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Jean-Jacques LAVILLE Senior Supply Chain Consultant, Icognitive Europe [email protected] À l’heure où la technologie permet tout ou presque, on ne supporte plus la moindre défaillance : le retard, l’erreur, la panne, la faillite du fournisseur,… deviennent de plus en plus inadmissibles. Le fonctionnement en juste à temps de nombreuses entreprises n’a fait qu’accroître cette peur de l’aléa. Le niveau de risque est devenu un des indicateurs à suivre, pour l’entreprise elle-même, mais aussi pour les mail- lons amont et aval de cette dernière. Les possibilités de défaillances des chaînes logistiques augmentent, c’est un fait. Nom- breuses sont les causes de cette augmentation de la vulnérabilité. Il est bien évident que les ruptures des chaînes logistiques ne sont pas uniquement l’effet d’évènements extérieurs tels que les catastrophes naturelles, les grèves ou bien encore les actes terroristes. Les supply chains étaient auparavant locales et intégrales, elles sont devenues mondiales et modulaires 1 . Accélérée par l’apport des Nouvelles Techno- logies de l’Information et de la Communica- tion (NTIC), la mondialisation des échanges et la globalisation des marchés pèsent lourde- ment sur l’apparition croissante des risques liés à la supply chain. Une concurrence accrue, une durée de vie des produits toujours plus courte, une demande toujours plus vola- tile sont autant de facteurs qui tendent à rendre le combat économique de plus en plus difficile et appellent des solutions innovantes et per- formantes. Simultanément, le développement de partena- riats induisant la réduction du nombre de four- nisseurs parfois jusqu’à la plus simple expression, le besoin de se recentrer sur ses activités de base pour optimiser la chaîne de création de valeur, ajouté aux différentes démarches Lean engagées dans les entreprises conduisent également à fragiliser les échan- ges. Aujourd’hui, l’accroissement de la réactivité et l’élévation du niveau de service qui consti- tuent des facteurs clé de la réussite écono- mique, se jouent dans un registre beaucoup plus global, beaucoup plus intégré. Ainsi que nous allons l’exposer plus loin, cette néces- saire globalité a un prix : l’accroissement des points critiques au niveau des nœuds et liai- sons du réseau supply chain. Ceux-ci doivent être identifiés, évalués et traités en vue de leur diminution ou éradication. Définitions Dans cet environnement, la gestion de la chaîne logistique est devenue fondamentale, en ce sens qu’elle peut fournir une différencia- tion concurrentielle. Cette gestion est donc de nature stratégique et nécessite la mise en œuvre d’un projet supply chain. Dans ce der- nier, la modélisation des processus doit être la première étape pour comprendre les opportu- nités d’amélioration de la performance. Une fois les processus modélisés, la discussion peut commencer pour déterminer quels élé- ments du processus peuvent vraiment être décrits comme facteur de vulnérabilité. Logistique & Management Vol. 14 – N°1, 2006 3 1 - John Paul, Directeur Icognitive Singapour Comment sécuriser sa supply chain ?

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Jean-Jacques LAVILLESenior Supply Chain Consultant, Icognitive [email protected]

À l’heure où la technologie permet tout ou presque, on ne supporte plus la moindredéfaillance : le retard, l’erreur, la panne, la faillite du fournisseur,… deviennent deplus en plus inadmissibles. Le fonctionnement en juste à temps de nombreusesentreprises n’a fait qu’accroître cette peur de l’aléa. Le niveau de risque est devenuun des indicateurs à suivre, pour l’entreprise elle-même, mais aussi pour les mail-lons amont et aval de cette dernière.

Les possibilités de défaillances des chaîneslogistiques augmentent, c’est un fait. Nom-breuses sont les causes de cette augmentationde la vulnérabilité. Il est bien évident que lesruptures des chaînes logistiques ne sont pasuniquement l’effet d’évènements extérieurstels que les catastrophes naturelles, les grèvesou bien encore les actes terroristes. Les supplychains étaient auparavant locales et intégrales,elles sont devenues mondiales et modulaires1.Accélérée par l’apport des Nouvelles Techno-logies de l’Information et de la Communica-tion (NTIC), la mondialisation des échangeset la globalisation des marchés pèsent lourde-ment sur l’apparition croissante des risquesliés à la supply chain. Une concurrenceaccrue, une durée de vie des produits toujoursplus courte, une demande toujours plus vola-tile sont autant de facteurs qui tendent à rendrele combat économique de plus en plus difficileet appellent des solutions innovantes et per-formantes.

Simultanément, le développement de partena-riats induisant la réduction du nombre de four-nisseurs parfois jusqu’à la plus simpleexpression, le besoin de se recentrer sur sesactivités de base pour optimiser la chaîne decréation de valeur, ajouté aux différentesdémarches Lean engagées dans les entreprises

conduisent également à fragiliser les échan-ges.

Aujourd’hui, l’accroissement de la réactivitéet l’élévation du niveau de service qui consti-tuent des facteurs clé de la réussite écono-mique, se jouent dans un registre beaucoupplus global, beaucoup plus intégré. Ainsi quenous allons l’exposer plus loin, cette néces-saire globalité a un prix : l’accroissement despoints critiques au niveau des nœuds et liai-sons du réseau supply chain. Ceux-ci doiventêtre identifiés, évalués et traités en vue de leurdiminution ou éradication.

Définitions

Dans cet environnement, la gestion de lachaîne logistique est devenue fondamentale,en ce sens qu’elle peut fournir une différencia-tion concurrentielle. Cette gestion est donc denature stratégique et nécessite la mise enœuvre d’un projet supply chain. Dans ce der-nier, la modélisation des processus doit être lapremière étape pour comprendre les opportu-nités d’amélioration de la performance. Unefois les processus modélisés, la discussionpeut commencer pour déterminer quels élé-ments du processus peuvent vraiment êtredécrits comme facteur de vulnérabilité.

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1 - John Paul,Directeur Icognitive Singapour

Comment sécuriser sa supply chain ?

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Simplicité de l’architecture des processus

Les supply chains doivent être rétrécies etsimplifiées. Les méthodes d’optimisation deprocessus visent à améliorer un processus ouune partie d’un processus en permettant ainside simplifier le fonctionnement des organisa-tions, de réduire les coûts, de fiabiliser les trai-tements, d’éliminer ou de réduire lesdéfaillances,…. Que ce soit en termes de pro-duits et de services, ou de processus, il estindispensable de « décomplexifier » tout cequi peut l’être afin de diminuer ou d’éliminerles potentielles interruptions de la chaîne.

Intégrité de l’architecture des processus

L’intégrité est définie comme l’état d’unechose qui a toutes ses parties. Appliqué àl’architecture des processus, elle constitue undes éléments primordiaux pour la sécurisationdes flux. Ceci concerne l’intégration des sys-tèmes d’information, la documentation desprocessus et la qualité des données. Uneabsence ou une mauvaise intégration des sys-tèmes d’information dans l’architecture desprocessus a pour conséquence une multipli-cation des risques et des coûts (saisiesmanuelles,…). Des outils tels que les portailsInternet,… sont, parfois, une parade à ce vec-teur de risque. L’absence de liens entre les dif-férents systèmes d’informations dans lasupply chain engendre des vulnérabilités,notamment par l’allongement des cycles,…

L’étendue des supply chains nécessite uneexpression claire des processus permise parune documentation standardisée et un langageadapté pour une compréhension de tous lesacteurs concernés. Si un processus n’a pas unedéfinition et une description claires et compri-ses des partenaires, les dysfonctionnements etles coûts associés risquent de perturber lacontinuité des flux.

