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Risques infos est édité parl’Institut des Risques Majeurs

9 rue Lesdiguières38 000 Grenoble

Directeur de Publication :Henri de Choudens

Directeur de rédaction :François GiannoccaroRédacteur en chef :Laurence CassagneCharte Graphique :Sébastien Gominet

Réalisation :Imprimerie Fagnola

38 110 La Tour-du-Pin

Crédits photos :Sébastien Gominet

Alp’GéorisquesLIRIGM

RTMInstitut des Risques Majeurs

Géraldine StrappazzonLaurence CassagneMonsieur Brillaud

Avec le soutien financier du :- Conseil Général de l’Isère

Sites Internet :

- http://www.irma-grenoble.com/04risques/041risques-naturels/terrain.htm

- http://www.irma-grenoble.com/11sentiers/03pellafol/pellafol05.htm

- http://www.prim.net/citoyen/definition_risque_majeur/21_5_risq_mouvement.html

- http://www.bdmvt.net/

- http://www.bdcavite.net/

Sensibilité des communes de l’Isèreaux risques de glissement de terrain et de chutes de blocs

Source : Service de Restauration des Terrains en Montagne de l'Isère

Mise à jour : 01/05/2003

Critères de classement effectués à « dire d’expert » : - Sensibilité des terrains (altitude, pente, géologie, couvert végétal...) à l'aléa - Enjeux : zones d'urbanisation ou de développement économique ; axes de communication ; domaine skiable...- Historicité (sensibilité et incidence à partir des événements connus).

Classes : - Contrainte générale forte :phénomènes actifs ou potentiels généralisés, avec des phénomènes actifs pouvant parfois menacer des enjeux importants

- Contrainte générale modérée :1. phénomènes actifs ou potentiels localisés (protection facilement réalisable en cas d'enjeux importants)2. phénomènes plus généralisés mais enjeux menacés peu importants

- Absence de risques généralisés connus :phénomènes ponctuels ne pouvant être exclus du fait de particularités spécifiques des sites et/ou de circonstances météorologiques exceptionnelles.

Photo couverture : éboulementsur la RD 218 (Saint Quentinsur Isère) © S. Gominet (IRMa)

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Sommaire

4 Définitions et typologie des mouvementsde terrainS. Gominet - IRMa

6 La définition de l’aléa « mouvementde terrain » : une démarche d’expertD. Mazet-Brachet - Alp’Géorisques

7 Les études techniquesconduisant à préciser l’aléaL. Besson - MIRNat

10 La prise en compte du risque« mouvement de terrain » dans l’urbanismeet l’aménagement du territoireJ.P. Requillart - RTM

13 Les travaux de prévention actifs contreles glissements de terrain : stabilisationet drainage des zones instablesM. Gueffon - RTM

16 Les dispositifs de mesure pour lasurveillance des mouvements de terrainF. Lemaitre, J-C. Poussière, J-P. Duranthon, L. EffendiantzCETE Lyon

18 L’apport de la recherche dans l’évaluation de l’aléa « éboulement rocheux »D. Hantz, D. Jongmas - LIRIGM

20 La prise en compte du risque deglissement de terrain : l’exemple dela commune de Saint Etienne de CrosseyJ.M. Guillon - Mairie de St Etienne de Crossey

21 De l’approche d’un phénomène de grande ampleur et sa gestion jusqu’à l’expropriationC. Chatelard - Mairie Avignonet

23 Risque d’éboulement rocheux de grande ampleur : Les Ruines de SéchilienneG. Strappazzon - GRESEC

26 L’expérience du collège des six valléessitué en zone de mouvement de terrainG. Bouzon-Durand - Collège Bourg d’Oisans

Risques InfosN°16 - Juin 2005

Voici un nouveau numéro de Risques Infos entièrementconsacré à un phénomène naturel, ou plutôt à un typede phénomènes naturels : les mouvements de terrain.

En effet, depuis la chute brutale d’un rocher au glissementplastique lent d’une masse argileuse, les mouvementsde terrain ont une typologie très variée. Les régions demontagne, comme la nôtre, sont particulièrementconcernées par ces instabilités, préjudiciables auxaménagements et dont certaines présentent un risquehumain.

En raison de ses conséquences plus ou moins gravessur le plan économique, le risque de mouvement deterrain doit être pris en compte dans l’aménagement duterritoire et, en particulier, dans les projets d’urbanisme.Dans ce but, son étude conduit à l’élaboration de lacartographie de l’aléa, traduite ensuite en zonageréglementaire. Cette tâche régalienne n’exclut pasl’obligation des élus des collectivités locales d’intégrerles contraintes spécifiques au risque dans leurs documentsd’urbanisme.

La plupart de ces instabilités peuvent être traitées pardes travaux de protection, mais d’autres, désignéessous le nom de mouvements de grande ampleur, et pourlesquels il n’existe pas de traitement adapté, ne peuventêtre abordés que sous l’angle de la surveillance, avecpour seul objectif la détermination de seuils d’alerte etd’évacuation de la population exposée ; ce qui pose biendes problèmes aux élus de petites communes.

A la demande des services de l’Etat et des responsablespolitiques, c’est surtout le risque rocheux qui a retenul’attention des chercheurs, ces dernières années.Différents programmes, financés par le ministère encharge de l’Environnement, le Conseil général de l’Isèreet la Région Rhône-Alpes sont en cours pour améliorerla connaissance de cet aléa, particulièrement présentsur les versants de l’Y grenoblois. La suite opérationnellede ces projets devrait permettre de mieux répondre auxpréoccupations des élus de ces communes.

Liliane BessonAdministrateur de l’Institut des Risques Majeurs

édito

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Le terme de « mouvement de terrain »regroupe plusieurs types de phé-nomènes naturels très différents

les uns des autres de par leur nature,leur comportement mais aussi leursconséquences pour l’homme. Qu’ils’agisse de glissements de terrain,d’éboulements, d’affaissements ouencore de coulées boueuses, on estcependant toujours en présence dudéplacement gravitaire d’un volume deroche ou de sol déstabilisées sous l’effetde sollicitations naturelles (forte pluie,cycle gel/dégel, séisme, fonte des nei-ges…) ou anthropiques (terrassement,déboisement…). Ces différents phéno-mènes évoluent irrégulièrement dans letemps, passant de phases d’évolutionlentes à des phases d’accélération parfoisbrutale à l’origine de catastrophes plusou moins graves.

Dans les régions de montagne, c’estnotamment le cas des glissements deterrain et des chutes de pierres et deblocs (ou des éboulements) qui menacentde nombreuses zones urbanisées et denombreuses infrastructures routières,mettant ainsi en danger des vies humaines.La réalité de la menace est pourtantdifficile à faire admettre à la populationexposée. En effet, d’une part, la fré-quence d’apparition de phénomènescatastrophiques reste limitée à l’échellehumaine, et d’autre part, l’évolutiondes mouvements de terrain est rare-ment visible à l’œil nu (les secteursgénérateurs de risques comme les falaisesou les terrains argileux présentent sou-vent une apparente stabilité).

La vitesse de déplacement des diffé-rents phénomènes permet de distinguerdeux grands ensembles de mouve-ments de terrain : les mouvementslents et continus pour lesquels ladéformation est progressive, parfoisaccompagnée de rupture mais en principed’aucune accélération brutale. Il s’agitdes phénomènes d’affaissement, de tasse-ment, de fluage, des glissements et duretrait/gonflement de certains matériaux

argileux. Les mouvements rapideset discontinus, eux-mêmes divisés endeux groupes, selon le mode de propa-gation des matériaux : en masse lorsqu’ils’agit de matériaux rigides (roche), ou àl’état remanié quand il s’agit de matériauxmeuble (argile). Ce sont les effondre-ments, les chutes de pierres et de blocs,les éboulements, les coulées boueuses.

Quatre grandes familles de phénomènessont généralement retenues dans lesdifférents ouvrages qui traitent de cesujet :- Les chutes de pierres et de blocs et

les éboulements.- Les glissements et les coulées de

boue associées.- Les effondrements et les affaisse-

ments.- Les tassements par retrait.

Les chutes de pierres et deblocs et les éboulements Ce sont des phénomènes rapides etbrutaux qui affectent des roches rigideset fracturées tels que calcaire, grès,roches cristallines, etc. Dans le cas desroches sédimentaires, la stratificationaccroît le découpage de la roche etdonc les prédispositions à l’instabilité.

La phase de préparation de la chuted’éléments rocheux est longue et difficileà déceler (altération des joints de stra-tification, endommagement progressifdes roches qui conduit à l’ouverturelimitée des fractures, etc.). La phased’accélération qui va jusqu’à la ruptureest brève ce qui rend ces phénomènestrès difficilement prévisibles.

Les facteurs naturels favorisant leurdéclenchement sont nombreux.On peutciter par exemple les fortes variations detempératures (cycle gel/dégel), la crois-sance de la végétation ou au contrairesa disparition (feux de broussailles), lespressions hydrostatiques dues à lapluviométrie et à la fonte des neiges,les séismes…

Le volume total éboulé permet de dif-férencier les différents phénomènesentre eux : on parle de chutes depierres et de blocs lorsque ce volumeest inférieur à la centaine de m3,d’éboulement lorsqu’il est comprisentre quelques centaines de m3 etquelques centaines de milliers de m3, etd’éboulement en grande masse(ou écroulement) lorsqu’il est supé-rieur au million de m3.

Comme beaucoup d’autres départe-ments de montagne, l’Isère est forte-ment concerné par les phénomènes quenous venons de décrire. Deux secteurssont particulièrement sensibles :

- la vallée de l’Isère autour deGrenoble, constituée de communespéri-urbaines dominées par les falaisesdes massifs pré-alpins de laChartreuse et du Vercors. Les zonesurbanisées exposées à ces risquessont nombreuses comme nous le

4 Juin 2005 Risques Infos n°16

Définitions et typologie des mouvementsde terrain

Sébastien Gominet - Géographe à l’Institut des Risques Majeurs

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Destruction d’une maison à Lumbin (Isère) en janvier 2002par un bloc provenant de la falaise surplombant la commune

(versant Est du massif de la Chartreuse)

Eboulement sur la RN 85 à l’entrée du village de Laffrey (Isère)en janvier 2004

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rappellent les différentes études exis-tantes (plans de prévention desrisques naturels prévisibles notam-ment) et les quelques événementsdestructeurs passés ;

- une partie des communes du massifde l’Oisans situées notamment dansla vallée de la Romanche et dont denombreux secteurs urbanisés maisaussi des voies de communicationimportantes sont exposées (RN 91notamment).

Les glissements de terrainet les coulées de boueLes glissements de terrain sont desdéplacements lents (quelques millimètrespar an à quelques mètres par jour)d’une masse de terrain cohérente lelong d’une surface de rupture générale-ment courbe ou plane. Les coulées deboues résultent de l’évolution des glis-sements et prennent naissance dansleur partie aval. Ce sont des mouve-ments rapides d’une masse de maté-riaux remaniés.

L’extension des glissements de terrainest variable, allant du simple glissementde talus très localisé au mouvement degrande ampleur pouvant concernerl’ensemble d’un versant. Les profondeursdes surfaces de glissement varient ainside quelques mètres à plusieurs dizainesde mètres de profondeur. On parle deglissements superficiels dont les signesvisibles en surface sont souvent specta-culaires (fissures dans les murs deshabitations, bourrelets dans les champs,poteaux penchés…) et de glissementsprofonds qui présentent moins d’indi-ces observables et qui sont donc plusdifficilement détectables.

La nature géologique des terrains estun des principaux facteurs d’apparitionde ces phénomènes tout comme l’eauet la pente. Les matériaux affectés sonttrès variés (roches marneuses ou schis-teuses, formations tertiaires altérées,colluvions fines, moraines argileuses,etc.) mais globalement la présenced’argile en forte proportion est tou-jours un élément défavorable comptetenu de ses mauvaises caractéristiquesmécaniques. La saturation des terrainsen eau (présences de sources, fortesprécipitations, fonte des neiges brutales)joue aussi un rôle moteur dans ledéclenchement de ces phénomènes.

En Isère, les régions du Trièves et duBeaumont sont par exemple touchéespar des glissements de terrain de grandeampleur, profonds (plusieurs dizaines demètres de profondeur) et étendus (plu-sieurs dizaines d’hectares) en raison dela présence d’argiles lacustres, appelées« argiles litées », sur l’ensemble de leurterritoire. On peut citer pour mémoirele glissement de l’Harmalière du 7 mars1981 (commune de Sinard), le glisse-ment de la combe des Parajons en 1994(commune de la Salle en Beaumont) ouplus récemment le glissement du ver-sant de l'Adverseil du 16 janvier 2001 àCorps.

Les affaissements eteffondrements Les affaissements et les effondrementssont des mouvements gravitaires àcomposante essentiellement verticalequi résultent de l’évolution de cavitéssouterraines. Ils se manifestent par lefléchissement lent et progressif des ter-rains de couvertures dans le cas desaffaissements et par la rupture brutaledu toit d’une cavité dans le cas deseffondrements. Ces cavités peuventêtre préexistantes ou se développerprogressivement dans le sol. Elles ontdeux origines naturelles : la dissolutionde matériaux solubles (calcaire, gypse,sel), c’est le phénomène de karstifica-tion, et l’érosion interne dans des solshétérogènes à granulométrie étalée(entraînement des particules les plusfines par des circulations souterraines),c’est le phénomène de suffosion.

Il est important de préciser que la kars-tification peut être rapide dans lesterrains salins ou gypseux compte tenude leur très forte solubilité (apparition

possible de vides dangereux enquelques dizaines d’années) mais qu’elleest beaucoup plus lente dans les terrainscalcaires où elle n’évolue que peu àl’échelle humaine (massifs pré-alpins dela Chartreuse et du Vercors parexemple).

