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SAVOIR-VOIR COLLECTIF ET DÉVELOPPEMENT DE CAPACITÉS RÉSEAU Pierre-Jean Barlatier , Catherine Thomas Lavoisier | « Revue française de gestion » 2007/1 n o 170 | pages 173 à 190 ISSN 0338-4551 ISBN 9782746216846 DOI 10.3166/rfg.170.173-190 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2007-1-page-173.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Lavoisier. © Lavoisier. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © Lavoisier | Téléchargé le 22/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167) © Lavoisier | Téléchargé le 22/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167)

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SAVOIR-VOIR COLLECTIF ET DÉVELOPPEMENT DE CAPACITÉS RÉSEAU

Pierre-Jean Barlatier, Catherine Thomas

Lavoisier | « Revue française de gestion »

2007/1 no 170 | pages 173 à 190 ISSN 0338-4551ISBN 9782746216846DOI 10.3166/rfg.170.173-190

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2007-1-page-173.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour Lavoisier.© Lavoisier. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans leslimites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de lalicence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit del'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockagedans une base de données est également interdit.

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L’objectif de cet article est

de comprendre

le rôle des capacités réseau

dans la dynamique de

création de connaissances

en prenant appui sur une

recherche-intervention

menée au sein d’un réseau

de firmes localisé. Pour ce

faire, nous proposons un

enrichissement du concept

de capacités réseau en

intégrant des travaux sur

le capital social, puis nous

montrons le rôle-clé de la

dimension cognitive dans

le renforcement des

capacités du réseau à créer

des connaissances.

L’environnement négocié que représente le réseauest une source privilégiée d’acquisition et decréation de connaissances : la structure du réseau

fournit à la fois la stabilité nécessaire aux processusd’apprentissage collectif et une certaine variété issue desbases de connaissances des différentes organisations quiy sont impliquées. Foss (1999) et Kogut (2000) souli-gnent l’émergence à travers le temps, les interactions etl’expérience de « capacités réseau » permettant à la foisdes gains de coordination et d’apprentissage. En ce sensces capacités sont essentielles à la création, l’accumula-tion et le transfert des connaissances. L’objectif de cetarticle est de comprendre le rôle des capacités réseauxdans la dynamique de création de connaissances au seind’un réseau de firmes localisé.Dans la mesure où la création de connaissances organi-sationnelles est un processus social, notre démarche pro-pose d’abord d’enrichir le concept de capacités réseauen nous appuyant sur les travaux de Nahapiet et Ghoshal(1998) sur le capital social. En effet, ces auteurs ajoutentaux dimensions traditionnelles du capital social, à savoirles dimensions structurelle et relationnelle, une troi-sième dimension, la dimension cognitive. Cet articles’interroge alors sur le rôle-clé de la dimension cogni-tive sur la dynamique de création de connaissances.

D O S S I E R

PAR PIERRE-JEAN BARLATIER,CATHERINE THOMAS

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Notre étude s’appuie sur une recherche-intervention que nous avons menée dansle cadre de la technopole de Sophia-Anti-polis (Alpes-Maritimes, France). À lademande d’une association majeure decette technopole, Telecom Valley® (TV),un projet de conception puis d’implémen-tation d’une solution TIC (le projet Know-ledge Management Platform, KMP)devant permettre de renforcer les dyna-miques d’échange et de combinaison deconnaissances au sein du cluster Télécomsophipolitain, a été lancé en janvier 2003.Nous focalisons l’étude sur l’impact duprocessus de codification, consubstantielà l’élaboration de la solution TIC, dans lerenforcement des capacités réseaux et toutparticulièrement de la dimension cogni-tive. Nous faisons l’hypothèse que laconstruction des schémas interprétatifs,des règles, des normes et des options defacilitation, inscrits dans la technologiefavorise le développement d’un savoir-voir collectif particulièrement importanten ce qui concerne la capacité des firmesà échanger et combiner des connaissanceshétérogènes.Cet article s’articule en trois parties : unepremière partie analyse l’impact desréseaux sur les processus de création deconnaissances organisationnelles, en sefocalisant sur le concept de capacitésréseau ; une seconde partie présente l’étudeempirique issue du projet KMP, en insistanttout particulièrement sur le processus decodification des connaissances réalisé ausein du projet KMP; la troisième et der-nière partie étudie l’émergence d’un savoir-voir collectif et analyse son influence sur ladynamique de création de connaissances ausein d’un réseau télécom.

I. – LES MÉCANISMES DECRÉATION DE CONNAISSANCES

AU SEIN DE RÉSEAUX

Après avoir souligné l’importance des rela-tions sociales dans les processus de créationde connaissances, nous analyserons leconcept de capacités réseau en nousappuyant sur les travaux de Nahapiet etGhoshal (1998).

1. Les processus de création de connaissances organisationnelles

Selon Kogut et Zander (1992) et Nahapietet Ghoshal (1998) la création de connais-sances organisationnelles est avant tout unprocessus social. Dans une perspectivesimilaire, Shawney et Prandelli (2000)montrent que le processus de création deconnaissances organisationnelles est unprocessus émergent et dynamique où unenouvelle connaissance est l’output d’uncouplage synergétique entre les contribu-tions individuelles et l’interaction sociale(Shawney et Prandelli, 2000). Cetteconception est proche de la perspectiveschumpétérienne avancée par Moran etGhoshal (1996) et Nahapiet et Ghoshal(1998) selon laquelle la création deconnaissances organisationnelles est fondéesur deux mécanismes-clés : l’échange et lacombinaison (même si ces auteurs admet-tent que d’autres processus peuvent exister,en particulier au niveau individuel…). Lacombinaison et l’échange sont des proces-sus sociaux complexes qui reflètent l’en-chevêtrement des formes de connaissancesdans une organisation capable de créer, departager, de coordonner et de structurer desconnaissances. En ce sens le capital socialfacilite la création et le développement desconnaissances organisationnelles en affec-

