KéfiEcrivain et homme de culture. Journaliste. Il est le directeur fondateur du sited’informations « Kapitalis »

Photos: Raja Skandrani

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IMAGeS de TUNIScité méditerranéenne par excellence, à la fois terrienne et maritime, austère et prodigue,pudique et charnelle, Tunis aime se draper de blanc : blancheur des maisons, des sefsaris– voiles légers que portaient jadis les femmes –, des fleurs de jasmin assemblées enmechmoums - bouquets... - répandant leur parfum dans l’air dense de l’été. la ville aime décliner aussi ses infinités de bleus : bleu du ciel – clair et cristallin –, de lamer – dense et profond – et des portes et fenêtres, pudiquement fermées mais toujoursaccueillantes, dont les peintres et les photographes ont longtemps fait leur miel.

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Comparée jadis par un voyageur arabeà «un burnous étendu», Tunis s’étaledans la plaine, au milieu de trois lacs,comme une nuée de maisons blanchesd’où surgit, sous un ciel bleu, une multi-tude de dômes et de minarets. En re-montant vers le nord, on découvre ungrand lac, puis la mer et un golfe pro-fond. Sur ces rivages hospitaliers long-temps chantés par les poètes s’égrèneun chapelet de petites cités maritimes,paisibles, mais rieuses et bigarrées : LaGoulette, Le Kram, Carthage, Sidi BouSaïd, La Marsa et Gammarth.

Ce qui m’a toujours rendu cette ville attachante, c’est la hauteur – pour ainsi dire humaine – de sesédifices, et la diversité de leurs styles architecturaux. Et si j’aime tant y flâner, de jour comme de nuit,c’est parce qu’il suffit de passer de la vieille médina au quartier dit «européen», érigé au cours de lapremière moitié du XIXe siècle,

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Cité méditerranéenne par excellence,à la fois terrienne et maritime, austèreet prodigue, pudique et charnelle,Tunis aime se draper de blanc : blan-cheur des maisons, des sefsaris – voileslégers que portaient jadis les femmes –, des fleurs de jasmin assemblées enmechmoums (bouquets...) répandantleur parfum dans l’air dense de l’été. La ville aime décliner aussi ses infinitésde bleus : bleu du ciel – clair et cristal-lin –, de la mer – dense et profond – etdes portes et fenêtres, pudiquementfermées mais toujours accueillantes,

dont les peintres et les photographesont longtemps fait leur miel. Ancien faubourg de Carthage, dési-gnée capitale de l’Ifriqiya – l’Africaarabe – sous la dynastie des Hafsides,au XIIIe siècle, Tunis est devenue au fildes siècles un important centre decommerce entre l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique. Tour à tour punique,romaine, arabe, andalouse, otto-mane, italienne, grecque et française,elle porte la marque des peuples etdes cultures qui s’y sont brassées aucours des âges. A la fois orientale etoccidentale, arabe et méditerra-néenne, européenne et africaine, cecaractère cosmopolite lui donne unair aussi familier qu’insaisissable.

Ce qui m’a toujours rendu cette villeattachante, c’est la hauteur – pourainsi dire humaine – de ses édifices, etla diversité de leurs styles architectu-raux. Et si j’aime tant y flâner, de jourcomme de nuit, c’est parce qu’il suffitde passer de la vieille médina auquartier dit «européen», érigé au coursde la première moitié du XIXe siècle,du centre-ville historique aux cités bal-néaires de la banlieue nord, desBerges du Lac, nouveau centre d’af-faires et de loisirs, aux quartiers résiden-tiels d’El-Menzah, El-Manar et Ennasr,pour... changer carrément d’atmo-sphère, de sensations voire d’époque.

La médina, où je suis né, est le noyauautour duquel la ville s’est développéeau fil des ans. Elle reste donc, pourmoi, comme pour la plupart des Tuni-sois, le principal repère : le centre d’oùtout part et où tout converge. J’y re-viens toujours, surtout après chaquevoyage à l’étranger. Car j’ai besoin de

Ce qui m’a toujours rendu cette ville attachante, c’est la hauteur – pour ainsi dire humaine – de sesédifices, et la diversité de leurs styles architecturaux. Et si j’aime tant y flâner, de jour comme de nuit,c’est parce qu’il suffit de passer de la vieille médina au quartier dit «européen», érigé au cours de lapremière moitié du XIXe siècle,

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m’y ressourcer, humer les odeurs quiémanent de ses échoppes, écouter lebruissement de ses vieilles pierres etme perdre dans ses venelles ombra-gées et sinueuses qui n’en finissent pasde se dérober derrière des murs badi-geonnés à la chaux blanches et de gi-gantesques portes cloutées. Les vieux souvenirs se mettent alors àflotter à la surface de la mémoire : desvisages, des noms, des mots, des cris,des chuchotements... Et mille et unehistoires d’un temps révolu, mais ja-mais vraiment perdu : maris trompés,

Inscrite par l’Unesco dans la liste du patrimoine de l’humanité, cette vieille cité doit sa renaissanceactuelle à l’Association de sauvegarde de la Médina (ASM), organisme créé en 1967, qui veille à larestauration des palais, médersas et vieilles demeures des familles bourgeoises (appelées beldis), à lapréservation de leur architecture traditionnelle et à leur réaffectation à des activités nouvelles.

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épouses volages, notables ruinés,amours désespérées, querelles futiles... J’entends aussi, comme autantd’échos incertains, les chants mélo-dieux des muezzins, des garbagi (por-teurs d’eau), des vendeurs de gilate(en italien : gelatte, glaces) poussantleurs vieilles carrioles poussives, desrobba vequia, collecteurs de vête-ments usagés... Et puis, les hurlementsstridents des taggazas (diseuses debonnes aventures), reconnaissables àleurs peaux brûlées par le soleil, leursvisages creusés par de profonds sillons,

leurs mélias (robe paysanne) riche-ment colorées et, surtout, leur patoisqui fleure bon l’arrière pays. Et je vois, comme dans un rêve éveillé,cet enfant que je fus, il y a si long-temps, se silhouettant dans la pénom-bre, vêtu d’un pantalon court et d’untablier bleu taché d’encre, un carta-ble usé sur le dos, qui avance difficile-ment sous son fardeau, puis disparaîtau tournant d’une ruelle, anonymemais heureux.

La médina, «ma» médina, que j’ai dûquitter, un jour, comme tant d’autresTunisois, pour aller vivre dans quelquenouveau quartier résidentiel à lamode, l’ai-je jamais vraiment jamaisabandonnée ? Non, bien sûr, car je necesse d’y retourner. Et d’apprécier sajeunesse éternelle. Inscrite par l’Unesco dans la liste dupatrimoine de l’humanité, cette vieillecité doit sa renaissance actuelle àl’Association de sauvegarde de la Mé-dina (ASM), organisme créé en 1967,qui veille à la restauration des palais,médersas et vieilles demeures des fa-milles bourgeoises (appelées beldis), àla préservation de leur architecturetraditionnelle et à leur réaffectation àdes activités nouvelles. Parmi les réussites de cet organisme, jeciterai Dar Lasram qui a été baptisée,en 1974, Club culturel Tahar Haddad,en hommage à un penseur réformistedu début du XXe siècle, Dar Khaïred-dine Pacha (XIXe), transformée enMusée d’art moderne, Dar Bouder-bala, devenue Galerie Médina, un es-pace d’exposition artistique, lemausolée de Sidi Qacem Jelizi (XVe),converti en musée de céramique tuni-sienne et en Centre national de la cé-

Inscrite par l’Unesco dans la liste du patrimoine de l’humanité, cette vieille cité doit sa renaissanceactuelle à l’Association de sauvegarde de la Médina (ASM), organisme créé en 1967, qui veille à larestauration des palais, médersas et vieilles demeures des familles bourgeoises (appelées beldis), à lapréservation de leur architecture traditionnelle et à leur réaffectation à des activités nouvelles.

