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Article original Stimulation cardiaque chez l’enfant : indications, voies d’abord, et modes de stimulation Pediatric cardiac pacing: indications, implant techniques, pacing mode E. Villain Service de cardiologie pédiatrique, hôpital Necker-Enfants–Malades, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France Disponible sur internet le 07 décembre 2004 Résumé Malgré des difficultés techniques réelles et des spécificités liées au jeune âge, la stimulation cardiaque est maintenant possible à tout âge avec des résultats satisfaisants. Les principales indications de stimulation de l’enfant sont le bloc auriculoventriculaire complet, congénital ou postopératoire, et la défaillance sinusale postopératoire. Les enfants symptomatiques ou ayant une myocardiopathie doivent être stimulés, de même que ceux ayant un bloc complet postopératoire. En cas de bloc congénital, on retient une indication prophylactique chez les enfants dont la fréquence cardiaque moyenne est inférieure à une valeur seuil de 50 battements par minute (batt/min). Dans notre département, la voie de stimulation est épicardique chez les jeunes enfants, en pratique < 10–15 kg et endocavitaire chez les enfants plus grands, sauf en cas de difficultés d’abord du fait d’une malformation. En fonction de l’âge de l’enfant, on opte soit pour la stimulation double chambre, soit pour la stimulation ventriculaire avec asservissement à l’activité, qui permet de préserver le capital veineux en n’implantant qu’une seule sonde et dont les résultats sont excellents chez les enfants ayant un cœur normal. Les patients ayant une défaillance sinusale isolée sont stimulés en mode atrial. La majorité des enfants ayant un stimulateur cardiaque mènent une vie normale. À long terme cependant, quelques patients ont des complications préoccupantes : thromboses veineuses, infections liées à la répétition des interventions, difficultés d’extraction des sondes ; des myocardiopathies sont également décrites et certains les rapportent aux effets délétères de la stimulation à la pointe du ventricule droit. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Over the last years, pacing leads design and pacemaker (PM) generator size, reliability, and longevity have markedly improved, so that reliable paediatric implant can now be performed at any age with a low complication rate. Main indications include congenital and postope- rative atrioventricular block (AVB) and postoperative sick sinus syndrome. Implantation of a PM is mandatory for children who are sympto- matic from syncope or congestive heart failure and for those who have advanced block persisting more than 10 days after cardiac surgery. Criteria for pacing have been established in relation with the bradycardia and prophylactic pacing is recommended in children with congenital AVB and a mean heart rate <50 beats/minute. The majority of paediatric cardiologists recommend epicardial pacing in children less than 10 kg and when venous access to the heart is limited by congenital anomalies or prior operation; for older children, transvenous implantation has become the technique of choice. As heart rate is the main determinant of cardiac output at exercise in children with normal heart structures, the VVI-R mode is an alternative to dual chamber transvenous pacing in young patients. Patients with isolated sinus failure are paced in the atrium. Although the majority of patients are doing well, late complications within the paediatric population include venous thrombosis and difficulties in lead extraction. Myocardial dysfunction in children with congenital AVB is increasingly reported, but it is not determined whether it is due to the underlying disease or to right ventricular apical pacing and adverse remodelling. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Bloc auriculoventriculaire complet ; Bradycardie ; Mort subite ; Stimulateur ; Myocardiopathie ; Pédiatrie Keywords: Complete atrioventricular block; Bradycardia, Sudden death; Pacemaker; Cardiomyopathy; Pediatric Adresse e-mail : [email protected] (E. Villain). Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 54 (2005) 2–6 http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/ 0003-3928/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.ancard.2004.11.006

Stimulation cardiaque chez l’enfant : indications, voies d’abord, et modes de stimulation

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Article original

Stimulation cardiaque chez l’enfant :indications, voies d’abord, et modes de stimulation

Pediatric cardiac pacing: indications, implant techniques, pacing mode

E. Villain

Service de cardiologie pédiatrique, hôpital Necker-Enfants–Malades, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France

