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XJP CONFJERENCE DE CONSENSUS EN REANIMATION ET M~'DECINE D'URGENCE, 2 JUILLET 1993 SEDATION EN R~'ANIMA TION CONCEPT ET PRATIQUE rry du consensus : B. REGNIER, Fr. CLERGUE, M.F. DUMA Y, P. EVRARD, Fr. LECLERC, __ _VIALLEDANT, Fr. THALER, J.L. TROUILLET Introduction Des m6dicaments s~datifs sont communfiment administr6s dans les services de rfanimation. Plu- sieurs revues g6n~rales publifes ces derni~res ann6es, et une enqu6te menfe aupr~s des prescrip- teurs soulignent le besoin de mieux pr6ciser la place de cette pratique. Malgr6 une apparente variabilit6 des pratiques (selon un sondage effectu6 en 1993 ~ l'occasion de cette conffrence de consensus, 20 fi 97 p. 100 des patients recoivent une sfidation dans 130 services de r~animation m6dicale et/ou chirurgicale) dont l'analyse est difficile en raison de la diversit6 des pathologies prises en charge, il appara~t globalement que la s6dation est largement utilis6e. Certains ser- vices ont rapport6 son emploi chez 75 p. 100 des patients ou m~me chez plus de 90 p. 100 en r6ani- marion chirurgicale lourde pendant la semaine pos- top6ratoire. Pour ce type de patients, la fr6quence est fi peine moindre chez ceux qui ne sont pas venti- 16s (89 p. 100) que chez ceux qui le sont (96 p. 100). Des enqu~tes 6pidfmiologiques confirment ces don- nfes, en particulier en Grande-Bretagne et aux t~tats- Unis, o~ parmi 164 Unitfis de Soins Intensifs, la s6da- tion est prescrite chez plus de 70 p. 100 des patients darts 36 p. 100 des Unit6s et chez 20 ~ 70 p. 100 dans 48 p. 100 des Unit6s. L'origine de ces pratiques remonte ~ environ 40 ans, avec la curarisation du t6tanos et l'emploi de , cocktails lytiques, dans un but de protection neu- rov6g6tative. Par la suite, l'application 61argie de la ventilation arfificielle et la description de troubles psychiatriques associ6s fi la rfianimation, ont contri- bu6 ~ 61argir l'emploi de la s6dation. Au cours des annfes 70-80, le d6veloppement de m6dicaments Correspondance: Jean-Louis Pourriat, D6partement d'Anesth6sie-R~animation, H6pital Jean-Verdier, avenue du 14 juillet, 93143 Bondy Cedex. d'action courte et donc plus maniables, et celui des pompes ~ d6bit continu semblent avoir particip6 ~ sa g6n6ralisation. Enfin, et plus r~cemment, l'attention port6e au barotraumatisme de la ventilation artifi- cielle a amplifi6 cette pratique. L'ensemble de ces motivations (plus ou moins bien d6finies dans l'esprit des utilisateurs), mais aussi l'aisance d'emploi, et le confort apparemment obtenu, peuvent rendre compte de la banalisation de la pres- cription, ainsi que du choix relativement st6r~otyp6 des m6dicaments et du niveau souvent profond de s6dation. Cette uniformit6 contraste avec la diversit6 des situations cliniques qui devrait justifier des stra- t6gies appropri6es, m6dicamenteuses ou non. Le manque d'exp~rience approfondie des r6animateurs dans l'usage de m6dicaments en r~gle destin6s l'anesth6sie peut aussi contribuer ~ la monotonie des prescriptions. Depuis une vingtaine d'ann~es, quelques auteurs avaient tent6 d'analyser la justification de ces prati- ques. En raft, il semble que ce soient sa ,( popttlarit6 )) actuelle et l'observafion d'effets d616t~res prouvfs ou suppos6s, qui aient r6cemment conduit -- et donc a posteriori -- ~ tenter d'en rationaliser les indica- tions et ~ rechercher la documentation d'un rapport b6n~fice/risque favorable, La s6dation est comprise comme Faction exerc6e par les. m6dicaments s6datifs .. De. sedare, qui signifie : apaiser, calmer, nous sommes pass6s . s~dater .. I1 convient donc de d~finir ce que signi- fie calmer. Tousles auteurs s'accordent fi distinguer, tout en les associant, les objectifs de lutte centre l'anxi6t6, les effets du stress, la douleur, la dfisadap- tation du respirateur, l'insomnie, l'agitation et divers 6tats pathologiques dent la s6dation constitue le trai- tement 6tiologique (hypertension intracranienne, t6tanos, 6tat de mal convulsif, etc.). La s6dation recouvre donc des concepts multiples et intriqu6s : th~rapeutiques accept6es, comportements d'ordre ROan. Urg., 1993, 2 (4 bis), 437-451

Sédation en réanimation concept et pratique

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XJP CONFJERENCE DE CONSENSUS EN REANIMATION ET M~'DECINE D'URGENCE, 2 JUILLET 1993

S E D A T I O N E N R~ 'ANIMA T ION

C O N C E P T E T P R A T I Q U E

rry du consensus : B. REGNIER, Fr. CLERGUE, M.F. DUMA Y, P. EVRARD, Fr. LECLERC, __ _VIALLEDANT, Fr. THALER, J.L. TROUILLET

• Introduction

Des m6dicaments s~datifs sont communfiment administr6s dans les services de rfanimation. Plu- sieurs revues g6n~rales publifes ces derni~res ann6es, et une enqu6te menfe aupr~s des prescrip- teurs soulignent le besoin de mieux pr6ciser la place de cette pratique.

Malgr6 une apparente variabilit6 des pratiques (selon un sondage effectu6 en 1993 ~ l'occasion de cette conffrence de consensus, 20 fi 97 p. 100 des patients recoivent une sfidation dans 130 services de r~animation m6dicale et/ou chirurgicale) dont l'analyse est difficile en raison de la diversit6 des pathologies prises en charge, il appara~t globalement que la s6dation est largement utilis6e. Certains ser- vices ont rapport6 son emploi chez 75 p. 100 des patients ou m~me chez plus de 90 p. 100 en r6ani- marion chirurgicale lourde pendant la semaine pos- top6ratoire. Pour ce type de patients, la fr6quence est fi peine moindre chez ceux qui ne sont pas venti- 16s (89 p. 100) que chez ceux qui le sont (96 p. 100). Des enqu~tes 6pidfmiologiques confirment ces don- nfes, en particulier en Grande-Bretagne et aux t~tats- Unis, o~ parmi 164 Unitfis de Soins Intensifs, la s6da- tion est prescrite chez plus de 70 p. 100 des patients darts 36 p. 100 des Unit6s et chez 20 ~ 70 p. 100 dans 48 p. 100 des Unit6s.

L'origine de ces pratiques remonte ~ environ 40 ans, avec la curarisation du t6tanos et l'emploi de , cocktails lyt iques, dans un but de protection neu- rov6g6tative. Par la suite, l'application 61argie de la ventilation arfificielle et la description de troubles psychiatriques associ6s fi la rfianimation, ont contri- bu6 ~ 61argir l'emploi de la s6dation. Au cours des annfes 70-80, le d6veloppement de m6dicaments

Correspondance: Jean-Louis Pourriat, D6partement d'Anesth6sie-R~animation, H6pital Jean-Verdier, avenue du 14 juillet, 93143 Bondy Cedex.

d'action courte et donc plus maniables, et celui des pompes ~ d6bit continu semblent avoir particip6 ~ sa g6n6ralisation. Enfin, et plus r~cemment, l'attention port6e au barotraumatisme de la ventilation artifi- cielle a amplifi6 cette pratique.

L'ensemble de ces motivations (plus ou moins bien d6finies dans l'esprit des utilisateurs), mais aussi l'aisance d'emploi, et le confort apparemment obtenu, peuvent rendre compte de la banalisation de la pres- cription, ainsi que du choix relativement st6r~otyp6 des m6dicaments et du niveau souvent profond de s6dation. Cette uniformit6 contraste avec la diversit6 des situations cliniques qui devrait justifier des stra- t6gies appropri6es, m6dicamenteuses ou non. Le manque d'exp~rience approfondie des r6animateurs dans l'usage de m6dicaments en r~gle destin6s l'anesth6sie peut aussi contribuer ~ la monotonie des prescriptions.

Depuis une vingtaine d'ann~es, quelques auteurs avaient tent6 d'analyser la justification de ces prati- ques. En raft, il semble que ce soient sa ,( popttlarit6 )) actuelle et l'observafion d'effets d616t~res prouvfs ou suppos6s, qui aient r6cemment conduit -- et donc a posteriori -- ~ tenter d'en rationaliser les indica- tions et ~ rechercher la documentation d'un rapport b6n~fice/risque favorable,

La s6dation est comprise comme Faction exerc6e par l e s . m6dicaments s6datifs .. D e . sedare , qui signifie : apaiser, calmer, nous sommes pass6s . s~dater .. I1 convient donc de d~finir ce que signi- fie calmer. Tousles auteurs s'accordent fi distinguer, tout en les associant, les objectifs de lutte centre l'anxi6t6, les effets du stress, la douleur, la dfisadap- tation du respirateur, l'insomnie, l'agitation et divers 6tats pathologiques dent la s6dation constitue le trai- tement 6tiologique (hypertension intracranienne, t6tanos, 6tat de mal convulsif, etc.). La s6dation recouvre donc des concepts multiples et intriqu6s : th~rapeutiques accept6es, comportements d'ordre

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- 4 3 8 - X I ° Conference de Consensus en R#animation et M~decine d'Urgence

6thique vis-f~-vis des malades, r6ponses ~ des trou- bles psychiques, prise en compte du confort du malade, obtention de conditions facilitant les soins. Le recours ~ des m6dications qui d6passent souvent l'anxiolyse ou l'analg6sie pour atteindre la narcose semble s'accompagner aujourd'hui d'une sorte de << mauvaise conscience >>. I1 en r6sulte une interroga- tion sur la place ~ donner aux moyens non m6dica- menteux pouvant limiter le stress et assurer un meilleur confort des patients. On peut citer des rema- niements architecturaux et institutionnels, la remise en cause des modalit6s de fonctionnement des ser- vices, des interventions psychoth6rapiques aupr6s des patients, de leurs familles et des soignants dont l'angoisse est ~ prendre en compte.

L'61aboration de recommandations est rendue par- ticuli6rement difficile par l'absence presque totale d'6tudes ayant 6valu6 le rapport b6n6fice/risque et b6n6fice/cofit des techniques de s6dation. L'empi- risme, ainsi que des pr6occupations compassionnel- les, et 6ventuellement fond6es sur des extrapolations gt partir de situations ponctuelles et parfois 61oign6es de la r6animation (chirurgie cardiaque ou n6onatale), sont ~t l'origine de la plupart des pratiques observ6es. Par ailleurs, la majorit6 des m6dicaments employ6s ont 6t6 6valu6s lors d'administrations de courte dur~e en salle d'op6ration, alors qu'en r6animation, ils sont utilis6s de faqon prolong6e et chez des patients pr6- sentant de multiples d6faillances visc6rales et sou- mis ~ de nombreuses co-prescriptions.