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tant les conditions nécessaires aux méca-nismes d’échange et de combinaison. Ens’appuyant sur les travaux initiaux deMoran et Ghoshal (1996), Nahapiet et Ghoshal (1998) ont identifié quatre condi-tions nécessaires à l’échange et à la combi-naison :1) l’opportunité de faire l’échange et/ou lacombinaison ;2) l’anticipation de la valeur créée par l’in-teraction ;3) la motivation qui garantit l’engagementdes parties ;4) enfin, la capacité de combiner lesconnaissances.La première condition souligne la nécessitépour les organisations de s’ouvrir vers l’ex-térieur afin de développer leurs perspec-tives d’exploration, indispensables à lacréation de nouvelles connaissances. Danscette optique, l’émergence d’un réseau defirmes grâce à des phénomènes de proxi-mité spatiale et/ou technologique crée desopportunités d’échange. Selon Håkansson(1993), le recours à la forme organisation-nelle en réseau est un moyen efficace pouracquérir des ressources externes comme laconnaissance, car l’établissement de rela-tions interorganisationnelles qui composentun réseau, stimulées par des dynamiques de proximité, conduit à la création de com-plémentarités technologiques, d’interdé-pendances non marchandes et de flux d’informations, qui représentent autantd’externalités positives. Ainsi, l’idée de« diversité combinatoire » proposée parHåkansson (1993) et Kogut (2000) repose àla fois sur la complémentarité des bases deconnaissances des différents acteurs duréseau et sur l’émergence de capacitésréseau qui facilitent les processusd’échange et de combinaison.

2. Les capacités réseau

Selon Foss (1999), les capacités réseaus’apparentent au concept de capacité définipar la théorie des ressources, et sont accu-mulées à travers le temps et l’expérience.Les capacités réseau sont vues comme desfacteurs bénéfiques qui résident hors de lafirme individuelle, et qui émergent desinteractions entre les firmes. Les différentesdéfinitions des capacités réseau proposéesdans la littérature font toutes référence à desgains de coordination et d’apprentissage(Kogut, 2000). Les travaux de Kogut (ibid.)mettent en évidence deux dimensions descapacités réseau, la structure et l’identité.L’auteur souligne alors le rôle de la dimen-sion identitaire notamment sur la généra-tion de règles de coordination.Ces travaux suggèrent le rôle-clé des capa-cités réseau dans la dynamique de créationde connaissances : coordination et appren-tissage collectif facilitant l’échange et lacombinaison de connaissances complémen-taires. Toutefois, leur définition demeureencore très abstraite et peu opérationnelle.Dans la mesure où la création de connais-sances organisationnelles est un processusfondamentalement social, nous suggéronsalors d’enrichir la notion de capacitésréseau en mobilisant les travaux de Nahapiet et Ghoshal (1998).Dans leur analyse du capital social, Nahapiet et Ghoshal (1998) se réfèrentd’abord aux travaux de Granovetter (1985),selon lesquels tout collectif social (commeun réseau) est encastré dans des relationsstructurelles et relationnelles. Le « structu-rel » représente les propriétés générales duréseau dans son ensemble, comme la confi-guration du réseau et la nature de ses liens.Le « relationnel » représente la qualité des

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relations dyadiques du réseau, le genre derelations personnelles que les acteurs déve-loppent entre eux à travers l’évolution deleurs interactions en soulignant les relationsde confiance, les normes de coopération, lesobligations et attentes, et l’identification.Nahapiet et Ghoshal (1998) ajoutent unetroisième dimension au capital social : ladimension cognitive, fondée sur les repré-sentations partagées et les systèmes designification. Dans la mesure où le proces-sus de création de connaissance est sociale-ment encastré et dépendant de son contexte,les phénomènes comme les langages com-muns, les croyances et les codes partagésdeviennent centraux Nooteboom (2000).Ainsi nous proposons d’enrichir le conceptde capacités réseau en mobilisant lesdimensions structurelle, relationnelle etcognitive du capital social proposées parNahapiet et Ghoshal (1998). Il s’agira alorsd’analyser l’influence de ces différentesdimensions sur les processus de création deconnaissances, notamment sur les quatreconditions nécessaires aux mécanismes decréation de connaissance. Nous étudieronstout particulièrement l’impact du processusde codification développé lors de la concep-tion d’une solution TIC sur les dimensionsdes capacités réseaux et par effets joints surles conditions de création de connaissances.

II. – LE PROJET KMP: LA CONSTRUCTION D’UNE

SOLUTION TIC DE KM À L’ÉCHELLE D’UN RÉSEAU

Après une brève description du contexte de larecherche, nous présenterons le projet KMP.