En terme de prévention, le difficileproblème de la recherche et de la loca-lisation de cavités souterraines malconnues ou dont l’existence est seule-ment soupçonnée se pose fréquem-ment. Le Ministère de l’Ecologie et duDéveloppement Durable a chargé leBRGM de constituer une base de don-nées nationale des cavités souterraines1

(recensement et localisation de cescavités à l’échelle départementale) quidoit permettre d’affiner leur connaissanceet de conserver la mémoire des carrièressouterraines, abandonnées pour laplupart. D’après le rapport du BRGMpour le département de l’Isère, « lesmouvements de population et la pres-sion foncière conduisent à construireou aménager dans des sites autrefoisdélaissés, car sous-cavés, mais dontl’historique n’est plus connu ».

Les tassements par retrait

Certains types d’argiles donnent lieu àdes variations de volume importantesen cas de sécheresse durable ou de lasuccession de plusieurs années défici-taires en eau. Ce phénomène deretrait/gonflement des sols, aggravé parla présence d’arbres ou d’arbustes auvoisinage des habitations, peut être àl’origine de dégâts très importants surles constructions (le coût des domma-ges est de l’ordre du milliard de francspar an depuis 1989). Il est cependantsans danger pour l’homme comptetenu de la lenteur et de la faible ampli-tude des déformations occasionnées. ■

1. www.bdcavite.net

5Juin 2005Risques Infos n°16

Niche d’arrachement du glissement de terrain de l’Harmalière sur lacommune de Sinard (région du Trièves). 250 000 m3 de matériaux

ont glissé en 1981. Le glissement est toujours actif aujourd’hui.

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Glissement plan sur la RD 28 sur la commune de Merlas (Isère)à la suite des fortes précipitations du 6 juin 2002

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6 Juin 2005 Risques Infos n°16

La définition de l’aléa « mouvement deterrain » : une démarche d’expert

Didier Mazet-Brachet, Ingénieur Géotechnicien – Gérant du bureau d’études Alp’Géorisques àDomène – Enseignant à Polytech’Grenoble – Département Géotechnique

La cartographie de l'aléa « mouve-ments de terrain », c'est-à-dire dela fréquence et/ou de l'intensité

d'un phénomène donné, est nécessairedans le cadre de l'élaboration des PLU1

(volet risques naturels) ou dans celledes PPR2 multirisques. Dans les deuxcas, il s'agit d'une prise en compte desrisques naturels dans les documentsd'urbanisme pour assurer la sécuritédes personnes et des biens vis-à-vis dece phénomène naturel particulier.

La principale difficulté réside dans lefait que le terme « mouvements de ter-rain » regroupe une famille de phéno-mènes fort différents dans leurs origi-nes, leurs mécanismes et leurs effets.(cf. article de Sébastien Gominet).L'approche est donc logiquementconditionnée par les types de phéno-mènes en présence.

L'élaboration de la carte des aléas estun travail de technicien ou d'ingénieurqui nécessite de multiples compéten-ces. Qu'il s'agisse d'un géologue, d'ungéographe ou d'un géotechnicien, lechargé d'études, outre ses capacitéstechniques propres, doit aussi êtrecapable d'analyser une problématiquecomplexe, avoir une bonne capacité desynthèse et une rigueur intellectuellesans faille. En effet, la plupart du temps,la cartographie de l'aléa est établie à «dire d'expert », c'est-à-dire de façonqualitative, sans avoir recours à desreconnaissances ou des calculs complé-mentaires.

La démarche d'élaboration des cartesd'aléas est cadrée par les guidesméthodologiques rédigés par leMinistère de l'Ecologie et duDéveloppement Durable. Ces guidesfixent la trame générale que le techni-cien doit toutefois adapter au contextelocal.

La clef de la qualité de la carte des aléasest indéniablement la connaissance duterritoire acquise par le chargé d'étude.A cette fin, il se doit d'exploiter l'en-semble de l'information à sa disposi-tion. La carte géologique3 est la premiè-re étape. Ce document permet d'ap-préhender a priori les phénomènespossibles en fonction des horizons géo-logiques en présence (par exemple laprésence de formations de Trias attire-ra l'attention sur une possible présencede gypse, donc de cavités souterraines).L'exploitation des photographiesaériennes est également primordiale,de préférence sur plusieurs missionssuccessives. Le terrain conserve plusou moins bien les stigmates des défor-mations superficielles : les photogra-phies aériennes permettent souvent l'i-dentification de phénomènes aujourd'-hui effacés par le temps et par l'hom-me.

Le passé est souvent la clef de l'avenir.Sur ce constat, l'exploitation de lamémoire collective est très enrichis-sante. L'élaboration de la carte desaléas implique donc de recenser defaçon la plus exhaustive possible lesdésordres passés. Le chargé d'étudedevra pour cela consulter les archivesadministratives, la bibliographie, les étu-des antérieures, mais également faireappel à la connaissance des élus,comme celle des habitants.

Mais l'information la plus complète,c'est sur le terrain que l'expert doitl'acquérir par la lecture du paysage,dans une analyse géomorphologique. Saquête doit être systématique et rigou-reuse. Ce n'est qu'à l'issue d'un par-cours détaillé du territoire et d'obser-

vations pertinentes qu'il garantira laqualité de ses observations.

A ce stade de la collecte de l'informa-tion, l'expert ne dispose que d'unrecensement des phénomènes : tellezone a connu un glissement de terraindans le passé, tel bloc s'est arrêté dansce champ, telle parcelle a été le lieud'un effondrement de cavité souterrai-ne, telle autre est située au-dessusd'une exploitation minière abandon-née.

Son travail consiste donc ensuite à tra-duire une connaissance ponctuelle dansle temps et dans l'espace en une repré-sentation cartographique généraliséede l'aléa. L'expert porte alors sur lacarte des limites d'aléas homogènes.L'usage veut que l'aléa soit décrit entrois niveaux : fort, moyen et faible. Lesgrilles d'aléas doivent accompagner lacarte. Elles permettent la compréhen-sion par tous de la démarche et garan-tissent la rigueur dans la transcriptiondes phénomènes en aléas.

Dans la nomenclature actuelle, l'aléafort correspond à des terrains qui ontconnu dans le passé, ou qui connaissentactuellement, des manifestations plusou moins violentes, ou encore qui pré-sentent des caractéristiques géolo-giques ou de pentes analogues à deszones affectées. La probabilité d'occur-rence d'un phénomène analogue estforte. L'aléa moyen correspond à deszones non affectées mais sensibles ousoumises à des phénomènes peu actifs

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Chute de blocs - rocher de Comboire - Commune de Claix (38)

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Glissement de terrain du MollardCommune du Sappey-en-Chartreuse (38)

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ou peu intenses. L'aléa faible cor-respond à des terrains potentiellementexposés. Cette potentialité traduitdonc une sensibilité géologique oumorphologique (ou les deux) en fonc-tion de phénomènes considérée. L'aléafaible est en général le plus déconcer-tant pour l'élu ou le citoyen à cause deson caractère apparemment arbitraireet par son extension géographique. Onopposera au technicien : « il ne s'estjamais rien passé sur ce terrain » ou «ce terrain ne glisse pas ». C'est juste-ment la signification de cet aléa faible. Ilne se passera a priori rien tant que lesconditions initiales n'auront pas changé(rejet d'eau dans un terrain sensible,terrassement, surcharge, etc.), ou endehors de situation exceptionnelle(fortes précipitations, chute d'un blocde taille inhabituelle dont la propaga-tion sera plus longue, effondrementd'un toit d'une cavité souterraine,retrait-gonflement des argiles lorsd'une sécheresse exceptionnelle, etc.).Ces terrains demandent donc uneattention particulière avant tout amé-nagement.

La cartographie de l'aléa établie seloncette méthode qualitative présente denombreux intérêts. La démarche estrapide et exhaustive à l'échelle de lacommune et son coût est finalementmodeste au regard de l'informationfournie. Toutefois, s'il est souvent aisé

de délimiter les zones d'aléas forts etles zones d'aléas faibles, puis de les tra-duire de façon réglementaire (cf. articlede Jean-Pierre Requillart), les zones d'a-léa moyen sont en revanche plus déli-cates à gérer. L'aléa y est jugé significa-tif et la prudence nous inciterait à y évi-ter toute nouvelle implantation. Maissous réserve d'adaptations plus oumoins lourdes des projets, ces terrainspourraient être aménagés. La carte desaléas trouve alors ses limites. Sonapproche qualitative ne permet plus detrancher sur la faisabilité réelle etencore moins sur les techniques à envi-

sager pour garantir tel ou tel aménage-ment. Des investigations complémen-taires (sondages, trajectographie,reconnaissance de galeries, modélisa-tion géotechnique, trajectographie,etc. : cf. article de Liliane Besson) doiventêtre mises en œuvre pour assurer lasécurité de chaque projet et de sonenvironnement. ■

1 Plan Local d'Urbanisme

2 Plan de Prévention des Risques naturels prévisibles

3 Cartes détaillées au 1/50 000 éditées par le BRGM(Bureau de Recherches Géologiques et Minières)

7Juin 2005Risques Infos n°16

Les études techniques conduisantà préciser l’aléa

Liliane Besson - Ancien chef de la Mission Inter-services des Risques Naturels del’Isère (MIRNat)

L’étude des phénomènes naturelsn’est pas une science exacte. Elleprocède, en grande partie, d’une

démarche d’identification et de qualifi-cation, dite « d’expert » (cf. article deDidier Mazet-Brachet), menée à partird’une approche naturaliste qui s’appuieprincipalement sur l’analyse qualitativedu terrain et doit aboutir à l’élabora-tion de la carte des aléas.

Pour des phénomènes cartographiéstels que les mouvements de terraindont la typologie est variée (cf. articlede Sébastien Gominet), on est démunidevant les nombreux facteurs physiquesmis en jeu chacun interférant avec lesautres pour multiplier les cas d’instabi-lités à l’infini. A cette difficulté s’ajoutela méconnaissance de certains facteursspécifiques comme par exemple l’épais-seur de la masse instable (difficulté

d’appréhender la 3e dimension en pro-fondeur), les pressions interstitielles, etc.Cette appréciation qualitative conduitinévitablement à des incertitudes.

Cette approche qualitative de l’aléa estcependant suffisante pour afficher lescontraintes réglementaires d’interdic-tion ou de prescriptions de réalisation,dans la mesure où l’expert défini claire-ment sa méthode.

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Extrait d’une carte d’aléas (volontairement non localisée)

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En revanche, elle est insuffisante pouradapter un projet à la nature de l’aléadont l’étude peut se décomposer endeux temps : d’une part l’identification deses caractéristiques physiques, leur hié-rarchisation et leur délimitation, d’autrepart la détermination du comportementd’un objet (construction, aménage-ment…) confronté à cet aléa.

Il est alors nécessaire d’étudier quanti-tativement l’aléa et de connaître le pro-jet (nature, emprise, dimensions…)pour réaliser une bonne adaptation.C’est donc seulement à cette étapeque le recours aux études quantitativesspécifiques est lancé.

Ces études sont bien entendu spéci-fiques de l’aléa à préciser.

Les études géotechniques

La géotechnique inclut l’ensemble desactivités de reconnaissance d’un siteauxquelles il y a lieu de recourir pré-alablement à l’exécution de travaux ouà l’édification d’un ouvrage. Elle réunitdonc des études portant sur la géologiedu terrain (nature, structure, ainsi queperméabilité et régime des eaux sou-terraines) et les caractéristiques méca-niques des sols et des roches qui s’ytrouvent éventuellement présentes.Elle doit permettre de prévoir quellesera l’interaction entre ces terrains etles ouvrages qui leur seront liés.

Il arrive encore que de telles étudessoient commandées par un maîtred’ouvrage uniquement pour son assu-rance dommages ouvrage (DO). Danscet esprit, il s’agit simplement de rem-plir une formalité administrative et nond’optimiser le projet. La commande del’étude est donc faite prématurément,alors que le projet n’est pas suffisam-ment défini : en cas de désordre, le géo-technicien qui est intervenu très (trop)en amont s’en voit alors souvent attri-buer la responsabilité.

Afin de limiter ce dévoiement et debien préciser leurs responsabilités, lesgéotechniciens et en particulier lesmembres de l’Union syndicale géotech-nique (USG), ont proposé une classifi-cation des missions géotechniquestypes et surtout l’enchaînement et laprogression des différentes phases,dont chacune correspond à une investi-gation complémentaire ou supplémen-taire de la précédente, depuis l’étudepréliminaire de faisabilité jusqu’au suivigéotechnique d’exécution. Ces propo-sitions ont été validées après enquête,par la commission de normalisation, enjuin 2000, dans la norme NF P.94-500qui comprend, outre la classification, unglossaire pour définir sans ambiguïté levocabulaire spécifique.

Il existe aussi une mission G 5 (dia-gnostic sans et après sinistre) pour lesconstructions existantes.

Dans le cas d’un projet d’aménagementsoumis à des contraintes réglementairesissues des documents de zonage typePPR, selon différents critères dontl’importance du projet, on distingueprincipalement deux grands groupesd’études géotechniques demandées :les études de stabilité de versant et lesétudes « de sols », plus légères, quidéterminent l’adaptation du projet auterrain, en particulier le niveau et leprincipe des fondations. Ces étudesentrent essentiellement dans les missionsG 1-1 (faisabilité) et G 1-2 (détermina-tion des caractéristiques de terrain àprendre en compte avec éventuelle-ment un calcul de prédimensionnement),avec le recours à des outils de recon-naissance (G 0).

Il s’agit d’identifier la couche de sol laplus apte à supporter la surcharged’une construction, c’est-à-dire dedéterminer tout d’abord la contrainte(l’effort) admissible par le sol, puis lacontrainte transmise au sol par lesfondations de l’ouvrage. Pour la déter-mination de la seconde grandeur, oncomprend que le géotechnicien aitbesoin de connaître le projet (nature etdimensions). Il est alors amené àproposer soit des semelles élargiespour diminuer la contrainte exercéesur le sol, soit à rechercher un meilleurniveau porteur plus en profondeur.Cette étude ponctuelle du sol ne doitcependant pas s’affranchir du contextegéologique général du site dans lequelse situe la parcelle à construire.

Intérêt des étudesgéotechniques préalables àtout projet

Les versants des montagnes évoluentplus ou moins rapidement. Ils sontdonc presque tous affectés de mouve-ments. En montagne, les zones stablesdestinées à la construction deviennentde plus en plus rares.Très souvent, leszones urbanisables définies dans lesdocuments d’urbanisme sont situéesen pied de versant, sur des pentes plusou moins fortes. Ces pentes présententsouvent des structures géologiques à« pièges ».

