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Samuel Coisne. la malterie, 2011

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Livret de résidence de Samuel Coisne, en résidence à la malterie en 2011. Texte Agnès Violeau

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L’artiste Samuel Coisne a été accueilli enrésidence à la malterie en octobre et novembre2011. Son projet, Tours et détours d’unedisparition programmée, a ensuite fait l’objetd’une exposition à la malterie du 24 novembreau 16 décembre 2011.

Ce livret-mémoire constitue un document témoindu travail de résidence, et propose de resituerle projet de l’artiste dans l’ensemble de sadémarche artistique.

Si par son programme d’accueil en résidence,la malterie affirme sa volonté de soutenir lacréation artistique contemporaine, l’édition deslivrets confirme celle d’accompagner les artistesaccueillis par leur mise en relation avec uncritique d’art, qui rédige un texte théorique à lasuite de rencontres et d’entretiens ponctuanttoute la durée de la résidence.

Elise Jouvancy, chargée des résidences -la malterie______

Samuel Coisne est né en 1980, il vit et travailleà Bruxelles (B).Samuel Coisne is born in 1980, he lives andworks in Brussels (B).www.samuelcoisne.com

The artist Samuel Coisne has been in residencyat la malterie in 2011 October and November.His project, Tours et détours d’une disparitionprogrammée, has then been presented in anexhibition at la malterie from November the 24thto December the 16th.This booklet represents a memory document ofthe process and realisation of his project andre-place it in the global approach of the artist.Through its residency program, la malteriewants to support the contemporary artisticcreation. Through editions like this one, sheconfirms her commitment to artists that shehosts, by getting them in touch with an art criticwho drafts a theoretical text after exchanges andconversations taking place all the duration of theresidency.______

Plus d’informations sur la résidence de Samuel Coisneà la malterie, sur le blog, accessible via le site :www.lamalterie.comMore information on Samuel Coisne’s residency at lamalterie on his blog, accessible via the website :www.lamalterie.com

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la malterie // Lillestructure de soutien à la recherche artistiquedans le domaine des arts visuels et desmusiques actuelles de créationwww.lamalterie.com

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1 Serge Doubrovky inTextes en main,Autofictions & Cie.

2 Le Prix Médiatine existedepuis plus de 20 ans enCommunauté française deBelgique et vise à fairedécouvrir des artistescontemporains sensibles,prospectifs, engagés etnovateurs.

Sans titre2010Polystirène expansé150 x 150 cm

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Un point cardinal de la sensibilité postmoderne résidedans sa fascination pour le fractal, dans son engouementpour un paysage mental discontinuiste plus sensible auxperturbations, au chaos et à l’inattendu1. Samuel Coisne,jeune artiste français ayant grandi et étudié en Belgique, faitétat d’une sensibilité et d’un monde bien singuliers. Unepoétique « déconstructionniste », une polygraphie au sensd’une œuvre qui vise à atteindre non pas la linéarité mais uneforme plastique de désordre de l’œuvre où la mémoire seraitcoupée de toute historicité, et réinventée.

Après l’obtention d’un Master en arts plastiques à l’ÉcoleSupérieure des Arts Plastiques et Visuels de Mons en 2004,Coisne entame sa carrière en Belgique avec une séried’expositions de groupe, la sélection pour le Prix Mediatine2et le Prix de la Jeune sculpture de la communauté Françaisede Belgique en 2011. La fragilité, le hasard et l’apparition sont

Samuel COISNEL’art d’accommoder les restes

L’artiste de la nouvelle modernité se présente comme un pilote d’essai, un auteurde micro-utopies qui opère dans des zones délimitées. De la même manière quel’intellectuel spécifique défini par Michel Foucault a supplanté la figure sartriennedu penseur de la totalité, les micro-utopies sectorielles et pragmatiques sesubstituent aux macro-utopies totalisantes d’hier.Nicolas Bourriaud, in Le Magazine littéraire, mai 2000

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au cœur de sa pratique. Mettant en œuvre différentssystèmes topographiques, brisés ou reconstruits, Coisne faitdu fragment un appareil destructif de la durée narrative dansl’œuvre. L’artiste se détache d’une perfection des lignes qu’ilpulvérise au profit d’une poétique postmoderne de ladéliaison.

