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SNJ Section Ile-de-France 33, rue du Louvre 75002 Paris Tél. : 01 42 36 84 23 Fax : 01 45 08 80 33 Mail : [email protected] Blog : http://snj-paris-idf.org/ Sur Twitter : twitter.com/snj_idf N° 116 – Deuxième et troisième trimestres 2011 – 2 euros Des nouvelles du Conseil Si tu lis cet édito du SNJ Info, c’est que tu fais partie des quelque mille adhérents de la section régionale d‘Ile-de-France. Tu sais que le conseil de la région parisienne, composé de trente membres, a été renouvelé de la moitié d’entre eux en avril dernier. Le Conseil représente ses adhérents, donc toi, auprès des instances nationales du SNJ. Mais aussi tisse des liens entre les sections d’entreprise de la région francilienne, participe à nos combats, les fait connaître, soutient nos militants en difficulté, en période de recrudescence des attaques antisyndicales dans nos entreprises de presse et de crise du journalisme. Autant dire que le conseil parisien revêt une importance de tout premier plan pour chacun. Si nous t’avons paru trop peu communiquer ces derniers temps, nous comptons bien nous manifester à toi de plus en plus souvent. En usant des nouveaux outils que nous avons mis en place : le blog (http://snj- paris-idf.org/), le compte Twitter (twitter.com/snj_idf) et la liste de diffusion de la section régionale. Sans oublier le SNJ Info. Dès la rentrée prochaine, nous organiserons aussi des tables rondes sur notre métier, et convierons ceux qui le souhaitent à assister à une séance du Conseil. Nous préparons aussi le prochain congrès national du SNJ, organisé cette année à Autrans, du 5 au 8 octobre. Le conseil d’Ile-de-France y jouera tout son rôle, pour ses adhérents, pour le journalisme, pour le SNJ. Jean-Bernard Gervais, secrétaire général de la section francilienne du SNJ daNS ce NumérO l Page 2 Nouvelle tentative de réforme à l’ aFP l Page 3 débat public du SNJ Ile-de-France : « L’information, à quels prix? » l Page 4 La commission arbitrale côté SNJ. Studio Press : dix journalistes à réintégrer 1 SNJ INFO 116 Quels investisseurs apporteront 5 mil- lions d’euros pour recapitaliser La Tri- bune, d’ici la fin de l’année 2011? Il s’agit de sauver un titre, mais aussi de préserver le pluralisme de la presse éco- nomique quotidienne française, rien de moins! Le SNJ de La Tribune prépare ainsi le rappel de ses troupes et de tous ses confrères franciliens pour lan- cer un appel aux pouvoirs publics, lors d’une manifestation devant l’Assem- blée nationale. Histoire de souligner le devoir de pluralisme devenu consti- tutionnel (art. 35), car il n’y a que deux quotidiens économiques en France : Les Echos et La Tribune. Doté de la confiance de 80 % d’abon- nés (institutionnels, banques, assu- rances, gestionnaires de patrimoine, notaires, etc.), La Tribune, née au début des années 1980, disposait en 2010 d’une diffusion payée officielle de 79164 exemplaires, derrière Les Echos (120 444 exemplaires). Soucieuse de fiabilité pour une telle clientèle, très lisible, de plus petit for- mat que son concurrent, elle se veut « plus poil à gratter » que celui-ci, ex- plique David Larbre, délégué syndical SNJ de La Tribune. Malgré ces atouts, « des investisseurs sérieux ont fui », re- connaît-il, s’avouant « pessimiste » : si rien ne change, « il restera moins de 2 millions d’euros dans la caisse fin dé- cembre 2011; on est donc au bord de la liquidation ou de la cessation de paie- ment. Nous craignons que l’entreprise soit mise aux enchères au tribunal de commerce. N’importe quel repreneur pourrait faire une proposition ». Trop peu de journalistes Fin juin 2011, la PDG, Valérie Décamp, a présenté un plan social prévoyant la suppression de 17 postes, réorganisa- tion « inéluctable », selon elle, dans un contexte de recapitalisation et de procédure de sauvegarde dont béné- ficie La Tribune jusqu’à fin décembre 2011. Elle a affirmé alors qu’elle veil- lerait à mettre en œuvre « toutes les solutions possibles de formation et de reclassement interne ». Mais David Larbre s’inquiète au nom du SNJ : « Avec ce plan social, il resterait une soixantaine de cartes de presse, ce serait la plus petite rédaction quoti- dienne nationale de France » (presque trois fois moins qu’aux Echos). Les experts pointent ce que disent les élus depuis longtemps : une majorité des tâches de secrétariat de rédaction (SR) seraient transférées sur les rédigeants, ce qui n’est pas faisable. Le projet de Jacques Rosselin, directeur de la Sauver La Tribune et le pluralisme de la presse En mauvaise posture, et menacé par un PSE mutilant, le quotidien économique fait appel aux pouvoirs publics pour aider à préserver la pluralité de la presse économique quotidienne. (Suite page 2) 11070174-SNJ-Info-116-a_Mise en page 1 16/09/11 10:58 Page1