Les recommandations propos6es sont done fond6es pour l'essentiel sur la nature convaincante d'6tudes cliniques limitfes et non comparatives, ainsi que sur des observations parfois ~ l'origine de pr6occupations formul6es dans la litt6rature. Une meilleure connais- sance du b6nffice r6el de la s6dation est n6cessaire. I1 est reconnu que des 6tudes rigoureuses sont peu envisageables dans des situations telles qu'une agi- tation extreme, des douleurs manifestes ou le syndrome de d6tresse respiratoire de l'adulte (SDRA). Cependant, et eu 6gard au tr~s grand nom- bre de patients recevant des m6dicaments sfidatifs, il est indispensable d'6valuer le bien-fond6 de ces strat6gies dans des indications telles que la ventila- tion artificielle en dehors du SDRA.

• D~finition

La s6dation peut se d6finir comme l'utilisation de moyens mfdicamenteux ou non, destinfe ~ assurer le confort physique et psychique du malade, et ~ faci- liter les techniques de soins. L'ensemble de ces moyens th~rapeutiques devrait au moins ne pas accrottre la morbidit6 et la mortalit6, et si possible contribuer ~ les r6duire. La pr6occupation de ne pas induire un allongement de la dur6e de s~jour en r6a- nimation est essentielle. La s6dation appara~t ainsi comme 6troitement like ~ la qualit6 des soins.

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Dans la mesure of~ la s6dation telle qu'elle est pra- tiqu6e aujourd'hui en r6animation, englobe tEn ensem- ble de pratiques aux objectifs tr~s divers, il est difficile d'en conceptualiser les limites. I1 est propos6 d'exclure les administrations de m~dicaments s6da- tifs lorsqu'ils sont prescrits comme composante sp6- cifique et valid~e d'une th6rapeutique. Ainsi, ne seront pas consid6r6s dans ces recommandations, l'analg6sie postop~ratoire de courte dur6e, l'analg6- sie loco-r6gionale ou pfridurale pour des indications chirurgicales ou traumatologiques codifi6es, l'6tat de real convulsif, le traitement de l'hypertension intra- cranienne (HIC), le t6tanos, l'intoxication ~ la chlo- roquine, le delirium tremens, l'emploi des halog6n6s dans l'6tat de real asthmatique, etc.

• Question 1 : Quels sont les objectifs de la s6dation ?

En r6animation, les objectifs de la s6dation corres- pondent aux pathologies rencontr6es et aux soins dis- pens6s.

La gravit6 potentielle des affections motivant un s6jour en r6animation n6cessite une technologie sophistiqu6e et une prise en charge sp~cifique du patient. CeUe-ci suppose la prise en compte de facteurs li6s ~ l'environnement du patient et ~ son confort. Ceux-ci, bien qu'ayant un impact sensible sur le v6cu et les capacit6s d'adaptation au milieu qu'est la r6a- nimation ont 6t6 jusqu'~ pr6sent n6giig6s. Les soins intensifs impliquent des moyens humains importants et un environnement forc6ment insolite : 6qulpe mul- tidisciplinaire en nombre important, continuit6 des soins 24 h/24 induisant une activit~ ininterrompue du personnel, nombreux appareils de surveillance avec alarmes (bruits divers et multiples). Ces contraintes entrainent la perte d'intimit6 du patient, l'exposition

la lumi~re et le manque de repos et de sommeil. Cette perte des rep~res est associ6e ~ d'autres fac-

teurs cr6ant une situation d'agression. Le patient est, en particulier, confront6 ~ la brutalit6 de son arriv6e en r6animation, ~ sa maladie, aux risques qui en d6coulent et au questionnement concernant sa sur- vie. Sur la base de cette analyse, et compte tenu de la d6finition propos6e de la s6dation, il est possible de d6gager six grands objectifs de la s6dation en r6a- nimation :

Amdliorer le confort du patient

Les 6tudes analysant le v~cu des patients en r6a- nimation (adultes uniquement), sont non comparati- ves et d'interpr6tation difficile car r6alisfes apr6s un d61ai variable suivant la sortie de services de type et de recrutement diffdrents. Cinquante pour cent des patients ne se rappellent pas de leur s~jour. Chez plus de la moiti6 des autres, il est possible d'identifier un certain nombre de facteurs participant ~ l'inconfort.

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Xl e ConfOrence de Consensus en R~animation et M#decine d'Urgence - 439 -

Certains facteurs incrimin6s pourraient etre dimi- nu~s par des mesures simples ou des adaptations structurel les (position dans le lit, soil, bruit, lumi6re...), alors que d 'autres pourraient l 'etre par le recours ~ la s6dation associant prise en charge psychologique et moyens m~dicamenteux.

La sddation doit permettre de lutter contre -- la douleur " elle est rapport6e a posteriori par

35 ~ 70 p. 100 des patients qui la qualifient de mod~- r~e ~ s~v6re. Les causes de douleurs le plus souvent rapport~es sont les plaies, les fractures, les compres- sions nerveuses, la kin~sith~rapie, les points de pres- sion (genou, talon, coude), l ' i r r i ta t ion locale (trach6otomie, tube naso-trach~al, drains pleu- raux, ...), les aspirations trach~ales, mais aussi des gestes diagnostiques telle que la ponction art~rielle, les cath~t~rismes ... Si de telles ~tudes n 'ont pas ~t4 r~alis~es chez l 'enfant, il convient de rappeler que les structures anatomiques et biochimiques de la per- ception de la douleur sont pr~sentes d~s la naissance.

-- l'anxi~t~ - induite ou accentu~e par la patho- logie et le s~jour en r~animation, est mentionn6e par 25 ~ 50 p. 100 des malades. Chez 10 p. 100 des mala- des ventil~s, on retrouve la peur d 'une d~faillance de la machine ou du sevrage de celle-ci.

-- le manque de sommeil (25 ~ 45 p. 100 des patients) semble en relation ~troite avec la sensation d ' inconfort (30p. 100), de douleur (30p. 100), d'anxi6t~ (50 p. 100), de bruit (50 p. 100)...

Assurer la sdcuritd du patient agitd et celle du personnel

Selon les 6tudes et le type de recru tement des uni- t6s, la fr6quence des 6tats d'agitation en r~animation varie entre 10 et 40 p. 100. Elle serait maximale dans les suites de chirurgie cardiaque. Dans tree 6tude non publi6e, men~e dans une unit6 de r6animation chi- rurgicale chez 1 800 patients adultes dont 76 p. 100 avaient requ une s6dation curative ou preventive, on re l ive un taux global de 8 p. 100 d'agitations sans relation avec l'~ge. Parmi ces patients agit6s, 32 p. 100 6taient septiques, 26 p. 100 polytraumati- s6s, 18 p. 100 avaient des ant6c~dents psychiatri- ques. Dans cette 6rude, le taux de d~c~s, la dur6e moyenne de s6jour, les scores de gravit~ et de charge en soins sont net tement plus ~lev6s chez les patients agit6s. Ceci est confirm6 dans la litt6rature.

Dans les dtats d' agitation, la sddalion a pour objectif -- d '6viter la survenue d 'un 6v6nement faisant

courir un risque au patient (chute, d6branchement, a r rachement d 'un tube, ...),

-- de permet t re l 'utilisation de techniques de soins invasives (ventilation arfificielle, h6modialyse, cath~t6rismes ...),

-- de minimiser le risque infectieux (manipula- tion des cath6ters, sondes, pansements.. .) .

Faciliter les soins et en garantir la meilleure efficacitd en permettant

-- au patient de participer aux soins qui lui sont dispenses avec un confort m ax im u m : (pr~venir, expliquer, installer),

-- la r6alisation des soins et leur efficacit6 : (pan- sements it~ratifs chez des grands brfll~s, d~bride- ment de cellulites extensives, pose de drains, ...).

Optimiser les bdndfices de la ventilation mdcanique en permettant I'adaptation au respirateur

-- soit au cours d 'une d6faillance respiratoire afin d'am~liorer les 6changes gazeux, de diminuer le barotraumatisme, voire de diminuer la consomma- tion en oxyg~ne,

-- soit au cours des situations dans lesquelles le contr61e et la stabilit~ de la pression intracr~nienne sont n~cessaires.

Faciliter les actes ~ visde diagnostique et thdrapeutique de courte durde afin d'amdliorer leur performance et d'en diminuer les risques iatrogdnes

II peut s 'agir de gestes effectu6s dans le service de r~animation ou n6cessitant un transfert :

-- r6alisation d'endoscopie ~ vis~e diagnostique effou th6rapeutique, telle une brosse protegee, un lavage broncho-alv6olaire, un cath6t~risme r6tro- grade de la voie biliaire principale avec ou sans sphinct6rotomie endoscopique, ou une colonoscopie, etc.

-- r6alisation d 'un examen radiologique : angio- graphie, scanner, ~chographie, IRM...

-- mise en place, surveillance et interpr6tation valide de diff6rents param~tres en particulier h6modynamiques ou de la pression intracr~nienne.

Diminuer la rdponse au stress

Indication classique de la s~dation, le stress est l 'origine d 'une r~ponse cardio-vasculaire et m6tabo- lique caractdris6e par un ~tat d 'hypercatabolisme. Celle-ci est la consequence de modifications neuro- endocriniennes et en particulier de l 'augmentation de la sdcr6tion des cat6cholamines.

La r~ponse du nouveau-n6 au stress est particuli~- rement intense et associ~e ~ des difficult~s ~ main- tenir une stabilit~ m6tabolique en raison de sa surface corporelle plus grande, de besoins en glucose ~lev~s, de faibles r~serves 6nerg~tiques, et de l ' immaturitd des syst~mes enzymatiques. I1 doit en outre s 'adapter

la vie extra-uterine et maintenir sa croissance.

Si l'utilisation des agents morphinomim~tiques att~nue la r~ponse neuro-endocrinienne au stress et

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- 4 4 0 - XP C o n f e r e n c e de C o n s e n s u s en R#an ima t i on et MOdec ine d ' U r g e n c e

a des effets bfnffiques dfmontrfs au cours de la chi- rurgie n6onatale et de la chirurgie cardiaque, aucune 6tude dans la littfrature n'a montrf chez l'homme un b6nffice mftabolique de la sfdation en rfanimation.

I1 est d6montr6 que le risque infectieux et la mor- talitf sont corr416s fi l'anergie explorfe par les tests cutanfs. De nombreux travaux ont identifif des altf- rations immunitaires et phagocytaires associfes l'augmentation des b6ta-endorphines. Un effet dfl6- thre de la morphine a fit4 6galement suggfrf in vitro et chez l'animal sur la fonction phagocytaire et chi- miotactique des polynuclfaires et macrophages. Cependant aucun argument chez l'homme ne perrnet,

ce jour, de dfmontrer une quelconque relation entre dfficit immunitaire et sfdation, ni en termes de ris- que, ni en termes de b6nffice.

