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Synthèse du Forum Prospective

« Restructurations d’entreprises, mutations économiques, enseignements du passé, perspectives d’avenir »

CESR de Bretagne – jeudi 18 octobre 2007 à l’ESC de Rennes

Introduction par M. Jean HAMON, Président de la Commission « Développement économique et Recherche » du Conseil économique et social de Bretagne M. Jean HAMON a souhaité caractériser la démarche du CESR au moyen de deux mots clés : maturité et espoir. Maturité Le sujet des mutations et des restructurations économiques est pour le moins sensible. En l’occurrence, les membres du CESR ont su aller au-delà des traditionnels jeux de rôle. En y regardant de près, on s’aperçoit que si la forme du rapport est mesurée, le fond est audacieux. La promesse du titre est celle d’un « retour d’expérience ». Et effectivement, le point de départ de la réflexion est le vécu. Ont ainsi pu être appréhendés sans tabou les exigences de compétitivité pour les entreprises, les attentes de sécurisation des salariés et l’impact territorial. Ce rapport a été voté à l’unanimité. Il y a quelques années, cela aurait été difficilement envisageable. Avec un tel sujet, c’est un signe de maturité pour l’Assemblée socio-économique. C’est aussi le signe que la société civile dans son ensemble a beaucoup avancé. Espoir Au sein de la Commission Développement Économique et Recherche, un débat animé a eu lieu sur l’expression « travail de deuil ». Cette expression est souvent utilisée par les consultants qui interviennent dans les restructurations. Elle est associée au mot de mort qui renvoie à l’angoisse existentielle. In fine, le CESR n’a pas conservé ce terme dans le rapport. En revanche, on y retrouver l’idée qu’après une restructuration et, a fortiori, une mutation, il peut et il doit exister une nouvelle vie, nouvelle vie qui peut être meilleure. L’espoir doit l’emporter sur l’angoisse. Conférence prospective « Les mutations économiques : Anticipation, traitement partenarial et perspectives d’évolution » par M. Jean-Pierre AUBERT, Délégué interministériel aux restructurations de défense Des thèmes essentiels Tout d’abord, M. Aubert exprime son grand intérêt pour le rapport du CESR intitulé « Retour d’expérience sur quelques grandes mutations et restructurations économiques en Bretagne :

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leçons à tirer pour mieux anticiper et agir ». En effet, ce document comporte quelques thèmes essentiels qui reflètent ses propres préoccupations et lui apparaissent importants. La volonté de partir de l’expérience. Paradoxalement, il est extrêmement important, pour construire l’avenir, de partir de l’expérience. Sur toutes ces questions, les acteurs sont trop souvent partis avec des a priori considérables et n’ont pas suffisamment tiré profit de l’expérience. Citant l’exemple de la restructuration de l’entreprise automobile Chausson, M. Aubert rappelle qu’il avait sollicité auprès du Ministère de l’Emploi, des éléments de comparaison permettant d’évaluer les résultats des mesures prises dans le cadre des plans sociaux (que l’on appelle désormais plan de sauvegarde de l’emploi) sur le traitement des salariés (il y en avait à peu près 1 000 dans cette usine). Or, il s’est avéré qu’il n’y avait rien, c’est-à-dire qu’après plus de vingt ans de reconversion et de restructurations industrielles, il n’y avait pas d’étude approfondie des plans sociaux, de leur efficacité. On préconisait des mesures dont on ne connaissait pas l’efficacité sur le terrain… Ce retour à l’expérience passée ressort nettement du rapport du CESR et constitue pour lui un vrai apport, une vraie contribution. La liaison établie entre anticipation et action Bien souvent, l’anticipation est orientée uniquement vers l’étude. Ces analyses sont nécessaires. Néanmoins, pour M. Aubert et pour les auteurs du rapport, l’anticipation est liée à une volonté de définir l’action. Selon eux, on a tendance à être plus concernés, quels que soient les acteurs, par les grandes déclarations que par les faits. En ce sens, on doit plus que jamais être dans une problématique d’action, de réalisation. Bien évidemment, l’action comporte des risques, on ne fait pas que des choses réussies, on n’agit pas forcément avec l’assurance du résultat. Il y a eu des réussites, des résultats moins satisfaisants et des échecs. La problématique de l’action est de mesurer par le résultat. Comme le disait Raymond Aron, « la réalité sociale, parce qu’elle est humaine, est équivoque et inépuisable ». Afin de répondre aux restructurations, il faut avoir conscience qu’il n’existe de recettes définitives. Il faut donc s’enrichir continuellement de l’expérience, mais avec une appréciation critique de l’expérience que l’on a menée. Comme l’évoque le rapport du CESR, la nécessité de l’évaluation régulière de l’action est un fait considérable et très difficile à réaliser. Nombre d’échecs rencontrés par M. Aubert ne se sont pas situés dans l’action mais davantage dans l’évaluation des résultats obtenus. On n’aime pas évaluer les actions passées car cela implique de revenir sur des choses qui dérangent. Il cite, sur ce plan, sa demande d’évaluation de l’accompagnement de la mutation de Moulinex (Basse-Normandie). Cette étude obtenue très difficilement ne sera probablement jamais rendue publique. Si on veut partir de l’expérience, il faut avoir cette rigueur, technique quelquefois : « la réalité humaine ne débouche pas forcément sur ce que l’on a voulu » Raymond Aron.