8 Juin 2005 Risques Infos n°16

Progression des missions Types Etudes et/ou suivi CommentairesExécution de sondages

Outils essais et mesure sur placede reconnaissance G 0 sans étude ni conseil

G 1-1 Etude préliminaire de faisabilité(dont enquête documentaire, rapportd’étude préliminaire avec principes généraux

Faisabilité G 1 d’adaptation de l’ourage au terrain G 0 éventuelG 1-2 Etude faisabilité(dont l’hypothèse géotechniques et principesde construction, terrassements, soutènementsfondations, risques de déformations desterrains, dispositions générales vis-à-vis des

Avant-projet nappes et des avoisinants) G 0 nécessaireG 1-3 Etude de prédimensionnement G 0 nécessaire

Projet G 2 Etude de projet géotechnique G 0 spécifique si nécessaireExécution G 3 Etude géotechnique d’exécution G 0 complémentaire

si nécessaireG 4 Suivi géotechnique d’exécution

G 5-1 Etude approfondie d’un élémentDiagnostic G 5 géotechnique spécifique sans sinistre

G 5-2 Etude approfondie d’un élémentgéotechnique après sinistre

MISSIONS GEOTECHNIQUES TYPE (G) pour un projet de construction

Missions géotechniques par type (G)Source : commission de normalisation

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9Juin 2005Risques Infos n°16

La rive gauche de l’Isère dans leGrésivaudan, par exemple, recèle desvices cachés du sol. Le versant descollines du balcon de Belledonneplonge dans la vallée de l’Isère par despentes assez raides où le rocher estparfois affleurant. Il s’agit d’un calcairemarneux (du Jurassique moyen) dont lependage est dirigé vers la vallée(pendage conforme). Or, le toit durocher, presque toujours caché par lacouverture de produits résiduelsd’altération riches en argile, n’est pasparallèle à la pente du versant. Destalwegs fossiles, sculptés lors de lafonte des glaciers et entièrementcolmatés par cette couverture d’alté-ration, déterminent des surépaisseursde produits argileux entièrementdissimulées. Sans reconnaissances pré-alables, le constructeur a la mauvaisesurprise de les découvrir au momentdes terrassements. De plus, la comberocheuse fossile concentre les écoule-ments souterrains fréquents entre lacouverture et le rocher. On est doncen présence d’un talus d’argile plaquésur une pente, siège de circulation

d’eau. Point n’est besoin d’être spécia-liste pour deviner ce qui peut se passer.Lorsque le glissement se produit, samaîtrise devient délicate et entraîne unimportant surcoût pour le projet.

Il est donc presque toujours nécessaire,et en tout cas bénéfique,de faire réaliserune étude géotechnique préalablementà tout projet.

Les études de risquede chutes de blocset d’éboulements rocheux

Les chutes de blocs et éboulementsrocheux mettent en jeu des mécanis-mes complexes caractérisés par destransferts d’énergie entre les blocs etle substratum, mais aussi entre les blocseux-mêmes au sein de la masse enmouvement. Il est donc intéressantd’évaluer les conditions probables depropagation des blocs ou des masseséboulées. Cette évaluation constituel’un des volets de l’étude de risques liésaux éboulements rocheux. Les simula-tions effectuées au moyen de logiciels

de trajectographies (modélisation),constituent un outil important d’éva-luation de ces conditions. On distinguedifférents types de modélisation prenanten compte :- le bloc isolé, à topographie bi-outridimensionnelle,- les éboulements en grande masse.

La première phase de l’étude, que l’onpeut appeler la caractérisation durisque du site étudié, est commune àtoutes les modélisations. Il s’agit d’uneétude générale qui intègre les contextestopographique, géologique, hydrogéo-logique, géomécanique et les mécanis-mes d’évolution. Elle est aussi communeà la cartographie qualitative (à dired’expert) de l’aléa chutes de blocs àobjectif PPR et comprend :

- l’observation de la zone de départ desblocs, pour apprécier, d’une part lesvolumes mobilisables en fonction de lamaille des réseaux de fractures et del’état d’ouverture de ces fractures,d’autre part la capacité de la roche à sefractionner, voire se pulvériser, lors desdifférents rebonds ;

Les logiciels de trajectographie sontdes outils d’aide à la décision de l’ex-pert. L’exemple suivant en montre lanécessité.

Le site de Comboire se trouve à 3 kmau sud-ouest de Grenoble, en rivegauche du Drac. Situé au pied du flancoriental du massif du Vercors, ilcorrespond à un petit chaînon calcaireculminant à 530 m alors que la plaineest à 240 m d’altitude en moyenne(ancienne terrasse alluviale du Drac).Le versant Est de ce chaînon estconstitué, depuis le sommet jusqu’à laplaine, d’une barre calcaire, d’une sériede petits bancs de calcaires marneuxet de marnes puis d’éboulis sableux etgraveleux recouverts d’une forêt depetits feuillus (diamètre : 20 cm).

Un éboulement de 1500 m3, sur unedénivelée de 240 m (cotes 500 – 260),s’est produit le 6 février 1995 vers 21 h.Les blocs sont arrivés jusqu’à la plaine.

L’essentiel des blocs (1 à 10 m3) s’estarrêté au début de la prairie, sur les15 premiers mètres, mais le plus gros(60 m3) a parcouru près d’unecinquantaine de mètres.

La distance parcourue par le plus grosbloc sur terrain plat et mou, montre ladifficulté pour l’expert d’estimer ladistance d’arrêt ; dans le cadre de l’é-laboration d’un périmètre de risqueR.111-3, elle avait été légèrementsous-estimée en raison de la présenced’un substrat absorbant et horizontal àl’échelle du site (le bloc s’étant arrêtéjuste sur la limite).

Dans le cadre d’un programme derecherche italo-franco-suisse (Interreg),abouti en 2001, une rétro-analyse aété menée par trois bureaux d’études,utilisant leur propre logiciel de trajec-tographie. Les méthodes donnent desrésultats qui recouvrent plus de 90 %des observations de terrain (localisa-tion des blocs). Les distances maxima-les trouvées par les calculs ont été de40 à 70 m du pied du versant.

L’éboulement de Comboire (Echirolles, 38)

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Les données informatives résul-tant d’une part de l’analyse desaléas (tant « naturels » que, le cas

échéant, « corrigés » selon l’efficacitéestimée des ouvrages de protection) etd’autre part de celle de la vulnérabilitédes enjeux existants ou projetésdoivent être prises en compte :

- soit réglementairement par le biaisd’un Plan de Prévention des Risquesnaturels prévisibles (PPR) dont laresponsabilité de l’élaboration et de lamise en œuvre incombe à l’Etat. Unefois approuvé (après enquête publiqueet diverses consultations), le PPR vautservitude d’utilité publique ; annexé auPlan Local d’Urbanisme (PLU), ils’impose donc à ce dernier. Toutemodification de son contenu passe parune révision, effectuée selon une pro-cédure analogue à celle de l’approba-tion.

- soit par intégration directe dans lesdocuments d’urbanisme locaux àl’occasion de leur élaboration ou deleur révision (PLU, carte communale)et ceci sous la responsabilité premièrede la commune.

En l’absence de tels documents ou encas d’acquisition de nouvelles connais-sances dont les conséquences seraientplus sévères, le risque, dès qu’il estconnu, doit être pris en compte, le plussouvent au coup par coup, notammentlors des instructions ADS1 (CU2, PC3,etc.) par application stricte de l’articleR 111.2 du Code de l’Urbanisme.

La traduction des études et concerta-tions menées va se concrétiser :

- par une délimitation de zonesexposées plus ou moins gravement auxdifférents risques (dites aussi « zones

de danger ») et de zones non directe-ment exposées mais sensibles (ditesaussi « zones de précaution »),

- par un règlement qui devra être à lafois conforme à la réglementationappliquée et adapté tant à la spécificitéde chacune des zones décrites qu’àcelle du ou des risques associés.

Le PPR apparaît comme un outil trèspuissant puisque l’article L 562.1 duCode de l’Environnement donne lapossibilité, dans les zones de danger etde précaution, non seulement, commepour un document d’urbanisme, d’in-terdire ou de réglementer les cons-tructions, installations et exploitations(agricoles, forestières, artisanales, com-merciales et industrielles) nouvelles

La prise en compte du risque“ mouvement de terrain ” dansl’urbanisme et l’aménagement du territoire

Jean-Pierre Requillart – Chef du service RTM de l’Isère

10 Juin 2005 Risques Infos n°16

- l’observation du versant, pour appré-cier la nature du sol (rocher, éboulis,terre, etc.) et la densité du couvertvégétal, pour déterminer les facteursfavorables ou défavorables à l’absorptiond’énergie lors des différents rebondsdes blocs ;

- l’observation de la zone supposéed’arrêt des trajectoires par repérage-pointage des blocs laissés en place etrecherche d’information auprès deshabitants pour dater les événements,dans la mesure du possible.

La plupart des modèles ont été élabo-rés à partir des années 1985, mais lesméthodes de calcul sont toujours endéveloppement. Bien que calés surl’étude détaillée d’événements passés(rétro-analyse), ils sont destinés à laprévision dans l’espace. Or, peud’éboulements se sont produits dans

des sites préalablement modélisés pourvérifier la bonne correspondance entrele calcul et l’événement. Ces méthodesrestent néanmoins très intéressantespour préciser les observations deterrain et doivent être utilisées commeun outil complémentaire d’aide à ladécision pour l’expert.

Le phénomène naturel étant trèscomplexe, les méthodes de calcul,toujours simplificatrices par rapport àla réalité, conduisent à être prudentdans l’interprétation des résultats. Onpeut observer, en effet, même en utili-sant des modélisations confirmées,des trajectoires réelles de blocs dites« aberrantes » par rapport aux simula-tions. Cette distorsion peut provenirpar exemple de la forme particulière deblocs en forme de plaque,qui se dressentsur la tranche et peuvent rouler trèsobliquement par rapport à la ligne de

plus grande pente, en s’affranchissantdu relief, ou du durcissement du sol parle gel, provoquant une diminution de sacapacité à absorber l’énergie développée.Ces deux cas conduisent à observerdes impacts dans des secteurs supposésa priori non exposés.

Enfin, il est rappelé que les trajectogra-phies doivent être considérées commedes outils d’aide à la décision et noncomme un critère absolu, tant pourl’élaboration des zonages de risques(PPR) que pour l’implantation desouvrages de protection. ■

Extrait du livre : Liliane Besson, Les risquesnaturels : connaissance pratique, gestion admi-nistrative. Ed.Techni.Cités (coll. Dossiersd'Experts Techniques - réf. : DET 442) àparaître en 2005

1 ADS : Application du droit des sols2 CU : Certificat d’Urbanisme3 PC : Permis de Construire

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11Juin 2005Risques Infos n°16

mais encore de leur imposer des dispo-sitions constructives (dont la mise enœuvre relève alors de la seuleresponsabilité des maîtres d’ouvrage etautres participants à l’acte de construc-tion) et de réglementer leurs conditionsd’utilisation ou d’exploitation ; il permetégalement d’y prescrire, vis-à-vis del’existant, des mesures relatives àl’aménagement, l’utilisation ou l’exploi-tation des constructions, ouvrages etespaces mis en culture ou plantés ; ilpermet enfin d’y définir des mesures deprévention, de protection et de sauve-garde s’imposant aux collectivités dansle cadre de leurs compétences ainsique celles qui peuvent incomber auxparticuliers.

Il ressort qu’un tel outil doit être utiliséà bon escient, en tenant compte ducontexte départemental (notammentniveau de la dangerosité, degré depression foncière, état des connaissances)ainsi que des moyens disponibles et dela relative lourdeur de la procédured’approbation puis de révision.

Par ailleurs, il apparaît généralementsouhaitable que, sur un même territoire,l’ensemble des risques naturels (y com-pris la totalité des inondations) soittraité simultanément (ou parallèlement,en cas d’échelle de territoire différente)car très souvent le non traité s’inter-prète dans la gestion ultérieure desdossiers par du non existant ou du nonpossible, pouvant être à l’origine d’orien-tations peu satisfaisantes sur le plan del’aménagement du territoire ainsi quede situations difficiles à gérer un jourou l’autre, tant par les intéressés quepar la collectivité nationale ou territo-riale.

Dans ce cas, l’élaboration de docu-ments informatifs (cartes d’aléas, voireprojets de PPR faisant l’objet d’unporter à connaissance préfectoral),permettant, tout en sensibilisant lesacteurs locaux, de gérer au mieux uneconnaissance initiale insuffisante et des’adapter plus facilement à l’évolution decelle-ci, apparaît comme une réponsepossible, notamment pour les risques

de type montagne, du fait souvent deleur multiplicité et de leur cloisonne-ment sur le territoire d’une mêmecommune ainsi que de leur relativespécificité et/ou complexité.

C’est ainsi qu’en Isère, à partir d’uneréflexion menée en 2004 par laMIRNat, en vue de hiérarchiser lesbesoins des communes en documentsréglementaires et/ou informatifs,Monsieur le Préfet a arrêté un pro-gramme d'actions prioritaires pourl’Etat en matière de zonage réglemen-taire du risque (PPR) ; par ailleurs, leprogramme de cartographie des aléasde versants, sous maîtrise d’ouvragecommunale, devrait se poursuivreavec le soutien financier du ConseilGénéral, en permettant la prise encompte directe des risques dans lesdocuments d’urbanisme (PLU) et lorsdes instructions relatives au droit dessols (CU,PC).

En se limitant au volet relatif aux seulsrisques de type montagne (avalan-ches, chutes de blocs, glissements deterrain, crues des torrents), quiconcernent environ 400 communessur les 533 du département, à un niveaufort ou modéré, l’objectif qui a été fixéest de 115 PPR approuvés. A noter que29 communes sont dotées actuelle-ment de PPR multirisques approuvés,133 de documents informatifs sousforme soit de projets de PPR portés àconnaissance (53) soit de cartes d’aléas(80, une trentaine étant par ailleurs encours d’élaboration) et que des docu-ments plus anciens, antérieurs à la LoiBarnier, peuvent également êtreutilisés, avec certaines précautionstoutefois.

