89
1 LE MARI DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE OU ROMUALD ET LE PRÉSIDENT Romuald, jeune ex-participant à The Voice et à une autre émission célèbre de téléréalité médiatisée, est choisi par la 1ère chaîne de Télé pour interviewer le Président de la République à l’occasion de sa candidature à sa réélection… Mais tout n’a pas été prévu, notamment la présence de Cupidon au-dessus de l’Élysée… Bien sûr, toute ressemblance des personnages de cette pièce avec des personnes connues… ne serait que le fruit du hasard… Romuald est un garçon plein de charme et de cœur. Max est un homme politique… Ni de droite… Ni de gauche… La politique n’étant pas le sujet de cette comédie… Pièce de Théâtre (1 ière version) déposée au SNAC le 30 décembre 2004 sous le numéro 4-5856. Dépôt COPYRIGHT France AX75669 du 05/09/2006. Pour découvrir mes romans, mon site : http://genygrosmromans.e-monsite.com/ LE MARI DU PRESIDENT

SCENE 1 - genygrosmromans.e-monsite.comgenygrosmromans.e-monsite.com/.../romualdword97-pu…  · Web viewLes deux hommes semblent se connaître. Romuald tend la main à Jean-Pierre

Embed Size (px)

Citation preview

1

LE MARI DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUEOU

ROMUALD ET LE PRÉSIDENT

Romuald, jeune ex-participant à The Voice et à une autre émission célèbre de téléréalité médiatisée, est choisi par la 1ère chaîne de Télé pour interviewer le Président de la République à l’occasion de sa candidature à sa réélection… Mais tout n’a pas été prévu, notamment la présence de Cupidon au-dessus de l’Élysée…

Bien sûr, toute ressemblance des personnages de cette pièce avec des personnes connues… ne serait que le fruit du hasard…

Romuald est un garçon plein de charme et de cœur. Max est un homme politique… Ni de droite… Ni de gauche… La politique n’étant pas le sujet de cette comédie…Pièce de Théâtre (1ière version) déposée au SNAC le 30 décembre 2004 sous le numéro 4-5856. Dépôt COPYRIGHT France AX75669 du 05/09/2006.

Pour découvrir mes romans, mon site :

http://genygrosmromans.e-monsite.com/

LE MARI DU PRESIDENT

2

LE MARI DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUEOU

ROMUALD ET LE PRÉSIDENT

SCÈNE 1

Le rideau s’ouvre sur un studio de télévision. Un cameraman s’affaire à son poste.

Entre Romuald, un beau jeune homme blond avec coupe undercut avec tresse, looké, d’environ 25/30 ans vêtu d’un tee-shirt gris, moulant, dernière mode et d’un pantalon slim taille basse grenat et en même temps que lui, par un autre accès, Jean-Pierre DARLIDON, présentateur vedette de la 1ère chaîne de télévision (en costume mais sans cravate).Les deux hommes semblent se connaître. Romuald tend la main à Jean-Pierre.

Romuald (inquiet)- Salut Jean-Pierre ! Il est là ?

Jean-Pierre (sûr de lui)- Bonjour gamin ! Fin prêt ? Non, on l’attend d’un moment à l’autre. Il est parti de l’Élysée.

Romuald- Ouh ! J’ai les boules ! Non ! Arrête-le ! Je vais être nul !

Jean-Pierre(Il se tourne vers le public et il exprime le contraire de ce qu’il va dire sur son visage)- Mais non ! Mais non !

(Il fait face à Romuald et prend un air de faux-cul)- De toute façon, c’est toi qui interroges le Président. Tu poses les questions que nous

avons préparées. Elles ont été soumises à Maxime DESPREZ. Surtout, tu n’as aucune initiative…

Romuald- Et s’il me pose des questions ?

Jean-Pierre- Tu fais comme les Jésuites !

Romuald (l’air ébahi)- Les quoi ? Ah ! Oui ! Les curés ?

Jean-Pierre (agacé)- C’est ça ! Tu réponds par une autre question…

Le smartphone de Jean-Pierre sonne. Il s’écarte pour répondre d’abord par des "oui" et des "non". Puis il ajoute :

- Oui ! On est à six mois des élections présidentielles et le conseiller en communication du Président, soucieux de séduire la jeunesse a suggéré ce face-à-face… Oui, avec Romuald… Oui, celui de The Voice… Oui, le petit P… le jeune gay ! (Un long moment de silence et Jean-Pierre ajoute plus bas) Merci pour tes condoléances !

Le smartphone de Romuald sonne à son tour :

LE MARI DU PRESIDENT

3

Romuald- Maman ! Je t’avais dit de ne pas m’appeler. Il va arriver ! Non ! Je dois lui poser que les

questions prévues ! Quoi ? Tu veux visiter l’Élysée ? Et en privé ! Mais ça ne va pas maman !

On entend des cris dans le téléphone que Romuald éloigne de son oreille… Et il finit par conclure pour se débarrasser de sa mère :

- Oui ! Bon ! On verra ! Je vais essayer de lui demander. À plus maman !

Le smartphone de Romuald sonne à nouveau alors que Jean-Pierre s’impatiente…

Romuald- Oui ma chatte !… Non, on l’attend !… Arrête ! Lâche-moi ! Je ne drague pas les vieux !

Et puis, je n’ai pas de compte à te rendre Bill ! On baise plus ensemble !… Je deviens impénétrable ? J’avais pas remarqué ! J’espère bien que non !

Jean-Pierre très énervé lui fait signe de raccrocher.

Romuald(en soupirant, coupant la communication…)

- Je te laisse ! À plus !

Jean-Pierre (cherchant la dispute)- Arrête de dire des insanités ! Et puis, tu aurais pu t’habiller autrement !

Romuald- Je ne suis pas coincé du cul ! Moi ! Je parle comme j’ai envie !

- Tu m’as dit "moderne" et représentatif de la jeunesse actuelle et un peu provocant  ! Vois un peu mon arrière-train !

Jean-Pierre (qui regarde les fesses de Romuald)- Ce n’est pas une raison pour porter un string que l’on voit dépasser de ton pantalon taille

basse et nous montrer ainsi et en plus… la raie de ton cul !

Romuald- On est à la télé ! On ne verra que mon buste ! Y en a plein qui la mate avec plaisir, la

raie de mon cul ! Ces pantalons-là, c’est d’ailleurs fait pour ! Toi tu matais bien les roploplos de Louise Bourgoin lors de ta dernière interview ! Arrête de faire l’hypocrite !

Jean-Pierre (excédé)- Le Président, lui, il va tout voir ! Et puis, s’il te plaît ! Ne pousse pas trop de petits cris

de… folle !

Romuald (énervé et agressif)- Dis tout de suite que je fais pédé !

LE MARI DU PRESIDENT

4

Jean-Pierre- Écoute ! Ça ! Tout le monde le sait que tu es gay ! La chaîne d’abord ! Avant de faire The

Voice, on avait vérifié la sexualité de chacun. Toi, tu étais le gay de service ! Mais, bon, tu plais aux femmes aussi, il paraît ! Je me demande bien pourquoi d’ailleurs !

- On t’a fait gagner en 3ème position ! Comme ça, on était sûr qu’il n’y aurait pas de problème avec la fille gagnante !

Romuald (agressif)- T’as quelque chose contre ? Je n’ai rien demandé moi !

Jean-Pierre (qui adoucit le ton)- Mais non ! Je n’ai rien contre ! Voyons ! Et puis, c’est le conseiller en communication du

Président qui t’a choisi ! Il paraît que tu fais rire le Président ! Il t’avait regardé dans The Voice puis dans les Anges de la Téléréalité !

Romuald (moqueur)- Je croyais que Les Anges, c’était la décadence de la télé ! Pour les incultes ! Le petit

peuple ! La rue ! Le 9-3 !

Jean-Pierre (sérieux)- Ne crois pas ça ! J’ai une anecdote à ce propos ! Un soir, pendant la durée de cette

émission, j’étais allé rendre visite à ma mère à Sceaux. Deux de ses vieilles amies étaient là ; des dames très respectables, bon chic bon genre ! Eh bien figure-toi ! Elles savaient tout sur les Anges de la Téléréalité, les prénoms de chacune et chacun, les histoires de cul ! Les ragots sur ton homosexualité ! Tiens ! Ça ne les empêchait pas de te trouver craquant !

Romuald (qui imite les vieilles dames avec un ton précieux en mimant les dames prendre le thé. Il touille sa tasse imaginaire avec le petit doigt en l’air).

- Ah ! Ma chère ! Vous croyez qu’il est homosexuel ?

- Oui ! Hélas ! Je ne me trompe jamais ! Je vois ça tout de suite ! Dommage pour nos jeunes filles… Un si beau garçon !

Jean-Pierre (excédé)- Arrête tes conneries !

Le smartphone de Romuald sonne une troisième fois…

Romuald- Oui… Ce que je fais ce soir ? La fête du string ! Au Dépôt comme d’hab ! Soirée

mousse ! Le pied ! Tu viens ?… Ok !

Jean-Pierre, excédé, lui arrache le smartphone des mains. Le téléphone tombe. Romuald se penche pour le ramasser (dos à la salle) et montre ainsi son postérieur au public…

Un huissier ouvre une porte et annonce :

- Monsieur Maxime DESPREZ, Président de la République !

Le Président (la quarantaine séduisante) tout sourire serre la main à Jean-Pierre.

LE MARI DU PRESIDENT

5

Le Président- Bonjour, Monsieur DARLIDON. Alors "Cool ?" comme disent les jeunes !

Jean-Pierre- Bonjour, Monsieur le Président ! Cool ! Nous sommes prêts !

Puis le président se tourne vers Romuald avec une particulière attention. Il lui tend la main.

Le Président (jovial, ravi)- Bonsoir Romuald ! Vous permettez que je vous appelle par votre prénom ? Je suis très

heureux de vous rencontrer !

Romuald (en bredouillant – très ému)- Bonsoir Monsieur le Président de la…

Il n’ose pas prendre la main du Président, fait un faux mouvement et lâche son smartphone qui tombe au sol… Il se retourne pour le ramasser, se penche à nouveau et c’est au tour du Président d’admirer involontairement le postérieur de Romuald qui aura du mal à reprendre son appareil téléphonique en main.

Le Président semble amusé, ravi et finit par serrer la main de Romuald très chaleureusement.

Le Président (avec un sourire électoral)- Détendez-vous Romuald ! Tout va bien se passer ! Faites comme les journalistes,

appelez-moi Maxime DESPREZ ! Ou Président ! Et dites-vous bien que je fais pipi comme vous ! Debout en éclaboussant la lunette des toilettes ! Ma mère m’engueule encore pour ça ! Et vous ?

Romuald- Moi aussi ! Mais vous êtes célibataire je crois ! Vous habitez encore chez votre maman ?

À l’Élysée ?

Jean-Pierre- Romuald ! Voyons ! Ce n’est pas dans la liste des questions !

Le Président- Mais laissez-le Jean-Pierre ! On viendra bien assez tôt à vos questions ! (se

désintéressant de Jean-Pierre, il se tourne vers Romuald en l’invitant à s’asseoir autour de la table de conférence et lui répond).

- Je suis effectivement "vieux garçon". Je vis avec ma sœur Nicole. Maman réside à Gannat et vient souvent me rendre visite à l’Élysée où elle dispose, comme ma sœur, d’un bel appartement.

LE MARI DU PRESIDENT

6

Romuald (en rafale)- Elle est comment votre maman ? La mienne, elle est gentille ! Mais collante ! Elle me

couve ! Elle m’achète même mes capotes ! Une vraie mère juive ! Pourtant, on n’est pas juif ! Je suis entier du bout !

Jean-Pierre- Romuald ! Voyons !

Le Président (amusé et radieux. Il ignore Jean-Pierre et sa remarque)- Pour vous répondre dans l’ordre ! La mienne aussi est collante ! Elle m’achète d’office

mes chaussettes et mes slips. Mais je vous précise que je n’ai jamais porté de string  ! Et confidence pour confidence, je ne suis pas circoncis non plus !

Jean-Pierre (gêné, désespéré, mais pompeux)- Monsieur le Président, on pourrait commencer l’entretien ?

Mais Romuald visiblement remis de ses émotions, reprend son babillage :

Romuald- Vous n’avez jamais porté de string ? Dommage ! On est bien là-dedans ! C’est la liberté !

Faut essayer ! Tiens, si vous voulez, je vous donne une adresse, une petite boutique dans le Marais…

Jean-Pierre, exaspéré… ne dit plus rien et lève les yeux au ciel, désespéré…

Le rideau tombe sur la musique du générique de l’émission.

LE MARI DU PRESIDENT

7

SCÈNE 2

Le rideau s’ouvre sur le même studio de télévision et mais sur la musique de fin de l’émission. On voit un écran de rappel avec le défilé du générique.

Alors que les personnages du premier acte se lèvent de leur siège, entre sur le plateau le conseiller en communication du Président.

Il a assisté sans doute à l’émission en régie et s’écrit :

Régis de St ALGUE- Parfait ! Enfin pas tout à fait ! Romuald, vous êtes sorti des questions ! Tout de même !

Aller demander au Président s’il a une petite amie ! Le Président est célibataire et le sujet est tabou !

Romuald (un peu contrarié puis sec)- Désolé ! Je ne suis pas entièrement programmé ! Mon microprocesseur personnel est

très fantaisiste ! Je ne peux pas m’empêcher de réagir naturellement. Mais vous pouvez couper ! L’émission n’est pas en direct !

Le Président- Non, Romuald, tu as été très bien ! Oh ! Pardon, je vous ai tutoyé !

Romuald (franc)- Vous pouvez ! Vous pourriez être mon père !

Le Président (décontenancé)- Je fais si vieux que ça !

Romuald- Non ! Mais c’est votre look ! Vos costumes gris ! Les cravates… pas in ! On ne vous voit

jamais en tenue décontractée !

