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Sédation consciente au MEOPA:
Un réel regain d’intérêt
CONSCIOUS SEDATION WITH THE PREMIXED 50% NITROUS
OXIDE
AND OXYGEN: REEL RENEWED INTEREST
Auteurs :
R. Fawzi : Spécialiste en Odontologie
Pédiatrique, Faculté de Médecine Dentaire de
Rabat
Y. DELBOIS : MCU-PH Odontologie
Pédiatrique, Université Victor Segalen, UFR
d’Odontologie, Bordeaux, France
J. NANCY : MCU-PH Odontologie
Pédiatrique, Université Victor Segalen, UFR
d’Odontologie, Bordeaux, France
S. PARFAIT, Assistante en Odontologie
Pédiatrique, Université Victor Segalen, UFR
d’Odontologie, Bordeaux, France
R. AMEZIANE : Professeur de
l’enseignement supérieur, Faculté de
Médecine Dentaire de Rabat.
RÉSUMÉ
La sédation consciente par inhalation du mélange équimolaire d’oxygène et du protoxyde
d’azote (MEOPA) constitue en Odontologie Pédiatrique une excellente solution pour réduire
l’anxiété et améliorer la coopération, permettant ainsi la réalisation des soins dentaires dans
des meilleures conditions. Sa facilité d’administration, sa rapidité d’induction et
d’élimination et le peu d’effets indésirables qu’il engendre font du mélange équimolaire
d’oxygène et du protoxyde d’azote un agent sédatif de choix. La sédation consciente se
révèle, de surcroît, être une alternative efficace à l’anesthésie générale chez les enfants peu
coopérants, anxieux ou mentalement déficients devant bénéficier de soins dentaires.
Depuis la prise en compte prioritaire de la douleur provoquée par les soins, le MEOPA
connaît actuellement un réel regain d’intérêt. Sa possibilité de prescription et/ou
d’administration par des praticiens non anesthésistes contribue à cet engouement.
Le MEOPA est un auxiliaire précieux de notre exercice dès lors qu’il est administré selon
un protocole bien établi et qu’on respecte les contre-indications d’usage.
Mots clés : sédation consciente, mélange équimolaire oxygène–protoxyde d’azote, analgésie,
odontologie pédiatrique.
En Odontologie Pédiatrique, le praticien est souvent confronté à la prise
en charge d’enfants difficiles, non coopérants aux soins, pour lesquels
le recours à une technique de sédation s’avère indispensable. L’agent
sédatif idéal serait un médicament efficace associant rapidité
d’induction et d’élimination, facilement administrable, ayant peu ou pas
d’effets indésirables et n’induisant pas de dépendance. Le MEOPA est
actuellement le produit qui répond le mieux à ces critères : il s’agit d’un
Mélange Equimolaire d’Oxygène et de Protoxyde d’Azote à
concentration fixe (50/50). L'emploi d’un pourcentage supérieur de
protoxyde d’azote est réservé aux seuls anesthésistes et n’intéresse donc
pas l’Odontologie pédiatrique dans les conditions de soins
ambulatoires.
Après une utilisation assez marginale, le MEOPA connaît actuellement
un réel regain d’intérêt depuis la prise en compte prioritaire de la
douleur provoquée par les soins. Sa possibilité de prescription et/ou
d’administration par des praticiens non anesthésistes contribue à cet
engouement. Mais l’extension rapide de la technique en milieu
pédiatrique a déclenché des réactions de méfiance ou de réticence
concernant la sécurité d’une méthode utilisée par des praticiens non
anesthésistes.
Une utilisation appropriée du MEOPA impose de connaître, outre ses
principales propriétés, ses conditions d’administration et ses limites.