Le zonage va donc transcrire les étudesmenées (aléas, enjeux et vulnérabilité,fiabilité des ouvrages de protection)en terme d’interdictions, de prescrip-tions et de recommandations. Pour laplupart des risques de type montagnequi présentent des caractères trèsspécifiques, différents de ceux desinondations de plaine, (notamment surles plans de l’extension possible, de la

soudaineté, de la violence, de la prévisi-bilité privilégiant le dire d’expert, de laprédictibilité impossible ou difficile etsouvent alors incompatible avec la miseen place d’un système d’alerte), onassiste, suite à l’évolution de la régle-mentation et de la jurisprudence, à undurcissement du zonage. Cela est dû àune prise en compte de l’impact desaléas non pas seulement, commeantérieurement, sur la vulnérabilité desbiens mais plutôt sur la sécurité despersonnes : en matière de chutes depierres et de blocs par exemple, l’aléafaible tend à être remplacé par de l’aléamoyen, dans la mesure où ce risquepeut être fatal dans les espaces de viesitués à proximité d’habitations dontles structures peuvent être facilementrenforcées.

Par ailleurs, comme en matière d’inon-dations, il est fait preuve d’une grandeprudence dans la prise en compte durôle des ouvrages de protection : eneffet, leur efficacité ne peut êtregarantie à long terme, notamment sileur maintenance et leur gestion nesont pas assurées par un maître d’ou-vrage pérenne et clairement désigné ouen cas de survenance d’un événementrare dépassant l’aléa de référence. Laprésence de tels dispositifs ne doitdonc pas conduire à augmenter lavulnérabilité mais plutôt à réduirel’exposition des enjeux concernés ;aussi, sauf absence de solutions alterna-tives à rechercher si possible au niveauintercommunal, on ne protège plus deszones naturelles exposées à un aléamoyen (et a fortiori fort) pour lesouvrir à l’urbanisation. En cas d’excep-tion ou pour protéger des zones déjàpartiellement bâties, on attache unegrande importance au bon dimension-nement des ouvrages, à leur fiabilitédans le temps et à la désignation dumaître d’ouvrage qui sera responsablede leur construction puis de leurentretien ; ceci amène, par exemple, àprivilégier en matière de chutes deblocs les ouvrages terrassés (merlons)plutôt que des filets disposés sur unseul rang.

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Ce zonage (dont les limites s'appuientglobalement sur celles des zones d'aléas)va définir :

- une zone inconstructible4, appeléezone rouge. Dans cette zone, certainsaménagements, tels que les ouvragesde protection ou les infrastructurespubliques qui n'aggravent pas l'aléa,peuvent cependant être autorisés.

- une zone de projet possible sousmaîtrise collective, appelée zone"violette". Elle est susceptible de sediviser en deux zones :

• une première « inconstructible4 enl’état » (= zone rouge) destinée soità rester inconstructible après réali-sation d’études qui auraient révéléun risque plus important ou mon-tré l’intérêt de ne pas aménagercertains secteurs sensibles pourpréserver des orientations futuresd’intérêt général ; soit à devenirconstructible après réalisationd’études complémentaires par unmaître d’ouvrage collectif privé oupublic, et/ou de travaux de protec-tion (une procédure est alorsnécessaire).

• une deuxième « constructible4 avecprescriptions détaillées des travauxà réaliser sous maîtrise d’ouvragecollective ». L’ouverture à l’urbani-sation y sera autorisée après laréalisation des travaux prescrits.

- une zone constructible4 sousconditions de conception, de réalisa-tion d'utilisation et d'entretien defaçon à ne pas aggraver l'aléa et nepas accroître la vulnérabilité des bienset des personnes, appelée zone bleue.Les règles correspondantes sont appli-cables à l'échelle de la parcelle.

Dans les zones blanches (zones d'aléanégligeable), les projets doivent êtreréalisés dans le respect des réglemen-tations et des règles de l'art.Cependant des phénomènes au delà del'événement de référence ou provo-qués par la modification, la dégradationou la disparition d'éléments protec-teurs généralement naturels (parexemple, la forêt là où elle joue un rôlede protection) ne peuvent être exclus.

En outre, des zones sans aléa peuvent setrouver réglementées car définiescomme zones d'aggravation du risque(par exemple, zones situées à l'amont deglissements de terrain dont l'activationou la réactivation est susceptible de semanifester en cas de modification desconditions de circulation des eauxpluviales et/ou usées).

D'autres peuvent être également décla-rées inconstructibles pour permettre laréalisation d'équipements de protection.

A l’appui de cette cartographie, va êtreassocié soit le rappel de principes géné-raux en matière de règles d’urbanismedans le cas de documents informatifs,soit un règlement plus ou moins détaillédans le cas d’un PPR (cf. ci-dessus).L’élaboration de ce dernier va néces-siter, pour le volet mouvements deterrain, de prêter une attention par-ticulière :

- en ce qui concerne les projets nou-veaux, en matière de glissements de ter-rains, à la définition des modalités degestion des eaux (usées, pluviales, dedrainage) et de réalisation des étudesgéotechniques nécessaires à une bonneadaptation des constructions et des ter-rassements aux caractéristiques des ter-rains ; en l’absence de mise à disposition,lors de l’élaboration du PPR, d’étudesd’aptitude des sols à l’assainissementindividuel, le règlement ne pourra qu’in-terdire tout recours à l’infiltration dansces secteurs particulièrement sensibles,

- en ce qui concerne les mesures surl’existant, à l’exécution de vérifications,dans les zones sensibles aux glissements,portant sur l’étanchéité des réseaux ousur le bon fonctionnement des disposi-tifs d’infiltration existants ainsi que,d’une façon générale, aux conditions demise en sécurité des habitants et donc àla préconisation d’études de dangeravec, selon les cas (ERP d’une certaineimportance en particulier), la mise enœuvre de plans de mise en sécurité,

- au titre des mesures générales de sau-vegarde, à la mise en place de divers sui-vis (phénomènes particuliers, sitesconnus pour leur sensibilité, état desouvrages de protection en particulier enmatière de chutes de blocs (filets, mer-lons), à la réalisation d’études particuliè-res de connaissance de risques et trèssouvent, compte tenu d’un certainretard actuellement en ce domaine, d’é-tudes de gestion des eaux de surface.

12 Juin 2005 Risques Infos n°16

Niveau d'aléas Contraintes correspondantes

Aléas forts Zone rouge inconstructible(sauf travaux de protection, infrastructures qui n'aggravent pas l'aléa)

Aléas moyens Zone rouge inconstructibleOUZone violette constructible sous conditions :les prescriptions dépassant le cadre de la parcelle et relevant d'un maître d'ouvrage collectif (privé ou public)OUCas particulier en zone bleue("dent creuse", etc.) : étude spécifique obligatoire lors de la réalisation du projet

Aléas faibles Zone bleue constructible sous conditions :les prescriptions ne dépassant pas le cadre de la parcelleRespect :- des règles d'urbanisme- des règles de construction sous la responsabilité du maître

d'ouvrage- des règles d'utilisation éventuellement

Le tableau résume, pour les aléas de versant, les correspondances entre niveaux d'aléa etzonage, les alternatives concernant essentiellement le devenir des zones d’aléas moyensaux vues des projets de développement locaux.

4 Les termes inconstructible et constructible sontlargement réducteurs par rapport au contenu del'article L 562-1 du Code de l’Environnement.

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Michel Gueffon – Adjoint du Délégué national aux actions RTM

Une des principales difficultés rencon-trées dans l’écriture du règlementconsiste à concilier la rigueur juridiqueet la prescription de mesures techniquessimples mais suffisantes pour garantirune bonne maîtrise des risques présents(qui peuvent en outre coexister sur unemême parcelle) ; ces mesures doiventpar ailleurs être adaptées tant à ladiversité des situations susceptiblesd’être rencontrées sur le terrain qu’àcelle des techniques de construction. Eneffet, il ne sera plus possible ensuite, lePPR ayant été approuvé, de modifier soncontenu, à moins d’une révision ; celle-cine pourra vraisemblablement êtreenvisagée par l’Etat qu’à l’occasion decirconstances particulières (comme parexemple, l’acquisition de nouvellesconnaissances, la survenance de phéno-mènes non prévus, l’évolution de laréglementation ou/et celle de lajurisprudence), d’autant que l’applicationdu R111.2 peut souvent, au moins dansun premier temps, apporter uneréponse plus ou moins satisfaisante,notamment en cas de durcissementnécessaire du zonage ou du règlement.

En conclusion, les conditions favorablesà une bonne application du PPR, une foiscelui-ci approuvé, supposent :

- lors des différentes phases de sonélaboration (recueil des données his-

toriques, carte des aléas,propositions dezonage et de règlement), un travailimportant d’explicitation et de discus-sion, notamment avec les élus, la négo-ciation étant toujours possible en ce quiconcerne la transcription de la cartedes aléas en zonage réglementaire ;elle portera d’ailleurs le plus souventsur le devenir des zones d’aléasmoyens en fonction des objectifssupra communaux figurant au SCOT etdes projets de développement locaux,

- une bonne information, non seulementdes habitants mais aussi et surtout desdifférents aménageurs (intervenantsdivers au titre des voiries, réseaux, etc.,constructeurs), portant sur les disposi-tions en vigueur au niveau communal,

- un minimum de compétences de cesintervenants ou/et de leurs conseils qui,hélas, ne maîtrisent pas toujours lestechniques les mieux adaptées aux situa-tions à risques. L’impossibilité à ce jourde mettre à disposition un guide simplesur les modes de construction adaptésaux zones en glissement de terrain –comme cela vient d’être fait en matièred’avalanches – montre les progrès res-tant à accomplir dans le domaine de ladiffusion de l’information technique,

- une clarification des mesures relativesà l’existant tant en ce qui concerne lesresponsabilités des différents acteurs

(Etat, commune, intéressés) que les pro-cédures à mettre en œuvre en matièred’information, de suivi de réalisation,éventuellement de contentieux (miseen demeure, etc.). Un véritable démar-rage d’interventions sur le terrain en cedifficile domaine de l’existant nécessi-tera vraisemblablement le recours à desopérateurs spécialisés.

Enfin, en complément de l’élaborationdes documents informatifs ou réglemen-taires, doit être prévue la mise enœuvre de plans communaux de sauve-garde (désormais obligatoires en cas dePPR) afin de faire face à d’éventuellessituations de crise, que les aléas deréférence pris en compte dans la carto-graphie du risque soient ou nondépassés. Par ailleurs, dans les zonesd’aléa (très) fort, en cas de risque immi-nent, non ou difficilement gérable etmettant en cause directement lasécurité des personnes, le recours àl’expropriation (ou à l’acquisitionamiable des biens menacés, comme lepermettent désormais les récentsdécret et arrêté pris en application del’article L 561-3 du Code del’Environnement) s’impose, indépen-damment de la mise en œuvre desmesures de police générale relevant dela compétence du maire. ■

13Juin 2005Risques Infos n°16

Les travaux de prévention actifs contre lesglissements de terrain : stabilisationet drainage des zones instables

On ne parlera pas ici des actionsde prévention dites « passives »,c’est à dire qui ne réduisent

pas l’ampleur du phénomène mais enlimitent ses effets : modification desenjeux, surveillance et alerte, arrêt oudéviation des matériaux, etc. On traite-ra, en partie, des actions dites « actives» qui permettent de stabiliser la zonede glissement. Ces actions peuvent êtreponctuelles (soutènement, végétalisa-tion, substitution de terrain par apportde matériaux grossiers de meilleurescaractéristiques mécaniques et drai-

nantes) ou plus étendues (drainage). Ledrainage est particulièrement mise enœuvre, l’eau jouant en règle généraleun rôle moteur déterminant.

Les différentes techniquesde drainageParmi les différentes techniques dedrainage, on distinguera :

1. Les ouvrages de captage, collec-te et évacuation ont pour principede capter et dériver les eaux de surfaces’écoulant en direction de la zone sen-

sible, d’éliminer les zones de stagnation(contre-pente, creux...), de localiser lesinfiltrations anormales pouvant prove-nir des canaux d’irrigation, de réseauxurbains ou de bassin de stockage, et decollecter et évacuer les eaux en limitantles risques de réinfiltration.

Ces techniques ont pour avantagesprincipaux leur coût modéré, une miseen œuvre simple pouvant être réaliséepar des entreprises locales, un entretienaisé pour les collecteurs à ciel ouvertet une bonne adaptation au traitementde zones étendues.

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2. Les ouvrages de drainage super-ficiel permettent de traiter des zonesde mouvement peu profondes ou peuétendues c’est à dire avec des volumesmis en jeu relativement raisonnables.Les techniques de drainage superficielsont dans leur principe relativementsimple. Elles peuvent se résumer à uneexcavation, pouvant aller jusqu’à 5-6m,comblée de matériaux drainants avecéventuellement un collecteur. Les diffi-cultés se situent dans leur conceptionafin de leur assurer une bonne pérennitéet dans leur mise en œuvre car engénéral les travaux se déroulent dans desconditions particulièrement délicates. Lestranchées drainantes (drains en pierresanciens, tranchées ouvertes, fermées,avec géocomposite) représentent lamajeure partie des techniques dedrainage superficiel.

3. Les ouvrages de drainage pro-fond sont utilisés en dernier recours,c’est à dire dans le cas où les techniquesdécrites précédemment n’auraient pasou peu d’effet stabilisateur. Le drainageprofond est le remède le plus efficacepuisqu’il agit au niveau de la surface deglissement en captant un maximumd’eaux nuisibles. Il concerne toutes lestechniques drainantes utilisant desforages, soit les drains subhorizontaux,drains siphons, puits verticaux.Le coût très élevé et les aléas du drai-nage profond réservent pratiquementde telles opérations aux problèmesurbains ou à la protection d’intérêtsimportants et de vies humaines. Cesont des techniques complexes àconcevoir et à mettre en œuvre. Ellesnécessitent systématiquement uneétude préalable importante et l’inter-vention d’entreprises spécialisées.