Quant à la qualité des données, l’inexactitudevoire l’absence de données mène à des erreursde gestion opérationnelle ou des prises dedécisions allant à l’encontre des effetsescomptés. Les conséquences en termed’interruption des flux sont importantes. Ellespeuvent, à titre d’exemples se manifester sousforme de marchandises bloquées en douanes,refus de marchandises chez le client pournon-conformité de documentation, ou bienencore de factures bloquées chez le client quiinduisent un allongement du cycle d’encaisse-ment.

Notion de risques

La fatalité est le caractère de ce qui est inéluc-table. En corrélation avec cette notion de fata-lité, la fameuse loi de Murphy énonce que siquelque chose peut aller mal, cela se passeraeffectivement mal. Force est de constater quela fatalité peut exister mais les impacts surl’atteinte des objectifs peuvent être éliminésou limités. Trouver des solutions alternativespour assurer la continuité des flux est un vasteprojet, néanmoins indispensable qui doit fairel’objet d’une prise en compte dans une stra-tégie supply chain.

Dire que les risques sont inhérents à la vie desentreprises et donc aux flux qui y circulent eninterne comme aux interfaces est une évi-dence. Néanmoins, la perception de ces ris-ques est parfois difficile à cerner au regard desnombreuses définitions existantes.

On peut ainsi trouver différentes définitionsdu risque. Toutefois, l’incertitude quant àl’atteinte des objectifs est un élément com-mun à toutes les définitions. En revanche, cesdéfinitions se différencient par la manièredont elles caractérisent les résultats. Certainesprécisent que le risque a des conséquencestoujours défavorables, tandis que d’autressont ouvertes à l’alternative au danger : lerisque peut être source d’opportunités.

De son côté, le petit Larousse définit le risquecomme un danger, un inconvénient plus oumoins probable auquel on est exposé. Ceci estune approche limitative du concept de risque.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor duCanada (2003) quant à lui, reconnaît « la pré-sence d’une connotation négative dans la des-cription du risque mais il est évident que lesdéfinitions évoluent. En effet, les débats et lesdiscussions foisonnent concernant une défini-tion générique acceptable du risque, quireconnaîtrait le fait que, lorsqu’il est bien éva-lué et géré, le risque peut être source d’innova-tion et d’opportunité ». Bien qu’appliquéedans le cadre de la vie politique, cetteapproche intéressante de la définition durisque permet de déterminer clairement que lerisque peut aussi être source de création devaleur.

Le risque est lié à l’incertitude qui entoure desévénements et des résultats futurs. « Il estl’expression de la probabilité et de l’incidenced’un événement susceptible d’influencerl’atteinte des objectifs de l’organisation ».

Ceci laisse entendre qu’il faut entreprendreune analyse quantitative et qualitative avant

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de s’orienter vers des décisions concernantd’importantes menaces pour l’atteinte desobjectifs stratégiques.

Eu égard à l’importance de cette notion derisque, en l’occurrence parce qu’il est autantsource de pertes que de gains, le risque doitêtre maîtrisé dans un seul cadre : celui de lastratégie générale de l’entreprise. C’est pour-quoi, la prise en compte par la direction géné-rale des « aspects risques » de la supply chainest fondamentale. La sécurisation des systè-mes informatiques ou le management des ris-ques projets et financiers sont courammentintégrés dans la vie des entreprises. Concer-nant la supply chain de nombreux progrès àreste à faire.

Avant d’avancer, il est important de faire unlien entre risque et processus. On peut, ainsi,considérer que la notion de risque est le pointde départ de l’analyse des processus. Illus-trons ceci par un exemple. Le processus for-mation a pour mission de réduire le risque demanquer de compétences. Ceci confirme qu’ilexiste bien un lien entre risque et processus, etplus précisément que tout processus est uneparade à un ou des risques (Talhi, 2003)

Notion de risques liés à la supply chain

Selon Caroline Thierry et Jacques Lamothe(2006), les risques liés à la supply chain peu-vent être définis comme : des évènementsincertains ou imprédictibles, affectant un ouplusieurs partenaires de la chaîne logistiqueou ses processus, qui peuvent influencer(négativement) la réalisation de ses objectifs.

« Supply Chain Risk refers to an uncertaintyor unpredictable event affecting one or moreof the parties within the supply chain or itsbusiness setting, which can (negatively)influence the achievement of your own busi-ness objectives ».

Cette approche est issue de celle de JamesDeloach (2000) qui précise dans son ouvrage« Enterprise-wide Risk Management », que lacapacité à maîtriser le risque et à contrôlerl’incertitude sont des éléments clé pourl’obtention d’un avantage concurrentiel.

Notion de gestion des risques

Comme c’est le cas pour la définition durisque, de nombreuses définitions de la ges-tion du risque sont disponibles. Dans certai-nes, la gestion du risque correspond auprocessus décisionnel, à l’exclusion de l’iden-tification et de l’évaluation du risque, tandisque dans d’autres, elle comprend l’ensemble

du processus, identification et évaluation durisque inclus.

Ainsi, la gestion du risque est définie par leSecrétariat du Conseil du Trésor du Canada(2003) comme « une approche systématiqueservant à déterminer la meilleure voie àprendre en cas d’incertitude en identifiant, enévaluant, en comprenant, en communiquantles questions liées aux risques et en prenantdes mesures à leur égard ».

Cette définition est intéressante dans le sensoù elle tend à prendre en compte l’ensembledu processus de la gestion des risques. L’effi-cacité de la gestion du risque tient essentielle-ment à la création d’une culture de gestion durisque qui appuie la vision et les objectifsde l’entreprise.

Le but de la gestion des risques est d’identifierles problèmes potentiels (ou avérés) avantqu’ils ne surviennent ou se produisent à nou-veau, de sorte que les activités de traitementdes risques puissent être planifiées et déclen-chées afin de mitiger les impacts défavorablessur l’atteinte des objectifs.

Notion de gestion des risquesliés à la supply chain

Il existe peu de définitions de la gestion desrisques spécifiques à la supply chain (Thierry,Lamothe, 2006).• “Supply chain risk management is a syste-

matic process of managing unwantedevents or unwanted change in the supplychain. » (Stan Smith, Quality Plus Enginee-ring, 2005)

• “Supply chain risk management is the ma-nagement of external risks and supply chainrisks through a co-ordinated approachamong the supply chain partners to reducesupply chain vulnerability as a whole”.(Ziegenbein, 2004)

• “Supply chain risk management can be de-fined as the identification and managementof risks within the supply chain and risksexternal to it through a co-ordinated ap-proach amongst supply chain members inorder to reduce supply chain vulnerabilityas a whole.” (Artebrant et al, 2003)

Ces définitions décrivent un processus de ges-tion d’évènements ou de changements nondésirés au sein de la chaîne logistique. La ges-tion des risques liés à la supply chain se situecomme l’indique la figure 1, à l’intersectionde deux démarches : la gestion de la supplychain et la gestion des risques.

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L’impact des risques qui ne peuvent pas êtretotalement éliminés doit être réduit et dessolutions alternatives doivent assurer la conti-nuité des flux.

La gestion des risques liés à la supply chain nepeut pas être dissociée des autres risques del’entreprise car les risques ne sont indépen-dants les uns des autres. En d’autre terme,toute décision concernant un risque supplychain peut engendrer une répercussion sur unautre risque (financier, commercial,…).

La figure 2 permet donc de comprendre queles risques liés à la supply chain doivent fairepartis d’une gestion globale et intégrée des ris-ques.