Sauver L Tˆ ˝˘ et l pu rai sm d - WordPress.com · 2011. 10. 13. · Actuellement, le CA est composé de seize personnes, dont dix issues de la presse quotidienne, régionale et

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Page 1: Sauver L Tˆ ˝˘ et l pu rai sm d - WordPress.com · 2011. 10. 13. · Actuellement, le CA est composé de seize personnes, dont dix issues de la presse quotidienne, régionale et

SNJ Section Ile-de-France33, rue du Louvre75002 ParisTél. : 01 42 36 84 23Fax : 01 45 08 80 33Mail : [email protected] : http://snj-paris-idf.org/Sur Twitter : twitter.com/snj_idf

N° 116 – Deuxième et troisième trimestres 2011 – 2 euros

Des nouvelles du Conseil

Si tu lis cet édito du SNJ Info, c’estque tu fais partie des quelque milleadhérents de la section régionaled‘Ile-de-France. Tu sais que le conseil de la région parisienne,composé de trente membres, a été renouvelé de la moitié d’entre eux en avril dernier. Le Conseil représente ses adhérents,donc toi, auprès des instances nationales du SNJ. Mais aussi tissedes liens entre les sections d’entreprise de la région francilienne,participe à nos combats, les faitconnaître, soutient nos militantsen difficulté, en période de recrudescence des attaques antisyndicales dans nos entreprisesde presse et de crise du journalisme. Autant dire que le conseil parisien revêt une importance de tout premier planpour chacun. Si nous t’avons parutrop peu communiquer ces derniers temps, nous comptonsbien nous manifester à toi de plus en plus souvent. En usant desnouveaux outils que nous avonsmis en place : le blog (http://snj-paris-idf.org/), le compte Twitter(twitter.com/snj_idf) et la liste dediffusion de la section régionale.Sans oublier le SNJ Info. Dès la rentrée prochaine, nous organiserons aussi des tablesrondes sur notre métier, et convierons ceux qui le souhaitentà assister à une séance du Conseil.Nous préparons aussi le prochaincongrès national du SNJ, organisécette année à Autrans, du 5 au 8 octobre. Le conseil d’Ile-de-Francey jouera tout son rôle, pour sesadhérents, pour le journalisme,pour le SNJ.Jean-Bernard Gervais, secrétaire général de la section francilienne du SNJ

daNS ce NumérO l Page 2 Nouvelle tentative de réforme à l’aFP l Page 3 débat public du SNJ Ile-de-France : « L’information, à quels prix? » l Page 4 La commission arbitrale côté SNJ. Studio Press : dix journalistes à réintégrer1

