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Lycée SUPPLÉMENT GRATUIT N OUVELLE R EVUE P ÉDAGOGIQUE C’est dans la perspective des objets d’étude des programmes de français au lycée que nous étudierons un groupement de textes extraits de la collection « Grands détectives ». Concernant toutes les classes et les sections, ces objets d’étude concerneront le roman policier historique comme renou- vellement du genre romanesque depuis le XIX e siècle, le personnage de roman, la ques- tion de l'homme, les réécritures, l’argumen- tation et les effets de chaque discours sur Repères 2 Des détectives exceptionnels Fëlures et idéal 3 Un enquêteur en marge 4 Une enquête double La description entre réalité historique et fiction policière 5 Une réflexion sur la violence criminelle et la mort 6 La littérature et la lecture en jeu Sherlock Holmes, une figure mythique 7 Une littérature au second degré 8 SOMMAIRE Septembre 2010 LE ROMAN POLICIER HISTORIQUE Par Franck Evrard professeur de Lettres et essayiste contexte, ils sont le support d’un question- naire dont les éléments de réponse sont également disponibles sur le site de la NRP. Le présent supplément voudrait, à partir des textes choisis, inciter à l’étude d’une des œuvres citées. Il peut aussi être l’amorce à une lecture suivie des romans en question. son destinataire. Ce dossier valorisera égale- ment les conditions de production et de réception de ces romans relevant d’un genre nouveau qui divertissent en faisant réfléchir sur la littérature et la lecture en général. Lire ne consiste-t-il pas à privilégier certains indices parmi tous ceux disséminés dans un texte en s’efforçant d’arrêter le sens ? Les extraits étudiés sont disponibles sur le site www.nrp-lycee.com. Mis en pparu depuis les années 1980, le roman policier historique est un genre nouveau qui reconstitue minutieusement une époque historique à travers une intrigue criminelle. La collection « Grands détectives » aux éditions 10/18 a certainement joué un rôle dans l’histoire du genre : Ellis Peters et les enquêtes médiévales du moine Cadfael, Robert Van Gulik et la série des juges Ti, autant de personnages qui innovent et font évoluer le genre policier. Les enquêtes se déroulent à toutes les époques (le Japon féodal chez I.J. Parker, l’Angleterre du XIII e siècle chez Peter Tremayne, la société victorienne chez Anne Perry, le Paris de la Belle Époque chez Claude Izner) mais aussi sur tous les continents (l’Égypte antique chez Paul Doherty, la Chine ancienne dans la série du juge Ti de Robert Van Gulik, le Botswana contemporain chez McCall Smith). Au centre de ces romans accessibles, écrits à partir d’un important travail de documentation, se trouve le personnage récurrent du détective, qu’il s’agisse d’un sénateur romain de l’Antiquité (Danila Comastri Montanari) ou de détectives de l’étrange au XIX e siècle (Fabrice Bourland). A

Septembre 2010 - nrp-lycee.nathan.fr...(Les Chouans, 1834), Alexandre Dumas (Les Trois Mousquetaires, Le Comte de Monte-Cristo en 1844), Théophile Gautier (Le Ro-man de la momie,

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Lycée

SUPPLÉMENT GRATUITN O U V E L L E R E V U E P É D A G O G I Q U E

C’est dans la perspective des objets d’étude des programmes de français au lycée que nous étudierons un groupement de textes extraits de la collection « Grands détectives ». Concernant toutes les classes et les sections, ces objets d’étude concerneront le roman policier historique comme renou-vellement du genre romanesque depuis le XIXe siècle, le personnage de roman, la ques-tion de l'homme, les réécritures, l’argumen-tation et les effets de chaque discours sur

Repères� 2

Des détectives exceptionnelsFëlures et idéal� 3Un enquêteur en marge� 4

Une enquête doubleLa description entre réalité historique et fiction policière� ������5Une réflexion sur la violence criminelle et la mort� 6

La littérature et la lecture en jeuSherlock Holmes, une figure mythique 7Une littérature au second degré 8

SOMMAIRE

Septembre 2010

LE ROMAN

POLICIER

HISTORIQUEPar Franck Evrard professeur de Lettres et essayiste

contexte, ils sont le support d’un question-naire dont les éléments de réponse sont également disponibles sur le site de la NRP.

Le présent supplément voudrait, à partir des textes choisis, inciter à l’étude d’une des œuvres citées. Il peut aussi être l’amorce à une lecture suivie des romans en question.

son destinataire. Ce dossier valorisera égale-ment les conditions de production et de réception de ces romans relevant d’un genre nouveau qui divertissent en faisant réfléchir sur la littérature et la lecture en général. Lire ne consiste-t-il pas à privilégier certains indices parmi tous ceux disséminés dans un texte en s’efforçant d’arrêter le sens ?