Le Président (amusé et malgré tout, penaud)- Tu es mal informé ! On m’a vu, photographié dans Paris Match, en jeans à Brégançon !

Romuald (il rigole, s’esclaffe même !)- Ah ! Oui ! Le jeans ! J’ai vu ! Si on peut appeler ça, un jeans !

Le Président (lui aussi tout sourire)- Donc, j’imagine nul !

Romuald (un peu moqueur)- Ma petite boutique de la rue du Bourg Tibourg… Je vous y emmène si vous voulez…

des vêtements "classe", des coupes modernes et la qualité… C’est Bill, mon ex, qui tient la boutique !

LE MARI DU PRESIDENT

8

Le Président- C’est vrai ! Romuald ! Tu es dans la mode ! Tu travailles, je crois, en ta qualité de styliste

pour le grand couturier Jean-Loup Galtier ! Il t’a engagé suite aux Anges de la Téléréalité non ?

Romuald (un brin malicieux, il se tortille en chantonnant)- Oui ! Et pour ça, je n’ai pas couché ! Sympa Jean-Loup !

Le Président (ravi et amusé)- Bien ! Je vais te laisser Romuald. J’ai beaucoup apprécié cet entretien ! En dehors des

questions préparées, celles que tu as posées – à l’encontre de Jean-Pierre DARLIDON – étaient pertinentes !

Le Président (sec, pour Jean-Pierre et Régis)- Vous ne coupez rien ! Sinon, je ne donne pas mon accord pour la diffusion !

Romuald- Merci Président !

Romuald (reprenant la parole, mais un peu penaud)- J’ai une grande faveur à vous demander !

Le Président (un peu inquiet)- Je t’écoute !

Romuald- Maman voudrait visiter l’Élysée… Moi aussi d’ailleurs !

Le Président (soulagé)- Je ne peux rien te refuser ! C’est entendu ! Je vais organiser ça ! Je te fais appeler sur

ton smartphone !

Romuald (ragaillardi)- Ah ! Merci ! Mais si j’osais encore !

Romuald- Et si on dînait ensuite ensemble à l’Élysée !

Le Président (souriant puis inquiet)- Excellente idée ! Cela me ferait très plaisir de te revoir et de discuter encore avec toi.

Mais je ne sais pas si c’est possible !

Romuald (étonné puis moqueur et naïf)- Vous êtes Président et vous ne pouvez pas faire ce que vous voulez !

Le Président (amusé)- C’est surtout que je ne m’occupe pas de ça ! Et puis, il y a le protocole !

LE MARI DU PRESIDENT

9

Romuald (un peu agressif, mais plutôt contrarié)- Et puis, ça ne se fait peut-être pas de recevoir un PD notoire ! Je suppose que vous

aussi vous le savez que j’en fais partie ! Ce n’était pas la peine de faire voter la loi sur l’homophobie !

Jean-Pierre et Régis (en même temps)- Voyons Romuald !

Le Président (il met la main amicalement sur le cou de Romuald)- Bien sûr que je sais ! Je… Tu… es si sympathique. C’est décidé ! Tu viens dîner avec ta

maman à l’Élysée.

Il va partir, puis se ravise et demande à Romuald :

Le Président (décidé)- S’il te plaît, prête-moi ton smartphone ! Je vais appeler tout de suite l’Élysée ! On va fixer immédiatement la date !

Jean-Pierre (jaloux et en aparté à Régis)- Un dîner de con ?

Pendant que le Président téléphone, une femme d’une cinquantaine d’années fait son entrée. Il s’agit d’Aline FORD une vedette de la chanson, encore belle et exubérante dont l’amitié pour le Président de la République est de notoriété publique.

Aline FORD (qui s’adresse d’abord à Jean-Pierre)- Salut pipeauteur ! T’es dans tous les coups toi !

Puis elle s’adresse au Président de la République très familièrement :

Aline FORD (excessive)- Bonjour mon Maxou ! Ta vieille copine a su que tu étais dans nos murs. Je mettais mon

grain de sel au montage de mon dernier spectacle quand j’ai entendu dire que tu étais là interviewé par notre nouvelle vedette nationale. Bref, mon chéri, ce n’est pas toi que je viens voir mais Romuald que je ne connais pas encore !

Aline embrasse très intimement le Président puis se tourne devant Romuald médusé.

Aline FORD (elle se présente à Romuald puis elle se montre excessive)- Aline FORD !- Ah ! Que t’es beau gosse mon chéri ! Dommage que je sois une vieille peau ! Mais je

t’embrasse quand même !

Aline se précipite sur Romuald et l’embrasse avec violence.

LE MARI DU PRESIDENT

10

Romuald (un peu au dépourvu)- Bonjour Madame !

Aline FORD- Ah non ! Ne me vieillis pas encore plus ! Tu fais partie du show-biz ! Tu me tutoies et tu

m’appelles Aline ! Mais je suis bête ! T’es trop jeune, tu ne me connais sans doute même pas !

Romuald (gaffeur)- Mais si ! Maman est une de vos fans et a tous vos 45 tours, pardon ! Vos CD !

Romuald s’aperçoit de son erreur et rectifie :

- En boîte, on danse sur vos plus grands succès ! Vous êtes… Pardon, tu es… sacrément à la mode !

Aline FORD (amusée et tendre)- T’es trognon toi ! Il paraît que tu te débrouilles en chanson ! Mais, c’est vrai, je t’ai vu sur

The Voice et tu étais arrivé 3ème ! Faudra me montrer ça ! Je t’appelle !

Puis s’adressant au Président :

- À bientôt Maxou ! Je passe te voir un de ces soirs !

Aline sort précipitamment et le Président qui s’apprête à partir dit à Romuald :

Le Président- Aline est ma seule vraie amie et confidente ! Romuald, au 7 courant si tu le veux bien, je

t’envoie une invitation par écrit.

Romuald- Merci Président ! (puis hésitant) Je voulais vous dire aussi…

Le Président (tout sourire)- Vas-y ! Parle librement !

Romuald (un peu confus)- C’est que je suis un peu timide !

Jean-Pierre (en aparté et moqueur)- On ne s’en serait pas aperçu ! Qu’est-ce que ce serait s’il se déclarait effronté !

Romuald (un peu embarrassé)- Il y a 5 ans, je venais de fêter mes dix-huit ans et j’ai voté pour la première fois pour

vous. Je ne connaissais rien à la politique et je vous ai choisi parce que je vous trouvais très beau et très sympathique !

Jean-Pierre (toujours en aparté et grossier)- Il n’a plus qu’à lui faire une petite gâterie !

LE MARI DU PRESIDENT

11

Romuald (qui a entendu Jean-Pierre mais qui garde son sang-froid)- Mais bon, après j’ai pu lire votre programme et j’ai été fier de mon choix.

Le Président tout ému serre longuement la main de Romuald qui semble "planer"… Puis il quitte la pièce après un bref salut à Jean-Pierre.

Le rideau tombe.

LE MARI DU PRESIDENT

12

SCÈNE 3

Le rideau s’ouvre sur un magnifique salon de l’Élysée.

Le Président est assis sur un canapé en compagnie de Romuald. Romuald est en costume (très mode, très chic). Il est plus séduisant que jamais… Romuald a changé de coiffure, plus discrète mais néanmoins moderne.

Romuald- Merci Président pour cet excellent dîner ! C’était vachement bon !

Le Président- Dommage pour ta maman cet accident ! J’espère que cela ne sera pas trop grave !

Romuald- Non ! Comme je vous le disais, juste une petite fracture de l’avant-bras ! Mais elle est

verte de rage à l’idée d’avoir loupé votre invitation !

Le Président- Si cet accident n’était pas intervenu ce matin, nous aurions pu remettre ! Mais, tu peux

rassurer ta maman, je vous réinviterai tous les deux dès que possible ! Mais tu aurais pu tout de même remettre si tu l’avais souhaité !

Romuald (pétillant)- Ah ! Non ! J’avais trop envie de vous revoir !

Romuald (qui se reprend)- Je veux dire… de visiter l’Élysée et de dîner avec vous !

Le Président se mord les lèvres. Flatté, mais visiblement gêné il finit par lui répondre :

Le Président- C’est gentil ce que tu as dit en premier ! Moi aussi figure-toi ! Mais d’habitude les jeunes

ne s’intéressent pas aux vieux, même s’ils sont Présidents…

Romuald- D’abord, vous n’êtes pas vieux ! Et puis moi, je préfère la compagnie des personnes

mûres ! Les mecs de mon âge, c’est juste bon pour baiser ! Oh ! Pardon ! Je parle mal !

Le Président rigole franchement de la candeur de Romuald. On frappe à la porte.

Le Président- Entrez !

L’Huissier- Monsieur de St Algue ! C’est urgent paraît-il !

Un signe d’approbation du Président et le conseiller paraît.

LE MARI DU PRESIDENT

13

Régis de St Algue- Président, bonsoir ! Excusez-moi ! Je souhaiterais vous entretenir un instant avec le 1er

Ministre qui est dans le bureau de votre chef de cabinet. C’est à propos de la campagne électorale ! Bonsoir Romuald !

Romuald- Bonsoir Régis. Bon, je vais vous laisser !

Le Président (s’adressant à Romuald)- Non ! Attends un instant s’il te plaît !

Le Président (s’adressant à Régis)- Cela pouvait sûrement attendre demain matin ! Je ne vois pas pourquoi Jean-Claude

DUVIVIER vient à l’Élysée sans que je sois prévenu ! Bon, je vous rejoins quelques instants dans le bureau de mon chef de cabinet. Laissez-nous maintenant !

Régis sort rapidement.

Le Président- Tu es pressé ? Un petit copain qui t’attend ?

Romuald (qui insiste sur la première phrase)- Non ! Je n’ai plus, et pas, de petit copain ! Et personne ne m’attend Président ! Mais je

ne voudrais pas déranger !

Le Président (qui pose la main pudiquement sur le genou de Romuald)- J’ai envie que tu restes un peu encore ! La soirée n’est pas finie. Sauf si tu es fatigué ou

si tu as assez de ma compagnie. Mais pour une fois que j’ai en ma présence quelqu’un de si… et puis plein de cœur… et qui ne m’a rien demandé à part une visite de la maison et un dîner… Je ne m’absente pas plus d’un quart d’heure…

Romuald- Je suis ravi d’être ici et je peux vous attendre pour continuer la soirée…

Le Président (soudain ragaillardi et audacieux)- Merci Romuald ! Et puis ! Tiens ! Quand on est ensemble, rien que nous deux, tutoie-

moi !

Romuald (ébahi)- Tutoyer le Président !

Le Président- Pourquoi pas ! J’ai bien des neveux de ton âge qui me tutoient ! Mes amis aussi, les

vrais comme les faux !

Romuald (hésitant)- Mais dans ce cas… Faut que je… vous… t’appelle pas ton prénom ?

Le Président- Bien sûr ! D’ailleurs mes amis, les vrais, ils m’appellent Maxou !

LE MARI DU PRESIDENT

14

Romuald- Je risque aussi de ne pas m’en souvenir et de te tutoyer en toutes circonstances !

Le Président (qui caresse, très pudiquement le genou de Romuald)- Tu as raison, pas de chichi ! Tu me tutoies tout le temps !

À l’instant entre sans frapper, une jeune femme élégante dans la quarantaine. Le Président, visiblement troublé, ne réagit pas tout de suite, puis retire vivement sa main du genou de Romuald.

Elle paraît surprise de voir le Président en compagnie de Romuald. D’ailleurs elle n’a pu que voir la main du Président sur le genou de Romuald (son regard est figé sur le genou du Président).

Le Président (d’abord gêné, il se lève d’un bond et Romuald aussi)- Nicole ! Ah ! Je te présente Romuald LAFONT ! Mais bon, tu dois le connaître…

Nicole (un peu sèche, elle s’approche de Romuald pour lui tendre la main)- Non, je ne connais pas Monsieur… Bonsoir Monsieur !

Romuald s’approche pour la saluer. Il est gauche et lui fait presque une courbette en lui serrant la main. Le Président affecte un grand sourire et ne cache pas une certaine admiration pour Romuald.

Le Président- The Voice, Les Anges de la Téléréalité !! Nicole ! Les Anges de la Téléréalité… Et puis

encore l’émission "Questions à" diffusée par la 1ère chaîne la semaine dernière !

Nicole (sèche)- Je ne regarde qu’Arte ! Tu le sais bien ! Mais, dis-moi, maman se plaint, ça fait huit jours

que tu ne l’as pas appelée !

Le Président (agacé)- Bon ! Ce n’est pas le moment de parler de ça ! Nicole, je suis assez occupé par mes

fonctions, alors maman, promis, je l’appelle demain.

Nicole (pincée)- Effectivement, je vois que tu es très occupé… avec le show-biz, donc !

Elle hausse les épaules en se retournant et quitte la pièce précipitamment en claquant la porte.

Le Président (qui soupire sur la sortie de sa sœur en regardant la porte)- Bon, Romuald, je te laisse quelques minutes. Tu peux regarder la télé et même faire un

tour sur la terrasse. Fais comme chez toi !

Le Président sort, mais avant de franchir la porte, il marque un temps d’arrêt pour regarder Romuald. Il se mord les lèvres.

Romuald se lève, sort son smartphone de sa poche, s’apprête à téléphoner, puis se ravise et sort sur la terrasse en poussant un volet entrouvert.

LE MARI DU PRESIDENT

15

Un instant après, entre dans le salon un petit personnage dans la cinquantaine, fébrile et assez excité. Il sort son mobile et compose un numéro.

