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CRPE 2014 – Exemple de sujet n° 1 – Page 1 sur 6 I. Question relative aux textes proposés À partir du corpus proposé, vous analyserez comment la mémoire inscrit l’homme dans le temps et donne sens à son existence. _______________ Texte 1 : J.M.G. Le Clézio, L’Africain, Gallimard, « Folio », 2005, pp. 119-123. C’est à l’Afrique que je veux revenir sans cesse, à ma mémoire d'enfant. À la source de mes sentiments et de mes déterminations. Le monde change, c’est vrai, et celui qui est debout là-bas au milieu de la plaine d’herbes hautes, dans le souffle chaud qui apporte les odeurs de la savane, le bruit aigu de la forêt, sentant sur ses lèvres l’humidité du ciel et des nuages, celui-là est si loin de moi qu'aucune histoire, aucun voyage ne me permettra de le rejoindre. Pourtant, parfois, je marche dans les rues d'une ville, au hasard, et tout d’un coup, en passant devant une porte au bas d'un immeuble en construction, je respire l’odeur froide du ciment qui vient d’être coulé, et je suis dans la case de passage d’Abakaliki, j’entre dans le cube ombreux de ma chambre et je vois derrière la porte le grand lézard bleu que notre chatte a étranglé et qu’elle m'a apporté en signe de bienvenue. […] Si je n’avais pas eu cette connaissance charnelle de l’Afrique, si je n'avais pas reçu cet héritage de ma vie avant ma naissance, que serais-je devenu ? Aujourd'hui, j’existe, je voyage, j’ai à mon tour fondé une famille, je me suis enraciné dans d'autres lieux. Pourtant, à chaque instant, comme une substance éthéreuse qui circule entre les parois du réel, je suis transpercé par le temps d’autrefois, à Ogoja. Par bouffées cela me submerge et m’étourdit. Non pas seulement cette mémoire d’enfant, extraordinairement précise pour toutes les sensations, les odeurs, les goûts, l’impression de relief ou de vide, le sentiment de la durée. C’est en l'écrivant que je le comprends, maintenant. Cette mémoire n’est pas seulement la mienne. Elle est aussi la mémoire du temps qui a précédé ma naissance, lorsque mon père et ma mère marchaient ensemble sur les routes du haut pays, dans les royaumes de l’ouest du Cameroun. La mémoire des espérances et des angoisses de mon père, sa solitude, sa détresse à Ogoja. La mémoire des instants de bonheur, lorsque mon père et ma mère sont unis par l’amour qu'ils croient éternel. Alors ils allaient dans la liberté des chemins, et les noms de lieux sont entrés en moi comme des noms de famille, Bali, Nkom, Bamenda, Banso, Nkongsamba, Revi, Kwaja. Et les noms de pays, Mbembé, Kaka, Nsungli, Bum, Fungom. Les hauts plateaux où avance lentement le troupeau de bêtes à cornes de lune à accrocher les nuages, entre Lassim et Ngonzin.

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CRPE!2014!–!Exemple!de!sujet!n°!1!–!Page!1!sur!6!

I.%Question%relative%aux%textes%proposés%% À partir du corpus proposé, vous analyserez comment la mémoire inscrit l’homme dans

le temps et donne sens à son existence. _______________

Texte 1 : J.M.G. Le Clézio, L’Africain, Gallimard, « Folio », 2005, pp. 119-123.

C’est à l’Afrique que je veux revenir sans cesse, à ma mémoire d'enfant. À la source

de mes sentiments et de mes déterminations. Le monde change, c’est vrai, et celui qui est debout là-bas au milieu de la plaine d’herbes hautes, dans le souffle chaud qui apporte les odeurs de la savane, le bruit aigu de la forêt, sentant sur ses lèvres l’humidité du ciel et des nuages, celui-là est si loin de moi qu'aucune histoire, aucun voyage ne me permettra de le rejoindre.

Pourtant, parfois, je marche dans les rues d'une ville, au hasard, et tout d’un coup, en passant devant une porte au bas d'un immeuble en construction, je respire l’odeur froide du ciment qui vient d’être coulé, et je suis dans la case de passage d’Abakaliki, j’entre dans le cube ombreux de ma chambre et je vois derrière la porte le grand lézard bleu que notre chatte a étranglé et qu’elle m'a apporté en signe de bienvenue.

[…] Si je n’avais pas eu cette connaissance charnelle de l’Afrique, si je n'avais pas reçu cet

héritage de ma vie avant ma naissance, que serais-je devenu ? Aujourd'hui, j’existe, je voyage, j’ai à mon tour fondé une famille, je me suis enraciné

dans d'autres lieux. Pourtant, à chaque instant, comme une substance éthéreuse qui circule entre les parois du réel, je suis transpercé par le temps d’autrefois, à Ogoja. Par bouffées cela me submerge et m’étourdit. Non pas seulement cette mémoire d’enfant, extraordinairement précise pour toutes les sensations, les odeurs, les goûts, l’impression de relief ou de vide, le sentiment de la durée.

C’est en l'écrivant que je le comprends, maintenant. Cette mémoire n’est pas seulement la mienne. Elle est aussi la mémoire du temps qui a précédé ma naissance, lorsque mon père et ma mère marchaient ensemble sur les routes du haut pays, dans les royaumes de l’ouest du Cameroun. La mémoire des espérances et des angoisses de mon père, sa solitude, sa détresse à Ogoja. La mémoire des instants de bonheur, lorsque mon père et ma mère sont unis par l’amour qu'ils croient éternel. Alors ils allaient dans la liberté des chemins, et les noms de lieux sont entrés en moi comme des noms de famille, Bali, Nkom, Bamenda, Banso, Nkongsamba, Revi, Kwaja. Et les noms de pays, Mbembé, Kaka, Nsungli, Bum, Fungom. Les hauts plateaux où avance lentement le troupeau de bêtes à cornes de lune à accrocher les nuages, entre Lassim et Ngonzin.

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Sujet 01

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Texte 2 : René de Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1946, pp. 76-77

Hier au soir je me promenais seul ; le ciel ressemblait à un ciel d'automne ; un vent

froid soufflait par intervalles. A la percée d'un fourré, je m'arrêtai pour regarder le soleil : il s’enfonçait dans des nuages au-dessus de la tour d’Alluye, d’où Gabrielle, habitante de cette tour, avait vu comme moi le soleil se coucher il y a deux cents ans. Que sont devenus Henri et Gabrielle ? Ce que je serai devenu quand ces Mémoires seront publiés.

Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d’une grive perchée sur la plus haute branche d'un bouleau. A l’instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel. J’oubliai les catastrophes dont je venais d’être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j’entendis si souvent siffler la grive. Quand je l’écoutais alors, j’étais triste de même qu'aujourd'hui. Mais cette première tristesse était celle qui naît d'un désir vague de bonheur, lorsqu’on est sans expérience ; la tristesse que j’éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l’oiseau dans les bois de Combourg m’entretenait d’une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. Je n’ai plus rien à apprendre, j’ai marché plus vite qu’un autre, et j’ai fait le tour de la vie. Les heures fuient et m’entraînent ; je n’ai pas même la certitude de pouvoir achever ces Mémoires. Dans combien de lieux ai-je déjà commencé à les écrire, et dans quel lieu les finirai-je ? Combien de temps me promènerai-je au bord des bois ? Mettons à profit le peu d’instants qui me restent ; hâtons-nous de peindre ma jeunesse, tandis que j’y touche encore : le navigateur, abandonnant pour jamais un rivage enchanté, écrit son journal à la vue de la terre qui s’éloigne et qui va bientôt disparaître.

Texte 3 : « Entretien avec Georges Perec », L’Arc, n° 76, 1979, pp. 29-30.

Je me souviens1 est un peu comme ce qui se passe lorsque deux camarades de classe qui ne se sont pas vus depuis vingt ans se rencontrent sur le quai d’une gare et commencent à se remémorer la binette de leur prof de maths, les tics du surveillant général, les sobriquets donnés aux pions et leurs autres copains également perdus de vue. Aucun de ces micro-souvenirs n’est réellement important. Mais ils sont partageables, ils scellent une connivence et ils en sont même les signes les plus précieux.

Je pense que j’ai essayé dans Je me souviens d'appliquer cette remémoration systématique à toute ma génération : écrire un fragment d’autobiographie qui pourrait être celle de tous les Parisiens de mon âge. Il importe peu que ces souvenirs soient personnels (uniques) ou généraux (collectifs), il importe peu, même, qu’il y ait ou non des erreurs dedans, cela fonctionne comme une grille où chacun peut venir déchiffrer un fragment de sa propre histoire.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!1!Je me souviens est le titre de l’un des ouvrages de Georges Perec.

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II.%Connaissance%de%la%langue%

II.1.$ Question$sur$l’orthographe$$À partir de ce récit écrit par un élève, vous répondrez aux questions qui le suivent :

Sophie fouillai partous, a la recherche de son cofre ; elle a regardé tout autour, sous les table, dans les placard. Elle ce met a pleuré, car elle avait peur d’ètre surprise la dans sette maison ; elle n’y voie plus rien, ces yoeux sont envaïs par les larmes. D’un cout, elle entandait des bruits de pas teribles qui font tous tremblé. Une silouette apparaissa, et elle, Sophie, disparu sous les escaliés. Son keur bas trés fort.

a. Réécrivez cette production d’élève en corrigeant les erreurs lexicales, grammaticales et celles commises dans l’emploi des temps du passé.

b. Dans le passage, analysez les deux formes verbales suivantes : « entandait » et « apparaissa ».

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II.2.$ Questionnaire$sur$la$phrase$simple$et$la$phrase$complexe$$Pour ce questionnaire, les réponses apportées doivent être claires et précises. Le candidat reportera bien sur sa copie le numéro de la question et la réponse complète.

1) Une phrase simple : a) Ne compte qu’une seule proposition comportant un verbe conjugué. b) Peut comporter plusieurs propositions sous certaines conditions.

2) Une phrase complexe peut se construire par : a) Juxtaposition. b) Coordination. c) Subordination. d) Juxtaposition et coordination. e) Coordination et subordination. f) Juxtaposition et subordination. g) Juxtaposition, coordination et subordination.

3) « Je prends à Auch mon train pour Toulouse à neuf heures. » comporte : a) Une proposition. b) Deux propositions. c) Trois propositions. d) Quatre propositions.

4) « Il est neuf heures, j'attends le train » : a) Est une phrase simple. b) Est une phrase complexe créée par :

x) Juxtaposition. y) Coordination. z) Subordination.

5) « J'attends le train de neuf heures car je dois aller travailler à Toulouse » : a) Est une phrase simple. b) Est une phrase complexe créée par :

x. Juxtaposition. y. Coordination. z. Subordination.

6) Dans la phrase « Il faut attendre qu’elle vienne. », la proposition soulignée est : a) une subordonnée complétive. b) une subordonnée relative.

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7) Dans la phrase « Je me demande qui viendra demain. », la proposition soulignée est : a) Une subordonnée relative. b) Une subordonnée interrogative indirecte.

8) Le verbe voir, dans la phrase « Elle veut que tu … sa maison » s’écrit : a) Vois. b) Voies. c) Voyes.

9) Dans la phrase « S’il neigeait, je serais déjà sur les pistes. », la proposition soulignée est : a) une subordonnée complétive b) une subordonnée relative c) une subordonnée circonstancielle de condition d) une subordonnée circonstancielle de conséquence e) une subordonnée interrogative indirecte

10) Le mot « que » ne peut pas être : a) Une conjonction de coordination. b) Une conjonction de subordination. c) Un pronom relatif.!

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III.%Analyse%critique%de%supports%d’enseignement%%!

À partir d’un texte étudié en classe et de la préparation de l’enseignant reproduits ci-dessous, dans votre analyse critique vous chercherez à répondre aux questions suivantes :

1- Quelles compétences l’enseignant cherche-t-il à développer ? Sont-elles conformes aux programmes de l’école élémentaire ?

2- Le choix du texte vous apparaît-il pertinent ? 3- Le déroulement de la séance prévue vous semble-t-il opportun ? Est-il adapté au texte

de Bernard Friot ? Justifiez vos réponses. 4- Quel type d’évaluation pourriez-vous proposer pour l’activité d’écriture ? 5- Quelles sont les principales pistes d’amélioration pour cette séance de lecture

littéraire ? ____________________

Soupçon

'ai tout de suite compris qu'il s'était passé quelque chose de grave. Dès que je l'ai vu. Il avait sauté sur mon lit et il se léchait les babines d'une manière qui m'a semblé bizarre. Je ne saurais expliquer pourquoi, mais ça me semblait bizarre. Je l'ai regardé attentivement, et lui me fixait

avec ses yeux de chat incapables de dire la vérité. Bêtement je lui ai demandé : - Qu'est-ce que tu as fait ? Mais lui, il s'est étiré et a sorti ses griffes, comme il fait toujours avant de se rouler en boule pour dormir. Inquiet, je me suis levé et je suis allé voir le poisson rouge dans le salon. Il tournait paisiblement dans son bocal, aussi inintéressant que d'habitude. Cela ne m'a pas rassuré, bien au contraire. J'ai pensé à ma souris blanche. J'ai essayé de ne pas m'affoler, de ne pas courir jusqu'au cagibi où je l'ai installée. La porte était fermée. J'ai vérifié cependant si tout était en ordre. Oui, elle grignotait un morceau de pain rassis, bien à l'abri dans son panier d'osier. J'aurais dû être soulagé. Mais en regagnant ma chambre, j'ai vu que la porte du balcon était entrouverte. J'ai poussé un cri et mes mains se sont mises à trembler. Malgré moi, j'imaginais le spectacle atroce qui m'attendait. Mécaniquement, à la façon d'un automate, je me suis avancé et j'ai ouvert complètement la porte vitrée du balcon. J'ai levé les yeux vers la cage du canari suspendue au plafond par un crochet. Etonné, le canari m'a regardé en penchant la tête d'un côté, puis de l'autre.

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Et moi, j'étais tellement hébété qu'il m'a fallu un long moment avant de comprendre qu'il ne lui était rien arrivé, qu'il ne lui manquait pas une plume.

Je suis retourné dans ma chambre et j'allais me rasseoir à mon bureau lorsque j'ai vu le chat soulever une paupière et épier mes mouvements. Il se moquait ouvertement de moi.

Alors, j'ai eu un doute. Un doute horrible. Je me suis précipité dans la cuisine et j'ai hurlé quand j'ai vu... Le monstre, il a osé ! Il a dévoré...

Je me suis laissé tomber sur un tabouret, épouvanté, complètement anéanti. Sans y croire, je fixais la table et l'assiette retournée. ... Il a dévoré mon gâteau au chocolat !

Bernard Friot, Histoires pressées, Zanzibar, Milan. __________________!

Fiche de préparation : lecture littéraire

Niveau : CM2 Titre : Une histoire à suspense ! Objectifs :

Comprendre les procédés qu’un auteur emploie pour maintenir le suspense dans une histoire (Compréhension écrite)

Ecrire : réécrire la fin d’une histoire (Production écrite) Confrontation orale entre élèves sur l’interprétation du texte

Matériel : 25 textes « Soupçon », extrait d’Histoires pressées de B. Friot. Cahier de brouillon

Durée : 1 heure Déroulement : 1/ Découverte du texte Chaque enfant lit silencieusement le texte de B. Friot durant cinq minutes. Questions orales posées à la classe :

= Qui est l’auteur de ce texte ? = D’où est-il extrait ? = Qui est le narrateur ? = Quels sont les personnages de l’histoire ? = Quel est l’intérêt principal de ce texte ? (Si le mot « suspense » n’est pas prononcé par les

élèves, le leur donner, l’écrire au tableau et en expliquer le sens.) 2/ Étude des procédés utilisés par l’auteur pour créer le suspense Recherche par groupes de deux sur le cahier de brouillon : « Expliquez comment l’auteur maintient le suspense. Pourquoi êtes-vous pressés de connaître la fin ? » Mise en commun : elle a pour but de mettre en évidence

= La progression des sentiments de peur ressentis à chaque épisode = La répétition du même schéma à l’intérieur de chaque épisode (crainte, recherche, enfant

rassuré) = La rupture de ce schéma à la fin Cette mise en commun pourra être suivie d’une reprise écrite sous forme de tableau pour synthétiser les éléments collectés.

