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Qu'est-ce que la Science ?
D'après le dictionnaire, la Science est la connaissance relative à des phénomènes
obéissant à des lois et vérifiés par des méthodes expérimentales.
Cette définition définit les bases de ce qu'est la Science. Nous allons ici regarder de plus
près ces trois composantes de la science : l'observation, l'expérimentation et les lois.
L'observation
Tout travail scientifique commence par des observations. L'observation la plus célèbre
de l'Histoire de la Science est sans conteste celle de la chute d'une pomme faite par
Newton, qui lui donna l'idée de sa théorie de la gravitation universelle. Même si cette
histoire n'est peut-être qu'une légende, elle illustre admirablement la démarche
scientifique : on observe un phénomène, parfois surprenant, mais bien souvent banal,
et on se pose la question : pourquoi ?
L'observation se doit d'être la plus objective et la plus précise possible. Elle ne doit pas
se laisser influencer par une possible explication, qui risquerait de la biaiser.
L'observation doit de plus en plus souvent s'aider d'instruments. Ces instruments sont
parfois indispensables pour effectuer cette observation : l'observation de l'espace
nécessite des télescopes de plus en plus puissants, alors que l'observation de l'infiniment
petit utilise des microscopes.
Même en cas de phénomènes directement observables, des instruments permettent de
rendre cette observation plus précise ; ainsi, une caméra permettra de mieux comprendre
des phénomènes rapides, tel par exemple le galop d'un cheval.
L'expérimentation
L'expérimentation est une catégorie particulière d'observation, dans laquelle d'une part
le phénomène à observer est généralement provoqué, et d'autre part les conditions
d'observations ont été optimisées en fonction de ce que l'on veut observer, notamment
pour éliminer les phénomènes parasites.
L'expérimentation permet de s'affranchir des aléas de l'observation, certains
phénomènes naturels pouvant être difficilement prévisibles, empêchant alors la mise en
place des dispositifs d'observations au bon moment et au bon endroit.
Les lois
Lorsque les phénomènes observés font apparaître des relations invariables entre
certaines grandeurs mesurées, on peut commencer à soupçonner l'existence d'une loi
liant ces grandeurs entre elles.
Un exemple simple est la relation entre la hauteur depuis laquelle un objet tombe et le
temps mis par cet objet pour tomber. Après avoir éliminé le mieux possible les effets
parasites des frottements de l'air, par exemple en utilisant des objets massifs, on trouve
que la hauteur est proportionnelle au carré de la durée de la chute, et que le coefficient
de proportionnalité est indépendant du type d'objet utilisé.
Cependant, une fois ces lois trouvées, il faut aller plus loin. Le but de la Science est de
trouver des lois les plus fondamentales possibles. En effet, les lois issues de
l'observation sont généralement la conséquence de phénomènes plus fondamentaux
qu'il s'agit d'identifier.
La loi fondamentale la plus célèbre est encore une fois due à Newton, il s'agit de la
gravitation universelle. Avant cette loi, on connaissait certains phénomènes de manière
dispersée : la chute des corps sur Terre, la trajectoire elliptique des planètes autour du
Soleil, les marées. La gravitation universelle a permis d'attribuer une seule et même
cause à ces différents phénomènes.
Réfutabilité
On parle fréquemment de vérification expérimentale d'une loi. En fait, une loi ne peut
jamais être vérifiée, elle ne peut être qu'invalidée. Cette manière de raisonner peut
paraître surprenante ; elle est cependant tellement importante qu'elle permet de définir
le caractère scientifique d'une théorie.
Pourquoi ne peut-on jamais vérifier une loi ? La raison en est simple : un seul contre-
exemple suffit à invalider définitivement une loi, quels qu'aient été ses succès
antérieurs. Cette réfutabilité est la contrepartie de la rigueur scientifique. Prenons un
exemple :
De nombreuses observations ont amené à la loi suivante : "tous les cygnes sont blancs".
Lors de nombreux voyages, cette loi a reçu des confirmations éclatantes par la
découverte de nouveaux cygnes, tous blancs. Or, un jour naît un cygne noir : ce seul
contre-exemple suffit à invalider cette loi.
Que devient une loi, une fois réfutée ? Elle peut continuer à être utilisée comme
approximation, ou une nouvelle loi plus exacte peut la remplacer. L'exemple le plus
parlant est la réfutation de la gravitation universelle par une observation astronomique
non explicable. Une nouvelle théorie a remplacé la gravitation universelle, c'est la
relativité générale. Cependant, la gravitation universelle reste généralement utilisée, car
elle constitue une approximation suffisante dans la plupart des cas et aussi parce que la
relativité générale est beaucoup plus complexe à utiliser.
La réfutabilité définit même le caractère scientifique d'une théorie, selon le philosophe
Karl Popper : il doit être possible d'imaginer des contre-exemples qui, s'ils étaient
observés, invalideraient la théorie. La théorie de la gravitation universelle était une
théorie scientifique : une infime variation dans l'orbite d'une planète non explicable par
cette théorie a suffi à la réfuter.