Question 2 : Quelles sont les situations cliniques qui n6cessitent le recours & la s4dation ?

Etats d'anxidtd -- L 'anxif tf est habituelle en rfanimation

Elle peut 6tre conque soit comme rfponse du , sujet psychologique ~, soit comme r@onse de l'organisme au stress• Outre les conditions du s6jour en r6animation, le traumatisme initial joue un r61e important, souvent nfglig4 dans la litt6rature. Les facteurs de stress, la personnalit6 du patient, les rfac- tions de l'entourage, l'impossibilitf de parler, la dou- leur, la privation de sommeil, la contrainte ~ la passivitG la d@endance, l'inconfort interagissent pour renforcer l'anxi6t& Le malade ne peut pas, le plus souvent, communiquer par la parole son v6cu et ses affects• L'anxi6t6 sera d6s lors rep6r6e par sa traduction comportementale (de l'inhibition ~ l'agi- ration) et par ses manifestations neurovfg6tatives. Ces derni~res se traduisent par des signes cardio- respiratoires, digestifs, neurologiques, et posent des probl6mes diagnostiques• Cette anxi6tf dolt ftre prise en compte pour trois raisons : le confort du malade, la pr6vention de dfcompensations psychologiques, la prfvention de complications somatiques dues l'angoisse et au stress• I1 convient de rappeler que l 'anxiftf est rarement isol6e, et se trouve gfn4rale- merit en interaction avec la douleur, l'insomnie et la dfsadaptation au respirateur.

- -L ' anx i f t 4 peut faire partie d'un tableau psychiatrique justifiant une thfrapeutique spfcifique :

-- Syndrome confusionnel et confuso-onirique. I1 associe une perplexit6, une d6sorientation, une agi- tation, des hallucinations. Un tel tableau peut ~tre d'origine organique et/ou biologique, ou ~tre-la consfquence d'un traumatisme psychique.

-- l~tats dflirants. On peut assister ~ des psycho- ses rfactionnelles, mettant en jeu des id6es de persf-

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cution. Souvent discrets, ils sont reconstitu6s apr6s le s6jour en r6animation.

-- Anxi6t6 life h u n syndrome dfpressif. Si la tristesse, le ralentissement sont toujours difficiles 6valuer en l'absence de paroles et en raison de l'immobilisation forc4e, une passivit4 importante avec une absence de plaintes dolt faire penser ~t un ftat dfpressif. Parfois, il s'agit d'4tats franchement mflancoliques avec auto-accusations et attitudes r6gressives ~ signification suicidaire.

-- Psychose de rfanimation. Ce syndrome semble recouvrir h la lois des fpisodes confuso-oniriques d'ori- gine organique et des psychoses rfactionnelles (oni- risme ou ddire syst4matisf). Le tableau psychiatrique est le plus souvent rfversible, ~ moins qu'il ne s'agisse de la dfcompensation d'une psychose prf-existante.

E, tats d' agitation Caractfrisfs par une hyperactivit6 psychomotrice

paraissant inadaptfe, une turbulence, de l'agressivitG des cris, des tentatives d'arracher les sondes, les ftats d'agitation imposent la recherche d'une cause orga- nique justifiant un traitement spfcifique (Tabl. 1). Un 6tat d'agitation peut cependant ~tre li6 ~ un tableau psychiatrique et nfcessiter un traitement adapt6.

L'agitation est souvent le seul mode d'expression d'un patient angoiss6 et il est dans ce cas nfcessaire d'entendre le message• I1 suffit parfois de rem6dier

un motif d'inconfort (globe vfsical par exemple). Ce peut ~tre aussi la manifestation d'une lutte du patient contre la r6gression qui est cependant nfces- saire ~ l'acceptation de sa dfpendance et qui doit ~tre , accompagn6e ..

I1 faut insister sur le risque de malentendu qui conduit fi la spirale agitation-contention, voire au recours ~ une sfdation massive• Ce risque pose le pro- bl6me de la disponibilit6 des soignants et du temps qu'ils devraient consacrer ~ une meilleure compr6hen- sion des messages d41ivrfs par les patients (TabL I).

Tableau I Principales c a u s e s d 'agi ta t ion . o r g a n i q u e .

m e t t a n t en jeu le pronostic vital en r~animation

1. Maladies neurologiques : • Infect ieuses : m4ningite, enc~phalite • Vasculaires : h6morragie rn6ning4e ou c6r6brale • Comitiales 2. Troubles rn4taboliques ou endocriniens : • Hypoglyc6mie

Hypox6mie • D6s6quil ibres acido-basiques ou hydro~lectrolyt iques s6v6res

Enc~phalopathie carentiel le type Wernicke

3. Troubles cardio-vasculaires : • Etat de choc • Enc(~phalopathie hypertensive

4. Causes rn~d icarnenteuses : • Intoxications • Sevrage y compris chez le nouveau-n~ de rn~re toxicomane

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XI e Confdrence de Consensus en R#animation et Mddecine d 'Urgence - 4 4 1 -

£,tats douloureux La douleur du patient de r~animation a ~t~ tr~s peu

~tudi~e sans doute en raison des difficult~s d'~valua- tion et parce qu'elle ne semble pas etre apparue comme une prioritY. Cette douleur peut etre aigu6 ou chronique et r~sulter soit d'une affection m~dicale, ou surtout chirurgicale postop~ratoire ou post- traumatique, soit d'un geste diagnostique ou th~ra- peutique. Les consequences endocrino-m~taboliques de la douleur ont ~t~ 6valu~es dans au moins 7 ~tu- des en particulier en traumatologie et en postop~ra- toire imm~diat rant chez le nouveau-n~ que chez l'adulte. La morbidit~ et la mortalit~ sont li~es ~ la r@onse au stress qui parait plus intense (les taux d'adr~naline sont multiplies par 3 ~ 10), mais plus courte, chez le nouveau-n~ que chez l'adulte pour une intervention ~quivalente. Chez l'adulte l'analg~sie diminue les consequences respiratoires, cardio- vasculaires et m~taboliques, notamment chez les patients de chirurgie cardio-vasculaire ou victimes de traumatisme du thorax. Chez le nouveau-n~, lors de la cure chirurgicale d'une cardiopathie complexe, une ~tude a montrd que l'analgdsie profonde per- op~ratoire suivie d'une analg~sie postop~ratoire rdduisait de fa~on significative les complications post- op~ratoires (acidose, infections, coagulation intra- vasculaire diss~min~e) et la mortalitY.

En r~animation, m~me si l'utilisation d'analg6si- ques s'accompagne d'une diminution des besoins ~nerg~tiques, il n 'y a pas de donn~es documentant d'autres effets b~n~fiques des analg~siques que le confort des patients.

Ainsi, depuis 30 ans les enqu~tes montrent que 35 70 p. 100 des patients ayant quitt~ l'unit~ de soins

intensifs rapportent une douleur qu'ils qualifient de mod~r6e ~ sdv&re. Dans leurs souvenirs ddsagr~a- bles, outre l'anxi~t~, c'est la douleur en rapport avec les gestes diagnostiques ou th~rapeutiques tels que ponction art~rielle, cath~t~risme, kin~sith~rapie, aspirations trach~ales, et sondage v6sical qui occu- pent la premiere place, avant le bruit, la faim et la soil, l'isolement, la d@endance, la crainte des ges- tes et des d~faillances mat~rielles (Tabl. H-111).

Tab leau II

Principaux gestes diagnostiques douloureux

- - Ponctions veineuses, artdrielles et prel~vements capillaires. - - Ponctions Iombaire et m6dullaire

Exploration radiologique avec injection veineuse de pro- duit de contraste iod6. - - Ponction d'organe exploratrice (synoviale, pl~vre, pdritoine, voies urinaires, abces, kyste, ganglion ...). - - Endoscopies digestives hautes ou basses, ORL, respira- toires, urologiques. - - Biopsies r~nales, h6patiques, cutan6es. - - ~ lectromyogramrne. - - Recueil d'urines par poches adhdsives.

Tab leau III

Principaux gestes th#rapeutiques douloureux

- - Soins de nursing. - - Injections m6dicamenteuses par voie intramusculaire ou sous-cutan6e (y compris les antalgiques et les anesthdsiques (ocaux). - - Pose de voie veineuse centrale ou p6riphdrique. - - Pose de sonde gastrique, lavage gastrique. - - Aspiration nasopharyngde et trachdale. - - Intubation trachdale. - - Kindsithdrapie respiratoire, rddducation articulaire. - - Drainage pleural. - - Drainage sus-pubien. - - Pansement de plaies, sutures. - - Gestes de radiologie interventionnelle.

Certaines pathologies sont par elles-memes doulou- reuses comme la p~riode postop~ratoire, les trauma- tismes, les brfilures ~tendues, les escarres...

La liste des principaux gestes diagnostiques et th& rapeutiques est indiqu~e dans les tableaux II et III (d'apr~s plusieurs ~tudes des plaintes de patients recueillies apr~s le s~jour en r~animation et de la per- ception des soignants).

Ventilation mdcanique Les agents s~datifs sont trSs fr~quemment utili-

s~s lors de la ventilation m~canique. Aucun travail n'a cherch~ ~ en analyser les indications selon les motifs d'assistance respiratoire, ni ~t appr6cier les niveaux et dur~es utiles. Chez les patients ventil~s, l'identification d'~tats d'agitation, d'anxi~t~ ou douloureux (operas, traumatis~s du thorax) justifie une s~dation. Cependant, il n'existe pas de d~monstration claire que la ventilation m~ca- nique et les aspirations trach~ales soient perques comme douloureuses et justifient une s~dation syst~- matique.

I1 est possible de citer des situations o£1 la s~dation a fait la preuve de son utilit~ afin d'optimiser l'h~ma- tose, de r~duire les contraintes physiques appli- qu~es aux poumons ou leurs consequences extra- thoraciques. Dans d'autres cas, son emploi apparait seulement comme raisonnable.

Causes respiratoires -- Le SDRA :Dans ce syndrome, la s6dation est

justifi~e pour : obtenir une parfaite adaptation au res- pirateur et optimiser l'oxyg~nation, permettre l'uti- lisation de modes ventilatoires particuliers (rapport I/E inverse, ventilation ~ haute fr~quence, hyper- capnie permissive, @uration extracorporelle du C02...), r6duire les pressions d'insufflation et limiter le barotraumatisme, diminuer la V02 (le b~n~fice en est real document~). I1 est ~ remarquer que certains modes nouveaux de ventilation imposent une s~da- tion profonde mais restent ~ ~valuer en termes de mortalitY.