Jean-Claude (mystérieux)- Oui ! C’est… le locataire de Matignon ! Je suis en entretien avec Max et Régis… Oui à

propos de la campagne électorale. J’ai un truc pour le faire tomber ! Figure-toi qu’il a l’air de s’intéresser à Romuald ! Oui le petit PD des Anges de la Téléréalité !… Oui, je sais, on doit dire gay ! Mais moi, ça me dégoûte ces gens-là ! Je n’en fréquente pas ! Et il n’y en a pas dans ma famille ! Le Président ?… Ça,… On n’en sait rien ! Le Président est célibataire. On ne lui connaît aucune femme ! Il fait quelques escapades très espacées depuis l’Élysée ! Je l’ai fait suivre par les RG ! Mais à chaque fois cela mène à un immeuble bourgeois du 17ème. Impossible de voir ou de savoir chez qui il se rend !… Charles ? Son garde du corps ! Il le suit, oui, mais il reste dans la rue… Le questionner ? Non trop dangereux ! Il est très dévoué à Max ! Il irait tout lui répéter ! Du fric ? Non… C’est un pur ! Impossible…

Au début de cette conversation téléphonique, on aperçoit Romuald qui s’apprête à rentrer. Quand il voit le 1er Ministre qu’il semble reconnaître, il s’arrête et se cache derrière le volet. Il entend toute la conversation…

Le 1er Ministre reprend :

Jean-Claude- Je vais brancher Régis – qui est dans le coup – pour qu’il favorise le plus de rencontres

possible avec Romuald. On va créer l’ambiguïté ! Et j’ai plusieurs paparazzis dans ma poche !

Jean-Claude raccroche et sort de la pièce.

Romuald rentre après s’être assuré que le 1er Ministre est bien parti.

Romuald s’assoit sur le canapé, sort son smartphone de sa poche, s’apprête à téléphoner puis se ravise à nouveau, comme s’il se rendait compte de la gravité de la conversation qu’il venait d’entendre. Puis, tout guilleret, il se lève, fait face à un miroir, parle tout seul et s’entraîne à appeler le Président par son prénom et à le tutoyer.

Romuald (minaudant et charmeur)- Maxou ! Maxou ! Comment tu me trouves ? Je suis à ton goût ?

Le président entre brutalement dans le salon.

Le Président (étonné)- Tu m’appelles ? J’ai été trop long ?

Romuald- Non, je m’entraîne à prononcer ton nom et à te tutoyer !- Je suis allé faire un tour sur la terrasse. Tu as un beau jardin ! En plein Paris, c’est

chouette ! Au matin, à la lueur de l’aube, il doit être magnifique !

Le Président (ému)- Serais-tu poète ?

LE MARI DU PRESIDENT

16

Romuald- J’adore l’aube et les petits matins. J’aime bien la poésie, mais je suis bien incapable

d’écrire un poème ! Mais par contre, je me défends un peu en peinture. Je peins des aquarelles !

Le Président- Merveilleux ! Faudra me montrer ça ! En attendant, les raseurs sont partis ! Ça te dirait

une petite coupe de champagne ?

Romuald- Oui ! Mais je te préviens ! Je supporte mal l’alcool ! Je vais dire des bêtises ! Ou les faire

d’ailleurs ! Tu seras peut-être obligé de me loger pour cette nuit !

Le Président (ambiguë)- Mais cela te fait plaisir ?

Romuald (finaud)- De boire un verre avec toi ? Oh oui ! Mais je suppose que tout ce que je vois et j’entends

ici, faut que je le garde pour moi, non ?

Le Président- Cela vaudrait mieux pour moi ! Je suis entouré de Judas tu sais ?

Romuald- De Judas ?

Le Président va pour lui répondre, mais Romuald lui fait un signe indiquant qu’il a compris. Il va pour ouvrir la bouche et parler au Président, mais il se ravise.

Le Président (appelant par téléphone son majordome)- Paul, s’il vous plaît, une bouteille de champagne et deux coupes !

Le rideau tombe pour un précipité.

Le rideau se ré ouvre sur la même salle. La bouteille est retournée dans le seau… Les coupes sont vides.

Le Président (en chemise) est affalé sur le canapé et Romuald danse sur la techno. Romuald a retiré sa veste, sa cravate. Sa chemise est largement ouverte sur son torse imberbe et musclé.

Le Président (enthousiaste)- Ah ! Romu ! Comme tu dis ! T’es trop ! T’es trop !

Romuald repousse sur le côté la table basse. Romuald change de CD sur la chaîne et effectue après avoir fait tomber sa chemise sur son pantalon, telle une jupe, une danse du ventre !

La porte du salon s’ouvre sur Nicole que le Président et Romuald n’ont pas vu entrer. Romuald invite le Président à danser avec lui. Il remet la techno. Le Président s’y met aussi… La danse de Romuald est de plus en plus suggestive et il pousse de petits cris accompagnant la musique…

LE MARI DU PRESIDENT

17

Nicole, sèchement (coupant net le son de la chaîne et s’adressant à son frère)- Aurais-tu oublié qui tu es ?

Le Président (furieux)- Un homme comme un autre ! J’ai bien le droit de m’amuser ! Tu m’énerves Nicole !

Lâche-moi ! Puisque tu me rappelles que je suis le Président eh bien, je te prie de quitter l’Élysée quelques jours. Tiens ! Va donc t’occuper de maman !

Nicole- Ne me le dis pas deux fois !

Le Président (direct)- Pars pour Gannat et attends que je te fasse signe pour revenir à Paris !

Nicole- Et le dîner du G8 à Versailles !

Le Président (sec)- Laisse-moi ! Je n’ai pas besoin de toi !

Nicole sort en claquant la porte.

Romuald (remettant sa chemise)- J’ai fait du gâchis ! Elle est furieuse contre toi et sûrement contre moi ! (puis amusé) Tu

fais comme les rois de France ! Des lettres de cachet pour éloigner les importuns !

Le Président (étonné)- Tu sembles bien connaître l’histoire de France ! J’exagère sans doute, Nicole, malgré

ses petites agressions et son air revêche, c’est la plus gentille femme de mon entourage ! Elle, elle fait tout par-devant et ne me trahit pas ! Demain matin, j’irai la voir dans ses appartements et je m’excuserai !

Le Président (retrouvant le sourire)- Tu te sens en forme ? Ou bien veux-tu rester dormir à l’Élysée ?

Romuald (très câlin, s’approchant très près du Président)- Je me sens en forme, mais, je dormirais bien ici ! Mais je ne sais pas si je vais dormir !

Je suis un peu "vénère" !

Le Président ouvre les bras et Romuald s’y blottit. Le rideau tombe et on les voit avec quelques hésitations s’embrasser… peu chastement…

SCÈNE 4

Le rideau s’ouvre sur un grand studio, bien décoré, au milieu un lit visiblement… occupé. La pièce est en désordre, des vêtements traînent partout et notamment des sous-vêtements masculins. Un boxer gris est accroché sur l’écran plat d’un ordinateur…

La sonnette de l’interphone retentit, mais aucune des deux personnes que l’on devine dans le lit ne réagit.

Quelques instants après, un bruit de clefs, la porte s’ouvre et une femme d’une quarantaine d’années, petite, ronde et au bras plâtré, entre dans le studio.

LE MARI DU PRESIDENT

18

Juliette (mère de Romuald)- Romuald ! Tu es là mon bébé ? Romu ? T’es encore au lit ?

Une tête blonde émerge de la couette. Romuald redresse son buste nu et voyant sa mère s’écrit :

Romuald (affolé)- Maman ! Mais qu’est-ce que tu fais ici ? Tu ne sonnes plus maintenant ! Je ne suis pas

seul ! Laisse-nous ! Va-t’en vite maman, s’il te plaît !

Juliette (calme et déterminé)- J’ai sonné, mais tu ne réponds pas ! Ça fait 15 jours que tu ne m’appelles plus ! Que tu

ne viens plus me voir ! Tiens, depuis ta soirée à l’Élysée !

Romuald (très doux)- Je t’en prie maman ! Pars vite ! J’irai te voir ce soir !

Juliette (ignorant la demande de son fils)- Qui c’est sous les draps ? Avec qui t’as encore niqué ? Comme tu dis ! Un ministre ?

Une vedette de la chanson ? Un grand couturier ? Depuis que t’as fait les Anges de la Téléréalité, tu fréquentes du beau monde ! Un homme politique, manquerait plus que ça ! Tiens d’ailleurs, devant l’immeuble, il y a des hommes costauds à l’allure bizarre, on dirait des flics !

Romuald se lève. On voit qu’il est nu et il se couvre (mal) avec une serviette de toilette trouvée au sol. Il essaye de pousser sa mère vers la porte… Mais elle résiste… La serviette de Romuald glisse plusieurs fois… Romuald arrive à conduire sa mère dans le couloir vers la porte, porte qui ne peut être vue du lit.

La tête du compagnon de lit (le Président) sort de la couette. Il est dans la même tenue que Romuald…

Le Président (joyeux et amoureux)- Romu ! Mon Lapinou ! Quel est ce tintamarre ?

Le Président se lève rapidement après s’être reculotté sous les draps. Il ne porte qu’un boxer, de marque et élégant venant d’une boutique du Marais…

Juliette entre à nouveau dans le studio et se retrouve nez à nez avec le Président.

Juliette (reconnaissant le Président et comme si elle avait vu le diable)- Ah ! Mon Dieu ! Mon Dieu ! Mais c’est pas vrai ! Mais c’est pas vrai !

Elle s’évanouit, rattrapée par Romuald et le Président.

Le rideau tombe et se rouvre quelques instants après. Romuald et le Président se sont sommairement rhabillés. Le caleçon gris a rejoint le postérieur de Romuald. Juliette reprend ses esprits, assise dans un fauteuil.

LE MARI DU PRESIDENT

19

Juliette (maladroite, émue…)- Monsieur le Président… Je vous salue… Mais veuillez m’excuser, je ne pouvais

m’attendre à vous trouver au lit avec mon fils. D’habitude, je le préviens toujours quand je me rends chez lui ! Mais depuis hier soir, son téléphone est sur messagerie ! Depuis quinze jours, il ne me dit plus rien ! Je comprends maintenant !

(Se retournant vers son fils)- Est-ce bien raisonnable mon bébé ? Tu vas au-devant de bien des ennuis !

(Revenant vers le Président)- Vous aussi Monsieur le Président ! Mais excusez-moi, je m’occupe encore de ce qui ne

me regarde pas !

Le Président- Je vous présente mes hommages, Madame ! Ne vous excusez pas ! Par contre vous

obligeriez beaucoup votre fils et moi à observer la plus grande discrétion.

Juliette- Bien entendu, Monsieur le Président. Mais excusez-moi un instant, je vais devoir poser

une question un peu directe à mon fils puisque je suis involontairement dans le secret.

Le Président (tout amoureux)- Merci Madame ! Mais avant que vous questionniez votre cher fils, permettez-moi de vous

féliciter d’avoir mis au monde un garçon, si sensible, si spontané, si vif, si généreux, si tendre, si beau, si…

Juliette (flattée mais qui lui coupe la parole)- Merci ! Mais que de "si" ! Ce n’est pas Paris que vous allez mettre en bouteille, mais la

France ! (elle insiste sur "France")(Se tournant vers Romuald)

- C’est juste un coup, comme tu dis, ou c’est sérieux ?

Romuald (s’approchant du Président)- Pour moi, c’est sérieux maman ! Je l’aime ! C’est une chose qui ne m’est jamais arrivée !

Et en plus, c’est un sacré bon coup !

Juliette (solennelle)- Romuald ! Sois respectueux ! Tu parles devant et d’un Président de la République !

Le Président (très souriant)- Laissez-le ! Il est si spontané ! Il n’y a rien de calculé chez lui ! Et je l’aime !

On sonne à nouveau, mais à la porte de l’appartement cette fois.

Romuald va ouvrir et fait entrer un homme qu’il semble connaître.

Le Président (qui le présente à Juliette)- Mon garde du corps, responsable de ma sécurité, le Lieutenant Charles VALBERT.- Que se passe-t-il Charles ?

LE MARI DU PRESIDENT

20

Charles- Monsieur le Président, je suis monté vous prévenir, une meute de journaliste vous attend

au pied de l’immeuble ! Je me demande comment ils ont su que vous étiez là !

Romuald (vif et contrarié)- Putain ! J’ai compris !

Le Président- Que veux-tu dire Romu ?

Romuald (hésitant)- J’aurais dû te le dire ! Mais je ne voulais pas t’ennuyer ! Et puis je n’ai peut-être pas bien

compris ! Et puis, je ne veux pas faire d’histoire !

Le Président (tout tendre)- Parle vite mon Romu !

Romuald (très contrarié)- Lors de notre première soirée à l’Élysée, lorsque tu m’as demandé de t’attendre pendant

que tu étais en entretien avec le 1er Ministre, je crois, je me suis rendu sur la terrasse. Lorsque j’ai pensé rentrer, un homme était là, dans le salon, au téléphone, avec son smartphone. J’ai reconnu un ministre.

Le Président- Quel ministre ?

Romuald (agité)- Je le connais, mais je ne sais pas son nom ! Le tout petit ! Le nain agité ! Ah mais si !

Une info ! Avant, il était à Bercy comme vous dites dans la politique !

Le Président (qui rigole)- Le 1er Ministre, Jean-Claude DUVIVIER ! Le nain agité ! Ça lui va bien ! Tu as trouvé le

mot juste ! C’est vrai, il nous a quittés quelques instants ce soir-là !

LE MARI DU PRESIDENT

21

Romuald- Il ne pouvait pas me voir. J’ai entendu la conversation. Jean-Claude DUVIVIER, donc,

parlait avec un inconnu, de toi, de moi. J’ai compris qu’il voulait se servir de moi pour saper ta carrière, faire un scandale.

Le Président- Tu ne m’as rien dit ! Mais au moins, cela me prouve ta discrétion !

Romuald- J’ai préféré la fermer ! En effet, à ce moment-là, je savais bien que nous étions attirés

l’un vers l’autre. Je me doutais bien que tu voulais tenter de me baiser comme beaucoup d’autres ! Alors, je me suis dit que cela ne valait pas la peine de parler et de foutre le bordel entre toi et le 1er Ministre. Après cette première nuit ensemble, j’ai vite compris que notre relation n’allait pas être que du cul ! J’ai pensé aussi que tu étais assez grand et assez fort pour te méfier de tes "amis" (il insiste sur le mot) et moi assez discret aussi.