Des restructurations qui évoluent Au milieu des années 1990, Jean-Pierre Aubert et Jacques Chérèque (Préfet chargé du redéploiement industriel de la Lorraine puis Ministre de l’Aménagement du Territoire) ont progressivement pris conscience que les restructurations allaient changer de nature, qu’elles allaient évoluer au fil du temps et que les analyses des reconversions des années 1970 et 1980 devaient être revues.

La notion de mutation Ils ont alors mis en valeur la notion de mutation, terme dont l’usage s’est, depuis lors, répandu. Pour eux, il y avait une caractéristique très importante dans cette question de mutation : il n’y avait pas seulement un passé mais aussi un avenir. La mutation n’est

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pas seulement expression d’une rupture par rapport à un passé, mais est aussi la construction d’un avenir. Pour M. Aubert, cela ressort d’ailleurs de façon intéressante dans le rapport du CESR.

Durant les années 1970 – 1980, des reconversions importantes ont été réalisées, la Lorraine en est un exemple. Elles étaient caractérisées par le sentiment qu’une page de l’histoire se tournait alors, que l’on on était en train de solder un passé, compte tenu par exemple de la place énorme que représentait la sidérurgie pour la Lorraine. En réalité, on ne s’est rendu compte que plus tard et progressivement que l’on préparait un avenir. Il est important, pour guider l’action face aux mutations, de le faire par rapport à l’avenir et non par rapport au passé. Cette rupture est difficile car on ne connaît pas l’avenir et car on croit connaître le passé et qu’on s’en fait souvent des représentations surévaluées. Or, il est très difficile d’avoir une représentation du passé qui ne soit pas exagérément idéalisée, en tout cas surévaluée par rapport à la construction de l’avenir. Cela explique que les personnes aient souvent des difficultés pour envisager un avenir différent de ce qu’elles ont vécu. L’avenir que l’on présume souvent est le prolongement du passé alors que désormais le mouvement est la règle et la permanence (la situation figée) l’exception. Pour illustrer son propos, Jean-Pierre Aubert signale la remise en cause totale de l’organisation militaire traditionnelle qui reposait sur trois piliers, longtemps stables : la construction, l’arsenal (pour Colbert, le fait que l’on forme et que l’on construise nos armements était l’expression de notre souveraineté dans un cadre étatique particulier avec des ouvriers d’Etat recrutés spécialement pour cette qualification élevée, cf. Brest) et enfin la ville garnison (politique dite « de stationnement » militaire très marquée par la Commune ; la présence de l’armée était un facteur d’ordre, de garantie par rapport aux agitations qui pouvaient venir de villes importantes). Il est très difficile de se dégager de cette histoire. Il signale également l’accroissement de la mobilité des implantations d’entreprises. Il est dorénavant fréquent que les entreprises qui s’implantent sur un site privilégient la location à l’achat des bâtiments et ce, même si elles créent beaucoup d’emplois. Cela constitue un vaste défi pour les acteurs économiques et sociaux car ceux-ci sont confrontés, alors qu’ils veulent se projeter dans l’avenir, à ce caractère éphémère de beaucoup d’activités ce qui contraste avec la durabilité des activités qui prévalait auparavant. Il met aussi en valeur le fait que, contrairement à l’image que l’on avait, les secteurs traditionnels n’étaient pas tous en régression alors qu’il pouvait y avoir de vastes restructurations dans des secteurs considérés comme d’avenir, tels que les télécommunications, et en particulier le téléphone portable. Alors que les observateurs pensaient avoir trouvé avec les télécommunications une production durable, basée sur des grands groupes. On a vu à Vitré et ailleurs, que les usines ne restaient pas forcément longtemps. De ce constat, il ne faut pas pour autant déduire un jugement intégralement négatif. Le mouvement est en effet nécessaire. Il est de ce fait à la fois difficile et crucial de faire en sorte de trouver les outils permettant d’assurer le développement du progrès économique et social malgré ce mouvement permanent. Tous les secteurs sont touchés La deuxième caractéristique qui, à l’époque, avait amené M. Aubert à poser la question des mutations, était le fait que cela touchait tout le monde. Comme le disait La Fontaine, « tous étaient frappés ». Il s’agit d’un phénomène absolument capital car on a longtemps pensé que certains secteurs étaient en pointe alors que d’autres ne l’étaient pas. S’agissant de la