3/Activité d’écriture Réécrire la fin de l’histoire à partir de « Je me suis précipité dans la cuisine et j’ai hurlé quand j’ai vu… » en changeant la réaction de l’enfant qui raconte, de telle sorte que la fin soit plus « normale » (5 lignes environ, travail individuel) Pour terminer, un temps de lecture permettra de confronter plusieurs productions et de comparer les effets produits.

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%1%sur%9%%

I.%Question%relative%aux%textes%proposés%% À partir des textes du corpus, vous analyserez comment la littérature participe à la

formation de l’individu et à sa compréhension du monde. _______________

Texte 1 : Dai Sijie, Balzac et la Petite Tailleuse chinoise, Gallimard, « Folio », 2000, pp. 70-75. 1%

À notre retour, le Binoclard nous passa un livre, mince, usé, un livre de Balzac. […] Le Binoclard hésita-t-il longtemps avant de choisir de nous prêter ce livre? Le pur

hasard conduisit-il sa main ? Ou bien le prit-il tout simplement parce que, dans sa valise aux précieux trésors, c’était le livre le plus mince, dans le pire état ? La mesquinerie guida-t-elle son choix ? Un choix dont la raison nous resta obscure, et qui bouleversa notre vie, ou du moins la période de notre rééducation, dans la montagne du Phénix du Ciel.

Ce petit livre s'appelait Ursule Mirouët. Luo le lut dans la nuit même où le Binoclard nous le passa, et le termina au petit

matin. Il éteignit alors la lampe à pétrole, et me réveilla pour me tendre l’ouvrage. Je restai au lit jusqu’à la tombée de la nuit, sans manger, ni faire rien d’autre que de rester plongé dans cette histoire française d’amour et de miracles.

Imaginez un jeune puceau de dix-neuf ans, qui somnolait encore dans les limbes de l’adolescence, et n’avait jamais connu que les bla-bla révolutionnaires sur le patriotisme, le communisme, l'idéologie et la propagande. Brusquement, comme un intrus, ce petit livre me parlait de l’éveil du désir, des élans, des pulsions, de l’amour, de toutes ces choses sur lesquelles le monde était, pour moi, jusqu’alors demeuré muet.

Malgré mon ignorance totale de ce pays nommé la France (j’avais quelquefois entendu le nom de Napoléon dans la bouche de mon père, et c’était tout), l’histoire d’Ursule me parut aussi vraie que celle de mes voisins. Sans doute, la sale affaire de succession et d’argent qui tombait sur la tête de cette jeune fille contribuait-elle à renforcer son authenticité, à augmenter le pouvoir des mots. Au bout d’une journée, je me sentais chez moi à Nemours, dans sa maison, près de la cheminée fumante, en compagnie de ces docteurs, de ces curés... Même la partie sur le magnétisme et le somnambulisme me semblait crédible et délicieuse.

Je ne me levai qu'après en avoir lu la dernière page.

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%1%Le narrateur, un intellectuel, se trouve dans un camp de rééducation à la campagne, dans la Chine des années 1970 ; à cette époque, lire des romans étrangers était interdit.%

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Texte 2 : Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, Éditions Garnier Frères, 1964, pp. 7-9.%

Je sentis avant de penser : c’est le sort commun de l'humanité. Je l’éprouvai plus qu’un autre. J’ignore ce que je fis jusqu’à cinq ou six ans ; je ne sais comment j’appris à lire ; je ne me souviens que de mes premières lectures et de leur effet sur moi : c’est le temps d’où je date sans interruption la conscience de moi-même. Ma mère avait laissé des romans. Nous nous mîmes à les lire après souper mon père et moi. Il n'était question d'abord que de m’exercer à la lecture par des livres amusants ; mais bientôt l’intérêt devint si vif, que nous lisions tour à tour sans relâche et passions les nuits à cette occupation. Nous ne pouvions jamais quitter qu’à la fin du volume. Quelquefois mon père, entendant le matin les hirondelles, disait tout honteux : allons nous coucher ; je suis plus enfant que toi.

En peu de temps j’acquis, par cette dangereuse méthode, non seulement une extrême facilité à lire et à m’entendre, mais une intelligence unique à mon âge sur les passions. Je n’avais aucune idée des choses, que tous les sentiments m’étaient déjà connus. Je n’avais rien conçu, j’avais tout senti. Ces émotions confuses que j’éprouvais coup sur coup n’altéraient point la raison, que je n’avais pas encore ; mais elles m’en formèrent une d’une autre trempe, et me donnèrent de la vie humaine des notions bizarres et romanesques, dont l’expérience et la réflexion n’ont jamais bien pu me guérir.

Les romans finirent avec l’été de 1719. L’hiver suivant, ce fut autre chose. La bibliothèque de ma mère épuisée, on eut recours à la portion de celle de son père; qui nous était échue. Heureusement, il s’y trouva de bons livres ; et cela ne pouvait guère être autrement ; cette bibliothèque ayant été formée par un ministre, à la vérité, et savant même, car c’était la mode alors, mais homme de goût et d'esprit. L’Histoire de l'Église et de l'Empire, par Le Sueur ; le Discours de Bossuet sur l’Histoire universelle ; les Hommes illustres de Plutarque ; l'Histoire de Venise par Nani ; les Métamorphoses d'Ovide ; La Bruyère ; les Mondes de Fontenelle ; ses Dialogues des Morts, et quelques tomes de Molière, furent transportés dans le cabinet de mon père, et je les lui lisais tous les jours, durant son travail. J’y pris un goût rare et peut-être unique à cet âge. Plutarque surtout devint ma lecture favorite. Le plaisir que je prenais à le relire sans cesse me guérit un peu des romans ; et je préférai bientôt Agésilas, Brutus, Aristide, à Orondate, Artamène et Juba. De ces intéressantes lectures, des entretiens qu’elles occasionnaient entre mon père et moi, se forma cet esprit libre et républicain, ce caractère indomptable et fier, impatient de joug et de servitude, qui m’a tourmenté tout le temps de ma vie dans les situations les moins propres à lui donner l’essor. Sans cesse occupé de Rome et d’Athènes, vivant pour ainsi dire avec leurs grands hommes, né moi-même citoyen d'une république, et fils d'un père dont l’amour de la patrie était la plus forte passion, je m’en enflammais à son exemple ; je me croyais Grec ou Romain ; je devenais le personnage dont je lisais la vie : le récit des traits de constance et d’intrépidité qui m’avaient frappé me rendait les yeux étincelants et la voix forte. Un jour que je racontais à table l'aventure de Scaevola, on fut effrayé de me voir avancer et tenir la main sur un réchaud pour représenter son action.

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Texte 3 : Charles Dantzig, Pourquoi lire ?, Grasset, 2010, pp. 9-14.

Apprendre à lire

[…] Tout le monde, n’apprend pas à lire avec facilité, il serait intéressant d’enquêter là-dessus. Les grands lecteurs seraient-ils des gens qui ont appris à lire facilement ? Pour ma part, cela a été facile, et presque immédiat. On m’a fait répéter un B, A, BA pendant quelques jours et, soudain, tout s’est libéré. J’ai lu. Cela vient peut-être de ce que c’était tardif ; au cours préparatoire ; j’avais 5 ans. Je vivais dans l’indignation depuis un an. La plupart de mes amis avaient appris à lire en dernière année de maternelle. « Pourquoi ne m’apprend-on pas, à moi ? » demandais-je sans arrêt à mes parents embêtés. Ils n’avaient rien d'autre à me répondre que : « C’est la méthode de ton école. Il te faut attendre le cours préparatoire. » Et moi, montrant du doigt tout ce que je croisais d’écrit, affiches, panneaux, couvertures de magazines, je demandais : « Qu’est-ce qui est écrit ? » Il me semblait qu’on me faisait une grande injustice. Qu’on retardait mon entrée dans la compréhension du monde.

Les enfants de 5 ans sont très intelligents. Et naïfs. Pour moi, l’écrit devait me permettre de comprendre ce qui se passait autour de moi. Cela se passait ouvertement, mais mystérieusement. Quelle était, non pas la raison de toutes ces choses, mais leur articulation ? Comment tout cela était-il lié ? Je faisais à l’écrit une confiance absolue pour me le dire.

[…] La littérature, et en particulier la fiction, est une forme d’analogie. Ou plus

précisément, une des formes de compréhension par l’analogie. Ou plus précisément, une des formes de compréhension par l’analogie qui agit sur les sentiments en plus de l’intelligence. Analogie, sentiment. Voilà qui est différent de cet autre mode de compréhension qu’est la philosophie, et qui, elle, s’appuie sur l'analyse et l'intellect.

C’est bien sûr cette partie sentimentale qui donne sa séduction à la littérature. Et son danger. Elle peut nous abuser par ses images comme des enfants. Elle peut aussi nous faire comprendre plus vite les choses, et peut-être d’autres choses, que la philosophie ou la psychologie. Et cette compréhension livresque des choses... Livresque... Je n’ai jamais bien compris le sens péjoratif attaché à l’adjectif « livresque ». Il accompagne le sens péjoratif que la société, restée brutale sous sa fine couche de ce qu’on appelle civilisation et qui ne sont sans doute que quelques manières de table, attache aux choses de l’esprit. Tiens, le raisonnement. Je ne suis pas sûr qu’il soit aimé. Dès qu'un enfant exaspère ses parents, ils le traitent de raisonneur. Il y a encore «littérature» et tous les mots qui y sont reliés. «Tout ça c’est de la littérature. » « Arrête de faire du roman ! » « Tout un poème ! » On imagine le scandale si j’osais dire, avec le même dédain : « Tout ça c’est de la charcuterie. » Le syndicat des bouchers-charcutiers me ferait un procès, il y aurait débat à la télévision, on me pousserait à la repentance. Et on aurait raison. Aucune catégorie n'est haïssable en soi. Ces gens qui emploient péjorativement les mots liés à la littérature feraient bien de se repentir eux-mêmes ; de reconnaître que c’est très bien, « livresque ». Pour moi, presque tout ce que j’ai appris de bien, je l’ai appris par les livres. Et ma compréhension du monde, ou le peu que j’en ai, s'est obscurcie à partir du moment où j’ai eu de l'expérience.

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II.%Connaissance%de%la%langue%Pour les deux questionnaires qui suivent, les réponses apportées doivent être claires et précises. Le candidat reportera bien sur sa copie le numéro de la question et la réponse complète.

II.2.$Questionnaire$sur$les$formes$et$les$valeurs$du$présent$de$l’indicatif$$

1) L’indicatif est un mode : a) Personnel. b) Impersonnel.

2) Analyse morphologique de la forme : (nous) chantons.

3) Donnez les différentes bases (variations du radical) pour le présent des verbes : a) Semer. b) Devoir.

4) Mettez au présent les verbes suivants : a) Vous disiez. b) Ils croyaient. c) Vous faisiez. d) Tu envoyais.

5) Donnez la troisième personne du singulier du présent de l’indicatif des verbes : a) Plier. b) Acquérir. c) Réussir. d) Peindre.

6) Associez à chacune de ces phrases la valeur que le verbe au présent exprime :

A- « Il sort à l’instant du collège. »

B- « Le matin, je me lève de

bonne heure. »

s- l’habitude, t- le passé proche u- le futur proche

7) Associez à chacune de ces valeurs du présent, la phrase qui lui correspond : A - Présent de vérité générale B - Présent de narration C - Présent d’actualité (d’énonciation)%

x- « Un agneau se désaltérait / Dans le courant d’une onde pure. / Un loup survient à jeun qui cherchait aventure, / et que la faim en ces lieux attirait. » (La Fontaine, Fables)

y- « Pierre qui roule n’amasse pas mousse. »

z- « J’aime bien l’écharpe que tu portes

aujourd’hui. »

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DBOCHEUX
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II.2.$ Questionnaire$portant$sur$la$grapho:phonologie$

1) Indiquez le nombre de syllabes qui composent chacun des trois vers suivants : […]

Là-dessus, au fond des forêts Le loup l’emporte et puis le mange, Sans autre forme de procès. La Fontaine, Le loup et l’agneau.

2) Indiquez le nombre de phonèmes qui composent chacun des deux mots suivants :

a) chat b) oiseau

3) Soit le mot « abstention ». Indiquez la bonne transcription phonétique parmi les trois formes suivantes :

a) [abstDsiB]

b) [apstBsJI]

c) [apstBsiI]

4) Trouvez trois mots rimant avec le mot « diamant » :

a- Un mot ayant un phonème commun b- Un mot ayant deux phonèmes communs c- Un mot ayant trois phonèmes communs.

5) Donnez au moins cinq graphies différentes correspondant au phonème [S]

6) Transcrivez phonétiquement les deux prononciations des mots suivants : « fils » et « couvent » et donnez leur nature respective.

III.%Analyse%critique%de%supports%d’enseignement%%À partir des ressources pour faire la classe, de la description d’une situation

d’enseignement en classe maternelle et de la transcription des échanges reproduits ci-dessous, dans votre analyse critique vous chercherez à répondre aux questions suivantes :

1) Quels sont les objectifs de cette séance de langage ? 2) Analysez les différents rôles des interventions de l'enseignante. Vous pouvez vous

appuyer sur trois ou quatre exemples. 3) Quel est l'intérêt de l'interaction orale entre pairs durant cette séance ? Justifiez votre

réponse. 4) Quels sont les principaux traits d'oralité dans les paroles de l'enseignante ?

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Document%A%:%Le#langage#à#l’école#maternelle.#Paris%:%Scéren/CNDPFCRDP,%«%Ressources%pour%faire%la%classe%»,%2011,%214%p.%

Extrait%n°%1%

Entrer dans un échange collectif suppose d’avoir quelque chose à dire en relation avec le sujet de l’échange, de demander la parole et, quand la parole est donnée, de s’exprimer voire de raccorder son propos avec les propos antérieurs qui avaient suscité une réaction. Tout adulte peut rencontrer des difficultés dans cette situation ; l’apprentissage dès l’école maternelle n’est qu’une première étape d’un long parcours. Il suppose une grande rigueur de gestion de ces moments d’échange par l’enseignant :

– donner des règles claires et, au début, peu nombreuses ; – choisir un sujet d’échange clair pour les élèves et amorcer par des questions précises ; – exercer une régulation très active : faire respecter l’écoute, distribuer la parole avec

équité, écarter les prises de parole « hors sujet » qui ne disqualifient pas pour autant leurs auteurs (si un élève peu « bavard » prend à ce moment la parole, même « hors sujet » il faudra alors considérer cet acte comme un signe très prometteur), valoriser les apports et reformuler si nécessaire, expliciter pour donner plus de portées quand le propos est confus (« Romain veut dire que... je pense », « Est-ce que c’est ça, Romain ? »), faire des récapitulations pour relancer l’échange (« Alors, tout le monde est d’accord sur cette solution ? Moi je croyais que... » ; « Alors, certains pensent que..., d’autres disent que... et quelques-uns... ; Comment pourrait-on faire pour trouver la bonne réponse ? »). (p. 17)

Extrait%n°%2%%

Une approche transversale, une préoccupation constante Le travail sur le lexique doit être une pratique quotidienne. L’ensemble des activités de l’école maternelle contribue à cela. Les différents domaines de l’école maternelle mais aussi les moments fonctionnels de la vie de la classe (accueil, habillage, hygiène corporelle...) sont autant d’occasions d’apprendre de nouveaux mots et de découvrir leurs usages en contexte. La découverte du monde est un domaine très porteur, d’autant que l’approche sensorielle du monde, sa représentation mentale et sa mise en mots sont intimement liées. Pour faire progresser les enfants dans leur conquête du lexique, il convient de repérer ces multiples opportunités et de s’en emparer. Un principe simple consiste à repérer les potentialités de chacune des situations d’apprentissage conçues et pilotées par l’enseignant dans une journée de classe et d’y associer systématiquement un ou deux objectifs linguistiques (lexique ou syntaxe). Des séances intégrées et des séances spécifiques Ces deux modalités doivent se conjuguer pour multiplier les occasions d’apprendre et favoriser la stabilisation les acquis. L’apprentissage du lexique peut se faire en lien avec les différents domaines dans le cadre de séances intégrées. Dans ce cas, on apprend du vocabulaire en faisant autre chose : des mathématiques, de la technologie, de la peinture. Ces situations ont l’avantage de donner du sens car les mots sont utilisés en contexte. Pour que les enfants le repèrent et l’entendent, il appartiendra à l’enseignant de mettre en relief l’emploi d’un nouveau mot, d’un mot savant ou d’un mot connu qui prend un sens différent dans un autre contexte. De multiples rencontres seront requises, pour assurer mémorisation et réemploi du lexique et les rencontres occasionnelles ne sauraient suffire. C’est pourquoi des

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séances spécifiques doivent être mises en place afin d’exercer les enfants à comprendre et à utiliser le vocabulaire rencontré en situation, en appui sur des objets, des jeux, des images ou des albums. Mettre en relation des mots connus en utilisant différents critères de catégorisation, associer des mots et leurs définitions, trouver « différentes manières de dire » constituent d’autres pistes à privilégier lors de ces phases de structuration. Dans ces moments-là le lexique doit être considéré comme un objet d’apprentissage et l’enfant doit percevoir l’enjeu de la situation : un moment dédié aux mots pour apprendre à bien parler. Les ressorts et les ressources du jeu méritent d’être largement mobilisés pour motiver et diversifier ces activités de structuration. La didactique des langues vivantes est une excellente source d’inspiration pour concevoir les séquences, les supports (flash cards, lotos, memory...) et conduire des séances attractives, rythmées et efficaces. (pp. 45-46) %

Document%B%:%situation%d’enseignement%et%transcription%de%la%séance%

Cette séance de langage a été réalisée en Moyenne Section, avec une demi-classe, suite à une plantation de bulbes de fleurs devant l'école.

