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SYNDICALISME SECTEUR DE LA SANTÉ CAHIER THÉMATIQUE K LE DEVOIR, LES SAMEDI 10 ET DIMANCHE 11 OCTOBRE 2015 La FIQ retourne à la table malgré la grogne Page K 4 Les périsoignants: essentiels, mais souvent oubliés Page K 2 PEOPLEIMAGES ISTOCK ET ARCHIVES LE DEVOIR COÛTS DE LA SANTÉ «La stratégie de miser sur le privé est un échec» HÉLÈNE ROULOT-GANZMANN «O n exagère grandement l’augmentation des coûts de la santé au Québec, af- firme Guillaume Hébert, chercheur à l’Institut de recherche et d’informations socio-écono- miques (IRIS). Il y a de la manipulation de la part du gouvernement à ce sujet. Qu’est-ce qu’on calcule lorsque l’on parle de santé et ser- vices sociaux ? Et avec quoi on compare les chif- fres ? Avec le budget du Québec ? Avec le budget consolidé du Québec ? Avec la richesse natio- nale du Québec ? À l’IRIS, on essaye de ne pas tenir compte que du pire des calculs, qui laisse croire à une explosion catastrophique des dé- penses. On utilise des méthodes plus complètes et on se rend compte non seulement que ça n’augmente pas aussi rapidement que ce que certains veulent laisser entendre, mais même que si l’on regarde sur une période de trente ou quarante ans, on peut affirmer que les dépenses sont relativement stables. » Explosion du coût des médicaments Pourtant, oui, certaines d’entre elles ont lit- téralement explosé. Parmi elles, les frais de médicaments, qui sont passés de 8 à 20 % du budget total de la santé entre 1981 et au- jourd’hui, et les coûts liés aux infrastructures telles que la construction des deux mégahôpi- taux à Montréal. « Si on regarde de plus près, poursuit M. Hé- bert, on se rend compte que ce sont les dépenses qui sont gérées par le privé qui augmentent le plus vite. Prenons l’assurance médicament, qui a été créée dans les années 90 mais qui est fon- dée sur un système hybride avec des gens qui sont assurés par le gouvernement et d’autres qui béné- ficient d’une assurance privée avec leur em- ployeur. Résultat: le gouvernement ne dispose pas d’un poids assez fort pour véritablement pe- ser dans la balance et demander de meilleurs prix. Au contraire, on a préféré faire des ponts en or aux pharmaceutiques pour qu’elles s’instal- lent dans la région montréalaise, et cela sans que ça ait vraiment de conséquences bénéfiques pour la main-d’œuvre puisqu’elles délocalisent la production. » Même chose du côté des infrastructures, qui sont aujourd’hui construites en partenariat pu- blic-privé, estime le chercheur. Ça laisse croire à la population que ça coûte moins cher, mais en réalité, ça revient à acheter une maison avec une carte de crédit. « Selon certaines estimations, ce choix du PPP pourrait aller jusqu’à doubler le coût de construc- tion , explique Guillaume Hébert. On parle quand même de 5 milliards de dollars. On n’en parlerait plus, du déficit budgétaire, si on avait pu sauver cette somme-là! Sauf que le PPP, c’est comme payer un loyer. Ce n’est donc pas de l’ar- gent qu’on sort tout de suite. Ça ne s’ajoute pas à dette. Et comme nous avons, comme société, déve- loppé une espèce de phobie de la dette, ça fait les affaires de tout monde à court terme. » Mais si les coûts reliés aux médicaments et à la construction des infrastructures ont réelle- ment explosé, l’IRIS assure également que dans le même temps, certaines dépenses ont considérablement baissé, raison pour laquelle, au final, les coûts de santé restent stables. « Plus les dépenses sont publiques et mieux elles sont contrôlées, résume M. Hébert. L’argent qui va directement aux hôpitaux a considérablement diminué ces dernières années, pour plusieurs rai- sons, dont le virage ambulatoire. En fait, en ad- ditionnant les dépenses hospitalières et les sa- laires des médecins, qui eux ont eu tendance à augmenter ces dernières années, les deux postes comptent pour seulement 5 % des dépenses de santé environ. Comparés aux 20 % des médica- ments… Bref, la stratégie de miser sur le privé est un échec. » Or, il semble que le plan d’austérité mènera à terme vers encore plus de sous-traitance au privé. La politique de centralisation voulue par le ministre Barrette va obligatoirement aboutir à la suppression de postes de cadres là où il n’est plus possible de couper, estime le cher- cheur de l’IRIS. Et il va falloir faire appel à des firmes privées pour faire le travail. C’est ce qui Le gouvernement libéral ne cesse d’expliquer le déficit budgétaire, et donc le plan d’austérité mis en place depuis son arrivée à Québec il y a dix-huit mois, par l’explosion des coûts de santé publique. Un argument rejeté cependant par certains chercheurs, qui estiment le calcul volontairement biaisé. Selon eux, si on la ramène à la richesse nationale, la part des dépenses de santé est relativement stable depuis la mise en place de l’assurance maladie universelle. VOIR PAGE K 4 : STRATÉGIE Déjà 3,6 milliards de compressions 3,6 milliards de dollars, voilà le total des compressions recensées par l’IRIS depuis l’arrivée du gouvernement de Philippe Couillard au pouvoir en avril 2014. 3,6 mil- liards de compressions, donc, qui selon ce même gouvernement n’auraient pas de conséquences sur les services donnés à la population. Vraiment ? Pour en avoir le cœur net, Minh Nguyen, chercheur à l’IRIS, a décidé de lister toutes les an- nonces officielles d’augmentation de ta- rifs, de fermeture d’organismes ou encore de réduction d’effectifs directement liées à une baisse des crédits alloués par Qué- bec. La liste est longue, et elle est consul- table via un outil multimédia mis en ligne à la rentrée et mis à jour chaque semaine. Pour le consulter, c’est ici : austerite.iris- recherche.qc.ca. Observatoire de l’austérité de l’IRIS