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ramique artistique, sans oublier le pa-lais de Mustapha Khaznadar, sur laplace Halfaouine, qui abrite le siègedu Théâtre national tunisien, ainsiqu’un studio de danse et une salled’entraînement de l’École de cirqueartistique.

L’autre Tunis, la ville dite «euro-péenne», construite au cours de lapremière moitié du XXe siècle dans unstyle architectural rococo et Art-Déco,n’est pas moins attachante. Avec sonterre-plein central, planté de ficus,

L’autre Tunis, la ville dite «européenne», construite au cours de la première moitié du XXe siècle dans unstyle architectural rococo et Art-Déco, n’est pas moins attachante. Avec son terre-plein central, plantéde ficus, l’avenue Habib Bourguiba, «L’Avenue» pour les intimes, offre une belle aire de promenade. Sesinnombrables cafés sont dotés de terrasses ombragées et de tables et chaises en rotin.

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l’avenue Habib Bourguiba, «L’Avenue»pour les intimes, offre une belle aire depromenade. Ses innombrables cafés(Paris, Africa, Champs Elysées, L’Uni-vers...) sont dotés de terrasses ombra-gées et de tables et chaises en rotin.J’aime m’y attabler, à toute heure dela journée, indifférent au mouvementincessant des voitures et aux cris despassants, pour lire un journal en siro-tant un thé. Avec ses librairies, salles decinéma, restaurants fast food et gale-ries commerciales, Dans cette partiede la ville, considérée aussi comme le

centre-ville historique, on rencontreplusieurs édifices entièrement dédiés àla culture, comme le Théâtre de laville, une «bonbonnière» érigé audébut du XXe siècle et conçu par l’ar-chitecte Resplandy. Restauré et dotésd’équipements modernes, ce joyaud’architecture dite «coloniale» resteencore le principal pôle d’attractionculturel de la capitale. Autres édificesculturels : El-Hamra, vieille salle de ci-néma à l’architecture délicieusementsurannée, aménagée en théâtre depoche, El-Téatro, ouvert dans une ailede l’hôtel El-Mechtel, l’Étoile du nord,espace polyvalent construit au milieud’un hangar abandonné, ou encorele Quatrième art, ancien cinéma LeParis, sur la rue du même nom, trans-formé en salle de représentation théâ-trale... J’ai gardé d’inoubliables souvenirs :premières amours, premières fugues,premières lectures littéraires, premierspoèmes dédiés à la médina et à sesnuits étoilées...

Cela me fait penser à une amie sy-rienne, qui me dit, un jour, à propos deTunis et de sa banlieue, en me priantde le prendre pour un éloge : «Cetteville est étonnante. Elle n’a rien d’unemétropole en pleine expansion éco-nomique, où vivent deux millionsd’âmes. Elle ressemble plutôt à ungrand village de vacances». «Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?», deman-dais-je, incrédule. Sa réponse fut aussivague que lumineuse : «Je suis fasci-née par la démarche insouciante desgens. Ils rayonnent d’une joie de vivreque je ne trouve dans aucune autrecapitale arabe».

L’autre Tunis, la ville dite «européenne», construite au cours de la première moitié du XXe siècle dans unstyle architectural rococo et Art-Déco, n’est pas moins attachante. Avec son terre-plein central, plantéde ficus, l’avenue Habib Bourguiba, «L’Avenue» pour les intimes, offre une belle aire de promenade. Sesinnombrables cafés sont dotés de terrasses ombragées et de tables et chaises en rotin.

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À l’instar de son antique voisine Carthage, Tunis a été fondée par des navigateurs puniques au IXème siècle av. J.-C.Toutefois, bien avant la fondation de ce comptoir phénicien, quelques Berbères vivent déjà sur cette petite colline d’ar-gile et de sable cernée par deux lacs, El Bahira, “ la petite mer “, et la Sebkhet Sedjoumi. La plus vieille évocation deThunes se trouve d’ailleurs dans un écrit du IVème siècle av. J.-C., mentionnant les allées et venues de commerçants etde navigateurs. Durant des siècles, Tunis vit aux côtés de la toute puissante Carthage sans véritablement lui faire del’ombre. Même la destruction de la capitale punique en 146 av. J.-C. ne l’autorise pas à prétendre à un autre rôle quecelui de banlieue de la nouvelle Carthage romaine.

Il était une fois TUNISAu coeur de la Méditerrannée, au carrefour des civilisations.

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À l’instar de son antique voisine Carthage, Tunis a été fondée par des navigateurs puniques au IXème siècle av. J.-C.Toutefois, bien avant la fondation de ce comptoir phénicien, quelques Berbères vivent déjà sur cette petite colline d’ar-gile et de sable cernée par deux lacs, El Bahira, “ la petite mer “, et la Sebkhet Sedjoumi. La plus vieille évocation deThunes se trouve d’ailleurs dans un écrit du IVème siècle av. J.-C., mentionnant les allées et venues de commerçants etde navigateurs. Durant des siècles, Tunis vit aux côtés de la toute puissante Carthage sans véritablement lui faire del’ombre. Même la destruction de la capitale punique en 146 av. J.-C. ne l’autorise pas à prétendre à un autre rôle quecelui de banlieue de la nouvelle Carthage romaine.

Il était une fois TUNIS

Textes extraits deTunis & EnvironsSRJ Edition Tunis 1999

Au coeur de la Méditerrannée, au carrefour des civilisations.

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Avec la construction de la mosquée Ez-Zitouna, la mosquée de l’olivier, en 732, la médina s’étend, mul-tipliant les ruelles, introduisant de nouvelles corporations dans les souks. Un pôle économique vient se-conder la vocation militaire de la ville.

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Avec la construction de la mosquée Ez-Zitouna, la mosquée de l’olivier, en 732, la médina s’étend, mul-tipliant les ruelles, introduisant de nouvelles corporations dans les souks. Un pôle économique vient se-conder la vocation militaire de la ville.

quelle les troupes arabes partent à laconquête de la Méditerranée occidentaleet surtout de l’Europe. Il s’agit alors d’uncamp militaire protégé par une série deremparts au sein desquels la ville peut sedévelopper sans crainte. Avec la construction de la mosquée Ez-Zi-touna, la mosquée de l’olivier, en 732, lamédina s’étend, multipliant les ruelles, in-troduisant de nouvelles corporations dansles souks. Un pôle économique vient se-conder la vocation militaire de la ville. Du-rant le règne des Aghlabides (800 - 909),qui font de Kairouan leur capitale, les Tuni-sois se révoltent à maintes reprises contreces occupants. En dépit de cette agitationpolitique, Tunis poursuit son développe-ment économique, notamment après laconquête de la Sicile par les Arabes en827. Elle devient une ville commerçanteprospère.

