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tF task-force # 17 en partenariat avec an company me faut-il ma propre marketplace ? les clefs du modèle

task-force - open.global · eUROPcAR GROUPe GAn AssURAnces GROUPe seB heineKen iGn / institUt nAtiOnAL De L’inFORmAtiOn ... clarifiez votre stratégie grâce au Business model canvas

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ce # 17

en partenariat avec

an company

an company

me faut-il ma propre marketplace ?les clefs du modèle

Septembre 2017

RemeRciementsL’eBG tient à remercier tout particulièrement les membres et le partenaire de la task Force

« marketplaces » : Lateos, Agence de Commerce Digital d’Open. Un grand merci à Nathalie Mrejenet Maïlys Levasseur (Open), Vincent Lorach et Olivier Czapka (Lateos), qui nous ont aidés à nourriret mettre en place ce projet, ainsi qu’à Florence Delplanque-Boulenger, qui a su collecter

les informations et mettre en forme cette publication.

Avec le soutien d’istock by Getty images

marketplaceles clefs du modèle

AccORhOteLsAiR FRAnce

AGnès B.ARKemA

BLeU BOnheURBnP PARiBAscARReFOUReDGeWeLL

eUROPcAR GROUPe

GAn AssURAncesGROUPe seB

heineKeniGn / institUt nAtiOnAL

De L’inFORmAtiOn GÉOGRAPhiQUe et FORestièRe

inteRnAtiOnAL cOOKWAReLA POste / DOcAPOst

PeRiAL

mARKet PAYRexeL

Rs cOmPOnentssAint-GOBAin

sFRsOnY mOBiLe

tRAVeLexUcPA

les membres de la task force

an company

an company

3 // marketplaces

Qu’est-ce qu’une Task Force ?

il s’agit d’un cycle de réflexion réservé à une vingtaine de décideurs grands comptes, réunis autour de 4 objectifs :

1. Échanger au sein d’un groupe homogène2. Progresser sur un sujet stratégique

3. identifier des partenaires de confiance4. Partager une réflexion avec l’ensemble de la communauté EBG

Longtemps incarnée par les géants du web Amazon et ebay, puis par les « licornes » Uber ou Airbnb, la marketplace est un modèle qui intéresse

désormais les entreprises traditionnelles, en Btoc comme en BtoB. Leurs motivations sont multiples : élargir la gamme, digitaliser l’activité de

l’entreprise grâce à ce modèle de vente « parallèle », disposer d’un outil inédit de veille sur le marché… Dans quel contexte une marketplace s’avère-t-elle la plus pertinente ? Pour quels produits ou services ? Quelles opportunités ouvre-t-elle en interne (approvisionnements) ? Quelles sont les ressources

requises ? Les réponses sont dans ce livre.

L’ELECTRONIC BUSINESS GROUP - www.ebg.net

L’eBG est la plus importante communauté professionnelle française qui rassemble des décisionnaires d’entreprises actives dans l’industrie, les services,

les médias... et qui ont pour point commun d’agir dans le sens de l’innovation.

Les activités de l’eBG :L’eBG a pour vocation d’animer un réseau de compétences et de savoir-faire, en organisant chaque année plus de 150 tables rondes permettant aux cadres

dirigeants de partager leurs expériences.il y a plus de dix communautés actives à l’eBG : les PDG/DG, les Directeurs

des Achats, les Responsables si, les Directeurs Financiers, les Responsables Juridiques et Rh, les Directeurs marketing, et Webmarketing/e-commerce, les Directeurs media et mobilité et les Responsables de la communication...chaque communauté se réunit au moins une fois par mois pour échanger et faire le point sur les nouvelles pratiques de leur fonction. Les séances sont

filmées et diffusées en direct.

Pour plus d’informations sur l’eBG ou les partenariats :

Benjamin GlaesenerDirecteur Général

01 45 23 05 [email protected]

Fanny RaimbaultResponsable Pôle B2c

01 73 03 01 [email protected]

[ Ce cochon d’Inde est la mascotte de l’EBG. Il vous accompagne au fil des pages pour vous apporter

des précisions, des chiffres ou des informations complémentaires.

Et si vous passez nous voir au 10, rue Mercœur (11e), vous pourrez le rencontrer en chair et en os. ]

4 // marketplaces, les clefs du modèle

Le monde ne se réduit pasà Amazon

(page 6)

Le rôle de tiers de confiance

clarifiez votre stratégie grâce au Business model

canvas

ÉtuDEs DE CAsAccorhotels.com :

La marketplace a fêté ses deux ans

(p. 14)

Rs components : L’équipe française défriche le sujet

(p. 16)

ÉCLAIRAGELe BtoB redoute la cannibalisation

(p. 18)

#1

[ P

remier

chapitre : Apprivoiser le sujet ]

[ D

euxiè

me chapitre : construire un Business Model ]

[ T

roisiè

me chapitre : conseils et bonnes pratiques ]

5 // marketplaces, les clefs du modèle

sommaire

#2 #3

Clefs de succès(page 32)

Les freins côté Acheteurs... … et les solutions

Les freins côté Vendeurs... … et les solutions

Acheter sur étagère ou construire une

marketplace « maison » ?

ÉtuDEs DE CAseuropcar : intégrer les

nouvelles formes de mobilité(p. 36)

Périal : « Apporter une plus-value à nos partenaires »

(p. 38)

ÉCLAIRAGEPlan de communication,

les règles d’or (p. 40)

nos conseils (p. 42)

à savoir avantde sauter le pas

(page 20)

Avantages & risques du modèle

tenir ses promesses en demeurant rentable

Pas de marketplace sans services associés

ÉtuDEs DE CAscarrefour : retour

d’expérience et bonnes pratiques

(p. 26)

Groupe seB : «tisser des liens avec le client final »

(p. 28)

ÉCLAIRAGEJuridique : 4 conseils

pour éviter la chute (p. 30)

6 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

le monde ne se réduit pas à amazonMarketplaces de produits ou de services, BtoC, BtoB ou CtoC, leur nombre a explosé depuis cinq ans. Certaines ont même une vocation purement interne.

chapitre 1

7 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

« An sed audire aperiri, et quod amet consectetuer sea, no definiebas adversarium sea. Sint percipit no nec, id vis viris aeterno euismod. Atomorum pericula no qui, esse iuvaret usu ad. Ius ferri prompta praesent ut. »[ Nullam semper ei eam ]

« La plupart des marketplaces n’achètent pas ce qu’elles revendent : elles n’ont pas d’investissements pour constituer leurs stocks, pas de frais de stockage, ni de frais de logistique. Elles disposent donc d’une grande liberté pour tester un marché à moindre coût. »[ Vincent Lorach, directeur associé de Lateos ]

l l l

L e marché d’intérêt national (min) de Rungis travaille depuis ce mois d’avril

2017 à l’ouverture d’une marketplace... Pour qui a déjà franchi le péage du plus grand marché du monde, l’information suffit à prendre la mesure du « phénomène marketplace ». car Rungis est sans doute l’incarnation parfaite du monde physique et du commerce traditionnel : le brouhaha des négociations et le fracas des palettes, les odeurs des produits fraîchement déchargés, le plaisir de se retrouver avant l’aube, une ambiance, tangible, plus vive que tout ce qui pourra être écrit sur le sujet. et surtout, le fait de venir choisir ses produits : toucher, voir, soupeser…Alors, transposer cet écosystème sur une marketplace ? cela semble audacieux. « mais le modèle marketplace se prête parfaitement au min, estime Vincent Lorach, directeur associé de Lateos (Open). nous sommes bien loin du temps où le marché se résumait à Amazon. » De fait, de nombreuses success stories possèdent ce dénominateur commun : elles sont des marketplaces. « Uber, la plus grande société de taxis, ne possède aucun véhicule. AirBnB n’a jamais acheté aucun hôtel et réalise en France un chiffre d’affaires de 65 millions d’euros. et Alibaba, le plus gros retailer mondial, ne possède aucun stock. »

Au-delà de ces grands noms, les marketplaces fourmillent. et toutes ne sont pas des Pure Players : on le voit avec la Fnac, Boulanger, La Redoute ou encore Accorhotels. certaines marketplaces vendent des produits (Darty, cdiscount, Retif…), d’autres des services (Blablacar, Doctolib, task Rabbit…) ; elles peuvent être orientées Btoc (comme Deliveroo) ou BtoB (comme Le Duff).

des achats aux marketplaces relationnellessi de nombreuses marques ouvrent une marketplace par nécessité, pour préserver leur avance et maîtriser une concurrence perçue comme agressive, d’autres s’y engagent plus sereinement, dans le but d’optimiser un potentiel inexploité : « Prenons l’exemple du BtoB, souvent sous-estimé : pour les entreprises de ce secteur, le modèle marketplace est pertinent, car elles disposent déjà d’un réseau de fournisseurs, dont elles peuvent facilement faire des marchands », relève Olivier czapka, directeur commercial chez Lateos.Une marketplace peut également avoir une vocation strictement interne, pour mieux valoriser les ressources d’une entreprise en favorisant les échanges de services entre collaborateurs. Ou encore pour gérer les approvisionnements.« Une marketplace, c’est un espace qui met en relation

acheteurs et vendeurs, et même plus largement, des gens qui proposent un produit ou service et d’autres que cela intéresse, que ceci fasse ou non l’objet d’une transaction financière. Le modèle transactionnel n’est pas le seul : il existe des marketplaces relationnelles, comme LeBoncoin.fr », reprend Vincent Lorach.La valeur ajoutée de cette mise en relation est incarnée par l’opérateur de la marketplace (le professionnel ou l’entreprise qui la gère), qui tient le rôle de tiers de confiance. « il fournit un cadre stable et vérifie la fiabilité de l’ensemble des acteurs. »ce rôle (et les responsabilités qui lui sont liées)

le chiffre+18 %

L’indice iPM, destiné à mesurer le volume des ventes réalisées sur les places de marché (ventes réalisées par les marchands hébergés sur les places de marché de l’iCE 40), a progressé de 18 % en 2016. Une progression moins importante que l’année précédente, mais des ventes qui pèsent de plus en plus lourd sur l’activité des sites. Elles représentent désormais 28 % du volume d’affaires total des sites participant à l’iPM (contre 26 % en 2015). Source : Fevad.

8 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

l l l soulève de nombreuses questions, comme le souligne Delphine Besloy, responsable de la tranformation digitale chez GAn Assurances : « ma grande interrogation, en tant qu’annonceur, porte sur le recrutement des vendeurs. comment être sûre que les marchands remplissent bien tous nos standards de qualité ? On a beau instaurer une charte, il faut accepter une certaine perte de contrôle... imaginons que nous ouvrions une marketplace réunissant des artisans ; comment faire pour ne pas dégrader l’image de la marque, le jour où l’un d’eux réalisera mal les travaux ? il y a sans doute un travail de communication à réussir ici, en pariant sur la transparence : il faut bien expliquer sur le site qui fait quoi, qui est responsable de quoi... Évidemment, il est toujours difficile de dire : “ On ne garantit pas la qualité ! » Je suppose que c’est plus simple lorsque l’on vend des produits, que des services. »

une verticalisation du marchéLes Pure Players sont les acteurs les plus portés vers la création de marketplaces, dans la mesure où pour eux, il s’agit plus ou moins d’une extension de gamme. « ils ont déjà un catalogue en ligne et

la markeplace vient asseoir leur position sur le marché », reprend Vincent Lorach.Viennent ensuite les « retailers soucieux de digitaliser leur activité. » « Personne ne va se lancer pour concurrencer Amazon, souligne Benoît Feron, co-fondateur d’izberg. On observe une verticalisation de la marketplace, sur des marchés de niche, dans la mode, le sport, le vin, l’alimentaire... en fin d’année 2016, europ Assistance a lancé homio.fr, une marketplace permettant de trouver un artisan pour des travaux en Île-de-France. ce n’est pas Amazon qui peut offrir ce type de service. tous les secteurs peuvent être adressés. La France compte 170 000 sites d’e-commerce, mais seuls 6 000 d’entre eux dépassent le million d’euros de chiffre d’affaires. La marketplace leur offre un nouveau canal de distribution. »

Les promesses à tenirUne marketplace est « un centre commercial virtuel, auquel l’opérateur fournit un cadre de confiance transparent et sécurisé », indique Vincent Lorach (Lateos). Le vendeur, qu’il soit particulier ou professionnel, fabricant ou distributeur, e-marchand ou non, bénéficie à la fois d’une

plateforme fluide et d’un vivier potentiel de clients. en contrepartie, il reverse à la marketplace une commission sur le montant de ses transactions. cette commission est, par exemple, de l’ordre de 6 à 8 % pour le high tech, 10 à 12 % pour les produits culturels, le Jardin ou le mobilier...« Le concept de marketplace s’est démocratisé, et nos clients sont de plus en plus nombreux à s’y intéresser, poursuit Vincent Lorach. toute entreprise peut imaginer créer sa propre marketplace de niche, que ce soit en BtoB, Btoc ou ctoc. L’idée est de bâtir la marketplace phare de son secteur, afin d’attirer et donc de maîtriser la concurrence sur son propre site marchand. »Le site manomano.fr fondé en 2012 sous le nom de monechelle.fr a pris un envol spectaculaire, passant de 1 million d’euros de chiffre d’affaires la première année, à 15 millions dès la deuxième année, puis 32 millions en 2015 et 90 millions en 2016.« cette place de marché spécialisée dans le bricolage et dans le jardinage fait aujourd’hui partie du top 30 des sites e-commerce en termes d’audience avec 4 millions de visiteurs uniques par mois,

dossier

« uNE MARkEtpLACE OFFRE à L’OpÉRAtEuR L’ACCès à tOutEs LEs DONNÉEs : ChAquE tRANsACtION LuI Est CONNuE. C’Est uNE DIFFÉRENCE IMpORtANtE AVEC LEs MODèLEs D’AFFILIAtION, tELs quE LEs COMpARAtEuRs, Où L’ON

pERD LA RELAtION AVEC LE CLIENt. »[ Vincent Lorach - Lateos]

