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Le Musée américain, Bath Le retour du Md_y/Sozver Dans le Somerset, près de la ville de Bath, si riche en ensembles architecturaux de style cLGe~rgian’7, se déroule une expérience unique en son genre : Claverton Manor, château qui se dresse sur l’épaulement d’une colline, abrite désormais le premier musée américain installé hors des États-Unis. Ce château a été construit en 1820 dans le style néo-grec en vogue à cette époque (fig. zj) par sir Jeffry Wyatville, architecte de George IV, pour remplacer le manoir du petit hameau de Claverton, situé plus bas au flanc de la colline. Ce qui n’est pas le moins surprenant, c’est que cette entreprise est due entièrement à l’initiative de deux particuliers, M. Dallas Pratt, de New York, et le regretté John Judkpn, citoyen anglais naturalisé américain. Les moyens financiers nécessaires ont été fournis par la Fondation Halcyon, créée précédemment à New York par M. Pratt. Pendant plus de deus ans, de vastes recherches ont d’abord été menées pour réunir des objets datant du début de l’histoire américaine. Les premiers envois, qui suivaient à peu près, en sens inverse, l’itinéraire emprunté par le &gy$’oower trois cent quarante ans auparavant, ont commencé à arriver en I 9 j 9, et le musée a été ouvert au milieu de 1961. L’histoire des colonies américaines remonte maintenant à trois siècles environ, et au cours du développement spectaculaire que le pays a connu depuis lors, beaucoup de monuments et de vestiges de l’époque des pionniers ont été laissés à l’abandon, ou même volontairement détruits par la hâte impitoyable de nombreuses générations par G. IV. R. Nicho11 plus récentes d’Américains, qui leur ont prttféré les symboles modernes du Nouveau- Monde. De plus, l’image de la période coloniale et des premiers temps de l’existence du jeune et dpamique État avait été ternie par une propagande inepte et, sans doute plus profondément et plus largement encore, par les déformations et exagérations des “épopées” made in Holl~wood. Ceux qui ont patronné la fondation du musée estimaient cependant, comme l’a dit M. Pratt, que “certains aspects du patrimoine américain sont extrêmement séduisants : les intérieurs accueillants et soignés de l’époque coloniale, les grandes cheminées brûlait un feu de bois, les meubles, la nourriture traditionnelle (si différente des aliments congelés, séchés, ou tout préparés, que consomment aujourd‘hui habituellement les Américains) ; en bref, cette ambiance qu’ont récemment recréée, de fason si ingénieuse, nombre de musées américains locaux. C‘est d’ailleurs dans une atmosphère de ce genre que le projet a pris naissance. “Ce fut, comme le rappelle M. Pratt, au cours d’un week-end en Nouvelle-Angleterre, alors que nous étions entourés de souvenirs américains d’avant l’ère des “produits congelés”, que l’idée nous vint de partager avec nos amis anglais le plaisir que nous procuraient certains des aspects encore existants de l‘Amérique de l’époque colo- niale.” Mais et comment ? La réponse à la seconde question était simple: en créant un musée. La première question était plus difficile à résoudre. La réponse fut trouvée tout à fait par hasard, lorsqu’une importante résidence de campagne située à Freshfort, dans le Somerset, fut mise en vente. Non loin de là s’élevait à l’origine le manoir de Claverton, simple hameau qui avait cependant joué un rôle assez notable dans l’histoire d’Angleterre. E n I 8 19, ce manoir était si délabré que son propriétaire, George Vivian, demanda à sir Jeffry Wyatville de le remettre en état. Mais Wyatville, considérant qu’une telle opération serait trop coûteuse, obtint de son client, non sans peine d’ailleurs, la permission de démolir le manoir et d‘édifier une autre résidence un peu plus haut, sur la colline qui domine le hameau. Un an après, il avait construit un bâtiment de proportions imposantes, bien que d’une esthétique parfois discutable et dont l’attrait tenait surtout au site choisi : il s’agissait d’une clairière sur un épaulement boisé d‘où l’on jouit d’une vue magni- 23. THE AMERICAN Mussuiï, Bath. Façades sud et est de Claverton Manor (1820). L‘intérieur seul a ktk restauré en vue de l’installation des collections, des bureaux et des appartements. 23. South and east facades of Claverton Manor (1820). Only interior alterations have been made to house the exhibits, offices and residen- tial flats. 277

The American Museum, Bath

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Le Musée américain, Bath

Le retour du Md_y/Sozver

Dans le Somerset, près de la ville de Bath, si riche en ensembles architecturaux de style cLGe~rgian’7, se déroule une expérience unique en son genre : Claverton Manor, château qui se dresse sur l’épaulement d’une colline, abrite désormais le premier musée américain installé hors des États-Unis. Ce château a été construit en 1820 dans le style néo-grec en vogue à cette époque (fig. z j ) par sir Jeffry Wyatville, architecte de George IV, pour remplacer le manoir du petit hameau de Claverton, situé plus bas au flanc de la colline.

