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UNIVERSITE DU DROIT ET DE LA SANTE LILLE 2 FACULTE DE MEDECINE HENRI WAREMBOURG

Anne : 2008 Thse pour lobtention du DIPLOME DETAT DE DOCTEUR EN MEDECINE

Prdisposition gntique aux effets indsirables des antirtroviraux : tude du syndrome dhypersensibilit labacavir et prsence de lallle HLA-B*5701 dans une cohorte de patients infects par le virus de limmunodficience humaine suivis en Martinique.

Prsente et soutenue publiquement Le 9 Juin 2008 Au sein de lUniversit et de la Facult de Mdecine des Antilles et de la Guyane Au CHU de Fort-de-France

Par Mathieu NALPAS N le 6 Fvrier 1979 Seclin

Directrice de thse Madame le Docteur Sylvie ABEL

Membres du jury Monsieur le Professeur Yazdan YAZDANPANAH Monsieur le Professeur Serge ARFI Monsieur le Professeur Pierre COUPPIE Madame le Docteur Odile BERA Monsieur le Docteur Raymond CESAIRE Prsident Juge Juge Juge Juge

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(The Caribbean) has, in song and verse, in political philosophy and action, long been a source for the articulation of both the lamentations and aspirations of black people everywhere. When Africans were wrenched from their continent, they carried Africa with them and made the Caribbean a part of Africa. Nelson Mandela

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Monsieur le Professeur Yazdan Yazdanpanah Professeur dUniversit Praticien Hospitalier Chef du service Universitaire de Maladies Infectieuses et Tropicales Chef du ple Mdecine Centre Hospitalier de Tourcoing Je vous adresse ma profonde reconnaissance pour lhonneur que vous me faites en prsidant le jury de ma thse de mdecine gnrale et je vous remercie sincrement de vous tre dplac quelques milliers de kilomtres de la Facult de Mdecine de Lille pour juger ce travail.

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Monsieur le Professeur Serge Arfi Professeur dUniversit Praticien Hospitalier Chef du service de Mdecine Interne Chef du ple Mdecine Centre Hospitalier Universitaire de Fort-de-France Veuillez trouver lexpression de ma profonde gratitude davoir accept de faire partie du jury de cette thse. Merci infiniment pour votre dynamisme et votre investissement dans la formation des internes. Soyez assur de mon respect le plus complet.

Monsieur le Professeur Pierre Couppi Professeur dUniversit Praticien Hospitalier Chef du service de Dermatologie Chef du ple Mdecine Centre Hospitalier de Cayenne Soyez assur de ma sincre reconnaissance et de mon profond respect pour avoir pris le temps de juger ce travail.

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Madame le Docteur Odile Bra Praticien Hospitalier Service de Virologie Centre Hospitalier Universitaire de Fort-de-France Je vous remercie tout particulirement pour avoir toujours pris le temps de rpondre mes questions. Merci pour votre aide prcieuse et votre soutien si spontan.

Monsieur le Docteur Raymond Csaire Praticien Hospitalier (Professeur dUniversit partir de Septembre 2008) Chef de Service de Virologie Centre Hospitalier Universitaire de Fort-de-France Veuillez trouver lexpression de ma vive reconnaissance pour avoir accept de juger ce travail. Je vous remercie sincrement de mavoir accueilli dans le laboratoire de Virologie.

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Madame le Docteur Sylvie Abel Praticien Hospitalier Service de Maladies Infectieuses et Tropicales Centre Hospitalier Universitaire de Fort-de-France Ton investissement personnel dans ce travail, ta disponibilit, ton dynamisme, la richesse de tes connaissances et de tes qualits humaines resteront pour moi et pour longtemps un modle de professionnalisme. Je te suis profondment reconnaissant de mavoir si bien accompagn tout au long de la rdaction de cette thse. Je naurais pu avoir de meilleure directrice de thse !