9 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

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indiquait Lemoniteur.fr en juin 2017. Après avoir levé 13 millions d’euros en mars 2016, puis décroché le pass Frenchtech et intégré le programme Google scale Up (soutien technique, marketing et commercial de Google pour le développement à l’international), le pure-player projette d’atteindre 280 millions d’euros pour cette année. »Le magazine capital.fr, en avril dernier, soulignait les avantages du modèle marketplace - au sujet de manomano toujours : « en 2012, le secteur du bricolage et du jardinage pesait en France 30 milliards d’euros de chiffre d’affaires, mais 1 % seulement se faisait sur internet. “ On avait un boulevard ”, reconnaît Philippe de chanville, l’un des deux fondateurs du site. ensuite, notre tandem de bricoleurs a opté pour un modèle de place de marché, qui permet d’aller vite. intermédiaire entre fabricants et acheteurs, le site ne gère ni les stocks, ni la logistique, à la charge des vendeurs. Du coup, manomano propose un

choix bien plus large qu’un magasin (1,2 million de produits référencés), à des prix 10 à 20 % moins élevés. sa rémunération ? Une commission de 12 à 20 % sur chaque achat. “ Deux à trois fois moins que les marges engrangées par les enseignes de bricolage ”, assure un expert de l’e-commerce. »Le site de bricolage le revendique lui-même : « nous agissons comme intermédiaire de confiance entre vous et le marchand qui vous a vendu les produits sur notre site. ce n’est pas nous qui expédions votre colis mais le marchand auprès duquel vous faites votre achat. Le rôle de manomano est de dénicher les spécialistes Brico - Déco - Jardin les moins chers puis de négocier en plus pour vous des tarifs préférentiels exclusifs pour manomano ; de sélectionner les marchands admis sur manomano sur des critères stricts de fiabilité et rendre leur catalogue accessible sur un seul site internet avec des stocks mis à jour en temps réel ; et de vous garantir

une livraison conforme à la promesse du marchand. »clair et précis, ce texte résume bien le positionnement de toute (bonne) marketplace. Principale difficulté du genre : réussir à lancer un « cercle vertueux ». car, pour avoir des clients, il faut avoir des vendeurs, et vice-versa. c’est l’histoire de l’œuf et de la poule ! (lire page 33)

longueur d’avanceLa plupart des marketplaces n’achètent pas ce qu’elles vendent : on l’a vu, elles n’ont ni stocks, ni investissements à réaliser. sauf quelques exceptions notables : Amazon vend d’une part ses propres produits et d’autre part propose d’assurer la logistique pour ses vendeurs. Dans ce cas, les vendeurs envoient leurs stocks à Amazon qui va gérer les expéditions pour leur compte. Ainsi Amazon peut-il tenir sa promesse de livraison en 24h.Une marketplace offre à l’opérateur l’accès à toutes les données : chaque transaction ou échange noué « chez lui » lui est connu. c’est une différence importante avec les modèles d’affiliation, tels que les comparateurs (exemple : Opodo), où l’on perd la relation avec le client. « à part le cookie, le comparateur n’a pas d’informations sur l’internaute. tandis que sur une marketplace, vous voyez tout passer. Vous conservez le client dans votre univers, et d’ailleurs, si la marketplace est bien faite, il n’a pas envie d’en sortir. Vous maîtrisez la relation avec lui, vous pouvez tester des services, des produits, et bien sûr vous gardez une bonne longueur d’avance sur les tendances du marché », résume Vincent Lorach (Lateos). en août 2017, le site Qz.com (Quartz) a dévoilé

dossier

10 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

qu’Amazon développait en toute discrétion ses propres marques. cosmétiques, alimentaire, lingerie, mode, linge de maison, meubles… Dix-neuf marques (happy Belly, mama Bear, Pinzon, Presto!, Wickedly Prime, Goodthreads, mae...) ont été repérées comme appartenant en réalité à Amazon. « Après des décennies passées à vendre des produits - et à savoir exactement ce que les gens achètent et quand - Amazon a commencé à fabriquer ses propres produits. Des chargeurs d’iPhone, des batteries, des rouleaux de massage, des sacs à dos ou des gants de toilette…. ce type de produits, qui ne génèrent pas vraiment de fidélité à l’égard d’une marque. Qui se soucie d’acheter des batteries Duracell ou Panasonic ? Amazon constate qu’un produit se vend bien et peut décider de le faire fabriquer lui-même », explique le magazine.

zoompari réussi pour Emmaüs

Benoît Féron, co-fondateur d’Izberg a évoqué un beau cas d’usage, avec le lancement en décembre dernier de la marketplace Emmaüs : les vendeurs, dans chacun des centres Emmaüs pilotes, ont été formés à la mise en ligne de leurs produits et sont devenus autonomes sur les prix et les ventes. « Chaque produit est unique, il n’y a pas de catalogue, et les équipes Emmaüs n’avaient pas forcément l’habitude de travailler en ligne : c’est un travail impressionnant qui a été fourni par l’association. »« La vocation de label Emmaüs, la boutique en ligne solidaire d’Emmaüs France, est de rendre accessibles sur Internet les meubles et objets issus de dons et vendus dans les 350 points de vente d’Emmaüs, dont le produit finance l’accueil des compagnons », résumait Le Monde en juin dernier, en citant Maud Sarda, aux commandes de ce projet : « On est très satisfaits de l’impact social, on devrait à terme créer 35 à 40 emplois. Nous touchons un nouveau public, avec 400 000 visiteurs uniques par mois dont 25 % d’entre eux qui n’avaient jamais acheté chez Emmaüs avant, et le panier moyen de 45-50 euros est trois fois supérieur à celui des espaces physiques de vente. »

le chiffre

27 %Près du tiers des e-marchands TPE / PME vendent sur des places de marché en 2016.Source : Fevad / Profil du e-commerçant spécial TPE - PME, Oxatis/Kpmg - janvier 2017)

l l l

« MANOMANO pROpOsE uN ChOIx BIEN pLus LARGE qu’uN MAGAsIN (1,2 MILLION DE pRODuIts RÉFÉRENCÉs),

à DEs pRIx 10 à 20 % MOINs ÉLEVÉs. sA RÉMuNÉRAtION ? uNE COMMIssION DE 12 à 20 % suR ChAquE AChAt. »

[ Capital.fr - Avril 2017]

11 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

P ourquoi un client achèterait-il son produit sur votre marketplace,

plutôt que directement chez le fournisseur, ou sur une marketplace concurrente ? Pour répondre à cette question, Vincent Lorach et Olivier czapka (Lateos), appuyés d’Adriano mucciardi, manager chez converteo, suggèrent de construire un Business model canvas, outil de clarification d’une stratégie.il s’articule en trois grandes phases : « ce que l’on vend, ce qui permet de vendre et ce qui permet de produire ». concrètement, découpez une

feuille A4 (esprit de synthèse oblige) en neuf parties, et remplissez les rubriques en répondant à ces neuf questions, en respectant bien leur ordre :• Quels sont vos segments de clientèle : définissez des ensembles de clients homogènes, qui appellent chacun une offre distincte et des canaux différents.• Quelle est votre proposition de valeur : listez les produits et services créant de la valeur pour ces différents segments. Quels problèmes résolvez-vous ? Quels besoins satisfaisez-vous ?• Quel type de relation client voulez-vous instaurer ? Réfléchissez aux moyens

mis en œuvre pour capter et fidéliser les clients. à quel prix pour le client ? Pour quel avantage ? et avec

zoom clarifiez votre stratégiegrâce au business model canvas

le chiffre

33En 2016, les Français ont dépensé 72 milliards d’euros sur Internet, un chiffre en hausse de 14,6 % sur un an. Le cap du milliard de transactions en ligne a été franchi avec une progression de 23 %. Cela représente 33 transactions par seconde.(Source : Fevad, janvier 2017)

zoomMapool : retour d’expérience

Olivier Czapka (Lateos) a partagé son expérience de fondateur de marketplace : il a créé Mapool en 2015. Cette plateforme mobile met en relation en temps réel, comme Uber, des conducteurs de motos avec des passagers. « Après un gros travail sur la promesse de service, et sur le développement from scratch de l’application, avec notamment une automatisation du processus de qualification des conducteurs (il fallait moins d’une minute pour valider ou invalider un dossier : permis de conduire, assurance, photos du véhicule et du motard, etc), nous avons obtenu un taux de satisfaction des utilisateurs de 98 % et un taux de ré-utilisation de 100 %. Au bout d’un an, nous avions 20 000 utilisateurs actifs et un peu moins de 100 000 trajets réalisés. »Mais Olivier n’a pas poursuivi, pour deux raisons : des questions légales qui restent complexes et un « onboarding » des vendeurs et acheteurs difficile à mener en simultané.

l l l

dossier

12 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

zoomtickets-déjeuners ou location de bureaux ?

Répartis en deux groupes, les membres de la Task Force ont été invités à travailler sur des cas d’usage : il s’agissait pour le premier groupe de se mettre dans la peau d’un fournisseur de tickets-déjeuners ; et pour le second dans celle d’un propriétaire de parc immobilier (location de bureaux). En quoi ces deux entreprises peuvent-elles avoir intérêt à lancer une marketplace ? Pour saisir quelles opportunités ? Pour quelle valeur ajoutée ? Comment s’y prendre ? Comment convaincre la direction ?Les restitutions ont permis au premier groupe d’exposer de nombreuses idées pour la création d’une marketplace de services : la possibilité de réserver un restaurant en ligne et de régler à l’avance (ceci afin de supprimer toutes les frictions une fois arrivé dans le restaurant), celle de trouver des plats ou restaurants en fonction de critères comme le montant du ticket-restaurant ou le type de nourriture recherchée (food truck, végétarien, livraison sur place, etc), mais aussi des options pour déjeuner entre collègues, faire venir un chef au bureau ou permettre aux restaurateurs de remplir plus facilement leurs tables.Le second groupe, plutôt que de ne proposer « que » des bureaux à louer, s’est dit qu’il proposerait également sur sa marketplace des services pour embellir le quotidien des salariés, comme des solutions de conciergerie, restauration, bien-être au travail (sport, etc). Pour se faire, il créerait une Business Unit spécialisée. Avec à terme, une personnalisation de l’offre par secteur d’activité.

quelle(s) contrainte(s) pour vous ?• Pensez aux canaux de distribution : ici, on pourrait décider par exemple de vendre une partie de l’offre sur la marketplace et une autre partie dans des boutiques physiques.• Quels sont les flux de revenus générés pour chaque segment de clients ? Pour quelle valeur ajoutée les clients sont-ils prêts à payer ? à quelles conditions (délais, coût de gestion…) ? Quels sont leurs moyens de paiement ? et comment fixez-vous les prix ?• Quelles sont les activités-clefs indispensables à votre proposition de valeur, en interne comme en externe ?• Quelles sont vos ressources-clefs : listez les actifs détenus par l’entreprise, nécessaires à la production de valeur et permettant de se montrer pertinent auprès de la cible. il peut s’agir d’actifs matériels, immatériels ou humains.• Quels sont vos partenaires-clefs ? Listez les actifs indispensables externalisés et réfléchissez à la sécurisation de ces partenariats ainsi qu’à l’avantage concurrentiel qu’ils représentent - ou pas !• Enfin, pensez à votre structure

de coûts : l’ensemble des coûts induits par le Business model (coûts fixes et variables, coût d’acquisition d’un client

confronté à son ROi, mais aussi répétabilité & scalabilité du nouveau modèle…).

l l l

« pENsEz à VOtRE stRuCtuRE DE COûts : L’ENsEMBLE DEs COûts INDuIts pAR LE BusINEss MODEL (COûts FIxEs

Et VARIABLEs, COût D’ACquIsItION D’uN CLIENt CONFRONtÉ à sON R.O.I., MAIs AussI RÉpÉtABILItÉ Et sCALABILItÉ

Du NOuVEAu MODèLE…). »[ Vincent Lorach- Lateos]

13 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

de plus en plus de marketplaces

zoom

B2C - C2C

hOMIO

LA REDOutE

FNAC DELIVEROO AIRBNBBOuLANGER

DOCtOLIB

pIxMANIA

BLABLACAR

supERMANO

ALIBABA

AMAzON

REtIF

LE DuFF

FIVERRstApLEs

3M

hELpLING

jEt

BIRD OFFICE

hOpwORk

E-MERChANt

DARty

OutIz

ChèquE DÉjEuNER

tAsk RABBItCDIsCOuNt

B2B

pRODuIts sERVICEs

Quelques exemples (liste non exhaustive !)