Disponible sur internet le 07 décembre 2004

Résumé

Malgré des difficultés techniques réelles et des spécificités liées au jeune âge, la stimulation cardiaque est maintenant possible à tout âgeavec des résultats satisfaisants. Les principales indications de stimulation de l’enfant sont le bloc auriculoventriculaire complet, congénital oupostopératoire, et la défaillance sinusale postopératoire. Les enfants symptomatiques ou ayant une myocardiopathie doivent être stimulés, demême que ceux ayant un bloc complet postopératoire. En cas de bloc congénital, on retient une indication prophylactique chez les enfants dontla fréquence cardiaque moyenne est inférieure à une valeur seuil de 50 battements par minute (batt/min). Dans notre département, la voie destimulation est épicardique chez les jeunes enfants, en pratique < 10–15 kg et endocavitaire chez les enfants plus grands, sauf en cas dedifficultés d’abord du fait d’une malformation. En fonction de l’âge de l’enfant, on opte soit pour la stimulation double chambre, soit pour lastimulation ventriculaire avec asservissement à l’activité, qui permet de préserver le capital veineux en n’implantant qu’une seule sonde etdont les résultats sont excellents chez les enfants ayant un cœur normal. Les patients ayant une défaillance sinusale isolée sont stimulés enmode atrial. La majorité des enfants ayant un stimulateur cardiaque mènent une vie normale. À long terme cependant, quelques patients ontdes complications préoccupantes : thromboses veineuses, infections liées à la répétition des interventions, difficultés d’extraction des sondes ;des myocardiopathies sont également décrites et certains les rapportent aux effets délétères de la stimulation à la pointe du ventricule droit.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

Over the last years, pacing leads design and pacemaker (PM) generator size, reliability, and longevity have markedly improved, so thatreliable paediatric implant can now be performed at any age with a low complication rate. Main indications include congenital and postope-rative atrioventricular block (AVB) and postoperative sick sinus syndrome. Implantation of a PM is mandatory for children who are sympto-matic from syncope or congestive heart failure and for those who have advanced block persisting more than 10 days after cardiac surgery.Criteria for pacing have been established in relation with the bradycardia and prophylactic pacing is recommended in children with congenitalAVB and a mean heart rate <50 beats/minute. The majority of paediatric cardiologists recommend epicardial pacing in children less than 10 kgand when venous access to the heart is limited by congenital anomalies or prior operation; for older children, transvenous implantation hasbecome the technique of choice. As heart rate is the main determinant of cardiac output at exercise in children with normal heart structures, theVVI-R mode is an alternative to dual chamber transvenous pacing in young patients. Patients with isolated sinus failure are paced in theatrium. Although the majority of patients are doing well, late complications within the paediatric population include venous thrombosis anddifficulties in lead extraction. Myocardial dysfunction in children with congenital AVB is increasingly reported, but it is not determinedwhether it is due to the underlying disease or to right ventricular apical pacing and adverse remodelling.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Bloc auriculoventriculaire complet ; Bradycardie ; Mort subite ; Stimulateur ; Myocardiopathie ; Pédiatrie

Keywords: Complete atrioventricular block; Bradycardia, Sudden death; Pacemaker; Cardiomyopathy; Pediatric

Adresse e-mail : [email protected] (E. Villain).

Annales de Cardiologie et d’Angéiologie 54 (2005) 2–6

http://france.elsevier.com/direct/ANCAAN/

0003-3928/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.ancard.2004.11.006

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La taille, les performances, et la durée de vie des systèmesde stimulation sont maintenant adaptées aux exigences pédia-triques, si bien que l’implantation d’un stimulateur est réali-sable dés la période néonatale si nécessaire. Les principalesindications de stimulation pédiatriques sont les blocs auricu-loventriculaires complets (BAVC) et les troubles du rythmepostopératoires.