Matière et ville en mutation

La ville et ses rhizomes sont le terrain de jeu de SamuelCoisne. Dans ses agencements et compositions souvent detrès petite échelle, soigneusement pensés, l’œuvre senourrit volontiers de résidus. Morceaux de polystyrèneprédécoupés, moulages en négatif issus de boites de jeux,mini ready-mades assemblés et rejoués pour composer uneforteresse (Sans titre, 2010), boule à facettes en forme deglobe terrestre où les océans apparaissent en réserve(Discoworld, 2008), moulage de sa caisse à outils retournéeoffrant son négatif (Sans titre, 2010), les œuvres de Coisne,par le détournement, le collage ou la récupération, donnentune seconde chance aux matériaux en fin de vie.Invité à la malterie pour une résidence puis une

exposition personnelle, l’artiste ouvre sa recherche à ladisparition et réapparition de l’eau au contexte del’exposition et à la mécanisation. Tours et Détours d’unedisparition programmée se présente comme unecomposition au dispositif complexe. Micro-usineautofonctionnelle, toutefois ravitaillée régulièrement encubes de glaces par l’artiste, elle se compose de blocs deglace moulée en forme de petits immeubles dont la fontenourrira différents supports où l’eau, directement récoltéedans des tuyaux, alimentera alors de nouvelles formes devie. Naissance d’une plante, vie aquatique, objet sonore, ou

Sans titre2010Plâtre, laque40 x 30 x 20 cm

Discoworld2008Boule à facettes,moteurDiamètre 50 cm

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simple mutation de la matière (vapeur, condensation), ladisparition d’un élément amène l’apparition d’un autre.Micro-utopie joyeuse, paysage industriel ou œuvreautotélique, l’installation, au fonctionnement de l’alcaloïde,offre une nouvelle vie à l’eau, tenace et fragile à la fois.

Car ce qui frappe en entrant dans l’atelier de SamuelCoisne est la délicatesse avec laquelle sont disposées lesœuvres, chacune occupant un espace précis, délimité.Cartographies murales en dentelle de papier, fil ou vitrail,puzzle de verre brisé rassemblé soigneusement au sol,décorum en façade lumineuse factice : un ordre de piècesbien agencé, le postulat de l’artiste s’enracinant dans desquestions d’occupation de l’espace, de reconstruction etd’empathie.

Il est difficile de ne pas mettre en regard le travail deSamuel Coisne et la situation actuelle d’une Belgiquefragile, en pleine fracture sociale, où le gouvernement,éclaté entre régions et communautés, montre un pays enquête de reconstruction. Cette crise politique, économiqueet sociale, est aussi environnementale, la course au profitayant engendré ces dernières années désastres naturels etréchauffement climatique notables. L’installation Tours etdétours d’une disparition programmée, au titre à doublelecture, suggère la mutation de notre économie vers lesénergies durables et écologiques. Un équilibre construit enun cercle vertueux, où l’énergie naturelle remplacerait lenucléaire et une activité économique intense dont laproduction accentue les dégâts sur l’environnement.

Des fragments et des bris

La notion de fragmentarité se distingue de l’œuvreclassique en ce que celle-ci est fondée sur la cohérence etla finition. L’exigence fragmentale est considérée parBarthes comme le lieu d’une écriture précaire etcontinuellement différée. Un trait majeur de la sensibilitépostmoderne consiste, selon Lyotard, à remettre enquestion les notions d’unité, d’homogénéité et d’harmonie.Chez Coisne les vitres sont brisées, elles participent nonseulement d’une esthétiqueparcellaire, mais également d’unsouhait d’une déconstruction dupaysage derrière la vitre. Coisnelaisse la place à l’accident.