Exemples de techniques dedrainage

Captage de sourceLe captage peut être une bassine d’ar-gile façonnée, un massif drainant avecen fond un film imperméable, un regard

entouré de matériaux drainants ou unouvrage de captage relié à un réseau dedrain.

Fossé

Un fossé est une tranchée peu profondecreusée dans le sol avec une pente suf-fisante pour permettre l’écoulement.

Ils permettent de recueillir et d’évacuerle plus directement et le plus rapidementles eaux de ruissellement hors de lazone instable. Le système permet unassainissement rapide des couchessuperficielles.

Les fossés peuvent atteindre 0.5 à 1 mde profondeur avec des sections trian-gulaire, rectangulaire ou trapézoïdale.

Collecteurs à ciel ouvert.Leur but est de transporter l’eau cap-tée par le système drainant hors de lazone en glissement en évitant le plusles réinfiltrations. Il existe une impor-tante gamme de collecteur à cielouvert qui permettent de s’adapter àde nombreuses situations : aqueducbéton, canal en pierres sèches/maçon-nées ou en bois, demi- buse métallique.

Les collecteurs fermésCe sont de simples canalisations iden-tiques à celles utilisées en adductiond’eau et assainissement, installées lors-qu’il n’est pas possible d’utiliser descollecteurs à ciel ouvert pour des rai-sons foncières (ex : traversée de par-celles, exploitation agricole).

Dans le cas de glissement très actif,seuls des tuyaux non enterrés enPEHD semblent acceptables.

Les tranchées drainantes anciennes

Il s’agit de la technique la plus répandueet la plus ancienne. Beaucoup d’anciensdrains datant en général du début dusiècle, ne fonctionnent plus ou ont étéabandonnés ou oubliés. Pourtant ils’agit en général d’ouvrages remarqua-bles par la quantité de travaux qu’ilsreprésentent compte tenu des moyensde l’époque et par leur efficacité.

Les tranchées étaient réalisées par simpleremplissage de pierres, après avoiraménagé à la base un canal en pierressèches ou maçonnées.

Les tranchées avec massifs drainantsLes tranchées drainantes sont desexcavations remplies de matériauxpermettant la collecte des eaux et sonévacuation hors de la zone sensible.

L’objectif est de drainer l’eau de la zoneinstable en remplaçant une partie duterrain peu perméable par un matériauplus perméable qui a généralement descaractéristiques mécaniques supérieures.

14 Juin 2005 Risques Infos n°16

Un exemple de fossé©

RTM

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TMFigure 1 : schéma type de captage(source : www.interaide.org)

Figure 2 :exemple de collecteur fermé

Figure 3 : schéma type de tranchées drainantes anciennes

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Les tranchées avec géocompositeL’écran drainant en géocomposite estcomposé d’une âme drainante, d’ungéotextile et de tuyaux collecteurs.

Le géocomposite permet de réaliserdes écrans drainants jusqu’à 6m deprofondeur.

Les drains siphons

Le drain siphon est un tube descendudans un forage réalisé de manière àrecouper les aquifère que l’on désireassainir. Ce tube est composé d’unréservoir à la base, puis une partie cré-pinée et de nouveau une partie pleine

débouchant à la surface. Dans celui-ci,un ou plusieurs tuyaux assurant lesiphonnage sont mis en place, démar-rant du réservoir, remontant jusqu’à lasurface et s’arrêtant dans un regard enaval dont le niveau topographique estlégèrement plus bas que la partie supé-rieure du réservoir situé à l’amont. Autiliser lorsque l’on veut atteindre desprofondeurs de rabattements impor-tantes mais inférieures à 10 mètres.

15Juin 2005Risques Infos n°16

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1 Mathieu ULRICH (2004) : Panorama des travaux de drainage dans les services RTM – Rapport de stage IUP génie Civil, Université Joseph Fourier.

Figure 4 : schéma de principed’un drain siphons (Source:TPGéo)

Adaptation au contexte etlimites

Une enquête réalisée auprès desservices RTM, dans la cadre d’un stageIUP Grenoble1 encadré en 2004 par laDélégation Nationale RTM, a permis dedresser un bilan du fonctionnementd’un certain nombre d’opérations detravaux de drainage (62 ouvrages,répartis sur 10 sites en terrainsdomaniaux et 14 correspondant à destravaux sous maîtrise d’ouvrage deCollectivités, situés dans les Alpes et lesPyrénées).

Une partie des constats effectués estrésumée dans les graphes suivants :

Maître d’ouvrage et enjeu :

Enjeu et degré de connaissance :

Lorsque l’on est confronté à desenjeux importants, il est notammentnécessaire de s’assurer de l’efficacitédes travaux à réaliser. Un des moyens

pour y parvenir est la bonne connais-sance des terrains à stabiliser, surtoutlorsqu’il y a un risque pour des vieshumaines.

Des enjeux forts excluent pratique-ment la réalisation de travaux sans unereconnaissance minimale.

Types de solutions suivant lemaître d’ouvrage :Les contraintes d’emprises, la nécessitéde traiter des parcelles privées influentsur le choix des solutions de traitement.

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Les dispositifs de mesure pour lasurveillance des mouvements de terrain

D’après : « L’Utilisation du radar sol pour la surveillance des mouvements de terrain »François Lemaitre - Jean-Claude Poussière - Jean-Paul Duranthon - Laurent EffendiantzIn Bulletin des Laboratoires des Ponts et Chaussées, n°249, mars avril 2004, p. 19-34

Type de glissement et état desouvrages :

Quelques remarques pourconclure

Le choix d’une technique de drainagetient compte à l’évidence de la profon-deur du mouvement, de la nature et duvolume de matériaux mis en jeu, de laconnaissance du site (vitesses de glisse-ment, réaction aux épisodes pluvieux)

et de ses contraintes d’accès et d’emprises,des contraintes économiques d’inves-tissement et d’entretien, des délais deréalisation, et des risques de désordresen phase de travaux.

Il sera notamment nécessaire de réflé-chir à l’adéquation entre le dispositif etl’échelle du phénomène, à la pérennitéde certaines techniques (les drains sub-horizontaux résisteront-ils à l’activitédu site ?), aux nécessités et possibilitésd’entretien ultérieur (le maître d’ouvrageest-il en mesure d’assurer l’entretiend’une telle technique ?) et à la possibilitéde compléter le dispositif suite à desobservations faites durant le chantierou après quelques années de fonction-nement. Il faudra également s’interrogersur la maîtrise des risques liés à lamodification des écoulements (en par-ticulier le contrôle des exutoires), et aucomportement des dispositifs en casd’épisode de pluie particulier, de réacti-vation du mouvement, etc…

Enfin on insistera jamais assez sur lestrois points :

1. La surveillance du dispositif est néces-saire, quant à son entretien, à l’apprécia-tion de son efficacité (souvent possiblepar quelques mesures simples mais régu-lières), ce qui suppose la parfaite connais-sance des travaux effectivement réalisés.

2.Toute intervention a ses limites dansun domaine naturel complexe commecelui d’un versant. La connaissance dufonctionnement de celui-ci était enrègle générale très réduite avant laréalisation des travaux, il n’ y a pas descience exacte dans ce domaine.

3. Les conditions de fonctionnement« naturel » peuvent varier sur une longuepériode (modification des écoulementsen amont par exemple). Il convientdonc de ne pas faire preuve d’un opti-misme excessif en ce qui concernel’aménagement et l’urbanisation dezones en aval, dès lors qu’on a affaire àun mouvement de terrain qui peut, ouqu’on imagine raisonnablement pouvoir,(re)devenir très actif et potentielle-ment destructeur. ■

16 Juin 2005 Risques Infos n°16

La nécessité de protéger les habi-tants dans des zones suscepti-bles d'être touchées par les

conséquences de mouvements de ter-rain de grande ampleur (Ruines deSéchilienne en Isère par exemple),implique qu'une évacuation puisse êtreprévue suffisamment tôt lorsque lamenace devient imminente.

Le déclenchement d'une telle mesureoblige donc à suivre en permanenceun certain nombre d'indices sur le ter-rain dont l'évolution est significativede l'accélération du phénomène et, à

partir d'un certain moment, de l'im-minence de l'éboulement ou duglissement.

Les différents dispositifsde surveillanceLes dispositifs destinés à surveillerl'évolution d'un mouvement de ter-rain, sont tous basés sur des mesuresde distance entre deux points, l'unfixe et stable (donc hors de la zoneen mouvement) et l'autre placé en unpoint particulier de la zone à sur-veiller.

Une première catégorie de dispositifsest constituée de systèmes implantéssur le versant en mouvement tels lesextensomètres à fil dont le principerepose sur la mesure d'une longueur.Ces dispositifs ont l'inconvénient denécessiter la présence d'une sourced'énergie sur le site et d'une télé-transmission des données. En périodede crise, leur maintenance nécessitantde se rendre dans la zone dangereuseest problématique.

Une deuxième catégorie d'appareilscomprend des distancemètres

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optiques. La mesure nécessite l'émis-sion et la réception en retour d'unfaisceau lumineux ou laser réfléchisur des cibles qui sont les seuls dispo-sitifs mis en place sur le site.L'avantage de ces dispositifs est depouvoir être opérés à partir du ver-sant opposé et leur inconvénient estd'être inopérants par temps debrouillard, de pluie, de neige ou à tra-vers une atmosphère nuageuse. Cesdispositifs permettent des mesuresavec une précision de l'ordre de plusou moins 3 mm ce qui est relative-ment insuffisant pour calculer unevitesse d'évolution du mouvementsur 24 heures.

Compte tenu des inconvénients desdeux précédents systèmes, a étédéveloppé un troisième type d'appa-reil reposant sur la technique radar.

Le système de surveillancepar RadarLe principe de l'appareil, comme detout radar, repose sur l'émissiond'une onde électromagnétique endirection d'une cible spéciale (un tri-èdre) et l'analyse du temps mis parl'onde pour aller puis revenir parréflexion sur la cible jusqu'au pointd'émission. Ce système permet ainside déterminer la distance entre lacible et le point d'émission.

Ce genre d'appareillage présente uncertain nombre d'avantages :- Un fonctionnement indépendant

des conditions météorologiques- Une non nécessité d'avoir une

source d'énergie sur la zone dan-gereuse

- Des données accessibles en tempsréel avec possibilité de surveillanceen continu 24h sur 24.

- Une précision suffisante pour lecalcul de la vitesse du mouve-ment.

La mesure est cependant affectéepar un certain nombre de phénomè-nes perturbateurs. Ceux-ci provien-nent des turbulences atmosphé-riques locales qui influent sur leparamètre mesuré. En effet, laconversion (en longueur) du tempsde propagation et de retour de l'on-de émise fait intervenir la vitesse depropagation de cette onde électro-

magnétique, c'est à dire la vitesse dela lumière. Or celle-ci est constantedans le vide mais est variable dans unmilieu donné en fonction de sonindice de réfraction dans ce milieu.Dans l'atmosphère cet indice deréfraction varie en fonction de plu-sieurs paramètres physiques : pres-sion - température - présence devapeur d'eau, paramètres qui sontvariables dans le temps. Ceci est sen-siblement identique à ce qui se passeavec les systèmes de mesureoptiques. La précision de la mesurene peut cependant être atteintequ'au prix d'un traitement informati-sé complexe et de corrections àintroduire à la mesure brute pourtenir compte de phénomènes per-turbateurs.

L'exemple du mouvementde grande ampleur deSéchilienneUn système radar a été implantépour surveiller le site dit des "Ruinesde Séchilienne".

Le dispositif électronique a étéinstallé sur le versant de la montagnefaisant face, de l'autre côté de la val-lée, au versant en mouvement.

Les cibles réfléchissantes sontsituées bien entendu sur le versanten mouvement à une distance com-prise entre 1.1 et 1.6 km du disposi-tif émetteur-récepteur.

L'ensemble est géré par un ordina-teur qui effectue tous les traitementsdes données, délivre une mesurepondérée toutes les heures ettransmet ces données et le résultatdu traitement à un centre de contrô-le (Centre d'Etudes Techniques del'Equipement de Lyon – CETE deLyon) où elles sont accessibles entemps réel.

ConclusionsL'utilisation de techniques radarpour effectuer des mesures de distanceprécise afin de déterminer des vitessesde déplacement de sites géologiquesen mouvement, a montré son effi-cacité. Des précisions de l'ordre de0.1 à 0.2 mm pour des distances del'ordre de 1 500 m peuvent êtreatteintes quelle que soient les condi-tions météorologiques moyennantdes dispositifs matériels (points fixesde compensation) et un traitementstatistique des données. Le recul dequatre années de fonctionnementsur le site de Séchilienne démontrel'opérabilité de ce système qui bienentendu est encore perfectionnablesur plusieurs points afin d'éliminer laplupart des aléas pouvant influer surson fonctionnement. ■

17Juin 2005Risques Infos n°16

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Local de Monfalcon hébergeant le distancemètre optique (au rez-de-chaussée) et le radar (à l’étage)

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Cet article a pour but de pré-senter les recherches encours au LIRIGM, sur l’évalua-

tion du danger d’éboulement à longterme, qui intervient notamment dansla réalisation des cartes d’aléa. Leséboulements rocheux sont des mouve-ments dans lesquels les blocs chutent,s’entrechoquent, rebondissent, roulentet glissent à des vitesses extrêmementrapides, pouvant dépasser 100 km/h.Leur volume varie de moins de 1 m3 àplusieurs millions de m3. La fuite étantimpossible, ils représentent un dangerpermanant pour les personnes, contrai-rement aux glissements qui sont géné-ralement lents et qui menacent surtoutles biens. Cependant, les plus groséboulements (plusieurs hm3) présententpresque toujours des signes précurseursdans les jours précédant la rupture. Ladétection de ces signes est l’objet de lasurveillance. Mais elle n’est possible quelorsque les mouvements précurseurscommencent suffisamment longtempsavant la rupture et ont une ampleur

suffisante pour attirer l’attention. C’estle cas du mouvement de versant deSéchilienne,qui est l’objet d’une surveillancecontinue depuis une vingtaine d’années.Mais ce cas est exceptionnel par l’impor-tance de son volume (plusieurs dizainesd’hm3) et de la durée des mouvementsprécédant la rupture. En effet, la plupartdes éboulements plus petits se produisentsans qu’aucun signe précurseur n’aitété détecté. Dans le contexte de l’amé-nagement du territoire ou de la déter-mination des travaux prioritaires poursécuriser un itinéraire, le problème estdonc de savoir :

(1) quelles masses rocheuses sont sus-ceptibles de se mettre en mouvementet d’évoluer en éboulement ?