Une employée municipale, Océane, avait apporté des bulbes de fleurs et montré aux enfants comment préparer le terrain et planter les bulbes.

Les photos prises ce jour-là ont été affichées au tableau avant la séance.

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Conventions de la transcription : - Les prises de parole sont numérotées. - Les locuteurs sont désignés par leurs prénoms, pour les élèves, par l'initiale "M", pour la

maîtresse de la classe. - Les points de suspension indiquent une légère pause dans le flux verbal

%

N° Loc. Interventions 1 M J’ai mis des photos au tableau. On va un peu parler de ce qui est au tableau et de ce

qu’on avait fait la dernière fois, lundi, 2 Gwen Fleur 3 M Fleur. Laura ? 4 Laura Elle avait creusé. 5 M Elle avait creusé…Yani ? 6 Yani Elle…elle avait bêché. 7 M Marie ? 8 Marie … Elle avait retourné la terre. 9 M Bien… Lisa ? 10 Lisa Elle avait …. ratiné la terre. 11 M ….Ratiné la terre ? Lucas ? 12 Lucas Creusé. 13 M Creusé, ratiné, on dit ? …Enyss ?

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14 Enyss Bêché la terre. 15 M Bêché la terre. Mais le mot ratiner…, c’était comment le mot ? 16 El Avec un râteau. 17 M Avec un râteau, on… 18 Enyss Ratisse. 19 M Bien, redis . 20 Enyss Ratisse. 21 M Enyss., c’est bien, on ra- tisse. Alors ? On lève la main. Je veux bien vous

interroger mais on lève la main. Gwen ? 22 Dounia … verculations …verculations 23 M Des ? 24 Dounia Des verculations 25 M Des verculations ? Je comprends pas . 26 Dounia Des verpiations. 27 M Des verpiations ? Je sais pas ce que ça veut dire. 28 Dounia Parce qu’i y avait de l’eau dans les fleurs. 29 M T’as mis de l’eau dans les fleurs ? 30 Dounia Avec le… du sable. 31 M du sable, à toi. Et… Yacine…, qu’est ce qu’on a fait lundi ? 32 Yacine J’ai keusé la terre. 33 M T’as creusé la terre… 34 Yacine Oui… 35 M Oui et puis …Va t’asseoir… Yani. Tu sais pas … Quelqu’un d’autre ? Oui, Lucas ?

…Il n’y a plus personne qui veut dire quelque chose ? Oui, Romain ? 36 Romain On a planté des fleurs. 37 M On a planté des fleurs. Alors, comment c’était ? Enyss ? 38 Enyss C’était des roses, de toutes les couleurs. 39 M Des roses de toutes les couleurs ? …Emma ? 40 Emma Des racines. 41 M Elles étaient accrochées à quoi les racines ? …Comment ça s’appelait ? Laura 42 Laura Avec une pinque 43 M Une quoi ? 44 Laura Une pinque. 45 M Une pointe ? …Et la pointe, elle était où, la pointe ? 46 Laura Elle était en haut. 47 M La pointe était en haut, et les racines ? 48 Laura En bas. 49 M Mattéo ? Mattéo ? 50 Mattéo …On a ratiné. 51 M Rati… 52 Mattéo Ssé. 53 M Ra-ti-ssé. On a ratissé. 54 Mattéo On a creusé.

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55 M On a creusé… 56 Mattéo On a fait des trous… 57 M Oui, Je vous demande maintenant quels outils, quels outils on a utilisés pour

travailler ? 58 Enyss Une pelle 59 M On lève la main. Alexis ? 60 Alexis Un râteau. 61 M Un râteau. Il était comment le râteau ? 62 Alexis Avec des piques. 63 Romain On a ratissé. 64 Enyss On a bêché la terre. 65 M On a bêché la terre…Lisa ? 66 Lisa On… a bêché. 67 M On a bêché, Marie ? Les outils … 68 Marie On a ratissé. 69 M On a ratissé… Yani ? 70 Yani On a ratissé. 71 M Oui, on a ratissé. Laura ?

72 Laura On a bêché. 73 M On a bêché, on a ratissé. Ratisser, vous m’avez dit, c’est avec un … 74 El Râteau. 75 M Et bêcher, on a bêché…Levez la main …Lucas T. ? 76 Lucas

T. Avec la pelle.

77 M Avec la pelle…Non, ça s’appelle pas une pelle. Bêcher, c’est avec une ? 78 El Une bêcheuse. 79 M Une… bêche. C’est une… bêche. Elle est où la bêche ? (en montrant les photos au

tableau) Mattéo, montre-nous. Elle est où la bêche ? Ah… Alors, vous m’avez dit …bêcher avec la …(en montrant la photo)

80 El Bêche. 81 M Ratisser … 82 El Avec la ratte. 83 M Avec le… 84 El Râteau 85 M Avec le râteau. Et on a utilisé peut-être autre chose ? 86 Els La pelle. 87 M Non, il n’y avait pas de pelle. Ah, c’est ça la pelle que vous me disiez (en montrant

la photo du transplantoir), ça a un autre nom. On dit, c’est une petite pelle, on appelle ça un trans...plan…toir. C’est un nom difficile, un transplantoir. Et ça sert à quoi ?

88 El A planter les fleurs 89 M A planter les fleurs. Dites-moi quelles fleurs vous avez plantées. %

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PARTIE I : Question relative aux textes proposés AIDE METHODOLOGIQUE Le libellé du sujet annonce clairement la problématique et suggère un plan en deux parties : « vous analyserez comment la mémoire inscrit l’homme dans le temps et donne sens à son existence. » Cette analyse est cependant assez difficile parce que : - la problématique sur les formes et le rôle de la mémoire dans les écrits autobiographiques met en jeu des connaissances qui ne peuvent être ignorées : mémoire volontaire, mémoire involontaire, thème de la fuite du temps… ; - les différences de nature et de longueur entre les trois textes : un extrait d’un auteur contemporain (texte 1), un extrait très célèbre d’un texte du XIX

e siècle normalement étudié au lycée (texte 2), l’extrait d’un entretien à propos d’un ouvrage de type autobiographique (texte 3), peuvent compliquer une prise en compte équilibrée dans l’analyse. La difficulté pour le candidat est d’arriver à un plan progressif et détaillé, constitué de parties bien distinctes permettant d’éviter les répétitions.

PLAN

1. Comment la mémoire inscrit-elle l’homme dans le temps ?

1.1. La mémoire inscrit l’homme dans son temps personnel.

1.2. Elle l’inscrit dans un temps plus large, familial ou humain.

1.3. Elle l’inscrit dans le temps historique.

2. Comment la mémoire donne-t-elle sens à l’existence de l’homme ?

2.1. Puissance de la mémoire involontaire.

2.2. Elle permet de révéler l’être profond.

2.3. Rôle de la mémoire volontaire.

2.4. Rôle de l’écriture pour donner sens à l’expérience du temps

et de la mémoire.

AU CONCOURS

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CORRIGÉ

Le temps et la mémoire occupent toujours une place prépondérante dans la

réflexion autobiographique comme le montrent les trois textes du dossier : un extrait

du roman de J.-M. G. Le Clézio, L’Africain, publié en 2005, dans lequel l’auteur se

remémore son enfance en Afrique ; un passage très célèbre des Mémoires d'outre-

tombe, rééditées en 1946, où François-René de Chateaubriand, développe une

méditation sur le temps qui passe et l’urgence de l’œuvre à achever ; enfin un

fragment d’entretien avec Georges Perec, paru en 1979, où l’auteur explique son

projet pour l’ouvrage Je me souviens.

Dans ces trois extraits, la mémoire occupe un rôle central selon un double

questionnement : comment inscrit-elle l’homme dans le temps ? Et comment donne-

t-elle un sens à son existence ?

La mémoire inscrit l’homme dans les strates du temps, tout d’abord, dans celle

d’un temps individuel, celui de sa propre existence. Comme le montre Le Clézio,

l’enfance surgit avec le souvenir d’un animal familier, une chatte, qui semble donner

au narrateur un signe de bienvenue, au-delà du temps. Pour Chateaubriand vieilli,

c’est le chant de la grive qui fait renaitre les jours d’une jeunesse mélancolique,

empreinte « d’un désir vague de bonheur ». La rencontre fortuite d’un ancien

camarade de classe ravive, pour G. Perec, le souvenir de « la binette [du] prof de

maths, [des] tics du surveillant général, [des] sobriquets donnés aux pions » mais ces

souvenirs sont pour G. Perec comme des tremplins vers une « remémoration

systématique », capable de faire ressurgir un passé à la fois personnel et partagé.

Au-delà du temps personnel, en effet, la mémoire inscrit l’homme dans le temps

humain, le temps passé avec les proches. Georges Perec affirme que ces souvenirs

« scellent une connivence » identitaire entre les êtres. Ainsi, la mémoire de

Chateaubriand le ramène « au domaine paternel », à « Combourg ». « Cette mémoire

n’est pas seulement la mienne », affirme, pour sa part, Le Clézio qui semble avoir

hérité en quelque sorte des souvenirs d’une Afrique antérieure à sa naissance, celle

de ses parents, qui « allaient dans la liberté des chemins ».

Enfin, la mémoire inscrit l’homme dans le temps historique. Les noms de lieux

sont pour Le Clézio comme des noms de familles où son histoire personnelle se

confond avec celle de la colonisation « des royaumes de l’ouest du Cameroun » et

avec celle d’une Afrique immémoriale où « avance lentement le troupeau de bêtes à

cornes de lune », un peu comme la tour d’Alluye relie Chateaubriand au temps

d’Henri IV et à la France aristocratique qui fut la sienne. G. Perec, quant à lui,

annonce son ambition d’écrire l’histoire d’une génération particulière : « celle de

tous les parisiens ayant [le même] âge ».

Parce que l’homme est un être de temps, la mémoire qu’elle soit involontaire ou

volontaire donne sens à l’existence pourvu que l’écriture s’en saisisse.

Toujours déclenchée par une impression sensorielle, qui semble être le processus

le plus puissant pour faire ressurgir le passé, la mémoire involontaire se produit

soudainement, à l’occasion d’une sensation olfactive, l’odeur froide du ciment chez

Le Clézio, ou auditive, le gazouillement d’une grive chez Chateaubriand. Elle fait

SUJET 1 - CORRIGES

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affleurer l’être passé à la conscience présente : « je suis transpercé par le temps

d’autrefois » affirme Le Clézio pour qui la sensation est si vive qu’elle est notée au

présent « et je suis dans la case de passage d’Abakaliki », « j’entre », « je vois ». De

la même manière, Chateaubriand croit revoir « ces campagnes où [il] entendi[t] si

souvent siffler la grive »

Cette confrontation inattendue et saisissante entre être passé et être présent est

révélatrice de la permanence de l’être profond. Le Clézio découvre ainsi « la source

de [ses] sentiments et de [ses] déterminations », Chateaubriand, au contraire, prend

conscience de tout ce qui sépare la tristesse de l’homme sans illusions qu’il est

devenu de celle du jeune homme « sans expérience » qu’il n’est plus, ce qui entraine

chez lui une réflexion sur l’impuissance de l’être aux prises avec le temps : « Les

heures fuient et m’entraînent (…). Combien de temps me promènerai-je au bord des

bois ? » Cette mémoire-là est tellement fondatrice pour l’individu, que l’hypothèse

de sa perte, suscite une interrogation teintée d’angoisse existentielle chez Le Clézio :

« Si je n’avais pas reçu cet héritage de ma vie avant ma naissance, que serais-je

devenu ? »

À l’inverse, c’est par la mémoire volontaire que G. Perec cherche à exorciser le

pouvoir du temps et à donner sens à une expérience éphémère par la reconquête

d’une identité volontairement construite. Lorsqu’une telle mémoire s’applique à

dépasser le « microsouvenir » pour reconstruire, dans la connivence et le clin d’œil

entre « camarades », l’épopée d’une génération, la masse des souvenirs ainsi

collectés fonctionne « comme une grille où chacun peut venir déchiffrer un fragment

de sa propre histoire ». Mais, c’est, également, « en [les]écrivant » que Le Clézio

comme Chateaubriand choisit de faire partager ses souvenirs, son lien existentiel à

des lieux et à des êtres.

Ainsi, pour les trois auteurs, l’écriture apparait bien comme un moyen de fixer le

sens de cette expérience du temps qui dépasse l’expérience singulière pour éclairer

une destinée collective, historique et humaine. Le Clézio donne le titre de L’Africain

à son autobiographie et affirme : « c’est à l’Afrique que je veux revenir sans cesse ».

« Mettons à profit le peu d’instants qui me restent ; hâtons-nous … », écrit

Chateaubriand, que le parallèle qu’il établit entre son destin éphémère et celui des

amants disparus, incite à se consacrer plus ardemment encore à l’écriture : « Que

sont devenus Henri et Gabrielle ? Ce que je serai devenu quand ces Mémoires seront

publiés. » Pour G. Pérec, les souvenirs les plus « précieux » à retenir dans Je me

souviens ne sont ni « personnels », ni « collectifs » mais ceux d’une époque où

chacun a vécu en partageant un moment de l’histoire commune.

Ainsi peut-on vérifier, que selon les trois textes du dossier, la mémoire donne sens

à l’existence, pourvu que l’écriture la fixe, parce qu’elle témoigne du destin partagé

d’une humanité aux prises avec le temps.

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PARTIE II : Connaissance de la langue

1 Question sur l’orthographe

AIDE METHODOLOGIQUE

En dépit de l’apparente facilité de l’exercice, il convient d’être très vigilant car les erreurs à corriger concernent plusieurs domaines. La réécriture de ce texte présuppose une bonne connaissance de la valeur des temps du passé, notamment pour la distinction entre1er plan et arrière plan. Comme souvent, plusieurs possibilités de correction existent et le candidat doit indiquer les différents choix possibles. De plus, il s’agit de rester au plus près de la production initiale de l’élève, tout en prenant en compte la ponctuation.

CORRIGE

a. Réécriture d’une production d’élève.

Sophie fouillait (fouilla) partout à la recherche de son coffre ; elle regardait

(regarda) tout autour, sous les tables, dans les placards. Elle se mit à pleurer, car elle

avait peur d’être surprise là, dans cette maison ; elle n’y voyait plus rien, ses yeux

étaient envahis par les larmes. Tout d’un coup, elle entendit des bruits de pas

terribles qui faisaient (firent) tout trembler. Une silhouette apparut, et Sophie disparut

sous l’escalier. Son cœur battait (battit) très fort.

b. Analyse de deux formes verbales.

« *entandait » (entendait)

- Choix erroné du phonogramme an au lieu de en (sans incidence sur la

prononciation).

- La désinence – ait est correcte pour un imparfait de l’indicatif.

- erreur d’emploi de l’imparfait : l’élève aurait dû utiliser un passé simple puisque

la présence de l’organisateur temporel «d’un cout » en début de phrase devrait

introduire un évènement de premier plan.

« *apparaissa » (apparut)

- erreur concernant sur la morphologie du passé simple : la terminaison en –a est

sans doute calquée sur celle des verbes du 1er

groupe.