Tours et détours d’unedisparition programmée

2011Techniques mixtes

300 x 300 cm

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Belgique2010Tissu découpé60 x 70 cm

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Toujours dans cette optique du puzzle, du jeu, dumorcellement recomposé. Le fragment n’intègre pas ledéterminisme constructiviste de l’ensemble de l’œuvre, ausens où aucun fragment n’est dicté par ce qui précède, oun’annonce ce qui va suivre. Mais ce jeu de trompe-l’œilpermet à l’image de s’autonomiser, de trouver un cadre, uneconstruction dans la déstructuration. Coisne arpente lesvilles qu’il traverse - une prédilection, elle aussipostmoderne, pour l’errance, l’inattendu - et se nourrit deplans, de détours, logiques ou absurdes. On retrouve cecanevas systématique dans ses vitres réparées, ou œuvresà échelle de maquettes. Chez Samuel Coisne, relevantsouvent de mise en abîme ou de propositions infinimentpetites, précises et soignées, cette esthétique du fragment,de l’accumulation et de la brisure 3 défait les systèmesassociés à une vérité logocentrique.

L’absurde, le jeu, le leurre

Un autre élément constitutif de l’œuvre polymorphe deSamuel Coisne est son caractère auto dérisoire. L’artiste,né en France, grandit en Belgique, où il a digéré un sens del’absurde spécifiquement belge (citons Marcel Broodthaers,René Magritte, Wim Delvoye) sûrement hérité dusurréalisme, conjugué à un goût pour la matière (dentelle,fil) et à un sens de la fête déconfite : Discoworld (2008) ouLa plus petite discothèque du monde (discothèque établiedans un ascenseur, 2010), Le plus petit labyrinthe du monde(projet en cours), sont des pièces qui, bien que ludiques,empreintes de légèreté ou d’Entertainment ne sont pas sansformuler une inquiétude, sans rappeler James Ensor et ses

carnavals incertains. Espaces trop petits, boule à facettesoù la moitié des brillants sont tombés, peinture en pot àmotif impossible de damier ou camouflage, vitresfaussement réparées sont autant de pièces interrogeantnotre perception du réel et la place du hasard, mais aussi untemps où les réjouissances toucheraient à leur fin.Un temps aussi où rien n’est alors impossible, un dernier

bouillonnement, un sursaut de vie. Métaphore d’unecivilisation qui s’égare, d’une société du spectacle queCoisne synthétise par trompe-l’œil.Dans la production photographique de l’artiste, on trouve

également ces ingrédients récursifs. Dans LeCri (2009), le paysage d’un lac se mue enonde sonore ; dans Le ciel nous tombe sur latête (2009), les missiles de guerre sontrenversés par un simple retournement del’image, le réel se trouve alors remanié, notreœil chahuté.

Sans titre2011

Interventionsur une vitrede la malterie

3 Ce principe estomniprésent dansl’œuvre de l’italien

MichelangeloPistoletto par

exemple.

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Le fil du temps

En bon funambule, Samuel Coisne trouve la juste stationentre fragilité du quotidien et ténacité, entre chaos et poésie.Il rend minuscule ce qui est monumental (une ville, unediscothèque, une usine) et majestueux l’anecdotique,l’invisible (caisse à outils, broderie, paillette). Déclinant unvocabulaire fractal à travers nombre de procédés

(développement de systèmes, formes simples ouauto-existantes) son modus operandi s’autonomise pourautant vers un langage dominé par une cartographie dutemps. « La condition de l’homme, c’est d’être là», écrivaitBeckett. « Se donner du mal pour les petites choses c‘estparvenir aux grandes avec le temps. »4 Une tentative qui

semble avoir été à nouveauformulée dans le projet pour lamalterie.

Car il est bien question dutemps qui file dans une ville deglace qui fond, une plante quipousse, des objets transformés,un rebu rejoué, une fête quis’éternise dans un espaceintermédiaire.

Le Cri2009C-print contrecollésur aluminium80 x 60 cm

Sans titre2011

Miroir cassé150 x 150 cm

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Memento mori provisoire méticuleusement agencé ausol, cartographies de dentelle précaires, matériauxéphémères ou quasi invisibles, Samuel Coisne par lamutation, l’agencement, le tissage, la brisure ou leretournement offre à la matière un statut d’œuvre. En cesens, il illustre ce «levier logique grâce auquel un simpleobjet accède au rang d’œuvre d’art », cet acted’identification artistique décrit par Arthur Danto 5. Sapratique met en scène un monde éclairé où solitude etpoésie se rencontrent.