Ce qui n’est pas le moins surprenant, c’est que cette entreprise est due entièrement à l’initiative de deux particuliers, M. Dallas Pratt, de New York, et le regretté John Judkpn, citoyen anglais naturalisé américain. Les moyens financiers nécessaires ont été fournis par la Fondation Halcyon, créée précédemment à New York par M. Pratt. Pendant plus de deus ans, de vastes recherches ont d’abord été menées pour réunir des objets datant du début de l’histoire américaine. Les premiers envois, qui suivaient à peu près, en sens inverse, l’itinéraire emprunté par le &gy$’oower trois cent quarante ans auparavant, ont commencé à arriver en I 9 j 9, et le musée a été ouvert au milieu de 1961.

L’histoire des colonies américaines remonte maintenant à trois siècles environ, et au cours du développement spectaculaire que le pays a connu depuis lors, beaucoup de monuments et de vestiges de l’époque des pionniers ont été laissés à l’abandon, ou même volontairement détruits par la hâte impitoyable de nombreuses générations

par G. IV. R. Nicho11

plus récentes d’Américains, qui leur ont prttféré les symboles modernes du Nouveau- Monde. De plus, l’image de la période coloniale et des premiers temps de l’existence du jeune et dpamique État avait été ternie par une propagande inepte et, sans doute plus profondément et plus largement encore, par les déformations et exagérations des “épopées” made in Holl~wood. Ceux qui ont patronné la fondation du musée estimaient cependant, comme l’a dit M. Pratt, que “certains aspects du patrimoine américain sont extrêmement séduisants : les intérieurs accueillants et soignés de l’époque coloniale, les grandes cheminées où brûlait un feu de bois, les meubles, la nourriture traditionnelle (si différente des aliments congelés, séchés, ou tout préparés, que consomment aujourd‘hui habituellement les Américains) ; en bref, cette ambiance qu’ont récemment recréée, de fason si ingénieuse, nombre de musées américains locaux. ”

C‘est d’ailleurs dans une atmosphère de ce genre que le projet a pris naissance. “Ce fut, comme le rappelle M. Pratt, au cours d’un week-end en Nouvelle-Angleterre, alors que nous étions entourés de souvenirs américains d’avant l’ère des “produits congelés”, que l’idée nous vint de partager avec nos amis anglais le plaisir que nous procuraient certains des aspects encore existants de l‘Amérique de l’époque colo- niale.” Mais où et comment ? La réponse à la seconde question était simple: en créant un musée. La première question était plus difficile à résoudre. La réponse fut trouvée tout à fait par hasard, lorsqu’une importante résidence de campagne située à Freshfort, dans le Somerset, fut mise en vente. Non loin de là s’élevait à l’origine le manoir de Claverton, simple hameau qui avait cependant joué un rôle assez notable dans l’histoire d’Angleterre. En I 8 19, ce manoir était si délabré que son propriétaire, George Vivian, demanda à sir Jeffry Wyatville de le remettre en état. Mais Wyatville, considérant qu’une telle opération serait trop coûteuse, obtint de son client, non sans peine d’ailleurs, la permission de démolir le manoir et d‘édifier une autre résidence un peu plus haut, sur la colline qui domine le hameau. Un an après, il avait construit un bâtiment de proportions imposantes, bien que d’une esthétique parfois discutable et dont l’attrait tenait surtout au site choisi : il s’agissait d’une clairière sur un épaulement boisé d‘où l’on jouit d’une vue magni-

23. THE AMERICAN Mussuiï, Bath. Façades sud et est de Claverton Manor (1820). L‘intérieur seul a ktk restauré en vue de l’installation des collections, des bureaux et des appartements. 23. South and east facades of Claverton Manor (1820). Only interior alterations have been made to house the exhibits, offices and residen- tial flats.

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fique sur la vallée de Limpley Stoke, à plus de IOO mètres en contrebas, et, de côté, sur Bath, 1’Aqua Sulis des Romains, ville d’eau à la mode au temps des rois George.

En 19j 8, ce château fut mis en vente. Pratt et Judkyn se rendirent immédiatement compte que c’était là l’occasion qu’ils cherchaient depuis si longtemps, et même un coup de chance inespéré. Le choix de ce bâtiment présentait en outre deux avantages, qui, bien que certains puissent les considérer comme secondaires, n’en avaient pas moins un intérêt précis pour le nouveau projet. D’abord, le style néo-grec caractérisé par des frontons et des colonnes classiques, à la mode du temps de Wyatville, avait influé sur l’architecture du château, de sorte que celui-ci ressemblait beaucoup à certaines des grandes résidences que l’on construisait au même moment de l’autre côté de l’Atlantique.