SNJ INFO116

Quels investisseurs apporteront 5 mil-lions d’euros pour recapitaliser La Tri-

bune, d’ici la fin de l’année 2011? Ils’agit de sauver un titre, mais aussi depréserver le pluralisme de la presse éco-nomique quotidienne française, rien demoins! Le SNJ de La Tribune prépareainsi le rappel de ses troupes et detous ses confrères franciliens pour lan-cer un appel aux pouvoirs publics, lorsd’une manifestation devant l’Assem-blée nationale. Histoire de soulignerle devoir de pluralisme devenu consti-tutionnel (art. 35), car il n’y a que deuxquotidiens économiques en France : Les

Echos et La Tribune.Doté de la confiance de 80 % d’abon-nés (institutionnels, banques, assu-rances, gestionnaires de patrimoine,notaires, etc.), La Tribune, née audébut des années 1980, disposait en2010 d’une diffusion payée officiellede 79164 exemplaires, derrière Les

Echos (120444 exemplaires). Soucieuse de fiabilité pour une telleclientèle, très lisible, de plus petit for-mat que son concurrent, elle se veut« plus poil à gratter » que celui-ci, ex-plique David Larbre, délégué syndicalSNJ de La Tribune. Malgré ces atouts,« des investisseurs sérieux ont fui », re-connaît-il, s’avouant « pessimiste »  :  sirien ne change, « il restera moins de

2millions d’euros dans la caisse fin dé-cembre 2011; on est donc au bord dela liquidation ou de la cessation de paie-ment. Nous craignons que l’entreprisesoit mise aux enchères au tribunal decommerce. N’importe quel repreneurpourrait faire une proposition ».

Trop peu de journalistesFin juin 2011, la PDG, Valérie Décamp,a présenté un plan social prévoyant lasuppression de 17 postes, réorganisa-tion « inéluctable », selon elle, dansun contexte de recapitalisation et deprocédure de sauvegarde dont béné-ficie La Tribune jusqu’à fin décembre2011. Elle a affirmé alors qu’elle veil-lerait à mettre en œuvre « toutes lessolutions possibles de formation et dereclassement interne ».Mais David Larbre s’inquiète au nom duSNJ : « Avec ce plan social, il resteraitune soixantaine de cartes de presse, ceserait la plus petite rédaction quoti-dienne nationale de France » (presquetrois fois moins qu’aux Echos). Les experts pointent ce que disent les élusdepuis longtemps : une majorité destâches de secrétariat de rédaction (SR)seraient transférées sur les rédigeants,ce qui n’est pas faisable. Le projet deJacques Rosselin, directeur de la

Sauver La Tribuneet le pluralisme de la presseEn mauvaise posture, et menacé par un PSE mutilant, le quotidien économique fait appel aux pouvoirs publics pour aiderà préserver la pluralité de la presse économique quotidienne.

(Suite page 2)

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2SNJ INFO

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nouvelle tentative de réforme à l’AFP

viE DES EnTrEPriSES

Une proposition de loi défendue parJacques Legendre (UMP) devait êtremise à l’ordre du jour du Sénat le 8 juin.Face à l’hostilité des personnels del’Agence, l’examen du texte a été re-porté à l’automne 2011, son rapporteurJean-Pierre Leleux (UMP) devant ren-contrer les syndicats entre-temps.Pour la section SNJ de l’Agence, cetexte est porteur de trop d’incertitudes,notamment sur la définition des missionsde l’AFP et la composition du conseild’administration. Entretien avec Dimitride Kochko, délégué syndical SNJ.

Quelle est le principal danger decette proposition?

Dimitri de Kochko : Ce texte redéfinit lepérimètre des missions d’intérêt géné-ral remplies par l’AFP uniquement demanière comptable, et les lie auxcontraintes budgétaires, ce qui repré-sente un péril mortel. L’agence est néed’une volonté politique, à l’époqueunanime. Elle assure par essence unemission d’intérêt général en apportantaux citoyens une information quin’obéit pas à des impératifs de rentabi-lité commerciale, ce qui est le cas d’uneentreprise privée. Nous comprenons lesouci de répondre aux obligations dic-tées par la Commission européenne,mais nous attirons l’attention du législa-teur sur le fait que la conception mêmed’une agence comme l’AFP est toute en-tière dédiée à une mission d’intérêt gé-néral, indépendamment de la questionde son budget.