1. Le contexte de la recherche : le cluster« Télécom» de Sophia Antipolis

L’illustration de cette recherche se situe ausein de la technopole de Sophia-Antipolis(Alpes-Maritimes, France). Cette techno-pole a été créée ex-nihilo, sans tissu indus-triel ou tradition universitaire, par unevolonté étatique forte. Pendant les années1980 et 1990 les organismes de normalisa-tion des télécoms se sont implantés sur lesite (l’ETSI en 1988 et le W3C en 1994),constituant de fait un pouvoir d’attractionimportant ; ce qui permit au cluster1 Télé-com d’atteindre un niveau critique tant entermes « d’effet de masse » que de diversitédes acteurs. Toutefois ce cluster souffraitd’un manque de liens internes essentiels àl’exploitation et au développement descompétences et connaissances présentes surle site. Aussi de nombreuses associations sesont créées dans les années 1990 pour tenterde favoriser les synergies et de profiter ainsides proximités technologiques et géogra-phiques.Au début des années 2000, les princi-pales caractéristiques du cluster « Télécom »sophipolitain (cluster TS) peuvent être résu-mées de la façon suivante :1) les firmes évoluent dans un contextemultitechnologique couvrant un largespectre d’industries de la micro-électro-nique à l’informatique ;2) dans la mesure où les maison-mères sont localisées à l’étranger, les firmessophipolitaines ont des liens forts avec l’externe ;3) les firmes sophipolitaines souhaitentcombiner des stratégies de partenariat

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1. Un cluster est une concentration géographique d’acteurs technologiques unis par des chaînes de valeur écono-miques, évoluant dans un environnement bénéficiant d’infrastructures de soutien, partageant une stratégie communeet visant à attaquer un même marché (Cooke et Huggins, 2003).

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locales et globales dans une logique de ges-tion modulaire de la chaîne de valeur ; et4) au niveau local, la dynamique du clusterrepose essentiellement sur des interactionssociales développées par de multiples clubset associations, toutefois une absence desynergies effectives est constatée par lesprincipaux acteurs.Notre étude empirique se focalise sur lacommunauté d’entreprises TelecomValley®2 (TV). Acteur important de l’envi-ronnement économique reconnu au planinternational, TV rassemble aujourd’huienviron 70 membres du cluster « Télécom »de Sophia-Antipolis, représentant locale-ment plus de 10 000 salariés et 3 milliardsd’euros de chiffre d’affaires annuel.Aujourd’hui les membres de TV partagentune vision commune : « Être la premièrecommunauté en Europe qui anticipe, déve-loppe et promeut les usages, services ettechnologies qui bâtissent le futur des télé-communications. »

2. Le projet KMP

Le projet KMP propose de construire unesolution innovante de « Knowledge Mana-gement » partagée entre les différentsacteurs de TV. Cette solution est une com-posante d’un portail web destiné à une com-munauté d’entreprises, d’institutionnels etd’organismes de recherche pour instrumen-ter, de la manière la plus efficace possible,un processus d’échange et de combinaisonde leurs connaissances et compétences.L’équipe de conception du projet KMP estcomposée d’économistes et de gestion-

naires appartenant au GREDEG (équipesLatapses et Rodige) et à Télécom Paris,d’informaticiens, de psychologues et d’er-gonomes appartenant à l’INRIA (équipeAcacia) et à l’ENST Bretagne. Ce projet,labellisé par le RNRT en mai 2002, a mobi-lisé 187 hommes/mois sur une durée dedeux ans (2003-2005). Il entre aujourd’huidans une phase de pré-industrialisation.

Les objectifs du projet KMP

Le déploiement de ce service web de com-pétences s’articule autour de trois typesd’usages : (scénario 1) avoir et donner unevisibilité générale de TV, (scénario 2) favo-riser les coopérations entre entreprises et,(scénario 3) favoriser les coopérations entrela recherche publique et la recherche pri-vée. La solution technique repose sur unecartographie des compétences des acteursde TV qui doit permettre :– un repérage des compétences (cartogra-phie) et leur description (guide) ;– un repérage des acteurs (firmes, orga-nismes de recherche, organismes de déve-loppement régional, etc.) et de leurs inter-actions.En ce sens la conception de la solution TICsuppose une codification des compétences,des acteurs et de leurs interactions.

La codification proposée dans le projetKMP

La codification suppose un processus d’ex-tension (ou d’articulation) qui vise àconvertir la connaissance tacite en connais-sance explicite, et un processus d’abstrac-

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2. TV est une association à but non lucratif créée en 1991 par 8 membres fondateurs : Aérospatiale Satellites (main-tenant Alcatel Space Industries), AT&T Paradyne, Digital Equipment (maintenant Hewlett-Packard/Compaq), ETSI(European Telecommunications Standards Institute), France Télécom, IBM, Rockwell International et Texas Ins-truments. Des informations complémentaires sont disponibles sur l’URL: http://www.telecom-valley.fr

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tion qui vise à identifier des catégories abs-traites, facilitant la communication et la dif-fusion, notamment sous forme informa-tique. Les processus d’articulation etd’abstraction sont très liés, ce qui expliquequ’ils sont souvent confondus. Le premierdonne une forme au phénomène, le seconden propose une structure.La première étape consiste à expliciter lesconnaissances essentielles pour les acteursconcernés dans des codes socialement par-tagés ; ces codes peuvent être des images,des cartes, toutes formes symboliques uti-lisées comme des langages3 (Håkanson,2002). L’articulation correspond à un pro-cessus de différentiation des diverses caté-gories d’expérience (Boisot, 1998). Laseconde étape consiste en l’identificationde codes ou catégories abstraites permet-tant d’éclairer la structure sous-jacente duphénomène étudié, structure dont la perti-nence est à relier avec l’objectif poursuivide la codification. L’abstraction4 est unprocessus d’association des différentescatégories utilisées lors de la phase précé-dente (Boisot, 1998). Cette phase permetde faciliter la diffusion rapide des connais-sances. Toutefois, cette étape plus abs-traite que la précédente, peut générer uneperte de finesse dans la retranscription desconnaissances et compétences, et uneéventuelle déperdition de ces dernières,notamment si les acteurs ayant participéau processus d’articulation ne sont plusmobilisés.Par conséquent, le processus de codificationa d’autant plus de chance de réussir etd’évoluer que les communautés d’acteurs