D’autre part, pendant l’été de 1897, un jeune et fougueux officier de vingt-deux ans appelé Winston Leonard Spencer Churchill, revenu de l’Inde pour une brève permis- sion, avait prononcé son premier discours politique dans le parc du château. Au cours des décennies qui ont suivi ce discours, personne sans doute n’a fait davantage que Churchill pour développer la compréhension et la communauté de vues entre la mère patrie et son ancienne colonie, et ce long effort fut couronné par la publication de son Histoire des peiples de latgue anglaire. Cet ouvrage parut un ou deux ans seulement avant que le sort désignât Claverton Manor pour jouer son nouveau rôle qui consiste en fait - sinon intentionnellement - à illustrer sur le plan visuel l’objectif de Churchill. I1 est donc regrettable que le destin n’ait pas permis au vieil homme d‘État de visiter une dernière fois le lieu où avait débuté sa longue et orageuse carrière, plus de soixante ans auparavant. La vieillesse s’est opposée à ce qui aurait pu être l’occasion, pour Churchill, d’une apothéose historique et, pour le musée, d’une inauguration d’un éclat exceptionnel.

La propriété une fois acquise, il fallut encore deux ans de travail intense avant que le musée puisse ouvrir ses portes. On commensa par recruter un personnel réduit, que l’on plasa sous la direction de Ian McCallum, spécialiste de l’architecture américaine moderne, qui abandonna son poste de rédacteur de 1’ Arcbifectziral reuiew pour devenir conservateur du nouveau Musée américain. La Fondation Halcyon accepta immédiatement de financer le projet jusqu’au moment où pourrait être constituée une dotation (en fait le musée fut enregistré comme entreprise philan- thropique en 1959). Grâce à ce premier soutien, les deus cofondateurs commen- cèrent de vastes recherches en vue de trouver des pièces de collection, tandis qu’en Angleterre leurs collaborateurs s’occupaient d’aménager les grandes salles du château.

La plupart des objets exposés, à l’exception de quelques pièces rares comme les santos du Nouveau-Mexique, ont été trouvés par les fondateurs en Nouvelle-

24. THE AMERICAN MUSEUM, Bath. Pièce de style néo-grec, dont les principaux kltments proviennent d’une salle à manger new-yorkaise datant de 1825-1835. La plupart des meubles sont l’cruvre de Duncan Phyfe. 24. Example of the Greek Revival period, based on a New York dining-room of about 1825-1835. Furniture mainly by Duncan Phyfe.

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Angleterre et dans les autres États de la côte est des États-Unis, ou gOnéreusement offerts par des collectionneurs privés. A chaque saison ou presque, de nouvelles salles ou de nouveaux objets ont été installés, pour allonger la période considtrée ou combler des lacunes.

Les premiers envois comprenaient non seulement des meubles et autres objets, mais des appartements entiers avec tous leurs, éléments - corniches soigneusement moulurées, manteaux de cheminées sculptés, fenêtres, boiseries et planchers. On dut modifier les dimensions de beaucoup des grandes salles de Claverton au moyen de faux plafonds et de cloisons pour les adapter, entièrement ou‘ en partie, aux nouveaux intérieurs. Tous les éléments qu’il fallut ajouter pour compléter les ensembles originaux dataient strictement de l’époque contemporaine. L’ensemble le plus ancien montre bien le caractère cossu de certains intérieurs de Nouvelle- Angleterre, qui étaient aménagés sur le modèle des maisons anglaises (fig. 24). C’est le cas de la salle de séjour d‘une maison construite en 1690 à Wrentham (Massachusetts) avec un plafond à lourdes poutres apparentes et un épais plancher (fig. 21). Le mobilier comprend notamment un coffre à Bible sculpté, provenant de Nesvbury, dans le même État, et un coffre de chêne du Connecticut ; l’histoire des pèlerins eux-mêmes est concrétisée par un petit guéridon ayant appartenu à Peregrine White, né à bord du ilfa@ower en 1620, alors que ce navire mouillait devant Cape Cod.