14 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

étude de cas

[ Christophe Coppenolle est VP Business Line Marketplace d’AccorHotels. ]

Accorhotels.com

La maRkETPLaCE a FêTéSES dEUx aNS

En juin 2015, le site AccorHotels.com devenait

une marketplace et « AccorHotels » remplaçait la dénomination historique

« Accor ». Un virage important pour le groupe, qui a ouvert sa distribution en ligne avec

ce double objectif : conserver la confiance d’une clientèle

fidèle en veillant à la qualité de l’offre élargie ; et recruter

les hôteliers indépendants en misant sur un service

plus adapté que celui des OTA (Online Travel Agencies) comme Booking ou Expedia.

«L a marketplace nous permet d’enrichir l’offre sur des destinations non

couvertes, ou insuffisamment fournies en offres d’hôtels de marque, explique christophe coppenolle, aux commandes du projet depuis janvier 2017. en ouvrant notre site aux indépendants, nous disposions d’atouts solides : nous sommes leader sur le marché européen et partageons les mêmes problématiques qu’eux. nous pouvons comprendre leurs attentes, à la différence de Booking et autres, qui imposent des clauses parfois insupportables : ils veulent

pouvoir afficher les meilleurs tarifs, ils demandent aux hôteliers 100 % de leur inventaire, et pas seulement quelques chambres… à l’opposé de ces pratiques, nous nous plaçons comme une alternative plus équitable et plus proche des préoccupations des professionnels. »

une évolution naturelleAu printemps 2017, la marketplace rassemblait plus de 1 700 hôtels indépendants distribués sur le site, pour quelque 4 000 hôtels de marque Accorhotels.

[ Extrait de la liste de résultats pour Dublin, Irlande. ]

15 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

« en réalité, nous fonctionnions autrefois déjà comme une marketplace, pour nos propres marques et pour des services associés de type europcar, reprend christophe coppenolle. nous avons fermé toutes nos apps mobiles de marque, pour conserver une seule app et un seul canal de réservation. »

pédagogie et communication internecomment les franchisés Accorhotels ont-ils perçu l’ouverture aux hôteliers indépendants ? c’était un sujet-clef dans la réussite du projet. « Au départ, ils ont formulé des craintes, raconte christophe coppenolle, mais ils ont rapidement constaté que la marketplace leur permettait d’augmenter leurs ventes : c’est exactement comme lorsque l’on trouve trois bouchers dans la même rue : cela fait monter le chiffre d’affaires de chacun d’eux. On crée une “ rue des bouchers ”, qui attire plus de monde. Aujourd’hui, l’état d’esprit s’est inversé et nos hôteliers sont devenus des défenseurs de la marketplace. »La marketplace a été lancée en même temps que l’acquisition de FastBooking, une agence digitale pour les hôteliers indépendants, et le groupe

Accorhotels a pu s’appuyer sur FastBooking pour prospecter les hôteliers et les inviter à rejoindre son site.

un partenariat avec tripadvisor.comces hôteliers indépendants sont intégrés dans toutes les campagnes marketing, mais n’ont pas l’usage du cRm, bien entendu. ils sont sélectionnés par le groupe en fonction de leur localisation, du nombre de chambres (par segment d’hôtel), de l’emplacement en ville… et de leur note tripAdvisor. en effet, Accorhotels a noué un partenariat avec le site de conseils et d’avis en ligne. « nous encourageons nos clients, après chaque séjour, à aller scorer tripAdvisor. et la note tripAdvisor de chaque hôtel, qu’il fasse partie du groupe ou qu’il soit indépendant, est affichée sur la marketplace. » « Du côté des données, nous regardons si l’indépendant a apporté de nouveaux clients ou cannibalisé notre propre offre. nous analysons le comportement des clients envers les nouveaux hôtels et nouvelles destinations et mesurons la rentabilité des campagnes d’acquisition. »

Quels hôtels apparaissent en meilleure position sur une page, et pourquoi ?« Le classement d’un hôtel sur une liste de résultats dépend de plusieurs critères. nous avons construit un algorithme qui va les classer selon la proximité du point d’intérêt recherché par le client, l’appartenance au réseau Accorhotels, la note tripadvisor entre autres. nous nous efforçons d’apporter le choix le plus judicieux pour le client. »La marketplace est gérée par deux personnes chez Accorhotels et une dizaine de collaborateurs chez FastBooking.

zoomCôté chiffres

• En janvier 2016, la marketplace comptait 600 hôteliers indépendants, pour 2 200 en décembre de la même année ; et plus de 1 700 en août 2017.• Elle couvre, à l’été 2017, 305 destinations.• 88 % des hôtels présents sur AccorHotels.com ont une note Tripadvisor supérieure à 4.

« LEs sItEs COMME BOOkING VEuLENt AFFIChER LEs MEILLEuRs tARIFs ; ILs DEMANDENt Aux hôtELIERs 100 % DE LEuR

INVENtAIRE, Et pAs sEuLEMENt quELquEs ChAMBREs... NOus NOus pLAçONs COMME uNE ALtERNAtIVE pLus

ÉquItABLE EN tERMEs DE COMMERCE Et pLus pROChE DEs pRÉOCCupAtIONs DEs pROFEssIONNELs. »

16 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

étude de cas

[ Nathalie Debourge est Responsable E-Business pour RS Components France. ]

Rs components

L’éQUIPE FRaNçaISE déFRIChE LE SUjETDistributeur en fournitures

industrielles et composants électroniques et

électriques, le britannique RS Components

s’adresse à une clientèle professionnelle, qu’il

livre sous un à deux jours depuis 1986 en

France. Afin d’élargir son offre, la filiale française

implantée à Beauvais (Oise) étudie la création d’une marketplace : un projet en forme de POC, avec

un seul fournisseur pour commencer.

«L a vente en ligne représente plus de 70 % de notre chiffre d’affaires »,

souligne nathalie Debourge, responsable e-Business France. soit un ratio important, pour des clients au profil très varié, de l’artisan à l’entreprise du cAc 40. « notre force, c’est de pouvoir proposer à nos clients des solutions complètes (produits et services) adaptées à leurs besoins et basées sur une logistique performante : nous stockons pour les entreprises et nous livrons sous un à deux jours partout en France. nous avons également lancé il y a trois ans notre propre marque, baptisée “ Rs Pro ”, qui

représente aujourd’hui plus de 40 000 références. »cinq centres logistiques (2 en Grande-Bretagne, 1 en France, 1 en Allemagne et 1 en italie) permettent à Rs components de couvrir l’ensemble du territoire européen.

un prolongement naturelAvec 2 500 fournisseurs pour plus de 500 000 produits et environ 50 000 colis expédiés par jour dans le monde, le groupe a l’habitude de jongler avec les références : « concrètement, quand on est distributeur, on s’inscrit

17 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

déjà dans une logique de marketplace, estime nathalie Debourge. nous testons ce modèle, qui pourrait nous apporter davantage de souplesse en termes d’élargissement de la gamme. La France est un marché plus mûr que d’autres : nous jouons un rôle de poisson-pilote sur ce projet. Une marketplace permettrait de proposer une offre plus importante aux clients, mais ce n’est que le premier stade. Je suis convaincue qu’elle doit aussi apporter de nouveaux services, sous peine de “ vivoter ”. »ces services devraient en toute logique être étendus à l’échelle du groupe, mais ce point n’est pas tranché : créer une marketplace lorsque l’on est une filiale « éclaireur » soulève bien des questions de fond.

pas à pas côté marchands, Guillaume Fromond (chef Produits) avance sur le projet marketplace avec l’un de ses fournisseurs stratégiques, sur 20 000 produits. « sa gamme est large et nous préférons avancer pas à pas, un fournisseur après l’autre, même si le fait de recruter des vendeurs ne semble poser aucun problème. Les fabricants sont très intéressés par le projet, ils y voient l’occasion d’étendre leurs ventes, sans augmenter leur nombre de

clients directs, conformément à leur stratégie. nous livrons à partir de 1 centime s’il le faut, et à des milliers de petits clients. »Autre point déjà réglé : « Le fabricant va livrer directement, sauf si nous avons le produit en stock. si c’est le marchand qui livre, l’envoi pourra prendre plus de temps que notre fameux J+1. Aussi, nous l’indiquerons de façon explicite. »Pour préserver une harmonie

dans les fiches produits, Rs components fournit un gabarit à respecter lors de la rédaction des informations. « nous nous posons beaucoup de questions sur le nom de la future marketplace. et sur la partie seO : il ne faut pas que les recherches Google favorisent la marketplace par rapport au site du groupe. Le pilote va nous permettre de dire si oui ou non nous pouvons avancer sereinement. »

zoomCôté chiffres

• Le groupe a été fondé en 1937. Il est côté à la bourse de Londres.Chiffre d’affaires : 1,3 milliard de livres, pour 32 filiales dans le monde.• La filiale française de RS Components réalise 228 millions d’euros de chiffre d’affaires. • RS Components et Allied Electronics sont les marques commerciales d’Electrocomponents plc. La gamme est large : semi-conducteurs, interconnexion, composants passifs et électro-mécaniques, automatique et commande, électrique, test et mesure, outils et consommables.• La branche française du groupe compte 60 000 clients pour 450 collaborateurs, dont une équipe commerciale de 150 personnes et une équipe logistique de 130 personnes.Elle propose des services complémentaires : pas de minimum de commande, réception et traitement des commandes jusqu’à 19h, services spécifiques comme les services métrologie, cotations, encodage ou SAV.RS Components France étudie le Net Easy Score (la facilité de commander sur son site) et le Net Promotion Score, rappelant systématiquement tous ses détracteurs.

à no

ter

La marketplace pourrait proposer des exclusivités produits, ou des kits. Quoi qu’il en soit, c’est au département Chefs Produits d’enrôler les fournisseurs. « La marketplace s’inscrit dans la droite ligne de leurs attributions. Quand ils contactent les fabricants, ils peuvent présenter ce projet et “ prendre la température ”. Notre objectif est aussi

de minimiser l’impact du changement en interne. Dans le même esprit, nous souhaitons faire passer le flux de commandes de la marketplace par les process existants. Finalement, le plus important sera le prix : et là, les chefs de produits peuvent

conseiller intelligemment les fabricants. »

18 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

éclairage

le btob redoutela cannibalisationAujourd’hui, si le secteur du BtoC est très largement couvert par les marketplaces - pour les produits, davantage que pour les services - le BtoB l’est… nettement moins ! Les professionnels craignent de marcher sur les pieds de leurs distributeurs historiques, dès lors qu’ils se mettent à vendre en direct.

C ertains, comme le groupe seB (lire page 28), souhaitent continuer de

vendre au travers d’un réseau de distribution. Pour autant, leurs propres intermédiaires ont investi les marketplaces et ce phénomène change la donne.D’autres, comme Périal (lire page 38), envisagent l’option marketplace, pour développer la vente en direct, sans pour autant réduire la vente intermédiée.« La Fevad estime qu’en 2020, c’est-à-dire dans trois ans seulement, les marketplaces assureront la moitié de la croissance de l’e-commerce, souligne Vincent Lorach (Lateos). Le BtoB notamment présente une belle marge de progression, car seules 15 % des entreprises françaises du BtoB vendent en ligne (chiffre 2015). D’ici 2020, les commandes devraient croître de 30 %. »Parmi les principales réticences relevées en task-Force côté BtoB, figurent aussi la problématique du paiement (au-delà d’un certain montant, le règlement par carte bancaire ne correspond plus aux usages du marché)

et celle de la logistique : ouvrir une marketplace pour vendre en direct suppose d’emballer et d’expédier les produits en quantité beaucoup plus restreintes qu’auparavant, mais aussi plus fréquemment. On passe volontiers d’une vente par palette à une « vente par cartons ».cependant, le contexte est favorable : les acheteurs BtoB, eux, sont de plus en plus portés sur l’achat en ligne.« Aujourd’hui, 57 % des décisions d’achat BtoB sont prises avant même que l’acheteur n’entre en contact avec un commercial », expliquait stephanie Kidder, cmO d’Azalead, dans un livret publié en novembre dernier par l’eBG (marketing BtoB, les nouvelles technologies).L’acheteur est beaucoup mieux informé et l’explosion des forums, sites spécialisés, supports vidéos et réseaux sociaux, lui donne le sentiment de pouvoir se débrouiller seul. à ses yeux, la marketplace représente de nombreux avantages : un cadre sécurisé, des prix intéressants, une concentration de l’offre et même des services additionnels.