« La gestion intégrée des risques est un pro-cessus systématique, proactif et continu pourcomprendre, gérer et communiquer le risquedu point de vue de l’ensemble de l’organisa-tion. Il s’agit de prendre des décisions straté-giques qui contribuent à la réalisation desobjectifs globaux de toute l’organisation ».(Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada,2003).

En outre, prenant en considération les diversesinteractions stratégiques, il est à noter que lagestion intégrée des risques offre de nouvellesopportunités de création de valeur pourl’actionnaire.

Selon une enquête récente auprès de grandesentreprises menée par Booz Allen Hamilton,les trois-quarts des dirigeants s’inquiètent dene pas être suffisamment préparés aux risquesqui pourraient sérieusement compromettreleur activité et par voie de conséquence leursrésultats financiers.

Chaque entreprise doit se doter des moyens decommunication et des processus internes etexternes qui permettront une meilleure ges-tion proactive de ses risques.

Etapes de gestion des risques

L’identification des risques doit être perma-nente et effectuée par tous les acteurs de lasupply chain. Cet exercice d’identification est

d’autant plus constructif, si un groupe detravail est constitué dans cet objectif. De nom-breuses sources peuvent aider à l’identifica-tion : référentiels, retours d’expérience,….

L’identification des risques se décompose enquatre activités : délimitation du champd’investigation, analyse systématique desévènements clés, exploitation du retourd’expériences, formalisation des résultats.

Une fois, les risques identifiés, ils doiventfaire l’objet de comparaison et de hiérar-chisation afin de fournir les éléments néces-saires pour décider de l’importance dutraitement. Ceci consiste à évaluer la criticitéde chaque risque et déterminer si le risque estacceptable ou non selon les critères choisis.

« L’analyse des modes de défaillances, deleurs effets et de leur criticité (AMDEC), estun outil précieux qui permet d’identifier lespriorités dans la gestion des risques liés à lachaîne logistique » (Christopher, 2005).

La criticité est évaluée par le produit des troisfacteurs suivants : la probabilité d’occurrence,la probabilité de détection et la gravité.

Le système d’évaluation permis par ce produitest ensuite consigné dans un tableau de prio-rité permettant la mise en évidence des pointscritiques.

Nous reviendrons par la suite sur l’AMDECcar elle constitue un des outils de la politiquede gestion des risques liés à la supply chain.

Quant au traitement des risques, son objectifest d’apporter une action préventive ou cor-rective. Cette réponse doit rendre et mainteniracceptable les risques identifiés et évalués.Ceci réside, pour l’essentiel, à établir et à tenirà jour un plan d’actions de traitement de ris-ques pour minimiser voire éliminer les ris-ques. Les risques non éliminés sont appelésrisques résiduels.

Différents types d’actions peuvent être mis enœuvre pour contrer les défaillances identi-fiées :• actions d’élimination : consiste à annuler

les causes du risque,• actions de réduction : consiste à diminuer la

criticité du risque jusqu’à un niveau jugécomme acceptable. Les leviers pour la ré-duction des risques peuvent être une baissede la gravité, de la fréquence ainsi qu’unemeilleure détectabilité. Il est possible deconjuguer les actions sur les trois critèresde manière simultanée,

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Figure 1 : Supply Chain Risks Management As The Intersection ofSupply Chain Management and Risk Management

Source : Paulsson, 2003

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• actions de transfert ou de partage : dans lamesure où le risque ne peut pas être ramenéà un niveau défini comme acceptable, ilconvient de mettre en œuvre des actions vi-sant à négocier la prise en compte du risquepar un tiers (interne/externe). Avant toutequelconque action, ce tiers, en charge durisque, sera bien entendu jugé plus aptepour assurer le traitement du risque,

• actions de réévaluation : le but est de trans-former un risque inacceptable en risque ac-ceptable. D’autres méthodes d’analysespeuvent, éventuellement, aboutir une dimi-nution de la criticité,

• actions de financement du risque : Lorsquele risque ne peut être réduit et qu’il jugéinacceptable, on peut alors financer cerisque. Ceci peut être, par exemple, un in-vestissement pour du stock, … .

Enchaînons avec le suivi des risques. Cetteaction de surveillance des risques consiste àvérifier périodiquement l’évolution des ris-ques et l’apparition de nouveaux risques. Ilpermet également de contrôler que la commu-nication des risques avec les divers acteurs dela chaîne est bien assurée, que la capitalisationdes informations est effective, et que l’avan-cement et l’efficacité des actions de traitementsont mesurés. (Afnor, 2003)

Le management des vulnérabilités de la sup-ply chain nécessite la mémorisation des ris-ques ainsi que la capitalisation des réponsesapportées. Cela doit permettre l’approfondis-sement de la connaissance des risques d’inter-ruption de la chaîne et l’accroissement de laréactivité d’intervention à chaque niveau de lachaîne

Cette capitalisation implique une documenta-tion périodiquement mise à jour afin de don-ner l’état général des risques encore encouruset de suivre l’état d’avancement des actionsde traitement mis en œuvre.

Typologies des risques liésà la supply chain et identificationdes vulnérabilités

Les risques peuvent être répartis en deuxtypologies : les risques internes et les risquesexternes. Abordons, en premier lieu, les ris-ques internes.

Risques liés à la conception

La conception de nouveaux produits est uneactivité fondamentale pour un grand nombred’entreprise. Au regard de l’accroissement de

la concurrence, elle est d’ailleurs, un des élé-ments fondamentaux permettant la pérennitéde l’entreprise, à un détail près : la nécessité deconfigurer une supply chain efficace et effi-ciente dès la phase de conception.

Une conception faite sans prise en considéra-tion de contraintes de la chaîne logistiques’expose à des risques principaux qui sont detrois ordres : ne pas livrer les produits dans lestemps pour le lancement (Time To Market), nepas livrer les quantités suffisantes pourrépondre à la demande (Time To Volume), nepas générer les marges escomptées (Time toBenefit).

Risques liés aux processus achat etapprovisionnement

Certaines entreprises sont contraintes à tirervers le haut les performances de certains deleurs fournisseurs stratégiques, afinqu’elles-mêmes, puissent maintenir leursrésultats, voire tout simplement continuer àfonctionner.

Preuve à l’appui, en 2002, « Land Roverannonce qu’elle va devoir stopper la produc-tion de son 4x4 Discovery car son fournisseurunique de châssis, UPF Thomson est en liqui-dation. Il fallait alors six mois à Land Roverpour retrouver un nouveau fournisseur. Ilsn’eurent donc d’autres choix que de financerUPF Thomson pour leur permettre de pro-duire les châssis tant désirés ». (Christopher,2005).

Alors que les fournisseurs contrôlent (parfois)jusqu’à 80 % du coût final des produits,l’importance stratégique du « sourcing » etson rôle déterminant au sein d’une « supply

Figure 2 : les risques liés à la supply chain, 2006

Source : Ecole des Mines d’Albi – Carmaux (Caroline Thierry et Jacques Lamothe)

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chain » efficiente est évident. Parallèlement,le choix de fournisseurs ainsi que la détermi-nation de son nombre, sont des exercices à ris-ques. Sur la partie amont de la supply chain,prendre en considération un ou des fournis-seurs de rang 2 ou 3 requiert la mise en placed’une politique d’achat innovante.