Un autre ensemble, le salon Deming de Colchester (Connecticut) se trouvait dans une maison construite vers 1788 et soustraite à la démolition au moment oil l’on avait entrepris de déblayer l’emplacement pour y installer un grand magasin. Ce salon avait appartenu à Jonathan Deming, officier dans l’Armée continentale et riche négociant. D’autres objets présentent leur propre acte de naissance, tel le linteau de la cheminée de la taverne Conkey, qui porte l’inscription “June ye 2Ist I 776” (date intéressante, car la Déclaration d‘indépendance devait être signée moins d’un mois plus tard). Cette taverne du Massachusetts présente un autre intéret historique : c’est là que Daniel Shap trama, dix ans plus tard, une révolte qui devait avorter, la “Shays Rebellion”. Des spécimens d’art populaire, de précieux objets indiens et du Nouveau-Mexique figurent parmi les nombreux liens qui rattachent le passé au présent. Quant au patrimoine maritime du pays, il n’a pas été oublié : il est éToqué notamment par une reconstitution de la cabine du capitaine du Chades W. ~liloqztz, baleinier de Boston, qui a été soigneusement conservé et qu’on peut voir à près de 6 o00 kilomètres de là, dans le port de Mystic.

Les techniciens du musée ont pris grand soin de recréer aussi fidèlement que possible l’atmosphère des intérieurs et aussi, grâce à d‘habiles suggestions, le paysage original. Par exemple, l’impression de sombre opulence qui se dégage de la chambre

21. THE AMERICAN hIuSELrhf, Bath. Pikce de sijour, avec poutres apparentes et plancher d’origine, d’une maison de Wrentham (hiassa- chusetts) datant de 1690. A gauche, le guéridon de Peregrine White. ”J. The Keeping Room, with beams and floor- boards from a Wrentham, Massachusetts, house of 1690. Left, the Peregrine White pedestal table.

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à coucher de la Nouvelle-Orléans, avec son lit massif à colonnes et demi-baldaquin, entouré d‘une moustiquaire, et ses murs tendus de papier tontisse à la fransaise (fig. 26), aurait été complètement détruite si l’on avait a p e r p par la fenêtre un paysage manifestement anglais. Aussi cette fenêtre au balcon de fer forgé s’ouvre-t-elle sur un ciel d’après-midi encadré de tillandsia et de glycine, qui rappelle de fason ingé- nieuse le paysage du site original. De même, la lumière tamisée du Somerset en automne filtrant dans une hutte en adobe du Nouveau-Mexique (fig. 27) aurait été choquante; c’est pourquoi l’on a installé, en les dissimulant, des lampes à haut voltage dont la lumière évoque avec réalisme la réverbération puissante du soleil dans le désert.

Lors de l’amhagement des intérieurs, on a particulièrement soigné les détails pour donner une impression de vie ; par exemple on a disposé, sur une table, les cartes d’une partie commencée, jeté un négligé sur un lit, placé sur une cheminée une pipe à long tuyau, ou laissé sur une table un journal de l’époque. Certains objets, comme les collections de verreries ou d‘étains, sont nécessairement groupés dans des vitrines ; mais chaque fois qu’on l’a pu, on a cherché à les disposer de faGon moins statique (fig. 28, 29). Les objets de tôle laquée de la colonie hollandaise de Pennsylvanie sont rangés sur les buffets et les tables (fig. 30) et toute une série de couvre-pieds aux couleurs éclatantes ont été suspendus à des cadres. Les experts américains ont fourni une contribution particulièrement généreuse en surveillant personnellement la présentation des objets relevant de leurs domaines de spécialisa- tion respectifs. On est ainsi parvenu à donner au visiteur le sentiment qu’il est accueilli comme un hôte plutôt que comme un étranger animé d’une curiosité indiscrète.

Après avoir été présenté, en avril 1961, à plus de cinquante représentants de la presse, le musée a ouvert ses portes au public le 27 juin de la même année.

Les salles et galeries sont disposées de telle sorte qu’on peut y suivre le cours de l’histoire américaine de 1680 à 1860 environ. Parmi les principaux événements qui ont marqué cette période, on peut citer par exemple les bouleversements de la Révolution, les premières initiatives prises par le jeune État dans le domaine périlleux de la politique extérieure, avec la mise en vigueur de la doctrine de Monroe, la première grande “ruée vers l’or’’ dans l’Eldorado County, en Californie, et la bataille de Harper’s Ferry, qui mit fin à la campagne antiesclavagiste de John Brown. Cette période a vu se succéder quinze présidents : leur liste, qui commence naturellement par Washington, comprend des noms aussi fameux que ceux de Jefferson, du fervent antiesclavagiste John Quincy Adams, d’Andrew Jackson (c‘Old Hickory”), duelliste notoire, et elle se termine par celui de James Buchanan, prédécesseur immédiat et bien oublié de Lincoln. Dans l’histoire de la Grande-Bretagne la période correspon- dante va de la fin du règne de Charles II aux vingt-trois premières années du long règne de Victoria.