Trois exemples tout récentsOutiz.fr« Outiz, lancé en 2014 par saint-Gobain, réalise 70 % de son chiffre d’affaires en BtoB. Dès sa création, il projette d’ouvrir une marketplace afin de référencer un maximum d’articles sans faire exploser la valeur de son stock. il a d’abord ouvert 10 magasins en région parisienne et un call center pour se positionner sur tous les canaux. Puis a commencé à monter sa place de marché, lancée en octobre 2016. “ De 20 000 références en propre, nous sommes passés à 100 000 fin 2016, en ajoutant en particulier des produits encombrants et de nouvelles catégories comme la décoration ”, indique son DG Jean-Jacques Bourhis. Outiz prévoit de doubler son volume d’affaires en 2017 et souligne combien les possibilités de développement sont nombreuses. “ Les enseignes du groupe saint Gobain peuvent si elles le souhaitent référencer leurs gammes chez nous, mais elles pourraient aussi ajouter notre marketplace à leur propre site ”, souligne le dirigeant, qui envisage également l’international. »(Journaldunet.com, janvier 2017)

19 // Chapitre 1 // le monde ne se réduit pas à amazon

« sEuLEs 15 % DEs ENtREpRIsEs

FRANçAIsEs Du BtOB VENDENt EN LIGNE. D’ICI

2020, LEs COMMANDEs DEVRAIENt CROîtRE

DE 30 %. »

Le Duff & Gourming.com« Profitant de sa longue expérience dans la logistique internationale, le groupe rennais de restauration commerciale (Brioche Dorée, Del Arte, Le Fournil de Pierre...) et de boulangerie-viennoiserie industrielle (Bridor) lance Gourming, une place de marché sur internet dédiée à l’hôtellerie-restauration, et plus largement aux métiers de bouche. selon Louis Le Duff, le président du groupe éponyme, “ 76 % des tPe et Pme françaises n’exportent pas ”, souvent faute de moyens pour accéder à la clientèle étrangère. Après cinq années de travaux préparatoires, cette marketplace vise à remédier à cette faiblesse. Un strict cahier des charges a été établi afin de construire une offre dans onze familles de produits et trois grandes catégories : frais, secs et surgelés. chaque référencement implique un droit d’entrée de 100 euros. Gourming encaisse une commission de 25 % sur le prix de vente facturé aux clients. »(Lesechos.fr, janvier 2017)

procsea.com« La pêche aux financements a été fructueuse pour les Rennais de Procsea, la plateforme de mise en relation entre les mareyeurs (grossistes) et les restaurants et hôtels gastronomiques en quête de produits de la mer. Les Bretons ont annoncé avoir bouclé une première levée de fonds de 800 000 euros auprès de Polytech Ventures, un fonds basé à san Fransisco et à Lausanne, et huit business angels du swiss ict investor club et de Business Angels switzerland (BAs).Basée à montreux (suisse) et

à Rennes, Procsea s’est lancé fin 2016. La

société revendique

150 restaurants et hôtels clients sur sa plateforme.“ 95% des volumes de poissons sont importés en suisse, d’où l’intérêt de nous y installer. La présence des palaces à montreux a aussi beaucoup joué ”, explique Renaud enjalbert, ceO et cofondateur avec Florian Dhaisne. La plateforme sélectionne, audite et met en ligne les marchandises des mareyeurs. Procsea se définit comme une place de marché “ fermée ”. La start-up, qui estime le marché de la vente de poissons à plus de 50 milliards d’euros au niveau européen, emploie 10 personnes à Rennes et 7 en suisse. »(FrenchWeb.fr, juin 2017)

zoomAmazon Business dépasse le million de clients

« Lancée en avril 2015, la marketplace BtoB d’Amazon cible un marché adressable de 5 000 milliards de dollars. Elle compte aujourd’hui 85 000 vendeurs au lieu de 30 000 il y a un an. Pour l’instant disponible aux états-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne, Amazon Business fournit également des services d’analytics et des prêts. » Source : LSA.

20 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

Prévenir, c’est guérir... Le point sur les risques et atouts du modèle, sa rentabilité et l’une de ses particularités : un Time to Market extrêmement resserré.

chapitre 2

à savoir avant

de sauter le pas

21 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

«U ne marketplace, en soi, ça ne coûte pas cher, affirme Benoît Féron

(izberg). si l’on ne vend pas, on n’a pas de frais. Bien sûr, il faut un minimum de budget, essentiellement affecté aux ressources humaines, pour fédérer les vendeurs sur la nouvelle plateforme. toute la force de la marketplace réside dans sa capacité de connexion. il est donc impératif de mettre en place une offre valable. c’est pour cette raison que créer une marketplace n’est jamais un “petit ” projet. il ne peut pas y avoir de “ petite marketplace ” : toutes sont vouées à grandir vite. »invités à identifier les forces et faiblesses du modèle, les membres de la task Force ont établi une liste plutôt aboutie :

Les avantages• Une marketplace offre la possibilité de tester de nouveaux produits. certains n’ouvrent même pas de marketplace sur leur propre gamme : ils choisissent de ne vendre que les nouveautés lancées par d’autres.• On accède à une cible bien définie. Par exemple, cDiscount, par son offre de services (paiement en plusieurs fois, etc) vise une cible aux moyens financiers plus bas qu’Amazon.• Le risque d’échec est plus faible car il s’agit d’un magasin « virtuel », les coûts d’investissement sont moindres (zéro stock, zéro logistique, possibilité de tester de nouvelles gammes rapidement...).• Une marketplace permet

d’optimiser le seO par la largeur du catalogue produits, à condition de faire l’effort de proposer des fiches-produits uniques. mais aujourd’hui, la plupart du temps les fiches-produits sont les mêmes partout. Le résultat est pire.il faut éviter les contenus dupliqués.• Une marketplace permet de ne pas se faire désintermédier dans sa relation avec le client final, c’est du moins l’une des motivations principales des professionnels qui se lancent.• La donnée collectée permet de bien connaître les tendances d’un marché (le modèle offre une place de choix, façon « tour de contrôle »).

Les risques• Il y a une cannibalisation possible, avec le risque de « s’auto-disrupter ».• En tant que tiers de confiance, la marketplace engage son image (qualité de services) auprès des consommateurs. ce sont pourtant les vendeurs qui réalisent la prestation (qualité des produits, délai de livraison) et portent la qualité de service. Aussi, l’administrateur de la marketplace doit définir une politique de gestion des règles vendeurs ferme et réaliste.• Le ROI peut être trop faible.• L’équilibre vendeurs-acheteurs est difficile à trouver : pour attirer les vendeurs, il faut des acheteurs, et vice-versa. c’est l’un des enjeux majeurs : réussir à faire grandir ces deux pools en même temps.• La marketplace, comme tout projet innovant, crée le risque

de mal gérer la transformation de l’entreprise et les ressources humaines.• Elle représente un nouveau risque juridique pour l’entreprise.• Elle peut soulever un problème de légitimité, et même en étant légitime, cela ne suffit pas à garantir le succès. • Il peut être difficile d’établir sa stratégie : faut-il horizontaliser ou verticaliser son offre ?

le chiffre

2 000 €Le montant moyen annuel d’une transaction sur Internet baisse à 70 euros en 2016, contre 75 euros en 2015 soit - 7 %. Sur les deux dernières années, le panier moyen a fortement diminué. L’élargissement de l’offre, le développement de la concurrence, mais également les nouvelles approches en matière de logistique (abonnements de livraison en illimité, gratuité de la livraison et des retours) contribuent à amplifier ce phénomène.Cette baisse du panier moyen est cependant compensée par un record d’augmentation de la fréquence d’achat en 2016 : + 21 % par rapport à 2015. Les e-acheteurs réalisent en moyenne 28 transactions en ligne sur l’année pour un montant total de 2 000 euros. Ce montant a quasiment doublé par rapport à 2010 où il était de 1 084 euros.Source : Fevad (janvier 2017)

« IL NE pEut pAs y AVOIR DE “ pEtItE MARkEtpLACE ” : tOutEs sONt VOuÉEs à GRANDIR VItE. »

[ Benoît Féron - Izberg]

22 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

«L ’opérateur d’une marketplace fait aux acheteurs cinq grandes

promesses, rappelle Vincent Lorach (Lateos). D’abord, il leur offre un vaste choix de produits et services : le client est certain de trouver ce qu’il est venu chercher, soit en raison de la largeur de la gamme, soit parce que la marketplace s’est spécialisée. ensuite, l’opérateur de marketplace s’efforce de proposer des prix compétitifs et un bon rapport qualité-prix. il s’engage aussi sur l’excellence de la qualité de service (paiement, livraison, sAV, retours gratuits…) ; il endosse un rôle de tiers de confiance et se mobilise pour créer une expérience utilisateur optimale. »mais attention, l’opérateur de marketplace a deux types de « clients » : les vendeurs qui

alimentent son offre ont besoin eux aussi d’être séduits.L’opérateur leur promet un développement de leur réseau de distribution (un nouveau canal de vente), un système d’acquisition à la performance, la possibilité de tester facilement et rapidement les produits et les prix (gestion du catalogue facilitée) et bien sûr la sécurisation du paiement.« mais aussi l’accès à une audience qualifiée, l’opportunité de tester un marché étranger à moindres coûts et une meilleure gestion de la relation client », ajoute Vincent Lorach.comment tenir tous ces engagements, en restant rentable ? Le modèle de la marketplace est confronté à l’éternel problème de la masse critique : il faut trouver l’équilibre entre vendeurs et

acheteurs, pour que tous soient satisfaits.Les revenus de l’opérateur de marketplace peuvent être assurés en partie par un abonnement mensuel versé par chaque vendeur : ces frais ont également l’avantage de dissuader les marchands « dormants », mais ils risquent de constituer un frein à l’adhésion lors du lancement.

Exemples de prix d’abonnements• Priceminister : de 39 à 499 euros par mois• Amazon : à partir de 39 euros par mois• eBay : à partir de 26 euros par mois

cependant, les revenus proviennent surtout des commissions versées à chaque transaction.La plupart du temps, il s’agit

dossier

tenir ses promessesen demeurant rentable

« LEs REVENus DE L’OpÉRAtEuR DE MARkEtpLACE pEuVENt êtRE AssuRÉs EN pARtIE pAR uN ABONNEMENt MENsuEL VERsÉ pAR ChAquE VENDEuR : CEs FRAIs ONt ÉGALEMENt L’AVANtAGE DE DIssuADER LEs MARChANDs “ DORMANts ”

CEpENDANt, LEs REVENus pROVIENNENt suRtOut DEs COMMIssIONs VERsÉEs à ChAquE tRANsACtION.

ELLEs pEuVENt êtRE FIxEs Et / Ou VARIABLEs. »

23 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

d’un pourcentage sur le montant des transactions. Exemples de taux de commission• High Tech : 6-8 %• Culture : 10-12 %• Jardin et Mobilier : 10-12 %• Mode : jusqu’à 20-25 %

L’opérateur peut aussi facturer des services, comme la mise en avant d’un produit ou l’envoi d’une newsletter pour faire la promotion de certains produits.

Exemples de monétisation• Monétisation des espaces (CPM / CPC)• Mise en avant sur les résultats de recherche• E-mailing

La publicité directe et l’affiliation complètent la liste de ces ressources.Les marketplaces relationnelles, elles, vivent grâce à la publicité.Du côté des charges, il faut tenir compte de la maintenance et de l’administration de la plateforme, de la publicité et des éventuels litiges avec les acteurs.Quoi qu’il en soit, une fois la décision prise, ne tardez pas : « Le time to market pour une marketplace, c’est six mois ! souligne Olivier czapka (Lateos). Au maximum, un an. mais pas deux ou trois ans : d’ici là, tout aura changé, le marché sera à ré-étudier. certains

ont lancé leur marketplace en sachant pertinemment qu’elle ne serait pas rentable au départ : c’est d’ailleurs le cas d’Amazon, fondée initialement pour la vente de livres et qui avait prévu dès le Business Plan de ne pas réaliser de profits durant ses premières années (il lui en aura fallu presque 10 pour être bénéficiaire). »chez BlaBlacar, la mise en relation entre usagers a été gratuite pendant plusieurs années, avant que le site ne se mette à prélever une commission : « ses fondateurs voulaient d’abord construire l’usage et intégrer l’ensemble des pratiques des utilisateurs. »

« Le Time to Market pour une marketplace, c’est six mois ! Au maximum, un an. Mais pas deux ou trois ans : d’ici là, tout aura changé, le marché sera à ré-étudier. Certains ont lancé leur marketplace en sachant pertinemment qu’elle ne serait pas rentable au départ. »[ Olivier Czapka, directeur commercial chez Lateos ]

24 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

dossier

«L ’opérateur de marketplace, dans son rôle de facilitateur, a tout

intérêt à proposer des services qui séduiront les utilisateurs. Retour chez manomano (lire page 8) : la marketplace assure « un service clients aux petits oignons », expliquait capital.fr en avril dernier. « Avant l’achat, pour conseiller les internautes grâce à des experts extérieurs (certains sont vendeurs dans les grandes enseignes et arrondissent ainsi leurs fins de mois !) qui vont répondre aux mails et être rémunérés sur chaque vente conclue. et après, pour suivre les livraisons. Le casque sur les oreilles face à deux écrans d’ordinateur, ils sont une trentaine au siège à répondre aux e-mails, aux appels et à tchatter en un temps record. et gare aux marchands qui n’assurent pas. “ trop de réclamations, et on fait vite le point ”, assure terez Duhameau, responsable du service clients. »

Dans un autre secteur d’activité, pourquoi ne pas imaginer que les hôteliers se mettent à proposer sur leurs marketplaces des services inédits : développement de

photos de vacances, excursions, massages, plan de la ville disponible sur une application mobile… « ils glisseraient du statut de vendeur de nuitées vers celui de voyagiste »,

pas de marketplacesans services associés

« uNE MARkEtpLACE, CE N’Est pAs uNIquEMENt tEChNIquE.IL FAut DE VRAIEs COMpÉtENCEs EN INtERNE pOuR

L’ANIMER, GÉRER LEs stOCks, DÉFINIR LEs pRIx, suIVRE LEs VENtEs, ANALysER LE tRAVAIL DEs MARChANDs,

s’OCCupER DE LA NOtORIÉtÉ Du sItE... »[ Vincent Lorach - Lateos]

25 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

relève un membre de la task Force. cette stratégie favorise l’engagement des internautes, évitant qu’ils n’utilisent la marketplace comme un moteur de comparaison, pour finalement aller conclure leur achat sur un autre site.Les marketplaces qui échouent le doivent souvent, selon Benoît Feron (izberg), à un mauvais positionnement : « il faut émerger de la masse. On ne vend pas de produit en direct, la clef est donc d’apparaître comme un tiers de confiance légitime. Ainsi, en 2012, 2013 et 2015, Amazon a été élue marque préférée des Français... alors que ce n’est

pas une marque. On comprend cependant très bien pourquoi : ils ont fait ce travail de tiers de confiance à la perfection. »La ré-assurance, la qualité de service, le choix sélectif et transparent des marchands... Autant d’ingrédients qui composent le succès.Une entreprise qui lance sa marketplace doit pouvoir mobiliser des collaborateurs pour assurer le recrutement des vendeurs, le web marketing et le support clients.« Une marketplace, ce n’est pas uniquement technique, confirme Vincent Lorach. il faut de vraies compétences en interne pour l’animer, gérer les

stocks, définir les prix, suivre les ventes, analyser le travail des marchands, s’occuper de la notoriété du site... »Pour conclure, répétons que l’entreprise qui crée et pilote sa marketplace acquière de fait une connaissance très pointue d’un marché : « elle voit tout passer... si elle réussit à devenir une référence, elle disposera d’informations de qualité sur son secteur d’activité et les données qu’elle amasse (quels produits intéressent les consommateurs, quels sont les prix du marché, etc) prendront à leur tour une valeur significative. »

étude de cas

26 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

[ Hervé Chevallon est Online& Multi-channel Manager.]

carrefour

RETOUR d’ExPéRIENCE

ET BONNES PRaTIQUESAppliqué à la grande

distribution, le modèle marketplace remet en cause plusieurs piliers du système, comme le rôle de la centrale

d’achat. Hervé Chevallon exerce dans une direction du groupe Carrefour consacrée

au développement des nouvelles activités d’e-

commerce. Sans aborder les projets en cours, qui restent

confidentiels, il revient sur le lancement d’une marketplace

pour le site online.carrefour.fr, fermé depuis le rachat de

RueDuCommerce.fr en 2015.