Les extraits étudiés sont disponibles sur le site www.nrp-lycee.com. Mis en

pparu depuis les années 1980, le roman policier historique est un genre nouveau qui reconstitue minutieusement une époque historique

à travers une intrigue criminelle. La collection « Grands détectives » aux éditions 10/18 a certainement joué un rôle dans l’histoire du genre : Ellis Peters et les enquêtes médiévales du moine Cadfael, Robert Van Gulik et la série des juges Ti, autant de personnages qui innovent et font évoluer le genre policier. Les enquêtes se déroulent à toutes les époques (le Japon féodal chez I.J. Parker, l’Angleterre du XIIIe siècle chez Peter Tremayne, la société victorienne chez Anne Perry, le Paris de la Belle Époque chez Claude Izner) mais aussi sur tous les continents (l’Égypte antique chez Paul Doherty, la Chine ancienne dans la série du juge Ti de Robert Van Gulik, le Botswana contemporain chez McCall Smith). Au centre de ces romans accessibles, écrits à partir d’un important travail de documentation, se trouve le personnage récurrent du détective, qu’il s’agisse d’un sénateur romain de l’Antiquité (Danila Comastri Montanari) ou de détectives de l’étrange au XIXe siècle (Fabrice Bourland).

A

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REPÈRES

Dates repères

Les originesXIXe siècle Le roman historique comme genre littéraire apparaît avec les œuvres de Walter� Scott (Ivanohé, 1820), Victor� Hugo (Notre-Dame de Paris, 1831), Honoré� de� Balzac (Les Chouans, 1834), Alexandre�Dumas (Les Trois Mousquetaires, Le Comte de Monte-Cristo en 1844), Théophile�Gautier (Le Ro-man de la momie, 1858), Gustave� Flaubert (Salammbô,1862) et Léon�Tolstoï (Guerre et Paix, 1863).

1831 Parution de Maître Cornélius, une nouvelle d’Honoré�de�Balzac qui met en scène une enquête de Louis XI en 1479.

1841 Double Assassinat dans la rue Morgue d’Edgar� Allan�Poe apparaît comme le premier récit véritablement policier de la littérature.

Le policier historique1977 Trafic de reliques d’Ellis� Peters marque le début de

la série consacrée au frère Cadfael, un moine gallois. Avec cet herboriste-détective à l’abbaye Saint-Pierre et Saint-Paul de Shrewsbury au XIIe siècle, la vogue du roman policier historique est lancée.

1980 Le Nom de la rose d’Umberto� Eco, dont le héros est un moine franciscain éclairé, Guillaume de Baskerville, est une enquête policière dans le monde médiéval et mona-cal du XIVe siècle. Dans cet exposé de philosophie médiévale et ce pastiche de roman policier, Eco fait du livre un instrument de connaissance et une arme du crime.

1983 Meurtre à Canton de Robert� Van� Gulik inaugure la collection « Grands détectives » créée par l’avocat Jean-Claude Zylberstein. Ancien diplomate, Van Gulik ressuscite le Juge Ti, un personnage historique de la dynastie T’ang.

1995 À la disparition d’Ellis� Peters, Anne� Perry devient la figure de proue du roman policier historique avec ses deux séries victoriennes, centrées sur Thomas Pitt et William Monk.

1997 Lancement de la collection « Labyrinthes » par Le Masque, une collection dédiée au polar historique, devenu un genre à part entière.

2010 La collection « Grands détectives » compte près de 80 auteurs. Le dernier titre paru est Le Noyé du Grand Canal de Jean-François Parot.

Bibliographie critique

Parmi les textes consacrés au roman policier historique, on signalera comme principal ouvrage de référence :�Le Roman policier historique. Histoire et polar : autour d’une rencontre, Jean-Christophe�Sarrot�et�Laurent�Broche,�Paris,�Nouveau�monde,�2009.�

On conseillera aussi la lecture des essais suivants :- Apostille au Nom de la rose,�Umberto�Eco,�Alfabeta,�1983,�trad.�française,�Paris,�Grasset,�1985.- Le Polar d’Edgar Poe à James Ellroy, Le Magazine littéraire, n°17,�juillet-août�2009.�- Le Roman policier ou la modernité,�Jacques�Dubois,�Paris,�Nathan,�1992.- Lire le roman policier,�Franck�Evrard,�Paris,�Dunod,�1996.

NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 20102

Œuvres de la collection « Grands détectives » aux éditions 10/18 citées dans ce supplément

Brigitte Aubert

Alexander McCall Smith

Jonathan Rabb

Anne Perry

Fabrice Bourland

Gyles Brandeth

Claude Izner

Jean-François Parot

Ellis Peters

Frank Tallis

Le Miroir des ombres,�2008

Vérité et feuilles de thé, 2009

L’Homme intérieur, 2010

Défense et trahison, 1992Half Moon Street, 2000

Le Fantôme de Baker Street, 2008Les Portes du sommeil, 2008

Oscar Wilde et le Jeu de la mort,2008

La Momie de la Butte-aux-Cailles,2009

L’Énigme des Blancs-Manteaux,2000

Un cadavre de trop, 1979

Du sang sur Vienne, 2005

Anne Perry

Défense et trahison

Après une brillante carrière militaire au

service de la couronne d’Angleterre en Inde,

l’estimé général Thaddeus Carlyon rencontre

la mort, non dans l’affrontement d’une bataille,

mais au cours d’un élégant dîner londonien.