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Remerciements

Monsieur le Docteur Andr Cabi Chef du service de Maladies Infectieuses et Tropicales du Centre Hospitalier Universitaire de Fort-de-France Centre dInvestigation Clinique - Epidmiologie Clinique (CIC-EC) Antilles Guyane Je vous adresse ma profonde gratitude pour avoir accompagn ce travail tout au long de sa gestation. La qualit de vos conseils et de vos enseignements ont mnormment aid dans la ralisation de cette thse. Soyez assur de mon respect le plus sincre.

Monsieur le Docteur Bernard Liautaud La curiosit intarissable dont tu fais preuve, la richesse de tes connaissances mdicales et la gnrosit avec laquelle tu les partages sont un modle suivre pour ma future vie de mdecin. Merci pour ta prcieuse contribution ce travail et pour ton aide dans sa prparation.

Madame le Docteur Sandrine Pierre-Franois Monsieur le Docteur Guillaume crazy surfer doudou Braud Monsieur le Docteur Patrick Hochedez Mademoiselle Claire Godart Sbillotte, Monsieur le Docteur Nicolas Etor Merci pour vos conseils et votre prcieuse contribution ce travail. Travailler vos cts fut un vrai plaisir et une source denrichissement personnel et professionnel.

Madame le Docteur Laure Paturel Merci pour ton aide prcieuse dans la ralisation de ce travail, pour la qualit de tes conseils et de tes observations. Je te remercie davoir toujours pris le temps de mencadrer au laboratoire.

Mademoiselle Clarence Nalpas Merci pour ta contribution talentueuse la ralisation de certaines illustrations de ce travail

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A toute lquipe de lhpital de jour du 0D (Martine, Foufou, Eliane, Vronique, Jeanne, Vronique, Catherine, Sylvie, Rgine, Marie Cline, Frantz, Chantal, Marie Germaine, Carole et tous ceux que jai crois depuis 1 an et demi) Cette thse naurait pas t possible sans votre travail et sans votre investissement si spontan dans ltude CARABA. Vos qualits dcoute et de prise en charge des patients furent une source riche denseignements pour moi. Merci pour tous ces excellents moments passs ensemble! Man ka ddi thse ta la spcialmen ba zot !

A toute lquipe du Laboratoire dHistocompatibilit du CHU de Fort-de-France et tout particulirement aux techniciennes du HLA Merci pour votre accueil et votre contribution essentielle ce travail

Aux patients de lhpital de jour du CHU de Fort-de-France Merci davoir rendu ce travail possible

Merci la Facult de Mdecine des Antilles et de la Guyane Katy Foulmann, Madame Alexandrine, merci pour votre aide Merci Patrick et Aurore Abel pour votre accueil si sympathique !

A mes parents, merci pour votre confiance, votre soutien et vos encouragements constants tout au long de mes tudes. Je vous suis tellement reconnaissant de mavoir offert cette chance ! Merci pour la relecture de ce travail A Xavier, Charles, Clarence, Tatyana et Izkali, merci pour vos encouragements malgr la distance qui nous spare A mes grands-parents A mes amis dici et de l-bas, merci pour votre soutien et vos encouragements tout au long de mes tudes Aux internes Antilles Guyane, merci pour le soutien, pour les conseils et tous les bons moments passs ensemble en Martinique et en Guyane Merci toutes les personnes qui mont accompagn tout au long de mes tudes

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SOMMAIREListe des abrviations et des molcules antirtrovirales .............................................................................. 13