sont mobilisées dans la phase d’abstractiondes données (Lazaric et al., 2003). Laconfiance dans le processus de codificationrepose sur l’existence de « feed-back » per-manents entre connaissances tacites, articu-lées et abstraites.Les entretiens exploratoires menés en2001/2002 et début 2003, phase d’articu-lation, ont permis de délimiter le projet : ledomaine de référence (le cluster TS), lesactivités (différentes stratégies liées aunouage de partenariats), les flux d’infor-mations nécessaires à la réalisation de cesactivités (notamment sur les compétencesdétenues par les partenaires potentiels).La codification a alors principalementporté sur la représentation du cluster TS(modélisation de l’espace commun), lacodification des « savoir-faire » enmatière de partenariats (scénario d’usage)et la description des compétences, entermes de « savoir qui » et « savoir quoi »et non de « savoir comment ». Pour cefaire un nouveau référentiel des compé-tences a été élaboré : une compétence estune action qui mobilise des ressources(scientifiques et/ou technologiques et/oumanagériales) pour produire un délivrablequi participe à un système d’offres (Roubyet Thomas, 2004). Les connaissancesdétenues par les différentes équipes desmembres de TV apparaissent ainsi commedes ressources mobilisées par les compé-tences.Les catégories abstraites retenues pourdécrire une compétence constituent lesracines des différentes ontologies mobili-sées par le moteur sémantique. Les onto-

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3. Certains auteurs (Boisot, 1998) appellent cette étape « codification », d’autres « articulation » (Håkanson, 2002).4.Le processus d’abstraction est très proche de celui de « codification » au sens d’Håkanson, qui décrit la codifica-tion comme l’expression d’un savoir dans une forme relativement standardisée et fixe.

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logies, ou arbres sémantiques, définissentles termes utilisés pour décrire et repré-senter un champ de connaissances. Cesarbres très abstraits à la racine, proposentau niveau le plus fin un vocabulaire richeet varié (pour décrire par exemple uneaction ou des technologies), qui corres-pond au langage usuel des membres de la

communauté professionnelle. Une fois lesracines identifiées et validées par les utili-sateurs, le peuplement des ontologies sefait de façon incrémentale au fur et àmesure du travail de cartographie. Ainsides feed-back permanents entre les pro-cessus d’articulation et d’abstraction sontmaintenus.

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LA STRATÉGIE D’ACCÈS AU TERRAIN

Traditionnellement, la question de la conception d’outils TIC en sciences de gestions’inscrit dans les problématiques de recherche intervention.L’hypothèse que nous avons soutenue dans ce projet est qu’il est nécessaire, dans lalignée des travaux de Callon et Latour (1985), d’adopter une démarche de conception enboucles itératives, de placer les usagers au cœur de ces boucles et de mettre en place desprocessus d’intéressement de plus en plus larges. On peut à ce jour identifier quatreboucles de co-conception correspondant approximativement à une année : 2002 : élabo-ration du projet ; 2003 : élaboration, conception et implémentation de la solution tech-nique autour du scénario générique 1 ; 2004 : scénarios génériques 2 et 3 ; 2005 : app-ropriation de KMP par l’ensemble des acteurs de TV et poursuite du projet grâce auconcours du conseil régional et de la DRIRE (phase de préindustrialisation).Dans la perspective d’une recherche intervention, les interactions avec le terrain sesituent à deux niveaux qui se renforcent mutuellement : le dispositif d’interaction et ladémarche de connaissance (Hatchuel, 1994). Le dispositif d’interaction s’est organiséautour de quatre modalités principales : 1) des entretiens exploratoires (21) et des comités ad-hoc (10) auprès des utilisateurspotentiels pour définir les objectifs génériques assignés à la solution KMP ;2) des entretiens semi-directifs (38) réalisés auprès des utilisateurs pilotes pour capturerleurs pratiques et leurs logiques d’action récurrentes (scénarios d’usage) ;3) les comités de pilotage (8) pour valoriser périodiquement (périodicité généralementtrimestrielle) les résultats intermédiaires auprès des utilisateurs pilotes ;4) des entretiens individuels ou collectifs (18) pour l’évaluation auprès des utilisateurspilotes de la solution technique proposée dans chacune des boucles.La démarche de connaissance s’est construite par des confrontations itératives entre lessavoirs de l’intervenant (théories managériales des compétences, relations interfirmes,processus de création de connaissances, etc.) et ceux des acteurs concernés. Elle a croisédes approches top down et bottom up et favorisé l’émergence progressive, en collabora-tion avec les acteurs du terrain, de connaissances nouvelles : la chaîne de valeur du clus-ter sophipolitain (cf. figure 2), le modèle des compétences (Rouby et Thomas, 2004) etles ontologies des compétences.

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III. – RÉSULTATS ET DISCUSSION

Dans la mesure où notre recherche portesur la phase exploratoire du projet (proto-type implémenté à l’échelle d’une ving-taine d’organisations pilotes, entreprisesou organismes de recherche), il ne s’agitpas ici d’étudier l’influence de la solutionKMP sur les capacités réseaux et la dyna-mique des connaissances. Notre étude selimite à l’analyse de l’influence du proces-sus de codification sur les capacitésréseaux à créer des connaissances, tant auniveau des stratégies individuelles desacteurs (entreprises ou organismes derecherche) que collectives (développementdu cluster TS).La première partie s’interroge sur l’émer-gence et le développement d’un savoir-voircollectif. La seconde examine sesinfluences sur les différentes dimensionsdes capacités réseaux. Enfin, la dernièrepartie soulignera les interactions dyna-miques entre le processus de codification,les dimensions des capacités réseau, et lesconditions de création de connaissancesorganisationnelles.