Et sur la composition du conseild’administration ?

Actuellement, le CA est composé deseize personnes, dont dix issues de lapresse quotidienne, régionale et natio-nale. Le texte prévoit de ramener à

Sauver La Tribune (Suite de la première page)

quatre le nombre de représentants desmédias et la cooptation de « six per-sonnalités indépendantes disposantd'une expérience reconnue dans lesdomaines de l'information et du jour-nalisme, de la vie internationale des en-treprises de médias d'information et dela francophonie, dont au moins unepersonne de nationalité étrangère ».Nous estimons qu’il est impossible delaisser dans l’imprécision, et à termedans l’arbitraire, le choix de six per-sonnes sur seize, dont le futur PDG.Nous suggérons une liste d’organisa-tions et d’institutions représentativesdont seraient issues ces personnalités :associations de consommateurs, Fédéra-tion internationale des journalistes, etc.

Dans quel contexte syndical pro-pre à l’AFP s’inscrit cette nouvelletentative de réforme ?

En gros, tous les syndicats sont d’accordsur ces critiques. Mais la CGT et Sud re-fusent tout changement. Le SNJ accepteque le statut soit toiletté à condition dene pas porter atteinte aux principesconstitutifs de l’AFP. A l’assemblée gé-nérale du 8 juin, CGT, FO et Sud ont ap-pelé à une grève de vingt-quatre heures,

qui a été votée par 120 personnes. SNJet CFDT, de leur côté, ont préféré appelerà une grève "symbolique" de deuxheures, pendant la réunion des prési-dents au Parlement pour fixer l’ordre dujour. Ceux-ci ont reporté l’examen dutexte. Nous avons donc obtenu satis-faction : nous ne voulions pas d'un exa-men hâtif de cette proposition de loi. La proximité, alors, des élections des re-présentants du personnel à l’AFP ex-plique en fait la surenchère de la CGT,FO et Sud, qui savaient, en réalité, toutcomme le SNJ, que la proposition neserait de toute façon pas examinée parles sénateurs en juin. Depuis la rentrée,l’intersyndicale a retrouvée son unionpour mener ce combat.

Est-ce qu’il ne s’agit pas, aveccette réforme, d’un vieux serpentde mer?

Cette tentative de changer le statut estau moins la quatrième depuis une ving-taine d’années, pour des raisons légi-times ou non. La proposition de réformeactuelle tient compte des objections etdes luttes du personnel de l’AFP, maisprésente encore beaucoup trop d’im-perfections. Propos recueillis par M.-F. M

rédaction, est intéressant, mais il y a troppeu de moyens humains pour assurer unerédaction bimedia papier-numérique.« Les élus m’ont nommé pour ester enjustice, poursuit David Larbre, en raisond’irrégularités dans le plan social, notamment les propositions de reclas-sement des SR vers le service informa-tique, sous la convention de la publicité!D’où un prochain et probable référé autribunal pour stopper la procédure ».Parmi les 8 SR, 6 sont élus, dont 2 DS,précise David, lui-même SR. Le SNJ estle syndicat majoritaire de La Tribune

(86% des voix au CE en 2009).« C’est un immense gâchis, s’indigneDavid Larbre. Les comptes avaient étéremis à zéro en 2008, et Bernard Arnault(LVMH) avait laissé trois ans de trésore-rie en cash avant de céder le titre à AlainWeill qui avait nommé alors Valérie Dé-camp (venue de la pub et de Métro), à

qui il a cédé 80% du capital pour 1eurosymbolique en mai 2010. Elle avait en2008 trois ans pour bâtir un projet. Maisson entourage ne connaît pas la presse.Bilan : 3 directeurs de la rédaction diffé-rents, 3 nouvelles formules, la moitié desjournalistes partis en trois ans. Il y avait134 cartes de presse en 2008, le PSE ac-tuel en prévoit 60.  » L’aide de l’Etats’élève à 5 millions d’euros pendant cetemps. Mais ni Alain Weill ni ValérieDécamp n’ont investi dans La Tribune. « Il faut interpeller le gouvernementpour lui rappeler son devoir de plura-lisme, martelle David Larbre. Il faut quele gouvernement aide à trouver des in-vestisseurs, à moins qu’il n’ait intérêt àce qu’il ne reste que Les Echos, détenupar Bernard Arnault, proche du prési-dent Sarkozy, et qui serait dirigécomme une force de frappe du candi-dat UMP à la présidentielle… » M.-F. M