I. II.A.

INTRODUCTION ........................................................................................................... 15 DONNEES ACTUELLES - RAPPELS...................................................................... 17LINFECTION PAR LE VIH ............................................................................................... 181. a) b) c) d) e) 2. a) b) c) d) e) f) g) 3. a) b) c) d) e) Donnes pidmiologiques et accs aux traitements ......................................................................... 18 Situation mondiale [93]................................................................................................................. 18 Situation en Afrique ...................................................................................................................... 20 Situation dans la Carabe............................................................................................................... 20 Situation en France et dans les Dpartements Franais dAmrique (DFA) [47, 19] ................... 22 Situation en Martinique................................................................................................................ 24 Histoire naturelle du VIH................................................................................................................... 27 Dfinition ...................................................................................................................................... 27 Structure ........................................................................................................................................ 28 Pntration du virus dans lorganisme .......................................................................................... 29 Cycle de rplication....................................................................................................................... 29 Transmission du virus ................................................................................................................... 30 Les stades de linfection par le VIH.............................................................................................. 30 Dfinition du stade SIDA en France ............................................................................................. 33 Traitement de linfection par le VIH.................................................................................................. 34 Intrt et description des antirtroviraux....................................................................................... 34 Complexit des traitements antirtroviraux................................................................................... 38 Recommandations actuelles (selon le rapport Yeni 2006) ............................................................ 39 Le syndrome de restauration immunitaire..................................................................................... 41 Effets indsirables des antirtroviraux .......................................................................................... 41

B.1. 2. 3.

INTOLERANCE MEDICAMENTEUSE ET CARACTERISTIQUE GENETIQUE .... 45Un problme de sant publique.......................................................................................................... 45 Variabilit de rponse aux mdicaments............................................................................................ 45 Pharmacogntique ............................................................................................................................ 47 a) b) c) Dfinition ...................................................................................................................................... 47 Pharmacocintique ........................................................................................................................ 47 Un exemple, le polymorphisme du cytochrome P450................................................................... 49

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d) e) 4. a) b) c) d) 5. a) b) 6. a) b) c) d) 7. a) b) c)

Applications pratiques de la pharmacogntique .......................................................................... 50 Limites des applications de la pharmacogntique ....................................................................... 50 Pharmacogntique et antirtroviraux................................................................................................ 51 Exemples au sein de la classe des INNTI...................................................................................... 51 Exemples au sein de la classe des IP............................................................................................. 52 Exemple au sein de la classe des INTI .......................................................................................... 53 Applications pratiques de la pharmacogntique des antirtroviraux ........................................... 53 Hypersensibilit mdicamenteuse...................................................................................................... 55 Dfinition ...................................................................................................................................... 55 Mcanismes physiopathologiques de lallergie mdicamenteuse ................................................. 56 Le systme HLA [27]......................................................................................................................... 57 Dfinition ...................................................................................................................................... 57 Les deux types de molcules HLA : HLA de classe I et II............................................................ 58 Le polymorphisme ........................................................................................................................ 60 Mthodes dtude du systme HLA .............................................................................................. 61 Systme HLA et raction dhypersensibilit mdicamenteuse .......................................................... 62 HLA-B*5801 et allopurinol .......................................................................................................... 62 HLA-B*1502 et carbamazepine.................................................................................................... 62 HLA-DRB1*0101 et nvirapine ................................................................................................... 63

C.1.

Intolrance labacavir et HLA-B*5701 ............................................................................. 64Abacavir............................................................................................................................................. 64 a) b) c) d) e) f) g) 2. a) b) c) d) e) f) g) h) i) j) Structure chimique ........................................................................................................................ 64 Pharmacocintique ........................................................................................................................ 64 Prsentations commerciales .......................................................................................................... 65 Posologie....................................................................................................................................... 65 Recommandations dutilisation..................................................................................................... 65 Efficacit ....................................................................................................................................... 66 Toxicit ......................................................................................................................................... 66 Raction dhypersensibilit labacavir ............................................................................................ 66 Dfinition ...................................................................................................................................... 66 Mcanismes physiopathologiques de lhypersensibilit labacavir ............................................ 66 Frquence de survenue .................................................................................................................. 67 Dlais de survenue ........................................................................................................................ 68 Prsentation clinique : le syndrome dhypersensibilit labacavir.............................................. 68 Facteurs de risque de survenue dune hypersensibilit labacavir.............................................. 70 Rintroduction de labacavir aprs intolrance ............................................................................. 70 Prophylaxie ................................................................................................................................... 71 Diagnostic de lhypersensibilit labacavir ................................................................................ 71 Les tests picutans : aide au diagnostic dhypersensibilit labacavir ...................................... 71

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3. a) b) 4. 5. 6.