Les guides sont des femmes dont chacune connaît à fond son sujet et qui sont constamment à la disposition des visiteurs. Toutefois, pour que ceux-ci se sentent plus libres, elles ne sont pas chargées de donner des conférences à un public réticent, mais seulement de fournir, sur demande, ces renseignements complémentaires qu’aucun musée existant n’est en mesure de fournir sans avoir recours à un personnel de ce genre. Ce système est très apprécié. Néanmoins, lorsque des visites de groupes sont organisées à l’avance, pendant la saison d’ouverture ou hors saison, des guides font faire aux participants le tour du musée de fason plus’systématique.

Chaque saison, ou presque, a vu l’installation d’une nouvelle salle ou d‘une exposition spéciale, qui apporte un Clément nouveau ou comble une lacune. Comme il est naturel, les écoles s’intéressent particulièrement à toutes ces présentations qui peuvent jouer le rôle d’auxiliaires visuels de l’enseignement, et beaucoup d’entre elles - dont certaines sont situées à plus de I 5 o kilomètres de là - envoient leurs élèves au musée; le nombre total des visiteurs de cette catégorie est passé de moins de 3 o00 pendant la première saison d‘ouverture à plus de I O o00 pendant la saison 1966/ 1967. En outre, le musée ne se contente pas d’attendre passivement le public; son service éducatif est très actif. D’abord, dans le cadre des mesures prises pour commémorer le souvenir de John Judkyn, il a constitué une belle collection - qui s’enrichit régulièrement - d‘expositions portatives (fig. 31) consacrées à diverses périodes ou caractéristiques de la vie américaine; ce matériel est envoyé

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26. THE A i coucher X I X ~ siècle) 26. The" tury) furnis

dans les écoles, où les conférenciers peuvent les utiliser, parallèlement avec des projections, pour illustrer leurs causeries. En second lieu, des réunions de deux jours sont organisées à l'intention des grands élèves des écoles locales ; des conférenciers et d'autres spécialistes sont engagés en de telles occasions, ce qui apporte un élément de variété par rapport aux habituelles projections de films.

I1 est rare que les musées britanniques appliquent des programmes de ce genre, et ces activités sont certainement l'une des principales causes du succès rapidement croissant de cette remarquable tentative faite pour présenter à la mère patrie un ape rp du passé d'un de ses enfants.

Le Musée américain offre donc une image de Ifistoire tumultueuse de la naissance d'une nation. I1 montre la croissance d'un arbre qui a dépassé de loin la cime des majestueux séquoias : cet arbre est hybride, certes, mais si ses innombrables branches représentent de multiples cultures de l'ancien continent, le fût et la racine principale sont en solide bois anglo-saxon. D'autre part, il s'agit de l'histoire d'une nation différente de toutes celles que l'on connaît de ce côté de l'Atlantique, car elle n'a pas été fondée par une dynastie royale ou une caste d'aristocrates exeqant le pouvoir, vivant dans un "splendide isolement". Elle a pour origine les aspirations communes de simples citoyens.

C'est pourquoi on ne trouvera pas au musée de pièces propres à évoquer le faste des princes ou l'apparat qui entoure les grands de ce monde. Si importantes que puissent être de telles pièces, elles ne sauraient nous familiariser aussi pleinement avec l'histoire d'un pays que les œuvres des artistes et des simples artisans auxquelles leur style et leur mode d'utilisation conservent le caractère d'objets courants, de sorte qu'elles nous fournissent une image plus fidèle des origines et des particularités de la population. Telle est sans doute la principale raison de l'attrait que le Musée américain exerce sur le grand public comme sur les spécialistes. [ Tradtlit de I'aiglaks]

I

~.TERICAN MusEuhr, Bath. Chai de la Nouvelle-Orléans (miliei ; meubles de Prudent Mallard. ew Orleans bedroom (mid-19th ,bed with a suite by Prudent RiIal

nbre u du

cen- lard.

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The American Museum, Bath

by G. W. R. Nicholl

i

27. THE AMERICAN MusEuì-d, Bath. Salle de séjour d’une maison en adobe du Nouveau- Mexique ; des lampes dissimulées de l’autre côte de la fen&tre imitent l’éclat aveuglant du soleil dans le désert. 27. Living-room from an adobe house, New Mexico. Concealed lamps beyond the window simulate the glare of a desert sun.

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The return of the Mgjozw On the outskirts of the Georgian city of Bath in Somerset a unique experiment is taking place: on the shoulder of a hill stands Claverton Manor which now houses the first American museum to be established outside the United States. The mansion, built in 1820 (fig. 23) by George IV’s architect, Sir Jeffry Wyatville, was originally the manor house of the tiny hamlet of Claverton farther down the hill; it was re- constructed by Wyatville on its present site, in the Greek Revival style which had become fashionable at that time.