Agnès Violeau, octobre 2011

4 Samuel Beckettin Malloy, 1982

5 Arthur Danto inLa transfigurationdu banal, 1981

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TOURS ET DETOURS D’UNE DISPARITION PROGRAMMEE

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“Tours et détours d’une disparition programmée estle résultat de mon projet de résidence mené à lamalterie. Des blocs de glace sont installés sur leplateau au centre de l’installation. Symbolisant unemaquette de ville, les blocs fondent durant le tempsde l’exposition et sont remplacés au fur et à mesure.L’eau issue de la fonte est directement récoltée etdistribuée dans des tuyaux qui alimentent lesdifférentes parties de l’installation.Les plantes sont nourries, les graines germent, l’eauréagit au contact du son ou s’évapore pour ne pluslaisser trace de son passage...L’eau dans tous ses états.”

Samuel Coisne

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The influence of a postmodernism sensibility can be seenin the artist’s fascination with fragmentation and in his keeninterest in mental landscapes of discontinuity, which are morevulnerable to disruptions, chaos, and the unexpected1. Thisyoung French artist Samuel Coisne, who grew-up andstudied in Belgium, communicates sensitivity and creates aunique world in his art. He is a poetic “deconstructionist” andhis work acts as a kind of polygraph that rejects simple linearnarrative and strives for a plastic form of disorder, wherememories are disassociated from historicity and thenreinvented.

After obtaining his Masters in Visual Art at the ÉcoleSupérieure des Arts Plastiques et Visuels in Mons in 2004,Coisne began his career in Belgium with a series of groupexhibitions. His work was nominated for the Mediatine Prize2and the Young French and Belgian Sculptor Prize in 2011. Atthe core of his artistic practice are the notions of fragility,

Samuel COISNEThe Art of Using up Leftovers

The artist of the new modernity appears as a test pilot and an author of micro-utopiasthat operate inside a delineated zone. Just as Michel Foucault’s intellectual takes theplace of Sartre’s philosopher of totality, the fragmented and pragmatic micro-utopiasreplace the totalistic macro-utopias of yesteryear.Nicolas Bourriaud, Le Magazine Littéraire, May 2000

1Serge Doubrovkyin Textes en main,Autofictions & Cie.

2 Prix Médiatine began 20 years agoin the French and Belgiancommunities and its goal is todiscover contemporary artists whoare sensitive, active, innovative, andwho are turned towards the future.

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chance, and reappearance. By deconstructing andreorienting different topographical systems, Coisne shapesthese fragments into an anti-narrative tool. The artist leavesbehind the perfection of lines – instead he pulverizes themfor a postmodern poetic of disassociation or “déliaison.”

Materials and Cities Undergo Mutation

The city and its rhizomes are Samuel Coisne’splayground. In his installations and compositions, which areoften small scale and well-thought out, the artworks feed offresidual objects. Coisne’s works use collage, appropriation,and recuperation, to give a second life to materials: piecesof precut polystyrene, reliefs of negative space taken from aboard game, mini ready-mades assembled and used toconstruct a fort (Sans Titre, 2010), a disco ball in the shapeof a globe with whited-out oceans (Discoworld, 2008), andthe mold of his toolbox turned upside down, giving form tonegative space around the object (Sans Titre, 2010).

Having been invited to la malterie for an artist residencyand a solo exhibition, the artist initially researched thedisappearance and reappearance of water in the context ofthe exhibition and the mechanics of a given system. Tourset Détours d’une Disparition Programmée appears as acomposition with a complex system. An automatedmicro-factory, which the artist regularly fuels with ice cubes,is composed of blocks of ice molded into the shapes of smallbuildings. These buildings slowly melt andthe water, collected in pipes, feeds newforms of life. The disappearance of oneelement gives way to the appearance of

another : the birth of a plant, aquatic life, sounds, or a simplemutation of the material (steam or condensation, forexample). This installation – a joyous micro-utopia, industriallandscape, and an autotelic work – functions similarly toalkaloids and offers a new life to water, an element which isat once tenacious and fragile.

What first strikes you when you enter Samuel Coisne’sstudio is how delicately the works are arranged – each oneoccupies a precise and delineated space: wall-sized mapsof paper doilies, threads, or stained glass. There are puzzlesof broken bits painstakingly reassembled on the floorexpressing his decorum with an artificially bright façade.These well-placed pieces are the axiom of an artist rootedin questions regarding the use of space and thereconstruction of empathy.