A l'inverse, la théorie de la création de l'univers par un dieu tout puissant ne peut pas
être réfutée : quels que soient les contre-exemples produits, on peut toujours rétorquer
que c'est Dieu qui a volontairement créé lui-même ces contre-exemples pour mettre la
sagesse des hommes à l'épreuve. Ce n'est donc pas une théorie scientifique.
Les mathématiques sont-elles une Science ?
Cette question est plus délicate qu'il n'y paraît. En effet, la partie observation et
expérimentation est totalement absente des mathématiques, ces dernières étant
totalement abstraites. D'un autre côté, il est difficile d'imaginer ce que pourrait être la
Science sans les mathématiques ; en effet, une bonne partie des lois scientifiques utilise
des formulations mathématiques.
On peut donc considérer les mathématiques plutôt comme un outil extrêmement
puissant et sophistiqué que comme une Science à part entière. D'ailleurs, les
mathématiques ne satisfont pas aux critères de réfutabilité ; il est évident qu'étant
abstraites, aucune observation ou expérience ne peut les atteindre. Les théorèmes
mathématiques ne sont considérés comme valides qu'une fois rigoureusement
démontrés, et rien alors ne peut plus les remettre en question.
Le point le plus délicat se situe à l'interface entre la Science et les mathématiques ;
l'efficacité de l'outil est totalement dépendante de l'adéquation de la modélisation des
phénomènes. L'extrême souplesse des mathématiques permet cependant de forger de
nouveaux outils mathématiques si ceux existants ne sont pas adaptés à la modélisation
des phénomènes ou au traitement des données issues de l'observation. Newton, encore
lui, inventa le calcul infinitésimal pour pouvoir calculer les mouvements dus à
l'attraction universelle.
Pourquoi et comment ?
Contrairement à ce qui a été dit plus haut, dans un souci de clarté, la Science ne
s'interroge pas sur le pourquoi, mais sur le comment. On a souvent tendance à employer
un mot pour l'autre, et cette inversion rend parfois un discours plus compréhensible.
Lorsqu'il observe un phénomène, le scientifique ne se demande pas pourquoi ce
phénomène a lieu, mais comment il s'explique. Et pourtant, il semble bien plus naturel
de demander pourquoi le soleil brille, plutôt que de demander comment il brille.
Le pourquoi interroge sur les causes, mais aussi sur les raisons d'un phénomène, et
contient implicitement une notion de déterminisme (pourquoi) à laquelle la Science n'a
pas vocation de répondre. Toute réponse scientifique à un pourquoi risque alors d'être
insatisfaisante et générer un nouveau pourquoi.
Pourquoi la Terre tourne-t-elle autour du Soleil ? À cause de la gravitation universelle.
Mais pourquoi les corps s'attirent-ils ? Au final, la série des pourquoi finit toujours par
buter sur une des limites de la Science, tout l'édifice scientifique reposant sur des
observations non encore expliquées. Tout juste peut-on espérer faire reculer petit à petit
la frontière de l'inexpliqué, l'explication ultime n'existant a priori pas.
Où s'arrête la Science ?
La Science se trouve partout où il y a observation, expérimentation et élaboration de
lois à partir de ces observations. Bien qu'on associe souvent la Science à des équations,
comme dans le cas de la physique, la Science peut également être plus descriptive,
comme par exemple dans le cas de la paléontologie, fondée sur l'étude des fossiles.
Bien qu'étant rigoureuse méthodologiquement, la Science n'interdit pas des hypothèses
hasardeuses, qui peuvent s'avérer fécondes, mais aussi le plus souvent conduisent à une
réfutation, ou bien même s'avèrent irréfutables et sortent alors du cadre scientifique (ce
qui ne signifie pas qu’elle soit inexactes pour autant).
Existe-t-il une science officielle ?
La notion de science officielle est issue d'une part de scientifiques frustrés par la
réfutation de leur découverte et qui refusent le verdict, et d'autre part de la mouvance
paranormale popularisée par la série culte "X-files". Dans les deux cas, le discours tenu
prétend que les scientifiques "officiels" refusent de prendre en compte la "vérité", que
ce soit la mémoire de l'eau côté scientifique frustré ou les phénomènes paranormaux.
Tout n'est bien sûr pas angélique dans le monde de la Science, surtout lorsque des
considérations qui n'ont rien de scientifiques en perturbent le respect des principes de
base. On a vu une science officielle nazie rejeter la science juive, ou une science
officielle soviétique rejeter la science bourgeoise. Les résultats ont été à la hauteur :
dans le premier cas, les scientifiques juifs (dont Einstein) ont émigré, dans le second
cas, l'agriculture soviétique a beaucoup souffert (affaire Lyssenko).
Mais qu'il soit bien clair que la plupart des scientifiques ne demanderaient pas mieux
que de constater un véritable phénomène paranormal, et de pouvoir l'étudier.