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Défense ou du secteur public, on a pensé pendant longtemps, qu’ils incarnaient la permanence, comme l’agriculture à une certaine époque. Malheureusement, cela n’est pas vrai et ne sera plus jamais vrai. Il ne s’agit pas d’une remise en cause de la logique de la fonction publique, mais force est de constater que les outils d’organisation évoluent, et, comme partout, ces organisations sont soumises à des objectifs et à des réalisations ; elles sont implicitement mises en concurrence par rapport à d’autres moyens d’agir.

M. Aubert a pu le constater à l’occasion d’une restructuration de La Poste. Ce grand secteur public, un des piliers de notre organisation territoriale, évolue considérablement et est poussé à investir dans de nouvelles techniques. (D’ailleurs, contrairement à l’image que l’on en a, le produit principal de La Poste n’est plus du tout la lettre. Celle-ci est maintenant un produit secondaire de l’activité de La Poste. Ce constat de la généralisation du phénomène a amené M. Aubert à penser qu’il fallait, comme l’a fait le rapport du CESR, dépasser la dimension de l’entreprise ou d’un secteur particulier, pour étendre le concept en intégrant l’entreprise dans son environnement en évolution sensible et rapide. Pour répondre aux transformations, il ne faut donc pas rester cantonné dans le face-à-face interne à l’entreprise. Des transformations très rapides La troisième caractéristique est le caractère très rapide de ces transformations et malheureusement la difficulté de construire face à cela les outils nécessaires.

Faut-il anticiper dans un monde aussi changeant ? Dans cet état d’esprit, la dimension de l’anticipation et de la prospective pose une grande question : est-ce valable d’anticiper dans un monde aussi changeant ? Pour M. Aubert l’anticipation est plus que jamais un enjeu, parce que le monde change vite et que, pour agir, il faut mieux comprendre et comprendre de plus en plus vite les évolutions en cours et les inflexions que l’on peut apporter à ces grandes transformations.

Pour Jean-Pierre Aubert, l’attitude de celui qui anticipe s’apparente grandement à celle du judoka qui utilise la force de l’autre. Mais cela ne suffit pas. Plus fondamentalement, le travail de l’anticipation des grandes tendances est la prospective. En ce sens, l’anticipation est beaucoup plus dans l’interface avec l’action. C’est la recherche de l’élément qui permet d’infléchir le mouvement dans le sens souhaitable. Sa définition de l’anticipation est assez proche de celle qui se trouve dans le rapport du CESR : « dans un univers incertain, anticiper c’est se préparer à des changements possibles (quand on peut les déterminer) ou probables (il faut apprécier le degré de probabilité qui peut être très faible), en se donnant les moyens de les influencer (sans changer l’ordre de l’histoire) dans un temps souhaitable et donc de parer aux menaces et de saisir les opportunités qu’ils réfèrent ». L’anticipation, dans cet esprit, est tournée vers la faculté de saisir les mouvements pour les influencer dans le bon sens et c’est ce qui doit permettre de se positionner dans un mouvement positif pour tous et de créer de l’avenir pour chacun. M. Aubert signale qu’il a participé à la mission du Commissariat à l’industrialisation de l’Ouest Atlantique au cours des années 1980 et, qu’à cette occasion, il a été extrêmement frappé de constater que le thème de cette mission était resté le même que dans les années