Une énième tentative de réformer le statut de l’Agence France Presse (loi du 10 janvier 1957) suscite la vigilance et le scepticisme des syndicats.Sous leur pression, l’examen du texte qui la définit a été reporté.

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3SNJ INFO

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La section SNJ d'Ile-de-France avait in-vité, le 28 avril 2011, Denis Robert, quia dénoncé les agissements de la multi-nationale Clearstream, et Ignacio Ra-monet, ancien directeur du Monde

diplomatique, à un débat animé parEric Marquis sur le thème de « L'infor-mation, à quels prix ? »Ignacio Ramonet y a exposé son ana-lyse sans concession des répercussionsde la révolution numérique à la fois sur

notre société et notre métier. « Internetest une réalité technique équivalant àl'invention de l'imprimerie. En 1440,avec Gutenberg, c'est l'ensemble de lasociété qui est totalement bouleversée.La diffusion des connaissances et du sa-voir est possible, ce n'est plus l'apa-nage exclusif d'un tout petit groupe. Aujourd'hui, nous sommes confrontésau même bouleversement, d'où l'extinc-tion d'un certain nombre de médias».

Une gigantesque révolutionEt l'ancien directeur du Monde diplo-

matique d'expliquer que cette révolu-tion vient des Etats-Unis, où une centainede journaux a disparu en quelques an-nées et plus de 25000 journalistes ontété licenciés. « L'écosystème des médiasa été blessé, poursuit-il. Mais la dispari-tion des dinosaures a conduit à l'appa-rition des mammifères ! Dans le nouveaubiotope surgissent des médias diffé-rents. Internet n'est pas qu'un média, c'est

aussi un média ! N'importe qui détientaujourd'hui un média planétaire. Lesjournalistes ont perdu le monopole del'information !» Et Denis Robert, l’autreinvité du débat, d'acquiescer.

Dix ans de combat pour une même enquête« L'information ? J'ai donné. Moi, j'aipayé le prix... » L'ancien journaliste deLibération a résumé « dix années dejournalisme et de combat  » (notam-ment juridique) pour avoir mené uneenquête sur Clearstream qui lui a coûtédu temps, de l'énergie et de l'argent,même si sa bataille pour résister auxpressions et faire connaître ce que sonenquête a révélé est exemplaire pourtoute la profession. « Je me bagarre encore, dit-il. La Courde cassation ouvre les fenêtres. On aadmis le sérieux de l'enquête et le faitqu’elle est d'intérêt général. Les déci-sions de justice récentes sur cette affaireouvrent de nombreuses possibilitéspour les journalistes. Depuis janvier,sept confrères ont gagné en se fondantsur la récente jurisprudence ». Mais les « roitelets de l'information »qui ont critiqué leur confrère esseulé aucours de cette longue bagarre journa-listique et judiciaire ne le soutiennentpas davantage aujourd'hui. Le journa-liste n'en a cure. Si la presse a fait peud’écho à la décision de justice, interneta pris naturellement le relais. «  Au-jourd'hui, je peux ressortir mes livres,mes films. Je me bats aussi pour qu'uneenquête parlementaire européenne soitmenée sur Clearstream. » Denis Robert travaille actuellement surun film mettant en lumière des ré-flexions sur le journalisme et l'informa-tion, et suit des étudiants jusqu'àl'obtention de leur diplôme. Dans la salle, les questions fusent. « Le

DEBAT PUBLiC DU SnJ iLE-DE-FrAnCE

La révolution numérique, avec la facilité et l’apparente gra-tuité qu’elle apporte, a véritablement bouleversé l’informa-tion, alors que le prix à payer pour informer librement estparfois très lourd. Un débat du SnJ a abordé ces questions.

prix à payer pour l'information n'est-ilpas le sacrifice de la complexité? » SiDenis Robert a parfois le sentiment« d'être un dinosaure de l'information »,il pense surtout que ses enquêtes au-raient dû être publiées par un journal. « C'est un choix économique fait par leséditeurs que d'abandonner l'investiga-tion », estime-t-il.