HLA-B*5701 et hypersensibilit labacavir.................................................................................... 72 Contexte de cette dcouverte......................................................................................................... 72 Deux tudes la base de cette dcouverte..................................................................................... 73 Dpistage prospectif de lallle B*5701 ............................................................................................ 74 Frquence de lallle B*5701 ............................................................................................................ 75 Questions en suspens ..................................................................................................................... 77

D.

INTOLERANCE A LABACAVIR ET HLA-B*5701 EN MARTINIQUE : CONTEXTE

DE LETUDE .................................................................................................................................. 791. a) b) c) d) 2. Particularits de la Martinique [2]..................................................................................................... 79 Gographie .................................................................................................................................... 79 La population martiniquaise.......................................................................................................... 80 Histoire dune population mtisse [2, 64].................................................................................... 80 Particularits de linfection par le VIH en Martinique [19] .......................................................... 84 Justification de notre tude ................................................................................................................ 85

III.A.1. 2.

ETUDE CARABA ................................................................................................ 88OBJECTIFS............................................................................................................................ 89Objectif principal ............................................................................................................................... 89 Objectifs secondaires ......................................................................................................................... 89

B.1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8.

MATERIEL ET METHODE ................................................................................................ 90Type dtude et population tudie .................................................................................................... 90 Critres dinclusion dans ltude........................................................................................................ 90 Critre dexclusion de ltude ............................................................................................................ 90 Formulaire de consentement pour la participation ltude et la ralisation du test gntique ......... 91 Droulement de ltude...................................................................................................................... 91 Technique du typage HLA au laboratoire dHistocompatibilit du CHU de Fort-de-France ............ 92 Recueil des donnes ........................................................................................................................... 94 Donnes recueillies ............................................................................................................................ 95 a) b) c) 9. Donnes dmographiques ............................................................................................................. 95 Donnes en rapport avec linfection par le VIH............................................................................ 95 Donnes thrapeutiques................................................................................................................. 96 Analyse statistique ............................................................................................................................. 97

C.1. 2.

RESULTATS .......................................................................................................................... 98Caractristiques de la population ....................................................................................................... 98 Caractristique du typage HLA-B...................................................................................................... 99

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3. 4. 5. a) b) c) d)

Statut thrapeutique concernant labacavir dans la population tudie............................................ 103 Analyse des syndromes dhypersensibilit concernant les 394 patients exposs labacavir ......... 106 Analyse des patients inclus dans ltude selon leur origine gographique....................................... 109 Analyse des patients exposs labacavir avant le typage (groupe 1) ........................................ 109 Analyse des patients exposs labacavir aprs ralisation du HLA-B (groupe 2a) .................. 110 Analyse des patients non exposs labacavir (groupe 2b) ........................................................ 111 Arrts de labacavir ..................................................................................................................... 111

IV.1.

DISCUSSION............................................................................................................ 113Frquence de lallle HLA-B*5701 dans une cohorte de patients infects par le VIH suivis en Martinique ................................................................................................................................................. 114 2. 3. Polymorphisme des allles HLA-B.................................................................................................. 116 Distribution des allles B*57 dans une cohorte de patients infects par le VIH suivis en Martinique 117 4. Le syndrome dhypersensibilit labacavir dans une cohorte de patients infects par le VIH suivis

en Martinique ............................................................................................................................................ 117 5. 6. Raction dhypersensibilit labacavir ? Ou non ? La rponse reste difficile... ............................ 119 Lallle HLA-B*5701 : premier marqueur pharmacogntique valid des traitements de linfection

par le VIH.................................................................................................................................................. 120 7. 8. 9. Conduite tenir en cas de survenue dun syndrome dhypersensibilit........................................... 122 Dpistage de lallle HLA-B*5701 et nouvelles recommandations de prescription de labacavir .. 123 Intrt du dpistage gntique dans la survenue des arrts prcoces de labacavir.......................... 125