Le Président, très ému, prend Romuald dans les bras, le serre très fort, mais par pudeur devant Juliette et Charles, ne l’embrasse pas…

Le Président (à Romuald)- En effet, je vais me défendre ! Avec ta complicité, ton aide et ton soutien, mon Romu, si

tu le veux bien !

Le Président (à Juliette)- Juliette ! Vous permettez que je vous appelle Juliette, moi c’est Max ! Voulez-vous

m’aider ?

Juliette (flattée)- Bien sûr Monsieur le Pré… (elle se reprend) Bien sûr Max ! Mais que puis-je faire ?

Le Président- Si vous n’avez pas de mari ni d’amant qui pourrait être jaloux, sortir à mon bras de cet

immeuble ! Cela suffira ! Et ce soir, on dîne tous les trois à l’Élysée. Charles viendra vous chercher et vous entrerez officiellement à l’Élysée ! Charles, vous laissez un de vos hommes pour protéger Romuald et éloigner les curieux autour de lui et ce, jusqu’à nouvel ordre.

Juliette (ravie)- Servir le Président de la République ! Si je m’attendais ! (et discrète, elle ajoute),

Charles, sortons et attendons le Président sur le palier !

Romuald- Merci Maman !

Juliette- Comme je te l’ai déjà dit, j’aurais, comme toutes les mères, préféré être un jour, grand-

mère ! Mais mon bébé, je ne veux que ton bonheur !

LE MARI DU PRESIDENT

22

On frappe à la porte. Romuald hésite pour aller ouvrir. La personne insiste… et on entend une voix :

- Romu ! C’est moi Bill !

Romuald (derrière la porte)- Pourquoi t’as pas sonné ? Désolé Bill, je suis occupé ! Reviens !

Bill- Eh ! Je connais le code de la porte de l’immeuble ma loute ! Dépêche-toi de m’ouvrir !

Romuald (au Président)- Merde ! C’est Bill, mais pas CLINTON ! Bill DUVAL, mon ex ! On est toujours pote ! C’est

mon meilleur ami ! Mon confident ! Ceci dit, pour toi et moi, je n’ai rien dit !

Le Président- Fais-le entrer ! Je ne veux pas risquer de te faire perdre tes amis ! Les vrais amis, c’est

sacré !

Romuald (affolé)- Mais qu’est-ce que je lui dis ?

Le Président- Ce que tu veux ! Mais je pense qu’il va vite comprendre !

Romuald- Merci Maxou !

Romuald va ouvrir la porte et fait entrer… un beau black d’une vingtaine d’années au look… assez voyant… Ils s’embrassent dans le vestibule.

Bill (il parle un peu… gay, contrairement à Romuald)- Mais qu’est-ce tu branlais ! Ça fait 15 jours que t’es sur répondeur et je te laisse des

messages auxquels tu ne réponds pas ! Je commençais à m’inquiéter ! Depuis que tu interviewes les Présidents, t’as les chevilles qui enflent ! Tu ignores tes potes !

Romuald ne répond pas à la question, mais invite d’un geste Bill à entrer dans le studio.

Bill voit d’abord Charles et Juliette. Le Président lui tourne d’abord le dos.

Bill- Bonjour Monsieur ! Bonjour Dame Juliette !

Il va pour embrasser Juliette et se trouve nez à nez avec le Président.

Bill (interloqué, il prend un accent créole)- Oh ! Ah ! Seigneur Dieu !

LE MARI DU PRESIDENT

23

Le Président (amusé)- Non ! Je ne suis pas Dieu ! Et vous n’êtes pas au paradis ! Bonjour Bill !

Bill (qui se ressaisit, très digne, très "parisien")- Monsieur le Président de la République ! Mes respects !

Le Président (amusé)- "Bonjour" suffira largement !

Romuald a rejoint le Président. Ils se sont rassemblés en fait. On les devine très… proches… Puis le Président prend la main de Romuald. Leurs doigts s’enlacent…

Bill (qui commence à réaliser) (il montre du doigt Romuald, puis le Président)- Non ?… Toi ?… Lui ? C’est pas possible !

Le Président, Romuald, Juliette et Charles (tous en même temps)- Mais si !

Bill (qui en rajoute)- Je vais m’évanouir !

Romuald (un peu moqueur)- Non pas toi ! T’es un homme ! Tu as fait ton service militaire et dans les paras !

Bill- Oui ! Mais à l’habillement !

Le Président- Bill, nous comptons sur vous ! Vous voyez ce que je veux dire ?

Bill (flatté)- Bien sûr, vous pouvez compter sur moi Monsieur le Président ! Ah ! Mais ! Monsieur le

Président ! Donc, vous êtes le petit ami de mon ex. Donc, nous sommes camarades de régiment !

Romuald (étonné)- Quoi ?

Bill (rigolard)- Oui, on a travaillé dans le même corps !

Un silence, Romuald et le Président ne comprennent pas la plaisanterie.

Romuald (qui éclate de rire)- "Régiment – corps"… Mais, tu veux quoi Bill ?

Bill (toujours amusé)- Au moins… embrasser le Président et l’appeler par son prénom !

Le Président, soulagé et amusé, tend les bras à Bill. Ils s’embrassent sur les deux joues, très fraternellement.

LE MARI DU PRESIDENT

24

Le Président- Entendu Bill, moi, c’est Max !

Bill (ravi) (puis soucieux)- Ne manquerait plus qu’une photo !- Mais en bas… Maintenant, je comprends, il y a des photographes !

Le Président- Je vais sortir au bras de Juliette !

Bill (amusé)- Ok ! Je vais descendre avec vous, si vous permettez !

(Puis s’adressant à Romuald)- Ma loute ! On déjeune ensemble à midi ? Je t’invite ! Au Gai Moulin ! Tu sais que

Christophe s’est agrandi à côté ? Tu pourras peut-être m’en dire un peu plus !

Romuald- Ok Bill ! Mais je ne te parlerai que de sentiments et de mon bonheur !

Juliette entraîne Charles et Bill vers la porte…

Romuald regarde le Président…

Le rideau tombe alors que le Romuald se rapproche du Président…

Le rideau se rouvre, Romuald est seul. Il finit de s’habiller pour partir travailler, tenue très lookée. Il chantonne…

On frappe à la porte, Romuald va ouvrir et fait entrer Régis de St Algue…

Régis de St Algue- Salut Romuald ! Je n’irais pas par quatre chemins. Je suppose que vous voulez aider le

Président de la République ? Oui ! Le 1er Ministre et moi pensons que le Président doit s’ouvrir beaucoup plus aux jeunes. Jean-Claude DUVIVIER souhaiterait que vous passiez beaucoup plus de temps avec le Président, on vous présenterait comme un "conseiller" du Président en matière de jeunesse ! Vous pourriez l’emmener dans les endroits branchés de Paris ! Même gay ! Au Gai Moulin par exemple ! Nous savons que vous y avez votre table ! Nous savons aussi que vous lui plaisez beaucoup ! Il vous suivra !

Romuald (qui a compris le piège)- C’est dangereux ! Toute la France sait que je suis gay ! Le Président va passer pour un

PD !

Régis de St Algue (faux cul)- Mais non ! Mais non ! Seulement pour un Président qui s’intéresse à la jeunesse et aussi

au monde gay ! Mais surtout, cela doit rester entre nous ! Le Président ne doit rien savoir !

Romuald (agressif)- Vous êtes saturé "ouf" ! Le disque dur est plein ! Cette idée me déplaît ! C’est non !

LE MARI DU PRESIDENT

25

Régis de St Algue- 150 000 euros !

Romuald (irrité)- Mais ça va pas ! Non ! Vous êtes vraiment con ! Je ne suis pas à vendre, ni mon temps,

ni mon cul !

Régis de St Algue- Vous le regretterez un jour ! Surtout quand le Président en aura assez de vous sauter et

d’entendre vos conneries !

Romuald (violent)- Dehors pauvre con !

Régis furieux, sort de l’appartement sans un mot et claque la porte violemment.

L’interphone sonne, Romuald répond. Il a l’air étonné et déclenche l’ouverture de la porte.

Quelques instants après, il ouvre la porte sur Nicole (en tailleur élégant).

Romuald- Bonjour Madame ! Excusez-moi, je vais travailler, je suis en retard et très pressé !

Nicole- Bonjour Monsieur. Je ne vous retiendrais que quelques instants.

Romuald (aimable)- Vous pouvez m’appeler Romuald !

Nicole (sèche)- Je laisserai cette familiarité à mon frère, si vous permettez ! C’est à son sujet que je

viens vous rendre visite. Cela fait des années que je sais que mon frère est homo. C’est lui qui m’en a informé à la fin de son adolescence. C’est un secret bien gardé puisqu’en dehors de notre mère, personne ne le sait, hormis sans doute quelques… partenaires de mon frère… Et Aline FORD bien sûr ! Par ailleurs, je sais… que vous avez passé plusieurs nuits ensemble à l’Élysée et ici même !

Romuald (grave et contrarié)- Et que puis-je faire pour vous ?

Nicole (brutale)- Disparaître de la vie de mon frère ! Vous allez ruiner sa carrière, si ce n’est déjà fait ! Je

vous rappelle qu’il est candidat pour le renouvellement de son mandat !

Romuald- Un précédent Maire de Paris est bien gay et tous les électeurs le savaient quand ils l’ont

élu !

Nicole- Président de la République, c’est autre chose !

LE MARI DU PRESIDENT

26

Romuald (agressif, au bord de craquer et volontairement vulgaire)- Mais ce n’est pas une histoire de cul entre lui et moi ! Pour cela, il pouvait (il hésite)…

me baiser et me jeter ensuite ! Ce n’est pas le cas !

Nicole- Je n’ai pas voulu vous vexer, Monsieur ! Une histoire d’amour c’est bien ce que je

crains ! Il est encore temps d’arrêter tout ça ! (elle hésite un instant)… Pour vous aider, 150 000 euros en petites coupures ?

Romuald ne répond pas. D’un geste élégant, il invite Nicole à sortir de chez lui. Nicole sort sans un mot. Romuald se dirige vers le lit pour prendre son sac à dos. Il sort un mouchoir en papier et s’essuie les yeux pour effacer ses larmes.

Le rideau tombe.

LE MARI DU PRESIDENT

27

SCÈNE 5

Le rideau s’ouvre sur un salon à l’Élysée. Le Président est en compagnie de Charles. Le Président est en costume clair, sans cravate, beaucoup plus cool qu’avant…

Le Président qui était l’oreille sur son smartphone, jette rageusement son téléphone.

Le Président- Mais pourquoi ne répond-il pas ? Charles, votre enquête ?

Charles (très calme et posé)- Président, comme je vous l’ai déjà dit trois fois depuis le début de la semaine. Romuald

ne rentre plus chez lui. Je me suis rendu chez Jean-Loup Galtier. On n’a pas vu Romuald depuis plusieurs jours. Il a téléphoné à Jean-Loup Galtier pour dire qu’il était "au refuge" et il a raccroché. Je me suis permis d’appeler Bill DUVAL. Romuald ne s’est pas rendu à leur rendez-vous au Gai Moulin. Il n’est au courant de rien. J’en suis sûr, c’est un brave garçon ! J’ai rendu visite à Juliette. Elle n’a rien voulu me dire, malgré sa gentillesse.

Le Président- Vous lui avez demandé de venir me voir ?

Charles- Juliette a d’abord refusé. Puis sur mon insistance, cela remonte à ce matin, elle a fini par

me dire que son fils avait été mis sous pression par votre entourage et par deux fois. Je la cite texto "Une personne lui aurait demandé, moyennant finance, de s’afficher avec vous et l’autre, toujours avec une "récompense" à l’appui, le contraire". Je lui ai fait un peu de charme et Juliette va venir jusqu’à vous. Elle ne se confiera qu’à vous. Je l’ai fait chercher, elle va arriver d’un instant à l’autre !

Le Président- Bien Charles, merci !

Charles- Cela correspond à ce que je vous avais dit ! J’avais donc questionné, Roland que j’avais

affecté à la protection de Romuald. Régis de St Algue a rendu une courte visite à Romuald et Madame votre sœur ensuite. Visiblement très perturbé, Romuald a pris le métro. Roland l’a suivi. Mais il a perdu sa filature. Romuald a volontairement semé Roland et il connaît mieux le métro que mon adjoint !

Le Président (soulagé et moqueur)- Ah ! Les transports en commun, c’est l’avenir de Paris comme dirait Monsieur le Maire

de la capitale ! Quant à Roland, il ne doit pas être fier ! Mais qu’il se rassure, d’autres font des gaffes. Il y a quelques années, un escadron de gendarmes ou de CRS ont bien traversé la France pour se rendre soi-disant à La Plagne. Mais le chef de convoi a programmé sur son GPS La Plagne en prenant le 1er La Plagne venu, mais il s’est aperçu de l’erreur en arrivant à La Plagne à côté de Montauban ! Romuald, lui, pas besoin de GPS !

LE MARI DU PRESIDENT

28

Charles (malicieux)- Vive le métro, pas besoin de GPS, Président !

Un huissier frappe à la porte, l’ouvre sur invitation du Président et annonce :

L’huissier- Madame Juliette LAFONT !

Le Président se lève, alors que Charles s’apprête à sortir en saluant Juliette.

Le Président- Bonjour Juliette, comment allez-vous ? Restez Charles !

Juliette- Bonsoir Monsieur le Président ! Vous voulez donc des nouvelles de mon bébé ?