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- 4 4 2 - XI ~ Conference de Consensus en R~animation et M~decine d'Urgence

-- t~tat de mal asthmatique : la s~dation permet d'adapter le malade au respirateur et de limiter le barotraumafisme dans l'attente de l'efficacit~ des thd- ral6eutiques sp6cifiques de la maladie ;

-- La d6sadaptation du ventilateur au cours des insuffisances respiratoires aigues (en dehors du SDRA) : les patients soumis ~t une ventilation m~ca- nique, ayant une d6sadaptation non expliqu~e par une cause m~tabolique ou circulatoire et persistant en d@it d'une opfimisation des rdglages du ventilateur ou d'une modification du mode ventilatoire, peuvent b~n~ficier d'une s~dation, d'autant qu'existent une hypox~mie et/ou une hypercapnie ;

-- Situations particuli~res: la ventilation m~ca- nique des patients ayant un emphys~me pulmonaire, des bulles pulmonaires, une fistule broncho-pleurale pent imposer une s~dation afin de limiter le risque de barotraumatisme ou de fuite a~rique.

Causes neurologiques Au cours de l'hypertension intracr~nienne, la s~da-

tion est souvent requise pour obtenir une hypocap- nie. Par ailleurs, l'augmentation des pressions intrathoraciques, la d~sadaptation du ventilateur et les anomalies gazom~triques sont des facteurs majo- rant la pression intracr~nienne.

Limitations thdrapeutiques en rdanimation Lorsqu'une limitation des traitements s'av&re

appropri~e, la recommandation, faite par de nom- breux auteurs, notamment nord-am~ricains, est de prescrire (ou de poursuivre l'administration) des agents s6datifs (benzodiaz@ines et]ou morphiniques) aux doses habituelles. Les raisons invoqu~es par le personnel soignant sont le confort du malade (soula- gement de la douleur et de la souffrance), et ~ un moindre degr~ celui de la famille.

[] Question 3 : Quelles sont les th6rapeutiques pour r6aliser la s6dation ?

Les th6rapeutiques avec lesquelles les r4anima- teurs sont les plus familiaris4s sont les , m~dicaments s6datifs, et les curares. I1 apparait essentiel d'envi- sager d'autres th6rapeutiques. Les traitements non m6dicamenteux ont ~t la lois un r61e pr6ventif et cura- tif. L'int4ret des traitements ~ vis6e psychiatrique a sans doute 6t4 sous-estim6. Ces derniers reposent sur des m6dicaments psychotropes et seront envisag6s avec la dernihre question.

Th~rapeutiques non m~dicamenteuses

Elles s'int~grent dans la dispensation des soins. Leur fonction de pr6vention est bien 6tablie. Une vigilance 6troite devrait permettre de d6pister pr6- cocement et de prendre en compte un certain nombre

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de manifestations dont l'~volution spontan4e pour- rait n4cessiter une s6dation m4dicamenteuse.

L a p r i s e en c h a r g e p s y c h o l o g i q u e du pat i ent fait partie de l'approche des soignants et doit s'int4grer dans la d6marche de soins. Cependant cet aspect, ainsi que la communication avec le patient et sa famille sont difficiles ~ assurer, essentiellement par manque de temps.

Les solutions envisageables r4sultent de la concep- tion qu'ont les soignants de l'homme malade. Les th6ories de soins infirmiers, s'appuyant sur le concept de , pensfe syst6mique, (consid6rant l'individu comme, un tout dissociable, en interaction perma- nente avec son environnement), ont de plus en plus tendance ~ consid6rer le malade comme un parte- naire dans le processus de soins. En r6animation, cette interaction -- patient/famille/soignants -- revet une dimension particuli~re en raison de l'environne- ment 6trange et angoissant ainsi que des multiples situations d'agression pour le malade, d'autant que celui-ci, le plus souvent, n'a pas les moyens de s'exprimer.

Les th6rapeut iques non m 6 d i c a m e n t e u s e s ont pour but de favoriser le << bien-etre, du patient et s'int6grent dans l'organisation globale des soins. Cette pr6occupation prioritaire du confort du malade remet en cause nos pratiques. Un certain nombre de recommandations sont en relation directe avec les soins dispens6s aux patients, d'autres concernent l'environnement, d'autres enfin, s'adressent ~ l'orga- nisation et ~ la conceptualisation des soins par 1'ensemble de l'6quipe.

• L'accueil du patient et de sa famille, ~ l'entr6e en r6animation, est un moment privi16gi6 qui parti- cipe ~ la raise en confiance et ~ la diminution de l'angoisse (se presenter en temps que soignant, d6mys- tifier les moyens de surveillance, livret d'accueil...).

• Les Soins de bases participent au bien-atre et peuvent 6viter l'agitation : ils sont d~taill6s dans le tableau IV.

Tab leau IV

Soins de base participant au bien-#tre du patient

- - Installation confortable du patient, posit ionnement du corps, du lit, oreillers, changement de posture. - - Moyens de pr6vention des escarres. - - Favoriser la position demi-assise, lever le patient et le faire marcher aussit6t que possible pour lui donner des rep~res. - - Hygiene corporelle et proprete de la literie. - - Posit ionnement des appareils de surveil lance & distance du patient. - - Proximit6 des objets familiers, notamment des jouets pour les enfants. - - Installation et fixation des diff6rentes sondes, cath6ters, drains, 6vitant la mise en tension et la douleur (escarre du nez, drains g6nants, cordon du monitoring coinc6 sous une partie du corps...). - - D6gager le champ visuel du patient. - - Respect du rythme jour-nuit.

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XI e Conference de Consensus en R#animation et M#decine d 'Urgence - 4 4 3 -

• Communication. Chez le patient sous ventila- tion m6canique il faut favoriser les supports de com- munication (support sensoriel, ardoise, moyens audiovisuels). Bien qu'il n'y ait pas d'6tude ayant 6va- lu6 l'impact du temps de visite accord6 ~ la famille, on peut penser que l'introduction d'une certaine sou- plesse dans des horaires habituellement r6glemen- t~s et restrictifs pourrait etre b~n~fique au patient et au soignant. En p6diatrie, l'effet bfin~fique de la pr6sence des parents est admis.

• La structure architecturale a un impact qui a 6t6 6tudi& Les filaments favorables sont : chambre individuelle, lumi~re naturelle, utilisation de matd- riaux ad6quats pour r6duire le bruit.

• Le sommeil. Les troubles du sommeil ont fit6 identifi~s et en particulier la privation li~e ~ une veille intermittente. Quelques recommandations simples favorisent le repos, telles : le regroupement des soins, la limitation des conversations inutiles dans la cham- bre, le respect du sommeil notamment la nuit.

• Les techniques de massage, relaxation et la sophrologie : ces techniques pourraient trouver une place intdressante dans les soins en r6animation. Chez le nouveau-n6, les caresses et la mobilisation passive des membres ont un effet b6n~fique prouv6. I1 en est de meme pour la succion nutritive (glucos6) et non nutritive (t6tine).

• Les bienfaits de la musicoth6rapie sur la dou- leur ont ~t6 sugg~r6s en chirurgie.

I1 appara~t clairement que de telles dispositions imposent une r6flexion approfondie sur le fonction- nement des services. L'organisation des soins dolt privil6gier la prise en charge psychologique des patients et en particulier la communication. La qua- lit6 des soins requiert un personnel en nombre suffi- sant. Sa formation doit envisager en particulier, la gestuelle, e t , la relation d'aide ~) (un personnel per- formant s6curise le patient et permet la r~duction des douleurs li6es aux soins). Les temps de parole entre les membres de l'6quipe soignante doivent ~tre favo- ris6s. La place du psychiatre et/ou du psychologue au sein de l'6quipe est ~ envisager, mais les exp6- riences sont encore limit6es. Ceux-ci pourraient apporter une aide au patient, et ~ sa famille, mais aussi aux soignants.

Thdrapeutiques mddicamenteuses

Les molecules utilis~es sont nombreuses et pour la plupart issues de la pratique anesth6sique. De ce fair, beaucoup de donn6es pharmacocin6tiques et pharmacodynamiques sont extrapolfes et n'ont pas 6t6 valid6es en r6animafion. Ceci est partictfli~rement vrai chez le nouveau-n6 et le pr6matur6 chez qui l'albumin6mie est plus basse, le volume de distribu- tion plus 61ev6, les m6canismes d'dlimination imma- tures et la demi-vie d'61imination des m6dicaments augment6e.

I1 est ~ remarquer que dans les services de rfanima- tion, les prescripteurs sont souvent peu familiaris6s avec ces classes th6rapeutiques. Des enqufites conduites aux Etats-Unis vers 1990 ont montr6 que 95 p. 100 des services de soins intensifs adultes et 75 p. 100 de soins intensifs pfidiatriques ne dispo- saient pas de protocoles de s6dafion. I1 est souhaitable de d~finir des protocoles faisant appel ~ un nombre limit6 de m6dicaments et de recueillir plus souvent des avis comp6tents (anesthfisistes, psychiatres).

Les morphiniques Les morphiniques constituent la classe pharmaco-

logique la plus fr6quemment utilis~e en premiere intention en raison de leurs propri6tfis analg6siques puissantes (confort des patients) et de leurs effets d@resseurs respiratoires, recherch6s pour l'adapta- tion au respirateur.

Les m6dicaments utilis6s sont essentiellement la morphine et le fentanyl ou ses d~riv6s (agonistes).

En France, la faible utilisation actuelle de la mor- phine (pour la s~dation) semble s'expliquer par sa mauvaise maniabilit6 et son retentissement h6mody- namique chez le patient en rfianimation, avec une chute d'environ 15 p. 100 de la pression art~rielle et de l'index cardiaque. De plus, et en particulier en cas d'insuffisance r~nale ou h@atique, il existe un ris- que d'accumulation de la morphine et de son m6ta- bolite actif, le 6-glucuronide. La morphine a un effet d@resseur respiratoire plus marqu~ chez le nouveau- n~ que chez l'adulte. Les doses n6cessaires sont toutefois plus importantes car le nouveau-n6 est incapable de produire le m6tabolite 6-glucuro- conjugu6 qui contribue ~ l'effet analg6sique. Dans les services de r~animation p6diatrique am6ricains, la morphine -- d'apr~s une 6tude de 1993 -- est utilis6e par 88 p. 100 des r6animateurs. L'indice de satisfaction est toutefois moins 61ev6 qu'avec le fentanyl.

La ph6nop6ridine encore parfois utilis6e, est ~ pros- crire en cas d'insuffisance r~nale, en raison du ris- que d'accumulation d'un de ses m~tabolites actifs, la norp6thidine, excitant du syst~me nerveux central.

Le fentanyl est le morphinique le plus prescrit pour la s6dation en raison de sa bonne tol6rance h6mody- namique, et du faible risque d'accumulafion en cas d'insuffisance r6nale ou h6patique. Utilis6 seul, il peut etre responsable d'une rigidit6 thoracique.