1. Processus de codification et émergence d’un savoir-voir collectif

En « réifiant » un certain nombre d’élé-ments (concepts, modèles, représenta-tions), le processus de codification permetl’élaboration d’un répertoire partagé autourduquel la négociation de sens peut s’orga-niser (Wenger, 1998). Cette négociation desens autour de points focaux autorise laconstruction et le partage d’un système designification source d’un savoir-voir col-lectif. Dans le projet KMP deux pointsfocaux sont apparus comme particulière-ment importants : les concepts de similarité

et de complémentarité, d’une part et lareprésentation de l’espace commun,d’autre part.

Compétences complémentaires versuscompétences similaires

C’est à partir des travaux précédentsconcernant la codification des compétencesque les concepts de similarité et de complé-mentarité (Richardson, 1972) ont émergé etenrichi le processus de cartographie en don-nant du sens aux combinaisons potentiellesde compétences. Pour reprendre lesexemples de G. B. Richardson (1972), lasimilarité de deux compétences peut êtreillustrée par le fait de vendre une brosse àdents et de vendre un savon tandis que lacomplémentarité traduit le fait de produireune brosse à dents et de vendre une brosseà dents. Si l’on reprend la codification descompétences retenue dans le projet KMP, lasimilarité représente des compétences par-tageant les mêmes ressources et les mêmesactions, et la complémentarité représenteles compétences visant le même systèmed’offre.Prenant appui sur ces définitions, des algo-rithmes ont été élaborés ; ils permettentl’identification puis la représentation dedeux types de combinaisons : la combinai-son de compétences complémentaires,représentant une chaîne de valeur, qui estorientée vers les marchés et les usages et lacombinaison de compétences similaires ouquasi similaires (même système de res-sources), représentant un pôle de compé-tences, qui est axée sur les métiers et lestechnologies. Ces représentations partici-pent à structurer le cluster « Télécom». Lasimilarité va permettre l’identification depôles de compétences notamment technolo-

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giques (microélectronique, informatique,télécoms, etc.) et de mesurer le poids etl’atteinte d’une masse critique pour chacunde ces pôles. La complémentarité enrevanche va autoriser l’identification et lareprésentation de chaînes de valeur, plus oumoins complètes, et/ou plus ou moinsémergentes.

Représentation de l’espace commun

Telecom Valley souffrait d’un problèmeidentitaire : « Traditionnellement il y a tou-jours eu une ambiguïté pour savoir siSophia est plutôt télécoms ou infor-matique… » (Responsable d’une commis-sion de TV). Afin de lever cette ambi-guïté, très vite il a été décidé de construireune représentation de l’espace « TelecomValley », partagé par tous les membres decette communauté. Cette représentations’est élaborée en deux temps : la premièreétape a consisté à représenter les acteurs-clés de cette communauté industrielle etleurs relations. La seconde étape a enrichicette première représentation en intégranttous les acteurs de la communauté télécom:industriels, académiques, et institutionnels.Dans un premier temps, la représentation dela chaîne de valeur télécom (cf. figure 1),caractéristique du cluster sophipolitain a étéconçue à partir des travaux du MIT et eninteraction avec les industriels locaux, utili-sateurs pilotes du projet KMP. Les diffé-rents acteurs ont intuitivement comprisl’importance de cette représentation : desgroupes de travail ont été créés pour élabo-rer la chaîne de valeur. Celle-ci a été pré-sentée et validée par le conseil d’adminis-tration de TV en 2003 et est considéréeaujourd’hui comme un résultat majeur duprojet KMP. En 2004, outre les 11 entre-

prises pilotes du projet KMP, TV ademandé à toutes les entreprises membresde se positionner sur ce modèle. Une véri-table appropriation de la chaîne de valeurTélécom par les membres de TV s’est doncopérée.Cependant, il est apparu que la chaîne devaleur concernait essentiellement les entre-prises, c’est-à-dire les acteurs orientés versl’industrie. Or tous les membres de TV nesont pas des entreprises et la dynamiquelocale n’est pas uniquement le fait desentreprises. L’étape suivante a doncconsisté à modéliser l’ensemble du clusterTS (cf. figure 1) en intégrant les organismesde recherche, les instituts de normalisation,les facilitateurs (associations, clubs, ser-vices ou initiatives dont l’objectif est demettre en relation) et les fonctions supports(acteurs possédant des compétences mana-gériales).Cette représentation du cluster TS posi-tionne les acteurs et leurs rôles. Au niveauindividuel, elle permet à chaque acteurd’estimer son rôle dans le collectif danslequel il est impliqué (stratégies indivi-duelles). Au niveau collectif l’enjeu estdouble : d’une part cette représentation pro-pose d’emblée une vision globale des effetsde masse et des manques sur certains seg-ments de valeur au sein d’un territoiredonné et éventuellement d’envisager des’ouvrir sur d’autres territoires possédantles segments locaux manquants (stratégiescollectives). Sur Sophia-Antipolis, la plu-part des entreprises se positionnent sur lessegments 5, 6, 7 et 8, la chaîne de valeurétant peu dense localement sur les segments2, 3 et 4. De plus, cette représentation per-met d’identifier les frontières de la commu-nauté TV. En effet, la possibilité de pouvoir

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se positionner sur cette chaîne de valeur estmême devenue la condition sine qua nonpour pouvoir adhérer à Telecom Valley. Enopérant une régionalisation du temps et del’espace cette représentation a constitué lesocle d’une véritable « identité communau-taire » (cf. point III.2).Le partage de modèles (modèles des com-pétences), de concepts (similarité versuscomplémentarité) et de représentations(chaîne de valeur TS, cluster TS) participe àla construction progressive d’un savoir col-lectif. La question qui se pose maintenantest : dans quelle mesure la construc-tion dece savoir voir collectif va enrichir les capacités réseaux et par voie de conséquence influencer les conditions

d’échanges et de combinaisons au sein ducluster TS?