Le Président (soulagé)- Oh ! Oui ! J’ai cru comprendre qu’il a volontairement disparu suite à des pressions. Mais,

je suis sûr que vous savez où il est. Vous êtes trop calme et vous m’auriez fait appeler pour le faire rechercher ! Non ? Continuez à m’appeler Max, s’il vous plaît ! Nous ne sommes pas fâchés ! Non ?

Juliette- C’est cela, Max ! Je n’irai pas par quatre chemins ! Romu est chez moi, au 5ème sans

ascenseur, rue Jean-François Lépine ! Il s’est réinstallé dans sa petite chambre qui donne sur les toits, son "refuge" comme il dit quand il ne va pas bien ! Depuis plusieurs jours, il est prostré. D’abord, il a pleuré ! Il a fini par me dire qu’on l’avait pris pour un pantin ou pire, une pute ! Il m’a dit qu’il vous aimait, mais qu’il ne voulait pas d’une manière ou d’une autre vous nuire ! Il ne sait pas que je suis ici ! Je suis – pour Romu – au marché Saint Quentin !

Le Président- Bien ! Merci beaucoup Juliette ! Si vous permettez, je vais envoyer Charles le chercher !

Charles- Président ! Si je puis me permettre, vous devriez y aller vous-même ! Il attend Max, pas

le Président de la République !

Le Président (réalisant son erreur)- Oh que je suis con ! Merci fidèle Charles !

Le rideau tombe.

Le rideau se lève sur le même décor.

Le Président est assis sur le grand canapé. Romuald est allongé, sa tête repose sur les genoux du Président. Romuald est habillé cool, très sexy…

LE MARI DU PRESIDENT

29

Le Président (qui lui caresse les cheveux)- Mon Romu ! Tu sais comme je tiens à toi ! Je n’avais pas imaginé la pression que l’on a

faite sur toi ! Je vais y remettre bon ordre ! Tu es délicat et discret ! Mais si nous envisageons un parcours sentimental commun… Tu le souhaites toujours ? Il faudra officialiser notre union !

Romuald- Oui, Maxou ! Mais iras-tu jusqu’au mariage avec moi comme tu me l’as proposé ? Si je

tiens à toi, je n’exige rien de particulier !

Le Président- Il y a quelques mois, je n’aurais pas pu envisager une telle chose ! Je ne pensais pas

que ce contrat pourrait me servir ! Mais aujourd’hui, c’est la seule façon de montrer à l’opinion publique que notre relation est sentimentale ! Mais c’est peut-être un peu tôt ?

Romuald (se relevant tout joyeux)- Pour moi c’est ok ! Un mariage ! J’en ai toujours rêvé ! Mais tu sais, j’ai déjà été pacsé

deux fois ! Quand c’est sérieux, c’est comme un mariage !

Le Président (contrarié)- Ah bon ! Et tu as rompu ?

Romuald (souriant et moqueur)- 2 fois ! Mais ne fais pas cette tête-là Maxou ! C’étaient de faux PACS ! Pour légaliser des

sans-papiers ! Un Mauritanien qui était déjà marié trois fois dans son pays. Il avait 15 enfants ! Rassure-toi, il n’a pas essayé de m’en faire un ! Mais au moins, maintenant, il peut les nourrir ! C’est chouette non ?

Le Président- Oui, on est bien égoïste dans le monde occidental ! Et le 2ème ?

Romuald- Ouh ! Serais-tu jaloux, mon Maxou ? Le 2ème, un Mauricien, lui, il était gay et voulait

rejoindre son copain à Paris qui faisait ses études à la Sorbonne et qui avait un visa d’études ! Tu veux savoir si j’ai fait avec lui, une nuit de PACS ?

Le Président- Non ! Tu étais libre et puis… Tu es si généreux mon Romu !

Romuald- Si tu veux toujours de ce mariage, pour moi, ça sera sérieux !- Mais tu risques de perdre les élections !

LE MARI DU PRESIDENT

30

Le Président- Je risque de perdre effectivement ces élections ! Mais pour les gagner, je vais me battre

jusqu’au bout ! Et puis, la politique… Je te préfère à elle ! Tu es la plus belle chose que j’ai reçue depuis ma naissance ! Je ne renoncerai pas à toi ! Et je te demande en mariage !

Romuald (rayonnant)- Ouh ! Merci Maxou ! Moi aussi !

Un huissier frappe à la porte, l’ouvre sur invitation du Président et annonce :

L’huissier- Monsieur le 1er Ministre demande à être reçu.

Le Président- Il tombe bien ! Faites-le entrer !

Romuald- Attends ! Je vous laisse !

Le Président- Non ! Reste ! Il souhaitait nous voir ensemble, non ? Je vais juste lui annoncer une

conférence de presse ! Et toi, pour l’instant motus et bouche cousue comme diraient les Dupondt ! Mais je sais que je peux te faire confiance !

L’huissier sort et un instant après la porte s’ouvre sur Jean-Claude DUVIVIER.

Le Président (qui s’est levé ainsi que Romuald)- Salut Jean-Claude ! Je te présente Romuald LAFONT ! Mais tu le connais sans doute

pour l’avoir vu à la télé ?

Jean-Claude (visiblement très gêné)- Oui ! Bien sûr ! Bonjour Monsieur !

Le Président (très ferme)- J’ai cru comprendre que tu souhaitais que je voie très souvent ce charmant jeune

homme… Tu vas donc être servi ! Je vais faire une conférence de presse ce soir vers 20 heures ! Je pense que la 1ère chaîne la diffusera en direct ! Tu pourras ainsi me voir et prendre connaissance directement de… disons… mes dernières activités. À ce propos, d’ailleurs, la mission de Régis est terminée. Il présente sa note d’honoraire et il disparaît…

Jean-Claude (tout pâle)- Tu pourrais me dire ?

Le Président- Tu verras bien ! Tu pourras revenir me voir après ! Je serais ici en compagnie de

Romuald. Pour Régis, ne t’inquiète pas ! Il sait pourquoi !

Le 1er Ministre quitte brusquement le salon, visiblement inquiet et contrarié !

Romuald attend que le 1er Ministre soit parti et éclate de rire.

LE MARI DU PRESIDENT

31

Le Président- Cela me fait plaisir de t’entendre rire ! Le rire manque à cette maison d’ailleurs ! Bon, si

on allait travailler ?

Romuald- Oh oui ! Jean-Paul compte sur moi pour la prochaine collection !

La porte du salon s’ouvre à nouveau sur Nicole.

Nicole (gênée)- Bonjour Max ! Bonjour Romuald !

Le Président (moqueur)- Je te croyais à Gannat ! (il fait l’imbécile) Ah ! Non ! On t’aurait vu dans le 12ème…

Nicole (penaude)- Oui, j’ai fait une bêtise, je crois !

Le Président (très sec)- C’est le moins qu’on puisse dire ! Tu t’es ravalée au rang des prédateurs ! Et ce n’est

pas Romuald qui m’a mis au courant ! Tu sais ce qu’il te reste à faire !

Nicole- D’abord, je vais te dire que j’avais fait ça en pensant à ton bien ! Et puis, je t’ai vu si

malheureux depuis ce jour-là ! (puis reprenant son naturel). J’ai voulu t’éviter de gâcher ta carrière !

Le Président (déterminé)- Et qu’est-ce qui est plus important ? De plus important pour moi ! La France ? Laisse-moi

rire ! Avec ou sans Romuald, ils m’auront peut-être jeté dans deux mois ! Et dans quelques années… Plus personne ne s’intéresse aux anciens présidents ! Tiens un des derniers, pourtant pas si loin ! Des clous, ses meubles aux enchères !

- J’ai découvert l’amour ! Je veux vivre Nicole ! Avec ou sans la France ! Et Romuald ? Tu y as pensé à ce charmant jeune homme ? Tu l’as pris pour quoi ?

(Énervé, tout d’un coup grossier)- Un cul ? Une bite ? Il a du cœur lui aussi ! Des sentiments ! Tu crois que tout s’achète ?

Il s’arrête un instant en regardant amoureusement Romuald.

Nicole (lui coupant la parole mais à court d’argument)- Et tu as pensé à maman ?

Le Président (surexcité)- Maman ? Mais que vient-elle faire là-dedans ? Elle a eu sa vie ! J’ai la mienne ! Elle

n’appartient qu’à moi ! J’ai honte pour toi si tu n’as aucun remords vis-à-vis de Romuald !

LE MARI DU PRESIDENT

32

Nicole (vers Romuald, assez douce)- D’accord Romuald ! J’ai été odieuse avec vous ! Je pense que vous ne le méritez pas !

Je vous présente des excuses ! (puis se tournant vers son frère, plus sèche et un peu moqueuse). Je pars pour Gannat ! Bon courage pour les jours à venir !

- À propos de Gannat, comme tu sais j’y vais toujours en train via Vichy. Mais cette ligne, c’est la galère ! Pourtant elle dessert le centre de la France et la SNCF l’a oubliée. Les trains roulent au pas, sont toujours en retard, voire supprimés, inconfortables même en 1ère classe !. Tu vas dire au ministre des transports qu’il n’y a pas que les TGV qui comptent. Et puis aussi tu le diras au Président de la SNCF !

Le Président ne répond pas à sa sœur et celle-ci après un bref salut à ce dernier et à Romuald sort de la pièce.

Le Président (à Romuald)Pour le train, elle n’a pas tort ! Je vais voir ça !

L’huissier après avoir frappé à la porte et après être entré annonce au Président :

- Madame Aline FORD !

Aline FORD (qui entre brutalement et qui ne voit pas Romuald qui s’est à nouveau allongé sur les genoux du Président).

- Max, je sais où est ton Romu, notre Romu ! J’ai fait mon enquête, il est chez sa maman rue Jean-François Lépine ! Le petit chéri se cache, il a eu un gros chagrin provoqué par l’attitude déplacée de ton entourage ! C’est dégueulasse ce qu’on lui a fait !

Romuald, tout sourire se montre…

Aline FORD qui se précipite sur Romuald pour l’embrasser- Ah ! Mon chéri ! Tu es là !- Je veillerai personnellement à ce que l’on ne te fasse plus de misère !

Le rideau tombe et s’ouvre à nouveau sur le même décor. Le président et Romuald sont assis côte à côte. On voit un poste de télévision et le générique de fin du journal télévisé de la nuit.

Romuald- T’as été bon ! Et en te revoyant après le direct, je trouve ça meilleur encore ! T’as vu la

tronche décontenancée de David PUJADAS ! Ton coming out lui a coupé la chique !

Le Président- Surtout quand je t’ai fait entrer pour te présenter officiellement ! Mais c’est peut-être

gonflé ! J’ai hésité, mais cela a l’avantage de couper court à toutes les rumeurs ! Et puis, je te remercie encore d’avoir toi-même répondu à quelques questions ! Les Français ont pu voir que tu n’es pas une blonde !

LE MARI DU PRESIDENT

33

Romuald (étonné d’abord)- Une blonde ? (puis il comprend, rigole et ajoute toujours un peu provoquant)- Toi au moins tu sais que je suis une vraie blonde !

Un huissier frappe à la porte, l’ouvre sur invitation du Président et annonce :

L’Huissier- Monsieur le 1er Ministre demande à être reçu.

Le Président (ironique)- Nous l’attendions ! Faites-le entrer !

L’huissier sort et un instant après la porte s’ouvre sur Jean-Claude DUVIVIER.

Jean-Claude (furieux)- Fais sortir ce jeune homme, s’il te plaît !

Le Président- Tu vas me parler de lui ! Alors pourquoi le faire sortir ! Cela t’évitera, puisque tu es bien

élevé, de prononcer des paroles que tu pourrais regretter !

Jean-Claude (qui se contient)- Merci pour le PFD ! Tu nous fais rater les élections ! Présidentielle et législative du coup !

Le PARTI FRANÇAIS DÉMOCRATE sera dans l’opposition pour 20 ans ! Tout ça pour le cul d’un minet ! J’entends les leaders de l’opposition, la presse ! Le PFD devient le PDF ! (il insiste sur PD)

Le Président (très calme)- Je ne relèverai pas ton avant avant dernière phrase que je mets au compte de ta fureur  !

La France a eu des présidents de tout genre, des présidents hétéros et fidèles, des présidents hétéros et infidèles… Beaucoup de dames de petite vertu (comme on dit hypocritement) sont entrées à l’Élysée par la porte dérobée… Peut-être aussi la France a-t-elle eu des présidents gays et refoulés comme moi jusqu’à ce jour. Je l’ai dit ce soir à la nation, je maintiens ma candidature au renouvellement de mon mandat. Les Français décideront s’ils veulent ou non d’un président gay ! En tout cas, ils verront, puisque circonstance oblige, un candidat honnête et fier de son amour !

Le Président (violent et ferme)- Maintenant laisse-nous ! Si tu le juges nécessaire, je m’expliquerai devant le comité

directeur du Parti !

Jean-Claude- Bien ! Je verrai ça avec le 1er secrétaire du mouvement ! Mais si c’est pour nous refaire

le coup de ta déclaration faisant allusion aux droits de l’homme… Je trouve ça ridicule !

LE MARI DU PRESIDENT

34

Romuald- Aux Français d’en juger ! Ils ont plus de cœur et de jugeote que vous ne pensez !

(Comprenant qu’il aurait dû se taire)- Oh ! Pardon !

Jean-Claude- Effectivement, vous n’avez pas le droit à la parole, Monsieur !

Romuald (spontané)- Certes, mais moi, au moins, je ne trahis pas mes amis !

Le 1er Ministre le regarde un peu stupéfait par son audace et va rétorquer. Mais le Président le coupe :

Le Président- Suffit ! Jean-Claude, à demain ! Bonsoir !

Jean-Claude- Attends encore un instant ! As-tu pensé aux relations de la France avec notamment les

États-Unis, l’Angleterre ? Que va penser le Président Trump ? La Reine Élisabeth ?