Malheureusement, la plupart de ces phénomènes disparaissent spontanément à
l'approche des scientifiques et de leurs méthodes, particulièrement lorsque ceux-ci se
font assister d'un prestidigitateur, mieux à même qu'un scientifique de détecter toute
supercherie.
La Science et les autres domaines
La Science, de par son aspect rigoureux, apparaît rébarbative à beaucoup de personnes,
qui lui opposent d'autres conceptions de la culture ou de la vie. En fait, ces oppositions
ne sont souvent qu'apparentes, comme nous allons essayer de le voir maintenant.
La Science et l'imagination
L'aspect rigoureux de la Science semble interdire à tout jamais la moindre fantaisie au
scientifique. Le rêve et l'imagination paraissent définitivement bannis du quotidien du
scientifique, créature austère et rigoureuse pour qui les émotions ne sont finalement que
quelques courants électriques dans le cerveau.
Une telle description relève bien heureusement de la caricature, les scientifiques étant
le plus souvent des gens comme les autres, à des kilomètres des descriptions de savants
fous de certains récits d'épouvante. Bien sûr, les scientifiques sont souvent passionnés
par leur travail, au même titre qu'un artiste ou un écrivain par exemple.
Mais un scientifique est aussi un créateur, dépensant des trésors d'imagination pour faire
avancer ses théories ou en proposer de nouvelles. Sans imagination, Einstein aurait-il
pu concevoir la théorie de la Relativité ?
Et avant tout, un scientifique est également un homme comme un autre, capable de
laisser son esprit critique au vestiaire pour rêver. Le célèbre auteur de science-fiction
Isaac Asimov était également un brillant scientifique, ce qui ne l'a pas empêché d'écrire
des récits basés sur des hypothèses au mieux non vérifiées, et souvent carrément
inexactes (comment concevoir un empire galactique sans la possibilité de dépasser la
vitesse de la lumière, possibilité refusée catégoriquement par la théorie de la relativité).
Le tout est de ne pas faire interférer les rêves et la méthodologie scientifique ; il faut,
même si c'est parfois difficile, savoir dire "ce n'était qu'un rêve".
La Science et l'Art
L'Art est par essence même totalement éloigné de la Science. Cependant, cette dernière
n'est jamais loin. L'image d'Epinal de l'artiste est bien souvent aussi caricaturale que
celle du scientifique. On a bien trop souvent tendance à oublier qu'un artiste est d'abord
un technicien, qui doit maîtriser les techniques de son art avant de pouvoir les dépasser.
Il n'y a pas encore si longtemps, les artistes peintres fabriquaient eux-mêmes leurs
pigments. Un sculpteur doit maîtriser les matériaux qu'il utilise, un musicien savoir
jouer de son instrument.
Bien sûr, il s'agit là de technique plus que de Science. Cependant, ne peut-on pas
considérer la connaissance de l'anatomie humaine, nécessaire dès que l'on désire
peindre ou sculpter un être humain, comme une connaissance scientifique ? L'architecte
qui désire que son monument ne s'effondre pas ne doit-il pas utiliser des connaissances
scientifiques ? Et toutes les techniques employées, classiques ou d'avant-garde, ne sont-
elles pas généralement issues de la Science ?
L'Art fait également appel à la Science dès qu'il s'agit de restaurer une œuvre, ou
simplement de l'analyser ou de la sauvegarder. La restauration de toiles abîmées ou
rendues noires par l'opacification du vernis ou le décapage de monuments abîmés par
la pollution font appel à des techniques très pointues, rendues possibles uniquement par
les avancées scientifiques.
La Science et la Religion
Un scientifique peut-il être croyant ? Nombreux sont ceux qui ont répondu oui à cette
question. Une telle attitude n'est a priori pas gênante, lorsque la Religion reste dans le
domaine de l'irréfutable, c'est-à-dire hors du domaine scientifique.
Galilée nous a montré que cela n'a pas toujours été le cas. Il faut bien constater
l'ambivalence de la Religion vis-à-vis de la Science. Beaucoup de scientifiques étaient
très liés à l'Église (Galilée était l'ami du Pape), et étaient amenés à contester certains
dogmes religieux de par leurs observations, ce qui leur valait généralement de sérieux
ennuis.
Aujourd'hui, l'Église catholique ne cherche plus à contester ouvertement la Science,
même s'il reste certains pays (et non des moindres, par exemple les États-Unis) où des
mouvements intégristes cherchent à faire enseigner le créationnisme (qui professe que
le monde a été créé en 7 jours comme expliqué dans la Bible) comme une alternative
au Darwinisme.
Cependant, la situation des religions n'est pas toujours très confortable face à la Science.
Que faire lorsque des découvertes scientifiques invalident des chapitres entiers de la
Bible (notamment bien entendu la Genèse) ?
Actuellement, la Religion reste en deçà de la frontière de la Science, se réservant plutôt
l'éthique et la morale. Cependant, ces frontières reculent de plus en plus vite ; jusqu'où
pourront-elles reculer sans mettre en péril l'Église et les autres religions ?