1. Indications de stimulation

1.1. Bloc auriculoventriculaire complet « congénital »

Le BAVC de l’enfant est une affection rare, dont le carac-tère authentiquement congénital n’est pas toujours prouvé.Certains blocs congénitaux sont la conséquence d’une ano-malie de développement du tissu de conduction s’intégrantdans une malformation cardiaque (doubles discordances,cœurs univentriculaires). Chez les nouveau-nés ayant un cœurd’architecture normale, le bloc complet congénital est pres-que toujours associé à la présence chez les mères de cespatients d’anticorps anti-SSA-Ro et/ou anti-SSB-La, avec ousans affection systémique maternelle (lupus, syndrome deGougerot-Sjögren) ; diverses études expérimentales ont mon-tré que ces anticorps maternels circulants induisent une « myo-cardite » fœtale dont le bloc est la séquelle [1–4]. Le risquede BAVC chez les nouveau-nés des femmes ayant des anti-corps ne dépasse pas 2 % ; cette inconstance de l’atteintefœtale reste inexpliquée, d’autant que le risque de récurrenceest de 10 à 17 % quand une femme a déjà eu un enfant atteint[5–7]. Après les premiers mois de vie, il est rare qu’on trouvedes anticorps maternels et l’étiologie du bloc reste souventinconnue [8,9]. Une fois éliminés, les rares cas de myocardi-tes prouvées, de blocs familiaux ou avec myocardiopathie,on peut se demander s’il s’agit de blocs vraiment congéni-taux ou bien acquis au cours de l’enfance et dont l’étiologiereste à déterminer.

1.1.1. Indications de stimulation dans le BAVC congénitalÀ tout âge, la survenue de symptômes sévères, syncope ou

défaillance cardiaque, constitue une indication de stimula-tion. Chez les grands enfants, il est nécessaire dès que possi-ble de compléter le bilan par une épreuve d’effort ; en effet,les enfants aménagent leur vie en fonction de leur handicapet seule l’épreuve d’effort permet d’estimer les capacités réel-les de l’enfant à l’activité.

La constatation en échocardiographie d’une dysfonctionventriculaire gauche figure maintenant dans les recomman-dations concernant les indications d’implantation de stimu-lateur chez les patients ayant un BAVC congénital [10].

C’est au cours des premières années de vie que la morbi-dité et la mortalité des enfants ayant un BAVC congénital estla plus élevée [11,12]. Les études rétrospectives faites dansles années 1980 ont montré un accroissement du risque desyncope et de mort subite quand la fréquence ventriculairediminue et des recommandations d’implantation prophylac-

tique ont donc été établies en fonction de la fréquence cardia-que et de l’âge de l’enfant [10,13–16]. Ces recommandationsdoivent impérativement être suivies, en particulier chez lesenfants complètement asymptomatiques (Fig. 1).

Des critères électrocardiographiques sont parfois retenuspour décider de l’implantation d’un stimulateur : QRS lar-ges, anomalies de la phase lente, extrasystoles ou troubles durythme ventriculaires.

1.2. Troubles du rythme et de la conductionpostopératoires

Tout BAVC postopératoire se prolongeant au-delà de dixjours constitue une indication d’implantation [10] de mêmeque certains BAV partiels intra- ou infrahissien. Nous réali-sons systématiquement une étude endocavitaire postopéra-toire chez les enfants ayant un BAV II du deuxième degré, unbloc « trifasciculaire » ou ayant eu un bloc complet durantplus de 48 heures et gardant des anomalies résiduelles de laconduction [17].

Bien que les défaillances sinusales postopératoires soientle plus souvent modérées et bien tolérées, l’implantation d’unstimulateur est parfois nécessaire chez des patients ayant dessymptômes (fatigue, malaises) liés à une bradycardie exces-sive. Il est également recommandé de stimuler les patientsayant une bradycardie sévère, avec un rythme cardiaque< 30 batt/min et/ou des pauses prolongées, ainsi que ceuxrecevant des traitements antiarythmiques aggravant signifi-cativement la défaillance sinusale sous-jacente [10].

Fig. 1. Indication d’implantation prophylactique.ECG d’une enfant de 13 ans, morte subitement trois mois après cet enregis-trement. La fréquence cardiaque est < 45 bpm, ce qui constituait une indi-cation de stimulation.