HISTORIQUE (7,12)
Le protoxyde d’azote (N2O) est l’agent le plus ancien employé en
anesthésie. Ce gaz a été découvert en 1772 par Joseph Priesley et son
activité antalgique et euphorisante fut remarquée par son élève Davy en
1800 qui le surnommait « gaz hilarant » en raison des accès de rire qu’il
déclenche parfois. Aux Etats-Unis, sa pratique devient un spectacle, les
séances publiques d’administration de protoxyde d’azote se multiplient
afin de montrer ses effets euphorisants. C’est après avoir assisté à un de
ces spectacles de foire, qu’un dentiste de Hardford (USA), Horace
Wells tenta de l’utiliser en dentisterie en 1844. Après seulement une
vingtaine de cas réussis en cabinet, Wells organise une démonstration
devant les autorités de la Harvard Medical School qui se solde par un
échec. Cet échec est expliqué par l’empressement et l’impréparation de
Wells à faire une démonstration publique : l’extraction a été réalisée sur
un sujet a priori peu réceptif, dans une ambiance défavorable. Cette
expérience négative nuit bien évidemment au développement de l’usage
du protoxyde d’azote, auquel on préféra l’éther et le chloroforme.
Son utilisation moderne en dehors du bloc opératoire date du début des
années 1960. En effet, en 1961, Tunstall prépara un mélange à
concentration fixe 50/50 de protoxyde d’azote et d’oxygène dans un
même cylindre prêt à l’emploi dont le nom commercial anglais est
Entonox® (Mélange Equimolaire d’Oxygène et de Protoxyde d’Azote
ou MEOPA). Il fut initialement utilisé pour les douleurs du travail de
l’accouchement. Secondairement cette méthode antalgique va se
développer au sein des services hospitaliers, dans les ambulances et
surtout en chirurgie stomatologique (5). Depuis, de nombreux travaux
ont été publiés sur l’utilisation du MEOPA dans différentes situations
cliniques.
DONNEES PHARMACOLOGIQUES
Le protoxyde d’azote est un gaz incolore, insipide, non irritant et de
saveur douceâtre très discrètement sucrée (7). Il présente à son
avantage, une pharmacocinétique particulièrement rapide (5). Très peu
soluble dans le sang et les tissus, le N2O est très vite capté et franchit
rapidement la barrière alvéolocapillaire pour diffuser dans l’ensemble
des secteurs de l’organisme. Le protoxyde d’azote ne se combine avec
aucun tissu organique. Il est transporté dans le plasma uniquement sous
forme dissoute. Sa faible liposolubilité explique sa faible puissance
anesthésique.
En raison d’une pénétration rapide dans le cerveau, le début de l’action
survient après quelques inspirations. L'effet analgésique est d'intensité
variable selon l'état psychique des patients. Le N2O agirait au niveau
des récepteurs morphiniques, soit directement, soit en libérant des
médiateurs opiacés et stimule la sécrétion des endomorphines. Son effet
dure tant que l'inhalation se poursuit. Le pic de l’effet analgésique est
obtenu après trois à cinq minutes d’inhalation (9).
Non métabolisé ou transformé par l’organisme, le N2O est éliminé
inchangé, avec une cessation rapide des effets en l’espace de deux à
trois minutes y compris après une administration prolongée (7).
EFFETS CLINIQUES (6, 12,13)
Les effets cliniques sont remarquables et spécifiques :
Une sédation consciente est obtenue au bout de 2 à 3 minutes
d’inhalation. L'état de conscience est modifié mais le sujet reste
vigile, capable de réagir avec l'environnement et de dialoguer
avec l’entourage. Le patient conserve le contrôle de ses réflexes
pharyngo-laryngés et de ses mouvements respiratoires.
Une analgésie de surface rend la plupart des effractions
cutanées ou muqueuses peu ou pas douloureuses. L’enfant sent
qu’on le touche et peut avoir des réactions de retrait. Ce type
d’analgésie n’élève que « relativement » le seuil de perception
de la douleur et n’a absolument pas vocation à l’abolir
totalement. On parle alors « d’analgésie relative ». L’anesthésie
locale lors des soins générant la douleur est, dans la plupart des
cas, un complément essentiel.
Une anxiolyse associée à une euphorie sont observées après 2
à 3 minutes d'inhalation. Le visage est calme, détendu, détaché
avec parfois des accès de rire. Cette hilarité peut d'ailleurs être
facilement stimulée et provoquée par des histoires drôles.
Une amnésie d'intensité variable, intéressante cliniquement, est
souvent rapportée.
Une augmentation de la suggestibilité et de l’influençabilité
est induite par le MEOPA permettant d’orienter le tour de la
pensée.