Le sufentanil, 5 ~ 11 lois plus puissant que le fen- tanyl, poss~de certaines propri6t~s pharrnacologiques lui conf6rant, par rapport au fentanyl, un d61ai d'action et une 61imination plus courts, une plus grande stabilit6 et de plus faibles variations inter- individuelles des taux plasmatiques. Son index th~- rapeutique est le plus 61ev6 des morphiniques. Chez des patients admis en r6animation au ddcours d'une chirurgie cardiaque, des 6tudes sugg~rent que le sufentanil (en perfusion) r6duirait la morbidit6 et la mortalit~ postop6ratoires par rapport ~ la morphine

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- 4 4 4 - XI e Conf6rence de Consensus en R6animation et M6decine d'Urgence

(en bolus). I1 est ~ noter que le sufentanil n'a pas 4t4 compar6 au fentanyl en r6animation et que la traduc- tion clinique de ses avantages pharmacologiques n'est pas document6e (en particulier pour une utili- sation prolong6e).

L'alfentanil a une 61imination plus rapide que le fen- tanyl avec une demi-vie d'flimination de 30 rain. En revanche, la possibilit6 de retard d'flimination est plus fr6quente qu'avec le sufentanil, du fair d'un m6tabolisme h6patique faisant intervenir le cyto- chrome P450. En raison de son action et de son 4li- mination rapides, il est int6ressant en rfanimation, pour des administrations courtes lors de gestes dou- loureux.

Les morphiniques agonistes partiels et agonistes- antagonistes (nalbuphine, bupr6norphine) ont un effet plafond, limitant fi la lois l'intensit6 de l'analg6sie et la d@ression respiratoire. En r6animation, leur int6- r6t essentiel concerne les patients en ventilation spon- tanfe. C'est notamment le cas pour la nalbuphine qui est tr6s utilisfe chez 1'enfant. I1 faut savoir que Furl- lisation de ces produits peu g6ner celle, ultfrieure, de morphiniques agonistes purs.

Les benzodiazdpines

La diversit6 de leurs propri6t6s (anxiolyse, s6da- tion, myorelaxation, effet amn6siant) en fair la classe la plus utilis6e pour la s6dation en r6animation (plus de 95 p. 100 des services en Grande-Bretagne, Suisse, France). Les cons6quences, b6n6fiques ou non, de l'effet amn6siant ne sont pas connues. Les benzodiaz@ines agissent en occupant un r6cepteur benzodiaz@inique coupl6 ~ un r6cepteur gabaergique qu'elles modulent. Du degr6 d'occupation de ces r6cepteurs, d@end l'effet attendu, autorisant une titration.

On attribue aux benzodiaz6pines un index th6ra- peutique 61ev6, mais leur action vasodflatatrice mod6- r6e est potentialis6e par les autres agents de la s6dation et impose une administration prudente et contr616e notamment en cas d'hypovo16mie. D'autre part, l'att~nuation de la r6ponse ventilatoire au CO2 et ~ l'hypoxie, le risque d'apn6e et d'hypoventilation alv6olaire doivent rendre prudent en cas d'absence de contr61e des voies a6riennes sup6rieures. Le dia- z6pam est la plus ancienne et la plus 6valu6e des ben- zodiaz@ines. Ses inconv6nients sont sa longue demi-vie (plus de 48 heures) et des retards de r6veil tr6s prolong6s (plusieurs jours) li6s ~ sa d6gradation en m~tabolites actifs. De plus, le diaz6pam est dis- sous dans du propyl6ne glycol, toxique pour l'endo- veine. Cette propri6t6 est partag6e par le flunitra- z@am, mo16cule plus puissante. Sa forte lipolubilit6 aboutit aussi ~ des demi-vies tr~s longues, de l'ordre de 24 heures. La pharmacocin6tique du flunitraze- pam est en cours d'6tude chez le nouveau n6.

Ces inconv6nients expliquent le succ6s du mida- zolam. Hydrosoluble, cette imidazobenzodiaz6pine poss~de une voie m6tabolique rapide aboutissant

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un d6riv6 hydroxyl6, moins actif que la mol6cule m6re. La grande s6curit6 d'utilisation du midazolam a 6t6 confirm6e darts plus de 14 6tudes m~thodologi- quement correctes, et ce malgr6 des variations consid6rables des posologies (rapport de 1 fi 70 pour le bolus ; de 1 ~ 7 pour la perfusion). Des retards de r6veil ont cependant 6t6 rapport6s pouvant atteindre 48 heures apr6s perfusion de 7 jours. En partie li6s ft un d6faut de m6tabolisation h6patique, ils sont par- tiellement pr6visibles darts toute situation alt~rant le d6bit sanguin et/ou les possibilit6s de biotransforma- tion h6patiques. Cependant, le midazolam n'a jamais 6t6 compar6 en termes de qualit6 de r6veil aux ben- zodiaz6pines de rdf6rence lors des s6dations prolon- g6es de patients s6v6res. En raison de ses propri6t6s et en particulier de sa dur6e d'action limit6e et plus pr6visible, le midazolam s'est impos6 comme la ben- zodiaz6pine de choix en r6animation.

Autres mddicaments de la sddation

La place de choix du midazolam pourrait ~tre contest6e par le propofol, utilis6 depuis plusieurs ann6es en anesth6sie de courte dur6e, du fair de la r6versibilit~ imm6diate de ses effets. Cette propri6t6 explique son introduction darts les milieux de soins intensifs off il est compar6 au midazolam. Trois tra- vaux confirment la sup6riorit6 du propofol en termes de rapidit6 de r6cup6ration de conscience ~ l'arr~t du traitement. Le sevrage plus rapide de la ventila- tion et peut-etre de la dur6e de s6jour en Unit6 de Soins Intensifs, pourraient contrebalancer le cofit 61ev6 du propofol. Ceci a d'ailleurs 6t~ r6cemment rapport6 pour des s6dations inf6rieures ~t 24 heures, mais n'est plus retrouv6 pour de plus longues dur6es. Par ailleurs, ses effets secondaires cardio-vasculaires, des accidents ddcrits en P6diatrie, la charge liqui- dienne et lipidique engendr6e par le solvant (6quiva- lent ~ 500 ml d'intralipides gt 10 p. 100 par 24 heures, pour un adulte), et le manque de recul doivent conduire gi une certaine prudence dans l'attente d'une exp6rience 61argie en r6animation.

Du fair de l'importance accordde au midazolam et au propofol, l'utilisation des autres molecules est devenue limit6e.

Appr6ci6s pour leur facilit6 d'utilisation lors des asthmes graves, les anesth6siques halog6n6s ont 6t6, au travers de l'isoflurane, r6cemment r66valu6s pour la s6dation. L'exceptionnelle rapidit6 de r6cupdration des fonctions sup6rieures (entre 5 et 20 minutes apr6s plus de 60 heures d'administration) ne contrebalance cependant pas le cofit tr~s 61ev6 de la mol6cule, les difficult6s d'utilisation, les effets d6presseurs myo- cardiques, et l'interrogafion persistante sur les cons& quences r6nales des taux plasmatiques de fluorures obtenus.

L'6tomidate, malgr6 sa bonne tol6rance cardio- vasculaire, m6me en situation h6modynamique pr& caire, ne peut plus 6tre prescrit au long cours tant que les interrogations soulev6es par la publication

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XI e Conference de Consensus en R#animation et M6decine d'Urgence - 445 -

d'insuffisances surr6naliennes n'ont pas 6t6 lev6es. En effet, une surmortalit6 a 6t6 rapportfe lors d'uti- lisations prolongfies et attribu6e ~ une alt6ration des fonctions surrfnaliennes par ailleurs observ6e lors d'administration en bolus.

La k6tamine poss6de la particularit6 d'etre le seul hypnotique intraveineux pourvu de proprift6s anal- gfsiques. Ses effets cardio-vasculaires demeurent controvers6s. Le maintien d'une pression art6rielle systolique 61ev6e serait dfi fi une stimulation sympa- thique intense, masquant vasodilatation et d6pression myocardique directe. Par ailleurs, ses effets sur la circulation cfrfbrale sont tr~s discut6s. Des altfra- tions du d6bit sanguin c6r6bral avec augmentation de la pression intracrXnienne ont 6t6 sugg6r6es ~ par- fir d'observations chez des patients anesthfsi6s et en ventilation spontanfe. Si cette derni~re est contr6- 1re et que des posologies plus faibles, s6datives, sont administrfes, la k6tamine n'apparaitrait pas dfl6t6re pour l'enc6phale.

La place des neuroleptiques (ph6nothiazines ou butyroph6nones) et des antid@resseurs (essentielle- ment tricycliques) est discutfe dans le cadre de la der- nitre question.

Les anesth6siques locaux administr6s par voie rachidienne peuvent etre employ6s chez certains patients de rfanimation. Leur intfr6t rfside dans la qualit6 d'analg6sie, surtout not6e chez les patients apr~s chirurgie et traumatisme du thorax, de l'abdo- men ou des membres inffrieurs. Les anesthfsiques locaux induisent un bloc sympathique, responsable d'une chute de la pression artfrielle. D'autres effets adverses sont ~t prendre en compte, notamment les r6tentions urinaires, et plus rarement les infections du cath6ter p6ridural qui en limitent l'utilisation quelques jours. Cette technique est contre-indiqufe en prfsence d'anomalies de l'hfmostase. L'analg6- sie auto-contr616e (PCA) est prometteuse en chirur- gie. Sa place en r6animation reste gi d6finir. Chez l'enfant, la cr6me Emla est largement utilis6e pour les gestes douloureux programm6s. Son 6valuation est en cours chez le nouveau-n6.

L e s c u r a t e s

Leur frfquence d'utilisation est tr~s variable. En Grande-Bretagne, 15 p. 100 des rfianimateurs rap- portent une utilisation fr6quente. Mais aux Etats- Unis des chiffres de 30 ~ 70 p. 100 ont 6t6 r6cem- ment recens6s. La principale propri6t6 recherch6e est l'obtention d'une myorelaxation totale essentielle- ment dans le but de parvenir ~ une parfaite adapta- tion aux modes de ventilation mfcanique choisis pour les patients ayant une insuffisance respiratoire s6v6re. Plus accessoirement, les curares entrainent une r6duction mod6r6e de la consommation en oxyg6ne.

Seuls les curares non dfpolarisants sont utilis6s en r6animation. Le pancuronium est l'agent le plus pres- crit suivi du vecuronium et de l'atracurium.

Le pancuronium, du fait de son 61imination'r6nale pr6dominante (entre 50 et 80 p. 100), expose au ris- que de curarisation prolongde surtout en cas d'insuf- fisance r6nale. Mais, comme tous les curares non d@olarisants, il est facilement dialysable. Par ail- leurs, il entra~ne parfois une discrete tachycardie et une augmentation mod6r6e de la pression art6rielle. Du fait de sa dur6e d'action prolong6e, il peut paraF tre moins maniable que les autres produits.

Le vecuronium a une dur~e d'action plus courte et une 61imination urinaire plus faible (30-50 p. 100). I1 pourrait trouver une place en r6animation en raison de l'absence de tout retentissement h6modynamique, d'un risque moindre d'accumulation en cas d'insuf- fisance r6nale, et d'une r6cup6ration plus rapide gt l'arr~t de l'administration.