Accident ou homicide ? La belle Alexandra,

épouse du général, confesse bientôt son

meurtre, passible du gibet. William Monk,

Hester Latterly et Oliver Rathbone travaillent

d’arrache-pied pour faire tomber le mur de

silence élevé par l’accusée et la famille

de son mari ; ils cherchent désespérément

une réponse à ce sombre et effrayant

mystère, afin de sauver la vie d’une femme.

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GRANDS DÉTECTIVES

Z“Grands détectives” dirigé

par Jean-Claude Zylberstein

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Traduit de l’anglais

par Roxane Azimi

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ISBN 978-2-264-03305-3

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2007/11/07 04:37:20 AM

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Les héros de la collection « Grands détectives » possèdent un « roman familial » singulier (les origines troubles), présentent des failles existentielles ou subissent des crises qui les dotent d’une complexité humaine. Le héros de Jean-François Parot, Nicolas Le Floch, apprendra qu’il est le fils naturel du marquis de Ranreuil. Rendu amnésique par un accident, William Monk, l’inspecteur créé par Anne Perry, est condamné à enquêter sur les autres comme sur lui-même.

Fêlures et idéal

Texte 2

(En interrogeant la tenancière d’une maison de plaisir, le jeune Nicolas Le Floch se découvre brusquement policier et finit par arriver à ses fins en malmenant son témoin.)

«  Plus tard, Nicolas revivrait cet instant comme celui de sa véritable entrée dans la police. En quelques minutes, il avait en effet franchi la frontière qui sépare l’honnête homme, ancré sur des vérités solides, aux contours délimités… »

Étude d’extraits

SECTIONSCONCERNÉES:2de/ 1re/ T OBJETD’ÉTUDE:Le personnage de roman OBJECTIF:Repérer et analyser la complexité

d’un personnage de roman

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRES Recherche sur les personnages de la littérature

policière en proie à une crise existentielle pour des raisons personnelles ou familiales (Sherlock Holmes, Arsène Lupin, Joseph Rouletabille, Jules Maigret).

AXESD’ÉTUDEA.Lerécitd’unévénementperturbateur

1.Quel est le point de vue du narrateur dans ces deux extraits ?2.Quelle valeur ont les deux événements évoqués dans les textes ?

B.Unportraitnuancé1.En quoi l’enquête menée par William Monk est-elle paradoxale?2.Comment la description fait-elle ressortir l’ambiguïté et la complexité des deux personnages ?3.En quoi l’éthique des deux enquêteurs diffère-t-elle ?

C.Écritured’invention Imaginez les deux premières pages d’un roman policier

historique (écrit à la première personne) au cours desquelles un personnage historique réel (Sartine, Vidocq) explique les origines de sa vocation policière.

DES DÉTECTIVESEXCEPTIONNELS

NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 2010 3

Texte 1

(Dans la série des Monk, le narra-teur revient toujours sur l’accident qui a rendu l’inspecteur amnésique, ce qui l’oblige à retrouver des bribes de son passé pas toujours valorisant.)

«  Si, avant l’accident, il avait eu tendance à affirmer sa supériorité sur ses semblables, les preuves ne manquaient pas – et l’attitude de son entourage le confirmait – que, loin d’être de la simple vanité, ce jugement reposait sur des bases bien réelles… »

Cet ancrage de la subjectivité dans une société et à une époque (Louis XV et époque victorienne en l’occurrence) où la notion d’individu et de sujet ne s’est pas encore développée, relève d’un anachronisme assumé par la collection. En avance sur son époque, le « grand détective » expose ses idées novatrices sur la salubrité et la sécurité dans les grandes villes, la nécessaire égalité entre hommes et femmes. Il défend les défavorisés et les victimes d’injustices et exprime

une distance à l’égard de la société et du temps auxquels il appartient, surtout quand ceux-ci sont marqués par la violence, l’obscurantisme ou le fanatisme. Il privilégie la liberté individuelle sur les im-pératifs politiques (Nicolas Le Floch chez Jean-François Parot) ou sociaux (l’inspec-teur Thomas Pitt chez Anne Perry). Aussi ce personnage éclairé apparaît-il moins comme un anachronisme que comme un « agent du progrès historique », selon l’expression d’Umberto Eco et le symbole de l’Histoire en marche. Cependant, il ne verse pas dans la contestation radicale comme dans le roman noir ou le polar et entretient des relations nuancées avec le pouvoir en place. Pour exemple : dans Un cadavre de trop (1979), le moine Cadfael ne prend pas parti dans la guerre civile sanglante pour la conquête de la cou-ronne d’Angleterre et continue à cultiver son jardin préférant « penser à la croissance et à la vie ».

NOM : MONK PRÉNOM : William ÉPOQUE : les années 1850 et 1860 sous l’ère victorienne LIEU : Londres PROFESSION : inspecteur de police puis détective privé. SITUATION AMOUREUSE : marié à Hester Latterly, infirmière dévouée auprès de Florence Nightingale pendant la guerre de Crimée.

SIGNE PARTICULIER : souffre d’amnésie depuis un accident et éprouve des angoisses à l’idée que l’on découvre des informations sur son passé.

AUTEUR : Anne Perry

NOM : LE FLOCH PRÉNOM : Nicolas

ÉPOQUE : la fin du XVIIIe siècle, sous Louis XV

puis Louis XVI.