Sous les Fatimides (909 - 1171), elle n’esttoujours pas capitale, un rang qui revientalors à Mahdia, mais son rôle politiqued’opposition au pouvoir en place s’intensi-fie à partir de 944, avec le soulèvementdes Kharedjites, une secte islamique em-menée par Abou Yazid, surnommé “l’homme à l’âne “ et promettant aux pau-vres le règne de la justice. Celui-ci parvientà détruire la ville et menace même la ca-pitale, Mahdia. Sidi Mahrez (949 - 1022), au-jourd’hui reconnu comme le saint patronde Tunis, se charge de la reconstruction dela ville. C’est également sous ses directivesque les Juifs, interdits de séjour, la nuit, ausein de la médina, sont autorisés à s’instal-ler dans le quartier de la Hara.

Au XIème siècle, Abdelhaq Ibn Khurasanfonde la dynastie des Beni Khurasan, quirègne de 1054 à 1160. Tunis est alors décritepar le voyageur El Bakin comme un foyerde rayonnement religieux et éducatif

Ce n’est qu’avec l’invasion arabe auVIIème siècle de notre ère, qu’elle com-mence à prendre un certain essor. Pour desraisons de stratégie sécuritaire, les nou-veaux conquérants la préfèrent à Car-thage pour la construction d’un port etd’un arsenal. Ainsi, en 711, un canal estcreusé entre Radès et Tunis pour permettreaux bateaux de jeter l’ancre à l’abrid’éventuelles attaques. Tunis devient uneimportante base militaire à partir de la-

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A partir de 1159, la région tombe sous la coupe d’Abd El Mumin qui, avec ses 100 000 soldats et ses 70bateaux de guerre, parvient à conquérir Tunis qu’il intègre à l’empire des princes almohades de Marra-kech. A Tunis, grâce à leur butin de guerre, les Almohades font ériger une Kasbah

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grâce aux enseignements dispensés ausein de la Zitouna et de ses innombrablesmosquées. Cette prospérité prend mal-heureusement fin avec le déferlement deshordes nomades arabes des Beni Hilal, des-cendues de Haute Egypte. En ces périodestroubles, le commerce décline mais l’acti-vité portuaire ne cesse pas pour autant etles échanges avec les pays du Nord de laMéditerranée continuent de se dévelop-per. A partir de 1159, la région tombe sous

la coupe d’Abd El Mumin qui, avec ses 100000 soldats et ses 70 bateaux de guerre,parvient à conquérir Tunis qu’il intègre àl’immense empire des princes berbères al-mohades de Marrakech (1152 - 1228), quis’étend de l’Atlantique à l’Est de l’actuelleLibye. A Tunis, grâce à leur butin de guerre,les Almohades font ériger une Kasbah,c’est-à-dire une citadelle, en haut des rem-parts ouest de la médina. La Kasbah de-vient le siège du pouvoir almohade. Avecla construction d’une mosquée à proxi-mité, se constitue une ville haute, le makh-zen, réservé au pouvoir en place, tandisque la ville basse, celle des petits métiers,abrite toujours l’artisanat et le commerce.Tunis accède au rang de capitale.

En 1228, le gouverneur Abou Zakkariya ElHafsi profite des pleins pouvoirs octroyéspar le calife El Nasir et de la déliquescencedu pouvoir central pour s’émanciper del’Empire almohade et fonder sa propre dy-nastie. Les Hafsides conservent Tuniscomme capitale administrative et résiden-tielle. Trois siècles durant, de 1228 à 1574, laville connaît un véritable âge d’or. En dépitdes adversaires de l’extérieur comme del’intérieur qui menacent sans cesse la sta-bilité du régime dans la première moitié duXIVème siècle, l’essor culturel et écono-mique de la ville s’avère l’un des plus im-portants qu’ait jamais connu Tunis au coursde son histoire. Le port, fréquenté par unepléiade de négociants tant chrétiens quemusulmans, compte alors parmi les pluspuissants de la Méditerranée. La médinaremplit avec un succès croissant sa doublefonction religieuse et économique, consti-tuée autour de la mosquée Ez-Zitouna etdes souks. Ces derniers s’organisent selondifférentes corporations, établissant entreelles une hiérarchie de valeurs : les produitsnobles, parfums, étoffes, bougies ou bijouxont leur place aux alentours de la mos-

A partir de 1159, la région tombe sous la coupe d’Abd El Mumin qui, avec ses 100 000 soldats et ses 70bateaux de guerre, parvient à conquérir Tunis qu’il intègre à l’empire des princes almohades de Marra-kech. A Tunis, grâce à leur butin de guerre, les Almohades font ériger une Kasbah

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quée tandis que les activités plus pol-luantes comme la tannerie ou la teinture-rie, aux effluves pestilentielles, sont rejetéesaux portes de la ville. Les commerçants dela médina ne se bornent plus à la seulevente de leurs produits mais commencentégalement à les produire sur place, au seinde minuscules ateliers encastrés dans ledédale des ruelles. Par ailleurs, cette pros-périté économique favorise, à partir duXIIIème siècle, les constructions à l’extérieurde la médina qui se sent désormais trop àl’étroit dans son enceinte d’origine. De1317 à 1350, les remparts de la ville sontmaintes fois repoussés et d’autres portessont construites, ouvrant sur de nouveauxfaubourgs comme Bab Souika ou Bab Dje-zira. Entre le XIIIème et le XVIème siècle, lapopulation de Tunis passe de 20 000 à 60000 habitants. Parmi eux, les musulmansandalous et les juifs chassés d’Espagne,trouvent refuge dans tout le Maghreb, etnotamment à Tunis où cette élite lettréeapporte un nouveau souffle au rayonne-ment culturel et artistique de la ville. Demême, nombre de commerçants italienset français s’installent dans le quartier francà proximité de Bab el Bhar, la porte de lamer, dopant un peu plus encore le négoceet la banque.

Tunis, ville commerçante prospère, offre àla Tunisie, une position stratégique au seindu bassin méditerranéen, faisant de cepays un enjeu de taille dans la lutte entreTurcs et Espagnols pour la maîtrise de la ré-gion et de ses eaux. En proie à des convoi-tises venues de toute part, la ville sombrepeu à peu dans un lent déclin avant des’enfoncer dans un marasme économiquesans précédent. La piraterie, à la solde desdifférents souverains étrangers, s’y déve-loppe. Ainsi, le redoutable corsaire levan-tin, Khereddine Barberousse (1474 - 1546),

agissant pour le compte du sultan otto-man, Moulay Hassan, déferle sur Tunis en1534 après avoir conquis au Nord, Bizerteet La Goulette. Contrarié par l’avancée deson ennemi ottoman, Charles Quint, roid’Espagne, déploie une armée de 30 000hommes, renforcée par 400 navires deguerre, pour reconquérir Tunis. C’est chosefaite le 14 juillet 1535. Après avoir pillé laville, les Espagnols passent une alliance de

Les commerçants de la médina ne se bornent plus à la seule vente de leurs produits mais com-mencent également à les produire sur place. Cette prospérité économique favorise les

constructions à l’extérieur de la médina qui se sent trop à l’étroit dans son enceinte d’origine.

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Les commerçants de la médina ne se bornent plus à la seule vente de leurs produits mais com-mencent également à les produire sur place. Cette prospérité économique favorise les

constructions à l’extérieur de la médina qui se sent trop à l’étroit dans son enceinte d’origine.