Sans être exhaustif, les risques liés à ces pro-cessus sont l’absence de classification desfamilles de produits, l’absence ou l’insuffi-sance d’audit des fournisseurs, un rapport deforce entre le client et le fournisseur inappro-prié, l’absence de communication de prévi-sion au fournisseur, l’absence d’intégrationdes stratégies achat et approvisionnementdans la stratégie supply chain, l’incompatibi-lité des stratégies achat et approvisionnementavec les autres stratégies de l’entreprise etavec les objectifs stratégiques, le manqued’indicateurs clés pertinents, la mauvaisemaîtrise des opérations logistiques liées auxflux amont (redondances des contrôles,..), lanon prise en compte de coût total de posses-sion, le manque de visibilité du au cloisonne-ment.

Les risques essentiels liés aux fournisseurssont la méconnaissance des fournisseurs stra-tégiques, l’unicité d’un fournisseur de rang n,l’absence d’alternative en cas de défaillancesd’un fournisseur unique, l’achat de produitsbrevetés à un fournisseur unique, la localisa-tion des fournisseurs stratégiques, dépen-dance du fournisseur envers un autre clientimportant, dépendance envers le systèmeinformatique du fournisseur, le manque de fia-bilité des fournisseurs (qualité, délai) rang n,le manque de compétitivité des fournisseurs,le manque d’aspect contractuel dans une rela-tion de partenariat, le manque de réactivité etde flexibilité, la faillite d’un fournisseur derang n, l’absence de démarche qualité du four-nisseur, les défaillances d’un sous-traitant dufournisseur, le manque de visibilité du plan-ning des mises à disposition, le non respectpar le fournisseur des réglementations et del’environnement, l’absence de plan de conti-nuité des flux, les risques liés à la chaîne detransport (grèves, litiges, malveillance,…).

Défaillances du processus « fabriquer »

« Le processus fabriquer de la supply chaintransforme les ressources obtenues par appro-visionnement en biens et services suivant lesspécifications définies et les règlementationséventuelles » (Cohen et Roussel, 2005).

Soumis à d’importantes révolutions au coursde ces deux dernières décennies, les systèmes

de gestion industrielle formalisés par leprocessus fabriquer sont source de nombreuxrisques d’interruption de la chaîne logistique.

Bien que, transformer, soit le seul terme àretenir si l’on aborde la notion de création devaleur, la réalisation effective de celle-ci estétroitement liée à la maîtrise des flux. Ilconvient donc de s’assurer que toute lesactions sont entreprises pour mettre sous con-trôle le processus fabriquer afin qu’il livrecette valeur tant attendue. Transformer etvendre la valeur de la transformation avec lesmeilleurs ratios économiques et financierspossibles nécessitent la prise en compte desvulnérabilités du processus fabriquer. S’ils’interrompt, les ratios se dégradent et lesparts de marchés peuvent diminuer.

Les principaux risques de ce processus sont :• le manque d’intégration du processus fabri-

quer avec les autres processus,• l’inadéquation du processus fabriquer avec

les objectifs stratégiques de l’entreprise,• le manque de flexibilité et de réactivité,• l’absence de démarche qualité et d’amélio-

ration continue,• le manque de visibilité,• le manque de fiabilité des équipements de

production,• l’absence de relation client/fournisseur en

interne,• l’absence d’identification des goulets

d’étranglement,• la présence d’opérations sans valeur

joutée (manutentions et contrôles inutiles,stockage important d’encours, retouches,temps de changement trop longs, attentesdes produits entre les opérations, suivi ad-ministratif,… ),

• les risques opérationnels (fabrications dé-fectueuses, pannes machines, ralentisse-ments, erreurs administratives, rupturesd’approvisionnement, accidents, absen-téisme),

• le manque d’indicateurs clés pertinents,• l’absence d’alternative en terme de ressour-

ces énergétiques,• l’absence de soupapes de sécurité en terme

de capacité,• une mauvaise utilisation des ressources de

production,• le manque ou l’absence de communication

interne et externe.

Vulnérabilités du processus « distribuer »

« Le processus distribuer recouvre toutes lesactivités permettant d’exécuter une com-

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mande, de la préparation du devis à la récep-tion du paiement » (Cohen &Roussel, 2005).

Les principaux risques liés au processus « dis-tribuer » sont :• le manque d’intégration du processus dis-

tribuer avec les autres processus,• l’inadéquation du processus distribuer avec

les objectifs stratégiques de l’entreprise,• le manque de flexibilité et de réactivité,• l’absence d’une démarche qualité et amé-

lioration continue,• le manque de visibilité,• difficulté pour gérer les promotions, le

manque ou• l’absence de communication interne et ex-

terne,• le manque ou l’absence d’anticipation,• la constitution de stocks de sécurité impor-

tants,• les ruptures de stocks,• le mauvais dimensionnement des actifs,• la mauvaise organisation de la distribution

physique,• la mauvaise appréhension des typologies

de produit (grande dimension, pondé-reux,…),

• l’absence de gestion des prévisions des be-soins en produits finis,

• la mauvaise définition du maillage du ré-seau de distribution,

• l’obsolescence du stock,• les risques liés à la chaîne de transport (grè-

ves, litiges, malveillance,…).

Risques liés aux ressources humaines

Les risques liés aux facteurs humains sont lemanque de formation, l’incompétence, l’ina-daptation à l’emploi, l’indisponibilité (acci-dent, maladie, congés), les départs non voulus(hommes clés), le turn-over important, fuitede compétences, fuites d’informations straté-giques, la culture, la malveillance, le manqued’éthique, le manque de motivation, l’organi-sation inadaptée, les difficultés d’encadre-ment, la concentration du savoir, le manque dediffusion des connaissances. (Grégoire,2005).

Risques liés à l’informatisation desprocessus supply Chain

L’ampleur est telle qu’il s’impose d’aborderles risques liés à l’utilisation d’Internet dansles processus supply chain. Il est évident quel’utilisation d’Internet dans les processus de lachaîne logistique contribue à la baisse descoûts et à l’amélioration des relations entre lesacteurs du processus supply chain.

En revanche, si Internet peut faire partie deséléments constituant un avantage concurren-tiel, il peut, à l’inverse, s’avérer être un véri-table cauchemar et une gouffre financier sicertaines règles ne sont pas respectées enamont de sa mise en œuvre, notamment enmatière de sécurité.

Outre les vulnérabilités liées à la politique desécurité, les principaux risques liés au projetd’information des processus supply chainsont : l’achat avant formulation des besoins, lanon intégration avec les autres outils de ges-tion de l’entreprise, la dispersion fonction-nelle (vouloir tout implanter en même temps,élargissement du périmètre du projet), unedirection non suffisamment impliquée, unchangement des acteurs clés du projet, deséquipes indisponibles, des analyses etmaquettages insuffisants, le non respect desstandards, un chef de projet travaillant seul, lereconduction à l’aveugle de l’organisationactuelle.

Abordons maintenant les risques externes etles réseaux.

Risques liés aux systèmes d’information(liens avec les partenaires)

Passer de l’entreprise globale à l’entrepriseétendue nécessite d’avoir acquis la capacité àcommuniquer avec les autres acteurs de lachaîne logistique.

Les risques liés à l’intégration des systèmesdes partenaires du réseau sont : un systèmed’information interne trop spécifique nécessi-tant une mise au standard coûteuse voireimpossible, une dépendance trop grandevis-à-vis des systèmes des partenaires, le nonrespect des contraintes réglementaires enterme de standards de communication, lemanque de compétence interne lié aux systè-mes d’information, le manque de soutien de ladirection, le manque de sécurisation des don-nées des entreprises partenaires, le manque detransparence.