- erreur sur l’orthographe du radical (ou base). En effet, si l’élève utilise un

radical existant : « apparaiss- », que l’on peut trouver par exemple au présent (« les

silhouettes apparaissent ») ou à l’imparfait (« la silhouette apparaissait »), il semble

méconnaitre celle du passé simple : « appar- ».

Utilisation correcte du passé simple, pour sa valeur d’emploi (évènement de

premier plan).

SUJET 01 - CORRIGES

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2 Questionnaire sur la phrase simple et la phrase complexe

AIDE METHODOLOGIQUE Les QCM sont souvent faussement simples. La tentation est grande d’aller le plus vite possible mais il faut prendre le temps de réfléchir et de bien repérer la difficulté en jeu. Si nécessaire, il faut faire des analyses et des manipulations pour tester la réponse. Parmi les difficultés de ce questionnaire, notons la question 2 qui peut être interprétée de deux manières différentes : soit on prend en compte toutes les constructions possibles et toutes les réponses (de a à g) sont valables, soit il faut donner la réponse complète et alors g est la bonne réponse. Comme le candidat avait à répondre sur une feuille blanche, un commentaire rapide expliquant l’alternative des réponses pouvait lever l’ambigüité. Les questions 4 et 5 peuvent induire, à cause de leur présentation, que la réponse b est la bonne, parce qu’elle offre la possibilité d’une réponse complémentaire, mais il convient de le vérifier.

CORRIGE

1- a Une phrase simple ne compte qu’une seule proposition comportant un verbe

conjugué.

2- Soit a, b, c, d, e, f, g (toutes ces façons de construire une phrase complexe sont

possibles)

ou g qui regroupe les trois façons possibles et combinables de construire une

phrase complexe.

3- a « Je prends à Auch mon train pour Toulouse à neuf heures » comporte une

proposition.

4- b - x « Il est neuf heures, j’attends le train » est une phrase complexe créée par

juxtaposition.

5- b - y « J’attends le train de neuf heures car je dois aller travailler à Toulouse »

est une phrase complexe créée par coordination.

6- a Dans la phrase « Il faut attendre qu’elle vienne », la proposition soulignée est

une subordonnée complétive.

7- b Dans la phrase « Je me demande qui viendra demain », la proposition

soulignée est une subordonnée interrogative indirecte.

8- b Le verbe voir, dans la phrase « Elle veut que tu… sa maison » s’écrit :

« voies ».

9- c Dans la phrase « S’il neigeait, je serais déjà sur les pistes. », la proposition

soulignée est une subordonnée circonstancielle de condition.

10- a Le mot « que » ne peut pas être : une conjonction de coordination.

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PARTIE III : Analyse critique de supports

d’enseignement

AIDE METHODOLOGIQUE La première difficulté de ce sujet concerne la nouvelle « Soupçon » de B. Friot. En effet, le candidat doit être capable d’en faire une analyse suffisante. Il s’agit, pour lui, de repérer, dans ce texte, l’implicite, l’organisation textuelle, ainsi que les particularités de la nouvelle à « suspense ». La deuxième difficulté consiste à établir des relations claires entre les programmes en vigueur, les savoirs sur l’enseignement de la littérature à l’école et le support proposé à l’analyse.

1 Quelles compétences l’enseignant cherche-t-il à développer ?

Sont-elles conformes aux programmes de l’école élémentaire ?

La question posée précise que les compétences sont à développer, et non à

construire. En effet, au CM2, ces compétences sont « déjà-là » car elles sont

travaillées depuis le CE2 tout au long du cycle 3.

La fiche de préparation montre que l’enseignant cherche à développer plusieurs

compétences.

a. Des compétences en lecture et en compréhension :

l’élève doit être capable de lire silencieusement un texte dans son intégralité,

l’élève doit être capable de :

- repérer le paratexte d’un récit (identifier l’auteur et le titre du recueil) ;

- faire la différence entre auteur, narrateur et personnages ;

- dégager l’intérêt majeur d’un texte, notamment sur son genre, à savoir ici

une nouvelle à suspense,

- repérer les différents procédés narratifs utilisés par l’auteur pour faire

progresser l’angoisse du narrateur et susciter un horizon d’attente chez le lecteur ;

- dégager une structure narrative répétitive ;

- synthétiser des informations.

b. Des compétences communicationnelles :

l’élève doit être capable de :

participer à des échanges avec les autres de manière constructive ;

travailler en binôme.

c. Des compétences rédactionnelles :

l’élève doit être capable de transformer la fin d’une nouvelle.

Ces différentes compétences sont, dans l’ensemble, conformes aux programmes

2008 de l’école élémentaire.

Cependant, la fiche de préparation indique une durée d’une heure pour cette

séance alors que les activités prévues sont nombreuses et exigeantes. On imagine mal

SUJET 01 - CORRIGES

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que l’enseignant puisse vraiment mener toutes ces activités à leur terme et que

tous les élèves puissent s’y investir de manière profitable.

D’autre part, la fiche de préparation présente un certain flou dans la formulation

des objectifs en mettant sur le même plan un véritable objectif : « comprendre les

procédés qu’un auteur emploie pour maintenir le suspense dans une histoire », qui

semble effectivement être l’objectif principal de cette séance, et deux activités :

« réécrire la fin d’une histoire » et « confrontation orale entre élèves sur

l’interprétation du texte » qui vont servir au développement de la compétence.

Cette confusion est assez gênante car elle peut faire perdre de vue l’unité de la

séance.

2 Le choix du texte vous apparait-il pertinent ?

Quelle est la pertinence du choix de cette nouvelle, « Soupçon », dans le dispositif

didactique prévu par l’enseignant ? Il est possible d’analyser ce texte du point de vue

des compétences de lecteur d’un élève de CM2 d’une part, et du point de vue de

l’objectif d’apprentissage d’autre part.

a. Les compétences de lecteur

Pour cette analyse, on peut se référer aux cinq compétences de lecteur telles

qu’elles ont été définies par Umberto Eco et reprises par un certain nombre de

chercheurs, c’est-à-dire les compétences encyclopédiques, rhétoriques, linguistiques,

axiologiques et logiques.

Les compétences encyclopédiques à mettre en jeu pour lire ce texte ne peuvent

guère poser de difficulté parce que l’univers évoqué appartient à la vie quotidienne

d’aujourd’hui et que le scénario du chat prédateur de poissons rouges, de souris et de

petits oiseaux est un stéréotype très bien partagé.

Les compétences rhétoriques reposent sur la connaissance du fonctionnement de

la nouvelle comme genre. Il faudrait donc que les élèves aient déjà lus des nouvelles

pour en connaitre le principe de tension narrative et de résolution par un

retournement final.

Les compétences linguistiques, qu’il s’agisse du lexique, de la syntaxe ou encore

de la cohérence et de la cohésion textuelles ne posent pas de difficultés qui ne

puissent être assez simplement résolues.

Les compétences axiologiques nécessaires pour lire « Soupçon » sont

certainement plus difficiles à exercer. En effet, si la tension narrative reposant sur la

peur est facile à comprendre, le renversement humoristique final est beaucoup plus

difficile à saisir car il s’agit d’un renversement total des rôles et des valeurs : le chat

« méchant » devient inoffensif tandis que le narrateur, auquel le lecteur est amené à

s’identifier tout au long du texte, devient vraiment odieux puisque, pour lui, la perte

de son gâteau au chocolat importe plus que la mort de tous ses animaux familiers.

En lien étroit avec les compétences axiologiques, les compétences logiques sont

sans doute les plus difficiles à mettre en œuvre et justifient pleinement la séance

proposée en nécessitant un dispositif didactique adapté, sous peine de passer à côté

Cf. l’article d’Annie Rouxel, « Qu’entend-on par lecture littéraire ? » cité dans la bibliographie.

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de l’objectif visé. En effet, dans ce texte, la coopération du lecteur est sans cesse

sollicitée pour faire fonctionner la logique du texte ; c’est le lecteur qui comble les

blancs du texte : il doit comprendre l’état mental du personnage et inférer que celui-

ci craint que son animal n’ait été dévoré. Le suspense du texte, c'est-à-dire son

fonctionnement axiologique et narratif repose donc sur la capacité du lecteur à

déchiffrer les raisons de l’angoisse du narrateur. Le lecteur s’attend donc pour

chaque « évènement » à quelque chose de pire que ce qui précède. Mais le

retournement final déçoit toutes les attentes possibles et renverse complètement le

sens du texte qui passe brusquement du suspense horrible à la dérision comique.

b. Du point de vue de l’objectif d’apprentissage

Si l’on excepte la chute, cette nouvelle constitue un bon choix pour l’objectif :

« comprendre le fonctionnement d’un texte à suspense ». Le suspense est en effet

porté par une savante gradation de l’inquiétude et de la peur (le poisson rouge, la

souris, le canaris), par le champ lexical de la peur, par une utilisation particulière de

la ponctuation dans la phrase annonçant la chute.

Cependant, la chute finale inverse le sens et le genre du texte qui, de texte à

suspense un peu effrayant devient un texte amusant. Il serait donc judicieux dans la

mise en œuvre pédagogique de donner à lire aux élèves le texte sans la chute pour ne

travailler que sur le texte à suspense.

Par conséquent, du point de vue des compétences de lecteurs, cette nouvelle met

en jeu les différentes compétences de lecteur et correspond tout à fait à ce qu’on peut

attendre d’un élève de CM2. Elle parait aussi bien choisie en fonction de l’objectif

d’apprentissage car la brièveté de la nouvelle permet de mieux travailler sur le

suspense qu’un roman plus long, à condition d’aménager la situation de lecture.

3 Le déroulement de la séance prévue vous semble-t-il opportun ?

Est-il adapté au texte de Bernard Friot ? Justifiez vos réponses.

Le déroulement de cette séance est, dans l’ensemble, relativement cohérent

puisqu’il comporte trois phases indispensables :

- découverte du texte par la lecture des élèves,

- recherche ciblée sur le texte afin de repérer les procédés utilisés par l’auteur

pour créer le suspense,

- phase d’évaluation par l’écriture.

Toutefois, il est possible d’émettre quelques réserves sur le déroulement de la

séance dans ces différentes phases.

a. Découverte du texte

Le texte

Le fait de donner à lire le texte dans son intégralité risque de poser des

problèmes d’interprétation insolubles pour les élèves et d’empêcher d’atteindre

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l’objectif visé. Il aurait été plus opportun de proposer une version du texte sans la

chute finale en s’arrêtant par exemple à : « et j’ai hurlé quand j’ai vu… »

Les questions

Les deux premières questions sur le nom de l’auteur et le titre du recueil d’où le

texte est extrait permettent de prendre quelques repères formels.

Les deux questions suivantes sur le narrateur et les personnages sont plus

importantes et donnent une entrée dans le texte.

La dernière question : « Quel est l’intérêt principal de ce texte ? » veut conduire

les élèves à s’interroger sur la notion de « suspense ». Toutefois, elle semble

prématurée car elle interroge les élèves comme s’ils avaient déjà compris le

fonctionnement et l’enjeu du texte alors qu’ils en sont à la phase de découverte et

qu’ils devraient être interrogés sur l’effet que le texte produit sur eux. Le mot

suspense ne peut être, à ce stade du travail, qu’une étiquette vide pour la majorité des

élèves et le fait d’en expliquer le sens ne résout pas la difficulté.

Les modalités de travail

La découverte du texte par l’ensemble des élèves en « cinq minutes » ne tient

aucunement compte des différences de performance des élèves en lecture alors que

l’on sait que les écarts sont très importants (certains chercheurs les estiment de 1 à

6). Il faudrait donc prévoir une différenciation pour les faibles lecteurs par exemple

en leur ayant permis d’avoir un temps de lecture du texte en amont.

Le questionnaire oral collectif, après la lecture silencieuse du texte, permet aux

élèves une appréhension globale de la nouvelle et du travail en cours mais, sans

autres précisions, le caractère collectif de ce travail oral pose encore la question

sensible de la gestion de l’hétérogénéité et les élèves les plus éloignés du travail en

littérature, ou les plus timides, risquent de ne pas pouvoir s’exprimer.

Pour dépasser cette difficulté, les élèves pourraient, par exemple, répondre

individuellement à certaines questions par un écrit de travail ou sur leur carnet de

lecture. Après cet écrit individuel, les élèves confronteraient leurs réponses, à l’oral.

b. Étude des procédés

L’usage du cahier de brouillon peut recouvrir des pratiques bien différentes. Afin

de préserver la dimension « recherche » dans cette phase fondamentale du travail, il

serait sans doute plus judicieux de mentionner l’utilisation du cahier de recherche ou

d’écrits de travail, permettant le tâtonnement, l’inachèvement et l’emploi dans les

échanges oraux.

Même si le dispositif de travail en binôme semble bien adapté car il incite les

élèves à avoir des échanges et peut leur permettre de faire des relevés plus riches que

s’ils travaillaient individuellement, la consigne de départ : « expliquez comment

l’auteur maintient le suspense » parait inaccessible à des élèves de CM2 qui sont

censés découvrir le suspense en littérature. La deuxième question : « Pourquoi êtes-

vous pressés de connaitre la fin ? » est sans doute plus à même de déclencher la

réflexion et la production de réponses. Cependant, la succession de ces deux

consignes presque contradictoires, une première très technique et d’un niveau

Les distinctions de Michel Picard sur les rôles du lecteur (La lecture comme jeu, 1986) pourraient être reprises ici. On dirait ainsi que cette question s’adresse au lectant alors que l’élève est encore dans le lu.

Proche du carnet d’expériences en sciences, le carnet de lecture permet de recueillir les traces de lectures personnelles ou collectives (écrits de travail, impressions de lecture, cheminements dans l’œuvre, différents transcodages…).

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excédant celui d’élèves de CM2, une seconde sollicitant la pure subjectivité, n’aide

guère les élèves à trouver la bonne distance d’analyse.

Les autres questions, à l’exception de la dernière, qui présuppose de travailler sur

le texte intégral, peuvent aider les élèves à repérer des éléments de fonctionnement

du texte. La forme des questions parait cependant très académique et ne prend pas

assez en compte l’âge et les compétences des élèves.

Le tableau de synthèse risque d’être très compliqué à réaliser et n’intègre pas du

tout le fait que les résultats puissent diverger. Il présuppose d’emblée un résultat figé,

normé alors que les élèves sont censés découvrir le suspense dans une nouvelle.

c. L’activité d’écriture

La fiche de préparation manque de précision sur la nature de cette activité

d’écriture : écrit de travail ou rédaction ? Du fait des contraintes de temps (une heure

pour toute la séance), de l’absence de planification, on peut cependant penser qu’il

s’agit d’un écrit de travail.

La connaissance de la chute, puisque l’enseignant a prévu de travailler sur le texte

complet, risque de compliquer le travail des élèves qui auront certainement

beaucoup de mal à se démarquer de l’autorité du texte source alors que la consigne

« Raconte de sorte qu’elle soit plus "normale" » invite à aller à l’encontre de la

logique de la chute de la nouvelle de B. Friot. Le choix du terme « normale » est

assez normatif et finalement peu approprié : est-ce une remise en cause des choix de

l’auteur ? Lesquels ?

Cet écrit de travail devrait permettre aux élèves de réinvestir leurs observations

mais aussi de continuer à construire leur compréhension du fonctionnement du

suspense.

4 Quel type d’évaluation pourriez-vous proposer

pour l’activité d’écriture ?

L’évaluation de l’activité d’écriture envisagée dépend de la nature exacte de celle-

ci. S’il s’agit d’un écrit de travail on pourrait l’évaluer par une simple mutualisation

orale des productions qui pourraient, éventuellement, être discutées et commentées,

sans aborder précisément les aspects formels.

Dans le cas d’une rédaction, il faudrait imaginer un dispositif d’évaluation plus

consistant qui pourrait se présenter, par exemple, sous la forme d’une grille

d’écriture « critériée ». En effet, pour pouvoir rédiger en 5 lignes une fin plus

« normale », les élèves doivent s’approprier des critères de réussite qui pourraient

être :

- respecter les informations fournies par la nouvelle (le chat a bien mangé quelque

chose puisqu’il se lèche les babines et s’endort),

- conserver la narration en « je » et se mettre à la place de l’enfant-narrateur,

- adopter le style de l’auteur (usage des points d’exclamation, des points de

suspension, du registre de langue…),

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SUJET 01 - CORRIGES

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- maintenir le vocabulaire de la peur et sa montée en puissance (« inquiet », « j’ai

poussé un cri », « mes mains se sont mises à trembler », « j’étais… hébété », « j’ai

hurlé… »),

- respecter l’emploi des temps (notamment l’utilisation du passé composé),

- garder une cohérence entre le début et la fin de la nouvelle.