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En 1612, après bon nombre de révolutions de palais, Osni Mourad, un chrétien d’origine corse convertià l’islam, devient bey de Tunis, c’est-à-dire souverain vassal du sultan. Il fonde ainsi la dynastie des Mou-radites qui va régner sur le pays durant trois quarts de siècle, avant d’être renversée, en 1705, par uncomplot militaire emmené par Hussein Ben Ali.

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En 1612, après bon nombre de révolutions de palais, Osni Mourad, un chrétien d’origine corse convertià l’islam, devient bey de Tunis, c’est-à-dire souverain vassal du sultan. Il fonde ainsi la dynastie des Mou-radites qui va régner sur le pays durant trois quarts de siècle, avant d’être renversée, en 1705, par uncomplot militaire emmené par Hussein Ben Ali.

sous les efforts conjugués des forces otto-manes d’Alger, de Tripoli et d’Orient, par-viennent à les chasser de La Goulette. LaTunisie est intégrée à l’Empire ottomanmais sa capitale est à reconstruire. Sesremparts sont détruits ; ses souks et ses bâ-timents administratifs et religieux très en-dommagés. Le nouveau régime turc, sousla conduite d’un pacha nommé par le sul-tan ottoman, s’attelle à la reconstructionde la ville : remparts, mosquées, médersassont restaurés dans le respect de l’héritagehafside. Quant à l’influence ottomane, elles’exprime tout au long des XVIIème etXVIIIème siècles, à travers l’édification denouveaux édifices religieux : les mosquéesYoussef Dey et Hammouda Pacha témoi-gnent toujours de la présence turque àTunis, présence trois fois séculaire.

En 1612, après bon nombre de révolutionsde palais, Osni Mourad, un chrétien d’ori-gine corse converti à l’islam, devient beyde Tunis, c’est-à-dire souverain vassal dusultan. Il fonde ainsi la dynastie des Moura-dites qui va régner sur le pays durant troisquarts de siècle, avant d’être renversée,en 1705, par un complot militaire emmenépar Hussein Ben Ali. Instaurant la monarchiehéréditaire, ce dernier s’assure la pérennitédu pouvoir et fonde la dynastie des Hussei-nides qui régnera jusqu’à l’avènement dela République, en 1957.

Cette stabilité politique, même si elle n’estpas exempte de querelles successorales,profite à l’extension de la capitale. Tout aulong du XIXème siècle, de nouveaux quar-tiers se constituent à l’extérieur des rem-parts de la médina, à proximité de Bab elBhar. Ceci grâce notamment à la possibi-lité qu’offre aux étrangers la Constitutionde 1861 d’acquérir des propriétés fon-cières. Cette disposition légale représentel’acte de naissance d’une ville nouvelle à

circonstance avec Moulay Hassan qu’ils ré-tablissent dans ses droits, se contentantpour eux-mêmes, de faire de La Goulette,une garnison leur permettant de contrôlercette partie de la Méditerranée. Ils agran-dissent le port construit par Barberousse ettrente années durant, l’exploitent à la foismilitairement et commercialement.

Mais en 1574, les Espagnols cèdent défini-tivement la place à leurs rivaux Turcs qui,

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Sous l’influence de réformateurs comme Mustapha Khazhadar et Khereddine Pacha, une refonte dusystème fiscal et administratif est entreprise. Parallèlement, un nouveau système éducatif est mis enplace. En 1842, l’université de la Zitouna obtient le statut de centre éducatif tandis qu’en 1875, estfondé le collège Sadiki.

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Sous l’influence de réformateurs comme Mustapha Khazhadar et Khereddine Pacha, une refonte dusystème fiscal et administratif est entreprise. Parallèlement, un nouveau système éducatif est mis enplace. En 1842, l’université de la Zitouna obtient le statut de centre éducatif tandis qu’en 1875, estfondé le collège Sadiki.

fonte du système fiscal et administratifest entreprise. Parallèlement, un nou-veau système éducatif est mis enplace. En 1842, l’université de la Zitounaobtient le statut de centre éducatif tan-dis qu’en 1875, est fondé le collège Sa-diki. Cependant, les réformes ne suffisentpas à endiguer la dette extérieure dupays. La France, qui s’intéresse de plusen plus à la Tunisie, ne cherche qu’unprétexte pour forcer Sadok Bey à pla-cer son pays sous son protectorat. JulesFerry, alors président du Conseil, saisitl’occasion de quelques échauffouréesà la frontière algérienne, pour intervenirmilitairement en Tunisie. Et le 12 mai1881, Sadok Bey signe le traité du Bardoqui place la Tunisie sous protectoratfrançais. La souveraineté beylicale estmaintenue.

L’arrivée à Tunis de la nouvelle adminis-tration et de ses représentants a delourdes conséquences sur la vie écono-mique de la cité. La concurrence crois-sante des produits manufacturéseuropéens conduit à la faillite de l’arti-sanat local tandis que l’augmentationnon maîtrisée des impôts appauvrit lapopulation citadine. En cela, l’exemplele plus significatif concerne la produc-tion de chéchias, ces calottes de feutrerouge portées par l’élite tunisoise.Fuyant les persécutions, les immigrésd’Andalousie avaient apporté aveceux leur savoir-faire, fondant à Tunis dèsle XVIIème siècle, l’une des plus vieillesindustries du pays. En cette fin deXIXème, la ville compte près de 1 000ateliers employant plus de 15 000 ou-vriers. La production atteint facilementun million de chéchias par an, dont laplus grosse partie est exportée en di-

l’architecture européenne, un boule-versement ressenti jusque dans la ges-tion même de la cité. En 1858, Tunisobtient en effet sa propre administra-tion dont le premier objectif est d’en-gager une réforme des financespermettant l’élaboration d’une infra-structure de la ville. Sous l’influence deréformateurs comme Mustapha Khaz-hadar et Khereddine Pacha, une re-

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rection de l’Empire ottoman, du Maroc etde l’Afrique. Mais la concurrence engen-drée par la production industrielle euro-péenne, qui fournit des chéchias àmoindre coût, provoque la faillite de cetteactivité jadis florissante. Ainsi débute le lentet progressif déclin de l’activité écono-mique de la médina alors que parallèle-ment, se développe celle de la nouvelleville européenne.

La France, qui s’intéresse de plus en plus à la Tunisie, ne cherche qu’un prétexte pour forcer Sadok Bey àplacer son pays sous son protectorat. Jules Ferry, alors président du Conseil, saisit l’occasion de quelques

échauffourées à la frontière algérienne, pour intervenir militairement en Tunisie. Et le 12 mai 1881, Sadok Beysigne le traité du Bardo qui place la Tunisie sous protectorat français. La souveraineté beylicale est maintenue.

UNE HISTOIRE MILLÉNAIRE

IVème siècle av. J.C. Première évocation de Thunès dans unécrit mentionnant les allées et venues decommerçants et de navigateurs.

VIIème siècle de notre èreConquête arabe et extension de l’islam.

711Creusement du canal entre Radès etTunis.

732 Construction de la mosquée Ez-Zitouna.

944Soulèvement des KharedjitesDestruction de Tunis.

968Reconstruction de Tunis par Sidi Mehrez,saint patron de Tunis.

1159Occupation de Tunis par les AlmohadesConstruction de la Kasbah

1228 – 1574Règne des Hafsides, la capitale connaîtun véritable âge d’or.