Not the least surprising aspect of this venture is that it is entirely due to the enter- prise of two private citizens, Dr. Dallas Pratt of New York and the late John Judkyn, an Englishman who became a naturalized American. Financial help was provided by the Halcyon Foundation which Dr. Pratt had earlier established in New York. More than two years were spent in a wide search for the initial collection of early Americana. The first shipments, virtually retracing the course of the 11fg$’ower 340 years earlier, started arriving in 19j 9 and the museum was eventually opened to the public in mid-1961.

The history of the American colonies now extends back some 300 years, but with the very rapid growth of America, many monuments and relics of her pioneer past had been and are being discarded thoughtlessly, or even deliberately destroyed, because of the ruthless haste of many later generation Americans who preferred the modern symbols of the New World. The image of the colonial years and the early decades of the vigorous new nation had also become tarnished by the spread of inept propaganda and, perhaps more seriously and more widely, by the distortions and exaggerations of Hollywood “epicsyy. But, to the co-sponsors of the intended venture there were, in Dr. Pratt’s words, “certain aspects of the American heritage that we found very enjoyable: the hospitable and ship-shape colonial interiors, the big wood-burning fireplaces, the furniture, the traditional food (so Werent from the frozen, dried and processed stuff which has now become standard American fare); in fact, just those features which had in recent years been created with such imagination in a number of American country museums”.

Thus, the idea of the American Museum in Bath was born. “It was”, Dr. Pratt recalled, “during a week-end in New England, surrounded by reminders of pre- ‘fresh-frozen’ America, that the idea came to us of sharing with our English friends some of the still-existing aspects of colonial America which gave us pleasure.” But how and where? The answer to the first was at hand, a museum.

The question where was not so easy of solution. Then, quite fortuitously, an answer was found at Freshford in Somerset when a large country house came on the market. Originally it had been the manor of Claverton which, although a tiny hamlet, had itself played no inconspicuous part in English history. By 1819 the house was in such bad state of repair that the then owner, George Vivian, commis- sioned Sir Jeffry Wyatville to recondition it. Wyatville, however, deeming it beyond economical repair, persuaded his reluctant client to let him pull it down and build another mansion higher up the hill behind the hamlet. There, by the following year, he had constructed a building of imposing proportions, even if not entirely aesthetically pleasing in appearance. But its greatest attraction by far lay in its new position. In a clearing of wooded land, it stood on the shoulder of the hill with the full, magnificent sweep of the Limpley Stoke valley some 400 feet below and, around the corner, the fashionable Georgian spa of Bath, the Aqua Sulis of Roman times.

In 19j8, then, the manor came up for sale. This, Pratt and Judkyn saw at once, was what they had so long been looking for; indeed it represented a stroke of

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fortune exceeding their most sanguine hopes. There were two other points which, tenuous though some might consider the connexions, were also coincidental to the new project. First, the Greek Revival in architecture, distinguished by classical pediments and pillars, had become fashionable in TVyatville’s day and had thus influenced his treatment of the manor, so that it had much in common with some of the big houses being built at the same time across the Atlantic.

Secondly, on a summer day in 1897, a brash young army officer of twenty-two named Winston Leonard Spencer Churchill, home on a brief leave from India, had made his maiden political speech to a gathering in the manor grounds. In the decades that followed that first public utterance perhaps no other man in his time did more to promote understanding and harmony of purpose between mother and daughter countries, the long effort culminating in his Histoy of the EngZish-.r$eaÆing Peoples. This work was published only a year or two before chance brought Claverton Manor its new role, which virtually, if unintentionally, amounts to a visual interpretation of Churchill’s objective. It was therefore sad that fate did not permit the old states- man to make a last visit to the very place where he had launched himself into his long and stormy career more than three score years earlier. But frailty of years precluded bringing about what could have been a historic finale for the man, and a unique inauguration for the museum.

Two years of intense work followed the acquisition of the manor before it was ready for the opening day. First came the recruitment of a nucleus staff under Ian McCallum, an authority on modern American architecture, who left his executive editorship of the Architectmd Review to take over as director of this display of early Americana. The Halcyon Foundation immediately agreed to finance the project until an endowment could be built up (the museum in fact was registered as a charitable trust in 1959). With this initial backing, the two co-founders started their wide-ranging search for exhibits, while those in England prepared the great rooms in readiness.

Most of the exhibits, except such items as the rare New Mexico J-atztos, were discovered in New England or the other eastern seaboard states by the co-founders or were generously donated by private collectors. Almost each season a new room or exhibit has been added, extending the period or filling in gaps.

The first shipments were huge crates containing not only furniture and artefacts but whole suites complete with fixtures-elaborately moulded cornices, carved mantelpieces, windows, panelling and floorboards. Many of the big rooms at Claverton had to be modified dimensionally by false ceilings and walls to suit, wholly or in part, the new interiors. Such additional articles as were necessary to furnish the original settings were strictly contemporary. The earliest example

28. THE AMERICAN MUSEUM, Bath. La bou- tique de droguiste où sont exposés des sptci- mens des herbes medicinales utilisées par les premiers colons. 28. The Herb Shop, displaying the types of herbs used by the early settlers.