5 Quelles sont les principales pistes d’amélioration

pour cette séance de lecture littéraire ? Les pistes d’amélioration concernent essentiellement les problèmes soulevés dans

l’analyse précédente.

La prise en compte de l’hétérogénéité

Aussi bien pour la lecture du texte que pour la phase de découverte orale, il

faudrait prévoir une gestion de l’hétérogénéité par exemple en donnant un temps de

lecture supplémentaire aux faibles lecteurs ou bien en accompagnant leur première

lecture du texte et en utilisant les écrits de travail pour leur permettre de mieux

prendre part aux échanges oraux.

La découverte du texte

Un accès au texte en deux temps semble préférable. Tout d’abord, la découverte

de la nouvelle à suspense se ferait simplement jusqu’à l’annonce de la chute. Ensuite,

la lecture de la chute se ferait à la toute fin du travail sur le suspense pour faire

appréhender le pouvoir du texte littéraire.

Les questions sur le texte

Les questions devraient être plus centrées sur la réception du texte par les élèves

avec des questions telle que : « Et toi, que penses-tu de l'attitude du garçon?"

Ces questions permettent de faire prendre conscience à l’élève de la disproportion

des réactions du narrateur-personnage. La littérature ouvre le débat sans le clore et

rend possible l'interrogation. L’enseignant peut se servir des réflexions subjectives

des élèves pour les amener vers une analyse plus précise et distanciée destinée à

justifier leurs points de vue.

Les écrits de travail

Les écrits de travail sont à mettre au service de la compréhension et ils pourraient

être avantageusement utilisés dans la phase de découverte du texte ou dans l’activité

d’écriture finale, avant la découverte de la chute choisie par Bernard Friot.

On peut enfin imaginer des prolongements.

Travail sur les substituts

Faire un lien entre la lecture et l’étude de la langue de telle sorte que les élèves

réfléchissent sur les substituts nominaux et pronominaux, activité pertinente si elle

débouche sur le constat que la manière de caractériser les personnages évolue en

fonction de l'intrigue (ex : « le chat »/ « le monstre »).

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Lecture à haute-voix

Sans être directement évaluative, la lecture à haute voix permet aux élèves de

réinvestir leur compréhension du texte et de continuer à la construire dans une

activité où ils ne sont pas simplement récepteurs du « sens » ou des « effets » du

texte mais aussi, à leur tour producteurs.

Lire en réseau

Mettre en réseau cette nouvelle. Par exemple, un réseau sur les nouvelles à

suspense pourrait être proposé afin d'établir, au fur et à mesure des lectures, des

points communs avec ce type de récit, ou bien un réseau consacré aux nouvelles de

Bernard Friot permettrait aux élèves de dégager un univers d’auteur.

BIBLIOGRAPHIE Annie ROUXEL, Qu’entend-on par lecture littéraire ? , éduscol.education.fr Roberte TOMASSONE, Pour enseigner la grammaire, Delagrave Pédagogie et formation, 2002. Martin RIEGEL, Jean-Christophe PELLAT, René RIOUL, Grammaire méthodique du français, Paris, PUF, 1994. Jocelyne GIASSON, La compréhension en lecture, De Boeck Université, 1996. Réédité en 2008. Catherine TAUVERON, Lire la littérature à l’école, Hatier pédagogie ; Hatier, 2002. Catherine TAUVERON, Pierre Sève, Vers une écriture littéraire, Hatier pédagogie, Hatier, 2005. Les chemins de la littérature au cycle 3, Argos démarches, Scéren, CRDP, Académie de Créteil, 2003. Une culture littéraire à l’école : http://media.eduscol.education.fr/file/ecole/46/9/culture-litteraire-ecole_121469.pdf

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%1%sur%9%%

I.%Question%relative%aux%textes%proposés%% À partir des textes du corpus, vous analyserez comment la littérature participe à la

formation de l’individu et à sa compréhension du monde. _______________

Texte 1 : Dai Sijie, Balzac et la Petite Tailleuse chinoise, Gallimard, « Folio », 2000, pp. 70-75. 1%

À notre retour, le Binoclard nous passa un livre, mince, usé, un livre de Balzac. […] Le Binoclard hésita-t-il longtemps avant de choisir de nous prêter ce livre? Le pur

hasard conduisit-il sa main ? Ou bien le prit-il tout simplement parce que, dans sa valise aux précieux trésors, c’était le livre le plus mince, dans le pire état ? La mesquinerie guida-t-elle son choix ? Un choix dont la raison nous resta obscure, et qui bouleversa notre vie, ou du moins la période de notre rééducation, dans la montagne du Phénix du Ciel.

Ce petit livre s'appelait Ursule Mirouët. Luo le lut dans la nuit même où le Binoclard nous le passa, et le termina au petit

matin. Il éteignit alors la lampe à pétrole, et me réveilla pour me tendre l’ouvrage. Je restai au lit jusqu’à la tombée de la nuit, sans manger, ni faire rien d’autre que de rester plongé dans cette histoire française d’amour et de miracles.

Imaginez un jeune puceau de dix-neuf ans, qui somnolait encore dans les limbes de l’adolescence, et n’avait jamais connu que les bla-bla révolutionnaires sur le patriotisme, le communisme, l'idéologie et la propagande. Brusquement, comme un intrus, ce petit livre me parlait de l’éveil du désir, des élans, des pulsions, de l’amour, de toutes ces choses sur lesquelles le monde était, pour moi, jusqu’alors demeuré muet.

Malgré mon ignorance totale de ce pays nommé la France (j’avais quelquefois entendu le nom de Napoléon dans la bouche de mon père, et c’était tout), l’histoire d’Ursule me parut aussi vraie que celle de mes voisins. Sans doute, la sale affaire de succession et d’argent qui tombait sur la tête de cette jeune fille contribuait-elle à renforcer son authenticité, à augmenter le pouvoir des mots. Au bout d’une journée, je me sentais chez moi à Nemours, dans sa maison, près de la cheminée fumante, en compagnie de ces docteurs, de ces curés... Même la partie sur le magnétisme et le somnambulisme me semblait crédible et délicieuse.

Je ne me levai qu'après en avoir lu la dernière page.

%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%%1%Le narrateur, un intellectuel, se trouve dans un camp de rééducation à la campagne, dans la Chine des années 1970 ; à cette époque, lire des romans étrangers était interdit.%

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Sujet 02

CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%2%sur%9%%

Texte 2 : Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions, Éditions Garnier Frères, 1964, pp. 7-9.%

Je sentis avant de penser : c’est le sort commun de l'humanité. Je l’éprouvai plus qu’un autre. J’ignore ce que je fis jusqu’à cinq ou six ans ; je ne sais comment j’appris à lire ; je ne me souviens que de mes premières lectures et de leur effet sur moi : c’est le temps d’où je date sans interruption la conscience de moi-même. Ma mère avait laissé des romans. Nous nous mîmes à les lire après souper mon père et moi. Il n'était question d'abord que de m’exercer à la lecture par des livres amusants ; mais bientôt l’intérêt devint si vif, que nous lisions tour à tour sans relâche et passions les nuits à cette occupation. Nous ne pouvions jamais quitter qu’à la fin du volume. Quelquefois mon père, entendant le matin les hirondelles, disait tout honteux : allons nous coucher ; je suis plus enfant que toi.

En peu de temps j’acquis, par cette dangereuse méthode, non seulement une extrême facilité à lire et à m’entendre, mais une intelligence unique à mon âge sur les passions. Je n’avais aucune idée des choses, que tous les sentiments m’étaient déjà connus. Je n’avais rien conçu, j’avais tout senti. Ces émotions confuses que j’éprouvais coup sur coup n’altéraient point la raison, que je n’avais pas encore ; mais elles m’en formèrent une d’une autre trempe, et me donnèrent de la vie humaine des notions bizarres et romanesques, dont l’expérience et la réflexion n’ont jamais bien pu me guérir.

Les romans finirent avec l’été de 1719. L’hiver suivant, ce fut autre chose. La bibliothèque de ma mère épuisée, on eut recours à la portion de celle de son père; qui nous était échue. Heureusement, il s’y trouva de bons livres ; et cela ne pouvait guère être autrement ; cette bibliothèque ayant été formée par un ministre, à la vérité, et savant même, car c’était la mode alors, mais homme de goût et d'esprit. L’Histoire de l'Église et de l'Empire, par Le Sueur ; le Discours de Bossuet sur l’Histoire universelle ; les Hommes illustres de Plutarque ; l'Histoire de Venise par Nani ; les Métamorphoses d'Ovide ; La Bruyère ; les Mondes de Fontenelle ; ses Dialogues des Morts, et quelques tomes de Molière, furent transportés dans le cabinet de mon père, et je les lui lisais tous les jours, durant son travail. J’y pris un goût rare et peut-être unique à cet âge. Plutarque surtout devint ma lecture favorite. Le plaisir que je prenais à le relire sans cesse me guérit un peu des romans ; et je préférai bientôt Agésilas, Brutus, Aristide, à Orondate, Artamène et Juba. De ces intéressantes lectures, des entretiens qu’elles occasionnaient entre mon père et moi, se forma cet esprit libre et républicain, ce caractère indomptable et fier, impatient de joug et de servitude, qui m’a tourmenté tout le temps de ma vie dans les situations les moins propres à lui donner l’essor. Sans cesse occupé de Rome et d’Athènes, vivant pour ainsi dire avec leurs grands hommes, né moi-même citoyen d'une république, et fils d'un père dont l’amour de la patrie était la plus forte passion, je m’en enflammais à son exemple ; je me croyais Grec ou Romain ; je devenais le personnage dont je lisais la vie : le récit des traits de constance et d’intrépidité qui m’avaient frappé me rendait les yeux étincelants et la voix forte. Un jour que je racontais à table l'aventure de Scaevola, on fut effrayé de me voir avancer et tenir la main sur un réchaud pour représenter son action.

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%3%sur%9%%

Texte 3 : Charles Dantzig, Pourquoi lire ?, Grasset, 2010, pp. 9-14.

Apprendre à lire

[…] Tout le monde, n’apprend pas à lire avec facilité, il serait intéressant d’enquêter là-dessus. Les grands lecteurs seraient-ils des gens qui ont appris à lire facilement ? Pour ma part, cela a été facile, et presque immédiat. On m’a fait répéter un B, A, BA pendant quelques jours et, soudain, tout s’est libéré. J’ai lu. Cela vient peut-être de ce que c’était tardif ; au cours préparatoire ; j’avais 5 ans. Je vivais dans l’indignation depuis un an. La plupart de mes amis avaient appris à lire en dernière année de maternelle. « Pourquoi ne m’apprend-on pas, à moi ? » demandais-je sans arrêt à mes parents embêtés. Ils n’avaient rien d'autre à me répondre que : « C’est la méthode de ton école. Il te faut attendre le cours préparatoire. » Et moi, montrant du doigt tout ce que je croisais d’écrit, affiches, panneaux, couvertures de magazines, je demandais : « Qu’est-ce qui est écrit ? » Il me semblait qu’on me faisait une grande injustice. Qu’on retardait mon entrée dans la compréhension du monde.

Les enfants de 5 ans sont très intelligents. Et naïfs. Pour moi, l’écrit devait me permettre de comprendre ce qui se passait autour de moi. Cela se passait ouvertement, mais mystérieusement. Quelle était, non pas la raison de toutes ces choses, mais leur articulation ? Comment tout cela était-il lié ? Je faisais à l’écrit une confiance absolue pour me le dire.

[…] La littérature, et en particulier la fiction, est une forme d’analogie. Ou plus

précisément, une des formes de compréhension par l’analogie. Ou plus précisément, une des formes de compréhension par l’analogie qui agit sur les sentiments en plus de l’intelligence. Analogie, sentiment. Voilà qui est différent de cet autre mode de compréhension qu’est la philosophie, et qui, elle, s’appuie sur l'analyse et l'intellect.

C’est bien sûr cette partie sentimentale qui donne sa séduction à la littérature. Et son danger. Elle peut nous abuser par ses images comme des enfants. Elle peut aussi nous faire comprendre plus vite les choses, et peut-être d’autres choses, que la philosophie ou la psychologie. Et cette compréhension livresque des choses... Livresque... Je n’ai jamais bien compris le sens péjoratif attaché à l’adjectif « livresque ». Il accompagne le sens péjoratif que la société, restée brutale sous sa fine couche de ce qu’on appelle civilisation et qui ne sont sans doute que quelques manières de table, attache aux choses de l’esprit. Tiens, le raisonnement. Je ne suis pas sûr qu’il soit aimé. Dès qu'un enfant exaspère ses parents, ils le traitent de raisonneur. Il y a encore «littérature» et tous les mots qui y sont reliés. «Tout ça c’est de la littérature. » « Arrête de faire du roman ! » « Tout un poème ! » On imagine le scandale si j’osais dire, avec le même dédain : « Tout ça c’est de la charcuterie. » Le syndicat des bouchers-charcutiers me ferait un procès, il y aurait débat à la télévision, on me pousserait à la repentance. Et on aurait raison. Aucune catégorie n'est haïssable en soi. Ces gens qui emploient péjorativement les mots liés à la littérature feraient bien de se repentir eux-mêmes ; de reconnaître que c’est très bien, « livresque ». Pour moi, presque tout ce que j’ai appris de bien, je l’ai appris par les livres. Et ma compréhension du monde, ou le peu que j’en ai, s'est obscurcie à partir du moment où j’ai eu de l'expérience.

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En l'absence d'autorisation de reproduction de ce texte par l'éditeur, vous pouvez vous reporter au site du ministère de l'Education nationale pour en prendre connaissance (page 12/18 du document, page 3/9 du sujet 2) . http://cache.media.education.gouv.fr/file/sujets_0(2014)/59/5s0_crpe_francais_260595.pdf

CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%4%sur%9%%

II.%Connaissance%de%la%langue%Pour les deux questionnaires qui suivent, les réponses apportées doivent être claires et précises. Le candidat reportera bien sur sa copie le numéro de la question et la réponse complète.

II.2.$Questionnaire$sur$les$formes$et$les$valeurs$du$présent$de$l’indicatif$$

1) L’indicatif est un mode : a) Personnel. b) Impersonnel.

2) Analyse morphologique de la forme : (nous) chantons.

3) Donnez les différentes bases (variations du radical) pour le présent des verbes : a) Semer. b) Devoir.

4) Mettez au présent les verbes suivants : a) Vous disiez. b) Ils croyaient. c) Vous faisiez. d) Tu envoyais.

5) Donnez la troisième personne du singulier du présent de l’indicatif des verbes : a) Plier. b) Acquérir. c) Réussir. d) Peindre.

6) Associez à chacune de ces phrases la valeur que le verbe au présent exprime :

A- « Il sort à l’instant du collège. »

B- « Le matin, je me lève de

bonne heure. »

s- l’habitude, t- le passé proche u- le futur proche

7) Associez à chacune de ces valeurs du présent, la phrase qui lui correspond : A - Présent de vérité générale B - Présent de narration C - Présent d’actualité (d’énonciation)%

x- « Un agneau se désaltérait / Dans le courant d’une onde pure. / Un loup survient à jeun qui cherchait aventure, / et que la faim en ces lieux attirait. » (La Fontaine, Fables)

y- « Pierre qui roule n’amasse pas mousse. »

z- « J’aime bien l’écharpe que tu portes

aujourd’hui. »

%

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%5%sur%9%%

II.2.$ Questionnaire$portant$sur$la$grapho:phonologie$

1) Indiquez le nombre de syllabes qui composent chacun des trois vers suivants : […]

Là-dessus, au fond des forêts Le loup l’emporte et puis le mange, Sans autre forme de procès. La Fontaine, Le loup et l’agneau.

2) Indiquez le nombre de phonèmes qui composent chacun des deux mots suivants :

a) chat b) oiseau

3) Soit le mot « abstention ». Indiquez la bonne transcription phonétique parmi les trois formes suivantes :

a) [abstDsiB]

b) [apstBsJI]

c) [apstBsiI]

4) Trouvez trois mots rimant avec le mot « diamant » :

a- Un mot ayant un phonème commun b- Un mot ayant deux phonèmes communs c- Un mot ayant trois phonèmes communs.