1574 – 1612Tunis est rattachée à l’empire ottoman.

1612 – 1705Règne des Mouradites.

1705 – 1956Règne des Husseinites avec protectoratfrançais à partir de 1881.

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Face à ce dualisme, le XXème siècle voitTunis devenir le centre de la contestationnationaliste menée par des per-sonnalitéscomme Béchir Sfar, Ali Bach Hamba, AliThaâlbi ou Habib Bourguiba qui deviendrale premier président de la République tuni-sienne. Agissant de concert au sein du partides Jeunes Tunisiens, créé en 1907, ils ini-tient les grandes manifestations de 1930 et1938 et celles des années cinquante. C’est

également à Tunis que le juriste Tahar Had-dad, formé à l’université de la Zitouna, dé-veloppe sa thèse sur l’égalité des sexesdans la société arabo-musulmane.

Avec l’Indépendance du pays en 1956 etla proclamation de la République l’annéesuivante, Tunis maintient le rôle tenu jusquelà, celui de la capitale à la fois politique,économique et culturelle de la Tunisie.

La France, qui s’intéresse de plus en plus à la Tunisie, ne cherche qu’un prétexte pour forcer Sadok Bey àplacer son pays sous son protectorat. Jules Ferry, alors président du Conseil, saisit l’occasion de quelques

échauffourées à la frontière algérienne, pour intervenir militairement en Tunisie. Et le 12 mai 1881, Sadok Beysigne le traité du Bardo qui place la Tunisie sous protectorat français. La souveraineté beylicale est maintenue.

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Baguenaude par les ruelles de la MédINA de SfAx

Sfax capitale du Sud Tunisien fut toujours comme Fez capitale du Nord Marocain, uneville riche, puissante et convoitée, donc militaire et obligatoirement protégée par desremparts. Ici les murs qui enserrent la cité forment un quadrilatère de six cents mètressur les quatre cents. Les maisons se tassent, s’enchevêtrent, les unes sont accrochéesaux remparts, dominés par un mur de ronde, les autres lancent sur la rue des balconsde bois, les autres à l’alignement général, empiètent avec leurs étalages sur les pas-sages. Dans ces rues étriquées, quelle agitation.

AQUArelle

Aquarelles Shigéo KawakamiArchitecte, Photographe et aquarelliste.Shigéo vit entre Tokyo et Tunis.

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Baguenaude par les ruelles de la MédINA de SfAx

Sfax capitale du Sud Tunisien fut toujours comme Fez capitale du Nord Marocain, uneville riche, puissante et convoitée, donc militaire et obligatoirement protégée par desremparts. Ici les murs qui enserrent la cité forment un quadrilatère de six cents mètressur les quatre cents. Les maisons se tassent, s’enchevêtrent, les unes sont accrochéesaux remparts, dominés par un mur de ronde, les autres lancent sur la rue des balconsde bois, les autres à l’alignement général, empiètent avec leurs étalages sur les pas-sages. Dans ces rues étriquées, quelle agitation.

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AQUArelle

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Acheteurs et vendeurs s’en vont à tra-vers les souks paraissant indifférents.Durant une demi-heure ou une heure,ils tournent, retournent, causent avecdes amis, ce qui leur donne le tempsde réfléchir. Enfin, fatigués, ils achètentou cèdent la marchandise. Bijoux,étoffes, comestibles, réveille-matin dé-traqués et inutilisables, vieux tambours,lunettes à un seul verre… tout est envente et les mérites des choses les plusextraordinaires sont chantés et prônéspour les passants.

Mais à côté de ces hurleurs, voici, plussérieux, les artisans groupés par rues etpar corporations. Sfax fournit lesétoffes, les bijoux, les ustensiles de mé-nage à tout le bled voisin. Combiencurieuse est la rue aux étoffes, installéesous des arceaux très hauts et trèsblancs…et ce souk des teinturiers où,par milliers, pendent sur des bambousles étoffes les plus diverses de forme etde couleur…

Et ce marché qui, bien qu’installé enplein air devant la grande mosquéeembaume tout le quartier : le souk auparfum. Plus de cinquante marchandssont installés sur une petite plate-formeélevée d’un mètre au-dessus du sol.Accroupis devant leur éventaire, ilsproclament les qualités de leurs par-fums. L’un s’est spécialisé dans les es-sences de la lointaine Arabie, un autredans les senteurs de la région, un autredans les parfums de France. Je vois,étalés sur un petit tapis, les flacons lesplus chers…Je me hasarde à flairer.Merveille, je reconnais effectivementl’odeur qui m’a obsédé dans le Sud Tu-nisien, faite de plantes agrestes, de la-vande, de thym avec quelque chosede fauve, d’inédit, d’inimitable.

Pierre Dumas. La Tunisie 1937

Sfax, cette ville européenne bien ca-ractéristique par son plan et ses bellesconstructions, cette ville joyeuse et sianimée n’est pas la vraie capitale dusud. La vraie, c’est sa médina trépi-dante de vie et concentrée derrièrede vieilles murailles du VIIIe ou IXe siè-cle. Tout me rappelle la ville des sultansmarocains : souks bruyants, querelle devendeurs, chansons des enfants, pho-nographes nasillards et puissants. Ce-pendant le cri général qui, à Fez est «Balek…Balek … » destiné à faire écar-ter les passants, devient ici plus poli,moins impératif avec les « Barra Sidi…Barra ». L’architecture aussi diffère. ÀSfax, elle est moins austère, moins fa-rouche qu’à Fez. Les mosquées sontmoins sombres, plus ouvertes au re-gard. Les portes des maisons sont moinsdéfendues …. Mais l’ensemble, dansles deux villes, est le même…Grouille-ments, odeurs, enchères hurlantes,tractations clandestines.

Ce matin, au nouveau marché, j’ai as-sisté à la vente du poisson. À l’intérieur,la vente officielle est banale mais àl’extérieur, la vente locale est réelle-ment typique. Il y a trente ou quarantehommes alignés qui gesticulent au mi-lieu d’une énorme assistance. Leur va-carme et leurs cris rappellent ceux dela bourse de Paris, mais ici, bien en-tendu, tout est plus simple, plus com-préhensible, plus populaire. La hausseet la baisse des valeurs, c’est à dire dupoisson est le résultat de la pêche.

Après la vente du poisson qui a lieu lematin, les enchères continuent dans lessouks au cours de l’après-midi, surtoutle vendredi. La criée sévit en perma-nence. N’importe qui vend n’importequoi, en hurlant. Voici un vieil hommequi met à prix un magnifique diadèmede femme. Tout à côté et avec lemême sérieux, un enfant vend d’occa-sion quatre petites boîtes de sauce to-mate. Plus loin un jeune homme liquideun burnous.

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cArNeT de roUTe

leS GorGeS deSeljA

Par Renate Fisseler Historienne. Enseignante d’allemand et decivilisation allemande. Elle réalise des re-portages pour des revues allemandes etplus particulièrement pour le quotidienberlinois die “Tageszeitung”.