Risques liés à la gestion de la demande

L’incertitude est le risque majeur de la gestionde la demande. Comme déjà évoqué, cemanque crucial de visibilité pénalise lourde-ment les processus amont et, in fine, la bonnelivraison au client.

L’effet Bullwhip (Forrester) désigne uneamplification des variations de la demande aufur et à mesure qu’on s’éloigne du consomma-teur final. La courbe, par son augmentation dela variabilité, en remontant vers l’amont de lachaîne, s’apparente à un grand fouet. Cette

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augmentation de la variabilité rend lademande encore plus incertaine. Les varia-tions deviennent plus importantes (augmenta-tions ou diminutions), brusques et moinsprévisibles en amont. Elles sont ainsi demoins en moins en phase avec la demandefinale du consommateur.

Ainsi, les risques liés à l’effet “Bullwhip” sontnombreux. Citons de façon non exhaustive :prévisions complexes et trop erronées, gestiondes capacités difficile, risque élevé de ruptu-res de stock et faible qualité du service client,planification de production difficile et révi-sions fréquentes des programmes.

Outre les risques liés à la gestion de lademande, il existe aussi des « risques clients ».Ceux-ci résident, pour l’essentiel dans la pos-sibilité d’avoir des clients au poids tropimportant, et aux risques liés à leur solvabilité.

Risques liés à l’externalisation

Bien que certaines industries aient pour desraisons historiques ou de typicité de marchéschoisi l’intégration totale (faire), l’externali-sation (faire-faire) est une tendance lourde quise dégage.

Si les avantages et opportunités qu’elle per-met ne sont plus à démontrer (variabilisationdes charges, mutualisation des ressources,recentrage sur le cœur de métier,…), il estabsolument nécessaire de mettre en évidenceles risques liés à une décision d’impartition.• social : management du changement, trou-

bles sociaux ;• know-how : perte de l’expertise interne ;• contrôle des opérations : perte du contrôle

direct, gestion de la qualité et de la sécurité,contrôle des coûts et politique de factura-tion, gestion des litiges ;

• indépendance : risque de dépendance logis-tique, visibilité de ses activités chez un tiersprestataire, pérennité du prestataire (finan-cière et stratégique) ;

• technologique : capacité du prestataire à in-tégrer la technologie du client.2

Il convient de souligner que les risques liés àune externalisation peuvent être plus bienimportants si cette dernière se réalise dans lecadre d’une délocalisation hors des frontières.Parmi les risques supplémentaires, on peutajouter des risques tels les risques politiques,la variation à la hausse du montant des droitset taxes,…

Risques environnementaux,règlementaires, fiscaux et climatiques

Ces risques sont signalés pour information etne font pas l’objet du présent article. Néan-moins, mettre en place une supply chain sécu-risée requiert la prise en considérationd’autres critères de risques que ceux évoquésjusqu’à présent. Ces risques, pouvant devenirnombreux en fonction de l’importance de lasupply chain, sont très souvent du à des con-traintes additionnelles. Celles-ci pèsent par-fois lourd sur la performance de la chaîne,c’est en cela qu’elles présentent des risques àne pas négliger.

Mise en place d’une politique degestion des risques liés à la supplychain : Mise sous contrôle despoints critiques de la supply chain

L’ensemble des vulnérabilités doit être inté-gré dans un système permettant aux directionsd’obtenir la meilleure gouvernance possibleau regard des objectifs fixés par les actionnai-res. Tous les risques évoqués sont, in fine, desrisques de non performance pouvant mettre àmal la réalisation effective des objectifs.

Force est de constater qu’un certain nombrede défaillances, d’aléas se produiront, malgréla mise en œuvre de bonnes pratiques etimpose donc, de pouvoir proposer des répon-ses rapides pour limiter les coûts d’interrup-tion des flux.

En effet, selon Brindley (2004), l’impact desdéfaillances de la chaîne d’approvisionne-ment est caractérisé par deux éléments clés : lecoût et la durée. Brindley montre ainsi queplus la réponse à la vulnérabilité est longue àêtre mise en place, plus l’impact est fort etplus les coûts sont élevés.

Trouver des alternatives aux risques, ou toutau moins réduire leurs impacts impose ledéploiement d’une politique de gestion desrisques liés à la chaîne logistique.

Les 4 « R » de la supply chain

Mettre en œuvre une politique de gestion desrisques nécessite, en premier lieu, la présenta-tion des objectifs de la gestion des risques,c’est-à-dire de la philosophie du risque dansl’entreprise. Ceci consiste, en l’occurrence, àmettre en exergue le risque comme sourced’opportunités (dans la mesure où il a étéidentifié et mesuré comme acceptable). Ela-borer une politique de gestion de risques liés àla supply chain implique la création d’une cul-

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2 - Roques T. (2006),Professeur Bordeaux Ecole de

Management, Intervention ISLI

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ture à la gestion du risque dans la chaîne logis-tique. Cette gestion doit concourir à rendre lasupply chain réactive, fiable, robuste et rési-liente.

Réactivité

Selon Biteau (2003), « la réactivité est la capa-cité d’un système à répondre, dans un tempsdonné, à une sollicitation extérieure ». Depuisl’avènement du juste à temps, l’acceptation duretard est devenue improbable. La capacité àrépondre aux exigences des clients dans desdélais toujours plus courts est devenue fonda-mentale. Mais ceci ne suffit plus. Il faut que lachaîne soit capable de répondre rapidement àdes besoins changeants : la flexibilité qui per-mettra au système d’être réactif est donc unenotion clé. Cette agilité fournit, d’ailleurs, unavantage concurrentiel.

Réponse fiable

Fournir une réponse fiable réside en la livrai-son de ce qui a été demandé. Mais cette fiabi-lité est difficile à obtenir si, comme nousl’avons évoqué, l’incertitude est grande. Cettedernière concerne, entre autres, la demandefuture, la capacité des fournisseurs à honorerune promesse de livraison ou la qualité d’unproduit.

L’un des vecteurs clé de l’amélioration de lafiabilité réside dans l’augmentation de la visi-

bilité du pipeline. Cette dernière figure parmiles priorités de gestion car elle permet à lachaîne logistique d’être moins vulnérable.

Robustesse et résilience

Le petit Larousse définit la robustesse commela capacité d’un système à être résistant.Appliquée aux processus supply chain, larobustesse est la capacité d’une chaîne à résis-ter aux perturbations imprévues.

Selon Christopher et Rutherford (2004), unprocessus robuste est un processus qui estcaractérisé par une faible variabilité. En outre,ils précisent que les principes Lean viennentcorroborer cette définition. La faible variabi-lité des processus nous amène, naturellement,à la pratique des Six Sigma. Nous reviendronsplus loin dans l’exposé sur cette démarche.Christopher ajoute que les processus robustessont flexibles et donc capables de s’adapterrapidement.

L’information est également fondamentalepour assurer la robustesse de la chaîne, àcondition qu’elle soit gérée de manière colla-borative et dans l’objectif d’assurer une plusgrande visibilité des risques potentiels.

Pour finir tout changement dans la configura-tion des actifs modifiant le profil des risques,il est alors indispensable d’analyser le nou-veau profil de risques. La figure 9 résume les

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Figure 9 : Supply Chain Management, créer des réseaux à forte valeur ajoutée

Source : Christopher, 2005

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différentes étapes à mettre en place en vued’améliorer la résistance de la chaîne logis-tique.

La résilience est une notion applicable à beau-coup de domaines. En physique, la résilienceest l’aptitude d’un corps à résister aux pres-sions et à reprendre sa structure initiale. Enpsychologie, il s’agit de la capacité à vivre, àréussir, à se développer en dépit de l’adversité.