2. Savoir voir collectif et renforcementdes capacités réseau

Le processus de codification a permis decréer, nous l’avons vu, un langage commun.Comme ce processus a privilégié des feed-back permanents entre connaissancestacites, articulées et abstraites, il a favorisél’émergence d’un système de significationpartagé. En ce sens, il participe prioritaire-ment à l’enrichissement de la dimensioncognitive. Au-delà des effets directs du pro-cessus de codification sur la dimensioncognitive nous montrerons également seseffets indirects sur les dimensions relation-

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Figure 1REPRÉSENTATION DU CLUSTER TÉLÉCOM SOPHIPOLITAIN

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nelles et structurelles. Pour chaque dimen-sion nous nous attacherons à identifier leurinfluence sur les conditions qui prévalentaux mécanismes de création de connais-sance.À ce stade de l’analyse, nous pouvonsrepérer quatre types de liens qui illustrent lerapport entre le processus de codification,les capacités réseaux et les conditions quiprévalent à l’échange et à la combinaisonde connaissancesLes liens un et deux (figure 2) renvoient àl’influence de la dimension cognitive surl’anticipation de la valeur créée par lescoopérations et les capacités de combinai-son. Ces effets sont liés à l’élaboration d’unlangage commun : la création et l’implé-

mentation d’un référentiel commun decompétences, fondé sur un processus de coconception entre concepteurs, experts etpraticiens, d’une part, et l’identification etle partage des concepts de similarité et decomplémentarité qui permettent de structu-rer les compétences diverses du territoire,d’autre part. Ce langage commun a été app-roprié par les acteurs de TV, et au-delà parles différents acteurs du territoire sophipoli-tain, voire même de la région Paca.Ce langage commun a influencé les capaci-tés des acteurs à anticiper la valeur crééepar les coopérations (lien 1) tant au niveauindividuel (les firmes) que collectif (lesassociations). Au niveau individuel, nouspouvons citer un exemple relatif aux socié-

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Figure 2IMPACT DU SAVOIR-VOIR COLLECTIF SUR LES CAPACITÉS RÉSEAUX

ET LES CONDITIONS DE CRÉATION DE CONNAISSANCES

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tés de service d’ingénierie informatique(SSII) « pilotes » engagées dans le proces-sus de codification de KMP. En effet, durantle processus d’élaboration des ontologiestechnologiques dans lequel elles ont jouéun rôle actif, ces entreprises pilotes ont réa-lisé qu’elles avaient potentiellement àgagner en se voyant également comme par-tenaires plutôt que concurrentes, ce qui étaitplutôt le cas. La plupart d’entre elles sou-haitent aujourd’hui développer les partena-riats notamment en ce qui concerne le déve-loppement conjoint de solutions, ce quipourrait leur donner accès à davantage et àde plus importants clients, au sein et endehors de Sophia-Antipolis. Afin de renfor-cer cette dynamique partenariale, elles pen-sent même créer une nouvelle association,composée exclusivement de SSII.Au niveau collectif, ce cadre de référencecommun a permis d’identifier le rôle dechaque club et association du territoiresophipolitain, qui ont comme objectif ledéveloppement de synergies au sein du ter-ritoire. Certains ont été classés commevisant le développement de complémentari-tés (business-clubs, plutôt orientés marché)et d’autres ont été classés comme visant ledéveloppement de similarités (clubs tech-nologiques, plutôt orientés vers l’innova-tion technologique). Cette cartographie desclubs et de leur rôle a été présentée durantla manifestation de la « Journée des Clubs »par les membres du comité de pilotage deKMP et a résolu une grande partie des pro-blèmes de légitimité des clubs et associa-tions. Par exemple, certains clubs (commele club Sophia-Antipolis MicroElectro-nique ou le laboratoire des logiciels) ont pujustifier leur création en montrant que leurobjectif n’est pas redondant avec ceuxd’autres clubs préexistants. En effet, c’est

en s’appuyant sur cette cartographie que cesclubs ont démontré que leur implémenta-tion correspond à un besoin réel et se sontaffirmés vis-à-vis des clubs déjà existants,initialement réfractaires à leur création.Cette méthodologie de cartographie baséesur les concepts de similarité/complémenta-rité a également été adoptée et réutilisée parles acteurs de la région Paca afin derépondre au projet national de pôles decompétitivité, notamment par ceux du pôleSCS (solutions communicantes sécurisées).Ces concepts ont permis de structurer laprésentation des projets de coopération ausein du pôle SCS, augmentant ainsi la capa-cité à combiner des acteurs (lien 2). Deuxtypes de projets ont été identifiés : les pro-jets orientés usages (i.e. combinant descompétences complémentaires), et des pro-jets orientés technologies (i.e. combinantdes compétences similaires et visant l’inno-vation technologique).Ces deux derniers exemples montrent quel’identification et le partage des deuxconcepts de similarité et de complémenta-rité accroît les capacités de combinaison duréseau (lien 2 dans la figure 2) et l’antici-pation de la valeur créée (lien 1 dans lafigure 2). Dans cette optique, ces codes decommunication spécifiques représentent,selon Kogut et Zander (1992), un actifsource de création de valeur.Le troisième lien (figure 2) traduit l’in-fluence du processus de codification sur lavariable identitaire du réseau (dimensionrelationnelle), constituant elle-même unpuissant facteur de motivation des parte-naires à échanger et combiner leurs compé-tences. La représentation partagée de l’es-pace révèle les jeux d’intérêts des acteurs etdonne du sens aux logiques d’action quistructurent les dynamiques territoriales. Ce