LIEU : Paris et Versailles

PROFESSION : commissaire au Châtelet

longtemps sous les ordres de Sartine,

lieutenant général de police du Roi.

SITUATION AMOUREUSE : compliquée. Dans

L’Affaire Nicolas Le Floch, il est accusé de

l’empoisonnement mystérieux de sa maîtresse

Julie de Lastérieux. Dans Le Crime de l’hôtel

Saint-Florentin, il reconnaît son fils Louis

qu’il a eu de sa liaison avec une prostituée

et tombe amoureux d’Aimée d’Arranet, fille

d’un lieutenant général des armées navales.

SIGNE PARTICULIER : fin gourmet, amateur de

bonnes recettes.

AUTEUR : Jean-François Parot

Anne Perry, Défense et trahison, éditions 10/18, coll. « Grands détectives », 1992,�p.�79-80.

Jean-François Parot, L’Énigme des Blancs-Manteaux, éditions 10/18, coll. « Grands détectives », 2000,�p.�121.

Retrouvez la suite de l’extrait sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

Retrouvez la suite de l’extrait sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

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La désignation « grand détective » pour les personnages d’Ellis Peters (le moine Cadfael) ou de Peter Tremayne (sœur Fidelma, religieuse et avocate des tribunaux d’Irlande au VIIe siècle), peut surprendre. Vivant à une époque an-térieure à la création de la policepar Sartine sous Louis XV, ces héros apparaissent, au sens strict, comme des anachronismes. Nicolas Le Floch (le personnage de Jean-François Parot) est à l’origine clerc de notaire, Victor Legris, le héros de Claude Izner, est libraire. C’est le goût du mystère, la passion de la justice ou tout simplement le hasard des événe-ments qui motivent leur travail d’enquête.

Néanmoins, pour déchiffrer les indices souvent textuels et interpréter les docu-ments, les enquêteurs, qu’ils soient moines, notaires, médecins et écrivains, ont en commun d’avoir reçu une éducation livresque et entretiennent une� relation�privilégiée�au�livre.

Ce type particulier d’enquêteur influe sur la nature même de l’enquête qui s’écarte souvent des sentiers battus. Certes, animé par une démarche hypothético-déductive et cherchant des cautions du côté de la science de son époque, le détective amateur donne l’impression de «  plagier par anticipation  » les mé-thodes de Sherlock Holmes. Mais souvent

son� investigation� épouse� une� voie� ori-ginale�et�en�marge de l’autorité. Dans Les Portes du sommeil (2008) de Fabrice Bour-land, l’enquête policière d’Andrew Singleton se transforme en une quête onirique. Pour découvrir la vérité sur les morts étranges d’un scientifique spécialiste du sommeil et d’un poète surréaliste, l’amateur détec-tive, Andrew Singleton, hanté lui-même par les visions d’une belle inconnue, note scrupuleusement ses récits de rêve, s’adonne à la «  marche automatique  », chère aux surréalistes, lit Freud et rencontre André Breton. Dans la série des Max Lieber-mann, créée par Frank Tallis, l’enquêteur, élève de Freud, qu’il rencontre à plusieurs reprises, met la théorie psychanalytique au service de la police viennoise.

Un enquêteur en margeDES DÉTECTIVESEXCEPTIONNELS

Retrouvez la suite de l’extrait sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

Texte 1

(À Vienne, en 1902, un serial killer multiplie des meurtres sanglants avec mutilations obscènes et symboles ésotériques. Le psychiatre Max Liebermann révèle à son ami, l’inspecteur Oskar Rheinardt, la méthode utilisée par le criminel.)

«  Oskar, quelqu’un qui aime Mozart n’aurait pas pu commettre de telles atrocités, répondit le jeune médecin en se redressant. L’influence de Mozart est civilisatrice, au contraire.

— N’empêche que l’assassin connaît bien son Mozart… »

Etude d’extrait

SECTIONSCONCERNÉES :2de / 1re/ T OBJETSD’ÉTUDE:

• La notion de mouvement culturel et artistique• Le personnage de roman

OBJECTIFS:• Savoir contextualiser un texte littéraire• Réfléchir sur le statut du personnage de l’enquêteur et sur l’interprétation des signes

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRES• Lecture de L’Interprétation des rêves de Freud• Audition de La Flûte enchantée de Mozart

AXESD’ÉTUDEA.Lecadreviennois

1.Quels éléments renvoient à Vienne dans l’extrait ?B.L’enquêtepolicière

1.De quelles compétences fait preuve l’enquêteur ?2.Quelles analogies se dessinent entre la détection policière et l’activité analytique ?3.En quoi consiste la perversité du criminel ?4.Comment est développé le thème du secret ? 5.Quelle est la fonction du dialogue dans l’extrait ?

C.Écritured’inventionUn amateur d’art découvre un crime caché en contemplant une œuvre d’art au musée. Il reconstitue l’histoire du crime et s’interroge sur les mobiles de l’assassin. Votre texte pourra s’inspirer du Tableau du maître flamand (1990) d’Arturo Pérez-Reverte. Sur la toile restaurée par l’héroïne qui représente une partie d’échecs, figurent des personnages dont l’un a été assassiné.Photographie du Neuermarkt à Vienne en 1910.