SYNDICALISME - Le Devoir...SYNDICALISME K 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 10 ET DIMANCHE 11 OCTOBRE 2015 LES PÉRISOIGNANTS Essentiels, mais souvent oubliés PIERRE VALLÉE L’ invention

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SYNDICALISMESECTEUR DE LA SANTÉ

C A H I E R T H É M A T I Q U E K › L E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 0 E T D I M A N C H E 1 1 O C T O B R E 2 0 1 5

La FIQ retourne à la table malgré la grognePage K 4

Les périsoignants:essentiels, maissouvent oubliésPage K 2

PEOPLEIMAGES ISTOCK ET ARCHIVES LE DEVOIR

COÛTS DE LA SANTÉ

«La stratégie de miser sur le privé est un échec»

H É L È N E R O U L O T - G A N Z M A N N

« O n exagère grandementl’augmentation des coûtsde la santé au Québec, af-firme Guillaume Hébert,chercheur à l’Institut de

recherche et d’informations socio-écono-miques (IRIS). Il y a de la manipulation de lapar t du gouvernement à ce sujet. Qu’est-cequ’on calcule lorsque l’on parle de santé et ser-vices sociaux ? Et avec quoi on compare les chif-fres ? Avec le budget du Québec ? Avec le budgetconsolidé du Québec ? Avec la richesse natio-nale du Québec ? À l’IRIS, on essaye de ne pastenir compte que du pire des calculs, qui laissecroire à une explosion catastrophique des dé-penses. On utilise des méthodes plus complèteset on se rend compte non seulement que çan’augmente pas aussi rapidement que ce quecer tains veulent laisser entendre, mais mêmeque si l’on regarde sur une période de trente ouquarante ans, on peut af firmer que les dépensessont relativement stables. »

Explosion du coût des médicamentsPourtant, oui, certaines d’entre elles ont lit-

téralement explosé. Parmi elles, les frais demédicaments, qui sont passés de 8 à 20 % dubudget total de la santé entre 1981 et au-jourd’hui, et les coûts liés aux infrastructurestelles que la construction des deux mégahôpi-taux à Montréal.

« Si on regarde de plus près, poursuit M. Hé-bert, on se rend compte que ce sont les dépensesqui sont gérées par le privé qui augmentent leplus vite. Prenons l’assurance médicament, quia été créée dans les années 90 mais qui est fon-dée sur un système hybride avec des gens qui sontassurés par le gouvernement et d’autres qui béné-ficient d’une assurance privée avec leur em-ployeur. Résultat : le gouvernement ne disposepas d’un poids assez fort pour véritablement pe-ser dans la balance et demander de meilleursprix. Au contraire, on a préféré faire des pontsen or aux pharmaceutiques pour qu’elles s’instal-lent dans la région montréalaise, et cela sansque ça ait vraiment de conséquences bénéfiquespour la main-d’œuvre puisqu’elles délocalisentla production. »

Même chose du côté des infrastructures, quisont aujourd’hui construites en partenariat pu-blic-privé, estime le chercheur. Ça laisse croireà la population que ça coûte moins cher, mais

en réalité, ça revient à acheter une maison avecune carte de crédit.

«Selon certaines estimations, ce choix du PPPpourrait aller jusqu’à doubler le coût de construc-tion, explique Guillaume Héber t. On parlequand même de 5 milliards de dollars. On n’enparlerait plus, du déficit budgétaire, si on avaitpu sauver cette somme-là ! Sauf que le PPP, c’estcomme payer un loyer. Ce n’est donc pas de l’ar-gent qu’on sort tout de suite. Ça ne s’ajoute pas àdette. Et comme nous avons, comme société, déve-loppé une espèce de phobie de la dette, ça fait lesaffaires de tout monde à court terme.»

Mais si les coûts reliés aux médicaments et àla construction des infrastructures ont réelle-ment explosé, l’IRIS assure également quedans le même temps, certaines dépenses ontconsidérablement baissé, raison pour laquelle,au final, les coûts de santé restent stables.