V. VI. VII.

CONCLUSION.............................................................................................................. 127 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES................................................................. 130 Index des figures ....................................................................................................... 138 Index des tableaux................................................................................................. 139 ANNEXES ................................................................................................................. 140

VIII. IX.

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Liste des abrviations

ABC : abacavir ADN : acide dsoxyribonuclique AES : accident dexposition au sang

HAART : highly active antiretroviral therapy HLA : human leukocyte antigen HSR : IC : hypersensitivity reaction intervalle de confiance

AMM : autorisation de mise sur le march ARN : acide ribonuclique ARV : antirtroviraux ATP : adnosine triphosphate

INNTI : inhibiteur non nuclosidique de la transcriptase inverse INTI : inhibiteur nuclosidique/nuclotidique de

ATU : autorisation temporaire dutilisation CD4 : CD8 : cluster of differentiation 4 cluster of differentiation 8

la transcriptase inverse IP : inhibiteur de protase

OMS : organisation mondiale de la sant ONU : organisation des nations unies OR : PCR : RCP : odds ratio polymerase chain reaction rsum des caractristiques du produit

CDC : center for control disease CHU : centre hospitalier universitaire CMH : complexe majeur dhistocompatibilit CROI : conference on retroviruses and opportunistic infections DFA : dpartement franais dAmrique

SIDA : syndrome dimmunodficience acquise SNP : SSO : SSP : single nucleotide polymorphism sequence specific oligoprobes sequence specific primers

DHHS : department of health and human services DOM : dpartement doutre-mer EACS : european AIDS clinical society FDA : food and drug administration

WHO : world health organization VIH : virus de limmunodficience humaine

Les molcules antirtroviralesRTV : ritonavir (NORVIR) NFV : nelfinavir (VIRACEPT) SQV : saquinavir (INVIRASE) ATV : atazanavir (REYATAZ) TPV : tipranavir (APTIVUS) FAV : fos-amprenavir (TELZIR) TMC 114 : darunavir (PREZISTA) Inhibiteur de fusion : T-20 : enfuvirtide (FUZEON) Anti-intgrase MK-518 : raltgravir (ISENTRESS) Inhibiteur dentre : Anti-CCR5 : maraviroc (CELSENTRI)

INTI : AZT : zidovudine (RETROVIR) 3TC : lamivudine (EPIVIR) ddI : didanosine (VIDEX) d4T : stavudine (ZERIT) FTC : emtricitabine (EMTRIVA) ABC : abacavir (ZIAGEN) TDF : tnofovir (VIREAD) INNTI : NVP : nvirapine (VIRAMUNE) EFV : efavirenz (SUSTIVA) TMC 125 : etravirine IP : IDV : indinavir (CRIXIVAN)

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I.