Le concept de résilience que Boris Cyrulnik3 autilisé pour comprendre comment certainsenfants soumis à des chocs traumatiques pou-vaient se réparer a inspiré les auteurs del’ouvrage « La résilience dans l’entreprise »(Dentz, Bailli, 2005), qui l’ont appliqué auxchocs auxquels les entreprises sont soumisesaujourd’hui.

Appliqué à la supply chain, la résilience, est lacapacité de revenir à un état stable après uneperturbation (défaillance d’un fournisseur,augmentation imprévue de la demande,…).

Christopher et Rutherford expliquent claire-ment, dans «Creating supply chain resiliencethrough agile Six Sigma » qu’une chaîne trop« maigre » peut, à un certain stade, ne plus êtrerésiliente de manière optimale. Ceci est repré-senté par la figure 10.

Christopher décrit un exemple typique dansson ouvrage « Créer des réseaux à forte valeurajoutée » : En 1997, Toyota voit ses lignes deproduction stoppées, par un incendie qui adévasté les locaux d’un fournisseur straté-gique. Rendu vulnérable par excès de min-ceur, cette supply chain Toyota n’avait pourun type de composants qu’un seul et uniquefournisseur. Conjugué aux pratiques du juste àtemps, l’effet fut immédiat. Ceci conduit àdire que la robustesse et la résilience sont desqualités indispensables qui doivent caractéri-

ser les supply chains, mais chacune d’entreelles doit s’attacher à trouver le juste équilibreentre ces deux qualités afin d’obtenir la meil-leure performance possible.

Le tableau 2 résume les points communs,divergences, et complémentarités des chaîneslogistiques, à la fois robuste et résiliente.

Mise en place d’une équipe responsable dela continuité de la supply chain

Composition et objectif

Assurer la mise en oeuvre d’une politique degestion des risques supply chain, nécessitedavantage que la mise en place d’un groupe detravail temporaire. Une véritable équipeformée aux techniques de gestion des risqueset des flux est indispensable. Elle doit être per-manente et multifonctionnelle.

Cette équipe doit permettre d’assurer la conti-nuité des flux permettant ainsi la sécurisationde la supply chain. L’équipe responsable de lacontinuité de la chaîne devra tracer le profildes risques afin de mettre en exergue lesopportunités de réduction de risque et de cal-culer les gains possibles.

Axes de travail de l’équipe

Il s’agit d’apporter une réponse cohérente auregard des objectifs stratégiques. Bienentendu, la compréhension et la maîtrise desprocessus internes de l’entreprise doivent êtrela première étape dans la gestion des risquespermettant de la sorte, la mise en avant desmenaces critiques.

Maîtrisant ses propres vulnérabilités, l’entre-prise peut alors déployer une stratégie deréduction des risques issus du réseau ainsiqu’un plan de fonctionnement en modedégradé puis élaborer des solutions pourrecouvrer rapidement un fonctionnementoptimal.� Donner la priorité aux générateurs de

profitsIl est indispensable de repérer les éléments(actifs, processus, sous processus, activi-tés,…) qui génèrent le profit et qui soutien-nent les objectifs stratégiques et convientdonc de centrer les efforts d’analyse sur lesinterruptions avérées ou probables qui ontle plus d’impacts.

� Localiser les points de vulnérabilitéLes points de vulnérabilité sont, de ma-nière récurrente, caractérisés par un élé-ment dont dépendent beaucoup d’autres(goulot d’étranglement,…), un degré élevéde concentration (fournisseur unique, site

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Figure 10 : Finding the Optimal Level of ‘leanness’

Source : Christopher & Rutherford, 2004.

3 - Cyrulnik B., neuropsychiatre.Connu pour avoir développé le

concept de « résilience »

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de fabrication unique, client ayant un poidstrop important dans le chiffre d’affaire,…),des flux sans alternatives (passage d’unebarrière douanière,…), des flux en associa-tion avec des zones géographiques, des in-dustries ou des produits à hauts risques(pays en guerre, activités sensibles- trans-ports aériens ou maritimes-,…

� Les scénarios typesLes entreprises leader évaluent régulière-ment les menaces liées à la supply chainqui pèsent sur l’atteinte des objectifs straté-giques. Elles utilisent des outils de modéli-sation de la chaîne logistique pour simulerles impacts d’une crise. Nous reviendronspar la suite sur un exemple d’outil de modé-lisation et d’analyse de la supply chain : lemodèle SCOR (Supply Chain OperationsReference).

� Développer des réponsesLes réponses apportées pour contrer les ris-ques sont de deux ordres : les approchestraditionnelles basées sur les redondances(augmentation des stocks,…) et les appro-ches basées sur la flexibilité (conception deproduits basée sur l’agilité, fabricationstransférables d’un site à l’autre, visibilitéde la chaîne, formation transversale descollaborateurs,…).

Les réponses apportées doivent être propor-tionnelles aux risques et faire l’objet d’unsuivi. Par ailleurs, pour un risque donné, letype de réponse peut être amené à évoluer carles conditions économiques, les règlementa-tions ou encore les innovations sont dans uncontexte de perpétuel changement.

Quelques exemples de réponses

Prenons tout d’abord l’exemple de la concep-tion. Au regard de l’importance de la détermi-nation des coûts lors de la conception, ilconvient d’intégrer le plus tôt possible lesfournisseurs stratégiques. Le temps perdurésultant de changement après validation dufournisseur, mène à l’introduction de nou-veaux problèmes, et a souvent comme consé-quence le retard du lancement du produit surle marché.

Pour éviter cet écueil, l’Earlier SupplierInvolvement (ESI) (Brindley, 2004) peut êtredéfini comme un processus consistant à faireparticiper un fournisseur avant ou pendant laphase de conception d’un produit. Le Time ToMarket constitue un avantage concurrentielcertain mais il implique l’intégration desfournisseurs dans la conception.

Ceci permet de répondre à la nécessité d’obte-nir des lancements de produits fréquents et

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Tableau 2 : The characteristics of robust and resilient supply chains

ROBUST SUPPLY CHAIN RESILIENT SUPPLY CHAIN

"Lean thinking" central to supply chain Risk management central to supply chain strategy

A culture of quality awareness A culture of risk and quality awareness

Internal quality control Internal and external risk management

Responsive to reasonable variation in input Responsive and capable of sustained response tosudden and significant shift in input

Supply chain velocity Supply chain acceleration & deceleration

Low inventory levels throughout with strategic safety stocks

Spare capacity minimised throughout Critical path spare capacity in manufacturing,storage space and process capability

Lean process Mix of Lean and Agile processes

Efficient processes ———————————————> Effective processes

Strong ———————————————> Scalable/Adaptable

Processes are stable and under control

Non-value adding activities and processes removed

Supply chain output variability is minimised

Source : Christopher & Rutherford, 2004, “Creating supply chain resilience through agile Six Sigma”

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rapides, à la recherche de réduction des coûtsde développement des produits, à l’assuranced’obtenir la satisfaction des clients.

Une des conditions principales sera l’aug-mentation de la confiance envers les fournis-seurs par davantage de transparence. Bienentendu, pour assurer la confidentialité, ilconvient de ne pas négliger les aspects juridi-ques.