«P endant neuf mois, nous sommes passés par tous les écueils de la création

d’une marketplace, résume hervé chevallon. nous avions pour mission d’en monter une “ en mode commando ” : en effet, il faut bien comprendre que pour un groupe de distribution comme le nôtre, une marketplace représente une vraie rupture. »L’équipe avait à l’époque signé un partenariat avec Pixmania : bénéficiant ainsi de la structure logistique et informatique du Pure Player.« Le premier enjeu consistait à identifier les synergies avec le groupe carrefour, explique

hervé chevallon. clairement, la marketplace est perçue par la plupart des équipes historiques comme une concurrence de leur modèle et de leur organisation. en Gms, le pouvoir est entre les mains des Achats et des magasins. Un modèle comme le click & collect est plus facile à promouvoir en interne, car tout le monde y voit son intérêt, mais l’idée d’une marketplace vient se placer en frontal des habitudes et prérogatives habituelles. Avec l’aval de la DG, nous avons donc monté le projet en quasi autarcie, avec une équipe d’une dizaine de personnes. nous avons adapté les process et technologies

27 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

de Pixmania à notre univers. nous avons limité au strict minimum les dépendances avec les organisations et systèmes informatiques internes. il a fallu toutefois nous plugger avec la Finance, ce qui n’a pas été simple. Dans la grande distribution, on raisonne en termes de chiffre d’affaires. Le modèle marketplace, fondé sur les commissions, est bien différent... »

délais de paiementAutre défi : les méthodes - et surtout les délais- de paiement. L’opérateur d’une marketplace doit payer immédiatement les marchands, s’il veut pouvoir les conserver. On est loin des règlements à 60 jours (et par chèque) dont sont coutumiers les grands groupes. « Pour nos premiers fournisseurs, ça a été complexe. nous rapprochions deux mondes qui ne se ressemblaient pas du tout : une culture de la réactivité, voire de l’acrobatie, de leur côté ; et en face une méthode installée depuis 1960. »

L’équipe d’hervé a dû également aplanir des difficultés juridiques : « carrefour bénéficie d’une image de marque forte, qu’il faut protéger. tout en acceptant, dans le cadre de la marketplace, de perdre partiellement la maîtrise des produits et marchands rassemblés sur le site... »La marketplace a été lancée sur une gamme non-alimentaire, essentiellement des produits high-tech, avec une poignée de marchands à l’offre très large. hervé chevallon évoque un nouveau choc culturel : l’ajustement des tarifs entre les magasins physiques, le site d’e-commerce et la marketplace. « Voici bien une difficulté majeure, pour tous les opérateurs... et elle est rarement résolue. On trouve assez facilement quel est le “ bon prix ” pour vendre en ligne. mais en magasin, le tarif peut varier en fonction du marché local. et avec la marketplace, on introduit une troisième offre, avec des prix qu’on ne maîtrise pas ! il faut alors choisir entre favoriser l’offre carrefour, en la faisant systématiquement remonter sur

la page de résultats, ou traiter carrefour comme n’importe quel autre marchand. Du point de vue du client, il faut privilégier cette deuxième option. mais en interne, ce n’est pas toujours facile à comprendre. il faut un soutien fort de la DG, je le répète, car les conflits apparaissent très vite. »

à no

ter

Ouvrir une marketplace, c’est aussi multiplier le nombre de références. chez carrefour, l’équipe d’hervé chevallon a été confrontée à ce défi : comment référencer cent fois plus de produits qu’à

l’ordinaire ? « Les systèmes actuels ne peuvent absolument pas absorber ce flux. il faut donc s’appuyer sur un nouveau système de référencement, ce qui crée d’autres limites. Dans la même veine, nous avions souhaité nous appuyer sur le maillage physique pour vendre en magasin des

produits en extension de gamme, grâce à des collaborateurs équipés de tablettes. Plus besoin de stocker et exposer les produits, ce qui permet de vendre piscines, salons de jardin, accessoires auto... sauf que, pour passer en caisse, il faut que le produit soit connu dans nos systèmes de

référencement ! et puis, à qui faut-il attribuer la vente : à la marketplace ou à l’hypermarché ? »

zoomCôté chiffres

• Carrefour compte plus de 11 900 magasins dans quelque 30 pays. Dont 5 670 magasins en France.• Le chiffre d’affaires 2016 se porte à 85,7 milliards d’euros, dont 40,125 milliards pour la France.• Près de 110 millions de ménages sont clients dans le monde.• Soit 13 millions de passages en caisse chaque jour.

« DANs LA GRANDE DIstRIButION, ON RAIsONNE EN tERMEs DE ChIFFRE D’AFFAIREs. LE MODèLE MARkEtpLACE, FONDÉ

suR LEs COMMIssIONs, Est BIEN DIFFÉRENt. »

étude de cas

28 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

[ Antoine Champinot est Global eCommerce Lead.]

Groupe seB

« TISSER dES LIENSavEC LE CLIENT FINaL »

Le groupe SEB (Tefal, Moulinex, Rowenta...)

ne se positionne pas prioritairement en tant que distributeur de ses propres produits. Il s’appuie surtout

sur un réseau d’enseignes spécialisées comme Darty ou Boulanger, mais aussi

sur les e-commerçants et la grande distribution.

De plus en plus, ces intermédiaires développent

et vendent eux-mêmes sur des marketplaces.

Ce qui conduit le groupe à s’interroger sur ses

stratégies de distribution et leur impact sur ses

marques.

«L a distribution n’est pas la vocation première du groupe. nous avons bien

un réseau de distribution en propre sur certaines marques et certains marchés (WmF, tefal, Japon ou turquie par exemple) autour desquels nous avons dans certains cas développé le canal e-commerce, mais nous nous focalisons avant tout sur nos distributeurs partenaires pour servir les objectifs de nos marques », précise d’emblée Antoine champinot, Global ecommerce Lead.en revanche, le groupe accompagne l’activité de ses distributeurs historiques, à commencer par la vente en ligne sur les marketplaces. « sur le marché de l’électroménager,

l’e-commerce pèse désormais un quart des ventes mondiales (11 à 12 % pour les articles culinaires comme les poêles). il existe de fortes disparités entre des pays comme la République tchèque ou les Pays-bas, où ce chiffre grimpe à 40 %, et d’autres comme le Portugal ou la Grèce, où il ne dépasse pas les 3 %. »Les acteurs dominants dans les marchés les plus matures sont les Pure Players (Amazon, cdiscount, etc), essentiellement des marketplaces, sur lesquelles ils interviennent directement en tant que vendeurs, mais ouvrent aussi la porte à tout distributeur de produits, y compris concurrent.« comment adapter notre stratégie de distribution en tenant compte du fait que la croissance

[Le tout nouveau siège du groupe, à écully (69). © Gilles Aymard.]

29 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

zoomest aujourd’hui drivée par les marketplaces ? D’abord, il faut cesser de raisonner en fonction du canal de distribution : hier, la structuration du marché par canal de distribution plus ou moins étanche, nous donnait une certaine maîtrise de la distribution de nos produits aux consommateurs… ce système vole aujourd’hui en éclat : les marketplaces donnent accès au marché à tout revendeur, et donc aux consommateurs. Avec la transparence du digital et sa puissance d’amplification, cela crée une intensité concurrentielle infiniment plus forte qu’avant, qui est bien sûr de nature à éroder les prix de vente de nos produits. cela met sous tension la profitabilité de l’ensemble de la chaîne, c’est-à-dire des distributeurs et des marques, et pose question sur notre capacité à innover à long terme. nous le vivons comme un défi à relever, une opportunité de mieux servir nos consommateurs, car c’est bien à nous qu’il incombe de nous adapter aux évolutions du marché ! »

certifier les vendeursPremier challenge à relever donc, celui de la politique commerciale. Vient ensuite celui de l’impact sur les marques. « Les marketplaces permettent à n’importe qui de vendre nos produits et de réaliser le travail de marketing qui était jusqu’à présent le nôtre. La façon dont les produits sont présentés, l’histoire qui est racontée, peut nous échapper si nous ne comprenons pas ce système.

Par exemple, tout vendeur, si petit soit-il, qui achète une poêle tefal à un grossiste peut créer une offre sur tmall, l’incontournable marketplace chinoise (groupe Alibaba) et raconter ce qu’il veut sur cette poêle.nous travaillons avec les opérateurs de marketplace pour faire en sorte de faciliter le partage de nos contenus, afin de garantir un niveau minimum de cohérence sur la présentation de nos produits. Objectif principal : maintenir un niveau de confiance avec le consommateur de nature à déclencher l’achat. Dans certains cas, en particulier lorsque la question de l’authenticité des produits se pose, cela inclut la mise en place de programmes de certification par nos marques des vendeurs sur les marketplaces (par exemple au Japon avec la marque tefal). »mais ce n’est pas toujours simple de convaincre des opérateurs de marketplace dont la philosophie reste l’accès le plus ouvert possible au marché. D’autant plus qu’ils travaillent avec des algorithmes, évitant au maximum toute intervention humaine sur le site. « L’écosystème des marketplaces s’accommode très mal de l’intervention des institutionnels. il faut que nous soyons capables d’intégrer également ce décalage entre nos deux univers. nous devons non pas tenter de garder le contrôle, mais repenser la chaîne de distribution de nos produits en fonction de ces éléments nouveaux. c’est un bon test ! et finalement, les modèles ne sont

pas si nombreux et si différents. Amazon d’un côté (sur les marchés matures) et Alibaba de l’autre pilotent la transformation et s’imposent en modèles dominants. ils investissent fortement pour développer leur présence géographique, notamment par rachats. Alibaba a par exemple récemment (2016) pris le contrôle de Lazada, marketplace leader en Asie du sud-est, tandis qu’Amazon a acquis souq.com, marketplace leader au moyen-Orient. »Le groupe seB travaille sur le développement de services à destination des consommateurs, pour enrichir leur expérience, en particulier dans l’environnement de la cuisine. Aucun projet de marketplace n’est évoqué pour le moment, toutefois « il s’agit d’un domaine où le groupe seB pourrait avoir légitimité à réunir différents acteurs afin de simplifier l’expérience d’achat des consommateurs autour de recettes pensées par et pour les produits du groupe. » Le tout, autour d’une question-clef : « Que vais-je préparer comme repas ? »

Côté chiffres

• 160 ans d’Histoire.• 6 produits vendus dans le monde à chaque seconde.• + 26 % (résultat net) en 2016.

à no

ter

Une marketplace, c’est aussi l’apparition de milliers d’avis clients. Le groupe seb y voit une opportunité à saisir pour développer des outils de social Listening. « nous voulons à la fois

stimuler au maximum l’UGc (User Generated content), sur l’ensemble des points de contact, et analyser tout ce qui se dit sur nos marques. Les marketplaces permettent d’écouter le consommateur et de récupérer de l’information qualifiée, pour la R&D et le marketing. »

éclairage

30 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

juridique : 4 conseilspour éviter la chuteLe point de vue de maître Paul Benelli, avocat au cabinet Haas.

L ’affaire Vivastreet a fait grand bruit : « Le deuxième site de petites annonces gratuites

en France après Le Bon coin, est dans le collimateur de la justice : il fait l’objet d’une enquête préliminaire pour proxénétisme aggravé ouverte le 15 février par le parquet de Paris », résumait Le Figaro en avril dernier. La responsabilité des dirigeants fait débat : pouvait-ils ignorer les (très) nombreuses annonces postées sur le site ?Au-delà de cet exemple frappant, la question juridique est essentielle pour tout opérateur de marketplace. il endosse en effet un rôle particulier : il ouvre la porte aux vendeurs, qu’il laisse opérer en autonomie, mais il reste le tiers de confiance. Qui est responsable de quoi ? Aux yeux du grand public, les confusions sont plus que fréquentes. Aux yeux de la Justice, tout doit être strictement délimité en amont.