INTRODUCTION

Le traitement de linfection par le virus de limmunodficience humaine (VIH) a connu des progrs dcisifs depuis lutilisation en association de plusieurs molcules antirtrovirales puissantes. Dune volution inluctable vers le Syndrome dImmunoDficience Acquise (SIDA) et le dcs, cette infection est dsormais considre, grce aux multithrapies antirtrovirales, comme une maladie chronique. Cependant, en 2007, environ 6800 personnes taient encore nouvellement infectes par le VIH chaque jour et le SIDA tait responsable de prs de 5700 dcs chaque jour. Dans ce contexte, les antirtroviraux sont trs largement utiliss. Ltude de la tolrance de ces mdicaments prescrits au long cours et des mcanismes de leurs effets indsirables est devenue indispensable. Labacavir est un mdicament antirtroviral indiqu dans le traitement de linfection par le VIH. Il appartient la classe des inhibiteurs nuclosidiques de la transcriptase inverse (INTI). Son utilisation est limite par la survenue ventuelle dune intolrance potentiellement grave dans les premires semaines de traitement. Cette raction dite dhypersensibilit disparat dans les heures suivant larrt de cette molcule mais la mise en jeu du pronostic vital est possible en cas de rintroduction. Lassociation entre cette raction dhypersensibilit et la prsence de lallle HLA-B*5701 a t dcrite en 2002 par les quipes de Mallal (56) et de Hetherington (40). En effet, 48% 61% des patients porteurs de lallle B*5701 dvelopperaient une raction dhypersensibilit labacavir. La frquence du portage de cet allle dans les populations dorigine europenne est estime environ 5 6% mais varie selon lorigine gographique des populations tudies. Depuis, plusieurs tudes ont montr que le dpistage prospectif de ce marqueur pharmacogntique et la non prescription de labacavir ces personnes taient en mesure de rduire la frquence de survenue dune hypersensibilit labacavir. Mais les tudes lorigine de ces conclusions taient limites par le faible nombre de patients inclus, et par le fait que les populations tudies taient essentiellement dorigine europenne. Le bassin cariben est la deuxime rgion la plus touche par lpidmie de VIH dans le monde aprs lAfrique sub-saharienne. Au sein de cette rgion, les trois dpartements franais dAmrique (Guyane, Guadeloupe et Martinique) font face une situation proccupante et difficile contrler, malgr des moyens de lutte et un accs aux traitements antirtroviraux

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comparables ceux engags en France mtropolitaine. En Martinique, labacavir est largement utilis chez les patients infects par le VIH. En 2006, une tude rtrospective des cas dhypersensibilit labacavir survenus chez les patients infects par le VIH et suivis au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Fort-de-France a t mene. Des typages HLA-B ont t raliss au Laboratoire dHistocompatibilit du CHU de Fort-de-France afin de rechercher la prsence de lallle B*5701 chez les patients suspects dune intolrance labacavir. Dans cette tude, peu de syndromes dhypersensibilit suspects (10 sur 414 patients traits par abacavir) ont t retrouvs et ils concernaient majoritairement des patients dorigine europenne. Or, la population martiniquaise, linstar des autres peuples de la Carabe, est une population mtisse compose dune majorit dindividus dont les anctres sont originaires dAfrique sub-saharienne. La frquence de portage de lallle B*5701 nest pas connue dans les populations vivant dans les les de la Carabe. Il nous est apparu essentiel de dterminer si le petit nombre de ractions dhypersensibilit labacavir observ dans notre cohorte tait le reflet dune faible frquence du portage de lallle B*5701 dans la population de patients suivis en Martinique. Pour cela nous devions dterminer la frquence de cet allle dans cette population. Compte-tenu des rsultats des premires tudes de Mallal, nous avons dcid, pour les patients qui navait jamais reu dabacavir, de rechercher le B*5701 avant le dbut dun ventuel traitement par abacavir, et de ne pas prescrire ce traitement aux patients porteurs de lallle B*5701. Dans le mme temps, dbutaient deux grandes tudes internationales prvoyant dinclure des patients dorigines gographiques et ethniques varies pour tenter de confirmer les premires donnes. Nous avons commenc une tude dont lobjectif principal tait de dterminer la frquence de lallle B*5701 chez des patients infects par le VIH suivis au CHU de Fort-deFrance. Nous avons aussi observ les causes darrt prcoce de labacavir et la survenue de possible raction dhypersensibilit ce mdicament. Lobjectif de cette thse est de dcrire le contexte dans lequel cette tude a t initie et den prsenter la mthode et les rsultats.

16

II.

DONNEES ACTUELLES - RAPPELS

17

A.

LINFECTION PAR LE VIH

1.

Donnes pidmiologiques et accs aux

traitements

a)

Situation mondiale (93)

En 2007, on estime que 33,2 millions [30,6 36 ,1 millions] de personnes vivent avec le VIH et 2,5 millions [1,8 - 4,1 millions] le nombre de nouvelles infections par an.