«Plus les dépenses sont publiques et mieux ellessont contrôlées, résume M. Hébert. L’argent quiva directement aux hôpitaux a considérablementdiminué ces dernières années, pour plusieurs rai-sons, dont le virage ambulatoire. En fait, en ad-ditionnant les dépenses hospitalières et les sa-laires des médecins, qui eux ont eu tendance àaugmenter ces dernières années, les deux postescomptent pour seulement 5 % des dépenses desanté environ. Comparés aux 20 % des médica-ments… Bref, la stratégie de miser sur le privéest un échec. »

Or, il semble que le plan d’austérité mènera àterme vers encore plus de sous-traitance auprivé. La politique de centralisation voulue parle ministre Barrette va obligatoirement aboutir

à la suppression de postes de cadres là où iln’est plus possible de couper, estime le cher-cheur de l’IRIS. Et il va falloir faire appel à desfirmes privées pour faire le travail. C’est ce qui

Le gouvernement libéral ne cesse d’expliquer le déficit budgétaire, et donc le plan d’austéritémis en place depuis son arrivée à Québec il y a dix-huit mois, par l’explosion des coûts desanté publique. Un argument rejeté cependant par certains chercheurs, qui estiment le calculvolontairement biaisé. Selon eux, si on la ramène à la richesse nationale, la part des dépensesde santé est relativement stable depuis la mise en place de l’assurance maladie universelle.

VOIR PAGE K 4 : STRATÉGIE

Déjà 3,6 milliards de compressions

3,6 milliards de dollars, voilà le total descompressions recensées par l’IRIS depuisl’arrivée du gouvernement de PhilippeCouillard au pouvoir en avril 2014. 3,6 mil-liards de compressions, donc, qui selon cemême gouvernement n’auraient pas deconséquences sur les services donnés à lapopulation. Vraiment ? Pour en avoir lecœur net, Minh Nguyen, chercheur àl’IRIS, a décidé de lister toutes les an-nonces officielles d’augmentation de ta-rifs, de fermeture d’organismes ou encorede réduction d’effectifs directement liéesà une baisse des crédits alloués par Qué-bec. La liste est longue, et elle est consul-table via un outil multimédia mis en ligneà la rentrée et mis à jour chaque semaine.Pour le consulter, c’est ici : austerite.iris-recherche.qc.ca.

Observatoire de l’austérité de l’IRIS

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SYNDICALISMEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 0 E T D I M A N C H E 1 1 O C T O B R E 2 0 1 5K 2

LES PÉRISOIGNANTS

Essentiels, mais souvent oubliés

P I E R R E V A L L É E

L’ invention de ce néolo-gisme revient au Conseil

provincial des affaires sociales(CPAS) du Syndicat canadiende la fonction publique(SCFP). « Lorsqu’une personnedit qu’elle travaille dans un hô-pital, la première réaction desgens est de penser qu’elle exercela profession d’infirmière ou demédecin , explique Pier reSoucy, président du CPAS. Çane leur passerait pas par l’es-prit qu’elle puisse exercer unautre métier ou une autre pro-fession. On était conscient decette situation au CPAS et l’onsouhaitait faire connaître et va-loriser les autres métiers et pro-fessions exercés dans le réseaude la santé et des services so-ciaux. Mais avant d’arrêterune stratégie pour le faire, en-core fallait-il les nommer. On adonc inventé le nom de périsoi-gnant pour les désigner. »

Qui sont-ils ? Depuis l’adop-tion de la Loi 30, le gouverne-ment divise en quatre catégo-ries le personnel du réseau dela santé et des ser vices so-ciaux. Les médecins et les ca-dres ne sont pas concernés. Lapremière catégorie est celledes soins infirmiers et cardio-respiratoires, ce qui inclut lesinhalothérapeutes. La secondecatégorie comprend le person-nel paratechnique, les ser-vices auxiliaires et les métiers.On trouve dans cette catégorieautant les préposés aux bénéfi-ciaires et à l’entretien ména-

ger que les cuisiniers et les pâ-tissiers comme les électricienset les mécaniciens. La troi-sième catégorie est celle desemployés de bureau et destechniciens en administration.La quatrième catégorieconcerne les techniciens et lesprofessionnels de la santé etdes services sociaux. Cette ca-tégorie englobe autant lestechniciens en radiologie queles ergothérapeutes et les psy-chologues. Les périsoignantsappar tiennent aux trois der-nières catégories.