Le Président- Trump, il tire sur tout ce qui bouge. Il n’a d’ailleurs rien à dire !…

Romuald (un peu moqueur)- Quant à la reine, il paraît qu’elle a failli devoir adhérer à l’association des Parents Gays,

comme maman, de chouettes gens !

Le 1er Ministre sort en claquant la porte.

Romuald- Excuse-moi Maxou ! Je devrais me taire ! Je ne sais pas fermer ma gueule ! Il va me

détester !

Le Président- La spontanéité, c’est ton charme ! Mais pour ce qui est de te détester, c’était sûrement

déjà fait depuis longtemps ! La jalousie !

Romuald (étonné)- Jaloux de moi ? Un Premier Ministre !

Le Président- Oui ! De ta jeunesse ! Et tout ce qui va avec ! De ta liaison avec moi !

Romuald (qui rigole)- Il veut peut-être coucher avec toi ! En tout cas, il ne sait pas ce qu’il perd !

Le rideau tombe.

LE MARI DU PRESIDENT

35

SCÈNE 6

Le rideau s’ouvre sur l’appartement de Romuald. Une petite table est dressée. Romuald en tenue décontractée s’affaire dans le coin cuisine à préparer un dîner. Il allume les bougies sur la table. L’ambiance est romantique.

On sonne à l’interphone.

Romuald (se contente de dire) :- Je t’ouvre.

Il va entrebâiller la porte d’entrée.

Le Président entre. Il marque un temps d’arrêt devant la porte, se retourne et dit :

Le Président- Charles, merci, vous pouvez disposer ! Laissez la protection en place, mais rentrez chez

vous ! Je vous appelle demain matin avant de sortir d’ici !

Romuald revient dans l’entrée à sa rencontre. Romuald ouvre la porte d’un placard ce qui nous empêche de voir leur étreinte…

Le Président- Romu ! On est si bien chez toi ! Rien que nous deux ! Tu as fait la cuisine ?

Romuald- J’ai triché ! C’est maman qui a tout préparé ! Note que je me débrouille pas mal en

cuisine, mais franchement je n’aurais pas eu le temps ! J’ai eu trop de boulot aujourd’hui ! Tiens ! Mais à propos de boulot, hier soir, je t’ai préparé une petite chanson à ma façon ! Tu veux l’entendre ?

Le Président- Bien sûr ! Mais tu chantes ? Ce sont les Anges de la Téléréalité que tu as faits ou Star Ac ?

Ah non ! Mais non, je rigole ! C’est The Voice et tu es arrivé 3ème !

Romuald- Assieds-toi ! Je mets la musique en karaoké !

Romuald attrape un micro, règle sa chaîne hi-fi alors que le Président s’installe confortablement sur le canapé.

Romuald interprète à sa façon en mimant un accent anglo-saxon une chanson bien connue. Mais il a changé quelque peu les paroles devenues très fantaisistes :

LE MARI DU PRESIDENT

36

RomualdMon studio a la forme d’un nid douillet

Le faisceau de lune passe par-dessus le toitLes reporters à ma porte comme les paparazzis qui veulent me prendre

Je veux aller travailler !Je veux dîner avec Maxou !

Je ne veux pas oublier !Et puis, j’aime le Président

J’ai enfin comme le goût de l’amour ! 1

Le Président admire son amant et savoure le moment.

On sonne à nouveau à l’interphone…

Romuald (qui répond)- Oui ! Bonsoir ! J’ouvre ! (et s’adressant au Président) Ta sœur !

Le Président- Elle ne va pas nous lâcher ! Ça va devenir pire qu’à l’Élysée ici ! Je suis désolé mon

Romu ! Tu n’avais qu’à l’envoyer balader !

Romuald- C’est toi qu’elle veut voir ! C’est urgent paraît-il !

Romuald ouvre la porte à Nicole. Elle lui tend la main et Romuald très nature, l’embrasse sur les deux joues ! Nicole a un petit mouvement de recul !

Romuald- Oh ! Excusez-moi Nicole ! J’ai l’habitude comme beaucoup de personnes maintenant

d’embrasser les dames ! Mes copains aussi d’ailleurs ! C’est plus sympa ! Plus chaleureux non ? Mais si cela ne vous convient pas, je m’abstiendrai !

Nicole ne lui répond pas et se plante devant son frère. Elle lui tend, lui jette presque, une pile d’hebdomadaires…

Nicole (plus aimable… à Romuald)- Excusez-moi du dérangement ! Mais c’est plus facile de trouver le Président de la

République dans un studio du 12ème qu’à l’Élysée !(Agressive avec son frère)

- Le meilleur ! (elle montre à son frère, puis à Romuald, la première page d’un hebdo à scandale). Puis elle cite "Romuald ou la nouvelle Monica !" "Est-il plus doué au lit ?" "Aide-t-il son Maxou à prendre des décisions en passant pour le détendre sous le bureau ?".

Le Président (rigolard)- Je croyais que tu lisais "Le Monde", "Le Figaro" et pour te distraire "la Vie" !

Nicole (qui feuillette rageusement l’un des périodiques)- Et là ! À St Jean ! Ils ont réussi à te photographier dans la piscine avec ton amant !

Le Président1 Sur la base de la chanson de PINK MARTINI, Paroles et musique: Forbes, Lauderdale

LE MARI DU PRESIDENT

37

- Et alors ! Si ça les amuse ! Je n’y vois pas d’inconvénient ! Ils ont dû avoir du mal ! Le photographe a dû prendre ce cliché depuis le tertre, il devait avoir un sacré matériel  ! Et puis arrête d’appeler Romuald "ton amant" ! Certes, il l’est et j’en suis heureux et fier ! Mais il a un nom !

Nicole (agressive et ignorant la dernière remarque)- Et rien ne te choque sur cette photo !

Le Président (qui fait mine de ne pas voir)- Si… Elle est un peu floue !

Nicole- Pas suffisamment à mon goût pour cacher ce qui n’est pas montrable chez ton…

Romuald !

Romuald (qui s’approche étonné)- Ils m’ont eu à poil ? On distingue mon cul ? On voit ma queue ?

Nicole (outrée)- Monsieur ! Un peu de correction !

Le Président (qui ignore sa sœur)- On voit juste tes jolies petites fesses ! C’est plus que montrable ! Rien de scandaleux !

Nicole (pincée)- Je vous précise, Romuald, que sur cette photo vous êtes nu en compagnie du Président

de la République, vêtu, lui, heureusement, d’un maillot de bains !

Romuald (qui rit franchement)- Eh bien ! Ma pauvre Nicole, je suppose que vous n’avez pas navigué sur Internet

pendant la durée les Anges de la Téléréalité ! On a vu de moi, à mon insu, bien plus que dans les Anges de la Téléréalité à la télé ! Tous les internautes ont pu voir que je suis une vraie blonde ! Ils ont quand même caché mon sexe sur la photo de PARIS MATCH. Mais je ne dirai rien de plus car je ne veux pas vous choquer !

Nicole (crispée)- Riez ! Riez ! Vous ruinez la carrière de mon frère ! Et le pire ! Dans Entrevue ! Regarde

ça Max ! À Brégançon ! Tu… embrasses Romuald sur la bouche ! Il y a la série de photos… floues ! Prises de très loin, d’un bateau sans doute ! Certes ! Mais on voit bien que c’est toi qui en prends l’initiative ! Un Président de la République qui…

Romuald- Me roule une pelle ! Et ils n’ont pas pu tout voir Nicole ! Ils nous harcèlent ! Nous n’y

pouvons pas grand-chose !

Nicole- Si ! Vous tenir Monsieur ! Bien que vous ne soyez peut-être le moins à blâmer !

LE MARI DU PRESIDENT

38

Le Président- Bon, ça suffit Nicole ! On n’empêchera jamais les paparazzis de faire leur boulot ! Ils ont

de quoi s’exciter ! Je te rappelle tout de même que tu as divorcé de Jacques, il y a plus de dix ans ! Que tu ne t’es pas remariée ! Que tu n’as pas d’amant connu ! Et qu’un journaliste de Press People a fait un article sur toi en te faisant passer pour lesbienne parce que tu avais passé tes vacances aux Séchelles avec ta copine Josiane !

Nicole- Certes, mais moi je ne suis ni Président de la République ni lesbienne ! Enfin ! Je vous

aurais prévenus tous deux !

Le Président- On ne va pas non plus arrêter de vivre ! Et puis, le plus important, c’est l’attitude très

correcte de la classe politique. Mes adversaires ne m’ont pas attaqué là-dessus ! Je leur en serai toujours reconnaissant !

Nicole (pincée)- Très bien ! Je vous laisse !

(elle se ravise)- Ah ! Non ! Et les guignols de la Une !

Le Président- Je croyais que tu ne regardais que Arte !

Nicole- J’ai mes sources ! Toi ! Max ! En Castafiore ! Et Romuald… en panthère rose avec un

pantalon… Je ne sais pas comment les jeunes appellent ça ! Des pantalons larges qui ne tiennent pas à la taille ! Enfin ! On voit leur début de fesses ! La Panthère rose, se nomme Romua et elle se retourne constamment pour montrer son… postérieur ! Et quand la panthère n’est pas debout, elle est sous un bureau qui ressemble au tien Max ! C’est honteux !

Romuald (qui rigole)- Et les pubs ! Un camembert Présidoux… Les préservatifs avec la marque "Maxi

Président" !

Le Président (souriant)- Oui ! Et ma photo dans un hebdo satirique ! Dans le haut, je suis habillé en grand

chancelier de la Légion d’honneur et dans le bas, une minijupe, sur mes jambes poilues !

Romuald- Nos compatriotes étaient moroses, paraît-il ! Maintenant la France s’amuse au moins !

Nicole- Continuez de rire ! Ils n’iront même pas voter !

Nicole après un profond soupir et un bref salut quitte rapidement l’appartement… en claquant la porte…

LE MARI DU PRESIDENT

39

Le Président- Enfin tranquille ! Bien ! Maintenant on ne répond plus à personne ! Ok ?

Romuald- Entendu Maxou ! Une petite coupe de champagne ?

On frappe à la porte et on entend une voix :

Charles- C’est Charles ! Je regrette de vous déranger, Romuald ! Il faut que je parle au Président !

Romuald fait entrer Charles.

Charles- Désolé Président ! Le 1er Ministre est en bas ! Il veut absolument vous voir ! Je lui ai dit

que j’avais l’ordre de ne pas vous déranger ! Il a insisté et… il a… je dois dire été un peu grossier !

Le Président (qui soupire et s’adressant à Romuald)- Tu es chez toi ! À toi de répondre et de dire si tu souhaites recevoir Jean-Claude !

Romuald- Vaut peut-être mieux s’en débarrasser ! Après, je ne réponds plus, ni à l’interphone, ni

au téléphone ! Ça te va ? Mais je vais vous laisser !

Le Président (à Charles)- Faites-le monter ! Mais rappelez-lui qu’il est chez Romuald LAFONT !

(Puis à Romuald)- Avec Jean-Claude, on s’est déjà entretenu toute la matinée ! Mais tu vas rester ! Tu ne

vas tout de même pas t’enfermer dans ta salle de bains !

Le Président (à nouveau à Charles)- Charles ! Vous resterez aussi ! Même s’il vous demande de sortir ! Cela lui fera

comprendre qu’il importune !

Charles sort pour aller chercher le 1er Ministre et réapparaît quelques instants après avec ce dernier.

Jean-Claude (s’adressant d’abord à Romuald après toutefois lui avoir serré la main)- Laissez-nous s’il vous plaît ! Vous aussi Charles !

Le Président- Je te rappelle la plus élémentaire correction. Tu es ici chez Monsieur Romuald LAFONT

qui veut bien te recevoir. Il restera ici ainsi que Charles. Je suppose d’ailleurs que toi aussi tu viens me parler de Romuald ? T’es choqué sans doute d’avoir vu son beau petit cul dans Paris People ? (il insiste sur "beau petit cul")

Jean-Claude- Non ! Son cul, je m’en fous moi ! Non ! Je viens juste d’apprendre que ce Monsieur a

déposé en ton nom et au sien une demande de mariage à la Mairie du 8ième !

LE MARI DU PRESIDENT

40

Le Président- Et alors ! En quoi cela te concerne ? Tu veux recevoir un carton d’invitation ?

Jean-Claude- Ce mariage ! Ça pouvait peut-être attendre que tu nous aies fait perdre les élections !

Romuald (qui répond vivement avant que le Président n’ait réagi)- J’ai déposé les papiers en accord avec Max ! C’est une décision personnelle que nous

avons prise en commun et qui ne regarde que nous !

Jean-Claude- Ne vous énervez pas jeune homme ! D’ailleurs, je ne m’adresse pas à vous ! Mais les

relations du Président de la République intéressent toute la nation et en plus, si elles sont contre nature…

Romuald (qui parle sous le regard et l’expression amusée du Président)- Ok ! Vous avez fait voter la loi sur l’homophobie, également vous avez, avec vos amis

politiques, voté pour l’adoption du mariage pour tous et maintenant vous vous reniez ! Ce n’est pas bien clean tout ça ! Ce mariage, d’abord et justement, c’est pour la morale ! Les gays, donc pour vous, on peut baiser ! Ok ! Mais pas s’aimer devant tous alors ! Vous êtes ignoble !

Le Président- Jean-Claude, Romuald a tout résumé ! Je n’ai rien à ajouter ! Nous conclurons ce

mariage avant les élections.

Jean-Claude- Mais tu as vu le résultat des derniers sondages ? Pas terrible ! Alors avec le mariage en

plus !

Le Président- Tu n’auras pas ma place mon vieux ! Et ce malgré tes tentatives déjouées. Ne m’oblige

pas à t’en dire plus là-dessus ! Je suis toujours candidat ! D’ailleurs, c’est un excellent exercice pour la démocratie !

- Et, puis rappelle-toi ! C’est bien toi qui as souhaité que je m’affiche avec Romuald ! Autant que je fasse les choses bien !