Concernant l’amont de la supply chain lesactions possibles sont l’intervention auprès dufournisseur en cas de crise logistique majeureet pilotage de plans de rattrapage, la mise enplace d’une démarche de prévention des ris-ques de retards de livraison (analysecharge/capacité des fournisseurs), la mise enœuvre d’outils de pilotage et suivi en tempsréel des fournisseurs, la segmentation desfamilles de produits pour segmenter les tech-niques d’achat et d’approvisionnement,l’application de best practises telles que latandardisation des composants, la gestionpartagée des approvisionnements, la consi-gnation de stocks, les prévisions collaborati-ves, la standardisation des supports demanutention, l’utilisation des N.T.I.C.,…,l’intégration du flux amont avec les autresflux de l’entreprise et du réseau supply chain.

Quant au processus de fabrication, la diminu-tion des défaillances liés aux flux industrielsest étroitement liée à la mise en œuvre de bestpractises qui mettent quasi systématiquementen avant le bien fondé du principe du LeanManufacturing. «Il consiste à gérer les proces-sus et ressources au plus juste, plutôt que de“tirer” davantage sur ces ressources » (Hoh-mann, 2006)4.

C’est ce qu’exposent, dans leur ouvrage« Lean Thinking », Womack et Jones, en2003. Ils y décrivent les cinq étapes fonda-mentales d’une démarche Lean : spécifier cequi fait ou crée de la valeur pour le client, iden-tifier le flux de valeur, favoriser l’écoulementdu flux, tirer les flux et viser la perfection.

Les outils associés au Lean Manufacturingsont, entre autres : le 5S, le changement rapidede production (SMED), l’améliorationcontinue du poste de travail (Kaizen), le dis-positif anti-erreur (Poka-yoke), les sept gas-pillages, observer et agir sur le terrain, laflexibilité des équipes, l’équilibrage destâches entre opérateurs, le système Kanban,…

Par ailleurs, travailler de manière efficace surles goulets d’étranglement est une autrenécessité pour assurer la continuité des flux.La théorie des contraintes (Goldratt, 2002) se

concentre sur les performances des ressourceslimitées pour améliorer la performance glo-bale d’un système.

Quant aux processus « distribuer » et « gestionde la demande », la réponse aux risques passe,entre autres, par une plus grande visibilité,une meilleure anticipation, et une collabora-tion accrue. En effet, la collaboration est unvecteur clé de la continuité des flux.

Les chaînes logistiques sont souvent sujettes àde fortes incertitudes et instabilités, et les ris-ques encourus par les acteurs sont assez éle-vés. Dans un tel environnement, si l’on veutdiminuer ces vulnérabilités et améliorer lesperformances tant locales que globales, il estnécessaire de mettre en place des coopéra-tions au sein de la chaîne. Pour convaincre lesdifférents acteurs de la nécessité de cette col-laboration, basée de manière substantielle, surle flux d’information, il s’avère indispensablede mesurer les risques et enjeux liés àl’échange des informations et aux processusde traitement de cette information au sein dela chaîne. Une collaboration plus étroite per-met d’augmenter la visibilité et une meilleureanticipation des aléas. La collaboration estdonc résolument fondamentale pour l’obten-tion de processus de gestion de la demande etde la distribution sécurisés.

Le niveau de collaboration dans la chaîne estétroitement lié au niveau de maturité del’entreprise concernant le concept de supplychain. L’élévation du niveau de maturité per-met un accroissement du chiffre d’affaire et dela marge, une réduction du coût des produitsvendus et des coûts liés à la supply chain (cf.Grille de maturité Kevin Mac Cormack). Enoutre, selon Douglas Kent, Directeur de lasociété eknotion et instructeur SCOR, le meil-leur moyen de sécuriser la supply chain estd’accroître le niveau de maturité de la supplychain.

La boîte à outils

Gestion des risques : apport de la modélisa-tion

« Comprendre la supply chain » correspond,selon Christopher (2005) à la première étaped’une gestion des risques liés à la chaînelogistique. Comprendre, c’est saisir le sens dequelque chose, pouvoir décrire, pouvoir défi-nir. Au regard de la rapidité des changementsimposée par les nouveaux règlements, le mar-ché,…, savoir définir, être capable de décrire,pour s’adapter rapidement aux évolutions estessentiel. Ceci implique donc d’avoir la capa-cité d’identifier les chemins critiques.

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4 - Hohmann C.www.membres.lycos.fr/hconline

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Il convient, dès lors, de savoir à quels endroitsdu réseau (nœuds et liaisons) sont placés ceschemins critiques. Connaître, mesurer et trai-ter ces derniers conduit à assurer la continuitédes flux.

Les chemins critiques sont souvent caractéri-sés des délais importants, une unique sourced’approvisionnement, une dépendance enversdes infrastructures (ports, entrepôts, SI,…),des goulets d étranglement, un niveau élevéde risques identifiables sur les processus,…

Cartographier les flux et les points de défail-lances de ces derniers constitue donc uneétape cruciale dans la gestion des risques.Nous avons pris l’exemple du modèle SCOR(Supply Chain Operations Reference model)qui est connu et reconnu par de nombreuxacteurs importants.

Exemple du modèle SCOR

Le modèle SCOR est développé par le SupplyChain Council (SCC) depuis 1996. Le SCCest une association mondiale regroupant prèsde 1000 membres, industriels, distributeurs,éditeurs de logiciels, acteurs du transport et dela logistique, universités, souhaitant confron-ter, développer et partager leurs expériencesdu supply chain management.

Le modèle SCOR définit une démarche, desprocessus, des indicateurs et des best practisespour représenter et évaluer la supply chain.

L’apport du modèle SCOR dans la gestion desrisques liés à la supply chain peut être résuméde la manière suivante : il peut permettre demieux appréhender la gestion des risques et leniveau d’analyse grâce une approche tant sys-témique que globale et donc :• d’intégrer la situation actuelle dans un envi-

ronnement (mapping des process,..)=>identification des défaillances,

• d’évaluer l’état actuel et l’état désiré avec labase de métriques proposée par le SCC. Lebenchmarking peut fournir une aide à lafixation des objectifs de l’état désiré. Onpeut alors évaluer le niveau de risque. Leniveau de risque est en fin de compte le del-ta entre l’évaluation de l’état actuel et l’éva-luation de l’état désiré,

• de repositionner les résultats obtenus avecd’autres outils type AMDEC dans un cadreglobal permettant ainsi d’assurer la cohé-rence des actions qui seront entreprises,

• de proposer des actions de traitement desrisques par la mise en œuvre de best practi-ses répertoriées par le modèle (meilleurespratiques du moment).

La représentation opérée par l’intermédiairedu modèle permet la mise en évidence depotentielles sources uniques d’approvisionne-ment, de ruptures organisationnelles, de trai-tements redondants, de flux d’informationempruntant des circuits tortueux,… Lemodèle SCOR conduit donc à l’identificationdes chemins critiques de la supply chain(nœuds et liaisons). Ceci est essentiel car il estnécessaire de centrer ces ressources sur lespoints critiques.

Le modèle SCOR permet de rendre cohéren-tes, les actions de diminution des défaillancesentre elles, afin que la gestion des risquess’inscrive dans un cadre d‘action qui soit glo-bal et non pas local.

Dans le cadre de la mise en place d’une poli-tique de gestion de risques, le modèle SCORdoit être associés à d’autres démarches,méthodes et techniques d’analyse telles queSix sigma, AMDEC, le Lean,… car le modèleSCOR ne propose que peu de méthodes d’ana-lyse permettant d’identifier les causes racinedes points critiques.