« Ce sont 240 000 périsoi-gnants qui travaillent dans leréseau de la santé et des ser-vices sociaux au Québec et ilsreprésentent plus de 70 titres detravail. Le réseau ne pourraitpas fonctionner sans leur pré-sence. La nourriture, ça faitpartie des soins que l’on of freaux patients, et sans cuisiniers,pas de nourriture. Il faut despréposés à l’entretien ménagersi l’on veut éviter les infectionsnosocomiales. Le travail des pé-risoignants est essentiel au bonfonctionnement du réseau, onne pourrait pas s’en passer. »

Emploi précaire et conditions de travail

Il existe une certaine préca-rité d’emploi dans le domainedes périsoignants, mais celas’explique surtout par le fonc-tionnement du système. «Nousavons des employés permanentsà temps plein. Par contre,comme ces employés ne peuventpas travailler plus de cinq jours

de suite et qu’ils ont droit à unefin de semaine de congé sur deux,il faut des employés pour les rem-placer lors des journées de congé.Ce sont les employés permanentsà temps par tiel qui viennentalors combler ce vide.On estime que 50% despérisoignants sont àtemps plein et 50 % àtemps partiel. De plus,cer tains employés àtemps partiel choisissentde s’inscrire sur la listedes employés permanentsoccasionnels, ce qui leurpermet d’aller chercherdes journées de travailadditionnelles et ainsi compléterune semaine normale.»

Tout en étant correctes, lesconditions salariales demeu-rent modestes. «Oui, il y a cer-taines professions ou cer tainsmétiers où les salaires sont plus

élevés, mais pour la plupart despérisoignants, c’est loin d’être leKlondike. Par exemple, un pré-posé aux bénéficiaires gagne21$ de l’heure, à l’entretien mé-nager, c’est 17 $ et en cuisine,

environ 18 $. On pour-rait facilement avancerque le salaire de la plu-part des périsoignantsoscille entre 35 000$ et40 000$ par année. »

Sans compter que letravail s’est alourdi aufil des ans. « Aupara-vant, lorsqu’un patientétait hospitalisé, parexemple pour une opéra-

tion, il demeurait à l’hôpital unesemaine ou deux. Pour les péri-soignants, les premières journéesétaient les plus lourdes, mais aufur et à mesure que le patient serétablissait, les journées auprèsde lui devenaient plus légères.

Aujourd’hui, les séjours à l’hôpi-tal sont de plus en plus courts etles patients reçoivent leur congéaprès seulement quelques jours.Cela fait en sorte que les périsoi-gnants voient uniquement despatients dans leurs journées pluslourdes, ce qui rend la tâche plusdifficile aujourd’hui qu’hier.»

Campagne de valorisationLe CPAS a décidé de lancer

récemment une campagne devalorisation pour mieux faireconnaître les périsoignants.Cette campagne passe d’abordpar la mise en place du site In-ternet périsoignant.com. L’on ytrouve une foule d’informa-tions ainsi qu’une série detrois capsules vidéo les présen-tant. Fait à noter, le site périsoi-gnant.com inclut dans sa défi-nition de périsoignant lessoins infirmiers. « C’est que

nous avons environ 250 infir-mières qui font partie de notresyndicat et l’on a choisi de lesinclure. Mais ça demeure unpetit nombre par rapport aux20 000 périsoignants qui sontreprésentés par le CPAS.»

Dans un second temps,d’autres mesures de valorisa-tion seront ajoutées. « Notrecherchons d’abord à les faireconnaître auprès du grand pu-blic. Mais notre véritable ob-jectif, c’est de faire reconnaîtreà sa juste valeur l’importancedu rôle que jouent les périsoi-gnants dans le réseau de lasanté et des services sociaux.Sans la contribution de ce per-sonnel dévoué, le réseaus’écroulerait. Il est temps quel’on s’en rende compte. »

CollaborateurLe Devoir

Ils sont pourtant nombreux à travailler dans le réseau québé-cois de la santé et des services sociaux, mais ils passent laplupart du temps inaperçus. À un point tel que jusqu’à récem-ment, il n’existait même pas de nom pour les désigner. Maisaujourd’hui, ils s’appellent les périsoignants.

ENSEMBLE, REPENSONS LE MONDE

P L A Ç O N S L A P R É V E N T I O N A U C Œ U R

D ’ U N E M E I L L E U R E S A N T É

C O N C O R D I A . C A

C E N T R E P E R F O R M

KADMY ISTOCK

Les périsoignants représentent le personnel paratechnique (les préposés aux bénéficiaires et à l’entretien ménager, les cuisiniers et lespâtissiers, les électriciens et les mécaniciens), les employés de bureau, les techniciens et les professionnels de la santé et des services sociaux

Où en sont les négociations entre le gouvernement et les employés du secteur public ? Samedidernier, le Front commun syndical organisait une manifestation afin d’indiquer son impa-tience devant la lenteur des négociations. Le gouvernement est-il enfin prêt à bouger ? Entre-vue avec l’un des membres du Front commun, Daniel Boyer, président de la FTQ.

Les syndicats fourbissent leurs armes

P I E R R E V A L L É E

«D epuis deux semaines, annonce-t-il, onsent un peu de mouvement à la table cen-

trale.» Pourtant, le gouvernement maintient sespositions sur son offre salariale comme sur lerégime de retraite. «Oui, c’est vrai, le gouverne-ment maintient ses positions, mais on sent un pe-tit changement. Depuis le début des négociations,il y a de cela neuf mois, les négociateurs des deuxparties s’en sont tenus à expliquer leurs demandesrespectives en déposant à la table des études poursoutenir leurs arguments. Mais depuis deux se-maines, on sent un léger changement d’attitude.»