5) Donnez au moins cinq graphies différentes correspondant au phonème [S]

6) Transcrivez phonétiquement les deux prononciations des mots suivants : « fils » et « couvent » et donnez leur nature respective.

III.%Analyse%critique%de%supports%d’enseignement%%À partir des ressources pour faire la classe, de la description d’une situation

d’enseignement en classe maternelle et de la transcription des échanges reproduits ci-dessous, dans votre analyse critique vous chercherez à répondre aux questions suivantes :

1) Quels sont les objectifs de cette séance de langage ? 2) Analysez les différents rôles des interventions de l'enseignante. Vous pouvez vous

appuyer sur trois ou quatre exemples. 3) Quel est l'intérêt de l'interaction orale entre pairs durant cette séance ? Justifiez votre

réponse. 4) Quels sont les principaux traits d'oralité dans les paroles de l'enseignante ?

%

____________%

%

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%6%sur%9%%

Document%A%:%Le#langage#à#l’école#maternelle.#Paris%:%Scéren/CNDPFCRDP,%«%Ressources%pour%faire%la%classe%»,%2011,%214%p.%

Extrait%n°%1%

Entrer dans un échange collectif suppose d’avoir quelque chose à dire en relation avec le sujet de l’échange, de demander la parole et, quand la parole est donnée, de s’exprimer voire de raccorder son propos avec les propos antérieurs qui avaient suscité une réaction. Tout adulte peut rencontrer des difficultés dans cette situation ; l’apprentissage dès l’école maternelle n’est qu’une première étape d’un long parcours. Il suppose une grande rigueur de gestion de ces moments d’échange par l’enseignant :

– donner des règles claires et, au début, peu nombreuses ; – choisir un sujet d’échange clair pour les élèves et amorcer par des questions précises ; – exercer une régulation très active : faire respecter l’écoute, distribuer la parole avec

équité, écarter les prises de parole « hors sujet » qui ne disqualifient pas pour autant leurs auteurs (si un élève peu « bavard » prend à ce moment la parole, même « hors sujet » il faudra alors considérer cet acte comme un signe très prometteur), valoriser les apports et reformuler si nécessaire, expliciter pour donner plus de portées quand le propos est confus (« Romain veut dire que... je pense », « Est-ce que c’est ça, Romain ? »), faire des récapitulations pour relancer l’échange (« Alors, tout le monde est d’accord sur cette solution ? Moi je croyais que... » ; « Alors, certains pensent que..., d’autres disent que... et quelques-uns... ; Comment pourrait-on faire pour trouver la bonne réponse ? »). (p. 17)

Extrait%n°%2%%

Une approche transversale, une préoccupation constante Le travail sur le lexique doit être une pratique quotidienne. L’ensemble des activités de l’école maternelle contribue à cela. Les différents domaines de l’école maternelle mais aussi les moments fonctionnels de la vie de la classe (accueil, habillage, hygiène corporelle...) sont autant d’occasions d’apprendre de nouveaux mots et de découvrir leurs usages en contexte. La découverte du monde est un domaine très porteur, d’autant que l’approche sensorielle du monde, sa représentation mentale et sa mise en mots sont intimement liées. Pour faire progresser les enfants dans leur conquête du lexique, il convient de repérer ces multiples opportunités et de s’en emparer. Un principe simple consiste à repérer les potentialités de chacune des situations d’apprentissage conçues et pilotées par l’enseignant dans une journée de classe et d’y associer systématiquement un ou deux objectifs linguistiques (lexique ou syntaxe). Des séances intégrées et des séances spécifiques Ces deux modalités doivent se conjuguer pour multiplier les occasions d’apprendre et favoriser la stabilisation les acquis. L’apprentissage du lexique peut se faire en lien avec les différents domaines dans le cadre de séances intégrées. Dans ce cas, on apprend du vocabulaire en faisant autre chose : des mathématiques, de la technologie, de la peinture. Ces situations ont l’avantage de donner du sens car les mots sont utilisés en contexte. Pour que les enfants le repèrent et l’entendent, il appartiendra à l’enseignant de mettre en relief l’emploi d’un nouveau mot, d’un mot savant ou d’un mot connu qui prend un sens différent dans un autre contexte. De multiples rencontres seront requises, pour assurer mémorisation et réemploi du lexique et les rencontres occasionnelles ne sauraient suffire. C’est pourquoi des

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CRPE%2014%–%Exemple%de%sujet%2%%Page%7%sur%9%%

séances spécifiques doivent être mises en place afin d’exercer les enfants à comprendre et à utiliser le vocabulaire rencontré en situation, en appui sur des objets, des jeux, des images ou des albums. Mettre en relation des mots connus en utilisant différents critères de catégorisation, associer des mots et leurs définitions, trouver « différentes manières de dire » constituent d’autres pistes à privilégier lors de ces phases de structuration. Dans ces moments-là le lexique doit être considéré comme un objet d’apprentissage et l’enfant doit percevoir l’enjeu de la situation : un moment dédié aux mots pour apprendre à bien parler. Les ressorts et les ressources du jeu méritent d’être largement mobilisés pour motiver et diversifier ces activités de structuration. La didactique des langues vivantes est une excellente source d’inspiration pour concevoir les séquences, les supports (flash cards, lotos, memory...) et conduire des séances attractives, rythmées et efficaces. (pp. 45-46) %

Document%B%:%situation%d’enseignement%et%transcription%de%la%séance%

Cette séance de langage a été réalisée en Moyenne Section, avec une demi-classe, suite à une plantation de bulbes de fleurs devant l'école.

Une employée municipale, Océane, avait apporté des bulbes de fleurs et montré aux enfants comment préparer le terrain et planter les bulbes.

Les photos prises ce jour-là ont été affichées au tableau avant la séance.

----------

Conventions de la transcription : - Les prises de parole sont numérotées. - Les locuteurs sont désignés par leurs prénoms, pour les élèves, par l'initiale "M", pour la

maîtresse de la classe. - Les points de suspension indiquent une légère pause dans le flux verbal

%

N° Loc. Interventions 1 M J’ai mis des photos au tableau. On va un peu parler de ce qui est au tableau et de ce

qu’on avait fait la dernière fois, lundi, 2 Gwen Fleur 3 M Fleur. Laura ? 4 Laura Elle avait creusé. 5 M Elle avait creusé…Yani ? 6 Yani Elle…elle avait bêché. 7 M Marie ? 8 Marie … Elle avait retourné la terre. 9 M Bien… Lisa ? 10 Lisa Elle avait …. ratiné la terre. 11 M ….Ratiné la terre ? Lucas ? 12 Lucas Creusé. 13 M Creusé, ratiné, on dit ? …Enyss ?

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14 Enyss Bêché la terre. 15 M Bêché la terre. Mais le mot ratiner…, c’était comment le mot ? 16 El Avec un râteau. 17 M Avec un râteau, on… 18 Enyss Ratisse. 19 M Bien, redis . 20 Enyss Ratisse. 21 M Enyss., c’est bien, on ra- tisse. Alors ? On lève la main. Je veux bien vous

interroger mais on lève la main. Gwen ? 22 Dounia … verculations …verculations 23 M Des ? 24 Dounia Des verculations 25 M Des verculations ? Je comprends pas . 26 Dounia Des verpiations. 27 M Des verpiations ? Je sais pas ce que ça veut dire. 28 Dounia Parce qu’i y avait de l’eau dans les fleurs. 29 M T’as mis de l’eau dans les fleurs ? 30 Dounia Avec le… du sable. 31 M du sable, à toi. Et… Yacine…, qu’est ce qu’on a fait lundi ? 32 Yacine J’ai keusé la terre. 33 M T’as creusé la terre… 34 Yacine Oui… 35 M Oui et puis …Va t’asseoir… Yani. Tu sais pas … Quelqu’un d’autre ? Oui, Lucas ?

…Il n’y a plus personne qui veut dire quelque chose ? Oui, Romain ? 36 Romain On a planté des fleurs. 37 M On a planté des fleurs. Alors, comment c’était ? Enyss ? 38 Enyss C’était des roses, de toutes les couleurs. 39 M Des roses de toutes les couleurs ? …Emma ? 40 Emma Des racines. 41 M Elles étaient accrochées à quoi les racines ? …Comment ça s’appelait ? Laura 42 Laura Avec une pinque 43 M Une quoi ? 44 Laura Une pinque. 45 M Une pointe ? …Et la pointe, elle était où, la pointe ? 46 Laura Elle était en haut. 47 M La pointe était en haut, et les racines ? 48 Laura En bas. 49 M Mattéo ? Mattéo ? 50 Mattéo …On a ratiné. 51 M Rati… 52 Mattéo Ssé. 53 M Ra-ti-ssé. On a ratissé. 54 Mattéo On a creusé.

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55 M On a creusé… 56 Mattéo On a fait des trous… 57 M Oui, Je vous demande maintenant quels outils, quels outils on a utilisés pour

travailler ? 58 Enyss Une pelle 59 M On lève la main. Alexis ? 60 Alexis Un râteau. 61 M Un râteau. Il était comment le râteau ? 62 Alexis Avec des piques. 63 Romain On a ratissé. 64 Enyss On a bêché la terre. 65 M On a bêché la terre…Lisa ? 66 Lisa On… a bêché. 67 M On a bêché, Marie ? Les outils … 68 Marie On a ratissé. 69 M On a ratissé… Yani ? 70 Yani On a ratissé. 71 M Oui, on a ratissé. Laura ?

72 Laura On a bêché. 73 M On a bêché, on a ratissé. Ratisser, vous m’avez dit, c’est avec un … 74 El Râteau. 75 M Et bêcher, on a bêché…Levez la main …Lucas T. ? 76 Lucas

T. Avec la pelle.

77 M Avec la pelle…Non, ça s’appelle pas une pelle. Bêcher, c’est avec une ? 78 El Une bêcheuse. 79 M Une… bêche. C’est une… bêche. Elle est où la bêche ? (en montrant les photos au

tableau) Mattéo, montre-nous. Elle est où la bêche ? Ah… Alors, vous m’avez dit …bêcher avec la …(en montrant la photo)

80 El Bêche. 81 M Ratisser … 82 El Avec la ratte. 83 M Avec le… 84 El Râteau 85 M Avec le râteau. Et on a utilisé peut-être autre chose ? 86 Els La pelle. 87 M Non, il n’y avait pas de pelle. Ah, c’est ça la pelle que vous me disiez (en montrant

la photo du transplantoir), ça a un autre nom. On dit, c’est une petite pelle, on appelle ça un trans...plan…toir. C’est un nom difficile, un transplantoir. Et ça sert à quoi ?

88 El A planter les fleurs 89 M A planter les fleurs. Dites-moi quelles fleurs vous avez plantées. %

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SUJET 02 - CORRIGES

PARTIE I. Question relative aux textes proposés

AIDE METHODOLOGIQUE Le dossier ne pose pas de problème majeur : - la thématique générale est clairement annoncée : le dossier traite de l'impact de la littérature sur le lecteur, et plus particulièrement sur le lecteur enfant ou adolescent ; - deux axes sont aussi annoncés : la participation de la littérature à « la formation de l'individu » et à « sa compréhension du monde ». Un troisième axe peut être élaboré concernant le plaisir ambigu que suscite la fiction et l'illusion référentielle sur laquelle elle est bâtie ; - les textes sont des textes littéraires, donc une des difficultés est de faire émerger les éléments implicites qu'ils recèlent sans dériver vers le commentaire. Une autre difficulté peut aussi provenir de l'emploi de la première personne : si dans les textes 2 et 3, le pronom « je » renvoie à l'auteur, car il s'agit d'une autobiographie et d'un essai, il est plus difficile de le savoir dans le texte 1. Il est donc préférable de bien dissocier auteur et narrateur dans l'analyse de ce texte.

PLAN

1. Littérature et formation de l'individu

1.1. Une expérience fondatrice et formatrice

1.2. Une initiation

1.3. L'identification du lecteur

2. Littérature et compréhension du monde

2.1. Littérature et savoirs

2.2. Littérature et le rapport réalité / fiction

3. Littérature : une source de plaisir ambigu

3.1. Littérature et plaisir

3.2. Une emprise dangereuse

AU CONCOURS

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SUJET 02 - CORRIGES

CORRIGÉ

La littérature est généralement définie comme un ensemble d’œuvres à valeur

esthétique favorisant la réflexion du lecteur ; mais comment participe-t-elle à sa

formation et à sa compréhension du monde ? Telle est la problématique soulevée à la

lecture de trois textes : un extrait du roman de Dai Sijie, Balzac et la Petite Tailleuse

chinoise, publié en 2000, qui relate la rencontre du narrateur avec Ursule Mirouët de

Balzac ; un passage de l'autobiographie de Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions,

éditée en 1964, dans lequel le narrateur raconte comment la lecture l'a peu à peu

forgé ; enfin, des extraits de l'essai Pourquoi lire ?, paru en 2010, dans lesquels

Charles Dantzig fait part de ses réflexions sur le rapport entre littérature et

appréhension du réel. Pour ces trois auteurs, si la littérature joue un rôle dans la

formation de l'individu, d'une part, et dans sa compréhension du monde, d'autre part,

elle exerce néanmoins une emprise ambigüe sur les êtres.

L'entrée en littérature est, pour les trois narrateurs, un moment-clé de leur vie, une

expérience fondatrice : ses premières lectures constituent les souvenirs les plus

anciens de J.-J. Rousseau, la découverte d'Ursule Mirouët « bouleversa » l'existence

du narrateur de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise et de son ami Luo ; de même,

pour le jeune C. Dantzig, « tout fut libéré » lors de son apprentissage de la lecture.

Pour les auteurs, lire des œuvres littéraires est aussi une expérience formatrice. Ainsi,

l'accès aux romans déclenche, chez le jeune J.-J. Rousseau, un processus

d’apprentissage à l’origine d’une conscience continue de lui-même. Si ces lectures

ont ouvert l'enfant aux sentiments de façon précoce, la découverte d'ouvrages que J.-

J. Rousseau considère comme plus savants ont contribué à sa formation intellectuelle

et à l'émergence de son « caractère indomptable », ont fait de lui un homme épris de

liberté, républicain, patriote. De même, le narrateur de Balzac et la Petite Tailleuse

chinoise, alors « encore dans les limbes de l'adolescence », bénéficie d'une éducation

sentimentale grâce à la lecture d'Ursule Mirouët.

L'accès aux œuvres littéraires ouvre donc les chemins de la connaissance de soi,

autant au jeune J.-J. Rousseau qu'au « puceau de dix-neuf ans » lecteur de Balzac, et

relève, d'après les trois auteurs, d'une initiation permettant de quitter la petite

enfance, pour C. Dantzig et J.-J. Rousseau, et l'adolescence naïve, pour le narrateur

de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise. Une initiation qui les fait entrer dans une

autre communauté, un autre cercle : celle d'une famille lettrée où les livres se

transmettent de génération en génération pour J.-J. Rousseau, celle des lecteurs, pour

C. Dantzig, celle des Chinois qui lisent des ouvrages étrangers interdits par le régime

communiste, pour le héros de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise, alors qu'il se

trouve en camp de rééducation politique.

La littérature participe donc à la construction et à l'évolution du sujet, car « elle

agit sur les sentiments en plus de l'intelligence », affirme C. Dantzig, tout en les

éveillant, montrent Dai Sijie et J.-J. Rousseau. Pour ces deux auteurs, cette fonction

formatrice de la littérature est liée à l'identification du lecteur aux personnages.

Ainsi, l'adolescent de Balzac et la Petite tailleuse chinoise, en lisant Ursule Mirouët,

se croit chez lui à Nemours, et le jeune J.-J. Rousseau se sent « Grec ou Romain »,

devient le héros dont il découvre l'histoire, au risque de se mettre en danger en

s'identifiant à Scaevola.

La littérature est donc, d'après les auteurs, la source d'un cheminement, qui, tel un

parcours initiatique, permet aux êtres d'évoluer et de se former, en particulier grâce

au processus d'identification qu'elle favorise. C'est pourquoi elle aide aussi le lecteur

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à comprendre le monde.