Sans titre2011

Briques, gélatinesDimensions variables

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It is difficult not to see Samuel Coisne’s work in terms ofthe fragile Belgian society, whose current governmentaldivide in certain regions and communities reveal a countryin the process of rebuilding itself. This political, social, andeconomical crisis also takes a toll on the environment: therace for profits is responsible for recent natural disasters andmost notably, global warming. The title of the installationTours et Détours d’une Disparition Programmée can beunderstood in two ways: it can also suggest the evolution ofour economy towards ecological and renewable resources.This equilibrium is built through a virtuous circle, wherenatural energy replaces both nuclear energy and the intenseeconomic activity of production, which increasesenvironmental wastes.

Fragments and Shards

Fragmentary works can bedistinguished from classic worksbecause the latter are founded oncoherence and the notion of an endproduct. Barthes considers anexample of fragmentary practice asprecarious writing that is continuouslydeferred. A key trait of postmodernsensitivity consists, according toLyotard, of questioning notions ofunity, sameness, and harmony. InCoisne’s work, the broken glass

participates not only in the fragmented aesthetic, but also indeconstructing the landscape behind the glass. Here,Coisne gives chance the reins.His work is consistent with the vision of the puzzle, the

game, and of reassembled pieces. The fragments don’tdemonstrate the constructivist determinism apparent in theensemble of his works because the fragments themselvesare neither linked to the previous pieces nor imply thefollowing ones. But this game of trompe l’œil grants theimage a certain autonomy as well as creates a frameworkand shape from destructuralization. Coisne surveys thecities he visits – an equally postmodern predilection forwandering and for the unexpected – and builds on theirroutes and detours, logical or absurd. Here we find at work

Europe2011Papier50 x 150 cm

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the same systematic schema that was present in hisrepaired windows and his model scale works. The aestheticof fragmentation and the accumulation of splinters inSamuel Coisne’s work, which often relies on either a miseen abime or infinitely small undertakings, undoes thesystems associated with a logocentric truth, precisely andthoughtfully.3

The Absurd, the Game, the Bait

Another key element of Samuel Coisne’s polymorphicwork is its self-deprecating character. Although the artist wasborn in France, he grew-up in Belgium where he developeda sense of the absurd particular to Belgian culture (let usremember Marcel Broodthaers, René Magritte, and WimDelvoye) which must surely be a result of surrealism. Thiscombines with his interest in materials (such as lace andthread) and his sense of a celebration: in Discoworld (2008)or La Plus Petite Discothèque du Monde (a disco set-upinside an elevator, 2010), or Le Plus Petit Labyrinthe duMonde (current project), the pieces are all fun, light andentertaining, but they are not free of cares, and we cannothelp recalling the work of James Ensor and his system ofincertitude. His cramped spaces, disco balls with missingmirrors, paint cans forming a pattern impossible to hide orcamouflage, glass badly repaired, all interrogate ourperception of what is real, the importance of chance, andthe time when celebrations must come to an end.

3 This principle is omnipresent inthe work by the Italian artistMichelangelo Pistoletto, forexample.

Sans titres2008-2009Scotch, carton, surdifférentes vitrines de Bruxelles

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It is a time when nothing is impossible. It is the lastgurgle, the last tremor of life. In this metaphor depicting acivilization that is drifting, Coisne synthesizes this society ofthe spectacle in his trompe l’œil.

In the artist’s photographic production, we also findrecurrent elements. In Le Cri (2009), the landscape of a lakeis transformed by sound waves and in Le Ciel Nous Tombesur la Tête (2009), war missiles are toppled by a simple turn

of the image: the real is reshuffled andour gaze is startled.

Threads of Time

Like a tightrope walker, SamuelCoisne finds the right footing betweeneveryday fragility and the tenacitybetween chaos and poetry. He rendersminuscule that which is monumental (acity, a disco, and a factory) and majesticthe anecdotic and the invisible (a toolbox,embroidery, and sequences). Creating afragmented vocabulary fractal in hisnumerous procedures (development ofsystems, simple forms, or self-existence)his modus operandi is based on alanguage dominated by time. “Man’scondition is being,” wrote Beckett. “Totake pains for the little things is toaccomplish great things in time.”4 Heseems to revisit this approach in hisproject for la malterie.