29. THE AMERICAN MUSEUM, Bath. Piece d‘une maison du New Hampshire (Lee Room) du début du X V I I I ~ sitcle. La plaque de cheminée, fabriquke A Oxford (New Jersey) en 1746, porte les armes royales, rappelant ainsi qu’A cette date les colons étaient encore sujets du roi d’Angleterre. 29. The early 18th-century Lee Room from a New Hampshire house. The iron fireback, cast in Oxford, New Jersey, in 1746, bears the Royal Arms, a reminder that colonists at that date were still subjects of the British Crown.

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30. THE AbrERICAN MUSEUM, Bath. Mobilier et objets en tóle peinte de la colonie hollan- daise de Pennsylvanie. 30. Pennsylvania. Dutch furniture and painted toleware.

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shows how substantial were some of the New England houses, which were based on English homes (fig. 24). This is the Keeping Room, with heavy beams and floor- boards from a 1690 house in Wrentham, Massachusetts (fig. 21). Furnishings include a carved bible box from Newbury in the same state and an oak chest from Con- necticut. A particularly historic link with the Pilgrim Fathers themselves is provided by a small pedestal table once owned by Peregrine \Vhite, born aboard the M a y jlower in 1620 as she lay in Cape Cod harbour.

Another example, the Deming Parlour from Colchester, Connecticut, was part of a house (c. 1788) which was saved from demolition on a site being cleared for a department store. This belonged to Jonathan Deming, an officer in the Continental Army and also a rich merchant. Some other exhibits carry their own birth certificate, such as the fireplace lintel in Conkey’s Tavern which is inscribed “June ye 21st. 1776” (a significant date, for the Declaration of Independence was to be signed less than a month later). History is further linked with this Massachusetts tavern, for in it Daniel Shay plotted his abortive “Shay’s Rebellion” against the state ten years afterwards. Folk-art, Indian and New Mexico treasures are among many strands connecting past and present, not forgetting the nation’s maritime heritage, a centre- piece of which is a replica of the captain’s cabin of the Boston whaleship Charles W. Morgan, the original vessel still lying faithfully preserved 3,000 miles away in Mystic Seaport.

The greatest care was shown by the museum craftsmen in reproducing as faith- fully as possible the original atmosphere, internal and, by cunning implication, external. The feeling of sombre luxury of a New Orleans’ bedroom, for example, with its massive half-tester mosquito-curtained four-poster and flock-papered walls in the French style (fig. 26) would have been completely ruined had the window opened on to an obviously English landscape. The view beyond the wrought-iron balcony therefore reveals an afternoon sky framed by Spanish moss and wistaria, a cleverly contrived impression of the original. Again, the soft autumn light of Somerset filtering into a New Mexico adobe hut (fig. 27) would immediately have struck a false note; instead, the glare from hidden high wattage lamps realistically conveys the reflection that would come from the harsh-lit aridity of a desert back- ground.

Particular attention to detail has also been paid to the manner in which interiors are laid out, so that there is a sense of life-the half-finished game of cards on the table, for instance; the careless toss of a négligé on a bed; the way a longstemmed pipe has been left on a mantelpiece; a contemporary newspaper on a table. Certain exhibits, such as the glass and pewter collections, are perforce grouped in show-

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cases; but wherever possible displays are arranged less statically (fig. 28, 29), the Pennsylvania-Dutch toleware on sideboards and tables (fig. j o ) , and the remarkably colourful array of quilts on hanging frames. American experts have been especially generous with help by personally supervising the treatment of their own specialities. The visitor is thereby induced to feel he is welcomed more as a guest than a curious- minded interloper.

Following a press preview in April 1961, attended by over fifty representatives, the museum first opened its gates to the public on 27 June.

The layout of the rooms and galleries is such that a chronological path through history can be followed from about 1680 to 1860. To illustrate this period, choosing arbitrarily, among other notable events are included the turmoil of the Revolution, the first steps taken by the new nation into the quagmires of foreign affairs by the inauguration of the Monroe Doctrine, the first great gold rush in Eldorado County, California, and the collapse of John Brown’s anti-slavery campaign at the battle of Harper’s Ferry. It was a period which saw fifteen Presidents, starting of course with Washington; it embraced such famous names as Jefferson; that fervent opponent of slavery, John Quincy Adams; the duelling Andrew Jackson (Old Hickory); and it ended with the obscure James Buchanan, Lincoln‘s immediate predecessor. The corresponding span in Britain had seen the last years of Charles II at one end and the first twenty-three of Victoria’s long reign at the other.