En revanche, des effets psychodysleptiques déplaisants sont également
possibles :
Des modifications de la perception de l'environnement se
manifestant par une impression de distanciation de la réalité
avec épisodes de pseudo-rêve : " j'ai rêvé que j'étais à l'hôpital
avec des infirmières et des médecins autour de moi... ". La perte
de la notion de temps est parfois décrite par les enfants.
Des modifications des perceptions sensorielles sont parfois
rapportées. La fonction corticale est rapidement diminuée, et
toutes les formes de sensation sont affectées.
o Auditives : hypoacousie objective et hyperacousie
subjective avec impression de sons éloignés,
o Visuelles: vision double, floue,
o Tactiles : paresthésies (picotements, fourmillements)
au niveau péribuccal et des extrémités,
o Odorat : effet anosmique partiel (diminution de
l’odorat).
EFFETS INDESIRABLES
Il existe de rares effets adverses (moins de 10%). Relativement bénins,
ils sont quasi réversibles après l’arrêt de l’inhalation. En aucun cas, ils
ne mettent en jeu le pronostic vital (1,10,11).
Nausées – Vomissements en raison d’un dérèglement de la
mécanique de la déglutition mais qui sont sans incidence
clinique car les réflexes laryngés protecteurs sont respectés.
Cependant, ces effets peuvent être gênants jusqu’à interrompre
les soins.
Malaises – Dysphories peuvent s'observer chez des patients
souffrant d’une claustrophobie ou chez certains enfants très
anxieux, qui paniquent quand ils se sentent "partir". Ils peuvent
être surpris voire "désorientés" par les perceptions sensorielles
nouvelles procurées par l'inhalation du MEOPA. Ces patients
ont des difficultés à lâcher prise.
Excitation- agitation dues soit à un effet antalgique insuffisant,
soit à un effet d’excitation paradoxale comme décrit avec tous
les produits sédatifs et anxiolytiques chez l'enfant
(barbituriques, benzodiazépines...)
Sédation parfois profonde peut s'observer chez certains
patients. Il s’agit souvent d’une susceptibilité individuelle de la
même manière qu’il le serait avec des sédatifs oraux. C’est
pourquoi, il est indispensable de garder le contact verbal avec le
patient.
Des céphalées bénignes sont parfois rapportées.
INDICATIONS
Cette méthode concerne, d’une manière générale, les patients dont la
coopération à l’état vigile est insuffisante pour permettre le diagnostic,
la prévention ou le traitement des pathologies bucco-dentaires, mais qui
acceptent d’être aidés pour être soignés : un minimum de coopération
est requis au départ et pendant toute la durée des soins. La sédation
consciente sous MEOPA est particulièrement utilisée pour des soins de
courte durée ne dépassant pas 30 minutes chez (6) :
- les enfants anxieux et pusillanimes,
- les enfants handicapés qui ont souvent un passé médical
chargé responsables d’une peur et d’une attitude d’opposition
aux soins en général.
- les enfants présentant une pathologie mal contrôlée telle que
l’asthme. La relaxation diminue le risque de crise pendant la
séance.
Le MEOPA est surtout indiqué chez l’enfant à partir de l’âge de quatre
ans. Chez le sujet plus jeune, le taux de succès est moindre :
l’autoadministration est difficile à obtenir et la contention physique
induit une agitation qui ne pourra pas être contrôlée par le MEOPA (5).
CONTRES INDICATIONS
Les contre-indications sont peu nombreuses et sont surtout liées à la
grande capacité de diffusion du protoxyde d'azote dans les espaces
organiques clos, ce qui majore les volumes et les pressions (8,12).
Certaines sont liées à l’acte lui même.
CONTRE INDICATIONS ABSOLUES
Hypertension intracrânienne: Le N2O augmente le volume et
le débit sanguin cérébral et donc la pression intracrânienne.
Présence d’une cavité aérienne close dans l’organisme
(pneumothorax non drainé, embolie gazeuse, bulle
d’emphysème, distension gazeuse abdominale, obstruction
sinusienne…).
Traumatisme crânien non évalué
Traumatisme maxillo-facial intéressant la région d’application
du masque
État hémodynamique précaire.
Insuffisance cardiaque : Le N2O diminue la contractilité
myocardique (effet inotrope négatif).