Frank Tallis, Du sang sur Vienne, éditions 10/18, coll. « Grand détectives », 2005,�p.�236-237.�

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NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 2010 5

UNE ENQUÊTEDOUBLE

L’enquête d’Œdipe sur sa propre culpabilité chez Sophocole, l’histoire du coupable suivi à la trace de farine dans le Livre de Daniel (la Bible) ou l’épisode du chien du vizir dans Zadig de Voltaire rappellent les liens qui existent quasiment dès les origines entre littérature et « roman policier ».

Le double statut générique du roman policier historique a des conséquences. Du côté du roman historique, la description multiplie les «  effets de réel  » qui attes-tent de la réalité de l’époque et des faits relatés, la véracité des personnages. La précision dans les dates ou la topogra-phie, qui va jusqu’à la reproduction de plans ou de cartes, témoigne de ce souci de faire vrai. La description acquiert aussi une fonction informative pour le lecteur qui découvre des lieux ou des groupes sociaux qu'il ignorait. Du côté du roman

Étude d’extraits

SECTIONSCONCERNÉES:2de/ 1re/ T OBJETSD’ÉTUDE:

• La description• Le réalisme

OBJECTIF:Réfléchir sur les fonctions de la description et le régime du signe

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRESRecherche sur la représentation de Paris dans le roman policier

AXESD’ÉTUDEA.L’étudedocumentaire

1.Quelle fonction a la description dans l’extrait ?2.Quelle image l’extrait nous donne-t-il de Paris ?

B.L’enquêtepolicière1.Sur quels éléments de nature différente se fonde le travail d’enquête mené par Joseph ?2.L’extrait marque-t-il vraiment pour le lecteur un progrès dans l’enquête ?3.En quoi l’éthique des deux enquêteurs diffère-t-elle ?

C.Écritured’inventionUn détective raconte comment il a élucidé une série de crimes atroces commis dans le même quartier en s’aidant… d’un guide touristique.

policier et de son herméneutique ludique, la description parsème le récit d’indices au statut ambigu et paradoxal. En effet, dans un roman policier, les signes indiciels révèlent en même temps qu’ils cachent. Si le roman historique est vraisemblable parce qu’il intègre des documents ou des événements réels à la fiction, le roman policier possède d’autres règles de vrai-semblance propres à son genre comme le faux coupable. Le lecteur de roman policier, toujours soupçonneux, selon Jorge Luis Borges, interprète, émet des hypothèses, se raconte d’autres récits, imagine la fiction absente du crime initial, une fiction différente que celle proposée par le détective. Proposant un univers saturé de signes fonctionnant comme effets de réels ou indices policiers, le roman policier historique, à la fron-tière de la fiction et du documentaire

invite à une double lecture : l’une naïve, accorde une vraisemblance au récit inscrit dans l’Histoire, l’autre, critique, soup-çonne le moindre détail dans son désir de résoudre l’énigme.

Situé en 1896, La Momie de la Butte-aux-Cailles de Claude Izner fait réfé-rence aux techniques nouvelles comme la photographie ou le cinématographe, l’architecture (la tour Eiffel), l’art (Rodin), le climat social et politique (l’antisémitisme, l’affaire Dreyfus, la condition des femmes). La récurrence des personnages qui vieillis-sent d’un roman à l’autre permet de mesu-rer les évolutions de la société, de perce-voir une Histoire en mouvement. L’étude du paratexte révèle le souci didactique d’expliquer le contexte historique par un glossaire de termes de l’époque, des repères bibliographiques ou des recettes de cuisine.

Claude Izner, La Momie de la Butte-aux-Cailles, éditions 10/18, coll. « Grand détectives », 2009,�p.�186-187.

La description entre réalité historique et fiction policière

Retrouvez la suite de l’extrait sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

Texte 1

(Paris, 1896. À l’aide de son adjoint Joseph Pignot, Victor Legris se lance sur les traces de l’assassin d’une de ses amies, Alexandrine Pirote. L’ enquête les oriente vers l’un des quartiers les plus miséreux de la capitale, baptisé « le faubourg souffrant » : la Butte-aux-Cailles.) 

«  Joseph surgit en libérateur. Lorsqu’il eut verrouillé la serrure, il brandit triomphalement l’extrait d’acte de naissance d’Alexandrine Pirote.

— Hourra ! Le quartier d’enfance de la brocanteuse, c’est le XIIIe arrondisse-ment !

Victor parcourut le papier.— Vous êtes sûr ? Il s’agit de la commune de Maison-Blanche… »

Photographie  de la Butte aux Cailles, Paris XIIIe, par Eugène Atget, 1899.