Jean-Claude- Je me demande bien comment tu as pu savoir ça ! D’ailleurs, je revendique cette action !

J’ai voulu t’éloigner du pouvoir pour le bien de la France ! Son image dans le monde !

Romuald (comédien pompeux, souriant, moqueur)- J’en suis fort marri Monsieur ! Mais c’est raté !(Max souriant rigole)- Oui ! Oui ! Et puis sortez les droits de l’homme tant qu’à faire ! Ça peut servir !

(Et il entonne la Marseillaise…)- Allons Z’enfants de la patrie iii e…

LE MARI DU PRESIDENT

41

Jean-Claude (furieux)- Et en plus insolant ! Je vous rappelle que je suis le 1er Ministre !

Romuald- Pour la lâcheté, la trahison et l’hypocrisie, vous valez bien Talleyrand ! Mais les droits de

l’homme, laissez-les aux hommes d’honneur et de cœur ! Comme dit maman, après l’Évangile, c’est le plus beau texte du monde ! Mais au pays des droits de l’homme, on pourrait faire encore beaucoup de progrès en la matière !

Jean-Claude (furieux, au Président)- Jamais personne ne m’a parlé ainsi ! Tu fréquentes un… voyou ! Et je me retiens pour

être correct, ton Romuald, ce n’est pas ainsi qu’on l’appelle dans certains milieux !

Le Président (d’abord moqueur)- Pour une fois que quelqu’un te parle franchement ! Ça fait mal ! Non ?

(Puis il s’énerve, le ton monte)- Mais vas-y ! Ne te gêne pas ! Dis-nous comment l’on nomme Romuald…

(Il se calme, il est très tendre et regarde exclusivement Romuald)- Moi, je ne te dirai pas comment je le nomme ! Je te dirai juste une chose, je suis désolé

que notre relation soit exposée au grand jour. Mais c’est ainsi ! Je vais le dire devant toi "Je l’aime !". Pour le mariage, il n’y aura pas de cérémonie publique, soit rassuré. Romuald et moi inviterons famille et amis à la mairie puis à St Jean et ce, dans la plus stricte intimité… Maintenant, laisse-nous !

Le 1er Ministre quitte brusquement le studio en claquant la porte. Charles le suit et fait un geste discret à l’encontre de Romuald. Il lève le pouce en signe de félicitation.

Le Président (rigolard)- Décidément, cela va devenir une habitude ici pour les visiteurs indésirables de claquer la

porte !

Romuald- J’ai peut-être un peu exagéré !

Le Président- Tu as bien fait ! Il a besoin de leçon ! Et puis, je crois que ce mariage, sur le plan

politique, ce sera sans doute bénéfique ! La seule chose, comme nous en sommes convenus, c’est qu’il ne faudra pas étaler cette cérémonie devant la presse !

- Bon ! Je te sers une coupe ?

Romuald s’approche du Président et le rideau tombe…

LE MARI DU PRESIDENT

42

SCÈNE 7

Le rideau s’ouvre sur le salon de l’Élysée et sont présents, Romuald, Max, Juliette, Aline et Charles.

Juliette- Romuald, raconte à Aline tes déboires à la mairie quand tu as pris rendez-vous pour fixer

la date du mariage !

Aline- Oh oui ! Raconte mon petit chéri !

Romuald- Je me suis occupé des formalités et de la constitution du dossier. Et puis, je me suis

rendu au Service de l’État Civil. L’employé a cru à une plaisanterie quand il a vu le nom, la qualité et l’adresse pour le moins prestigieuse de mon futur mari !

Romuald imite l’employé de mairie:- "C’est une plaisanterie Monsieur !" m’a dit l’employé et je lui ai rétorqué "Mais pas du

tout, il s’agit bien d’un mariage qui va être conclu entre Monsieur Maxime DESPREZ, Président de la République et moi, Romuald LAFONT" "Vous voulez vous moquer des institutions ! Je vais appeler la police !"

Aline- Il a refusé ?

Romuald- Oui ! J’ai dû me fâcher car tout le dossier était parfaitement constitué.

Romuald imite le greffier :- "Vous vous croyez à la télé ! Une caméra cachée ? Je vais déposer une plainte pour

outrage à magistrat ! " m’a dit l’employé. Mais non ! Voyez ! Il y a là une photocopie de la carte d’identité de Maxime DESPREZ certifiée conforme par M. le Secrétaire Général de l’Élysée ! Voyez ! Il y a le sceau ! Et même une copie intégrale de son acte de naissance ! "Mais l’employé n’a rien voulu entendre, il a ouvert une porte et a crié "Appelez la police !" J’avais demandé à Charles de m’accompagner car je prévoyais effectivement un problème. Il a justifié de son identité. L’employé s’est calmé et m’a donné le rendez-vous d’un air méfiant. Je lui ai dit sur un ton aimable qu’il devait observer la plus grande discrétion, la date devant rester secrète. Cela a eu pour effet de le vexer. J’ai cru alors que l’employé allait nous faire une crise d’apoplexie ! "Vous n’allez pas m’apprendre mon métier jeune homme ! Vous m’insultez ! Je n’ai jamais vu ça en vingt ans de carrière !"

LE MARI DU PRESIDENT

43

Charles- Il faut dire que Romuald est parti d’un fou rire ! Le rire a été communicatif et j’ai moi aussi

eu du mal à me contenir !

Romuald- J’ai immédiatement téléphoné à Max. Max a appelé le Ministre de l’Intérieur. L’employé a

dû comprendre que ce n’était pas une plaisanterie malgré notre hilarité et il est sorti précipitamment de la pièce.

Charles- Romuald m’a suggéré d’attendre quelques instants. J’ai vu débouler dans les quelques

minutes une autre personne, je suppose le maire du 8 ième qui s’est confondu en excuses et qui a assuré à Romuald de la discrétion de tout le personnel. J’ai ri "intérieurement", car le maire est devenu un véritable pantin. Il s’est adressé à Romuald comme à un ministre. Il lui a même parlé à la troisième personne.

Romuald (imitant le maire, pompeux)- Monsieur Romuald LAFONT voudra bien accepter mes excuses ! L’attitude de mon

employé a été inqualifiable ! Votre dossier est en outre parfaitement constitué. Je vous saurais gré de transmettre mes excuses personnelles à Monsieur le Président de la République. Je l’accueillerai personnellement lors du mariage et tiendrai la cérémonie !

Aline- Quoi qu’il en soit, nous avons eu une belle cérémonie ! Merci encore de m’avoir invitée

mes amis ! J’ai tenu ma langue, mais l’arrivée imprévue du Ministre de l’Intérieur a dû mettre la puce à l’oreille aux journalistes qui surveillaient l’entourage de Romu !

Le Président- Nous avons eu une brillante porte-parole en la personne d’Aline !

Aline- Mon annonce de conclusion du mariage aux journalistes sur les marches de la Mairie du

8ème arrondissement n’a pas calmé ces derniers qui ont réclamé et scandé grâce à la présence de passants et de badauds une déclaration de Max. Mais nos jeunes mariés sont venus à mon secours en faisant une apparition au balcon du bureau du Maire.

Juliette- Je n’ai pas pu entendre et encore moins voir !

Charles- Chère Juliette ! Vous verrez tout cela ce soir sur toutes les chaînes de télé ! Je peux

vous dire que le Président s’est contenté d’un beau sourire quand Romu a carrément crié, à défaut de micro, "Merci à tous, nous sommes mariés et très heureux !"

L’huissier entre dans le salon et annonce :- Monsieur le 1er Ministre et Madame Nicole DESPREZ !

LE MARI DU PRESIDENT

44

Aline- Ne manquaient plus que le nain agité et la coincée ! Pardon Max pour la coincée !

Max se contente de répondre par un sourire d’évidence… Le 1er Ministre fait son entrée en laissant poliment entrer Nicole.

Jean-Claude (furieux, au Président et à Romuald)- Pour la discrétion, bravo la réussite ! France Info vient de lancer une édition spéciale et

les chaînes de TV ont interrompu leurs émissions habituelles pour un journal spécial !(À Romuald)

- Jeune homme vous auriez dû vous taire et laisser parler le Président de la République !

Nicole (rageuse et s’adressant à son frère)- Ah ! Elle va être belle la première page de PARIS MATCH ! Il a fallu que tu embrasses

Romuald sur la bouche ! Et en plus faire faire l’annonce par une comédienne !

Aline- Une chanteuse !

Nicole (hargneuse)- Chanteuse ! Comédienne ! On ne sait pas très bien qu’elle est votre spécialité !

Aline (provocante)- Évidemment, je ne passe pas sur Arte et comme je crois, vous ne regardez que cette

chaîne ! En tout cas, moi, j’attends avec hâte la photo du premier bébé !

Jean-Claude et Nicole (en même temps)- Quoi !

Jean-Claude (ébahi)- Mais comment ?

Romuald (qui entre dans le jeu)- Nous avons décidé d’adopter un enfant ! Max est d’accord sur un petit beur, un petit

Kader…

Aline (comédienne)- Oui ! Et je serai la marraine civile d’un petit Kadou d’amour !

Max, Juliette et Charles se sont légèrement reculés. Ils ont compris la plaisanterie d’Aline relayée par Romuald et affichent une mine réjouie…

Jean-Claude (qui en perd la boule)- Ah ! Non ! Pas un bougnoule ! Mais ça ne va pas ! Mais ça ne va pas !

Le 1er Ministre en trépigne de rage…

Nicole (sèche)- Un arabe ! Soyez correct Jean-Claude ! Un français d’origine maghrébine !

LE MARI DU PRESIDENT

45

Romuald (tendre et moqueur)- Un petit beur ! Il n’y a rien de plus beau ! Et puis, Max est brun après tout ! Nicole et vous

Monsieur le Premier Ministre, vous savez bien que moi je suis blonde !

- Maxou, faudra faire installer une nurserie à l’Élysée et je prendrai un congé parental pour élever cet enfant ! Sauf erreur de ma part ce sera le premier enfant adopté d’un Président de la République éduqué à l’Élysée !

Le Président (digne et ferme)- Merci mon Romu ! Merci charmante et chère Aline ! Bon, finie la plaisanterie ! J’aurais

été heureux et fier d’être père ! Pour l’instant une adoption, ce n’est pas à l’ordre du jour. Mais comme Romu, je ne fais partie de ceux qui ne jurent pas par "Fontaine, jamais je ne boirai de ton eau !"

- Ceci dit, pour toi Jean-Claude, pour toi Nicole, je vous interdis à compter de ce jour d’intervenir dans la vie privée de Romu et moi. Pour toi, Jean-Claude, Romuald est mon mari. Tu lui dois ainsi que tous, le respect à ce titre, conformément au protocole de la République. Donc, plus de "jeune homme" ou autre familiarité. Tu devras l’appeler en accord avec ce dernier, "Monsieur", "Romuald" ou encore "Monsieur Romuald LAFONT". Maintenant, laissez-nous !

LE MARI DU PRESIDENT

46

SCÈNE 8

Le rideau s’ouvre sur la terrasse d’une très belle maison en province ou en grande banlieue. Nous sommes dans la propriété privée du Président de la République. C’est la fin du printemps, il fait beau et chaud. Romuald et le Président sont "vautrés" sur une balancelle. On devine une piscine à quelques mètres. Romuald, très sexy, est en maillot de bain très "étroit". Le Président en short a visiblement "revu" sa garde-robe…

Sur la terrasse, un bureau et sur ce bureau un poste de télévision et un PC.

Le personnel d’un traiteur prépare un buffet.

Romuald- Si tu n’es pas élu ce soir, on fait la fête tout de même ?

Le Président- Oui ! Ne serait-ce que pour remercier mes proches ! Toi en particulier, ton ami Bill, Aline

bien sûr, ta maman aussi et particulièrement ! Juliette a bien prévu d’arriver vers 18 h ?

Romuald- Tout à fait ! Elle est ravie ! Surtout d’ailleurs de retrouver Charles ! Je crois que je vais

avoir un beau-père !

Le Président- Ce serait bien pour ta maman ! Elle est un peu seule non ?

Romuald- Oui, j’avais 5 ans quand mon père est parti, comme ça, sans prévenir. Je n’ai jamais eu

de ses nouvelles. Quand j’ai fait mon coming out auprès de maman, elle m’a dit la vérité. Mon père, il est gay comme nous ! Il est parti avec un mec, un collègue de boulot paraît-il ! Je comprends qu’il ait pu quitter ma mère, mais pas qu’il m’ait abandonné. Maman m’a consacré sa vie. Depuis longtemps, je voudrais qu’elle pense à elle !

(Puis changeant brutalement de sujet)- Tu attends qui ce soir ?

Le Président- Aline, Nicole, Jean-Claude (incontournable), mon nouveau conseiller en communication,

le directeur de la SOFRES et quelques vrais amis que tu connais.

Romuald- Tu sauras quand ? Pas avant 20 heures ?

Le Président- Non, avant, vers 18 heures, une première simulation qui devra rester secrète puisque le

vote ne sera pas terminé. Mes invités devront rester ici jusqu’à 20 heures, fermer leurs smartphones et ne pas y toucher avant l’heure fatidique ! Charles surveillera discrètement ce beau monde !

LE MARI DU PRESIDENT

47

Romuald- Et à 20 heures qu’est ce qui se passera ?

Le Président- En tout état de cause, je ferai une déclaration à la presse !

Romuald (sincère)- J’espère que tu seras réélu !

Le Président- On verra bien ! Tu sais, les Anglais ont bien jeté Churchill après la guerre alors qu’il les a

conduits à la victoire !

Romuald- J’ai lu dans la presse que tu avais marqué des points en faisant descendre le taux de

chômage de façon spectaculaire, grâce à la privatisation de l’ANPE ! Et tu as assaini sans heurt le déficit des finances de l’État ! Les retraités ont pu enfin voir le montant de leurs pensions augmenté et garanti par une indexation.

Le Président- Entre autres, oui ! Et la concurrence des agences pour l’emploi intéressées au résultat !