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système de signification partagé relatif auxjeux d’intérêts et aux logiques d’actionsprésents dans le réseau (dimension cogni-tive) renforce l’identité collective (dimen-sion relationnelle) et influence les stratégiesde coopération. Par exemple, la filialed’une multinationale informatique améri-caine, réticente au début du projet, a vive-ment souhaité devenir « utilisateur-pilote »lorsqu’elle a été capable de se positionnerdans l’espace commun. L’impact sur lepotentiel de développement collectif estsouligné par de nombreux acteurs du terri-toire sophipolitain. Selon le vice-présidentde Télécom Valley, « Il ne peut exister devéritable dynamique d’exploitation descompétences sur Sophia que si les jeuxd’intérêts sont clairs et aux vues de tous ».Dans une même optique, la présidente duclub Énergie affirme que « rendre leslogiques d’actions compréhensibles parti-cipe à la construction d’une identité collec-tive qui fait que le territoire sophipolitain vapouvoir se développer de façon pérenne ».Enfin, le quatrième lien (figure 2) concernel’influence du processus de codification surl’accès à l’échange et la combinaison via ladimension structurelle des capacitésréseaux. Avant la mise en œuvre du projetKMP, la plupart des relations au sein ducluster étaient informelles, fortementdépendantes des relations entre individus.Ces liens pouvaient être forts (e.g. les rela-tions au sein d’associations et de clubs) oufaibles (e.g. les amis des amis) mais d’unemanière générale, les individus, dansSophia-Antipolis, avaient tendance à tra-vailler avec des personnes avec lesquellesils avaient déjà travaillé. Les « affaires »étaient essentiellement relationnelles, etceci avait façonné la structure du clusterTS, en faisant émerger des « structural

holes » (Burt, 1992). Par exemple, la plu-part des entreprises d’ingénierie et deconsulting de Sophia-Antipolis avaientl’habitude de travailler avec les mêmesclients. Ainsi, le cadre travaillant dans l’en-treprise « donneur d’ordres » contactaithabituellement les mêmes personnes (i.e.les mêmes fournisseurs) pour une nouvelleaffaire, constituant d’une certaine façon desbarrières à l’entrée pour les autres et notam-ment pour les nouveaux entrants. Ces der-niers ont très vite anticipé le potentiel decommunication de la solution KMP repo-sant sur le modèle et les ontologies de com-pétences. Dès les premiers mois du projetils ont souhaité devenir pilotes et ont consti-tué un groupe ad-hoc afin d’élaborerensemble les ontologies constitutives deleur domaine. Ces acteurs ont ainsi claire-ment anticipé une multiplication des oppor-tunités d’échange et de combinaison vial’utilisation de KMP ; la construction collective des ontologies devant garantirune certaine équité des acteurs dans leurmanière de communiquer sur leurs compé-tences.Globalement, nous pouvons observer queces résultats s’inscrivent dans les travauxde Nahapiet et Ghoshal sur les effets desdifférentes dimensions du capital social (icides capacités réseau) sur les conditions decréation de connaissances. Les résultats sui-vants proposent un enrichissement en révé-lant des dynamiques complexes.

3. Savoir voir collectif et dynamiquescomplexes

Nous avons vu que la conception du serviceweb de compétences KMP a joué sur lestrois dimensions des capacités réseau ducluster TS et par conséquent a amélioré lesconditions de création de connaissances.

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Mais au-delà de ces dynamiques « simples »que nous avons soulignées, le processus decodification de KMP et l’élaboration pro-gressive de ce savoir voir collectif (modèleset ontologies des compétences, chaîne devaleur télécom, etc.) ont généré des dyna-miques complexes, multidimensionnellesqui ont affecté à la fois les capacités réseau,les conditions de création de connaissanceset la cohérence (i.e. équilibre entre diversitéet spécialisation de la base de connaissancesdu réseau) du cluster TS.En effet, la chaîne de valeur télécom afourni une représentation collective parta-gée qui a eu pour principale conséquence,nous l’avons vu, le développement d’unsavoir-voir collectif tant au niveau desfrontières du réseau, des effets de masse etdes manques, que des jeux d’intérêts desdifférents acteurs. Par exemple, le posi-tionnement des acteurs sur la chaîne devaleur a montré des effets de concentrationsur le site au niveau du développementd’applicatifs (pôle informatique) et dudesign microélectronique (pôle microélec-tronique) alors que le futur des télécoms(présentant les perspectives de profit lesplus attractives) réside désormais dans lesfournisseurs de contenu (pôle multimé-dia). Cette prise de conscience de la situa-tion actuelle de TV par ses propres acteursa rapidement déclenché une dynamique dechangement, affectant à la fois la cohé-rence du réseau (entrée de nouveauxacteurs) et les trajectoires de diversifica-tion stratégique des membres de TV, i.e.leurs jeux d’intérêts.Par exemple, un réseau de firmes de petitetaille évoluant dans les domaines du multi-

média, localisé en dehors de Sophia-Anti-polis mais dans la région PACA, a récem-ment fait la demande de rejoindre TV aprèsavoir eu connaissance des modèles déve-loppés dans KMP5. Quelques années aupa-ravant, ces entreprises n’auraient vraisem-blablement pas candidaté pour devenirmembre de TV, car elles sont à la fois géo-graphiquement et technologiquement assezéloignées des membres de TV, et de lamême façon TV qui avait du mal à se défi-nir, était très frileuse quant à l’entrée denouveaux membres. Aujourd’hui, grâce à lamodélisation de l’espace commun, le nou-vel entrant potentiel est capable de détecterdes opportunités via le portail KMP, et TVa augmenté ses possibilités de sélection des« bons » nouveaux entrants, afin d’élargirsa base de connaissances de façon cohé-rente.Ainsi, cette représentation de l’espace com-mun, issue du processus de codification aeu un impact important sur les dimensionscognitive et relationnelle (identification) duréseau. Cette compréhension collective del’identité de TV a provoqué une certaine« clôture organisationnelle » du réseau, carles acteurs de TV étaient, à ce moment-là,capables de définir précisément les fron-tières du réseau, et par conséquent, de leurbase de connaissances ; Cette clôture estpourtant, paradoxalement, à l’origine deperspectives nouvelles et appropriées d’ou-verture du réseau. Cela a opéré une « régio-nalisation » du temps et de l’espace qui estaujourd’hui un élément-clé de la gestion dela cohérence du réseau.L’impact du processus de codification surles dimensions relationnelle et cognitive