En effet, les trois écrivains montrent, d'abord, que la littérature est un moyen

d'appréhender le réel, parce qu'elle apporte des savoirs. Ainsi, Ursule Mirouët ouvre

au narrateur de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise non seulement la porte de la

connaissance du désir, mais aussi celle d’un univers jusqu’alors insoupçonné et

opposé au sien d'un point de vue géographique, temporel et social, celui de la

bourgeoisie provinciale du XIXe siècle en France, pays dont il ignorait tout. De même,

les romans apportent à J.-J. Rousseau, malgré son jeune âge, une connaissance fine

des sentiments et des passions, sans qu'il les vive lui-même, par procuration, avant

même qu'il ait une « idée des choses ». Et, pour l'enfant non lecteur C. Dantzig, la

lecture est révélation des mystères du monde, promesse d'un moyen d'organiser le

réel, d'appréhender la façon dont les éléments qui le constituent sont reliés.

La littérature permet cette compréhension du monde, pour le héros de Balzac et la

Petite Tailleuse chinoise, parce qu'elle est dotée d'un pouvoir de vérité, qui abolit la

frontière entre fiction et réalité, grâce à l' « analogie », explique C. Dantzig. Aussi le

jeune lecteur d'Ursule Mirouët considère-t-il que l'histoire de l'héroïne est « aussi

vraie que celle de [ses] voisins », les problèmes sordides d'héritage d'Ursule

accentuant l'« authenticité » du récit par leur réalisme. Pour C. Dantzig, par ce lien

entre fiction et réel, la littérature permet de comprendre le monde d'une autre manière

que la philosophie ou la psychologie et d'une façon plus claire que l'expérience. Elle

est ainsi, pour lui comme pour Dai Seije, ouverture au monde et à la vie, car, selon le

narrateur de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise, elle est porteuse d’une vérité qui

transcende les frontières entre les époques et les cultures, d'une manière quasi-

magique : il suffit d'une journée pour qu'il se trouve à l'aise dans la maison d'Ursule

Mirouët. Pour lui, la vérité du roman s’oppose ainsi aux « bla-bla révolutionnaires»

qui ne disent rien de la vérité du monde. De même, C. Dantzig s'insurge contre

l'emploi péjoratif des mots qui ont un rapport avec la littérature, par une société qui

déconsidère les « choses de l'esprit », car, écrit-il, « presque tout ce que j’ai appris de

bien, je l’ai appris par les livres ».

Ainsi, les auteurs montrent que la littérature permet de comprendre le monde, car

elle est source de savoir et de vérité, par l'analogie qu'elle génère entre la fiction et la

réalité. Pourtant, ils suggèrent qu'elle exerce, sur les lecteurs, une fascination, qui

n'est pas sans ambigüité.

Selon eux, la lecture d'œuvres littéraires est, en effet, la source d'un plaisir

extrême, d'une délectation : le héros de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise et son

ami Luo, mais aussi J.-J. Rousseau et son père sont absorbés par leur lecture. La litté-

rature est donc envoutement, pour eux, « séduction » pour C. Dantzig : Luo lit le

roman de Balzac « dans la nuit même » où le Binoclard le lui donne, le narrateur

jeûne pour dévorer le roman, fasciné par le « pouvoir des mots », ne se levant que

quand le livre est terminé, comme J.-J. Rousseau et son père, qui en perdent la notion

du temps. Ce plaisir nait aussi, selon J.-J. Rousseau et Dai Seije, de la complicité

entre lecteurs que la littérature instaure : pour le premier, elle permet une lecture

partagée par le père et le fils, chacun lisant des livres à l’autre et tous deux les

commentant. La littérature favorise, ainsi, un rapport intime liant l’enfant avec son

père, mais aussi avec sa mère et son grand-père disparus. De même, Luo, une fois le

livre lu, le donne au héros de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise et ils deviennent

tous deux complices de cette transgression irrépressible tant Ursule Mirouët les

fascine.

Pourtant, cette emprise est, pour C. Dantzig, dangereuse : si l'analogie permet de

comprendre le monde, elle peut aussi « abuser » le lecteur, car elle est représentation,

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illusion. Ainsi, « même la partie » d'Ursule Mirouët sur des phénomènes peu

rationnels parait « crédible » à l'adolescent de Balzac et la Petite Tailleuse chinoise.

De plus, si pour C. Dantzig, la littérature apporte une compréhension du monde qui

« s'est obscurcie » par l'expérience, J.-J. Rousseau explique que les romans ont ancré

en lui une vision du monde faussée, dont il n'a pu se défaire par l'expérience. En

effet, il souligne que son apprentissage initial par les romans constitue une

« dangereuse méthode », fondée sur des « émotions confuses » qui lui ont donné « de

la vie humaine des notions bizarres et romanesques », dont il n'a jamais pu

« guérir ». En exacerbant l’imaginaire du jeune enfant, ces lectures sont donc, pour

J.-J. Rousseau, la cause de sa vulnérabilité et de son inadaptation au réel. Ainsi, s'il

affirme qu'il a acquis, grâce aux romans, une intelligence intuitive et sensible, il

ajoute que cette forme d’intelligence est un travers de son caractère.

La littérature est donc, pour les trois auteurs, compréhension de soi et du monde,

parce qu'elle parle aux sentiments et permet de les connaitre, grâce à l'identification

du lecteur et à l'analogie avec le réel qui la caractérisent. Mais, selon eux, elle est

aussi l'objet d'une passion qui peut se révéler dangereuse, car elle donne une image

altérée du réel que le lecteur peut considérer comme vérité.

PARTIE II Connaissance de la langue

1 Questionnaire sur les formes et les valeurs du présent de l’indicatif

1. a. L'indicatif est un mode personnel, ce qui correspond à la réponse .

2. La forme « chantons » est composée de deux morphèmes : la base verbale

« chant- », suivie du morphème « -ons » de 1re

personne pluriel (ou 4e

personne).

3. a. Les différentes bases pour le présent du verbe « semer » sont : « sèm- » et

« sem- ».

b. Les différentes bases pour le présent du verbe « devoir » sont : « doi- »,

« dev- » et « doiv- ».

4. a. Au présent, « vous disiez » devient « vous dites »,

b. « ils croyaient » devient « ils croient »,

c. « vous faisiez » devient « vous faites »,

d. « tu envoyais » devient « tu envoies ».

5. La troisième personne du singulier du présent de l’indicatif de :

a. « plier » est « plie »,

b. « acquérir » est « acquiert »,

c. « réussir » est « réussit »,

d. « peindre » est « peint ».

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6.

Phrases Valeurs du présent

A - «Il sort à l'instant du collège. » s - le passé proche

B - « Le matin, je me lève de bonne heure. » t - l'habitude

7.

Valeurs du présent Phrases correspondantes

A - Présent de vérité

générale

y - « Pierre qui roule n’amasse pas mousse. »

B - Présent de narration x - « Un agneau se désaltérait /

Dans le courant d’une onde pure. /

Un loup survient à jeun qui cherchait aventure, /

et que la faim en ces lieux attirait. »

(La Fontaine, Fables)

C - Présent d’actualité

(d’énonciation)

z - « J’aime bien l’écharpe que tu portes aujourd’hui.

»

2 Questionnaire portant sur la grapho-phonologie 1. Le nombre de syllabes qui composent chacun des trois vers proposés est 8.

2 a) Le nombre de phonèmes qui composent le mot « chat » est 2 ;

b) Le nombre de phonèmes qui composent le mot « oiseau » est 4.

3. La bonne prononciation du mot « abstention » est [apstɑ̃sjɔ̃], ce qui correspond à

la réponse b.

4. Plusieurs mots riment avec « diamant » :

a) ayant un phonème commun avec ce mot : « vent »,

b) ayant deux phonèmes communs : « ciment »,

c) ayant trois phonèmes communs : « évidemment ».

5. Les cinq graphies différentes correspondant au phonème [s] sont : « s », « ss »,

« c », « ç » et « t ».

6. Le mot« fils » peut être la transcription de [fis], nom au singulier ou au pluriel, ou

encore de [fil], nom au pluriel.

Le mot « couvent » peut être la transcription de [kuvɑ̃], qui est un nom, ou de

[kuv(ə)], qui est la troisième personne du pluriel du verbe « couver » au présent

de l'indicatif ou du subjonctif.

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PARTIE III : Analyse critique de supports

d'enseignement

AIDE METHODOLOGIQUE

Ce sujet est assez classique quand il s'agit d'analyser des transcriptions de séances. De plus, le dossier est constitué d'un texte officiel (document A) qui peut vous servir de base pour cette analyse.

Pour la question 1 : même si la consigne ne l'indique pas explicitement, il convient d'étudier la conformité des objectifs de l'enseignante avec les Programmes en vigueur.

Pour la question 2 : l'analyse des interventions de l'enseignante renvoie au concept d'étayage (ou interaction de tutelle) de J. Bruner, repris et complété par E. Nonnon pour analyser des situations de classe.

Pour la question 3 : étant donné que dans cette séance il n'existe pas d'interaction entre élèves à proprement parler, il s'agira d'étudier les phénomènes de reprises et d’enchainements de leurs propos.

Pour la question 4 : les traits d'oralité sont les phénomènes linguistiques spécifiques à une situation de communication orale. Ils ne sont pas considérés comme des erreurs dans un oral spontané.

Quelques ressources

- Le langage à l’école maternelle. Paris :Scénette / CNDPF-CRDP, « Ressources

pour faire la classe », 2011 :

http://eduscol.education.fr/cid48415/apprentissage-de-la-langue-francaise.html

- Michel GRANDATY, « Évaluation des apprentissages oraux au cycle 1 »,

Repères n°24/25, 2002 : http://ife.ens-lyon.fr/edition-electronique/archives/

reperes/web/fascicule.php?num_fas=280

- Dossiers Eduscol sur le langage et le vocabulaire en maternelle, notamment la

contribution de M. Grandaty : http://eduscol.education.fr/cid46403/en-quoi-un-

traitement-didactique-de-l-oral-transforme-t-il-un-enfant-de-petite-section-de-

maternelle-en-eleve%A0.html

- Document d'accompagnement des programmes, Découvrir le monde à l'école

maternelle, téléchargeable sur Internet.

- Elisabeth NONNON, « Quels outils se donner pour lire la dynamique des

interactions et le travail sur les contenus de discours ? », Enjeux n°39-40, 1997.

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CORRIGÉ

Le dossier proposé est constitué, d'une part, de deux extraits de Le langage à

l’école maternelle, ressource émanant du Ministère de l'éducation nationale et

publiée en 2011 par le CNDP, d'autre part, de la présentation d’une situation

d’enseignement en moyenne section et de la transcription des échanges. Il est

opportun de cerner les objectifs de la séance proposée, d'analyser les différents rôles

des interventions de l'enseignante, de définir l'intérêt de l'interaction entre pairs au

cours de cette séance, mais aussi de déterminer les principaux traits d'oralité dans les

paroles de l'enseignante.

1 Quels sont les objectifs de cette séance de langage ?

L'enseignante, au cours de cette séance de langage, poursuit différents objectifs.

Elle vise ainsi des objectifs langagiers, en production et en réception :

- participer à un échange collectif en écoutant autrui et en attendant son tour de

parole ;

- ajuster son propos pour se faire comprendre en fonction des questions ou des

remarques de l'enseignante ;

- comprendre les consignes et les questions de l'adulte, en situation de groupe.

Ces objectifs transversaux concernent également le domaine « Devenir élève ».

De plus, en choisissant de centrer l'échange sur des activités de plantation

réalisées précédemment, l'enseignante a aussi comme objectif que les élèves soient

capables de parler d'évènements passés auxquels ils ont participé, ce qui constitue

une étape vers le langage d'évocation.

Elle vise également un objectif lexical : comprendre, acquérir et utiliser un

vocabulaire pertinent concernant les actions effectuées et les objets utilisés lors d'une

activité réalisée précédemment, en prenant appui sur des photographies. En effet,

l'enseignante cherche à ce que les élèves soient capables d'employer de façon

correcte des verbes, comme « râtisser » (en 11-21 et en 50-53), et des noms comme

« pointe » (en 41-44), appartenant notamment au champ lexical des outils (en 57) ;

son objectif est donc que les élèves commencent à mettre des mots en réseau, par la

relation hypéronymie / hyponymie pour le nom des outils, mais aussi par la

dérivation : « râteau » / « ratisser », « bêche »/ « bêcher » (en 73-85).

Cet objectif met en lien les domaines « S'approprier le langage » et « Découvrir le

monde », puisque cette séance vise à reconnaître et nommer des objets selon leur

usage lors de plantations, donc en relation avec la découverte du vivant.

L'ensemble de ces objectifs est conforme aux exigences des Programmes de 2008,

notamment concernant le domaine « S'approprier le langage ». Ainsi, il est préconisé

qu'à « la fin de l’école maternelle, l’enfant soit capable de :

- comprendre un message et agir ou répondre de façon pertinente ;

- nommer avec exactitude un objet, une personne ou une action ressortissant à la

vie quotidienne. »

De plus, comme il est indiqué dans l'extrait 2 du document A, le choix de lier la

maitrise du langage et de la langue au domaine « Découvrir le monde » est pertinent

pour l'appropriation du lexique : « La découverte du monde est un domaine très

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porteur, d’autant que l’approche sensorielle du monde, sa représentation mentale et

sa mise en mots sont intimement liées ». Toutefois, au cours de cette séance, la

poursuite d'un double objectif, langagier et lexical, sans que l'un prime sur l'autre,

pose problème, car l'objectif lexical parasite l'objectif langagier : l'enseignante, en

cherchant à obtenir des réponses précises, que les élèves peinent à fournir, bride leur

expression. De plus, l'objectif lexical n'est pas clairement explicité en début de

séance, puisque l'enseignante y met l'accent sur l'objectif langagier («On va un peu

parler de ce qui est au tableau et de ce qu’on avait fait la dernière fois, lundi »). S'il

est possible de considérer cette séance comme faisant partie des « séances

spécifiques » mentionnées dans le second extrait du document A, elle ne correspond

donc pas exactement à ce que préconisent les auteurs de ce texte : « Dans ces

moments-là le lexique doit être considéré comme un objet d’apprentissage et

l’enfant doit percevoir l’enjeu de la situation : un moment dédié aux mots pour

apprendre à bien parler ».

Ainsi, les objectifs visés sont conformes aux programmes de 2008, mais il est

difficile de cerner l'objectif principal de la séance présentée, les objectifs langagiers

et linguistiques entrant en concurrence.

2 L’analyse des différents rôles des interventions

de l’enseignante

Tout au long de cette séance, sur 89 tours de parole, l'enseignante intervient

44 fois, donc quasiment une fois sur deux. Ses interventions jouent plusieurs rôles

qu'il est possible d'analyser, selon les travaux d'E. Nonnon, d'une part sur le plan de

la régulation et de l'étayage de la progression commune, d'autre part sur le plan de

l'étayage de la prise de parole et de l'écoute.

1. Régulation et étayage de la progression commune

Fonction initiative et d'enrôlement (1) : la première intervention de l'enseignante

permet d'expliquer l'activité langagière qui va suivre, pour que les enfants s'y

engagent, l'enseignante donnant le support et le thème de l'échange. Le choix de

fonder cette séance sur une activité motivante qu'ils ont eux-mêmes réalisée ne peut

que susciter l'adhésion des élèves aux exigences de la tâche.

Mobilisation et récapitulation des acquis : par ses questions et ses relances, en

31, 35 et 85 par exemple, l'enseignante aide les élèves à se remémorer les plantations

qu'ils ont effectuées et à faire le lien avec ce qu'ils savent.

Maintien de l'orientation par des questions et relances. En 67 notamment,

comme les enfants, en 62-66, reviennent sur les actions effectuées au cours de la

plantation, alors qu'elle a demandé de parler des outils, elle recadre l'échange, pour

éviter qu'ils ne rétrogradent vers d'autres buts : « Les outils ? ». En réduisant ainsi les

degrés de liberté, elle aide les élèves à se focaliser sur les aspects de la tâche, évite

les dispersions et contrôle l’attention.

Scansion et balisage de l’échange : en 73, l'enseignante synthétise les propos des

enfants, comme il est préconisé dans l'extrait 1 du document A (« faire des

récapitulations pour relancer l’échange »). De même, en 57, elle lance les élèves dans

une autre direction, car elle se rend probablement compte que les réponses des élèves

ne font plus progresser l'échange. Sa formulation « je vous demande maintenant »

leur donne ainsi les moyens de comprendre qu'il s'agit d'une nouvelle étape dans la

discussion.