Ce changement d’attitude est surtout mani-feste aux tables sectorielles. «Le gouvernementest arrivé avec de nouveaux dépôts aux tables sec-torielles et les négociateurs gouvernementaux ontreçu de nouveaux mandats. Et dans ces nou-veaux dépôts, on a pu constater que certaines de-mandes du gouvernement avaient été éliminéeset d’autres atténuées. De plus, certaines de nosdemandes ont été acceptées. Ce changement d’at-titude m’indique que le gouvernement est peut-être arrivé au point où il sera possible d’envisa-ger de véritables négociations. »

Pour la suite des chosesNul ne peut prédire pour le moment l’abou-

tissement des négociations. Daniel Boyer de-meure toujours optimiste et croit qu’il est en-core possible d’arriver à une entente négociéeet signée. Mais le Front commun syndical esttout sauf naïf, et il fourbit ses armes au cas oùle gouvernement traîne les pieds.

« Nous sommes présentement à aller cher-cher des mandats de grève auprès de nos dif fé-rents syndicats. À présent, environ la moitiéde nos syndicats ont reçu un mandat de grèvede leurs membres. Il faudra encore deux se-maines pour tenir les assemblées pour l’autremoitié. »

Une fois les mandats de grève en poche,tout dépendra alors de l’attitude du gouver-nement. « Si ce dernier ne fait pas preuve d’ou-verture, il faudra donc augmenter la pression.On le fera par des grèves rotatives d’un jourpar région. »

Et si ces grèves rotatives n’amènent pas legouvernement à faire preuve de plus d’ouver-ture, le Front commun envisage-t-il la possibi-lité d’une grève illimitée ? «Ce n’est pas pour lemoment dans nos intentions. Le gouvernementnous indique qu’il n’a pas l’intention d’avoir re-cours à un décret et il n’y a donc pas de ferme-ture de sa part, et pour le moment, je le crois. Etsi à cet égard le gouvernement cachait son jeu,une grève illimitée serait pour lui la parfaite jus-tification pour procéder par décret. J’ai encoreconfiance que l’on puisse en arriver à uneconvention collective négociée. »

Et si cela échoue et que le gouvernementprocède par loi spéciale ? « Il est évident quenous allons contester cette loi spéciale devant lestribunaux. La Cour suprême a statué que le droitde grève fait partie de notre droit de négociationet d’association. »

CollaborateurLe Devoir

ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR

Daniel Boyer, président de la FTQ

Pierre Soucy

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SYNDICALISMEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 0 E T D I M A N C H E 1 1 O C T O B R E 2 0 1 5 K 3

LES SERVICES PUBLICS DE SANTÉ ET D’ÉDUCATION, C’EST

VITAL

POUR UN QUÉBEC PLUS JUSTE

Aux tables de négociations dusecteur public, tous les en-jeux importants sont sur la ta-ble, et certains droits qu’oncroyait acquis pourraient dis-paraître. Les porte-parole dessyndicats en santé racontentce qu’il en est de cette dif fi-cile négociation.

M A R I E - H É L È N E A L A R I E

Samedi dernier, ce sont plusde 150 000 employés de la

fonction publique qui sont des-cendus dans la rue. Et toujoursla semaine dernière, la Confé-dération des syndicats natio-naux, la CSN, obtenait de sesmembres un mandat de grèveon ne peut plus clair de 85 %.Cette mobilisation exception-nelle envoie un message expli-cite au gouvernement, soulignele président de la centrale,Jacques Létourneau. Malgréplusieurs séances de négocia-tions, les dossiers portés aux ta-bles de négociations n’avan-çaient pas d’un iota. Depuis lasemaine dernière, note-t-il, les« patrons » ont commencé àbouger, «à partir du moment oùles quatre fédérations du secteurpublic ont tenu une instanceconjointe et que les mandats degrève sont sortis de façon aussiforte […]. Mais bouger un peune veut pas dire bouger nécessai-rement dans le bon sens…»

Selon le président, « le ras-le-bol est généralisé et une tellemobilisation est à la hauteur del’attitude du gouvernement libé-ral depuis qu’il est au pouvoir :toute la lutte à l’austérité, les ef-fets des compressions budgé-taires sur les personnels et surles services à la population ».Jacques Létourneau af firmeque s’ajoutent à tout ça « desannées et des années de restruc-

turation. Le Par ti libéral n’apas inventé la roue ; ce qu’esten train de faire MonsieurCouillard, Monsieur Charestl’a fait avant lui ».

L’objectif du syndicat esttoujours d’en ar river à uneconvention négociée. Mais sile passé est garant de l’avenir,Jacques Létourneau rappelleque « c’est clair, on a toujoursderrière nous l’historique dusecteur public avec une tren-taine de décrets qu’on a vécupar le passé».