Altération de l’état de conscience non évaluée (empêche la
coopération du patient)
CONTRE-INDICATIONS RELATIVES :
D’ordre général :
Obstacle anatomique à la respiration nasale (grosses
amygdales, végétations adénoïdes volumineuses, déviation du
septum nasal…).
Rhume, bronchite ou toux où il est préférable de reporter la
séance jusqu’à la guérison du patient.
Personnes sous antidépresseurs, barbituriques, psychotropes :
Le protoxyde d’azote potentialisant les effets des
benzodiazépines et des morphiniques, le risque de dépression
respiratoire, de somnolence, de vomissements et de chute
tensionnelle, est exceptionnel mais réel (2).
Contre-indications liées à l’acte lui-même (13,14) :
durée d’intervention trop longue
interventions itératives répétées à moins d’une semaine
d’intervalle
refus catégorique de l’enfant du masque nasal.
ADMINISTRATION DU MEOPA
La pratique de la sédation consciente par inhalation du MEOPA se fait
en mode ambulatoire par un personnel médical ou paramédical
spécifiquement formé et dont les connaissances sont périodiquement
réévaluées (14).
Comme tout médicament, l’administration du MEOPA nécessite une
prescription médicale nominative écrite dans le dossier du patient (7).
Après l’évaluation du comportement de l’enfant et de sa coopération,
ou suite à une tentative de soin n’ayant pas aboutie, la technique peut
être proposée à l’enfant et à ses parents. Les effets du MEOPA et la
réalisation du geste doivent être expliqués. Cette explication se voudra
rassurante et mettra en exergue les effets analgésiques que
l’administration du gaz procure à l’enfant, mais elle portera aussi sur
les effets indésirables et les limites de la technique. Il faut laisser le
temps aux enfants et aux parents de poser des questions, faire
reformuler ce qui a été présenté. L’obtention du consentement des
parents est obligatoire. Un délai d’une semaine par exemple entre la
présentation de la technique et du matériel et la sédation effective est le
meilleur garant du recueil du consentement éclairé.
Equipement nécessaire (5, 7,13,14):
Deux systèmes sont utilisés actuellement. Le premier système distribue
initialement de l’oxygène pur puis peu à peu, permet l’incorporation
progressive de protoxyde d’azote sans dépasser les 50% (3). Le
deuxième système que nous utilisons dispense, d’emblée, un mélange
équimolaire oxygène-protoxyde d’azote (MEOPA) dont le pourcentage
est de 50/50 pour les deux gaz, évitant ainsi toute erreur de
manipulation et d’hypoxie accidentelle (6).
Il comporte:
o une bouteille contenant le mélange à concentration fixe
50/50 avec un chariot de transport adapté pour déplacer les
bouteilles auprès des patients et éviter les risques de chute
(fig1).
o un manodétendeur qui permet la sortie du gaz
o un débitmètre permettant de régler le débit du gaz de 0 à 15
l l’adaptant ainsi à chaque enfant
o un ballon réservoir standard 2 1
o un kit comprenant : une tubulure reliée au manomètre et au
ballon
o une valve d’anesthésie type Ruben, valve antiretour évitant
la ré-inhalation du gaz expiré
o un jeu de masques faciaux nasaux ou naso-buccaux de tailles
différentes. (tailles 1, 2 et 3 sont les plus fréquemment
utilisées)
o un filtre antibactérien à usage unique qui s’intercale entre la
valve et le masque facial
o des accessoires ludiques : masques parfumés ; sifflets
(facultatif)
o un flacon à fabriquer des bulles de savon.
Ce type de matériel requiert une gestion rigoureuse, le démontage et le
remontage de la valve anti-retour posent souvent des problèmes
importants (fig2).
Précautions d'emploi :
Le personnel doit vérifier l’intégralité du matériel s’assurant, entre
autre, du contenu de la bouteille, de la température du stockage (la
bouteille ne doit pas être stockée à une température inférieure à - 5°C
car il y a possibilité de séparation des deux gaz exposant le sujet à un
risque d’hypoxie (7)). Le matériel d'urgence, et notamment celui
nécessaire à une ventilation artificielle, doit être vérifié et à portée de
main.