L’investigation change de supportIgnacio Ramonet confirme, tout envoyant l'émergence de nouveaux phé-nomènes : « Le journalisme d'investiga-tion est en train de disparaître, mais estapparu Wikileaks ! Par ailleurs, auxEtats-Unis, des mécènes créent des fon-dations pour financer des enquêtes.D'ailleurs, en 2010, un site internet, Pro-Publica, financé par des dons, a rem-porté le prix Pulitzer. » Dans cetterévolution numérique qui donne un incontestable coup de vieux aux édi-teurs traditionnels apparaissent d'autresbusiness models. Aux journalistes des'adapter en profitant des nouvelles op-portunités. «  Je veux de l'information bio. Sansmensonges, sans OGM, sans pesti-cides ! Seuls les journalistes peuvent lagarantir ainsi. C'est pourquoi noussommes les garants de la démocratie »,conclut Ignacio Ramonet. C. P.

Bibliographie : « Révélation$ », par Denis Ro-bert, avec Ernest Backes, Arènes Editions, 2011. « L'explosion du journalisme. Des médias demasse à la masse des médias », par Ignacio Ra-monet, Editions Galilée, 2011.

«L’information, à quels prix?»

Conseil et bureau d’ile-de-France 2011-2012

A l'issue de l'assemblée générale du 28 avril2011, le conseil d’administration du SNJ dela région Ile-de-France a renouvelé la moitiéde ses membres. Un nouveau bureau a étéélu. Le nouveau secrétaire général duConseil est Jean-Bernard Gervais.

Un public attentif et intéressé.

Denis robert et ignacio ramonet, les deux intervenants invités au débat.

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4SNJ INFO

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PERMANENCES SNJ33, rue du Louvre, 75002 ParisACTION SyNDICALE EN ENTREPRISE : le jeudi, de 18 h 30 à 20 h 30EMPLOI : le jeudi, de 19 h 30 à 20 h 30JURIDIQUE : le mercredi, de 10 h 30 à 12 h partéléphone et de 14 à 16 h sur place

SNJ INFO (sous-titre : L761-2)

Organe du SNJ Ile-de France33, rue du Louvre, 75002 ParisTél.: 01 42 36 84 23Fax : 01 45 08 80 33Site : www. snj.frMail : [email protected]

Directeur de la publication :Mario GuastoniResponsable éditorial : Eric BissengerCommission paritaire : 0996-5548Imprimerie : Hemmerlé 75002 Paris

ver une solution acceptable pour lesparties. Désormais, d'importantes ten-sions apparaissent : mandat des repré-sentants patronaux pour ne pasdépasser une certaine somme, chan-tage à la signature, remise en cause decertaines demandes du salarié. Depuisun an, une nouveauté va dans un mau-vais sens : certains employeurs propo-sent zéro centime au-dessus de quinzeans, justifiant ce choix... par la crise, ladifférence entre journalistes et autressalariés moins bien traités par le codedu travail et estimant, in fine, que lasomme perçue par le salarié pour sesquinze premières années est suffisante.C'est donc pied à pied que les négo-ciations ont lieu, afin que les confrèrespuissent partir avec des sommes dé-centes – alors qu’on leur reproche ausside profiter d'un « effet d'aubaine ». Deux questions prioritaires de constitu-tionnalité (QPC) sur la légitimité de lacommission ont été posées par des em-ployeurs, mais n'ont pas abouti. C. P.