S’il n’y a pas encore eu d’an-nonce concernant le momentdu déclenchement de cesgrèves rotatives, « ça va venir,et c’est clair qu’en attendant onva continuer à négocier, tantau niveau des salaires qu’en cequi a trait aux demandes despatrons aux tables sectorielles.C’est dif ficile de dire quand etcomment ces négos aboutiront,mais l’horizon de l’automne estle bon, c’est clair. Ce sera quoila conclusion ? On ne pourravous le dire qu’après la nuit ul-time où on négociera ce qui res-tera à négocier».

La désorganisation du travail

Jeff Begley, le président de laFédération de la santé et desservices sociaux, la FSSS–CSN,est d’avis que la priorité des né-gociations actuelles va aux aug-mentations de salaire : «Depuisles deux dernières conventionscollectives, année après année,on regarde les augmentations sa-lariales et le coût de la vie et onconstate que nos membres y per-dent, et de façon importante ;près de 13 % d’augmentationpendant que le coût de la viegrimpait de 28%.» La Fédéra-tion représente environ 130 000travailleurs de toutes les caté-gories d’emploi des domainesde la santé et des services so-ciaux au Québec ainsi que les

services à la petite enfance.Outre les salaires, toute l’or-

ganisation du travail, « ou plu-tôt la désorganisation qu’a crééela Loi 10», est importante pourJeff Begley : «On commence àpeine à voir les implications,nous insistons pour trouver lesmoyens pour pallier les pro-blèmes qui ne manqueront pasde surgir. » Par exemple, prèsde 50 % des membres de laFSSS travaillent sur appel ou àtemps partiel. Ces personnes,sur liste de rappel, ne saventpas réellement quand elles se-ront appelées à travailler.« Elles sont souvent appelées àla dernière minute pour desremplacements alors qu’elles re-viennent semaine après se-maine sur le même poste etpour le même nombre d’heures.On voudrait consolider cespostes pour que les patients etles travailleurs vivent des condi-tions un peu moins pénibles »,explique-t-il.

Le président de la FSSS sou-haite aussi qu’on s’attaque auxinégalités sociales : « On perdprès de 800 millions qui partentvers des paradis fiscaux. Qu’est-

ce qu’on pourrait faire avec toutcet argent ! » Il s’inquiète d’unsondage réalisé par la Fonda-tion Chagnon qui mentionneque la moitié des Québécoiscraignent la pauvreté et croientqu’elle doit rester une des prio-rités des décideurs publics :« Je suis convaincu que lesjeunes familles et les retraitésdoivent être très préoccupés. Cegouvernement attaque les gensqui ont un régime de retraite aulieu d’améliorer la situation desgens qui n’en ont pas ! Les mem-bres chez nous qui travaillent àtemps partiel s’en vont vers lapauvreté à la retraite…»

Jeff Begley est aussi préoc-cupé par l’incapacité du sys-tème à retenir ses employésainsi que la menace d’une plusgrande présence du privé : «Cene sont pas les propositionsd’augmentations salariales de3 % sur cinq ans qui vont atti-rer les travailleurs dans le do-maine de la santé. »

L’exode des cerveauxCette crainte de ce qu’on

pourrait appeler l’exode descerveaux est partagée par Mi-

chel Tremblay, le président dela Fédération des professio-nèles de la CSN, la FP : « Au-jourd’hui, quelqu’un qui sort del’université n’a pas le goût d’al-ler travailler dans le public sansparler même des conditions sa-lariales, mais simplement desconditions de travail. Dans plu-sieurs disciplines, il y a pénurieimportante et, de plus, on a unproblème d’attraction et de ré-tention.» À ce rythme, la moro-sité et la surcharge de travailconstantes auront raison desprofessionnels que représenteMichel Tremblay.

À titre d’exemple, le 31 marsdernier le ministère a aboli uneprime de rétention offerte auxpsychologues selon le nombred’heures travaillées. Cetteprime avait été mise en place ily a trois ans afin d’endiguer lapénurie de psychologues : «Lerésultat, c’est qu’aujourd’hui lespsychologues font plus d’heuresdans le privé, et la pénurie nefait que s’aggraver.»

Dans ce contexte, il n’estpas étonnant que, depuis plu-sieurs années, Michel Trem-blay se batte pour revoir l’or-ganisation du travail. En se ba-sant sur des chiffres d’absen-téisme du ministère, le prési-dent trace un portrait sombrede l’état des troupes : « Au mi-nistère, il existe un groupe detravail sur l’assurance salairequi rédige un rapport annuel-

lement. Il y a une quinzained’années, ce comité avait sonnél’alarme en constatant d’impor-tants problèmes d’absentéisme,des problèmes qui coûtent cher.Ce qu’on constate, c’est qu’an-née après année, les taux d’ab-sentéisme augmentent ainsique les problèmes de santé psy-chologique au travail, qui re-présentaient en 2014 quelque40 % des cas. L’an dernier, lescoûts engendrés en assurancesalaire dépassaient 400 mil-lions de dollars. C’est majeur. »

À la table de négociation, cequ’il propose, c’est « d’amélio-rer les lieux de discussion au ni-veau local pour améliorer laqualité des services of fer ts.Pour nous, dans le secteur de lasanté et des services sociaux, laqualité des services passe par laqualité de vie au travail ; il fautque les gens soient en formepour pouvoir donner des ser-vices adéquats ». Dans les faits,ça se traduit par la créationd’un comité local d’améliora-tion continue, qui revoit laqualité de vie au travail, laconciliation famille-travail, laqualité des services offerts, letransfert d’expertise et l’ana-lyse de toutes les dimensionsreliées aux charges de travail.Mais « là-dessus, il n’y a pasd’écoute», déplore le président.