L’administration doit se faire dans un local aéré ou facilement
ventilable pour limiter l’exposition du personnel soignant.
Protocole d’administration :
Première séance :
L’acte est rarement réalisé au cours de la première séance qui sera
consacrée à établir des liens de confiance entre l’enfant et le praticien.
L’enfant sera d’abord familiarisé avec l'environnement et le matériel en
lui présentant la technique sous une forme très simple. Une simulation
de la technique de sédation est réalisée en lui apprenant le mode de
ventilation buccal/nasal par application du masque (fig3).
Chez l’enfant très difficile, l’association de la méthode avec une
prémédication sédative médicamenteuse peut être indiquée. En effet,
les anxiolytiques tel que l’hydroxyzine (Atarax®
) à la dose de 1 mg/Kg,
augmente sensiblement le niveau de sédation et représente donc un bon
complément pour les enfants très difficiles (13).
Deuxième Séance :
La qualité du résultat final est la sommation de petits " détails " qu'il est
essentiel de respecter. Il faut réunir toutes les conditions avant de
commencer l'inhalation à savoir (7):
Veiller au calme de l'environnement dans lequel se déroule
l'inhalation. Une amplification des bruits, source de stress
chez les enfants, est très courante avec le MEOPA.
Mettre l'enfant en confiance : présence parentale est
souhaitée.
Prévenir des différentes sensations ressenties quelquefois
sous MEOPA (distorsion des sons, fourmillements, rêves,
euphorie...). Expliquer les changements sensoriels que
l'enfant va ressentir, « tu vas te sentir bizarre, tu vas avoir
envie de rire » ; il faudra lui expliquer que le gaz lui
permettra d'avoir moins peur et qu'il aura beaucoup moins
mal. L'utilisation des rituels ludiques apporte une aide
significative
Modalités d’administration du MEOPA (5,13).
La présence de deux personnes au minimum est nécessaire, une
réalisant le geste thérapeutique, l’autre s’occupe de l’administration du
gaz.
Il n’est pas nécessaire que l’enfant soit à jeun car le MEOPA ne
déprime pas les réflexes laryngés (6). Cependant étant donné la
possibilité de nausées ou vomissements intercurrents, il reste judicieux
d’obtenir un jeûn de 2 heures avant l’inhalation programmée.
L’inhalation est réalisée au moyen d’un masque facial, adapté à la
morphologie du patient. Il faut toujours privilégier l’auto-
administration (fig4), mais elle n’est pas toujours possible surtout chez
les enfants âgés de moins de quatre ans. Une des difficultés de ce
protocole consiste à faire accepter "spontanément" le masque par
l'enfant; sinon la contrainte physique induira une agitation qui ne pourra
pas être contrôlée par le MEOPA. L'obstacle sera d'autant plus grand
que l'enfant a déjà eu des expériences "malheureuses" avec le masque.
En cas de non-coopération de l'enfant, la contention doit être limitée au
maximum car elle est elle-même bien souvent génératrice d'agitation.
La contention souple consiste à ne jamais bloquer la tête de l'enfant tout
en lui appliquant le masque sur le visage et en gardant toujours le
contact verbal.
L’inhalation du MEOPA doit être continue pendant une durée
minimale de 3 minutes, masque parfaitement étanche sur le visage, Une
vérification constante de l'absence de fuite entre visage et masque doit
être effectuée. Recommencer pendant 3 mn si l'enfant enlève le
masque. Le débit du mélange gazeux est déterminé par la ventilation
spontanée du patient et doit être suffisant pour maintenir le ballon
gonflé sans tension et non collabé même à la fin de l’inspiration. S’il
est plat, le débit est insuffisant pour la capacité respiratoire du petit
patient, et doit donc être augmenté (fig5).
La surveillance continue est essentiellement clinique (contact verbal,
coloration cutanée, fréquence respiratoire).
L’inhalation est maintenue jusqu’à l’obtention d’une détente
objectivable de l’enfant. Elle est souvent accompagnée de
fourmillement des extrémités et d’une paresthésie péri-buccale.