QUESTionS JUriDiQUES

Les arbitres du SnJ sont les plussouvent présents dans cette juridiction d’exception, qui intervient sur les indemnités aprèsun licenciement pour faute graveou au-delà de quinze ans d’ancienneté (cf SnJ info n°114).

Le SNJ s’occupe de plus de 80% desdossiers qui passent en Commission ar-bitrale. Plusieurs de nos militants sontmobilisés à la relecture des mémoires etcomme arbitres lors du passage dujournaliste devant cette juridiction d'ex-ception qui se tient rue Lafayette, dansles locaux de la Carte de presse. Pourdes raisons évidentes, ce sont surtoutdes personnes de la région parisiennequi sont désignées comme arbitres.Heureusement, d'autres militants deprovince, expérimentés, prêtent leurconcours quand il y a des problèmes de

disponibilité. Par ailleurs, une employéeà mi-temps s'occupe des saisines, desphotocopies des dossiers et du plan-ning afin que le SNJ puisse toujoursavoir deux bénévoles disponibles pourétudier les dossiers et être sur place lorsdes audiences. C'est une très grosse or-ganisation. La commission est paritaire, mais les at-taques d'employeurs qui vivent mal dedevoir payer des clauses de cession,des licenciements au-delà de 15 ansd'ancienneté, ou justifier des licencie-ments pour fautes, la fragilisent. Autre-fois, les relations pouvaient laisserpenser à un relatif « gentleman agree-ment » entre les représentants des em-ployeurs et ceux des salariés, qui (sous laprésidence d'un haut magistrat rompu àces questions) discutaient autour de latable de chaque cas en tentant de trou-

La Commission arbitralecôté SnJ : l’envers du décor

Fraude de Studio Press (groupe roularta)

Dix journalistes à réintégrer !Par dix arrêts du 24 mai 2011, laCour d’appel de Paris a ordonné à la société Studio Press, filiale à100% du Groupe Express-rou-larta, de réintégrer dix des jour-nalistes du magazine Radikal

injustement licenciés en 2005. Radikal était un important titre de lapresse rap. Le 20 septembre 2004, sasociété éditrice, Studio Press, l’avaitconfié en location-gérance à la société al-lemande Imag. Le tribunal de grandeinstance de Bobigny avait donné sonautorisation. Mais Imag a renoncé àson projet : c’est une autre société, Pop-Média, créée pour l’occasion par Imag,qui a repris illégalement ce titre en loca-tion-gérance avant d’être mis quelquetemps plus tard en dépôt de bilan et fi-nalement en liquidation judiciaire. La cour d’appel de Paris a jugé que lecontrat de travail des dix salariés a étéfrauduleusement transmis à la sociétéPop-Média en 2004. Elle a jugé enconséquence le licenciement des jour-nalistes par le liquidateur de Pop-Médiasans effet. Les dix salariés auraientalors dû être réintégrés au sein de leur

société d’origine, Studio Press, ce quileur a été refusé à l’époque. StudioPress a été condamné à leur payer unrappel de salaire sur cinq ans (environ1,5 million d’euros pour les dix), ainsiqu’à les réintégrer, sous astreinte de500 euros par jour et par personne, àpartir du 1er juillet 2011. Studio Press doitégalement rembourser la totalité desmontants que les AGS (Garp) ont verséaux dix journalistes, lors de leur licen-ciement, le 10 octobre 2005. Ces in-demnités étant laissées aux dix, à titrede réparation du préjudice. Le 1er juillet2011, les dix journalistes se sont doncprésentés, accompagnés de maîtreCohen, huissier de justice à Paris, ausiège de la société Studio Press, où ilsont été reçus par la direction des res-sources humaines. Celle-ci leur a af-firmé alors que la société n’était pas enmesure de les réintégrer. Depuis 2005, les dix anciens salariésexercent leur métier de journaliste entant que pigistes pour diverses publica-tions, mais aucun d’entre eux n’a re-trouvé un emploi salarié stable.

D’autres infos sur les entreprises d’ile-de-France

sur le bloghttp://snj-paris-idf.org

et sur Twittertwitter.com/snj_idf

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