CollaboratriceLe Devoir

Les âpres négociations de l’automne

FSSS-CSN

Jef f Begley, le président de laFédération de la santé et desservices sociaux, la FSSS–CSN

MICHEL GIROUX

Michel Tremblay, le président dela Fédération des professionèles(FP) de la CSN

Le ras-le-bol est généralisé et une telle mobilisation est à lahauteur de l’attitude du gouvernementlibéral depuis qu’il est au pouvoirJacques Létourneau, président de la Confédération des syndicats nationaux (CSN)

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Page 4: SYNDICALISME - Le Devoir...SYNDICALISME K 2 LE DEVOIR, LES SAMEDI 10 ET DIMANCHE 11 OCTOBRE 2015 LES PÉRISOIGNANTS Essentiels, mais souvent oubliés PIERRE VALLÉE L’ invention

SYNDICALISMEL E D E V O I R , L E S S A M E D I 1 0 E T D I M A N C H E 1 1 O C T O B R E 2 0 1 5K 4

La FIQ retourne à la table malgré la grogne

R É G I N A L D H A R V E Y

C e syndicat rassemble enfait dans ses rangs une

très grande partie des person-nels soignants : les infirmières,les infirmières auxiliaires, lesinhalothérapeutes et les perfu-sionnistes. La FIQ, profondé-ment déçue par les offres de lapartie patronale, a récemmentquitté la table sectorielle desnégos dans le cadre des pour-parlers pour le renouvellementdes conventions collectivesdans le secteur public. À cetteoccasion, la présidente n’a pasmâché ses mots en parlant despropositions du gouvernementCouillard : «On a reçu des gifleset ça ne nous tente pas d’alleren chercher d’autres.»

«Mes propos ont été à la hau-teur de ce qu’on nous a of fer tparce que c’était choquant ; iln’y avait là que de la récupéra-tion portant sur la plupart desgains qu’on avait arrachés dehaute lutte lors de la dernièrenégociation, il y a moins decinq ans, comme la majorationdes primes de soir et de nuit etcelle sur les soins critiques. Ilest clair qu’on ne vou-lait pas revenir en ar-rière, et c’est la raisonpour laquelle on aquitté [les négos] », as-sure-t-elle.

La FIQ avait quitté latable mais n’avait pasclaqué la porte pour au-tant : «Comme organisa-tion responsable, on atoujours maintenu lescanaux ouverts avec le gouver-nement et avec le ministre de laSanté parce que l’objectif, c’étaitd’obtenir le dépôt de nouvelles of-fres, ce qui s’est produit. On estdans une phase de négociation,ce qui laisse entendre que per-sonne ne va obtenir tout ce qu’ilveut, mais, du même souffle, ildoit y avoir une ouverture pourdiscuter, entre autres de nos solu-tions sur les plans de l’organisa-tion du travail, de la composi-tion des équipes et de la diminu-tion importante du temps par-tiel.»

Il y a eu des échanges, de-puis le retrait de la table, entrela présidente et le ministre, detelle sorte que la Fédération afinalement choisi de repren-dre les négociations : « Il y atoujours eu des discussions aveclui, ce qui est important pourmoi parce que ma responsabi-lité c’est d’en arriver à une en-tente négociée. »

Pour la suite des pourpar-lers, Mme Laurent dresse laliste des points sur lesquelsportent principalement les re-

vendications de la FIQ sur leplan sectoriel : l’organisationdu travail, la dotation sécuri-taire du personnel, les problé-matiques particulières aux in-firmières auxiliaires qui sontsous-utilisées ou mal utiliséesdans les équipes de travail etla planification de la main-d’œuvre dans un avenir àcourt terme au cours duquelsurviendront des prises de re-traite accentuées : «On doit re-garder comment on est capabled’avoir une organisation du tra-vail et une façon de dispenserdes soins qui soient acceptableset plus humains ; on doit attirerde plus en plus de jeunes quiviennent vers nos professions. »

Le grand ménagestructurel

Le temps venu de mesurerles répercussions des com-pressions budgétaires ou despolitiques d’austérité qui ontconduit au chamboulementdes structures du réseau, Ré-gine Laurent appor te ce té-moignage : « Il est cer tainqu’il y a une diminution dunombre de personnes et que

tout est prétexte pourne pas ef fectuer desremplacements depostes. Les déléguéessyndicales nous disentsouvent sentir que toutest figé et que personnen’ose prendre vrai-ment des décisions ouregarder dif férents pro-jets qui pourraient ser-vir à faire mieux. »

Il existe d’autres effets per-vers : « Il y a beaucoup decrainte relativement à laconcentration de certains cen-tres d’activités ; il y en a quipourraient être fermés à un en-droit pour être déplacés vers unautre, ce qui inquiète égalementles patients. » La trame de fondapparaît comme suit : « Il estclair que tout le monde sentqu’il va y avoir d’autres ré-formes, mais on ignore de quellenature elles seront, et c’est enquelque sorte l’angoisse que celasuscite dans le réseau.»