Sitôt la relaxation acquise, l’anesthésie locale peut être réalisée puis les
soins entrepris. A 50% de protoxyde d’azote, le mélange gazeux a un
effet analgésique suffisant pour couvrir l’effet nociceptif des injections
anesthésiques. L’anesthésie locale reste indispensable car la sensation
de douleur peut amener à nouveau un comportement agité et
décourager l’enfant. Pour certains enfants, il faut poursuivre l'inhalation
durant toute la durée des soins (fig6), pour d’autres, l’anxiété est liée
seulement à certains actes (notamment l’anesthésie) et l’inhalation sera
fractionnée. Quel que soit le mode d’inhalation, le dialogue doit être
maintenu avec l’enfant.
Dès la fin du geste, il faut arrêter progressivement l'administration du
mélange gazeux. L'effet se dissipe rapidement après le retrait du
masque, l'enfant récupère son état initial en quelques minutes. Aucun
effet rémanent n’est à craindre, néanmoins le repos est conseillé cinq
minutes après l’arrêt du MEOPA. Avant de mettre l'enfant debout, le
faire asseoir, surveiller les premiers pas, évaluer la satisfaction de
l'enfant, l'inciter à exprimer ce qu'il a ressenti.
A la fin des soins, il faut procéder à la décontamination, le nettoyage et
la désinfection du matériel en contact avec les sécrétions et les voies
aériennes de l’enfant. Le filtre doit être jeté, le kit doit être décontaminé
et le masque peut être gardé pour une prochaine administration chez le
même patient.
CONCLUSION :
Les soins sous sédation consciente représente une alternative
intéressante à l’anesthésie générale : elle diminue la prise de risque
consentie par le praticien lors d’une anesthésie générale de confort,
souvent réclamée par les parents et permettent également de réduire les
coûts de santé.
Le MEOPA se révèle être un auxiliaire précieux de notre exercice à
condition de maîtriser convenablement son administration et de
respecter les contre-indications d’usage. Alors, cet outil profite non
seulement au praticien, en lui fournissant une occasion d’exercer son
talent et au patient, en lui permettant de recevoir des soins appropriés,
mais encore à la collectivité, en réduisant de façon notable la charge
financière induite par la prise en charge de cas semblables sous
anesthésie générale. Nous devons faire sa promotion sans angélisme
mais sans culpabilité ni résignation : c’est à ce prix que le MEOPA
pourra intégrer définitivement la panoplie thérapeutique du chirurgien-
dentiste, soucieux de l’exercice de son devoir et du bien-être de ses
patients.
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ICONOGRAPHIE
Figure 1 : Bouteille contenant le mélange
à concentration fixe 50/50 avec un chariot
de transport adapté pour déplacer les
bouteilles auprès des patients.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
Figure 2 : Montage du masque, filtre, valve
anti-retour et ballon.
Le tout sera relié à la bouteille.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
Figure 3 : Simulation de la technique à vide
au cours de la première séance
La présence des parents est toujours souhaitable.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
Figure 4 : L’inhalation est continue pendant
une durée de 3 minutes, masque
parfaitement étanche sur le visage.
Favoriser toujours l’auto-administration.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
Figure 5 : Le débit du mélange gazeux est
déterminé par le ballon qui doit être
gonflé sans tension et non collabé.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
Figure 6 : Réalisation des soins avec
poursuite de l’inhalation par voie nasale.
(Service Odontologie, hôpital saint André, Bordeaux)
SUMMARY
Conscious sedation with the premixed 50% nitrous oxide and oxygen (N²O/O²)
in Paediatric Dentistry constitutes an excellent solution to reduce the anxiety,
and to improve the cooperation thus allowing the realization of the dental care
in the best conditions. Its facility of administration, its rapidity of induction and
elimination and its safety for patient and operators make this gas a sedative
agent of choice. It appears, in addition, being an effective alternative to the
general anaesthesia at children not very cooperating, anxious or mentally
deficient, having to profit from dental care.
Since we first consider the pain provoked by the care, the N²O/O² now knows
such a revival. Its possibility of administration by experts not anaesthetists
contribute to this renewed interest.
The N²O/O² proves to be an invaluable auxiliary of our practice since it is
managed according to a protocol well defined respecting the contra-indications
of use.
Key words: conscious sedation premixed 50% nitrous oxide and oxygen,
analgesia, paediatric dentistry