< 2 ans fréquence ventriculaire < 50 battements/minute (batt/min)(< 70 batt/min si malformation cardiaque significative)

> 2 ans fréquence ventriculaire moyenne (ECG sur 24 heures)< 50 batt/minfréquence instantanée (ECG en consultation) < 45 batt/minpauses ≥ 2–3 fois le cycle de base

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2. Voies d’abord

2.1. Implantation épicardique

Chez les nouveau-nés et les nourrissons < 10–15 kg, notrepréférence va à la stimulation épicardique, permettant de pré-server le capital veineux de patients qui devront être stimuléstoute leur vie, d’autant que la mauvaise réputation de la sti-mulation épicardique n’est plus justifiée. Les électrodes poreu-ses à diffusion de stéroïdes permettent d’obtenir des caracté-ristiques de stimulation satisfaisantes et stables [18]. Lesstimulateurs disposent d’une réserve d’énergie suffisante, etla position abdominale profonde du boîtier le protège contreles traumatismes et l’extériorisation (Fig. 2). Dans notre expé-rience, les résultats de la stimulation épicardique sont satis-faisants et on peut généralement attendre au moins cinq ansavant de stimuler les enfants par voie veineuse [19]. Comptetenu de la sévérité du pronostic chez les nouveaux-nés ayantun BAVC diagnostiqué avant la naissance, ces enfants doi-vent bénéficier d’un environnement de réanimation cardiolo-gique pédiatrique dès leur naissance [11].

Quand l’anatomie rend impossible l’abord veineux ducœur, la voie épicardique est seule utilisable. C’est le cas despatients ayant un ventricule unique (risque d’embolies systé-miques) ou de ceux ayant eu un montage chirurgical de typedérivation cavopulmonaire totale (Fig. 3). Dans ces cas, lesparamètres de stimulations sont souvent médiocres, en rai-son de la fibrose postopératoire chez ces patients fréquem-ment opérés [20].

2.2. Implantation endocavitaire

Au-delà du poids de 10–15 kg, le système d’entraînementest implanté par voie veineuse. Sous anesthésie générale, les

sondes sont introduites par dénudation de la veine céphali-que et/ou ponction de la veine sous-clavière, vissées dans lemyocarde, puis raccordées au boîtier introduit dans une pochepré-pectorale ; les déplacements secondaires de sondes ontquasiment disparu avec l’utilisation exclusive de sondes à fixa-tion active, et la croissance pose peu de problème si on fixeles sondes avec du fil résorbable en laissant une boucle per-mettant la croissance [21,22]. Chez les patients déjà opérés,il est indispensable de vérifier la perméabilité des accès vei-neux au cœur, en particulier après interventions de Senningou Mustard (transposition des gros vaisseaux) ; en effet,l’introduction de sondes dans des chenaux rétrécis risqued’entraîner un syndrome cave supérieur et un dysfonctionne-ment du montage. En cas de sténose ou d’obstruction vei-neuse, il faut refaire le montage chirurgicalement ou bien dila-ter puis « stenter » les veines avant l’implantation [23].

3. Choix du mode de stimulation

Outre les problèmes posés par la taille et la croissance desenfants, la spécificité de l’entraînement cardiaque en pédia-trie tient aux différences de fréquence cardiaque, de niveaud’activité, et de durée de stimulation séparant enfants et adul-tes.

3.1. Mode double-chambre DDD

Le sinus des enfants ayant un BAVC congénital est en règlegénéral normal et on peut donc chez eux réaliser un synchro-nisme auriculoventriculaire piloté par le sinus, grâce à unestimulation double chambre. Ce mode de stimulation est pos-sible dés la période néonatale, et on programme alors le sti-mulateur avec des fréquences élevées, par exemple de 80 à180 batt/min. L’absence de conduction rétrograde et de trou-ble du rythme atrial permet de programmer des périodesréfractaires courtes, en désactivant les algorithmes de repli.

Les enfants ayant un BAV postopératoire ont un risqueimportant de développer ultérieurement des troubles du

Fig. 2. Radiographique thoracique d’un nouveau-né stimulé. On voit les élec-trodes atriale et ventriculaire, raccordées au stimulateur abdominal.

Fig. 3. Angiographie d’une dérivation cavopulmonaire chez un enfant ayantun ventricule unique et un BAVC. Il n’y a pas d’abord veineux au cœur etdes électrodes endocavitaires ont été introduites par le chirurgien, en raisonde l’impossibilité d’obtenir des seuils satisfaisants par voie épicardique.

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rythme atrial (flutter cicatriciel) et il faut donc choisir poureux des stimulateurs dont la technologie permet la reconnais-sance (voire la prévention et le traitement) de ces troubles durythme et qui ont des mémoires permettant de recueillir destracés. La fréquence maximale doit être réglée en fonction dela cardiopathie sous-jacente et de l’âge du patient.