Reportage photos Raja Skandrani

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Des formations rocheuses escarpées de couleurs terreet d’une beauté particulière encadrent la vallée sa-blonneuse. Elles forment des murailles de plusieurs di-zaines de mètres et donnent un aspect grandiose auxgorges. Sur les parois les eaux ont sculpté des courbesmarquant les étiages successifs du torrent. Au milieuun remblai surélevé sur lequel passe la voie ferrée tra-verse les gorges sur toute leur longueur,

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récIT de voYAGe

Il fait assez chaud ce matin et la météo annonce une température en-core plus élevée au courant de la journée. Nous traversons rapidementla ville minière de Metlaoui en direction de Tozeur. La route, qui longeles usines de traitement de phosphates et ses longues bandes transpor-teuses qui mènent aux stations de lavage, est encombrée par le va etvient incessant d’énormes camions. Quelques minutes plus tard nousquittons le tumulte de la ville encore enveloppée par un immensenuage de poussière pour un paysage de montagnes arides parseméesde quelques touffes d’alfa, de romarins et d’oliviers sauvages. La routes’enfonce tout droit dans la steppe. Une dizaine de kilomètres plus loin,nous nous engageons sur une route à droite qui nous indique lesGorges de Selja à 5 kilomètres.

Au beau milieu d’un paysage de couleur ocre nous apercevons unemaisonnette blanchie à la chaux. Un homme moustachu et corpulentd’une cinquantaine d’années en sort et nous fait signe d’avancer la

ll fait assez chaud ce matin et la météo annonce une température encore plus élevée au courant de la journée. Noustraversons la ville minière de Metlaoui en direction de Tozeur. La route, qui longe les usines de traitement de phos-phates avec ses longuescombrée par le va et vient incessant d’énormes camions.

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voiture encore quelques mètres dans sa direction puis nous somme denous arrêter. D’une voix forte et, me semble-t-il, un peu trop joviale, ilnous salue. Et puis soudain un flot de paroles s’abat sur nous. En arabeentrecoupé de français, il me demande d’où je viens, si je comprendsun peu le français, et s’étonne de me voir parler même un peud’arabe. Sans attendre, tout est clair pour lui, nous sommes déjà desclients acquis. Le train touristique le « Lézard rouge » n’étant pas en ser-vice ce jour-là, il pourra nous faire découvrir les gorges. Il nous vantemême la marche à pieds plus intéressante que le voyage en train. Àdeux cela nous coûterait soixante dinars, lui par contre n’en prendraitque trente. C’est dans l’intérêt de tous, et ça l’aiderait à gagner sa vie.Brusquement, son flux de paroles s’arrête net. Il a dit ce qu’il voulait oudevait dire. Pendant tout ce temps, un jeune et grand garçon, la quin-zaine, vêtu d’un jean et d’un tee-shirt rouge vif, se tient dans l’encadre-ment de la porte de la maisonnette, un journal à la main, qu’il regardeostensiblement sans, semble-t-il, le lire pour autant. Indifférent, il lève la

ll fait assez chaud ce matin et la météo annonce une température encore plus élevée au courant de la journée. Noustraversons la ville minière de Metlaoui en direction de Tozeur. La route, qui longe les usines de traitement de phos-phates avec ses longuescombrée par le va et vient incessant d’énormes camions.

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récIT de voYAGe

tête, son regard nous traverse avant de se jeter dans le vide. Ce qui sedéroule devant ses yeux ne le regarde pas. Mais c’est là que l’hommele désigne du doigt. Son fils parle un peu français et nous accompa-gnerait. Le garçon ne dit rien, disparaît un instant à l’intérieur de la mai-sonnette et revient avec un bâton. Sans dire un mot, il se dirige vers lesgorges. Nous aussi, sans dire un mot, nous le suivons, soulagés que cene soit pas le « vieux » qui nous accompagne. Nous lui demandons sonnom et montrons que nous aimerions mieux le connaître. Malek réponden arabe. Il apprend l’informatique. Nous devançant toujours dequelques mètres, comme s’il avait besoin de cette distance, Malekavance d’un pas rapide. Son visage est hermétique, un teenager encrise d’adolescence, ne puis-je m’empêcher de penser ; Il aurait pré-féré rester dans la maisonnette. Et pourtant, obéissant à son père, ilmarchera pendant presque trois heures avec nous, répondra à toutesnos questions, attirera, parfois même de sa propre initiative, notre at-tention sur telle ou telle particularité des gorges.

Nous traversons tout d’abord un tunnel d’une centaine de mètres environ ; quelques mètres séparent les parois dutunnel laissant tout juste la place au chemin de fer. Je ne suis pas à l’aise, j’avance hâtivement dans la pénombre etbutte contre le ballast. Je demande comment on allait faire si un train venait à passer.

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Nous traversons tout d’abord un tunnel d’une centaine de mètres envi-ron ; quelques mètres séparent les parois du tunnel laissant tout juste laplace au chemin de fer. Je ne suis pas à l’aise, j’avance hâtivementdans la pénombre et butte contre le ballast. Je demande ce que l’onfait si un train venait à passer. Malek nous rassure qu’on l’entend venirde loin. Enfin c’est la fin du tunnel et nous sommes dans les gorges deSelja. Le défilé s’élargit à quelques centaines de mètres du débouchélarge d’une trentaine de mètres en moyenne. Des formations ro-cheuses escarpées de couleurs terre et d’une beauté particulière en-cadre la vallée sablonneuse, alternativement étroite et large. Ellesforment des murailles de plusieurs dizaines de mètres et donnent un as-pect grandiose aux gorges. Sur les parois les eaux ont sculptés descourbes marquant les étiages successifs du torrent. Au milieu un rem-blai surélevé sur lequel passe la voie ferrée traverse les gorges sur touteleur longueur, sept à 8 kilomètres nous dira Malek. Le long du remblai,un oued vert foncé, boueux, semble presque irréel. L’oued ne tarit ja-

Nous traversons tout d’abord un tunnel d’une centaine de mètres environ ; quelques mètres séparent les parois dutunnel laissant tout juste la place au chemin de fer. Je ne suis pas à l’aise, j’avance hâtivement dans la pénombre etbutte contre le ballast. Je demande comment on allait faire si un train venait à passer.

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récIT de voYAGe

mais et son débit d’une vingtaine de litres par seconde peut atteindreplusieurs mètres cubes par temps de pluie. Des résidus de phosphatemélangés à de l’eau proviennent du centre de lavage situé plus enamont. Ils couleront à travers le canyon avant de s’infiltrer, à la fin deleur trajet, dans les sols du désert. Les Romains, semble t-il, avaient éta-blis des barrages dans les gorges, ce qui rend vraisemblable l’existenced’une colonie agricole. Mais c’était du temps des Romains. Aujourd’huije remarque qu’il n’y a pas de moutons ni de chèvres qui broutent lesquelques herbes. À cause du phosphate nous répond Malek. Et c’estjustement en voulant comprendre pourquoi les bêtes mourraient en sedésaltérant dans le ruisseau qu’un ingénieur, Philippe Thomas vétéri-naire militaire passionné de paléontologie, avait découvert les affleure-ments phosphatés. Le gisement est exploité de façon intensive, dix ansaprès sa découverte en 1896. Depuis d’autres gisements furent décou-verts permettant l’ouverture d’autres centres d’exploitation faisant decette région le plus grand centre minier de Tunisie. Et la Compagnie de

Et c’est justement, en voulant comprendre pourquoi les bêtes mourraient en se désaltérant dans le ruisseau qu’uningénieur, Philippe Thomas vétérinaire militaire passionné de paléontologie, avait découvert les affleurementsphosphatés. Le gisement est exploité de façon intensive, dix ans après sa découverte en 1896.