(2) dans quel délai ?

(3) jusqu'où peuvent-elles se propager ?La manière de traiter ces questionsdépend en grande partie du volume desmasses rocheuses concernées.

Le cas des chutes de pierresou de blocs

Une réponse rapide peut être donnéeaux deux premières questions dans lecas des volumes les plus petits, dans lamesure où les éboulements dequelques m3 ou moins (on parle alorsde chutes de pierres ou de blocs) sonttrès fréquents à la fois dans l'espace etdans le temps.On considère généralementque,sur une durée de quelques décennies,des chutes de blocs sont probablesdans n'importe quelle falaise. La questionessentielle pour les chutes de blocs estdonc celle de la propagation. Bien quetous les problèmes ne soient pas encorerésolus, plusieurs méthodes relativementéprouvées sont utilisées courammentpar les bureaux d'études pour calculerles trajectoires des blocs.Trois d'entreelles ont été comparées sur des cas

réels, dans le cadre d'un projet derecherche européen du programmeInterreg 2C [1]. Ces méthodes permet-tent non seulement de déterminerjusqu'où les blocs peuvent se propager,mais aussi de dimensionner des ouvragesde protection pouvant arrêter lesblocs. Notons enfin qu'il existe égale-ment des méthodes de renforcementdes falaises permettant d'empêcher lachute des blocs.

Le cas des éboulements enmasse

Les questions (1) et (2) posées dansl'introduction deviennent d'autant pluscruciales que le volume des massesrocheuses considérées est important.En effet, les parades deviennent de plusen plus difficiles, voire impossibles, àmettre en œuvre, pour des raisonsautant économiques que techniques.D'autre part, les gros éboulements sepropagent plus loin que les chutes deblocs. Il est donc nécessaire d'identifieret de hiérarchiser les zones les plusmenacées par ces phénomènes. Lesméthodes utilisées actuellement,basées sur l'expérience des experts,sont relativement subjectives et nefournissent qu'une évaluation qualitative[1], [2], [3]. Alors que l'évaluation del'aléa sismique se traduit par la proba-bilité qu'un séisme d'une certaineintensité (ou accélération) minimale seproduise dans un délai donné, l'évalua-tion de l'aléa éboulement ne se carac-térise généralement que par troisniveaux : faible, moyen ou fort. Depuisquelques années, des recherches sontmenées au LIRIGM pour tenter demieux évaluer l'aléa éboulement.

Les recherches

A partir d'une étude géotechnique dumassif rocheux, les ingénieurs spécialisés

18 Juin 2005 Risques Infos n°16

L’apport de la recherche dans l’évaluationde l’aléa éboulement rocheux

Didier Hantz, Denis Jongmans - LIRIGM (Laboratoire Interdisciplinairede Recherches Impliquant la Géologie et la Mécanique) - Université Joseph Fourier,Grenoble

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Figure 1. Eboulement du 20 avril 1992 (20 000 m3). La RD 218,menant de Veurey à Autrans, a été emportée sur 100 m.

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en ingénierie des roches sont capablesde dimensionner des talus stables(déblais routiers ou carrières, parexemple) et de renforcer localementdes falaises naturelles (clouage). Enrevanche, il est impossible, dans l'étatactuel des connaissances, d'évaluer ladurée de vie d'une masse rocheusesusceptible de s'ébouler, même eneffectuant une étude détaillée de celle-ci.C'est pourquoi, pour avoir une idée desdurées de vie de telles masses rocheuses,les recherches se sont orientées vers

une étude historique de l'ensemble desfalaises qui dominent l'agglomérationgrenobloise. Cette étude a été réaliséeà partir d'un inventaire dressé par leservice RTM (Restauration des Terrainsen Montagne) de l'Isère, qui recense leséboulements survenus dans ces falaisesau cours du 20e siècle. Il a ainsi étépossible d'estimer les fréquences d'é-boulements (nombre moyen d'éboule-ments par siècle), pour différentesclasses de volumes. Ces fréquencessont données dans le tableau 1. Par

exemple, la fréquence des éboulementsde volume compris entre 10 000 et100 000 m3 est estimée, par cetteméthode très simple, à une dizaine parsiècle. Pour situer l'importance de telsphénomènes, deux éboulements de30 000 et 20 000 m3, survenus respec-tivement en 1971 et 1992, ont détruitsur une centaine de mètres la RD 218menant de Veurey à Autrans par le tun-nel du Mortier (figure 1). Cette routeest maintenant définitivement fermée.Bien sûr, la connaissance de la fréquen-ce n'informe pas sur les endroits où lesévènements vont se produire. Mais elleconstitue une contrainte qui doit êtreprise en compte dans l'évaluation de laprobabilité de rupture des massesrocheuses considérées comme suscep-tibles de s'ébouler. Par exemple, si uneétude d'aléa portant sur les falaises del'agglomération grenobloise ne détectequ'un éboulement de 10 000 à 100 000 m3

susceptible de s'ébouler dans les 100ans, il est probable qu'elle en aitoubliés. En revanche, si elle en trouveune centaine, cela montre que les pro-babilités de rupture ont été suresti-mées et qu'elles devraient plutôt êtrequalifiées de faibles (environ 1 "chance"sur 10 de se produire).

Dans l'exemple donné ci-dessus, nousavons supposé que les compartimentsrocheux susceptibles de s'ébouler(comme celui de la figure 2) étaient affec-tés de la même probabilité de rupture.Pour identifier les zones les plus mena-cées, il est nécessaire de hiérarchiserles compartiments suivant le risqueplus ou moins fort qu'ils s'éboulent.L'objectif du deuxième axe de rechercheest de déterminer les conditions lesplus favorables aux éboulements à partirde l'observation des évènements passés.Ainsi, 25 éboulements de volume com-pris entre 50 et 30 000 m3, situés dansles massifs calcaires du Vercors et de laChartreuse, ont été étudiés de manièredétaillée. Les résultats de cette étudeseront utiles aux experts chargés dedétecter les masses potentiellementinstables. De plus, une analyse statistiquede 60 éboulements de plus de 10 m3,dont les dates sont connues, a montréque ces éboulements sont plus fréquentsaprès un ou plusieurs cycles journaliersde gel-dégel. En revanche, les fortesprécipitations et les séismes ont peu

19Juin 2005Risques Infos n°16

Classe de volume (m3) 102-103 103-104 104-105 105-106 106-107

Période d'observation 1935-2000 1935-2000 1935-2000 1800-2000 1600-2000

Nombre d'éboulements 33 9 6 3 2

Fréquence (par siècle) 51 14 9 1.5 0.5

Tableau 1. Fréquences des éboulements dans la région de Grenoble, selon leur volume. Remarque : une analyseplus poussée des données, qui dépasse le cadre de cet article, permet d'améliorer ces estimations.

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Figure 2. Exemple de compartiment rocheux susceptible de s'ébouler.

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La Commune de Saint Etiennede Crossey, commune de 1284 hectares, se situe au pied

de la Chartreuse, à proximité deVoiron. Le village s’est établi sur unplateau fluvio-glaciaire comprenantnotamment des accumulationssableuses comme en témoignent lescarrières à la sortie des gorges deCrossey. Les hameaux, nombreux,sont localisés quelquefois sur lesversants pentus des collinesmolassiques. C’est le cas duHameau de Tolvon, très ancienne-ment peuplé puisqu’au XIVème siè-cle cette paroisse comptait déjàune cinquantaine d’habitants.

Mais depuis quelques décennies lapopulation du Bourg et deshameaux s’est considérablementaccrue pour dépasser les 2 500habitants. Si cette croissance n’estpas particulière à Saint Etienne de

Crossey, il est cependant nécessaired’expliquer certaines de sescaractéristiques.

La commune dispose d’un Pland’Occupation des Sols réalisé en1975 par l’Agence d’Urbanisme dela Région Grenobloise (AURG)dans l’esprit du Schéma Directeurd’Aménagement et d’Urbanisme(SDAU) de 1973. Ce dernier avaitprévu de décongestionner larégion grenobloise en créant uneagglomération nouvelle sur leVoironnais. C’est ainsi que le POSs’est traduit par des zones U, cons-tructibles, et des zones NA, defuture urbanisation, de façon plé-thorique, y compris dans les zonestrès pentues, comme au Hameaude Tolvon. En 1989, la nouvelleéquipe municipale a pris conscienced’une part, de la surabondance

d’offre foncière répondant à unedemande croissante et d’autrepart, des risques induits par uneaugmentation mal maîtrisée de lapopulation. Outre le déficit d’équi-pements, se posait le problème dudanger éventuel qu’il y avait à laissers’urbaniser certaines zones poten-tiellement à risques.

Un cas précis est venu alimentercette réflexion : celui d’un lotisse-ment au hameau de Tolvon.

Notons que ce lotissement, localiséen zone UA avec assainissementindividuel (!), a été accordé en mai1987. La municipalité de l’époque,ayant sans doute conscience quel’assainissement individuel danscette zone très pentue présentaitquelques risques, décide de réaliserun programme d’assainissementcollectif.

20 Juin 2005 Risques Infos n°16

La prise en compte du risque de glissementde terrain : l’exemple de la communede Saint Etienne de Crossey

Jean-Michel Guillon - Adjoint à l’Urbanisme mairie de Saint Etienne de Crossey (38)

d'influence. Enfin, l'observation rappro-chée d'une dizaine de zones d'arrache-ment montre que les compartimentsqui se sont éboulés étaient reliés à la falaisepar des ponts rocheux représentantseulement quelques pourcents de lacicatrice de l'éboulement, le reste étantconstitué par des fractures déjà ouvertesavant la rupture. La détection de cesfractures ouvertes qui découpent lescompartiments rocheux constitue unautre sujet de recherche, qui fait appelaux méthodes de prospection géophy-sique. La figure 3 montre un exemplede reconnaissance par la méthode dugéoradar, qui utilise les réflexions d'ondesélectromagnétiques (identiques auxondes radio) sur les discontinuités.

RemerciementsLes recherches menées au LIRIGMpour l'évaluation de l'aléa éboulement

ont été soutenues par le ConseilGénéral de l'Isère (Pôle GrenobloisRisques Naturels), la Région Rhône-Alpes (thématiques prioritaires) etl'Union Européenne (projets Interreg).Elles bénéficient également de la colla-boration des services RTM et duréseau des Laboratoires des Ponts etChaussées. ■

Références

[1] Groupe de travail du projet Interreg 2C"Grands mouvements de versant". Risques géné-rés par les grands mouvements de versant. Etudecomparative de quatre sites. Recommandations.207 pages (1998).

[2] Plans de prévention des risques naturels(PPR) – Risques de mouvements de terrain.Guide méthodologique. 71 pages. La documenta-tion française (1999).

[3] Comité Français de Géologie de l'Ingénieur.Caractérisation et cartographie de l'aléa dû auxmouvements de terrain. 91 pages. LaboratoireCentral des Ponts et Chaussées (2000).

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Figure 3. Recherche de fractures ouvertes par la méthode du géoradar.

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21Juin 2005Risques Infos n°16

C’est alors qu’un voisin signale desmouvements de terrain inquié-tants, induits par la réalisation destravaux d’assainissement. Est-ce laraison pour laquelle le Maire del’époque refuse d’accorder lecertificat d’exécution des travauxprévus dans l’autorisation de lotir ?probable !

Le lotisseur se tourne alors vers laPréfecture qui déclare qu’en l’absencede réponse à la demande decertificat constatant l’achèvementdes travaux, et après constat parun agent de la DDE, le lotisseurbénéficie d’un certificat tacite.

Le dossier est à la fin des années80 repris par la nouvelle équipemunicipale. Cette dernière décidede mettre en révision le POS pourmaîtriser la croissance et tenircompte des risques naturels. C’estdans ce but et afin de les préciser,qu’est confiée au Service deRestauration des Terrains enMontagne (RTM) la charge de des-siner la carte des risques naturelsqui sera approuvée en décembre1993 par arrêté Préfectoral.

Dès 1990, concernant le risque dulotissement des Gros à Tolvon, lamunicipalité a fait réaliser uneétude de stabilité du versant qui

conclut qu’une partie du lotisse-ment est inconstructible du faitd’un risque de glissement de terrainet que pour le reste l’avis d’ungéologue géotechnicien est néces-saire pour adaptation au sous-sol.Cette étude et l’avis défavorabledu Directeur de la DDAF permet-tent au Maire de motiver ses refusde certificat d’urbanisme et depermis de construire en 1991,refus attaqués devant le TribunalAdministratif qui donne raison auMaire en 1994. Entre temps pourtenir compte de la carte desrisques naturels et des étudesréalisées sur place, le secteur desGros dans le POS révisé a étéclassé en zone ND et NCrg.

En 1996 les ayant droit ont faitappel du jugement et l’affaire estde nouveau jugée par la Courd’Appel Administrative de Lyonqui, après avoir (sur la forme)annulé le jugement de mars 1994du Tribunal Administratif deGrenoble, rejette leur demande(sur le fond). Une nouvelle procé-dure devant le Conseil d’Etat estalors entamée par les ayant droiten Octobre 1997, mais finalementils se désisteront de leurrecours…

Quelles leçons tirer de toutcela ?1. Dans une zone constructible au

POS ou au PLU, un permis peutêtre néanmoins refusé si leMaire a connaissance d’unrisque potentiel : il est le garantde la sécurité des biens et despersonnes ;

2. Localisation des zones à urba-niser doit se faire de façoncohérente, non seulement envue de maîtriser la croissancedémographique, mais aussi entenant compte des risquesnaturels. Et pour ce faire lesoutils existent : différentes car-tes des risques, PPR, PPRI, etc...