#1 commençons par un ba-sique : parmi les démarches « incontournables » figurent les déclarations de traitement des données à la cnil et le strict res-pect du GDPR, dont l’entrée en vigueur est fixée au 25 mai 2018. L’opérateur est responsable des traitements qu’il met en œuvre pour la gestion de sa marketplace (les données personnelles des

vendeurs, par exemple). il est en revanche le plus souvent sous-traitant des vendeurs de la plate-forme s’agissant des transactions réalisées. Une co-responsabilité peut être envisagée lorsque ven-deurs inscrits et opérateur de marketplace « partagent » les données relatives aux internautes clients et exploitent celles-ci de manière autonome. en tant que responsable ou co-responsable, l’opérateur de marketplace doit remplir l’ensemble des obliga-tions issue de la réglementation informatique et Libertés dont l’obligation d’information, de collecte loyale, l’obligation de sécurité, l’obligation de mise en œuvre effective des droits d’accès, de rectification, d’opposition et bientôt de droit à la portabilité ou à l’effacement. s’il est considéré comme sous-traitant (hypothèse selon laquelle il n’agit que pour le compte des vendeurs s’agissant des données de leurs clients internautes), l’opérateur de mar-ketplace devra veiller à assurer la sécurité et la confidentialité des traitements de données. à ce titre, il s’interdira de procéder à des utilisations autonome de ces données, il veillera à interdire tout accès non autorisé ou encore à empêcher que ces données soient modifiées ou altérées.

#2 tout entrepreneur souhaitant développer une marketplace de-

vra prendre en compte les dispo-sitions de la loi macron du 6 août 2015. Désormais, chaque éditeur de plateforme est tenu de délivrer une information loyale, claire et transparente à l’ensemble de ses utilisateurs. il doit donc pour cela doter sa plateforme de conditions Générales d’Utilisation (cGU). Les modalités de référencement et de classement des offres de produit ou de services devront y être détaillées, au même rang que l’ensemble des conditions d’utilisation du service proposé par la marketplace, ou que les informations relatives à l’identité de l’éditeur.Par ailleurs, si la plateforme met en relation des consommateurs avec des professionnels, son éditeur sera tenu de fournir à l’ensemble de ses utilisateurs-vendeurs un espace leur permet-tant de remplir leurs obligations d’information du client final.concrètement, la marketplace devra être faite de telle manière à ce que le vendeur puisse commu-niquer ses conditions Générales de Vente (cGV) et ses propres mentions légales. ces obligations ne doivent pas être prises à la légère, puisque tout manquement peut entraî-ner des amendes pouvant aller jusqu’à 375 000 euros pour la société éditrice de la plateforme.

31 // Chapitre 2 // à savoir avant de sauter le pas

enfin, tout éditeur de plate-forme devra contractualiser ses relations avec l’ensemble des commerçants à qui il proposera de vendre leurs produits, par son intermédiaire, via la marketplace. Les conditions de la mise à dis-position d’une « e-boutique », et la détermination des responsa-bilités de chacun des partenaires pourront ainsi être organisées au sein de conditions Générales de service (cGs).

#3 Lorsqu’un client, consomma-teur ou non, procède à l’acquisi-tion d’un des produits ou services proposés par le marchand via la marketplace, il passe un ordre d’achat qui est relayé par l’opé-rateur jusqu’au marchand. Le client paie alors sa commande, en faisant transiter son ordre de paiement par la marketplace. La tentation est alors grande, pour tout éditeur de marketplace, d’encaisser ces sommes, et de les reverser ensuite au vendeur hébergé sur sa plateforme en y soustrayant sa commission.cependant, tout éditeur de plateforme doit se garder d’un

tel comportement puisqu’il est formellement interdit, pour toute plateforme, de procéder à l’en-caissement de sommes d’argent pour le compte d’autrui. L’éditeur de plateforme doit ainsi s’en tenir

à son rôle de simple prestataire technique.

La Directive 2007/64/ce de service de

Paiement (DsP)interdit à des

établisse-ments non bancaires de pro-céder à l’encaisse-ment pour le compte de tiers.

Une solution

fréquente consiste à

s’orienter vers des prestataires de

service de paiement

habilités à directement manipuler ces flux financiers, ou à en trans-mettre l’ordre.

#4 L’éditeur d’une place de mar-ché doit depuis juillet 2016 :- fournir une information loyale, claire et transparente sur les obligations fiscales et sociales qui incombent aux personnes réali-sant des transactions commer-ciales par leur intermédiaire, et ce à chaque transaction ;- adresser, en outre, à leurs uti-lisateurs, en janvier de chaque année, un document récapitulant le montant brut des transactions qu’ils ont perçu, par leur inter-médiaire, au cours de l’année précédente ;- faire certifier, par un tiers in-dépendant, avant le 15 mars de chaque année, le respect de ces deux obligations.ne pas pouvoir justifier du respect de ces trois obligations l’expose à une amende de 10 000 euros.

zoomun statut de courtier

Aux yeux de la loi, un opérateur de marketplace est considéré comme un courtier. Sa seule obligation : mettre les deux parties en relation. Il n’est pas partie prenante à la transaction qu’il facilite. Cela exclut tous les autres statuts (agent commercial, commissionnaire…) et présente un avantage important : une responsabilité limitée. L’opérateur de marketplace doit s’assurer que la transaction est possible au regard de l’identité et des finances des deux parties qu’il met en relation.La loi pour une République numérique, entrée en vigueur en octobre 2016, impose cependant trois grands principes : loyauté, transparence et clarté (lire ci-contre). Et attention : plus vous proposez de services, plus vous prenez de responsabilités.Autre point central, qui concerne les marketplaces de services de type Uber : plus elles imposent leurs règles dans les CGS, plus elles créent un lien de subordination. Concrètement, elles risquent alors des contrôles Urssaf et des requalifications en contrats de travail, avec des charges et arriérés de charges à verser qui peuvent atteindre des sommes très importantes.

32 // Chapitre 3 // clefs de succès

Retours d’expérience, de la part de fondateurs de marketplaces et consultants spécialisés.

chapitre 3

clefs de succès

33 // Chapitre 3 // clefs de succès

O n l’a vu, l’un des facteurs-clefs de succès, sinon « le » facteur-clef, reste la

double adhésion des vendeurs et acheteurs. comment créer ce climat de confiance ? Uber, qui permet aux utilisateurs de noter ses chauffeurs - et réciproquement - apporte une réponse très directe et pragmatique à la question.« Pour progresser, il faut aussi penser à la viralité, estime Olivier czapka (Lateos), en facilitant le bouche-à-oreille. Facebook s’inscrit nativement dans une logique virale, avec les partages, les Like, etc. en France, il a éclipsé “ copains d’avant ” car il était cent fois plus viral. Par ailleurs, des méthodes aussi basiques que les codes-promo d’Uber (le client parle d’Uber à tous ses amis pour récupérer des courses gratuites) font leurs preuves. effacez-vous au profit des vendeurs et acheteurs, mettez en avant la satisfaction des marques et des clients. La viralité oui, mais pour les faire parler, eux. il n’y a pas plus fort que la parole des utilisateurs eux-mêmes. »Les membres de la task Force,

répartis en trois équipes, ont été invités à lister les « peurs, craintes et réticences » des acheteurs, mais aussi des vendeurs d’une marketplace. ensuite, il leur fallait identifier des solutions pour répondre à chacun de ces blocages.

Les freins côté acheteurs...• Manque de notoriété de la marketplace ;• Craintes portant sur la Data Privacy ;• Qualité de la relation client et sAV ;• Service de garantie des vendeurs ;• Sécurisation du paiement ;• Conformité du produit reçu par rapport au produit commandé ;• Contrefaçons ;• Clarté du prix (différence entre prix affiché et prix final) ;• Crainte de ne pas recevoir le produit ;• Authenticité du vendeur (est-ce un vrai vendeur ?) ;• Respect des délais de livraison ;• Compétitivité tarifaire par

rapport au vendeur en direct ;• Expertise de la marketplace (distribue-t-elle sa propre marque ?) ;• Transparence du parcours ;• Problèmes de langage et de traduction (comme on peut en voir sur Alibaba) ;• Problèmes d’UX et UI ;• Authenticité des avis clients ;• Crainte de ne pas trouver les bons processus d’achat en BtoB (comment crée-t-on un compte fournisseur ?)

… et les solutions :• Apporter la garantie d’un SAV sans heurts, quel que soit le vendeur du produit ;• Décerner des labels, certifier les vendeurs ;• S’allier avec des tiers de confiance, par exemple pour proposer une page de paiement rassurante. même chose pour la logistique : il faut choisir les bons prestataires ;• Créer une charte, dans une logique de communication ;• Rester transparent et l l l

« La maintenance est un sujet-clef. L’éditeur d’une solution peut faire bénéficier ses clients de ce qu’il apprend ailleurs, dans d’autres secteurs d’activité. Je n’ai jamais vu un marché qui ne puisse en servir un autre, au moins partiellement. »[ Benoît Féron, co-fondateur d’Izberg ]

« IL FAut uNE ÉquIpE DÉDIÉE Aux MARChANDs : C’Est uNE ACtIVItÉ COMMERCIALE ChRONOphAGE quI DEMANDE

DIspONIBILItÉ & ExpERtIsE. Et sOyEz COMMERçANts : REpÉREz Et DIstINGuEz LEs “ tOp MARChANDs ”. ILs sONt

stRAtÉGIquEs pOuR VOtRE MARkEtpLACE. »[ Vincent Lorach - Lateos]

34 // Chapitre 3 // clefs de succès

dossier

clair sur l’usage de la donnée ;• Travailler sur la marque, pour qu’elle-même gagne en notoriété et devienne le point de référence. Vous pouvez communiquer clairement au client l’existence d’une offre marketplace : - Via un onglet dédié,- Via un espace en page d’accueil,- Via la lisibilité du prix en fiche produit,- Via la page de récapitulatif de commande.

Les freins côté vendeurs...• Absence de neutralité de la plateforme (le fait qu’elle favorise ses propres marques) ;• Crainte de ne pas se faire payer et inadéquation des modes de paiement ;• Problèmes techniques et connectivité ;• Commission de l’opérateur trop élevée ;• Perte de maîtrise de la stratégie commerciale et de la rentabilité ;• Possibilité pour l’opérateur

de la marketplace de copier des produits (s’approprier l’innovation du vendeur) ;• Sur-dépendance du chiffre d’affaires ;• Mécontentement des distributeurs historiques : comment rassurer les canaux traditionnels ? • Propriété de la donnée ;• Perte de la relation client ;• Problèmes dans le suivi de la vente, absence de fluidité des outils de gestion des ventes.

… et les solutions• Il faut une équipe dédiée au recrutement des vendeurs : c’est une activité commerciale chronophage qui demande de la disponibilité et une expertise. La qualité de cette équipe est fondamentale, car elle tisse des liens quotidiens avec les marchands partenaires.• Assurez-vous d’une bonne identification et sélection des marchands référents, suivie d’une intégration rapide de leur offre : travaillez le mapping avec les fiches produits du site et veillez à leur qualité, utilisez les bons outils (mapper, Akeneo) pour gérer l’import des catalogues et l’export des commandes vers les marchands.• Ensuite, vous pouvez fédérer et animer cette communauté des marchands, par exemple en animant des espaces collaboratifs (marché par marché) réservés aux vendeurs, afin qu’ils partagent leurs bonnes pratiques. enfin, soyez commerçants : repérez et distinguez les « top marchands ». ils sont stratégiques pour votre marketplace.

zoompaiement : bien choisir son prestataire

La problématique du paiement revêt plusieurs aspects :- Les solutions de paiement et leur coût ;- Leurs conditions ;- Les garanties de paiement ;- Le paiement des marchands ;- Les montants très importants en BtoB ;- Les droits de douanes et

autres questions juridiques ;- Le change ;- Le blanchiment et le financement du terrorisme ;- Le volet déclaratif (KYC - Know Your Customer : identification)Côté solutions de paiement, il faut bien comprendre qu’en tant qu’opérateur de marketplace, vous devrez choisir entre des prestataires qui sont des organismes bancaires, quand d’autres ne sont que des terminaux de paiement.à ces derniers, l’opérateur de Marketplace achète un abonnement + un prélèvement sur chaque transaction. Et il doit ensuite négocier avec sa propre banque, qui « se sert » elle aussi à chaque transaction. Il y a là un travail important à mener, car les coûts peuvent être réduits significativement si l’on se montre vigilant.

l l l

35 // Chapitre 3 // clefs de succès

P our clore la task Force, deux équipes ont été constituées, ainsi qu’un

jury composé de trois professionnels et incarnant la Direction Générale. Les deux équipes devaient s’affronter sur le choix de réaliser soi-même sa marketplace ou de la confier à un prestataire. Le premier groupe rassemblait des arguments en faveur de la solution « maison », tandis que le second se battait pour adopter une solution du marché. Le cas d’usage était celui de la vente de poissons via une marketplace opérant depuis la Bretagne et commercialisant ses produits jusqu’à la suisse ou l’Afrique.