L'atracurium poss~de 6galement une dur6e d'action courte ; il a l'avantage d'etre auto-d6grad6 dans le plasma, ce qui devrait 6viter route accumu- lation. En revanche, la possibilit~ d'hypotension art& rielle lors d'une administration en bolus, et la neurotoxicit6 de l'un de ses m6tabolites observ6e chez l'animal (laudanosine) sont ~ prendre en consi- d6ration.

Aucune ~valuation comparative de ces trois cura- res n'a 6t6 entreprise en r6animafion.

Question 4 : Quels sont les effets secondaires, les r~sultats en termes de mortalite et de morbidit6 et le coot de la s6dation ?

Pour ce qui concerne les effets secondaires, seule la s6dation par narcose et analg6sie, avec curarisa- tion 6ventuelle sera envisag6e. En effet, son rapport b6n6fice/risque m6rite d'6tre discut6. I1 est impor- tant de rappeler que des extrapolations fond~es sur la tolerance de ces m6dicaments employ6s en anes- th6sie, seraient tr~s incertaines pour des s6dations prolong6es de patients atteints de d6faillances vis- c6rales et polym6dicament6s.

(Les m~dicaments ~ vis~e psychiatrique sont dis- cut6s avec la derni~re question.)

Les morphiniques

La d@ression respiratoire est corr6Me ~ l'effet analg6sique. Elle est recherch6e lors des s6dations importantes, et d616t6res chez un patient en ventila- tion spontan6e. Cet effet est major6 chez le nouveau- n~ (le risque d'apn~e tardive est ~ connaitre). A cet ~ge, des convulsions ont 6t6 rapport6es. Lors de Furl- lisation de morphine par voie rachidienne, la d@res- sion respiratoire peut 6tre retard6e de 6 ~ 12 heures apr6s l'administration. Des rigidit6s thoraciques ont 6t6 observ6es, chez l'adulte et le nouveau-n6, apr~s administration de fentanyl ou de ses d6riv6s, notam-

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- 4 4 6 - X I o Conference de Consensus en R~animation et MCdecine d'Urgence

ment lorsqu'ils sont utilises seuls, en l'absence de benzodiazepines ou de curares. Des chutes tension- nelles sont parfois observees lors de l'administration de morphiniques, notamment chez les patients hypo- volemiques. L'administration prolong4e de morphi- niques est responsable d'un ralentissement du transit intestinal et de la vidange gastrique, de naus4es et de vomissements, de r6tention urinaire.

I1 a et6 sugger6 que les morphiniques modifiaient certaines symptomatologies cliniques, telles une defense ou une contracture abdominale. I1 n'y a pas de documentation de ce risque mais elle n'a pas reel- lement etfi recherch4e.

Le risque de dependance physique ou psychique apres utilisation de morphiniques en r4animation est exceptionnel. Afin de le minimiser, certains ont pr6- conise la voie intraveineuse continue, pour eviter que le patient n'etablisse une relation entre une injection en bolus et le bien-etre.

Le syndrome de sevrage serait fr6quent chez le nouveau-n6 (plus de 50 p. 100) et parfois observe apr~s seulement 3 jours de traitement. Chez l'enfant, des mouvements anormaux (myoclonie, chor4- athetose, tremblements) avec irritabilit4, mais sans dysautonomie, ont ete rapportes.

Le midazolam

Alors que chez les volontaires sains, il existe une relation entre concentrations plasmatiques et niveaux de s4dation, cette relation disparait chez le patient de r6animation. Ainsi, pour un meme niveau de conscience, des concentrations sanguines de 100 2 000 ng/ml ont 4t6 observees. Ceci contribue ~ la dis- parite des posologies d'administration. Dans certaines 4tudes, celles-ci peuvent varier d'un facteur de 2,5 chez des patients comparables. I1 existe une grande variabilit6 des delais de reveil ~ l'arr6t du midazolam. Des retards de 24 voire 48 heures aprhs administra- tion de 5 ~ 7 jours sont parfois observes pour une mol6cule a demi-vie courte (2 ~ 3 heures) et sans meta- bolite significafivement actif. Une instabilit6 h4mody- namique est parfois observee, et peut etre major6e par une hypovolemie. Chez le nouveau-n6, des hypoten- sions ont et6 rapport6es, plus particuli6rement lors- que le midazolam etait associe au fentanyl.

Comme pour toute benzodiazepine, des syndromes de sevrage sont observ6s aprhs administration de midazolam. La frequence semble faible mais pour- rait 6tre sous-estimee. Ces tableaux avec manifesta- tions digestives (vomissements, diarrhee), cardio- vasculaires (tachycardie, hypertension) et neuro- psychiques (angoisse, insomnie, confusion voire convulsions) imposent une diminution progressive des posologies ou la r6introduction de la molecule en cas d'arret inopin4. Dans ces circonstances, la voie digestive devrait pouvoir etre utilisee. Le syndrome de sevrage semble par contre exceptionnel chez le nouveau-he, sauf en cas d'association au fentanyl.

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Le propofol

Les effets adverses du propofol sur le syst~me cardio-vasculaire sont les mieux document4s. Ils associent une diminution des r6sistances art4rielles et veineuses, une d4pression myocardique. Son uti- lisation est contre-indiquee en cas d'hypovol6mie ou chez les sujets avec ant6c6dents de myocardiopathie. Des 4pisodes de bradycardie s4v6re ont 4t6 obser- v6s. L'impact de l'accroissement du taux des trigly- c6rides fr4quemment not6 est inconnu. Chez l'enfant, 7 d4c6s ont 6t4 rapport4s apr6s administration de 7,5

10 mg/kg/heure. Le tableau clinique associait aci- dose m6tabolique, bradycardie et incomp4tence myo- cardique. Ces observations doivent conduire ~ des 6tudes suppl6mentaires pour pr6ciser la place du pro- pofol dans la s6dation prolong6e.

La kdtamine

Outre ses effets h6modynamiques ~ type de pous- s4es hypertensives, d'dpisodes de tachycardie et d'hypers6cr6tion bronchique, des apn4es ont 6t6 rapport6es chez le nouveau-n4.

Les curares

Depuis 5 ~ 6 arts, de nombreuses publications ont soulign4 leurs inconv4nients parfois graves lots d'administration prolong6e. Les compressions vasculo-nerveuses et ulc4rations de corn4e doivent etre rappel6es marne si leur fr6quence n'est pas connue.

Plus r6cemment, plusieurs 6tudes ont insist4 sur la survenue de dysfonctionnements neuro-musculaires prolong6s apr6s arret des curares. I1 existe en fait deux entit6s diff6rentes. La premi6re est secondaire soit ~ un surdosage des mol6cules meres, soit l'accumulation de m6tabolites actifs (retrouv6s darts des biopsies musculaires 6 jours apr6s arret de l'administration). Cette curarisation prolongSe est souvent observ6e en cas d'insuffisance r6nale. Le deuxi5me tableau est une myopathie d'4tiopathog6- nie discutee. Elle associe une faiblesse musculaire ou des paralysies avec abolition des reflexes ost6oten- dineux, une augmentation des CPK, une diminution des potentiels 6voques, et 6volue pendant des semai- nes voire des mois. L'examen histologique retrouve une n6crose musculaire et des anomalies de la myosine. Cette myopathie a dt6 observ4e principa- lement lors de l'administration concomitante de for- tes doses de corticoides (asthme aigu grave), et sugg6re une interaction entre corticoides et curares st6ro[des. R6cemment, l'atracurium a lui aussi 6t6 incrimin4.

Ces dysfonctionnements neuro-musculaires ont 6t6 observ6s chez le pr6mature. I1 convient en outre de rappeler que l'hypocalc6mie et l'hypothermie, fr6- quentes en periode n6onatale, potentialisent l'effet des curares.

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XI e Conference de Consensus en R~animation et M~decine d 'Urgence - 447 -

Effets secondaires gdndraux

En dehors des effets secondaires sp~cifiques ~ cha- que m6dicament, une s6dation prolong6e et profonde entra~ne un 6tat d'immobilisation, (parfois recherch6)

l'origine de complications: 16sions corn6ennes secondaires ~ l'inocclusion palp6brale et l'absence de clignements; accidents de d6cubitus (escarres, compressions nerveuses p6riph6riques, thrombose veineuse) ; accidents sp6cifiques attx techniques ven- tilatoires (d6branchements accidentels, dysfonction- nement du respirateur ...); problemes digestifs (reflux gastro-oesophagien, il~us, ...) ; participation

la surcharge hydrosod~e. Aucune 6rude n'a tent6 d'en 6valuer la fr6quence, La r6alit6 de certaines d'entre elles et surtout la liaison de causalit6 avec la sedation peuvent ~tre discut6es. Malgr6 ces incerti- tudes, et eu 6gard ~ leur gravit6 potentielle, il est recommand6 de les prendre en compte dans la d6ci- sion d'instituer une s6dation profonde et prolong6e, et de mettre en place des mesures de pr6vention.

L'alt6ration de l'6tat d'~veil et/ou la paralysie mus- culaire favorisent la stase buccopharyng6e, l'absence de toux, l'encombrement bronchique et les at61ecta- sies. Tous ces 616ments ont et6 identifi6s par diff& rentes 6tudes comme facteurs de risque des pneumo- pathies nosocomiales. En outre, l'incidence de ces infections augmente avec la dur6e de ventilation, or celle ci peut ~tre prolong6e par les retards de r6veil et de sevrage.

D'autres effets secondaires de la s6dation profonde et prolong6e peuvent ~tre envisag6s. Mais la complexite et la gravit6 des pathologies en rend difficiles le reperage et 1'6valuation. La possibilit6 d'interactions m6dicamenteuses multiples doit en particulier ~tre consid6r6e. La toMrance h6modyna- mique des benzodiaz@ines ou des morphinomim6ti- ques est le plus souvent bonne. I1 convient toutefois de reconnaitre que lettr impact h6modynamique reel, en particulier lorsqu'ils sont associ6s de fa~on pro- long6e chez des patients pr6sentant des d6faillances mulfiviscerales, et n6cessitant un emploi prolong6 de cat6cholamines, n'est pas connu.

Morbiditd-mortafitd

II n'y a aucune 6tude ~valuant l'impact de la s6da- lion sur la morbidit6 et la mortalit6. Dans certaines situations (SDRA, asthme aigu grave, hypertension intracrfinienne), l'adaptation au respirateur est consi- d6r6e comme prioritaire. Le rapport entre les b6ne- rices attendus d'une s6dation profonde (survie, fonc- tionnalit~) et les risques est alors pr6sum6 favorable.