En matière d’urbanisme il est dudevoir des élus d’identifier lesrisques naturels et de leur donnerune traduction réglementaire.C’est aussi un des moyens derésister à une forte, trop fortepression foncière. ■

GlossaireDDAF : Direction Départementale de l’Agricultureet le ForêtDDE : Direction Départementale de l’EquipementPOS : Plan d’Occupation des SolsPLU : Plan Local d’UrbanismePPR : Plan de Prévention des Risques naturels prévisiblesPPRI : Plan de Prévention du Risque Inondation

De l’approche d’un phénomènede grande ampleur et sa gestion jusqu’àl’expropriation

Camille Chatelard - Maire d’Avignonet (38)

AVIGNONET est une petitecommune rurale de 200habitants dont les 2/3 de

la surface sont concernés par desglissements de terrain. Un lotisse-ment a été implanté, il y a unetrentaine d’années, sur le glisse-ment le plus actif.

Ce fut pour la maire d’Avignonet,dès son élection en 1983, le « début

d’une longue aventure » quiconduisit l’équipe municipale en2004 à une décision douloureuse :la mise en application d’une pro-cédure dite loi Barnier1.

« Ce dossier du lotissement duMas est le plus difficile que j’ai euà gérer, techniquement et psycho-logiquement. Difficile technique-ment, tout d’abord, parce que

dans le cas d’un glissement de ter-rain en profondeur on ne voitrien. Quelques déformations ensurface existent mais on ne lesremarque pas, surtout quand onvit sur le site car il faut pour celaun œil averti. Les quelques fissu-res sur les murs sont rapidementrebouchées, du fait que les mai-sons sont habitées et bien entre-tenues. Il faut donc mettre en

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22 Juin 2005 Risques Infos n°16

place des moyens permettant demesurer l’évolution du glissement: en premier lieu, des piézomètreset des inclinomètres, tous moyensà base de tubes qui se tordent etdeviennent rapidement inexploi-tables.Viennent ensuite les mesu-res de déplacement faites à l’aidedu système GPS, avec relevés parle RTM2. Devant les résultats onse dit que ce mal sournois et invi-sible, tapi sous nos pieds, existeréellement. Même si on ne le voitpas, il se manifestera un jour.

Une foule de questions se posentsur la survenue du phénomène :

Où ? L’attention est focalisée surle lotissement où le risque de glis-sement est le plus grand, maissouvenons-nous de la Salle enBeaumont3 (Isère). De récentesétudes ont montré que le secteurdéborde largement du lotisse-ment et concerne toute la combedu Mas.

Quand ? Cette question nouslaisse dans l’angoisse… Tout peutarriver dans un jour, dans un an,dans dix !

Comment ? Une faille, une maisonqui s’écroule, tout le terrain quipart au lac ? Tout est envisageable,

du léger incident au scénariocatastrophe.Ces questions restent sans répon-se. L’incertitude est très difficile àvivre et à gérer aussi bien pour leshabitants que pour les élus.

Un premier travailsur l’inconstructibilité et laprévention

Sollicité, le RTM a beaucoup aidéla commune par ses connaissancestechniques, et pour monter lesdossiers administratifs et finan-ciers. Nous avons commencé parune étude géologique du secteuren 1984 afin d’essayer de cernerau mieux la zone concernée etl’ampleur du phénomène. A partirde ce constat nous avons travaillédans deux directions : l’incons-tructibilité et la prévention.

Interdire de nouvelles construc-tions sur 2/3 de la commune n’apas été une mesure facile à faireaccepter et certains sont mêmeallés jusqu’aux menaces. Malgrétout, une fois le risque connutoute autre décision aurait étédéraisonnable. Nous avons élaboréun PER, Plan d’Exposition auxRisques naturels prévisibles (devenu

depuis un PPR, Plan de Préventiondes Risques) qui après quelquespéripéties a été approuvé par leConseil d’Etat en 1990. Ce docu-ment juridiquement difficilementcontestable nous a permis d’établirnotre POS dans une relativesérénité.

En matière de prévention nousavons réalisé, avec l’aide financièrede l’Union Européenne, de l’Etatet du Conseil Général, des travauxde drainage qui ont ralenti le mou-vement pendant quelques années.Mais la nature reprend vite sesdroits. Devant l’ampleur du phé-nomène, les techniciens ont finipar conclure qu’en l’état actueldes connaissances, il n’existeaucun moyen pour arrêter ceglissement qui s’accélère.

Il appartient au Maire d’assurer lasécurité des gens qui habitent ceslieux et de prévoir l’évacuation encas de survenue effective du glis-sement. Nous avons donc, avecl’aide de l’IRMa, élaboré un plan desecours. L’alerte a figuré parmi lespremières questions qui nous ontété posées : elle incombe officiel-lement au Maire, mais quand ladonner ? En l’absence d’indica-teurs techniques suffisammentprécis et donc fiables, ce sera sansdoute le glissement lui-même qui,en se déclenchant, la donnera.

L’application de la loi Barnier

Devant un problème d’une telleampleur, en tant que maire d’unepetite commune, quelle est laréalité d’une responsabilité quel’on n’a pas les moyens d’assurer ?Tout naturellement, je me suisretournée vers l’Etat. Après deuxans d’étude et d’expertise, laconclusion rendue a été la suivan-te : maintenant cela devient tropdangereux, il faut évacuer.En demandant l’aide de l’Etat, l’é-quipe municipale savait qu’il n’étaitpas possible de remettre en causeles études faites, et encore moins

Fissurations importantes d’une maison implantée sur le glissement

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23Juin 2005Risques Infos n°16

A25 kilomètres de Grenobleen direction de Bourgd’Oisans, sur le versant sud

du Mont Sec, à la pointe du massif deBelledonne, à l’endroit même où lavallée de la Romanche est la plus étroi-te, la falaise des Ruines de Séchilienne(constituée de roches micaschis-tiques fracturées et instables)menace de s’effondrer. Le secteur enmouvement s’étale sur 70 hectares,s’étageant de 500 à 1150 mètres d’al-titude : le massif se rompt progressi-vement et inéluctablement par frac-turation.

Depuis vingt ans, les Ruines deSéchilienne préoccupent les pouvoirspublics, les scientifiques, les indus-triels et les populations. Pour cernerla complexité des enjeux, notammentliés à l’information et la communica-tion, nous avons opté ici pour uneprésentation chronologique des évé-nements.

En 1985, d’importantes et régulièreschutes de blocs se produisirent sur laroute nationale 91, axe majeur entrele bassin grenoblois, l’Oisans, leBriançonnais et l’Italie. Les parentsd’élèves de Saint Barthélemy deSéchilienne, inquiets de la sécurité dela navette scolaire transportant leursenfants du village au hameau de l’Ilede Falcon, adressèrent une pétitionau Maire de l’époque, à la DirectionDépartementale de l’Équipement, etils écrivirent à Haroun Tazieff, alorsSecrétaire d’Etat à la Prévention desRisques Naturels et TechnologiquesMajeurs. Ce dernier, convié par AlainCarignon alors maire de Grenoble,président du Conseil Général del’Isère et Ministre del’Environnement, se déplaça à plu-sieurs reprises sur les lieux et révélasa préoccupation. Par ailleurs, les pre-miers travaux de reconnaissanceengagés sur le site montrèrent qu’il

ne s’agissait pas d’une banale altéra-tion des escarpements rocheux quidominent la route, mais bien d’unprocessus de glissement d’une partieimportante du versant du Mont-Secqui venait de se réactiver…

Les pouvoirs publics engagèrent alorsles premières mesures de parades :

- déplacement de la RN 91 sur le ver-sant opposé de la vallée pour la met-tre hors d’atteinte des éboulis ;

- édification d’un merlon de protec-tion pour, dans l’hypothèse d’un glis-sement important, protéger les mai-sons du hameau de l’Ile de Falcon ;

- réalisation d’un chenal de dérivationpour la Romanche, afin que les eauxne dérivent pas dans la plaine et sur-tout que soit protégée l’alimentation

Risque d’éboulement rocheux de grandeampleur : les Ruines de Séchilienne

Géraldine Strappazzon - Doctorante - GRESEC1 (EA 608) - Université Stendhal

de faire confiance à ceux qui affir-ment, sans en fournir les preuves,que le glissement n’existe pas.Peut-on dire à l’Etat que l’on refu-se l’application de la loi Barnier, etainsi prendre pour soi et la com-mune le risque de mettre en dan-ger la vie d’autrui ? Humainementet juridiquement, en tant quemaire, vous n’avez pas le choix : ilvous faut assumer ces responsabi-lités. Alors, même si la loi Barnierest une procédure d’Etat avec unedécision et un financement d’Etat,je ne surprendrai aucun élu localen affirmant que le maire devientle bouc émissaire de l’affaire.Evacuation, expropriation, indem-nisation, tous ces mots suscitent

des réactions violentes de la partde la population. L’application dela loi Barnier est psychologique-ment très difficile à vivre, pour leshabitants de la vingtaine de mai-sons concernées, qui, bien sûr,vivent dans l’angoisse du lende-main, mais aussi pour l’équipemunicipale. A la durée d’instruc-tion du dossier - trois ou quatreans, de la définition du périmètre,le montage du dossier et l’enquê-te publique qui seule peut ouvrirla voie aux négociations financiè-res – s’ajoutent d’interminables etinsupportables allées et venuesentre trois ministères. Les habi-tants, quant à eux, se sentent atta-qués, abandonnés. Ils tentent de se

défendre. Mais l’ennemi, hélaspour eux, n’est pas le maire, cardans ce cas la solution serait sim-ple. L’ennemi, c’est la nature ; etface à elle, on ne peut que mesu-rer son impuissance. » ■

1 Loi n°95-101 du 2/02/1995 relative au renfor-cement de la protection de l’environnementdite loi « Barnier » reprise dans le code de l’en-vironnement aux articles L 561-1 à L 561-5 surles mesures de sauvegarde des populationsmenacées par certains risques naturelsmajeurs.2 Le service Restauration des Terrains enMontagnes (RTM) est un service de l’ONF.

3 En 1994, un glissement de terrain de 1.3million de m3 a eu pour conséquences : 9 maisonsdétruites ou endommagées et 4 victimes,surprises dans leur sommeil.

1 Groupe de Recherche sur les Enjeux de laCommunication

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24 Juin 2005 Risques Infos n°16

de la nappe phréatique du SyndicatIntercommunal des Eaux de la RégionGrenobloise (SIERG) ;

- suspension de toute autorisationd’urbanisme sur l’Ile Falcon pour nepas accroître les enjeux ;

- et enfin, début de l’instrumentationdu massif pour approfondir laconnaissance scientifique et asseoirles premiers plans de secours : réseaude mesures géodésiques, capteursextensiométriques, balises GPS, radar,sismographes, station météorolo-gique.

Dans la même période, le program-me « Isère Département Pilote » pourla prévention des risques majeurs estlancé sous l’égide de Haroun Tazieff.

Dix ans plus tard, en 1995, la loin° 95-101 relative au renforcementde la protection de l’environnement,dite « loi Barnier », est votée. Ellecomporte des mesures de sauvegar-de des populations menacées parcertains risques naturels majeurs.Notamment, son article 11 stipule :« lorsqu’un risque prévisible de mouve-ments de terrain, ou d’affaissements deterrain dus à une cavité souterraine ou à

une marnière, d’avalanches ou de cruestorrentielles menace gravement des vieshumaines, l’État peut déclarer d’utilitépublique l’expropriation par lui-même,les communes ou leurs groupements,des biens exposés à ce risque, dans lesconditions prévues par le code de l’ex-propriation pour cause d’utilité publiqueet sous réserve que les moyens de sau-vegarde et de protection des populationss’avèrent plus coûteux que les indemni-tés d'expropriation ». C’est ainsi qu’envertu du décret interministériel du31 mai 1997 et à défaut de touteautre possibilité de protection, les115 hectares du hameau de l’Ile deFalcon (comprenant 94 maisons etéquipements publics et impliquantplus de 300 personnes) ont étéexpropriés au motif du risque d’é-boulement. Pour certains, « ce sont lesRuines de Séchilienne qui sont à l’o-rigine de la loi Barnier » [1].

Donc, c’est au motif du risque d’é-boulement uniquement que la procé-dure d’expropriation du hameau estengagée : il s’agit du premier cas enFrance d’application de la loi dite «Barnier ». La commune de SaintBarthélemy de Séchilienne se voitbrutalement plongée dans une situa-

tion dramatique : amputée de plusd’un tiers de sa population et de sesressources fiscales, elle est parailleurs contrainte d’accepter la des-truction de tous ses équipementspublics situés sur le hameau de l’IleFalcon. Ironie du sort, pour certainsd’entre eux, elle rembourse desannuités jusqu’en 2013 !

Pourtant, au fil des travaux menésdans les années 1990-2000, le phéno-mène des Ruines de Séchilienne vaprendre une tout autre dimension.

Toutes les études engagées concluentde manière unanime qu’une partie,voire la totalité de la zone en mouve-ment des Ruines de Séchilienne sedécrochera et tombera en fond devallée dans moins de dix ans. Le mou-vement du site est régulier et ininter-rompu.Toutefois, il convient de noterque le phénomène est fortementsensible aux conditions météorolo-giques, notamment au dégel et à lapluie : les eaux de ruissellement cir-culent dans le réseau des fractures ets'enfoncent en profondeur aggravantle mouvement. De même, la fortepente du versant est un facteur

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La vallée de la Romanche : Les Ruines de Séchilienne, la Romanche, la RN 91

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25Juin 2005Risques Infos n°16

moteur reconnu.A noter que la zoneen mouvement la plus rapide repré-sente un volume d'environ 3 millionsde mètres cube de matériaux qui glis-se vers le fond de vallée au rythmed'environ 90 centimètres par an !