De nombreux arguments ont été présentés et débattus (verbatim ci-dessous). « chaque cas est particulier, a conclu Benoît Féron (izberg). en 2012, j’ai créé ma propre marketplace, dans la mode féminine. La valorisation de l’actif était essentielle afin de pouvoir envisager un potentiel rachat dans le futur. et nous n’avions pas d’argent, uniquement du temps, avec deux développeurs et deux commerciaux. Faire soi-même permet de ne pas débourser d’argent. mais si j’en avais eu les moyens, j’aurais eu recours à une solution tierce, car le time to market représente déjà une perte d’argent. manomano, lui, a tout construit lui-même,

mais sur un marché qui n’était pas encore aussi concurrentiel que celui de la mode féminine en ligne. Attention également aux problèmes de systèmes obsolètes ou difficiles à mettre à jour si les équipes internes sont souvent renouvelées. La maintenance est un sujet-clef. L’éditeur d’une solution peut faire bénéficier ses clients de ce qu’il apprend ailleurs, dans d’autres secteurs d’activité. Je n’ai jamais vu un marché qui ne puisse en servir un autre, au moins partiellement. il y a des avantages et inconvénients de chaque côté : c’est vraiment très lié aux verticales que l’on adresse et au temps dont l’on dispose. »

solution sur étagèreou marketplace maison ?

Pour... le développement en interne

« il faut bien penser aux coûts de maintenance, pas seulement aux coûts d’acquisition. Une solution sur-mesure exprime rarement l’enveloppe globale, il reste des coûts cachés. On compare des choses qui ne sont pas comparables. Demandons aux prestataires leur structure de coût sur le long terme. »« Attention à la valorisation des actifs : si l’objectif est de vous faire racheter, vous avez vraiment intérêt à avoir développé la technologie en interne. ne chiffrez pas le ROi sur les seules ventes. »« incluez le budget Rh nécessaire. si vous développez le modèle en interne, vous allez trouver les collaborateurs les plus motivés. J’ai déjà entendu dire : “ Je mets deux personnes sur ma marketplace, l’une au social et l’autre à la technique ” ; si vous faites ça, c’est le crash assuré. »« Faut-il privilégier le First move Advantage ? Ou s’autoriser à prendre notre temps ? Pour aller vite, on peut commencer avec une solution d’éditeur et au bout d’un moment construire sa propre solution. mais est-ce que ça ne coûtera pas plus cher au final de tordre une solution existante que de créer la sienne ? »

Pour... le recours à un tiers

« nous connaissons notre marché, mais pas le monde des marketplaces. nous partons de zéro : nous avons besoin d’accompagnement. »« L’éditeur a déjà sélectionné un écosystème de partenaires fiables. »« On va gagner du temps, le time to market est l’argument-clef. »« Avec une solution externe, on anticipe les coûts car il y a un contrat. en interne, on risque des dérapages. »« Une solution toute faite nous apporte une richesse fonctionnelle : multi devises, multilingue, etc. »

36 // Chapitre 3 // clefs de succès

[ Stéphane Deux est GroupChief Information Officer. ]

étude de cas

europcar

Leader européen de la location de véhicules et

acteur majeur de la mobilité, le français Europcar n’a

pas l’intention de se laisser dépasser par l’arrivée de

nouvelles formes de mobilité. Le groupe est entré dans une

phase d’accélération de sa stratégie avec une ambition

forte pour le futur : « devenir un leader mondial des

solutions de mobilité ». Cette volonté pourrait s’incarner

dans une ou plusieurs marketplaces, actuellement

à l’étude.

d e l’explosion de Blablacar à l’arrivée imminente des voitures autonomes,

europcar étudie de près les bouleversements de son marché. « nous avons déjà intégré de longue date les fondamentaux de l’économie d’usage et de l’économie de partage dans ce qui est notre cœur de métier : la mobilité. La création de notre Lab, qui agit comme un incubateur d’idées, nous permet d’étudier les usages du marché de la mobilité et de rechercher de nouvelles opportunités auprès de l’ensemble des acteurs du monde de la mobilité, qu’ils

soient clients, partenaires ou consultants experts en technologie et mobilité », explique stéphane Deux, ciO du groupe.

élargir l’offreen juin dernier, europcar a annoncé un investissement minoritaire dans snappcar, une start-up spécialisée dans la location de véhicules entre particuliers. en 2014, il avait déjà racheté Ubeeqo : une solution bâtie sur l’auto-partage en entreprise.« Le point de départ de notre réflexion autour du modèle marketplace, ce sont bien ces

INTéGRER LES NOUvELLESFORmES dE mOBILITé

37 // Chapitre 3 // clefs de succès

nouvelles formes de mobilité, reprend stéphane Deux. nous devrons à terme proposer toutes les formes de mobilité, même si pour l’instant notre chiffre est réalisé en bonne partie sur notre cœur de métier. »Une marketplace Btoc permettrait à europcar de proposer à ses clients particuliers ces différentes solutions de mobilité et d’élargir sensiblement son offre.

plateforme btobmais c’est sur le marché BtoB qu’il sera sans doute le plus facile, dans un premier temps, de tester ce modèle. « nos clients grands comptes, dans leurs appels d’offres, commencent à demander l’accès à une plateforme globale pour que leurs salariés effectuent leurs réservations en direct. et ils s’intéressent déjà aux autres formes de mobilité que la location traditionnelle. »en soi, le modèle de la marketplace représente un prolongement naturel de l’e-commerce « classique », dont

europcar est déjà plus que familier. « nous disposons de canaux de distribution variés afin de mieux servir notre clientèle. Les réservations en ligne (internet direct et indirect ainsi que le smD - système mondial de distribution) représentaient 72 % du nombre total de réservations du groupe en 2016. »Plusieurs questions essentielles resteront à trancher, notamment sur le plan juridique, mais aussi sur le recours ou non

à un prestataire. stéphane Deux tend à privilégier la propriété de la technologie, que ce soit par rachat ou par développement interne.« mais attention, cela ne place pas l’it en sponsor de ces projets. nous sommes seulement un facilitateur qui se prépare à l’arrivée de ce type de besoins ; chacune de ces marketplaces potentielles est portée par un métier, notamment le marketing ou les Ventes. »

zoomCôté chiffres

• Une présence dans plus de 130 pays et territoires ; • 6 461 employés ;• 26 % de parts de marché dans les filiales pays en Europe où Europcar est présent (source : Euromonitor 2015) ;• Une flotte de 213 800 véhicules en 2016 ;• Trois marques principales : Europcar, InterRent et Ubeeqo.• Base clients : 5,5 millions de conducteurs.• CA 2016 : 2 151 millions d’euros.

« C’Est suR LE MARChÉ BtOB qu’IL sERA sANs DOutE LE pLus FACILE, DANs uN pREMIER tEMps, DE tEstER

LE MODèLE MARkEtpLACE. NOs CLIENts GRANDs COMptEs, DANs LEuRs AppELs D’OFFREs, COMMENCENt à DEMANDER

L’ACCès à uNE pLAtEFORME GLOBALE pOuR quE LEuRs sALARIÉs EFFECtuENt LEuRs RÉsERVAtIONs EN DIRECt.

Et ILs s’INtÉREssENt DÉjà Aux AutREs FORMEs DE MOBILItÉ quE LA LOCAtION tRADItIONNELLE. »

38 // Chapitre 3 // clefs de succès

[ Antoine Deshusses est Responsable Communication et Editorial Online. ]

étude de cas

Périal

Périal, spécialisé dans la « pierre-papier » (produits

d’épargne immobilière), commence à digitaliser son

activité commerciale.L’équipe souhaite avant tout

que ce virage profite à son réseau de distribution actuel,

tout en lui permettant de s’adresser directement aux

consommateurs. Une équation délicate qui demande de l’adresse et

beaucoup de pédagogie en amont.

L es métiers du groupe PeRiAL peuvent sembler hermétiques à qui

n’exerce ni dans l’Épargne, ni dans l’immobilier : il s’agit globalement de concevoir et de commercialiser des produits d’épargne qui s’appuient sur l’immobilier : scPi (sociétés civiles de placement immobilier) et OPci, ces derniers étant - dans les grandes lignes - des scPi qui mêlent de la pierre et des liquidités.ces investissements peuvent concerner l’immobilier d’entreprise ou l’immobilier tertiaire (crèches, ehPAD, commerces…).

Les produits sont principalement présentés et vendus au grand public par des conseillers de gestion en patrimoine (cGP), assureurs et banquiers notamment. Les clients finaux poursuivent tous le même objectif : placer leur argent de manière sécurisée et avec le meilleur rendement possible. PeRiAL travaille également pour des investisseurs institutionnels.

le métier s’interrogePlus encore que les assureurs, qui avaient bénéficié d’un relatif « répit » avant de se voir remis en cause par des modèles comme Lemonade,

« aPPORTER UNE PLUS-vaLUEà NOS PaRTENaIRES »

39 // Chapitre 3 // clefs de succès

l’épargne immobilière reste un secteur complexe et très encadré réglementairement, donc moins chahuté, car les bouleversements demandent plus de temps et de réflexion. « mais certains concurrents commencent à se lancer dans la vente en ligne (marketplaces comprises, comme chez moniwan) et quelques Pure Players apparaissent, tel Wesave, une structure adossée au géant du secteur Amundi », relève Antoine Deshusses, Responsable communication et editorial Online. « certains confrères choisissent de restreindre l’accès de leur marketplace aux seuls détenteurs d’un numéro cGP, c’est-à-dire qu’il faut déjà compter parmi les intermédiaires de l’opérateur, ou être recommandé par l’un d’eux. il est vrai que notre activité est soumise à l’Autorité des marchés Financiers (AmF) et que nous avons le statut de société de gestion, pas forcément facile à décliner en vente directe. il faut être très vigilant sur le lancement d’un nouveau canal de vente. »

« réchauffer » les leads« nos produits ont le vent en poupe, reprend Antoine Deshusses, car ils offrent une rentabilité supérieure à 4 %, ce qui devient rare. Or aujourd’hui,

moins de 20 % de nos ventes se font en direct. nous réfléchissons à la meilleure façon d’augmenter ces ventes directes, sans cannibaliser notre marché actuel. »Pour le moment, les commerciaux travaillent essentiellement par téléphone. L’équipe d’Antoine Deshusses a mis en place une stratégie de seO/ seA et de Lead nurturing. « notre site internet va évoluer progressivement pour devenir plus marchand, avec des fiches produits davantage tournées vers l’acquisition. nous songeons aussi à baisser le ticket d’entrée (actuellement de 5 000 euros), pour mieux correspondre à la clientèle du web. »concrètement, lorsque le client remplit aujourd’hui un formulaire de contact en ligne, le service clientèle vérifie que cet internaute n’est pas déjà intermédié, par une banque ou un cGP. « à terme, j’aimerais qu’en plus de faire ce renvoi, nous puissions apporter une plus-value, en donnant des informations sur la navigation du client, en qualifiant, donc en “ réchauffant ”, le lead pour nos partenaires cGP, en quelque sorte. »à plus long terme encore, une marketplace pourrait donc permettre à PeRiAL de proposer des packages diversifiés, en-dehors de ses propres

produits. et offrir des services complémentaires, comme le partage de retours d’expérience entre investisseurs, via la création et l’animation de communautés…L’option consistant à rejoindre une marketplace existante, en nouant des partenariats avec des métiers connexes, fait partie des solutions étudiées.« certes, l’idée pourrait inquiéter nos intermédiaires actuels, mais le but est bien de les valoriser. La principale difficulté est de développer un nouveau canal de distribution tout en améliorant les outils mis à la disposition de nos canaux traditionnels. »Un tel projet est encore loin d’être acté, mais il s’agirait pour le groupe d’un virage important et emblématique dans sa transformation digitale.

zoomCôté chiffres

• 2,8 milliards d’euros de capitalisation des fonds gérés.• 39 000 clients.• 470 immeubles en portefeuille.• 160 collaborateurs.

« NOtRE ACtIVItÉ Est sOuMIsE à L’AutORItÉ DEs MARChÉs FINANCIERs (AMF) Et NOus AVONs LE stAtut DE sOCIÉtÉ

DE GEstION, pAs FORCÉMENt FACILE à DÉCLINER suR tOus LEs CANAux Et tOus LEs suppORts DE DIstRIButION.

IL FAut êtRE tRès VIGILANt suR LE LANCEMENt D’uN NOuVEAu CANAL DE VENtE. »

éclairage

40 // Chapitre 3 // clefs de succès

plan de communication

les règles d’orSander Cisinski, directeur de La Netscouade et lui-même créateur d’une Marketplace BtoB en 2000, livre ses bonnes pratiques pour communiquer sur le lancement d’une marketplace.« On se pose souvent la question de la communication en bout de chaîne, au moment où l’on n’a plus beaucoup de temps. C’est exactement l’inverse de ce qu’il faudrait faire », affirme-t-il.