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5. Ce réseau a, in fine, directement intégré le pôle SCS.

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des capacités réseau, ont déclenché la miseen œuvre d’interactions multiples et récur-sives entre les capacités réseau, les acteursdu réseau et les conditions de création deconnaissances. Ces effets peuvent être syn-thétisés dans la figure 2.Dans cette figure, nous pouvons voir que lesavoir-voir collectif résultant de l’appro-priation cognitive des modèles managé-riaux (modèles des compétences, de lachaîne de valeur et concepts de similarité/complémentarité) par les acteurs a conduit àla mise en œuvre de deux processus dyna-

miques de changement, eux-mêmes eninteraction :– processus 1 : en cartographiant leséchanges actuels, la chaîne de valeur a révéléles futures opportunités les plus profitableset/ou potentiellement créatrices de valeur,augmentant ainsi les capacités d’anticipation(lien 1 dans la figure 3). Cette capacitéaccrue à anticiper la valeur créée parl’échange et la combinaison de connais-sances et compétences a conduit les acteurs àouvrir les frontières du réseau et par là mêmeà modifier sa configuration (lien 2 dans la

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Figure 3IMPACT DU PROCESSUS DE CODIFICATION DE KMP SUR LES INTERACTIONS

DYNAMIQUES MULTIDIMENSIONNELLES ET LES CONDITIONS DE CRÉATION DE CONNAISSANCES

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figure 3) afin de permettre l’entrée de nou-veaux acteurs (lien 3 dans la figure 3) ;– processus 2 : simultanément, le modèle dela chaîne de valeur, en définissant les fron-tières du réseau, a développé les capacitésd’identification des acteurs du réseau, quipeuvent désormais bénéficier d’une repré-sentation claire du réseau et de leur position(lien A dans la figure 3), augmentant parconséquent leur propre motivation à déve-lopper la dynamique d’échange afin d’in-fluencer et/ou maîtriser leur position au seindu réseau (lien B dans la figure 3). Celapeut motiver également l’entrée de nou-veaux acteurs ou le départ de certains (lienC dans la figure 3).Les deux processus conduisent simultané-ment (ou non) à la nécessité de modifier lacohérence du réseau (par l’entrée ou lasortie d’acteurs) afin de développer desopportunités négociées, i.e. l’accès àl’échange et la combinaison (liens 4/Ddans la figure 3), condition primordialepour la création de connaissances (en par-ticulier sur une vision à long terme).Ainsi, le processus de codification consub-stantiel à l’élaboration de la solution TIC aprocuré à TV une opportunité majeure degérer sa propre dialectique hétérogénéité/spécialisation, i.e. sa cohérence. Il est inté-ressant de souligner que le processus decodification a réduit les dissonances cogni-tives parmi les acteurs de TV, i.e. développéleur proximité cognitive, ce qui in fine apermis à TV d’accroître sa cohérence, enréduisant les contraintes liées à la proximitégéographique (la zone géographique a étéétendue) et/ou à la proximité technologique(la dimension technologique a été étendueau multimédia).

CONCLUSION

Dans cet article, nous avons proposé unenrichissement du concept de capacitésréseau ainsi qu’une analyse de leur rôle surla création de connaissances organisation-nelles, à partir des travaux théoriques deNahapiet et Ghoshal (1998) sur le capitalsocial. Nous avons alors montré, à traversune étude empirique issue de la conceptionet l’implémentation d’un service web decompétences le rôle du processus de codifi-cation sur le renforcement des capacitésréseau et par effets joints sur la dynamiquede création de connaissances.Cette étude a d’abord révélé le rôle du pro-cessus de codification sur l’émergence d’unsavoir-voir collectif et ses influences sur ladimension cognitive des capacités réseaux.Elle a ensuite permis d’illustrer et d’affinerles dynamiques simples entre les dimen-sions sociales des capacités réseaux et lesconditions de création de connaissancesidentifiées par Nahapiet et Ghoshal (1998).Enfin, cette expérimentation a mis en évi-dence l’existence de dynamiques com-plexes, multidimensionnelles, où le proces-sus de codification est apparu commeessentiel. La représentation de l’espacecommun du réseau, résultat du processus decodification engendré par la création d’unesolution TIC a eu un impact important surses dimensions relationnelle et cognitive.Un « savoir-voir » collectif a émergé et aincontestablement accru l’identité duréseau, provoquant alors une véritable« clôture organisationnelle » qui a para-doxalement procuré au réseau la possibilitéde s’ouvrir sur l’extérieur sans pour autantnuire à sa cohérence. Cette ouverture atransformé la structure du réseau en atti-

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rant/cherchant de nouveaux acteurs et enmodifiant la nature de ses liens. Au cours decette expérience, nous avons constaté que ledéveloppement de la proximité cognitive

des acteurs du réseau, plus qu’aucun autretype de proximité, joue un rôle significatifsur ses capacités de création de connais-sances.

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