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6 NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 2010

Le roman policier historique semble se donner comme tâche de conserver le passé pour mémoire, de lutter contre l’amnésie qui menace la société. Loin d’être la simple expression d’une folie individuelle, le crime apparaît comme un produit élaboré et complexe qui renvoie aux instances collectives et à une violence symbolique nichée au cœur de la civilisation. Dans les romans d’Anne Perry, le climat social marqué, l’importance de la position sociale, les préjugés de classe et la tyrannie des apparences, constituent une sorte de terreau pour le crime. Faisant partie intégrante de la société, le meurtre commis dans le passé révèle une culpabilité

collective. La� pulsion� de� mort� n’est� pas�seulement� individuelle� mais� sociale.��Déterrer les cadavres de l’Histoire, désenfouir la violence criminelle, permet de créer un lien entre le passé et le présent tout en exhibant de façon singulière le tragique de l’Histoire qui s’écrit, selon une vision pessimiste, de meurtre en meurtre. Le refoulé criminel et le refoulé historique vont de pair dans des romans comme Du sang sur Vienne (2006) de Frank Tallis, Les Portes du sommeil (2008) de Fabrice Bourland ou L’Homme intérieur (2010) de Jonathan Rabb qui montrent à Vienne ou Berlin les prémices de l’idéologie nazie et ses fondements mythologiques comme la montée des ténèbres

dans l’inconscient collectif. L’évoca-tion de la scène du crime relève donc moins de l’esthétique du genre policier (le crime pour le crime), propre au roman à énigme, que d’une thématique sociologique qui rappelle le roman noir. Roman du crime et du criminel, le roman policier historique explore la violence de la grande Ville dans un environnement topographique et sociologique diversifié.

Une réflexion sur la violence criminelle et la mort

Étude d’extraits

SECTIONSCONCERNÉES :2de / 1re / T OBJETSD’ÉTUDE:

• La vision de l’homme et du monde• La question de l'Homme

OBJECTIF:Savoir contextualiser une œuvre littéraire

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRESRecherche sur les origines historiques et idéologiques du nazisme

AXESD’ÉTUDEA.texte1 :unevilleduelle

1.Relevez le champ lexical de la ville en précisant les nuances de sens. 2.Sur quel procédé est fondée l’évocation de Vienne ?

B.texte2 :unevilleambiguë1.Quel est le thème dominant de l’extrait ?2.Quelle représentation de la grande Ville nous est donnée ?3.Quel est le paradoxe commun aux deux textes ?

Texte 1

« Vienne la radieuse ! Cité des Habsbourg ! Capitale des arts et de la musique. Ville de Brahms, Bruckner, Mahler et Schönberg. De Klimt et de Schiele. De Hofmannstahl, Schnitzler, Zweig. De Fritz Lang et de Freud !

Mais aussi Vienne la sombre  ! Gigantesque métropole où le nouveau Führer avait vécu ses années de jeunesse et fourbi ses doctrines racistes. Centre du pangermanisme, des ligues nationalistes et des thèses nauséabondes.

Au mois de juillet précédent, les nazis du coin, avec l’appui des services du Reich, avaient tenté un coup d’État.»

Texte 2

« — Comment le savez-vous ? s’enquit Mariah Ellison. Si vous me demandez combien il y a de voleurs à Londres, je ne saurai vous répondre.

Samuel secoua la tête.— New York ne ressemble pas à Londres, Mrs Ellison, bien que j’aie vu qu’ici

aussi la richesse côtoie la pauvreté. Mais alors que Londres donne une impression générale de respectabilité, de maturité, à New York, la vie était trépidante. La corruption ne se cachait pas  ; d’ailleurs, elle venait d’en haut  : le gouvernement, les hommes politiques étaient corrompus. La violence régnait de chaque côté  ; la police ne valait guère mieux que les malfaiteurs. C’est terrible, n’est-ce pas ? »

UNE ENQUÊTEDOUBLE

Fabrice Bourland, Les Portes du sommeil, éditions�10/18,�coll. « Grands�détectives »,�2008,�p.�197.�

Anne Perry, Half Moon Street,�éditions�10/18,�coll.  « Grands�détectives »,�2000,�p.�95.�

Peurs sur la grande ville

Gravure représentant l’assassinat de Rosine Rosier par Vacher « le tueur de bergers » (Fin XIXe).

Page 7: Septembre 2010 - nrp-lycee.nathan.fr...(Les Chouans, 1834), Alexandre Dumas (Les Trois Mousquetaires, Le Comte de Monte-Cristo en 1844), Théophile Gautier (Le Ro-man de la momie,

NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 2010 7

Texte 1

(Paris, 1934. Interrogé au Café de la place Blanche comme témoin dans l’affaire du « personnage en noir », André Breton, chef de file du surréalisme, le commissaire Fourier, « archétype du policier français ».)

« — Comment ça commissaire ? demanda mon camarade en se retenant de rire. Vous n’avez pas eu le temps de l’interroger ?

— Oh, que si  ! Mais cela ne m’a pas été d’un grand secours. Après moult manifestations de mauvaise humeur, et après avoir débité tout un tas de sornettes sur l’inanité philosophique du type de limier à la Sherlock Holmes ou à la Chevalier Dupin, môssieu a daigné nous répondre qu’il n’avait rien remarqué d’anormal. Aucun soi-disant Autrichien répondant au signalement que nous lui avons fourni n’aurait cherché à entrer en contact avec lui. »

Parmi les enquêteurs célèbres de la littérature policière (l’inspecteur Lecoq de Gaboriau, le chevalier Auguste Dupin d’Edgar Poe, le journaliste Joseph Roule-tabille de Gaston Leroux), le personnage de Sherlock Holmes occupe une place à part. Le décès de Conan Doyle en 1930 a entraîné la vogue des pastiches holme-

siens. Le Fantôme de Baker Street (2008) de Fabrice Bourland oscille entre polar historique et fantastique, et convoque le fantôme du détective. Le personnage mythique de Sherlock Holmes n’a cessé de visiter le roman policier historique pour offrir ses méthodes d’investigation logique mais aussi nous donner une leçon de lecture.