En revanche, dans les autres situations le b6n6fice d'une s6dation profonde et prolong~e est ~ mettre en balance avec les effets secondaires des agents seda- tifs, les complications g6n6rales de la s6dation, le ris- que de m6conna~tre une complication sous-jacente, la survenue d'infections nosocomiales, l'6ventuel besoin de maintenir des dispositifs invasifs de soins

et de surveillance, et la possibilit6 d'un allongement du s6jour en r~animation. Le rapport b6n6fice/risque ne peut plus ~ t r e , pr6sum6, favorable, mais doit alors etre consid6r6 comme au mieux incertain. I1 convient d ' , 6voquer les cons6quences psychiques d'un s~jour en r6animafion et du r6le jou~ par la s6da- tion. L'exp6fience vdcue par les patients a fait l'objet de temoignages. Cet 6v6nement est remani6 par cha- cun en fonction de sa personnalit6 et du sens qu'il prend dans son existence. Les effets amnfsiants de la s6dation laissent u n , t r o u , dans la m6moire des patients. Une 6valuation de ses cons6quences ulte- fieures est ~ recommander. Cette question est notam- ment importante pour les nourrissons et les enfants qui doivent pouvoir b6n6ficier d'un suivi psycho- logique.

A rapport b6n6fice/risque suppos6 6quivalent, le cofit induit par la s6dation reste ~ 6valuer. L'utilisa- tion au long cours de mol6cules visant le meme objec- tif mais ayant des 6carts de prix parfois considfirables (& fitre d'exemple, une s6dation journali~re par pro- pofol est cinq fois plus cofiteuse qu'une s6dation par midazolam), ne serait justifi6e que si la diminution des cot]ts indirects (charge de travail, dur~e de s6jour, effets adverses) compensaient le surcofit direct.

Question 5 : Quelles sont les modalit6s pratiques de la s6dation ?

La r6alisation pratique d'une s6dation m6dicamen- reuse ne peut faire appel ~ d e s , recettes ,. Elle doit tenir compte de chaque malade (tares, maladies sous- jacentes ...) et de chaque situation clinique. En fonc- tion du but recherche (analg6sie, anxiolyse, adapta- tion au respirateur ...), la nature et la posologie des m6dicaments, utilis6s seuls ou en association, varient et seront ~ adapter dans le temps chez un meme malade. Une surveillance clinique de cette s6dation s'impose et pourrait etre am~liorde par l'utilisation d'dchelles d'6valuation.

Les situations cliniques

Etats anxieux et troubles psychiatriques

Le traitement devrait etre prescrit avec le conseil d'un m6decin psychiatre.

-- Les 6tats anxieux

Un traitement ~ vis6e anxiolytique dolt 6viter d'etre trop s6datif et respecter un minimum de vigilance. Selon les cas, l'anxiolyse peut ~tre obtenue par les anxiolytiques, les neuroleptiques s6datifs, certains antid@resseurs.

• les anxiolytiques. Les benzodiaz@ines (par vole ent6rale ou parent6rale) seront prescrites devant un ressenti p6nible d'attente anxieuse avec hyper-

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- 4 4 8 - Xl e: Conference de Consensus en R¢animation et M#decine d'Urgence

vigilance : loraz6pam (T6mesta) 3 ~ 15 mg/jour ou un produit ~ dur6e d'action plus longue tels que : chloraz4pam (Tranx6ne) 50 ~ 300 mg/jour (PO, IM ou IV), diazepam (Valium) 10 ft 50 mg/jour. Dans ce contexte, lettrs effets amn6siants paraissent n6gligea- bles. I1 faut rioter la possibilit6 d'effets paradoxaux

type d'excitation. Le midazolam peut trouver ici une indication ~ doses tildes (0,1 mg/kg). La buspi- rone (Buspar) agit sur le systhme s6rotoninergique e t a l'int6ret d'etre trhs peu s6dative, sans retentis- sement ventilatoire. Son effet se rapproche d'une anxiolyse pure (20 ~ 80 mg/jour). Son utilisation en r6animation n'a cependant pas fait l'objet d'6va- luation.

• Les neuroleptiques s6datifs sont utilis6s pr6- f6rentiellement quand l'anxi6t6 ~'accompagne d'agi- ration : chlorpromazine (Largactil) 50 ~ 300 mg/jour ; levom6promazine (Nozinan) 50 ~t 400 mg/jour ; cya- memazine (Tercian) 50 ~ 400 mg/jour. Les neurolep- tiques ont des effets secondaires communs: abaissement du seuil @ileptog&ne, syndrome extra- pyramidal, dyskin~sies pr6coces, hyperthermie mali- gne. Les effets anfidopaminergiques et extrapyrami- daux sont tr~s variables en fonction des suscepti- bilit6s individuelles mais d'autant moins observes que le neuroleptique est plus s6dafif. L'effet sur le syst~me nerveux central, le blocage alpha-adr6nergique p6ri- ph6rique et de la tachycardie r6flexe sont f~ l'origine d'hypotension & redouter chez le malade hypovo- 16mique ;

• Les antid6presseurs sddatifs. Devant un 6tat d6pressif ~ forte charge anxieuse, certains antid6- presseurs a effet anxiolytique sont utiles : amitripty- line (Laroxyl) 50 ~ 200 mg/jour; trimipramine (Surmontil) 50 ~ 200 mg/jour ; dox@ine (Quitaxon) 50 ~ 200 mg/jour. Leur action ne se manifeste nette- ment qu'apr~s 2 ~t 3 semaines de traitement. Leurs inconv6nients sont des effets anticholinergiques, de possibles effets confusog~nes et des effets hypo- tenseurs.

-- Les 6tats psychotiques

Le drop6ridol (Droleptan) ne doit etre utilis6 qu'en cas de n&essit6 de r6duire rapidement une agitation (25 ~ 100 mg/j). Apr~s administration intraveineuse en particulier, une expansion vol6mique rapide peut s'av6rer n6cessaire. Devant un &at hallucinatoire ou d61irant on utilise un neuroleptique incisif : halop6- ridol (Haldol) 5 ~ 30 mg/jour ; pipofiazine (Piportil) 10 ~ 50 mg/jour associ6 ~ un s6datif ; loxapine (Loxa- pac) 150 ~ 600 mg/jour. La loxapine, par son activit6 pr6valente sur les r6cepteurs D3, a beaucoup moins d'effets neurov6g&atifs et extrapyramidaux tout en ayant des effets ~ la fois s6datifs et antipsychotiques. En cas de sevrage alcoolique, il est possible d'utili- ser le tiapride (Tiapridal) 400 ~ 1 200 mg/j.

- - t~tats d6pressifs

Devant un 6tat m~lancolique, les anfid@resseurs tricycliques restent les plus efficaces, dont la clomi-

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pramine (Anafranil) 50 a 150 mg/jour. Leur effet anti- cholinergique peut leur faire pr6f4rer des anti- d@resseurs non tricycliques. Le seul disponible par voie IV est la viloxazine (Vivalan), d6nu6e d'effet atropinique (200 ~ 400 mg/jour en perfusion lente). Comme elle active surtout les r6cepteurs dopaminer- giques, elle peut accentuer l'insomnie et l'anxi6t6 et doit etre associ4e ~ un anxiolyfique. Les IMAO sont proscrits en r6animation.

I1 existe un grand nombre de mol6cules r6centes, caract4ris6es par des diff6rences d'action sur les systhmes noradr6nergiques, dopaminergiques, s6ro- toninergiques. Cependant, les tentatives de faire cor- respondre les signes cliniqnes de la d6pression aux effets neurobiologiques ne sont pas probantes. On se contente en pratique de choisir un antid6presseur en fonction de ses effets plut6t stimulants ou plut6t s4da- tifs. Le choix est aussi d@endant des effets secon- daires. L'interacfion des antid6presseurs tricycliques avec d'autres drogues (ph6nytoine, ph4nothiazi- nes...), la diminution de leurs m&abolismes h6pati- ques entrainant l'allongement de leur demi-vie d4j~ longue (plus de 20 heures), peuvent etre ~ l'origine de surdosages et d'effets secondaires (hypotension, trou- bles de la conduction ventriculaire, convulsions...).

Etats algiques -- Malade non ventil6

-- Douleur aigu6 : pour la r4alisafion d'un geste diagnostique ou th6rapeutique : les produits utilis6s sont la morphine, ou le fentanyl souvent pr6c6d6 chez l'enfant de midazolam (adulte : morphine 0,15 0,2 mg/kg I.V. lent ; fentanyl 0,5 ~ 1 -y/kg I.V. lent ; enfant : fentanyl 0,5 ~ 2 ~,/kg en IV ; k6tamine 2 4 mg/kg en IV, jusqu'~ 10 mg/kg per os ou par voie rectale ; nalbuphine 0,2 mg/kg x 4 ~ 6/jour en IM ou SC ; pommade Emla).

-- Douleur prolong& : la morphine est le pro- duit le plus utilis6 (adulte : dose de charge 0,15 0,2 mg/kg puis 0,01 ~ 0,05 mg/kg/h ; nouveau-n6 : 5

7 -y/kg/heure en IV, (la forme orale est tr6s peu uti- lis6e en r6animation). La nalbuphine est souvent uti- lis6e chez l'enfant pour les douleurs et pendant deux ou trois jours.

- - Malade ventil6

Chez l'adulte comme chez l'enfant, le fentanyl est la mol6cule de r6f4rence : dose de charge 6gale ~ celle pr6c4demment indiqu6e, et perfusion de 2 ~t 4 -y/kg/heure chez l'adulte, et de 1 ~t 2 -y/kg/heure chez le nouveau-n6 et l'enfant (~ augmenter 4ventuel- lement par palier de 0,5 -y/kg/heure). Le sufentanil a 6t6 6valu6 apr~s chirurgie, lourde . ~ la posologie de 0,1 ~ 1-y/kg/h (jusqu'~ 2-y/kg/heure chez le nouveau-n6). Les r~sultats obtenus sont prometteurs mais m6ritent une 6valuation en rdanimation.

Intubation-rgintubation Chez l'adulte, l'intubation dolt &re r6alis6e apr~s

s6dation (par exemple, midazolam, fentanyl, alfen-

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XI e ConfOrence de Consensus en R~animation et MOdecine d'Urgence - 449 -

tanil). Chez l'enfant et tout particuli~rement chez le nouveau-n~, m~me lorsqu'il n'y a pas d'urgence vitale, l'intubafion est trop souvent faite sans pr6m6- dication ni s6dation, alors qu'il est bien d6montr6 que le geste est responsable de tachycardie, hypertension art6rielle, hypoxie et hypertension intracr~nienne. Chez l'enfant, il faut administrer pr6alablement de l'atropine. Les sch6mas utilisables comportent: midazolam et fentanyl aux doses pr6-cit6es, ou k~ta- mine, ou propofol.

Ventilation contr6lde I1 importe de rappeler qu'aucun argument ne per-

met de pr6coniser syst6matiquement une s6dation. Lorsqu'elle est jug6e n6cessaire, elle doit 6tre pro- gressive, et selon les 6quipes, comporter en premiere intention : midazolam + morphinomim6tique ou mor- phinomim6tique + midazolam. Le midazolam sera utilis6 aux posologies suivantes : adulte : dose de charge 0,3 mg/kg en 15-20 minutes puis 0,04 0,1 mg/kg/heure ; enfant : 0,2 mg/kg puis 0,1 mg/kg/heure. L'augmentation doit se faire par palier. Chez l'enfant, les doses n~cessaires ~ l'obten- fion d'un m6me niveau de s6dation doivent ~tre aug- ment6es apr~s 48-72 heures. L'extr~me variabilit6 des posologies n6cessaires est ~ rappeler. En cas , d'inefficacit6 ,, il semble pr~f6rable de changer de classe de m6dicament plut6t que d'augmenter les doses. Chez l'adulte, le propofol pourrait trouver sa place dans cette situation (dose de charge 1 ~ 3 mg/kg puis 1 ~ 4 mg/kg/h). Le niveau id6al de s6dation sous ventilation m6canique n'est pas pr6cis6. Mis ~ part le SDRA, des travaux 6valuant les m6dicaments ont g6n6ralement eu comme objectif les grades 2 ~ 5 de l'~chelle de Ramsay.