En 2000, un collège d'experts inter-nationaux désigné par le Ministère del'Environnement est convoqué. Dansson rapport, le risque d'éboulementdu massif est confirmé… mais uneinévitable bouchure de la vallée estégalement évoquée. En effet, lesexperts ont déclaré que dans l’hypo-thèse d’un éboulement, la valléeserait bouchée : un barrage naturel seformerait (avec les eaux du torrentRomanche) et lorsqu’il céderait, en1h30, 20 km de vallée seraient dévas-tés sous un flot canalisé par les obs-tacles naturels et urbains.Vizille seraitsous près de 2 mètres d’eau enmoins d’une heure. Puis, la « vallée dela Chimie », de Jarrie et de Pont deClaix avec plusieurs sites classésSeveso, serait rayée de la carte parcette inondation dévastatrice. AChamp sur Drac, où la Romancherejoint le Drac, la seule « protec-tion », la digue Marcelline, construitepar Lesdiguières au XVIIe siècle (tou-jours en l’état, sans aucun renforce-ment), serait recouverte par un flotde 3,50 mètres de haut, atteignantun débit de 870 m3/s qui dévasteraittout sur son passage. La zone deComboire, puis l’ensemble de l’agglo-mération grenobloise seraient sousles eaux en quelques dizaines deminutes. Au confluent de l’Isère, lepolygone scientifique et leSynchrotron seraient couverts parplus de deux mètres d’eau [2], [3].

Ainsi, au risque naturel pourraientsuccéder des risques technologiqueset industriels dont il est primordialde tenir compte, étant donné leséquipements existants en aval du site.

Le Préfet de l’Isère, dans l’attente denouvelles études et au motif de lasécurité, décida à l’automne 2003, desuspendre tous les dossiers d’urbanis-

me des communes concernées par lerisque d’inondation lié aux Ruines. Ledéveloppement de la vallée de laRomanche jusqu’à Jarrie a ainsi étégelé.

Mais, au-delà des décisions préfectora-les, quelles parades sont effective-ment en place aujourd’hui ?

L’expropriation du hameau de l’IleFalcon s’achève aujourd’hui : il reste àce jour huit familles à délocaliser.Qu’est-il prévu pour préserver leshabitants restant dans la vallée, etsurtout ceux résidant en aval du sitedes Ruines ?

Différents scénarios ont été étudiéspar les services de l'État pour réglerle passage de l'eau. Compte tenu del’enjeu représenté par le torrent (lanappe phréatique alimentée par laRomanche en aval du site couvre lesbesoins en eau de plus de 250 000habitants de l’agglomération greno-bloise), la seule solution est la créa-tion d'une dérivation hydrauliquecreusée sous le versant opposé, ducôté du Mont Falcon, à l'abri de l'é-boulement. Pour commencer, le gou-vernement a décidé en novembre1997 de réaliser une galerie dereconnaissance de 4,20 mètres dediamètre et 1930 mètres de lon-gueur. Le débit maximum autorisépar ce tunnel, achevé en décembre2000, est de 60 m3/s. Or, c’est undébit admissible bien insuffisant : eneffet, compte tenu de la sensibilité dusite aux phénomènes météo, lesexperts sont quasiment assurés quel’éboulement se produira au sortir del’hiver, à la fonte des neiges, mais ledébit de la Romanche à cette périodeest de 800 m3/s.

Par ailleurs, en janvier 2004, après lachute 200 m3 de roches et l’obstruc-tion de la route nationale 91, denombreux dysfonctionnements ontmis à jour des lacunes importantesquant à la gestion de la crise. C’estainsi que, la même année, le Préfet del’Isère a lancé un plan d’actions pré-

fectoral comprenant dix mesures :

- renforcement du dispositif de suiviet d’alerte

- mise en place d’un comité perma-nent d’experts

- instauration d’une communicationinstitutionnelle régulière

- achèvement de l’évacuation deshabitants de l’Ile Falcon

- actualisation du Plan de SecoursSpécialisé de Séchilienne

- élaboration d’un plan de gestion del’Oisans en cas de blocage des accès

- études précises des conséquenceshydrauliques d’un effondrement

- redéfinition des conséquences surl’urbanisation

- élaboration des plans de préventiondes risques

- études et mises en place de parades.

Le site des Ruines de Séchiliennebénéficie d’une surveillance extrême.Le risque d’éboulement est un phé-nomène connu et inéluctable, mais,compte tenu des événements subsé-quents, les parades en place semblentbien insuffisantes à ce jour. La situationest complexe tant les enjeux soustendus sont importants, notammentles enjeux communicationnels : laperception et le traitement du risquepar tous les acteurs concernés(citoyens, acteurs politiques et éco-nomiques, médias), reposent en grandepartie sur les pratiques communica-tionnelles des uns et des autres [4]. ■

Bibliographie

[1] POIROT Stéphane, « L’intercommunalité faceaux Ruines de Séchilienne », in La MairieMagazine, n°79, pp. 11-13, avril 2004

[2] Etude Sogreah (1999)

[3] Expertise relative aux risques d'éboulementdu versant des ruines de Séchilienne, rapports ducollège d'experts sous la direction du ProfesseurMarc Panet, Ministère de l'Aménagement duTerritoire et de l'Environnement,Décembre 2000(Rapport Panet I) et Mai 2004 (Rapport Panet II)

[4] STRAPPAZZON Géraldine, L’informationpréventive en matière de risques majeurs,Mémoire de DEA sous la direction d’IsabellePailliart, UFR des Sciences de la Communication,Université Stendhal – Grenoble 3 : juin 2004, 66pages. Travail poursuivi depuis en thèse.

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26 Juin 2005 Risques Infos n°16

La falaise du Prégentil, montagnequi domine et abrite Bourgd’Oisans à l’ouest, met, à épiso-

des plus ou moins rapprochés et nonréguliers, la population Bourcate enalerte, ainsi que les occupants duCollège des 6 Vallées situé précisémentà ses pieds.

C’est le mardi 20 avril 2004 que cettemontagne s’est rappelée au bon souve-nir des habitants de Bourg d’Oisans.

La paroi du « Bout du monde » , autreappellation de cette énorme falaise deshiste délité, a laissé choir deux pans derocher gris blanc, à 6h et 9h40, qui sesont écrasés plusieurs centaines demètres plus bas dans un cône dedéjection situé en amont du collège.

Immédiatement après l’éboulement, ungrand nuage de poussière a envahi lespentes, sans toutefois atteindre le collègeet les habitants.

Cette matinée du 20 avril a vu la miseen mouvement de volumes de l’ordrede 3000 à 5000 m3, soit des volumesbeaucoup plus faibles que ceux établislors des épisodes précédents du 22

janvier 1998 et des 29 et 30 juin 1998qui avaient vu des chutes de l’ordre de300 000 m3.

Il s’agissait alors, pour celui de juin, deglissements gigantesques producteursd’un nuage énorme de poussière déva-lant comme une nuée ardente de vol-can sur le collège et sur le Bourg plon-geant la cité dans une obscurité totalependant 30 minutes et recouvrant toutsur son passage.Cet incident, s’il n’a pas provoqué devictimes, a été, de la part des riverainset des membres de la communautééducative, source d’émotions et depeurs certaines, difficiles à conjurerjusqu’à la réalisation des travaux desécurisation de cette zone à risques.Car la crainte la plus grande est dans lecumul des chutes de rochers associé àdes pluies torrentielles dans le lit dutorrent du Saint-Antoine, pouvantprovoquer des coulées de bouesdévastatrices.

Suite à ces différents incidents, et aprèsconcertation de tous les services, il estdécidé, à la rentrée 98, que la parade laplus efficace face au risque de poussière

est la mise à l’abri pour tous les indivi-dus. Un système d’alarme « mise àl’abri » est alors installé, au sein ducollège, sous la responsabilité du chefd’établissement.

De plus, afin de répondre à la demandedes personnels et des parents d’élèves,et ce, dans un souci de responsabilisa-tion et de protection, conformément àl’article L. 125-2 du code de l’environ-nement, deux stages se sont déroulésau sein du collège les 30 septembre et1er, 7 et 8 octobre 1998.

Ces stages ont permis de prendreconscience des risques, de mieux lescerner afin de faciliter le travail d’infor-mation et d’éducation en direction desélèves. Ils ont été le lieu d’expressiondes peurs et des interrogations diverseset de la gestion du stress.

Mais revenons à ce mardi 20 avril 2004où les protocoles et consignes de sécu-rité ont globalement bien fonctionnéet donné satisfaction au sein du collège.

Les élèves et les adultes responsablessensibilisés dès leur arrivée par lasecousse matinale suivie d’un gronde-ment résonnant dans la vallée ont bienréagi à l’écoute de la sirène de mise àl’abri et ne se sont pas laissés aller àune panique bien naturelle, car lasérénité, en pareille circonstance, ne vapas de soi.

Pour maîtriser l’angoisse, rien ne vautl’application de mesures de précautionsen terme d’information, de communi-cation et de simulations régulières.

Celles-ci visent à familiariser les enfantsà la sirène de mise à l’abri distincte decelle relative à l’incendie.

Ces consignes décidées en septembre1998 sont, depuis cette date, respec-tées scrupuleusement par tous leschefs d’établissement qui se sontsuccédés depuis :

1- Information orale communiquéepar le chef d’établissement lors de laréunion de pré rentrée et chaque foisqu’il le juge nécessaire dès l’arrivée

Nuage de poussière généré par l’éboulement de 22 janvier 1998

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L’exemple du Collège des six Valléessitué en zone de mouvement de terrain

Gisèle Bouzon-Durand - Principale du collège des six vallées (Bourg d’Oisans, 38)

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27Juin 2005Risques Infos n°16

de nouveaux venus (tant élèves quepersonnels), avec écoute des sirènes« mise à l ’abri » et « incendie » pouropérer le distinguo.

2- Documents communiqués auxélèves et aux familles concernant lamise à l’abri.

3- Ecoute des sirènes « mise à l’abri »et « incendie » à plusieurs reprises aucours du mois de septembre.

4- Questionnaires, sous forme deQCM, remplis par les élèves et corrigéspar les professeurs principaux pouraider à la compréhension des consignesqui doivent prendre sens pour unemeilleure exécution.

5- Exercices de simulation une foispar trimestre en présence des servicesde secours, de la gendarmerie de Bourgd’Oisans et, dans la mesure des disponi-bilités, la présence de représentants del’Inspection Académique et du Rectorat.

Chaque niveau, 6e, 5e, 4e et 3e s’est vudésigner un point de rassemblement oùil doit se retrouver au retour de l’exté-rieur et attendre les instructions.

Un travail récent des élèves, sous laresponsabilité d’un professeur d’artsplastiques, a permis la réalisation depanneaux visualisant les points derassemblement par niveaux.

Cela se veut préventif avec le soucid’ancrer des repères chez les élèves etde les sensibiliser aux risques potentielssans dramatisation.

Mardi 20 avril 2004, dès l’alerte don-née, les enfants sont restés à l’abri dansleurs classes en attendant les instruc-tions des services de secours.

Une fois les premières chutes passéeset la sécurité assurée, les enfants ontété invités à rentrer chez eux pourl’après-midi, suite à la décision d’éva-cuation prise par Monsieur le Maire, aunom du principe de précaution, et ce,dans l’attente d’une reconnaissancehéliportée de la falaise par les spécialis-tes du RTM (Restauration des Terrainsen Montagne) et de Montagne experten géologie et du SDISS.

La reconnaissance n’a pas révélé derisque nouveau et en concertation avecles services de la Sécurité Civile et del’Académie, la vie scolaire a pu reprendrenormalement dès le lendemain.

Grâce à la mobilisation de tous lesservices de l’Etat et des CollectivitésTerritoriales, les travaux mis en placedepuis 1998 : (merlon de 350 m de longet de 7 m de hauteur, pare blocs etélargissement du torrent du Saint-

Antoine au pied de la falaise), sontétablis pour assurer la sécurité deBourg d’Oisans et de ses équipementscontre des chutes de pierres d’un volumelargement supérieur aux chutes poten-tielles estimées par les spécialistes.

La falaise du Prégentil devrait continuerà faire l’objet de la surveillance maximalepour assurer la sécurité de toute lapopulation notamment scolaire.

Un projet de reconstruction d’unnouveau collège dans la plaine deBourg d’Oisans est en cours d’examenpour pallier aux risques naturelsmajeurs auxquels l’actuel collège estconfronté et face auxquels, il est impor-tant que toute la communauté scolairese prépare.

Si l’Oisans est un territoire où lesrisques majeurs naturels sont très pré-gnants, il est de la responsabilité detous, et du chef d’établissement en par-ticulier, d’effectuer une prise de cons-cience de la situation de la falaise duPrégentil et de pallier ensemble à touteéventualité.

Je tiens à signaler l’implication totale etsans faille de tous les services concernéspar l’éboulement de la falaise du 20avril 2004 et de l’appui certain qu’ilsont su me témoigner. ■

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Mémoire collective des risques naturels

L’Institut des Risques Majeursrecherche des photographies illustrant des phénomènes naturels

et des catastrophes passés en Isère

La connaissance des événementset catastrophes naturelspassés tels que les glissements

de terrain et les chutes de blocs estindispensable non seulementpour mieux localiser puis cartogra-phier les zones à risques d’unecommune mais aussi pour entre-tenir et préserver une « culturedu risque » à l’échelon local.L’oubli est en effet une donnéeconstante de l’attitude de la

population face aux risques ce quine facilite pas l’acceptation decertaines mesures de préventionet le débat public autour de cesmesures.

Les informations sur les événementset les catastrophes passés sontmalheureusement difficiles d’accès,dispersées dans des fonds trèsvariés et souvent mal conservées.Les communes et les particuliers

possèdent parfois des photographiestrès intéressantes mais nonvalorisées. Dans ce contexte, nousavons engagé, depuis le début del’année 2001, un travail derecherche auprès de différentsacteurs dans le but de retrouver detelles photographies. Une foisrécupérées, elles sont numériséeset intégrées dans une base dedonnées accessible depuis notresite Internet :

http://www.irma-grenoble.com/06isere/communes/recherche_evenement01.php3http://www.irma-grenoble.com/04risques/index-evenements.htm

http://www.irma-grenoble.com/02activites/phototheque/phototheque_recherche.php3

Si vous êtes détenteur d’information, de documents,de photographies…

n’hésitez pas à nous contacter :

Institut des Risques Majeurs9 rue Lesdiguières38000 Grenoble

Tel : 04 76 47 73 73 – Fax : 04 76 47 15 [email protected]

Merci d’avance !