3.2. Mode ventriculaire asservi VVI-R

Quand la petite taille des veines incite à ne mettre en placequ’une seule électrode ventriculaire, on opte pour un sys-tème de stimulation asservi à l’activité physique, car la fré-quence cardiaque de l’enfant constitue le principal facteurd’élévation du débit cardiaque, en particulier à l’effort [24].Dans notre expérience, les capteurs les mieux adaptés sontceux qui détectent les mouvements de l’enfant ; enregistre-ments ECG sur 24 heures et épreuves d’effort permettent derégler au mieux le stimulateur (Fig. 4). La voie d’abord et lemode de stimulation des enfants ayant un bloc congénital évo-luent donc avec l’âge de l’enfant (Tableau 1).

3.3. Le mode de stimulation atriale (AAI, AAI-R)

Il convient aux patients ayant une défaillance sinusale pos-topératoire isolée, sans trouble de la conduction auriculoven-triculaire.

4. Surveillance et pronostic à long terme

Une consultation spécialisée est réalisée tous les six mois.On vérifie la charge de la batterie ainsi que les seuils de détec-tion et de stimulation, et le rythme sous-jacent du patient.L’expérience montre que le seuil de stimulation des enfantsayant un BAVC congénital est souvent plus instable que celuides adultes, et que ces patients sont souvent dépendants, d’oùla nécessité de programmer les stimulateurs avec une margede sécurité suffisante, voire à utiliser les systèmes avec auto-capture. Les enfants sont autorisés à mener une vie normale.

Il est probable que la répétition des interventions chez lespatients les plus jeunes lors de la primo-implantation va poserdes problèmes à long terme. Bien qu’on ne stimule par voieveineuse que les enfants les plus grands, certains dévelop-pent déjà des sténoses voire des thromboses veineuses tota-les (Fig. 5) ; ainsi, sur 62 enfants contrôlés par angiographieavant replacement d’un stimulateur, nous avons trouvé cinqthromboses complètes et neuf sténoses de la veine sous-clavière. La nécessité d’extraire ultérieurement les sondesrésultant d’une stimulation prolongée, et l’augmentation durisque infectieux avec la répétition des interventions [25] sontd’autres difficultés potentielles.

Les études de survie des enfants atteints de BAVC avecanticorps maternels font apparaître un risque de myocardio-pathies dilatées sévères plus ou moins tardives [26]. Bien quela stimulation prolongée à la pointe du ventricule droit ait étéincriminée dans la genèse de cette myocardiopathie [27] laconstatation d’une fibroélastose myocardique précoce, pré-cédant l’implantation d’un stimulateur chez des enfants ayantun BAVC immunologique est plutôt en faveur d’une atteintemyocardique primitive [28]. Il est donc important que lesenfants stimulés soient contrôlés par des échocardiographiesrégulières et une re-synchronisation ventriculaire peut êtrediscutée en cas de myocardiopathie.

En conclusion, l’implantation d’un stimulateur est réalisa-ble à tout âge, avec une incidence de complications très fai-

Fig. 4. Tracés Holter enregistrés chez un enfant ayant un système de stimu-lation ventriculaire asservi à l’activité. La fréquence de stimulation varieavec l’activité de l’enfant et on règle le pacemaker pour que la fréquencestimulée soit la plus proche possible de la fréquence spontanée de l’enfant(ondes P).

Tableau 1Voies et modes de stimulation chez l’enfant avec BAVC isolé

< 10 kg : épicardique, double chambre10–20 kg : endocavitaire, ventriculaire à fréquence asservie> 20 kg : endocavitaire, double chambre

Fig. 5. Angiographie montrant une thrombose totale des veines du membresupérieur gauche chez un enfant stimulé par voie veineuse.

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ble dans des mains entraînées. Les résultats de la stimulationpédiatrique sont satisfaisants et les enfants stimulés mènentglobalement une vie normale. À long terme cependant, desproblèmes d’abord veineux peuvent compliquer la stimula-tion de ces patients et il faut également poursuivre la sur-veillance prolongée du myocarde de ces patients.

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