Sherlock Holmes, une figure mythique

Étude des documents

SECTIONSCONCERNÉES :2de / 1re / T OBJETSD’ÉTUDE

• Le personnage de roman• Les réécritures

OBJECTIFS• Analyser une figure mythique en littérature• Repérer la composante ludique de la littérature et la lecture

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRESLire Une étude en rouge (1887) de Conan Doyle

AXESD’ÉTUDEA.Unefiguremythique

1.Que représente le personnage de Sherlock Holmes dans ces différents extraits ? 2.Comment est rendue l’extraordinaire célébrité du détective ?

B.Lalittératureetlalectureenjeu1.Comment se traduit l’humour des auteurs dans ces quatre extraits ?2.Quels plaisirs peut éprouver un lecteur de romans policiers historiques ?

A.ÉcritureDans une « lettre ouverte » pleine d’ironie, le personnage de Sherlock Holmes se plaint du traitement infligé par son créateur, Conan Doyle.

Fabrice Bourland, Les Portes du sommeil,�éditions�10/18,�coll. « Grands�détectives »,�2008,�p.�197.�2008,�p.�146-147.

Brigitte Aubert, Le Miroir des ombres, 2008,�p.198-199.

Alexander McCall Smith, Vérité et feuilles de thé, éditions�10/18,�coll. « Grands�détectives »,�2008,�p.�197.�2009,�p.�192.�

Gyles Brandeth, Oscar Wilde et le jeu de la mort, éditions�10/18,�coll. « Grands�détectives »,�2008,�p.�197.�2008,�p.�128-129.�Traduit�de�l’anglais�par�Jean-Baptiste�Dupin.

PRÉSENCES DE SHERLOCK HOLMES

Texte 2

« — Et moi aussi, intervint Mma Ramotswe. Je suis sûre que Sherlock Holmes lui-même serait fier de cette suggestion.

— Qui est ce Rra Holmes ? s’enquit la femme.— Un détective très célèbre, expliqua Mme Ramotswe. Là-bas.D’un geste, elle désigna la direction du nord.— Il vivait à Londres. Mais il est mort. »

Texte 4

(Londres, 1891. Au cours de son enquête, Louis Denfert, reporter au Petit Éclaireur, se rend à un bal mas-qué donné en l’honneur du romancier et poète Oscar Wilde.)

« Un homme, d’une trentaine d’années, au regard bleu pénétrant. Le nez fin, la mâchoire large, arbo-rant une superbe moustache châtain, arpentait le parquet ciré sans regar-der personne. Les mains dans le dos, il était vêtu d’un curieux costume en tweed au chapeau cloche assorti, une loupe suspendue autour du cou, l’air à la fois maussade et inquisiteur.

— Un flic ou un médecin, chuchota Louis à Albert.

Celui-ci répliqua en soulevant sa mantille :

— Vous avez raison et vous avez tort, c’est Conan Doyle, le père de Sherlock Holmes. »

Texte 3

(Alors que le fantasque Oscar Wilde a proposé à ses amis le jeu de la mort, jeu au cours duquel chacun inscrit sur une feuille le nom de la victime de son choix, la mort se met à frapper réellement les victimes potentielles. Le nom de Sherlock Holmes figurait sur cette liste funèbre…)

« Oscar sursauta.— Comment, Arthur ? Que dites-vous ? — J’ai l’intention de me débarrasser moi-même de Sherlock Holmes.— C’est donc vous qui l’avez choisi dimanche soir.Doyle éclata de rire…. » Retrouvez la suite des extraits

sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

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LA LITTÉRATURE

& LA LECTURE EN JEU

Gravure représentant l’assassinat de Rosine Rosier par Vacher « le tueur de bergers » (Fin XIXe).

Page 8: Septembre 2010 - nrp-lycee.nathan.fr...(Les Chouans, 1834), Alexandre Dumas (Les Trois Mousquetaires, Le Comte de Monte-Cristo en 1844), Théophile Gautier (Le Ro-man de la momie,

NOUVELLE REVUE PÉDAGOGIQUE - LYCÉE / Le roman policier historique / septembre 20108

L’une des caractéristiques de la litté-rature policière est de se fonder sur une convention affichée, de revendiquer le jeu et le «  faire semblant  ». Au lieu de re-chercher l’originalité, les romans policiers historiques de la collection des éditions 10/18 assument leur fidélité aux codes et stéréotypes du genre policier, privilégiant la composante ludique sur la composante mimétique. Le genre suppose en effet des personnages immuables (enquêteur / criminel / témoins), un processus récurrent (l’enquête), des scènes obligées (la scène du crime), autant de stéréotypes qui font appel à la compétence générique du lec-teur. La complicité est augmentée par la présence d’un héros récurrent. Il garantit, selon un pacte de lecture implicite entre

Une littérature au second degrél’auteur et le lecteur, le respect des règles du genre et le retour à l’univers propre au personnage. L’originalité tient dans le choix de ce personnage : le philosophe athénien Aristote (Margaret Doody), le romancier dandy Oscar Wilde (Gyles Brandeth) ou Eraste Fandorine, l’enquêteur de la Russie tsariste (Boris Akounine).