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phosphate de Gafsa un des plus grands pourvoyeurs d’emplois. Danscette région on est mineur ou employé de la compagnie de père enfils. Malek qui entre temps est plus ouvert nous montre à notre gauche,une brèche dans le rocher surnommée le « Coup de sabre ». Selon la lé-gende, le guerrier El Mansour après avoir libéré la princesse Leïla dujoug de son maître, tailla d’un coup de sabre dans la roche le lit nuptial.Nous admirons la vue sur la chaîne du mont Tarfaoui qui culmine à 512mètres. Nous continuons notre marche sur le remblai. Longeant la voiedu chemin de fer nous empruntons des petits ponts qui enjambent le «cours d’eau ». Je veux marcher dans la vallée, mais Malek nous met engarde contre les serpents venimeux. Je suis un peu inquiète, certaine-ment moins en raison des serpents, mais beaucoup plus à cause decette effrayante boue vert foncé se frayant inlassablement un chemindans le canyon. Nous rencontrons des cheminots qui rentrent à pied.Puis au loin nous entendons le sifflement du train. Lorsqu’il arrive à notrehauteur, nous comptons quarante wagons chargés de phosphate lavé.

Et c’est justement, en voulant comprendre pourquoi les bêtes mourraient en se désaltérant dans le ruisseau qu’uningénieur, Philippe Thomas vétérinaire militaire passionné de paléontologie, avait découvert les affleurementsphosphatés. Le gisement est exploité de façon intensive, dix ans après sa découverte en 1896.

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récIT de voYAGe

Au bout de deux heures de marche et après avoir traversé trois des huittunnels de Selja, nous faisons demi-tour devant le quatrième. Le plus longdes tunnels avec sept cents mètres. Le plus long et certainement le plusdangereux si on devait rencontrer un train. Tous juste devant l’entrée dutunnel Malek nous montre la source de « El Guattara ». Comme son noml’indique l’eau tombe à petites gouttes d’une saillie rocheuse. Malek sedésaltère et nous nous accordons une petite pause. Le soleil est au zé-nith. Et le retour sous ce soleil de midi nous semblera très long. On pren-dra quand même le temps d’admirer le paysage que nous verrons sousun autre angle. Nous prendrons aussi conscience de la hauteur des pa-rois infranchissables des gorges et de l’immensité du lieu. Malek sera aussicontent de rentrer. Sur le chemin du retour, je ne pouvais m’empêcherde penser à cette beauté étrange et aride des gorges de Selja. Le sou-venir s’effacera particulièrement vite de ma mémoire. Parce que j’auraisaimé voir un ruisseau aux eaux limpides couler dans le canyon. Il y auraiteu beaucoup de verdure, une oasis avec beaucoup de palmiers et desarbres fruitiers, des hommes, des femmes, des enfants : la vie.

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hIsToRIQue De La DÉCouVeRTe Du phosphaTe aux GoRGes De seLJa

1885 Découverte d’affleurements phosphatés dans les gorges del’oued selja par une mission scientifique conduite par philippeThomas géologue amateur français.

1896 Début de l’exploitation du gisement de phosphate et création dela « Compagnie de phosphates et de chemin de fer de Gafsa.

1899 Mise en service de la ligne de chemin de fer Metlaoui – sfax.

1904La Compagnie des phosphates de Gafsa ouvre un siège àRedeyef et le relie à Metlaoui qui longe l’oued selja.

1905exploitation du gisement de oum Larayès.extension du réseau ferré de la compagnie.

1929Le Tonnage exporté atteint les deux millions de tonnes.

1960association avec l’État tunisien qui en devient majoritaire ettransfert du siège social à Tunis.

LE LÉZARD ROUGE

Aujourd’hui un petit train, le « Lézard rouge » permetaux touristes de découvrir les gorges de Selja à partirde la gare de Metlaoui. L'histoire de ce train remonteau début du XXème siècle. Une voiture beylicaleaménagée pour les souverains husseinites servaitaussi au transport des personnalités étrangères en vi-site en Tunisie. En 1974 il est utilisé pour des trajets tou-ristiques sur la ligne Tunis – Tozeur. Entièrementrestauré, il est utilisé exclusivement pour la visite desgorges de Selja depuis 1984.

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PATrIMoINe

Par Férid BoughedirRéalisateur, critique et historien du cinéma arabe et africain.

Férid Boughedir est professeur de cinéma à l’Université de Tunis. Il réalise plusieurs films de fiction, dont Halfaouine, Tanit d'or aux Journées

cinématographiques de Carthage - JCC.

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Le cinéma tunisien est né sur un terreau particuliè-rement fertile, celui de la cinéphilie et de l'admi-ration pour les grandes œuvres du 7ème artmondial. Dès 1922, le précurseur du cinéma tuni-sien et génial touche-à-tout, Samama Chikly, au-teur des premières prises de vues sous-marines etdes premières prises de vues aériennes en ballon,tournait un cours métrage de fiction "Zohra" suivien 1924 d'un moyen métrage "Aïn el Ghazel"avec sa fille Haydée en vedette, devenant ainsil'un des tout premiers cinéastes "autochtones" ducontinent africain.

le cINéMA TUNISIeN

Plus tard en 1949, soit sept ans avant son indépendance politique, laTunisie était l'un des pays du continent africain possédant le plusgrand nombre de ciné-clubs. Tahar Cheriaa, président de la fédéra-tion des cinés clubs, devenu directeur du cinéma au Ministère de laCulture, fut tout naturellement le "père" des premières productionstunisiennes - le premier long métrage tunisien de fiction "l'Aube" deOmar Khlifi date de 1967 - et le créateur du premier festival panafri-cain et panarabe de l'histoire, les "Journées cinématographiques deCarthage", JCC, dont le succès populaire n'a pas faibli depuis 1966.Les ciné-clubs et les JCC ont contribué à former à la fois des ci-néastes et un public exigeants. D'emblée, il ne fut pas question de

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PATrIMoINe

s'aligner sur l'unique "vieux" ci-néma arabe existant, grandpourvoyeur de mélodrames etde films musicaux parmi les-quels essayaient d'émerger diffi-cilement quelques "auteurs". Ils'agissait plutôt pour la majoritédes cinéastes de réussir, chacunselon son style, des films "d'ex-pression" politiques, sociaux,culturels, etc. originaux, mar-qués du sceau de leur réalisa-teur et visant la qualitéartistique déjà atteinte au ni-veau mondial et cela, à

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quelques exceptions près, sanscéder aux "facilités" qui au-raient été payantes auprès duseul public local. C'est pourquoi à la différencede ses voisins maghrébins quifurent tentés suivant les pé-riodes par une veine "épique"ou par une veine "populiste",ces deux catégories sont prati-quement absentes de la filmo-graphie tunisienne, oùdominent presque de façonpresque individualiste, les "filmsd'auteur". Des films très différen-ciés les uns des autres. À telpoint que, malgré un air de fa-mille général et des regroupe-ments évidents, on a pu direque chaque réalisateur tunisienreprésentait une "école" diffé-rente à lui tout seul. Cette li-berté de choix a été favoriséepar le fait que la Tunisie pos-sède également une censurecinématographique, différentede la censure télévisuelle, quiest indubitablement une desplus souples du monde arabe.Des scènes, qui sont interditesdans d'autres pays arabes, ré-vélant de la célébration de lanudité féminine "Halfaouine",l'homosexualité "l'Homme decendres", la répression politique