A corps of women guides is always on duty, each of whom has had a thorough grounding in her subject. However, to maintain the atmosphere of easy freedom, they are not there to lecture an unwilling public but to supply that additional in- formation which no museum yet designed has been able to convey unaided. It is a system which brings frequent praise. Nevertheless, when organized parties make visits by prior arrangement, in or out of season, guides are there to show them round in a more formal manner.

Almost every season has seen a new room or special exhibit on show, each fresh facet building up the story or filling in a missing detail. The value of all this as a visual teaching aid is naturally of particular attraction to schools, many of which send pupils from as far as IOO miles away, the total seasonal attendance in this sector alone having risen from less than 3,000 in the first period to an estimate of over IO,OOO this year. Again, the museum is not content to sit back passively awaiting an audience; its educational department fulfils a more positive role. First, as part of a memorial to John Judkyn, a fine and growing collection of travelling show-cases (fig. j~) covering various periods or features of American life has been establish- ed; these are taken out to schools where lecturers can use them, together with slide projectors, to illustrate their talks. Secondly, two-day conferences are arranged for

31. THE AMERICAN MusEuhf, Bath. Stries d‘ex- positions portatives. Des enregistrements sur bandes magnétiques, gitnéralement de musique en rapport avec le sujet, peuvent y &re joints. Certaines valises contiennent des objets portant des étiquettes invitant les enfants à les toucher. Des emballages en polystyrene prothgent les pieces pendant le transport. YI. A range of travelling show-case kits. Tape recordings, usually of music appropriate to the subject, are also available. Some cases contain “Please touch” articles for children. The items are protected against damage in transit by polystyrene packaging.

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senior classes of local schools, outside lecturers and other specialists being engaged for the purpose as a change from the more regular film shows.

This type of positive activity, unusual in a British museum, is undoubtedly a major reason for the rapidly increasing popularity of a remarkable venture-a daughter country presenting something of her own past to her mother country.

Here, then, at this museum will be found something of the tumultuous story of the birth of a nation. It tells of the growth of a tree which has far out-topped the stature of the majestic sequoia; a hybrid no doubt, yet if its myriad branches are representative of many cultures from the Old World, the bole and tap-root are of solid Anglo-Saxon stock. It is the story, moreover, of a nation unlike any known on this side of the Atlantic, for it was not founded by a kingly dynasty or an aristocratic clan ruling in regal isolation from its subjects. This nation emerged from the common aspirations of ordinary peoples.

The exhibits displayed do not therefore include the regalia of monarchs or the trappings of state. Important as these might be, they do not chronicle as full a history as do the arts, crafts and simple handiworks of the times; these, by the style and manner of use, retain that “common touch” which reveals more faithfully the origins and nature of the peoples concerned. And it is most probably this factor above all others which accounts for the American Museum’s continually growing popularity among laymen as well as scholars.

Le Musée Pouchkine, Moscou

par Alexandre Icrein Quel sort étonnant que celui d’un génie comme Pouchkine : les années, les décennies, les siècles passent, mais l’intérêt pour la personne et l’oeuvre du grand écrivain, au lieu de faiblir, ne cesse de s’accroître.

Les musées Pouchkine ne manquent pas en URSS : il y a “Mikhaïlovskaïa”, dans la région de Pskov où le poète vécut en exil, le Mus$e A. Pouchkine de Leningrad, installé dans la dernière demeure du poète, où il fut transporté, mortellement blessé, après son duel, le musée de la ville de Pouchkine (l’ancienne Tsarskoïé Sélo) où il fit des études, sans compter les musées Pouchkine d‘Odessa, de IGchinev, de Boldino, etc.

MOSCOU, où naquit le poète, lui érigea un monument en 1880, mais cette ville n’avait pas, jusqu’à ces derniers temps, de musée qui lui fût consacré. Un groupe de personnalités du monde culturel et de personnes occupant les professions les plus diverses ayant demandé aux autorités qu’un musée Pouchkine soit fondé à MOSCOU, l’État accorda les crédits nécessaires et mit à la disposition du futur musée une ancienne propriété datant de l’époque de Pouchkine, un véritable joyau architectural qui fut soigneusement remis à neuf à cette occasion (fig. 32). Au moment de sa création, le musée ne possédait rien, pas un seul objet à exposer ... Et c’est alors que le miracle se produisit, le miracle de l’amour impérissable du peuple pour son poète.

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La recherche des reliques ressemble à une réaction en chaîne. Dans le cas de Pouchkine, des milliers de personnes y ont participé avec enthousiasme. Quant à nous, membres du personnel du musée, nous devions seulement ne pas perdre les traces qu’on nous indiquait et suivre chacun des sentiers suggérés. Chaque fois que