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Fonction de développement : l'enseignante amène les élèves à corriger leurs

erreurs et à utiliser le terme juste, comme en 51-53, généralement en reprenant sous

forme interrogative l'énoncé erroné de l'enfant, par exemple en 13 et 15, ce qui lui

permet de procéder à des ajustements. Elle ne donne pas le terme exact, mais le fait

trouver aux élèves : ces interventions ont donc aussi une fonction heuristique, sauf en

33 où elle corrige la prononciation erronée de Yacine « *keusé » / « creusé ».

Focalisation de l’attention conjointe, par la répétition des propos des élèves dans

des phrases affirmatives, par exemple en 5, ce qui lui permet de les répercuter pour

que tous les entendent et les comprennent, notamment en segmentant les mots (« ra-

tisse », en 21). L'utilisation de phrases interrogatives, elles, signalent soit qu'elle

donne la parole à un élève, comme en 3, soit que le propos précédent est erroné, en

25 par exemple. Elle favorise ainsi la prise en compte des énoncés d’autrui pouvant

faire progresser l'échange et la réalisation de la tâche, comme en 11-21 sur le mot

« ratiné ».

2. Étayage de la prise de parole et de l’écoute

Les interventions de l'enseignante jouent également un rôle dans le pilotage et la

régulation de l'échange.

Donner la parole à l'élève qui manifeste, probablement en levant le doigt,

l’intention de la prendre : par exemple en 3 et 5, elle nomme l'enfant en utilisant une

intonation montante marquant l'interrogation, avec quelquefois « Oui » en début

d'énoncé ou de relance, par exemple en 35.

Solliciter la participation des élèves, en 35, et probablement d'enfants qui

interviennent rarement pour les enrôler dans la tâche langagière en 31 et en 35.

Rappeler les règles de prise de parole, en 59 et en 75. De même, en 21 ;

pourtant, à la fin de ce tour de parole, l'enseignante interroge Gwen, mais accepte

ensuite la réponse de Dounia. Ce rappel lui permet aussi de gérer la discipline, car

plusieurs élèves veulent probablement intervenir en même temps. La gestion de la

discipline est aussi le rôle joué par l'impératif « Va t’asseoir » en 35.

Valider certaines réponses : en répétant les propos des élèves, par exemple en 5,

elle fait comprendre aux autres enfants que cette réponse correspond à ce qu'elle

attend. Chaque répétition fonctionne donc comme une signalisation implicite des

caractéristiques déterminantes de la tâche. Cette validation passe aussi par des

demandes d'explication ou de précision, comme en 41, la question signifiant que la

réponse précédente correspond à ses attentes.

Contrôler la frustration : en 62-66, elle laisse parler Romain, Enyss et Lisa, qui

sont rarement intervenus auparavant, même si leurs propos sont « hors sujet » ; elle

permet ainsi à chacun de ces enfants de ne pas perdre la face. Comme il est préconisé

dans le premier extrait du document A : « Si un élève peu « bavard » prend à ce

moment la parole, même « hors sujet » il faudra alors considérer cet acte comme un

signe très prometteur ». De même, en 9 et 21, elle valorise les prises de parole de

Marie et d'Enyss, par « bien » ou « c'est bien » et, en 87, elle souligne que le mot

« transplantoir » est difficile à mémoriser et à prononcer, pour éviter le

découragement des élèves, voire un sentiment d'échec.

Ainsi, les interventions de l'enseignante ont pour rôle de soutenir l'effort des

élèves dans la réalisation de la tâche langagière et de réguler les prises de parole :

elles les aident à savoir sur quels thèmes porte l'échange, à se souvenir de leurs

actions, des objets utilisés, à les nommer correctement, mais aussi à prendre la parole

à bon escient lors d'un échange collectif. Toutefois, l'enseignante ne met pas en

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SUJET 02 - CORRIGES

œuvre de façon adéquate et efficace certaines des fonctions de l'étayage. En début de

séance, elle ne formule pas clairement ce qui est attendu des élèves : ils connaissent

l'objet de l'échange, mais ils ne savent ni le but ni l'enjeu de cet échange, ils n'en

connaissent pas non plus le déroulement à venir. L'enseignante n'explicite donc pas la

finalité de la tâche, ni le problème à résoudre. Or, pour que les élèves comprennent la

situation et donnent du sens aux activités scolaires, il est essentiel qu'ils sachent ce

qu'ils vont faire, mais aussi pourquoi et comment ils vont le faire, comme il est

énoncé dans les programmes concernant le domaine « Devenir élève » : « Les

enfants doivent comprendre progressivement la spécificité de l’école, ce qu’ils y

font, ce qui est attendu d’eux, ce qu’on apprend à l’école et pourquoi on l’apprend.

Ils comprennent la valeur des consignes collectives. Ils établissent une relation entre

les activités matérielles qu’ils réalisent et ce qu’ils en apprennent (on fait cela pour

apprendre, pour mieux savoir faire) ». La première intervention de l'enseignante n'a

donc pas une fonction de signalisation des caractéristiques déterminantes de la tâche,

pourtant essentielle, selon J. Bruner, dans l'interaction de tutelle. Ainsi, elle ne

facilite pas la clarté cognitive des enfants. Comme l'indique l'extrait 1 du

document A, l'enseignant doit veiller à :

« - donner des règles claires et, au début, peu nombreuses ;

- choisir un sujet d’échange clair pour les élèves et amorcer par des questions

précises », ce qui n'est pas le cas dans le début de cette séance.

Les interventions de l'enseignante posent également un problème en ce qui

concerne la réduction des degrés de liberté. En effet, par son insistance à obtenir le

mot juste, notamment en revenant sur des erreurs antérieures, comme en 13 et 15,

elle empêche la progression de l'échange à partir des propositions des élèves. Elle est

ainsi constamment en posture de contrôle, intervenant majoritairement dans

l'échange et gênant les interactions entre élèves.

Par ailleurs, elle utilise très peu la reformulation des propos des élèves pour les

amener à progresser linguistiquement : généralement, ses feed-back se réduisent à la

répétition des énoncés des élèves ou à la mise en évidence de leurs erreurs. De plus,

en 23- 27, si elle reprend Dounia et lui fait comprendre que le terme employé est

inintelligible, ce qui est pertinent, elle ne lui donne pas de mot pour exprimer

correctement son idée. Or, les Programmes de 2008 soulignent l'importance de

« l’attention que l’enseignant porte à chaque enfant, auquel il fournit les mots exacts

en encourageant ses tentatives, et en reformulant ses essais pour lui faire entendre

des modèles corrects ».

Enfin, il est à noter qu'aucune de ses interventions n'invite explicitement les élèves

à l'écoute. Ce constat peut être interprété de deux façons : soit les enfants s'écoutent,

donc il est inutile de le leur signaler, soit l'enseignante se focalise sur les réponses de

chacun des enfants qui interviennent, sans prendre en compte les autres élèves et leur

attention, comme peuvent le laisser penser ses longues interactions avec un seul

enfant : par exemple, avec Dounia de 22 à 31, Laura 42 à 48, Mattéo de 49 à 57 et à

la fin de la transcription, où un seul élève prend majoritairement la parole pour

répondre aux sollicitations de l'enseignante. Mais l'étude des enchaînements des

prises de parole des élèves montre que la première hypothèse est la plus probable.

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3 Quel est l’intérêt de l’interaction orale entre pairs

durant cette séance ?

Dans cette séance, il n'existe pas d'interactions entre pairs à proprement parler. En

effet, la communication se déroule dans un réseau centralisé, fermé : toutes les prises

de parole sont initiées par l'enseignante et lui sont adressées. Il n'est possible de

relever qu'un seul moment où les prises de parole ne passent pas par l'enseignante,

lors des tours de parole 62 à 64. Pourtant, il est difficile de parler d'interaction entre

pairs, car, si Alexis, en 62 répond à la question de l'enseignante « Il était comment le

râteau ? », Romain et Enyss n'interagissent pas et ne s'adressent à aucun autre élève.

En revanche, certains effets de reprise et certains enchainements montrent que les

enfants entendent et comprennent ce que disent leurs pairs. Ainsi, Mattéo, en 50,

reprend le mot « ratiné » énoncé par Lisa en 10, mais est capable de se corriger en

52, en utilisant le mot donné par Enyss en 20 (« ratisse ») et en l'employant au

participe passé. Romain en 63, Marie en 68, et Yani en 70 prononcent ce mot de

façon correcte et l'utilisent à bon escient, ce qui laisse à penser qu'ils prennent en

compte l'énoncé de Mattéo. Il en est de même pour le mot « bêché » utilisé en 64 et

repris en 66 et 72, et pour le mot « creusé », employé en 4 et réutilisé en 12, en 32 et

en 54 par des élèves différents. Par ailleurs, il est possible de remarquer plusieurs

énoncés symétriques du point de vue syntaxique et complémentaires du point de vue

sémantique. Ainsi, en 6, 8 et 10, les élèves reprennent la construction « Elle avait +

participe passé », employée par Laura en 4, en ajoutant, chaque fois, une

information : « creusé » / « bêché » / « retournée la terre » / « ratiné la terre ». La

symétrie entre ces deux dernières prises de parole est ainsi remarquable. De même,

en 63, Romain reprend un énoncé précédent (en 53) et son propos est enchaîné à

celui d'Alexis par contiguïté : « râteau » / « ratissé » et, en 64 (« On a bêché la

terre »), Enyss reprend la construction syntaxique employée par Romain « On a » +

participe passé, tout comme Lisa, Marie, Yanis et Laura de 66 à 72. Enfin, en 60,

Alexis nomme un outil différent de celui cité par Enyss en 58 et non répété par

l'enseignante, ce qui montre qu'il a entendu et compris ce qu'a énoncé son camarade

de classe.

Si cette séance ne donne pas lieu à de véritables interactions entre élèves, l'étayage

de l'enseignante étant très fort, les phénomènes de reprises et d'enchainements

témoignent d'une écoute des autres et sont le signe d'une participation active à une

discussion collective. Comme le précise l'extrait 1 du document A : « Entrer dans un

échange collectif suppose d’avoir quelque chose à dire en relation avec le sujet de

l’échange, de demander la parole et, quand la parole est donnée, de s’exprimer voire

de raccorder son propos avec les propos antérieurs qui avaient suscité une réaction ».

Tel est le cas dans cette séance. Il est à noter que les élèves répètent beaucoup ce

qu'ont dit les autres enfants ; comme le remarque M. Grandaty, cela montre qu'ils

s'insèrent dans une discussion de groupe, ce qui est une grande conquête pour de

jeunes enfants. De plus, le jeune enfant est souvent tenté de s'adresser à l'adulte,

comme dans cette séance. Il est donc nécessaire que l'enseignant décentre les élèves

par rapport à lui au profit du groupe de pairs.

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SUJET 02 - CORRIGES

4 Quels sont les principaux traits de l’oralité dans les paroles

de l’enseignante ?

Plusieurs traits d'oralité peuvent être repérés dans les paroles de l'enseignante ,

dont les principaux méritent d'être relevés.

1. Sur le plan de l'énonciation : emploi de marques d’énonciation qui caractérisent

une situation de communication orale directe

a. Emploi de déictiques

Pronoms personnels de 1ère et 2ème personnes : « tu » / « vous »

Mais aussi emploi du pronom « on » : désignant un être indéterminé, mais

fréquemment employé à la place d’un pronom personnel, en particulier «

nous », ce pronom, dont la signification est implicite, universalise le sujet des

verbes, sans nommer explicitement de qui il s’agit. Dans les énoncés de

l'enseignante, il est utilisé pour « nous » (en 1, par exemple) ou pour « vous »

(comme en 59) et dans un emploi non déictique, en 21. Dans ce tour de parole,

« on » est employé à la fois comme déictique avec le sens de « vous » et en

concurrence avec ce pronom (« On lève la main. Je veux bien vous interroger

mais on lève la main ») et comme pronom indéfini dans son sens général (« on ra-

tisse »). L'utilisation de ce pronom est problématique avec de jeunes enfants, en

particulier quand, dans le même énoncé, il renvoie à des référents différents,

comme le précise Le langage à l'école maternelle : « il faut être clair sur le

destinataire, éviter le « on » trop imprécis. Le « tu » associé au prénom ou le

«vous » collectif sont préférables » (p. 35).

Indicateurs temporels : en 1, « dernière fois », « lundi » . Il est possible de se

demander ce que signifient ces mots pour un élève de MS. Ces indications sont

trop implicites pour que les enfants sachent à quel événement l'enseignante fait

référence. Seule la présence des photos au tableau peut le leur permettre.

Emploi d'articles définis ou de pronoms marquant la connivence, non

compréhensibles hors contexte, peut-être liés à un geste : « au tableau » (en 1),

« elle » (en 5). Il aurait été opportun que l'enseignante explicite le pronom « elle »

en employant le prénom de l'employée municipale. A noter aussi l'utilisation

récurrente du pronom « ça » comme déictique, renvoyant soit aux photos, soit à

un évènement vécu ensemble, donc dont le sens est implicite : en 41, « Comment

ça s’appelait ? » ; en 77, « Non, ça s’appelle pas une pelle. » et, surtout, en 87: «

Ah, c’est ça la pelle que vous me disiez (en montrant la photo du transplantoir),

ça a un autre nom. On dit, c’est une petite pelle, on appelle ça un

trans...plan…toir. C’est un nom difficile, un transplantoir. Et ça sert à quoi ? ».

b. Enoncés marquant un lien entre un locuteur et un interlocuteur :

récurrence de phrases interrogatives et présence de quelques phrases

impératives, par exemple, « Va t’asseoir » en 35.

2. Sur le plan de la syntaxe phrastique

Utilisation de nombreuses phrases averbales et /ou interrompues : par

exemple, en 3, l'enseignante répète l'énoncé de Gwen, « Fleur », sans l'insérer

dans une structure syntaxique ; en 11, elle reprend juste la fin de la phrase de Lisa

sous forme interrogative (« ...Ratiné la terre ? ») ; en 13, elle réitère l'énoncé

d'Enyss sans sujet : « Bêché la terre » ; en 77 : « Bêcher, c’est avec une ? ».

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SUJET 02 - CORRIGES

Emploi récurrent de phrases à la construction lâche : par exemple, en 13 :

« Creusé, ratiné, on dit ? » ; en 15 : «Mais le mot ratiner…, c’était comment le

mot ? » ; en 41 : « Elles étaient accrochées à quoi les racines ? » ;

Constructions avec un pronom personnel à valeur cataphorique : en 41

« Elles étaient accrochées à quoi les racines ? », en 61 : « Il était comment le

râteau ? ». Ce phénomène rend l'énoncé difficile à suivre pour les élèves, puisque

le thème ne se trouve explicité qu'en fin de phrase.

Emploi des pronoms démonstratifs « ce » ou « ça », comme pronoms de

reprise : en 37, « On a planté des fleurs. Alors, comment c’était ? » ; en 27, « Des

verpiations ? Je sais pas ce que ça veut dire. ». Ces mots gagneraient à être

explicités pour que les élèves comprennent exactement de quoi parle

l'enseignante.

Phrases avec mise en relief, en particulier en 35 « Il n’y a plus personne

qui veut dire quelque chose ? » : phrase interrogative, emphatique et négative, ce

qui la rend peu compréhensible.

Elision de la première partie de la locution adverbiale de négation « ne »,

le plus souvent, par exemple en 25, 27 et 77. A noter, en 35, l'emploi de la

négation une fois avec « ne », une autre fois sans « ne ».

Utilisation de « est-ce que » particule interrogative, en 31..

e. Au niveau du mot

Elision d'un phonème « t' » pour « tu », à plusieurs reprises, par exemple

en 29 et 33.

Si ces traits d'oralité ne sont pas des erreurs à l'oral, certains posent problème, car

l'enseignant doit être particulièrement attentif à la langue qu'il emploie, comme il est

indiqué dans les Programmes de 2008 : « L’enseignant veille [...] à offrir

constamment à ses jeunes élèves un langage oral dont toute approximation est

bannie ; c’est parce que les enfants entendent des phrases correctement construites et

un vocabulaire précis qu’ils progressent dans leur propre maitrise de l’oral » ou

encore dans Le langage à l'école maternelle, qui souligne la nécessité, pour

l'enseignant, d'employer une langue proche de l'écrit.

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