Tu t’intéresses à l’économie maintenant ?

Romuald (malicieux)- Je préfère m’intéresser aux chiffons ! Mais j’écoute France Info !

Le Président- À propos de chiffons, on va devoir s’habiller un peu !

Romuald- Tu as raison ! Je monte prendre une douche et m’habiller !

(Puis il ajoute en plaisantant)- Le temps de faire un masque et de me maquiller… J’en ai bien pour une heure…

Le Président sourit et regarde Romuald rentrer dans la maison.

Une femme d’un certain âge habillée en "servante" annonce un visiteur.

La servante (un peu gauche)- Monsieur Bill… Excusez-moi, Monsieur le Président, je n’ai pas bien compris son nom de

famille, mais les policiers l’ont laissé entrer, c’est bien un invité…

Le Président- Oui, Bill est attendu ! Ne vous inquiétez pas Madame MARTIN ! Le service d’ordre fait

son travail en amont !

LE MARI DU PRESIDENT

48

Le Président (apercevant Bill, habillé d’un magnifique costume blanc cassé)- Mon cher Bill ! C’est vraiment aimable à toi d’être venu ! Comment ça va depuis notre

petite célébration ?

Bill (impressionné)- Très bien Président ! Quelle belle cérémonie ce mariage ! Notre Romu était aux anges !

Le Président- Comme je te l’ai déjà demandé, appelle-moi Max ! Et aussi, tutoie-moi ! Nous sommes

amis non ?

Bill- Certainement ! Mais… Max… Je n’ai pas l’habitude de fréquenter des Présidents de la

République !

Le Président- Des mecs comme les autres ! Tu ne peux pas savoir comme je suis anxieux dans

l’attente des résultats du scrutin !

Bill- Que préfères-tu ? Gagner ces élections ou perdre Romu ?

Le Président- Garder Romu et gagner les élections ! Est-ce incompatible ?

Bill- Bien répondu Max ! Tu as des couilles ! Romu est là ?

Le Président- Romu s’habille ! Il va se pomponner et changer plusieurs fois de vêtements avant de

redescendre !

La servante (qui approche, d’abord calme, puis un peu affolée)- Monsieur le Président, Madame LAFONT ! Votre amie la vedette, Madame Aline FORD,

celle-ci, au moins je sais son nom, c’est ma chanteuse préférée ! Et… d’autres personnes !

Juliette fait son entrée au bras de Charles, suivie de Nicole et du directeur de la Sofres. Aline suit de quelques instants, un boa rouge sur ses épaules nues et manque de s’étaler en loupant une marche…

Le Président embrasse Juliette et Aline sous l’œil désapprobateur de sa sœur ! Il embrasse sa sœur et serre la main aux deux hommes.

Bill embrasse Juliette chaleureusement et salue avec admiration Aline flattée.

Le Président- Installez-vous ! Madame MARTIN va vous servir des boissons. Je vous laisse, je vais

m’habiller.

Bill- En Président Max ! Bien que tu sois très sexy en short !

LE MARI DU PRESIDENT

49

Nicole- Vous parlez au Président de la République, jeune homme ! Restez correct !

Bill (qui relève la provocation)- Je pense être correct, Madame ! Sinon, j’aurais dit "Tu me fais triquer Max ! Ou mieux,

ma bite va passer au beau fixe !".(Il se tourne vers le Président)

- Pardon Max ! Je n’aurais pas dû dire ça, sachant l’amour que tu portes à Romuald et celui qu’il a pour toi !

Nicole- Et vous tutoyez le Président de la République ! On aura tout entendu ! Le Président

Mitterrand et le Général de Gaulle doivent se retourner dans leur tombe !

Le Président- Merci Bill ! Nicole, c’est toi qui les déranges dans leur tombe ! Tu nous lâches un peu s’il

te plaît !

Nicole se renfrogne, le Président rentre dans la maison. Juliette qui se veut aimable et conciliante s’approche de Nicole.

Juliette- Chère Madame, allez-vous mieux ?

Nicole (agressive)- Je n’ai pas été malade !

Juliette (d’abord pompeuse)- Le jour du mariage, Max nous a dit que vous ne puissiez venir, clouée au lit par une

migraine !

Aline (moqueuse)- Ah ! Oui ! Une migraine diplomatique ! C’est bien pour une sœur de Président !

Nicole (à Aline et Juliette)- Appelez ça comme vous voulez !

Juliette (perfide)- Vous n’aimez pas votre frère ?

Nicole- Si ! Énormément ! Mais je déplore sa conduite ! Il oublie qu’il est Président de la

République Française !

LE MARI DU PRESIDENT

50

Bill (qui s’adresse à Nicole)- C’est un homme d’abord ! Il a le droit de vivre sa vie ! Dans quelques décennies, voire

siècles au mieux, tout le monde l’aura oublié, comme vous, comme moi, comme notre cher Romu !

Juliette- Et des indispensables, il y en a plein les cimetières !

Le rideau tombe pour un précipité.

On voit Romuald s’approcher, il est pimpant !

Romuald- Qui est indispensable ?

Bill- En tout cas, toi ma loute ! Pour le bonheur de ton Président !

Le Président revient à son tour, habillé d’un costume clair très mode…

Le Directeur de la SOFRES- Monsieur le Président, il va être l’heure ! Puis-je utiliser votre PC ? Sinon, j’ai le mien

dans ma voiture.

Le Président- Allez-y, il est connecté sur Internet.

Dans un silence lourd, le directeur de la SOFRES, pianote…

Le Directeur de la SOFRES- Monsieur le Président, je vous prie de venir et de valider…

Le Président attrape la main de Romuald et l’entraîne devant l’ordinateur.

Le Président- Appuie, s’il te plaît ! Mais sache que je n’ai pas besoin de ça pour être heureux avec toi !

Romuald- Moi non plus !

Romuald hésite un peu…

Juliette (impatiente)- Vas-y mon bébé !

Aline (bouillonnante)- Mon chéri, Mon Romu, ne nous fait pas languir !

Bill- Tu ne veux pas devenir la 1ère Dame de France ?

LE MARI DU PRESIDENT

51

Romuald (souriant et coquin)- Pourquoi "Dame" ?

Nicole (agacée)- Arrêtez de jacasser inutilement !

Romuald appuie sur le bouton. Le Président et Romuald regardent fixement l’écran et leurs visages s’éclairent.

Romuald cache son visage dans le cou du Président qui l’étreint fortement.

Le Directeur de la SOFRES regarde à son tour l’écran et dit :

Le Directeur de la SOFRES- Monsieur le Président, je me permets de vous féliciter ! 54,8 % des suffrages exprimés

en votre faveur et ce, dès le premier tour ! Même après comptage définitif des voix, votre victoire est assurée ! Et avec une participation record de 75 % !

C’est la joie dans l’assemblée… embrassades… félicitations… Tant pour le Président que pour Romuald. Charles et Bill embrassent le Président !

Le Personnel du traiteur ouvre les bouteilles de champagne…

Quelques instants après, Madame MARTIN arrive tout affolée…

Madame MARTIN (très solennelle)- Monsieur le 1er Ministre !

(En aparté pour Bill)- Celui-là, je ne sais pas son nom, mais je l’ai reconnu ! Monsieur Romuald l’appelle "le

nain agité", mais je crois que c’est un surnom !

Jean-Claude entre accompagné d’un jeune homme.

Jean-Claude (qui s’adresse au Président)- Félicitations Max ! J’ai eu l’info à l’instant par qui tu sais… ! Je n’aurais pas cru un si bon

résultat ! Je suis venu avec mon fils Damien, mais tu le connais je crois !

Damien serre la main du Président. Bill s’approche et s’écrit :

Bill- Damien ! Si je m’attendais ! Mais… tu es le fils de… ?

Damien (embrassant Bill très affectueusement)- Salut ma poule ! Mais tu le sais bien !

Bill- Je savais que tu étais le fils d’un ministre… C’est tout ! Ce n’est pas ça qui m’intéressait

chez toi quand je t’ai… croisé… au Dépôt ! Tu connais Romu ?

Damien (souriant serrant la main de Romu)- Pas bibliquement ! Dommage d’ailleurs ! Mais de réputation des Anges de la Téléréalité,

The Voice jusqu’au… Président ! Bon, je suppose que toi, tu connais Romuald ?

LE MARI DU PRESIDENT

52

Romuald- Salut Damien ! Bill est mon ex, depuis quelques mois… Mais maintenant, c’est mon

meilleur ami !

(Damien finit par embrasser Romuald chaleureusement)

Jean-Claude et le Président s’approchent…

Jean-Claude (tout pâle, s’adressant à son fils)- Si je comprends bien, tu connais ce Monsieur ?

Damien (rigolard)- Assez bien ! Très bien même !

(S’adressant à Bill)- Je peux dire ?… Jusqu’où ?

Bill- Je n’ai rien à cacher ! Tu peux tout dire !

Damien (direct et déterminé)- Oui Papa ! Je connais très bien ce garçon ! Si tu veux tout savoir, on a baisé ensemble

et de nombreuses fois ! Je suis gay ! Ça y est ! Je l’ai dit ! J’ai fait mon coming out ! Ah ! Ben ! Ça va mieux !

Jean-Claude (passant du vert au rouge)- Toi ! Mon fils ! PD… ! Non ! Ce n’est pas possible ! On n’a jamais fait ça dans la famille !

Tu n’as pas le droit de me faire ça ! C’est le déshonneur !

Juliette (furieuse)- Vous n’avez pas honte ! Parler comme ça à votre fils ! Vous l’aimez oui ou non ?

Aline- Après le nain agité, le nain honteux !

Jean-Claude- Oui ! C’est mon fils, je l’aime et j’en suis fier même ! Mais je ne peux pas supporter qu’il

soit… gay !

LE MARI DU PRESIDENT

53

Juliette- Tiens ! C’est plus PD ! C’est le terme "gay" maintenant que vous employez ! Et vous

préférez votre image à votre fils ? Vous oubliez que c’est vous qui l’avez fait comme ça ! Les gènes, il parait ! Y en a eu d’autres avant lui dans votre famille !

Aline (moqueuse)- Voyons Jean-Claude, vous connaissez le rapport Kinsey ?

Jean-Claude (abasourdi)- Oui ! Enfin vaguement ! Mais ça vient faire quoi là-dedans !

Aline- D’après le rapport Kinsey, qui traite de la sexualité, il y a au moins cinq à dix pour cent

d’individus qui sont homosexuels, quarante à quarante-cinq bi et seulement cinquante pour cent hétéros ! Et d’après ce savant, les bi ignorent bien souvent qu’ils le sont ! Donc, faîtes le compte dans votre famille, il y a bien cent personnes…

Puis elle se tourne vers la scène, scrute les spectateurs et prend son temps pour les observer. Romu la rejoint, elle lui prend la main en l’embrassant et s’adresse à la salle :

Aline (provocatrice)- Bon ! Et là… Nous avons bien… 1800 spectateurs ! Et dix pour cent ! Ça fait combien ?

Et quarante pour cent ?

Jean-Claude (qui se reprend, regarde Juliette et Aline, éberlué et s’adresse à son fils)- Tu aurais pu me mettre au courant plus tôt et autrement ! Tu me mets dans une drôle de

situation !

Damien- Papa ! Ça fait des mois que je veux te parler ! Je t’ai dit plusieurs fois que je voulais te

parler de ma vie ! De vive voix d’abord, puis par lettre, puis par e-mail… Tu ne daignes pas me consacrer une minute !

Bill (rigolard, pour détendre l’atmosphère)- Tu pourrais dire que je suis un bon coup !

Romuald (rayonnant)- C’est vrai ça !

Juliette (espiègle)- Bienvenue au Club des parents d’enfants gays, Monsieur le 1er Ministre !

Aline- Moi mon ex-mari est gay ! Je l’aime toujours bien ! Ah ! J’ai aussi un neveu gay ! Un

beau et gentil gosse ! Tiens, Damien ou Bill, je vous le présente !

Nicole (exaspérée)- Cela a déjà été dit, mais… "Pauvre France !"

Juliette (directe)- Vous, la mal baisée, ça suffit !

LE MARI DU PRESIDENT

54

Tous, y compris le Président (et en même temps)- … PAS BAISÉE DU TOUT !!! …

Jean-Claude (abattu)- Ça va se savoir ! Je vais être la risée du Parti et de l’opposition, des Français même ! Je

vais être obligé de me retirer de la vie politique !

Le Président- Je ne vois pas pourquoi ! Comme père, tu es peut-être nul ou simplement négligeant,

mais comme 1er Ministre, tu te défends bien ! Bien qu’un peu intrigant ! Bon ! Mais maintenant que je le sais ! Tu ne veux pas continuer avec ton Président gay ? Allez ! Cinq ans et je te laisse la place ! Et tu vas te battre Jean-Claude !

Jean-Claude, visiblement soulagé, embrasse son fils (tendrement), il lui dit quelques mots que l’on n’entend pas… Puis il embrasse le Président, Romuald (à qui il dit aussi quelques mots)… Et toute l’assemblée…

Le Président prend la main de Romuald et s’avance face au public.

Le Président- On va attendre sagement 20 heures ! Je ferai une déclaration à la télé. Après, je ne

m’occupe plus que de toi mon Romu !

Romuald- Et demain, on part quelques jours en voyage de noces, pas vrai mon Président chéri ?

Romuald, sans quitter la main de Max, entonne la chanson éternelle quelque peu modifiée et adaptée par ses soins :

LE MARI DU PRESIDENT

55

Parle-moi d’amour,Redis-moi des choses tendres.

Ton bien beau discours,Mon cœur n’est pas las de l’entendre. 2

Le Président (qui chante à son tour avec Romuald)

Parle-moi d’amour,Redis-moi des choses tendres.

RIDEAU

2 Paroles et musiques de Jean LENOIR

LE MARI DU PRESIDENT