Lorsque l'indication de la curarisation a 6t6 bien pes6e, elle fair appel au vecuronium (adulte: 0,1 mg/kg en dose de charge puis 0,02 f~ 0,1 mg/kg/ heure ; enfant : 0,05 ~ 0,1 mg/kg en dose de charge puis 0,05 f~ 0,08 mg/kg/h.) ou au pancuronium : (adulte 0,1 mg/kg en dose de charge puis 0,05 mg/kg/heure ; enfant 0,05 ~ 0,1 mg/kg puis 0,03

0,05 mg/kg/heure).

Chez le nouveau-n~ ventil6, le fentanyl est parfois prescrit seul mais la curarisation reste largement utilis6e.

Situations particuli#res - - Insuffisance r~nale

Fr6quente chez les patients de r6animation, elle peut entra~ner une accumulation des mol6cules effou de leur m6tabolites. De plus, l'accroissement de la fraction libre, non li~e aux prot6ines, peut accentuer ce ph6nom~ne. Parmi les morphinomim6tiques, seuls les m6tabolites de la morphine ou de la ph6nop6ri- dine sont concern6s. Dans le premier cas, le d6riv6 6-glucuronide majore et prolonge l'effet analg6sique ; pour le second, un risque de toxicit~ neurologique existe, m6di6 par la norp6thidine. Le midazolam volt

sa demi-vie d'61imination et donc sa dur6e d'action prolong6es. Pour le diazepam et le flunitrazepam, l'effet toxique du propyl~ne glycol est accentu6. De plus, les benzodiaz@ines ne sont pas dialysables. Le pancuronium et le vecuronium ont des ~liminations retard6es avec accumulation de la mol6cule mare pour le premier, ou d'un m6tabolite ac6tyl6 pour le second. L'61imination de l'atracurium, d6grad6 par voie d'Hoffman, n'est pas influenc6e par la fonction r~nale.

- - Insuffisance h@atique

La demi-vie des morphinomim6fiques est augmen- t6e, mais peut-atre ~ un degr~ moindre pour le fen- tanyl. Toutes les benzodiaz6pines sont concern6es par un risque d'accumulation. Pour les curares, le ris- que est comparable ~ ce qui est d6crit pour l'insuffi- sance r6nale. En cas d'@uration extracorporelle, les doses de certains produits, notamment du fentanyl et de k6tamine, doivent etre augment6es.

Les modalitds de surveillance

L'administration de m6dicaments s6datifs impose la surveillance de la pression art6rielle, des fr6quen- ces respiratoire et cardiaque, et de la saturation oxy- h6moglobin~e (SpO2) en particulier chez le patient non ventil6. Le niveau de vigilance et de r6activit6 est le plus souvent estim~ p a r , l'impression clini- que ,. Des 6chelles d'6valuation ont 6t6 propos6es dans le but de permettre une surveillance sensible et sp6cifique. Cependant, elles sont encore peu utili- s6es dans les services de r~animation car souvent complexes, consommatrices de temps, et parfois peu adapt6es aux patients de r6animation. Beaucoup n'ont pas 6t6 valid6es en r6animation.

Evaluation de la sgdation

Chez l'adulte, parmi les nombreuses m6thodes d'6valuafion, l'6chelle de Ramsay, tr~s simple, est la plus utilis6e.

t~chelle de Ramsay

Niveau R@onse

1 Anxieux et agit6

2 Coop6rant, orient6, et calme

3 R@ond seulement aux ordres

4 Endormi mais r6ponse nette percussion de la glabelle ou & un bruit intense

5 Endormi avec r6ponse faible aux memes stimuli

6 Pas de r@onse attx stimuli nociceptifs

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Chez l'enfant, un score de Ramsay modifi6 a 6t~ propose. D'autres 6chelles existent comme celle de Rosen.

l~,chelle de Rosen

Niveau R6ponse

1 Comateux : ne r6pond pas la stimulation

2 Endormi : se r~veille ~ la stimulation

3 Calme : pas de risque pour les cath6ters

4 Alerte : risque pour les catheters

5 Agit6, non contr61able, se d6battant

D'autres scores propos6s, notamment au cours de l'anesth~sie, s'attachent davantage ~ appr~cier la r6activit& L'un d'entre eux est d6riv6 du score de Glasgow mais n'a 6t~ que peu utilis6 (Cook et Palma). I1 est souhaitable d'ajuster le niveau de s6dafion chaque situation clinique et en fonction d'un objec- tif precis. I1 n'y a cependant pas d'6tude permettant de pr6coniser un niveau appropri6 en fonction des indications. I1 est ~ noter que des ~tudes visant ~ ~va- luer des m~dicaments s6datifs se sont souvent fix~es comme objectif tin Ramsay de grade 2 fi 5 ou un score d e , Glasgow modifi6 ~ de 8 ~ 13 (extremes de 4 18). Cette modulation se propose d'~viter des sSda- tions inefficaces, ou ~ l'oppos6 (et sans doute plus souvent) excessives et exposant inutilement ~ des complications. Certaines de ces 6chelles ont ~t6 vali- d6es en r6animation (Ramsay). L'~chelle de Ramsay est d'emploi facile et peut 6tre utilis6e par les infir- mi&res ; son utilisation en routine parait raisonnable. N6anmoins il conviendrait d'en ~valuer l'utilit6 avant de la recommander. Les crit~res de jugement devraient prendre en compte la douleH, la facilit~ des soins, d'~ventuelles complications, les d61ais de r6veil et de sevrage du ventilateur, et la dur6e de s6jour.

Evaluation de la douleur

L'estimation habituelle de la douleH, bas6e sur des m6thodes tr6s subjectives, est rarement effectu6e, et contraste avec une approche objective habituelle- ment recherch6e en r~animation. Or, c'est dans les Unit6s de Soins Intensifs que la prescription d'antal- giques est la plus large et la moins contr616e en ter- mes d'efficacit6.

Chez l'adulte conscient, la douleH est 6valu6e par les 6chelles visuelles analogiques (EVA). Pour l'adulte inconscient ou s~dat6, le score d e , Prince Henry Pain Scale >~ (PHPS) a 6t6 pr6conis6 et semble le plus utilis6 dans les 6tudes cliniques r6centes.

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Prince Henry Pain Scale

Niveau

0

1

2

3

4

R6ponse

Pas de douleH ~ la toux

Douleur ~ la toux, non l'inspiration profonde

Douleur ~ l'inspiration profonde, non au repos

DouleH au repos, pas de demande d'antalgique

Douleur au repos, demande d'antalgique

Chez l'enfant, les 6chelles visuelles analogiques ne sont utilisables qu'au-del~ de l'~ge de 3 ans. Chez le nouveau-n~ et le nourrisson, on utilise des ~chelles comportementales (6chelle d'Amiel Tison, 6chelle Cheops) ou des 6chelles comportant l'appr6ciation des param~tres tels que ff6quence respiratoire, ff6- quence cardiaque, pression art6rielle, SaO2 transcu- tan6e (6chelle de Besan~on). Les modifications des param~tres physiologiques ne sont toutefois pas sp6- cifiques de la douleH.

Calmer la douleH des patients en r6animation est un objectif majeH. Fr~quente d'apr~s les t6moigna- ges, elle n'a jamais 6t6 6tudi6e, et rien ne permet d'assurer qu'elle soit reconnue correctement et trai- t6e efficacement. I1 parait souhaitable de lui oppo- ser un traitement appropri6 et pas d'induire un coma m6dicamenteux. L'exp6rience acquise chez l'enfant sugg~re que l'emploi d'6chelles permet une 6valua- tion sensible et sp6cifique, et l'optimisation du trai- tement de la douleur. L'application ~ l'adulte parait logique en utilisant des m6thodes appropri6es (EVA, PHPS). I1 est cependant n6cessaire : de valider ces outils, de mieux d6cfire le ph6nom~ne douloHeux en r6animation, d'6valuer le b~n6fice tir6 de l'utilisation en routine de ces 6chelles.

Monitorage de la curarisation L'adaptation posologique des curates peut etre

ais6ment obtenue par l'analyse des r@onses aux sti- mulations de nerfs periph6riques (contraction de l 'adducteH du pouce lors de la stimulation du nerf cubital, ou contraction de l'orbiculaire de l'ceil).

L'objectif d'une curarisation profonde est la dispa- rition de toute contraction des muscles respiratoires obtenue dos l'abolition de la contraction de l'orbicu- laire de l'ceil. Bien qu'il soit simple et peu on6reux, le monitorage de la curarisation est peu utilis6. En dehors des rares situations off la r6versibilit6 rapide de la curarisation est souhaitee, le monitorage continu semble difficile ~ proposer en routine, compte tenu de la s6v6rit6 habituelle des patients curaris6s, et de la lourdeur des soins qu'ils n6cessitent. I1 conviendrait

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XI e Conf6rence de Consensus en R6animation et M#decine d'Urgence - 451 -

d'6valuer l'int~ret de ce monitorage dans ]a prfiven- tion des complications de la curarisation prolong6e.

Sevrage de la sddation

Avec les benzodiaz@ines et les morphiniques, le sevrage progressif est recommand6 tant chez l'enfant que chez l'adulte.

Le flumazenil permet d'antagoniser les effets des benzodiaz@ines. Cependant, sa demi-vie d'~limina- tion courte expose, en cas d'administration unique au retour de l'effet de l'agoniste. Son int~r6t r6side darts la r6version de la s6dation par les benzodiaz6-

pines des traumatis~s crXniens pour faciliter leur sur- veillance clinique. En revanche, en cas d'hyper- tension intracrfinienne, l'ufilisation du flumaz6nil peut s'accompagner d'une chute de la pression de perfusion c6r6brale, imposant la surveillance de la pression intracrXnienne. Son utilisation lots de retard de r6veil apr6s administration prolong6e de benzo- diaz6pines peut 6tre d'une grande utilit6 diagnosti- que mais peut d6clencher un syndrome de sevrage. La posologie sugg6r6e est de 0,2 mg ~ 0,3 mg, ~ 6ven- tuellement renouveler apr~s une minute jusqu'~ -obtention de l'effet recherche, et sans d@asser 2 2,5 rag. Le cofit de ce mode de rfiversion est impor- tant et devra ~tre pris en consid6ration.

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R#an. Urg., 1993, 2 (4 bis), 437-451