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1970. A l’époque, il est vrai, l’industrialisation était un progrès économique considérable pour les régions et s’accompagnait d’un réel progrès social. Dans les années 1960 (les fameuses années de prospérité), les agriculteurs qui venaient travailler chez Citroën à Rennes avaient le sentiment d’accéder à une certaine modernité. C’était peut-être la solution pour que chacun puisse se sentir intégré à la modernité et donc avoir des anticipations positives pour eux et pour leurs enfants. Or, progressivement, une rupture s’est opérée pour nombre de ces personnes qui altère leur capacité à se projeter dans l’avenir. Pourtant, comme le martèle M. Aubert « je crois que notre monde a un vrai avenir ». Comment anticiper ? Jean-Pierre AUBERT décline ensuite trois enjeux de l’anticipation (cités dans le rapport du CESR) : Coopérer pour anticiper La première notion est la coopération en matière d’anticipation et de prospective. Ce terme est utilisé dans le document du CESR et il est l’expression d’une maturité car il est rarement utilisé dans les rapports. La coopération, c’est la faculté collective de pouvoir appréhender avec courage et lucidité les évènements à venir. C’est un élément crucial et capital car, la plupart du temps, on a délégué à certains cette pré-connaissance de l’avenir. Or, ce qui a changé dans notre monde, c’est que les uns et les autres veulent coopérer à cela et veulent participer à cette définition de l’avenir et s’y intégrer.

Il signale que l’on est loin d’avoir exploré tout le potentiel d’anticipation et de gestion coopérative de l’évolution industrielle. La coopération signifie que chacun contribue et participe à la définition de son avenir mais aussi de celui des autres. Cela implique, comme l’écrit le rapport du CESR, un engagement et une responsabilité réciproques, ce qui modifie considérablement les outils de dialogue (la décentralisation contribue largement à cela). En outre, le positionnement réciproque des acteurs que sont les partenaires sociaux, va être révolutionné par cette approche. Évoquant son passé de syndicaliste, il précise que, pendant longtemps, parler d’une coopération avec le milieu patronal était particulièrement difficile. La logique était davantage celle de la lutte, de l’affrontement. Envisager de coopérer pour l’avenir était presque impossible. La comparaison avec les syndicalistes allemands, considérés en France comme un peu compromis montrait d’ailleurs les importantes différences culturelles entre les deux rives du Rhin. Ce face-à-face est en train d’évoluer considérablement et il n’est plus le seul moteur de la coopération. On commence seulement à découvrir l’approche territoriale, d’ailleurs mise au centre du rapport du CESR. A l’heure actuelle, on est encore très préoccupé de donner un fondement à ce que l’on appelle le dialogue social territorial. Cela constituerait une très grande transformation de nos relations sociales, qui demeurent très fondées sur l’entreprise et sur la branche et peu articulées sur le côté territorial et transversal des choses. Cela implique, dans la coopération, un élargissement des champs de préoccupation. Pour construire un avenir, le premier fondement est l’utilisation de toutes les forces et pas seulement celles de la puissance publique. M. Aubert rappelle que, bien qu’ayant occupé des postes élevés dans l’administration d’État, il a souvent été très critique concernant la démarche de l’Etat, non pas parce que l’Etat est mauvais en soi mais parce qu’on attend de lui des choses qui peuvent occulter le potentiel des autres forces.

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S’ouvrir Le deuxième point est l’emboîtement des niveaux. Les niveaux local, national mais aussi européen doivent s’articuler (le CESR a d’ailleurs analysé des cas gallois et écossais). Or, la tendance naturelle est à rester encore trop franco-français, ce qui réduit notre capacité à penser l’avenir.