Concept et application de l’AMDECà la supply chain

L’AMDEC a été employé pour la premièrefois à partir des années 60 dans le domaine del’aéronautique pour l’analyse de la sécuritédes avions. Sa mise en œuvre s’est longtempscantonnée à une utilisation dans le cadred’études de fiabilité sur du matériel. Bienqu’ayant subi de nombreuses critiques duesau coût et à la lourdeur de son application, ellereste néanmoins une des méthodes les plusrépandues et l’une des plus efficaces. Diffé-rents types d’AMDEC existent. Celui quiintéressera le présent travail, est l’AMDECprocessus.

L’AMDEC est un des outils permettantd’aboutir à la maîtrise des risques. Celle-ciconsiste à prévoir les perturbations potentiel-les ou à mettre en exergue les risques exis-tants, puis à établir et à mettre en œuvre desactions préventives dans le but, soit d’éviterque la défaillance ne se concrétise, soit d’ensupprimer ou d’en diminuer l’impact.

Bien entendu, il ne s’agit pas de prévoir tousles risques, en revanche, en s’appuyant surl’expérience et sur les problèmes les plus fré-quents, le but consiste à identifier les aléasrendant ou risquant de rendre une ressourcecritique (goulot d’étranglement, fournisseurunique,…).

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L’AMDEC permet de mesurer la criticité desrisques puis initie la mise en place de plans deréduction de risques afin d’obtenir une supplychain qui soit robuste et résiliente. La maîtrisedes risques permet d’améliorer la producti-vité, la ponctualité ainsi que d’optimiser lafiabilité des processus.

La maîtrise des risques à l’aide de la méthodeAMDEC permet de mener des actions préven-tives sur des perturbations potentielles ou avé-rées, c’est à dire de résoudre les problèmesavant que ceux-ci ne se présentent. Si cetteméthode est suivie tout au long du processus,le flux en sera amélioré et de l’impact desdéfaillances majeures diminué.

Toutefois, l’AMDEC nécessite une connais-sance poussée de la question à étudier. Engénéral, un brainstorming avec plusieurs per-sonnes impliquées dans le processus estnécessaire.

L’indispensable et importante disponibilitédes acteurs rend, parfois, difficile la mise enplace de l’AMDEC. Ceci constitue l’une desprincipales faiblesses de cet outil.

Autres outils appuyant la gestion et la maîtrisedes risques

Le premier outil est le Supply Chain EventManagement (SCEM) qui est un concept qui apour objet le pilotage de chaque étape des pro-cessus de la supply chain. A chaque étape sontsurveillés les évènements qui interviennent eten cas de perturbation, les informations sontremontées instantanément aux différentsacteurs. Le SCEM permet de répondre auxévènements non planifiés sur une based’exception. Il a donc un intérêt tout particu-lier dans l’amélioration du taux de service(repérer les anomalies et y remédier, informerles clients, etc.). Cet outil permet d’améliorerla visibilité de la chaîne et donc d’assurer lacontinuité des flux.

Notons que les logiciels de SCEM font le lienentre les logiciels de Supply Chain Executionet les logiciels de Supply Chain Planning. Ilspermettent de rendre visible les ruptures deflux alors qu’il est encore temps de mettre enplace un scénario alternatif.

Une des limites du SCEM tient à l’importancede bien intégrer l’ensemble de la supply chain,ainsi que tous ses acteurs (fournisseurs etclients compris). Une collaboration totale etun langage commun sont indispensables aubon fonctionnement du système.

Abordons maintenant l’identification parradiofréquence, ou RFID (Radio Frequency

Identification), qui est une méthode pourstocker et récupérer des données à distance enutilisant des marqueurs appelés « Tag RFID ».Les Tag RFID sont de petits objets, tels quedes étiquettes autoadhésives, qui peuvent êtrecollées ou incorporées dans des produits. LesTag RFID comprennent une antenne associéeà une puce électronique qui leur permet derecevoir les demandes et de répondre auxrequêtes radio émises depuis l’émet-teur-récepteur.

Son apport pour la sécurisation de la supplychain est significatif car il permet une meil-leure identification, une meilleure traçabi-lité et la garantie de la cohésion del’information par des outils intégrés. Des con-traintes existent, malgré tout l’intérêt de cettenouvelle technologie pour la diminution de lavulnérabilité de la chaîne. Le coût et l’indis-pensable implication des acteurs de la chaînefigurent parmi les contraintes majeures decette implémentation.

Enfin le concept Six Sigma est une méthodo-logie élaborée par Motorola dans les années80. A cette époque, Motorola avait de grosproblèmes pour satisfaire ses clients et sou-haitait donc trouver une méthode afin d’opti-miser ses processus de fabrication.

Six Sigma a ensuite été perfectionnée pard’autres groupes, tel que General Electric,l’ayant mise en oeuvre avec succès. Les résul-tats engendrés ont été pour l’essentiel laréduction des problèmes inhérents à la nonqualité (rebuts, reprises, retouches, retours,pertes de temps, problèmes de communica-tion, blocages aux interfaces des processus etactivités,...) et une meilleure exploitation desressources (optimisation des processus, utili-sation optimale des machines et des autreséquipements, amélioration des temps decycle,…).

Le Six Sigma est un concept simple : c’estl’élimination de la variation et des défauts, etdes chances de variation et de défauts dans lesprocessus. On peut l’utiliser dans tous lesdomaines.

Cependant, le Six Sigma peut être aussi vucomme un concept complexe :• c’est une vision, une philosophie qui doit

apporter aux clients la certitude de livraisondu produit ou du service sans défaut.

• c’est un indicateur (une mesure standard) :le Sigma,

• c’est un outil de comparaison avec les meil-leurs (Benchmarking),

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• c’est une Méthode (Define, Measure, Ana-lyze, Improve, Control).

Le but de Six Sigma est d’améliorer rapide-ment, de façon continue et importante lesprocessus en éliminant la variation. Cetteméthodologie est utilisée pour améliorer lesprocessus, les produits et les services, pourréduire les coûts de toutes sortes et amélio-rer la qualité.

L’objectif est simple : satisfaire le client enayant des processus sans défaut. De plus, leSix Sigma est un changement de culturepositive et profonde avec à la clé, des résul-tats financiers réels.

La maîtrise des défaillances de la supplychain passe par la maîtrise des variationsincontrôlées des processus qui se traduisentpar une flexibilité réduite pour suivre lademande des marchés. On comprend alorsle rôle fondamental que peut jouer SixSigma dans une politique de gestion des ris-ques

Conclusion

Le risque, à la fois synonyme de menaces etde source de création de valeur est devenuélément indispensable à considérer dans lagestion de la supply chain, tout comme l’estdéjà pour la gestion de projets, la gestion deproduits ou la gestion financière.

Identifier, évaluer et traiter les risques de lasupply chain est donc devenu un enjeu stra-tégique pour l’entreprise. Véritable diffé-renciation concurrentielle, la supply chaindoit être capable de répondre aux sollicita-tions du marché dans des conditions optima-les. Malgré les aléas susceptibles de laperturber, celle-ci doit posséder la capacitéd’être à la fois robuste et résiliente.

Sécuriser sa supply chain, c’est répondre àla promesse faite au client dans les condi-tions définies, mais il est, parfois, bien diffi-cile d’y parvenir.

Une collaboration étroite, une plus grandevisibilité, une intégration étendue des pro-cessus informationnels et physiques sontdes conditions indispensables à la sécurisa-tion de la supply chain.

Toutefois, la principale difficulté de la ges-tion des risques, n’est pas technique, maisliée aux hommes qu’il faut impliquer etmobiliser. Chacun doit pouvoir s’approprierle processus de changement, gérer ses crain-tes ou ses incompréhensions, être rassuré

sur le pourquoi, le comment et connaître le butà atteindre.

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