Ainsi, le stéréotype inscrit aussi le texte dans un système de références littéraires. Les récits ne cessent de faire allusion à la Bi-bliothèque universelle à travers une inter-textualité particulièrement riche et variée. Les aventures des enquêteurs de Fabrice Bourland, Andrew Singleton et James Trelawney, s’inscrivent dans l’histoire de la Littérature. Grand lecteur de Nerval et de Poe, Singleton est capable de résoudre

une énigme par sa connaissance du livre tandis que Trelawney a pour modèle Conan Doyle. « La vérité est dans les livres.  Je ne fais qu’appliquer cet adage et en étendre le prin-cipe à l’art de l’expertise policière », avoue le héros détective. Pur jeu de langage et de signes, le roman policier historique affirme son autonomie par rapport à la réalité et se présente comme une littérature au second degré. Pratiquant l’humour ou l’ironie, les enquêtes semblent avoir pour ressorts l’acte même de lecture ou de relecture et réfléchir sur la construction d’un lecteur, «  modèle  » pour Umberto Eco, ou adepte de la «  critique policière  » pour Pierre Bayard. Ces enquêtes qui donnent un sens au « plaisir du texte ».

Retrouvez la suite de l’extrait sur le site���www.nrp-lycee.com�+ les questions d’étude à télécharger.

Texte 1

« […] Bien que The Time Machine ne soit qu’un…La ride verticale se creusa sur son front pendant qu’elle cherchait le terme

approprié.— … un roman scientifique, je ne peux m’empêcher de penser que M. Wells

n’avait pas seulement l’intention de distraire ses lecteurs…

Frank Tallis, Du sang sur Vienne, éditions�10/18,�coll. « Grands�détectives »,� 2005,�p.�244-245.�

Étude du document

SECTIONSCONCERNÉES :2de / 1re / T OBJETSD’ÉTUDE :

• La vision de l’homme et du monde• Le personnage de roman• Les réécritures

OBJECTIFS :• Analyser les stéréotypes d’un genre• Réfléchir sur les conditions de production et de réception d’une œuvre

ACTIVITÉSCOMPLÉMENTAIRES• Lecture de La Machine à explorer le temps (1895) de H.G. Wells• Vision de Metropolis (1927) de Fritz Lang

AXESD’ÉTUDEA.UnréquisitoirecontrelagrandeVille

1.Comment les différences sociales entre les classes sont-elles mises en valeur dans l’exposé d’Amelia?2.En quoi la représentation de la grande Ville échappe à la représentation réaliste ?

B.Undialogueintertextuel1.Justifiez la référence à l’œuvre de Wells dans l’extrait.2. En quoi la référence à La Machine à explorer le temps favorise-t-elle une réflexion « en abyme » sur le roman policier historique ?

LA LITTÉRATURE& LA LECTURE

EN JEU

Supplément à la NRP Lycée n° 41 de septembre 2010. Ne peut être vendu séparément. Auteur : Franck Evrard (professeur de français). Rédaction, administration, correspondance : Editions Nathan, 25, avenue Pierre de Coubertin – 75013 Paris. Tél. 01 45 87 50 00 / fax : 01 45 87 57 91. Directrice de la publication : Catherine Lucet. Directrice déléguée : Françoise Fougeron. Directeurs de la rédaction : Jean-Claude Mary, Yun Sun Limet. Conseillère pédagogique : Corinne Abensour. Responsable des partenariats : Christophe Vital-Durand 01 45 87 52 83. Maquette conception : Elise Rebaa-Launay. Maquette réalisation : Julia Girodroux. Iconographe : Laure Penchenat. Abonnements : Nathan Abonnements – BP 90006 – 59718 Lille cedex 9. Tél : n0 vert 0 800 032 032 (depuis la France métropolitaine) 00 33 (0)3 28 38 52 46 – fax : 33 (0)3 20 12 11 12 – email : HYPERLINK "mailto:[email protected]" [email protected]. Abonnements pour la Suisse : Edigroupe SA, case postale 393, CH 1225 Chêne-Bourg – HYPERLINK "mailto:[email protected]" [email protected] – tél : 022/860 84 01 – fax : 022/348 44 82. Abonnements pour la Belgique : Edigroup sprl, tél : 00 32 (0)70 233 304 – fax : 00 32 (0)70 233 414 – mail : HYPERLINK "mailto:[email protected]" [email protected]. Dépôt légal : septembre 2010. N° d’éditeur : 108392 Crédits photographiques : Couv : BIS / Ph. Yves Bresson, Rosalba Giovanna Carriera, Portrait of man,© The National Gallery, Londres, © Archives Larbor ; 4 : LEEMAGE / Costa ; 5 : ROGER-VIOLLET / Musée carnavalet ; 6 : ROGER-VIOLLET ; 8 : LEEMAGE / Heritage images

Illustration pour Flamme d’Argent (de Conan Doyle), Sherlock Holmes et le Docteur Watson dans un train, 1901.