Lors de la reconversion de la Lorraine, on a pu constater que coexistaient, à seulement quelques dizaines de kilomètres les unes des autres, trois sidérurgies qui s’ignoraient totalement : celles du Luxembourg, de la Belgique et de la Meurthe-et-Moselle. Le Préfet chargé du redéploiement industriel, M. Chérèque, a d’ailleurs connu d’importantes difficultés pour mettre en place la zone européenne de LONGWY. Au cours des dernières années, Jean-Pierre Aubert a cherché à bénéficier de références au niveau européen. Les restructurations et les mutations existent également chez les Italiens, les Espagnols, les Allemands, les Suédois et bien d’autres. A ce titre, en ce moment, la Commission européenne mène de très intéressants travaux sur l’anticipation. Elle a beaucoup avancé dans ce domaine, plus rapidement même que la France. En particulier, elle a fait réaliser un travail extrêmement instructif sur l’automobile. Dans ce secteur comme pour la Défense (pour lequel une autre réflexion transnationale a été engagée), l’Europe est l’échelle pertinente si l’on veut préparer et travailler l’avenir. Nombre d’entreprises sont désormais transnationales ce qui relativise grandement le thème du patriotisme économique. C’est pour cette raison que M. Aubert a proposé d’associer toutes les organisations syndicales du secteur de la Défense Nationale à la réflexion sur l’évolution du secteur à l’échelle européenne. Dialoguer et faire preuve de professionnalisme Troisième et dernière remarque, pour préparer l’avenir avec les uns et avec les autres, il faut du dialogue mais aussi la volonté d’être le plus précis et le plus professionnel possible. Trop souvent, les restructurations sont vécues sur un plan un peu idéologique ou à un niveau purement politique. Les problèmes de contrat de travail ou de sécurisation des parcours professionnels ne peuvent être traités qu’avec un dialogue le plus ouvert possible, mais aussi avec de la pertinence sur le plan précis des choses. Il est très intéressant que le CESR ait, dans son rapport, décrit les outils. La première préoccupation, c’est l’avenir des personnes. Ce sujet est complexe et il convient de multiplier les pistes d’expérimentation. M. Aubert a participé à la Commission Borloo qui a élaboré le contrat de transition professionnelle. Or, quelques années auparavant, il avait fait réaliser un rapport sur les expériences étrangères et notamment européennes, de gestion des parcours des personnes concernées par une restructuration. Ce rapport a été à l’époque ignoré par tout le monde parce qu’il était européen. Or, il mettait en évidence que, pour sortir de ce mouvement, il faut envisager de nouvelles procédures de gestion des parcours. Devant cette incertitude, il faut construire des références, des repères importants pour les personnes et on en a la possibilité. Nous connaîtrons, et nous connaissons déjà, une certaine évolution du marché du travail, qui peut aboutir à de nouvelles formes de tensions : sur des qualifications, sur des compétences. Le chômage de masse existe encore et va se modifier. L’évolution du marché du travail sera dorénavant différente de celle que l’on a connue ces trente dernières années. Nous bénéficions donc d’une opportunité considérable pour intégrer davantage de monde dans le marché du travail. On a ainsi sans doute la possibilité de construire une évolution qui donne à chacun l’assurance qu’il ne va pas « plonger » à la première échéance. M. Aubert insiste sur l’enjeu majeur que représente la question des parcours pour les personnes. Cela impliquera un très gros travail, en particulier pour la France.

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Pour conclure, Jean-Pierre Aubert évoque la Région. Grâce au rapport du CESR, la Région Bretagne va pouvoir se doter d’une analyse plus poussée des mutations économiques, même si elle les a déjà intégrées dans ses Schémas de développement. Le Président du Conseil régional de Bretagne a la volonté de mettre en place des instruments opérationnels pour traiter ces phénomènes. Les Régions sont en train de découvrir qu’elles ont un rôle ; elles tiennent dans leurs mains un certain nombre de facteurs : une plus grande faculté à saisir la proximité de certains problèmes, par rapport à l’Etat notamment, mais aussi la capacité à accroître les coopérations entre les acteurs. Les Régions sont un échelon intermédiaire significatif pour éclairer l’avenir à une échelle suffisante, à condition de regarder vers le local et vers l’Europe, et pour pouvoir avoir une approche plus technique, plus professionnelle. Ce point est important car nous avons besoin d’organisation, de pilotage des transformations. Nous ne pouvons nous contenter de déclarations, même les plus généreuses.