Quant au recrutement depersonnel, « on n’est pas dutout dans une situation d’em-bauche ; plusieurs employeursnous disent même que, oui, ilserait bon d’af ficher des postes,mais qu’il faut attendre devoir comment tout cela va sepasser, de voir quels sont nosbudgets ; en même temps, lesbesoins sont là et c’est la rouequi tourne : pour subvenir àceux-ci, on paye en heures sup-plémentaires plutôt que defaire du recrutement. Il appa-

raît que les conseils d’adminis-tration ne sont pas tous enplace et on a l’impression quepersonne ne veut vraimentprendre de décision à l’heureactuelle dans le réseau ». Ilexiste une espèce de gel surle plan administratif.

La menace légale…Le syndicalisme infirmier a

écopé dans le passé de loisspéciales musclées qui luiont imposé des amendes tel-lement costaudes que sonexistence même a été miseen péril. Dans l’éventualitéoù les négos aboutiraient àune impasse totale, les mem-bres de la FIQ éprouvent-e l l e s d e n o s j o u r s d e scraintes face au recours àune éventuel le menace lé-gale ? Régine Laurent n’encroit r ien : « On oublie quebeaucoup de gestes de solida-rité ont été posés quand detelles lois ont frappé ; il y a eu,cela va de soi, l ’aide finan-cière appor tée par nos col -lègues des autres provinces. »

Mais il y a eu davantage :« Le plus grand geste de solida-rité a été posé quand le gouver-nement nous avait coupé uneannée d’ancienneté par jour degrève ; tout le monde a alors res-

pecté la pré-ancienneté pendantdes années et des années et per-sonne n’est passé devant unecollègue compte tenu du faitque le nombre de jours de grèven’avait pas été le même pourtout le monde d’un centre d’acti-vités à un autre. »

Une telle manifestation de so-

lidarité lui inspire confiancepour l’avenir, et Régine Laurentbrosse ce portrait de l’état actueldes troupes: «Les gens considè-rent qu’ils ont assez d’imagina-tion pour trouver des façons d’em-bêter le gouvernement. Pour no-tre part, on va leur présenter unnouveau plan d’action avec un

peu plus de mordant. À la FIQ,on n’est pas rendu aux mandatsde grève, et on aime bien la gra-dation dans nos moyens de pres-sion avant d’en arriver là, mêmesi ce n’est pas exclu.»

CollaborateurLe Devoir

Les infirmières, qui portent à bout de bras le réseau de lasanté, selon les témoignages mêmes de bon nombre de méde-cins, en ont ras le bol des conditions de travail qui leur sontimposées. Pendant ce temps, le ministre Barrette impose unerestructuration de ce réseau qui en paralyse, ou tout aumoins en ralentit présentement en partie le fonctionnement.Infirmière de profession et présidente de la FIQ, la Fédéra-tion interprofessionnelle de la santé, Régine Laurent sepenche sur le dossier d’un patient plutôt mal en point, le sys-tème de santé québécois.

csn.qc.ca

150 000à la défense des conditions de travail et des services publics3 octobre 2015

s’est passé en 2003 lors de lacréation des CSSS et desagences de santé et servicessociaux.

« On nous avait servi lemême argumentaire à l’époque,rappelle-t-il. On sait au-jourd’hui que ce n’est pas ce quis’est passé et on recommencequand même. Comme on re-commence avec les politiquesd’austérité alors qu’on saitqu’elles sont dysfonctionnelles.C’est elles qui font en sor tequ’on attend dix heures à l’ur-gence. Mais dans le même

temps, ça donne l’impressionque le système public n’est pascapable de soutenir sa missionet ça fait les affaires de certainspoliticiens, de cer taines per-sonnes qui n’ont jamais appré-cié qu’on ait mis en place unsystème de santé public aussifort. »

Un cercle vicieux qui, selonGuillaume Hébert, sert à jeterle discrédit sur le système pu-blic afin de faire accepter à lapopulation une ouverture versle privé. « Or, cette ouverture,conclut-il, c’est la garantie devoir très peu de gens faire beau-coup de profits. »

CollaboratriceLe Devoir

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STRATÉGIE

MICHAËL MONNIER LE DEVOIR

Le syndicalisme infirmier a écopé dans le passé de lois spéciales musclées qui lui ont imposé desamendes tellement costaudes que son existence même a été mise en péril.

RégineLaurent