It is truly a question of time that lingers in a city of meltingice, a growing plant, transforming objects, restructuredrebus, and a celebration that drags on in an intermediaryspace.

Puzzle monochrome #12008Carton imprimé20 x 30 cm

4Samuel Beckettin Malloy, 1982

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His memento mori is provisionally and meticulously laidout on the floor, precarious lace maps of ephemeralmaterials that are almost invisible. Through mutation, layout,weaving, fracture, and reversals, Samuel Coisne givesmateriality to these works of art. In this sense, he illustratesthat “logic elevates a simple object to a work of art,” whichArthur Danto described as an act of artistic identification5.His practice sheds light on a world where solitude andpoetry meet.

Agnès Violeau, October 2011translated by Ellen LeBlond-Schrader

5 Arthur Danto in TheTransfiguration of theCommonplace, 1981

Tache #12009Latex, peinture20 x 20 x 20 cm

Origami2008

C-print contrecollésur aluminium120 x 80 cm

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Texte / Text : Agnès VioleauTraduction / Translation : EllenLeBlond-Schrader

Crédits photographiques / Copyrights :Sébastien Demilly, Loïc Mathieu, SamuelCoisne, & la malterie

Agnès Violeau est critique d’art etcommissaire indépendante. Elle contribuerégulièrement à différentes revues d’artcontemporain et co-dirige la revue J’aimebeaucoup ce que vous faites (art contemporainet littérature). Parallèlement, elle a co-fondé lecycle “Fiction_lectures performées” de laFondation d’entreprise Ricard à Paris etassume la programmation des Performancesde l’Espace culturel Louis Vuitton et de laMaison de l’Amérique Latine.

Agnès Violeau is a french art critic and anindependent curator. She regularly contributesto different contemporary art journals andco-edits the review J’aime Beaucoup ce queVous Faites (contemporary art and literature).She also co-founded the series“Fiction_lectures performées” at the RicardFoundation in Paris and is responsible for theperformance program at the Louis VuittonCultural Space and La Maison de l’AmériqueLatine.

La commande de ce texte par la malterie a étépossible grâce à un cofinancement de l’Unioneuropéenne - Fonds européen deDéveloppement Régional / ProgrammeInterreg IV “Investir pour votre futur”. Lesopinions exprimées n’engagent que l’auteur, etles autorités du programme des 2 Mers nepeuvent être tenues responsables.Toute reproduction totale ou partielle sur quelque support que ce soit ou utilisation ducontenu de ce document est interdite sansl’autorisation écrite préalable de la malterie etde l’auteur.

This text for la malterie has been madepossible by the support of the European UnionEuropean Fund for Regional Development /Interreg IV Program “Invest in your future.” Theopinions expressed are that of the author andthe program authorities at 2 Mers cannot beheld responsible.All complete or partial reproductions in anyform and all use of the content of thisdocument are prohibited without the expresswritten authorization of la malterie and theauthor.

Edité par / edited by : la malterieImprimé en mai 2012 à 1000 exemplairesen partenariat avec la formation BTS CIG dela Cité scolaire Baggio

La résidence de Samuel Coisne et l’édition dece livret entrent dans le cadre du projet :“Landscape, Cities, People”, co-financé parl’Union Européenne – Fonds Européen deDéveloppement Régional (Interreg IVA,Programme des 2 Mers). Ce projet sur troisans (2009-2012), regroupe 6 structures dusecteur des arts visuels : Fabrica (Brighton,Uk), Aspex (Portsmouth, Uk), Netwerk (Aalst,B), Kunst & Zwalm (Zwalm, B), l’H du siège(Valenciennes, F) et la malterie (Lille, F).

La malterie reçoit également le soutien de laVille de Lille, du Conseil régional Nord-Pas deCalais, de la DRAC Nord-Pas de Calais, duConseil Général du Nord.

la malterie42 rue Kuhlmann

59000 Lillewww.lamalterie.comwww.iriscan.org