1. vous avez deux cibles distinctes : tenez-en compte« Une marketplace a la particularité de concilier deux grands types de public : les acheteurs et les vendeurs. ceux-ci ont des enjeux différents : vous devez donc leur servir un message différent. Les faire venir sur votre site demande de la pédagogie, de l’accompagnement, des promotions… et surtout un message adapté à chaque étape de la construction de votre marketplace. Vous allez en effet les suivre de bout en bout. Avec des objectifs qui vont varier dans le temps : recrutement, confiance, réassurance… essayez d’identifier par avance leurs questionnements pour être capable de répondre de manière pertinente le moment venu, voire pour anticiper leurs demandes et lever les freins. »

2. Pensez la communication en amont« cela ne veut pas dire qu’il faut communiquer très en amont, juste y réfléchir. sur le terrain, rares sont les

opérateurs de marketplace qui prennent les devants sur le chapitre de la communication. ils se limitent souvent à la communication de lancement, pour aller chercher des acheteurs et fournisseurs. Or,

les marketplaces bousculent les équilibres établis, les règles du jeu habituelles auprès des parties prenantes.trop tarder dans la communication, c’est laisser s’installer des craintes et de la méfiance vis à vis de la

41 // Chapitre 3 // clefs de succès

marketplace. Or, la confiance fait partie du socle du modèle et la rétablir une fois qu’elle s’est dégradée est infiniment plus difficile que de la créer au départ.»De manière générale, commencez par les décideurs internes. « Vous serez confronté à des blocages, des questions au niveau de la direction générale et de la direction des achats. il faut les convaincre et en faire des sponsors, leur permettre de se projeter d’un point de vue business. ensuite, communiquez vers toutes les parties prenantes pour les faire adhérer au projet. c’est une communication projet, qui a pour but d’engager les opérationnels. Attention, ne les lâchez pas pour autant par la suite. ce n’est pas parce que vous les aurez contactés très tôt dans le projet, que vous en aurez terminé avec eux. Au troisième stade seulement arrivent les acheteurs et vendeurs de la marketplace, à démarcher simultanément car vous comprendrez ainsi mieux leurs enjeux et réticences :

la compréhension des enjeux de l’un apporte souvent les réponses de l’autre. »

3. Fixez-vous des indicateurs de performance« c’est relativement facile en phase de lancement : le nombre de fournisseurs recrutés peut être un KPi associé à tel ou tel canal de communication. mais sur les phases plus amont, vous pouvez opter pour des indicateurs comme la mesure du temps écoulé avant la prise de décision. Bien sûr, vous ne pourrez l’imputer à votre seule politique de communication. mais si vous ne rencontrez pas d’opposition forte, de crise, c’est que vous aurez bien communiqué, vous aurez évité que les craintes des uns et des autres ne se transforment en points de crispation. »

4. Séquencez votre offre s’il le faut, pour préserver l’équilibre entre vendeurs et acheteurs

« sur une famille de produits donnée, si

l’on a un plan de recrutement déséquilibré entre acheteurs et vendeurs, on crée un effet déceptif et là encore pour un projet novateur, la déception coûte cher. La croissance doit se faire avec des recrutements cohérents, or on n’a pas forcément une fenêtre de tir très longue. On peut se donner plus de temps, mais cela veut dire qu’on travaillera par famille de produits, ou sur une dimension géographique si le marché s’y prête : y aller pas à pas constitue une bonne option. n’hésitez pas à séquencer votre offre. »

5. Soyez clairs sur le sujet « Qui est responsable de quoi »« toute la communication sur l’utilisation de la marketplace doit être bien traitée et bien alimentée en amont. ce sont des pièges faciles à éviter. expliquez précisément comment se passent les paiements, qui pilote la marketplace, qui contrôle la qualité… ces points essentiels peuvent faire l’objet de FAQ disponibles dès le lancement, faciles à trouver et limpides. »

« LA CONFIANCE FAIt pARtIE Du sOCLE Du MODèLE

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42 // marketplaces, les clefs du modèle

nos conseils

#1Lancez-vous pour conserver la relation directe avec votre clientLe modèle marketplace n’est plus une simple tendance, il est devenu un standard. il peut venir bouleverser votre entreprise, d’autant que par nature chaque opérateur de marketplace « phagocyte » la relation client. n’attendez pas que cela arrive. Ouvrir une marketplace vous permet de prendre la main, tout en maîtrisant finement les tendances de votre marché.

#2N’attendez pas : prenez le « First Mover Advantage »Gardez le contrôle, quitte à ce que l’activité marketplace ne soit pas rentable immédiatement

(Uber n’est toujours pas rentable et Airbnb n’est rentable que depuis 2016, après 7 ans d’existence).De nombreux acteurs n’ont pas vu venir le danger et ont réagi trop tard.capitalisez sur vos atouts : clients existants, réseau de distribution, organisation, fournisseurs, connaissance métier.soyez rapides : raisonnez en mode mVP, avec une première plateforme qui embarque les fonctionnalités indipensables pour se lancer. Vous perfectionnerez votre solution au fur et à mesure... Donnez-vous six mois maximum pour que ce mVP soit en ligne.Faites-vous accompagner par des experts pour définir votre proposition de valeur, Business model et Business Plan, votre

organisation et cible et votre solution technique.sécurisez votre lancement en anticipant les contraintes juridiques.

#3Ayez une vision projet globaleUn projet marketplace n’est pas qu’un projet technique. Pensez des le départ aux impacts internes, à accompagner le changement dans vos équipes. identifiez

sept recommandationspour être efficacePar l’équipe de Lateos.

43 // marketplaces, les clefs du modèle

et recrutez les bonnes compétences pour animer les communautés, gérer les vendeurs, le service après-vente, suivre les ventes, analyser l’activité des vendeurs... #4Assurez votre Go to Market :le dilemme de l’œuf ou la pouleenrôlez d’abord des vendeurs pour initier la « vitrine » et n’hésitez pas à leur proposer des avantages conséquents.embarquez-les sur la plateforme : communiquez de façon adaptée à leurs besoins, leurs craintes et leurs spécificités.Réfléchissez très tôt à votre communication externe.

#5Faites un choix technologique : solution maison ou solution du marché ?Pour arriver rapidement sur le marché, dans 80 % des cas nous conseillons un plan en deux parties :- commencez par une solution externe pour vous imposer et bénéficier de conseils d’experts. c’est également moins cher que de construire une solution sur mesure.

- si vous démontrez une vraie traction de la marketplace, envisagez de bâtir votre propre solution « maison » pour valoriser votre marque.

#6soyez un « dictateur » ! Vous êtes un tiers de confiance et la qualité de l’expérience utilisateur au sein de votre plateforme est l’un des éléments-clefs pour vous différencier. Définissez des règles fermes de gestion des vendeurs et faites-les respecter sans compromis possible.Parlez avec vos clients

(chat, téléphone...) et répondez à toutes leurs questions : ne leur donnez pas le sentiment d’être laissés en autonomie. #7Communiquez en continuPensez votre plan de communication au début du projet, et non la veille du lancement. Les acheteurs, les vendeurs et les équipes internes de la marketplace ont besoin d’entendre un discours clair à chaque étape du lancement. Pour stabiliser l’activité de votre marketplace, ne les abandonnez pas en cours de route.

le glossaire

Clientsociété ou particulier qui achète des produits et / ou services sur la marketplace (on parle aussi d’acheteur).

CommissionPourcentage pris par l’opérateur de marketplace, sur le montant des ventes réalisées par les marchands, pour assurer le service de mise à disposition et de gestion de la marketplace.

Comparateur ou Shopbot Le comparateur propose une liste de sites marchands en mesure de fournir le produit recherché par l’internaute.Autrefois classés par prix croissant, ces sites sont désormais plutôt classés par popularité... or , ladite « popularité » est souvent liée au fait d’être annonceur !Le modèle de rémunération le plus répandu des comparateurs est le coût par clic (cPc). Les comparateurs de prix peuvent être généralistes ou spécialisés. en 1999, le tout premier comparateur de prix français, toobo.com, lancé quelques mois avant Kelkoo, était l’œuvre de thierry Petit, actuellement DG de showroomprivé. Bien d’autres ont été lancés depuis : Kelkoo, Les Furets, Acheter moins cher, Le Lynx, shopzilla, trivago...

marketPlaceUne marketplace est une plateforme digitale qui met

en relation des acteurs qui proposent des produits ou services avec d’autres qui en ont besoin.La marketplace est à l’e-commerce ce qu’est le centre commercial au détaillant traditionnel. en plus sophistiqué toutefois, car si le centre commercial offre un flux continu de passants (et la marketplace, un flux continu d’internautes), la seconde propose des outils marketing permettant aux vendeurs de se démarquer. Le vendeur bénéficie d’une part d’une plateforme fluide et d’autre part d’un vivier potentiel de clients. en contrepartie, il reverse à la marketplace une commission sur ses ventes.à noter : il existe des marketplaces relationnelles, comme LeBoncoin.fr.

minimum viable product - mvP -Le mVP, pour minimum Viable Product, ou encore en français « plus petit produit viable », repose sur l’élaboration d’un prototype minimal en vue d’effectuer des tests de lancement tout en minimisant les coûts.

Net Promoter Score - NPS - indicateur de la satisfaction et de la fidélité client, le nPs évalue dans quelle mesure le répondant recommande une société, produit ou service à ses amis, ses proches ou ses collègues. concrètement, une unique question est posée :« Quelle est la probabilité que

vous recommandiez la marque / entreprise / produit / app à un ami ou un collègue ou à un membre de votre famille ? » Les réponses sont données sur une échelle de notation de 11 points, allant de 0 (tout à fait improbable) à 10 (tout à fait probable). selon la note donnée par le répondant, ce dernier est classé dans une des trois catégories suivantes : promoteurs (note de 9 ou 10) ; passifs (7 ou 8) ou détracteurs (0 à 6). Le net Promoter score est calculé ainsi : nPs = % de promoteurs - % de détracteurs.

Onboarding managementProcessus d’inscription et de validation des vendeurs sur la marketplace, permettant leur croissance rapide tout en contrôlant l’identité et la qualité de chacun d’eux.

Opérateur de marketplaceL’opérateur de la marketplace est l’acteur qui crée et gère la marketplace. il doit recruter les vendeurs (marchands) en fonction de sa stratégie business et les piloter sérieusement pour assurer le respect des promesses annoncées aux clients. il lui faut générer du trafic sur la marketplace pour en assurer le développement et se charger de la relation avec les clients de la marketplace.

Product Information management - PIm -Le Pim est un outil qui centralise et harmonise toutes

les informations marketing et techniques des catalogues produits des vendeurs d’une marketplace. il permet :- d’améliorer la qualité et la cohérence des données relatives aux produits sur tous les canaux,- de simplifier l’intégration des fournisseurs et des sources de données,- d’avoir une à vision à 360° des informations relatives aux produits.

proof of value expérience permettant de conforter ou d’infirmer le choix d’une nouvelle offre, d’une nouvelle méthode ou de nouveaux concepts. à la différence du Proof Of concept (POc), l’accent est porté sur l’apport de l’expérience en termes de ROi.

Seller Reviews & Scoringméthode d’évaluation des vendeurs par des retours sur expérience grâce à des fonctionnalités de scoring et d’évaluation (notations, règles de scoring, commentaires, alertes et gestion des incidents).

Service Information management - SIm -Voir à Pim : c’est le même principe, mais appliqué aux services.

Système de paiementsolution permettant de payer en

ligne les produits et/ou services achetés sur la marketplace, le plus souvent par carte bancaire pour les marketplaces Btoc.

Time To market Délai nécessaire pour le développement et la mise au point d’un projet ou d’un produit, avant qu’il puisse être lancé sur le marché.Avec le raccourcissement des cycles de vie des produits, il est devenu un facteur stratégique

majeur, en ce sens où une réduction caractérisée du time to market peut permettre à une entreprise et / ou une marque d’améliorer de manière significative sa rentabilité, mais aussi lui donner la possibilité de prendre un avantage concurrentiel décisif.

vendeursociété ou particulier qui propose ses produits et/ou ses services sur la marketplace.

Ouvrir sa Marketplace est un moyen redoutable pour devenir un acteur de référence sur son marché, de digitaliser son activité et d’en augmenter la monétisation en ligne, tout en maîtrisant parfaitement sa trésorerie. Lateos, Agence d’Open spécialisée dans le Commerce Digital, propose une offre de bout en bout permettant d’adresser les enjeux fonctionnels,

Bâtissons ensemble la Marketplace référente sur votre secteur

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Open, entreprise de services du numérique, accompagne au quotidien les entreprises et les organisations dans leur transformation industrielle et digitale. Son objectif : transformer les SI de ses clients pour répondre à leurs nouveaux Business Models digitaux et aux enjeux de Time-To-Market, d’agilité, de rapidité et d’expérimentations.

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IMAGINERle bon modèle pour développer votre Marketplace

DESIGNER & CONCEVOIRvotre marketplace de bout-en-bout

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ITÉRER & AMÉLIORER

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techniques et stratégiques, de la conception d’une marketplace sur-mesure jusqu’à son lancement et monitoring de la plateforme. Dans ce cadre, Lateos déploie un cycle agile et innovant en 7 étapes, basé sur son expertise e-commerce et son expérience d’intégrateur, pour construire des marketplaces BtoB, BtoC ou CtoC.

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Nos expertises IT et Digitales reposent sur une approche de bout en bout, basée sur un cycle agile et innovant en 7 étapes : Imaginer, Designer & Concevoir, Fabriquer, Tester, Opérer, Engager, Monitorer.

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Longtemps incarnée par les géants du web Amazon et ebay, puis par les « licornes » Uber

ou Airbnb, la marketplace est un modèle qui intéresse désormais les entreprises

traditionnelles, en Btoc comme en BtoB. Leurs motivations sont multiples : élargir la gamme, digitaliser l’activité de l’entreprise grâce à ce modèle de vente « parallèle », disposer d’un outil inédit de veille sur le marché… Dans

quel contexte une marketplace s’avère-t-elle la plus pertinente ? Pour quels produits ou

services ? Quelles opportunités ouvre-t-elle en interne (approvisionnements) ? Quelles sont les ressources requises ? Les réponses sont dans

ce livre.

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