"Les sabots en or", le tourismesexuel "Bezness", la misère desquartiers déshérités "Essayda", ledroit de l'épanouissementsexuel de la femme "Fatma","Satin rouge", ont été finale-ment acceptées par la censuretunisienne dès lors qu'ellesétaient exprimées par des ar-tistes et étaient nécessaires à lacohérence de leurs œuvres.Tous ces facteurs, autorisant dessujets audacieux osant ce quidemeurait "tabou" ailleurs, ainsique le rejet économique du"tout étatique" au profit du sou-tien au secteur privé, permet-tant l'émergence deproducteurs particulièrementdynamiques malgré les difficul-tés, ont abouti durant la décen-nie 1986-1996, à une sorted'âge d'or pour les créateurs etle public. Certes durant la dé-cennie précédente, le cinématunisien avait déjà brillé au ni-veau festivalier internationalavec plusieurs films dont "LesAmbassadeurs" en 1976, "Soleildes Hyènes" en 1977, "Aziza" en1980, "La trace" en 1982, "Traver-sées" en 1982 ou "Les Baliseursdu désert" en 1984, tous abon-damment primés dans de nom-breuses manifestations.

Des films très différenciés les uns des autres. À tel point que,malgré un air de famille général et des regroupementsévidents, on a pu dire que chaque réalisateur tunisienreprésentait une "école" différente à lui tout seul.

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Le miracle a été qu'à partir de"L'Homme des cendres" sorti en1986, et contrairement à ce qui sepassait dans la plupart des pays duSud où les films d'auteur restentconfinés dans les ghettos des sallesd'Art et d'Essai ou exclusivementdestinés au "prestige" des festivalsétrangers, le public tunisien a fait untriomphe sans précédent aux filmstunisiens, même à des films "difficiles"comme "Chich Khan" ou "Soltane elMedina" et "inventant" ainsi une ca-tégorie cinématographique inédite,celle "des films d'auteur de masse"!

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Ce triomphe local a été doubléd'un triomphe extérieur avec unevéritable distribution commer-ciale à l'échelle internationalecomme "Les Silences du palais","Halfaouine", "Un Été à la Gou-lette", ou "Satin rouge", les auteursde ces films se voyant égalementsouvent honorés par une invita-tion à siéger dans les jurys officielsdes plus grandes manifestationsinternationales comme Cannes,Venise et Berlin.

Les succès du cinéma tunisien ontété jusqu'à présent assurés par lagénération des ciné-clubs desannées 60, nourrie par l'admira-tion des œuvres du grand écran,la génération d'avant la générali-sation de la télévision, laquelle acréé un rapport nouveau àl'image. Face au recul du publiclocal et à l'accueil international,certains nouveaux cinéastes, dés-emparés, tentent de reproduireinconsciemment ce qu'ils croientavoir été les "recettes" du succèsde leurs ainés ou les "attentes"des sélectionneurs de festivalsétrangers. En attendant la réor-ganisation espérée, c'est assuré-ment de cette "jeune vague" queviendra aussi le succès du ci-néma tunisien de demain.

Albert Samama, dit Samama Chikly,fut le premier cinéaste tunisien. Cer-tains disent que ce surnom lui vientd'une joyeuse confrérie qui s'appelaitLes Pompiers de l'Ile de Chikly, cettepetite île située sur le lac de Tunis oùAlbert Samama organisait des fêtes.Ce personnage extraordinaire étaitd'une curiosité telle qu'il a été le pre-mier à introduire une multitude denouveautés en Tunisie. Comme ilétait passionné de photographie, ils'est tourné tout naturellement vers lecinéma, en 1895, lorsque le cinéma aété inventé. Deux ans après, AlbertSamama Chikly organisait des pro-jections de films en Tunisie. Noncontent de filmer sur terre, cet inven-teur curieux et touche-à-tout, a ef-fectué la première prise de vue enballon entre Hammam-lif et Gromba-lia puis les premières prises de vuesous-marines. Il filme ensuite le trem-blement de terre de Messine, unepêche au thon pour le Prince de Mo-naco, et pendant la Guerre 14-18, lestranchés de Verdun. Après toutes cesréalisations expérimentales, il décidede faire son premier court métrage.C'était en 1922. Il tourne Zohra, l'his-toire d'une jeune fille française quitombe d'un avion et qui est recueilliepar une tribu bédouine tunisienne. Lefilm décrit la vie de cette tribu danstous ses détails. Il en avait confié lerôle principal à sa fille Haydée. AvecAïn el Ghazal ou La Fille de CarthageSamama Chikly réalise le premierlong métrage de Tunisie réalisé parun Tunisien.

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NoS lecTeUrS oNT dU TAleNT

AMBIANceS TUNISIeNNeS

cAThY SeGUeU

« Depuis l'âge de 14 ans,

âge auquel j'ai découvertce beau pays qu'est laTunisie, je n'ai jamais cesséd'y séjourner chaqueannée. Désormais, la Tunisieest devenue

"Mon Pays de Coeur"..».

Cathy est photographeamateur et Conseillèreartistique de l’artiste peintreAhsen Guerfallah

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TeSToUr

eT AUSSI

MArABoUTS eT zAoUIAS eN TUNISIe

lA GAlITe

lA cÔTe de BéchATeUr

la vieille ville de Testour fut construite par les premiers Anda-lous lorsque, chassés par les espagnols, ils étaient venus s’éta-blir dans le Nord de la Tunisie au début du XVIIe siècle. Ilstenaient énormément à reproduire dans ses moindres détailsle modèle de ces villes. Ainsi s’élevaient les maisons avecleurs toits en tuiles, les mosquées avec leurs minarets en formede clochers d’églises, les ruelles droites et bien tracées.

Nichés au sommet des collines ou au creux des vallées, éri-gés le long des routes ou des chemins en terre, construits unpeu à l’écart des villages, les marabouts sont omniprésentsdans les campagnes tunisiennes. Ces petits édifices cu-biques, généralement en chaux, et toujours surmontésd’une coupole, témoignent de la survivance jusqu’à nosjours d’une forme populaire de l’Islam : le culte des saints.

Archipel volcanique, les îles de la Galite se trouvent à 35 ki-lomètres au large de Tabarka. la Galite, la plus grande île,avec 5,3 km de long, 2 km de large et une altitude de 400 mest habitée par des pêcheurs. Les cinq autres îlots rocheuxavec des noms comme les chiens pour le Galiton de l’Est, leGallo, (le coq), la Gallina (la poule), le Galiton de l’Ouest etle Pallastro sont inhabités.

La côte de Béchateur est découpée par des falaisesabruptes et parsemée de petites criques et de petitesplages de sable fin. Elles disparaissent dès que la mer estremontée. La randonnée est un véritable plaisir. Ici se mêlentl’ocre de la montagne, le vert de la forêt et le bleu de lamer. Le relief mollement accidenté est couvert d’unmanteau végétal qui fait alterner acacias et conifères.

GRANDS ESPACES vous fera découvrir en photos panoramiques de hautslieux de la culture et du patrimoine touristique de la Tunisie.

À partir du 5 février sur SAISoNS TUNISIeNNeS