En 2007, 2,1 millions [1,9 2,4 millions] de personnes sont dcdes du SIDA. Le nombre de personnes dcdant de maladies lies au SIDA a toutefois baiss au cours des deux dernires annes grce, notamment, aux antirtroviraux. Le SIDA reste cependant lune des premires causes de mortalit dans le monde (91).

Selon le dernier rapport pidmiologique conjoint de lONUSIDA et de lOMS sur linfection par le VIH dans le monde, en Dcembre 2007, la prvalence mondiale du VIH sest stabilise et le nombre de nouvelles infections a chut (93). Mais le nombre total de personnes vivant avec le VIH dans le monde augmente du fait de la survenue continuelle de nouvelles infections, associes des temps de survie prolongs, dans une population gnrale qui saccrot sans cesse.

18

Figure 1: Lpidmie du VIH dans le monde en 2007 (93).

Figure 2: Prvalence mondiale de linfection par le VIH en 2006 (92).

19

b)

Situation en Afrique

La rgion la plus svrement touche dans le monde est lAfrique subsaharienne o 22 ,5 millions [20,9 24,3 millions] de personnes vivent avec le VIH (sur les 33,2 millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde en 2007), soit 68% du total mondial. En Afrique, le SIDA est, en 2007, la premire cause de mortalit tout ge confondus. A elle seule, cette rgion compte prs du tiers (32%) de toutes les nouvelles infections VIH et des dcs lis au VIH dans le monde en 2007.

En 2007, la prvalence du VIH dans la population adulte (15 49 ans) est estime 5% [4,6 5,5] avec de grandes variations selon les rgions concernes. Elle va de moins de 2% dans certaines rgions du Sahel plus de 15% dans huit pays africains (Botswana, Lesotho, Mozambique, Namibie, Afrique du Sud, Swaziland, Zambie et Zimbabwe).

Contrairement aux autres rgions du monde, la majorit des personnes infectes sont des femmes (61%). On estime le nombre dorphelins directement lis lpidmie de VIH dans cette rgion 11,4 millions [10,5 14,6 millions].

c)

Situation dans la Carabe

La Carabe est la deuxime rgion dans le monde la plus touche par lpidmie du VIH aprs lAfrique sub-saharienne avec une prvalence de la population adulte proche de 1% [0,9 1,2]. En 2007, on estime 230000 le nombre de personnes vivant avec le VIH [210000 270000]. Dix-sept mille personnes ont t nouvellement infectes en 2007 et 11000 [9800 18000] personnes sont dcdes du SIDA.

Parmi les personnes ncessitant un traitement antirtroviral dans cette rgion du monde, moins de 1 sur 4 (23%) en recevaient en 2005 (OMS/UNAIDS 2006) (92).

Les deux pays les plus touchs sont Hati (prvalence estime 2,2% en 2005) et la Rpublique Dominicaine. Tandis qu Cuba, la prvalence est estime moins de 0,2% de la population.

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Une surveillance pidmiologique insuffisante ne permet malheureusement pas de fournir de donnes mises jour pour tous les pays de la Carabe et notamment dans les zones les plus rurales.

Les rapports sexuels constituent le principal mode de transmission du VIH dans la rgion. Linjection de drogues sans respect des rgles dasepsie nest responsable que dune minorit des infections VIH. Les rapports sexuels non protgs entre hommes sont un facteur de risque significatif dans la rgion mais ce fait est largement masqu par la stigmatisation qui leur est associe.

Figure 3: Prvalence de linfection par le VIH chez ladulte en Amrique Latine et dans la Carabe en 2005 (92).

21

d) Situation en France et dans les Dpartements Franais dAmrique (DFA) (19, 47)

(1)

Situation gnrale en 2006

Daprs les derniers rsultats de la surveillance de linfection VIH en France, coordonne par lInstitut de Veille Sanitaire (InVS), le nombre de nouveaux diagnostics dinfections par le VIH identifis en 2006 est en lgre baisse (6300 infections contre 6700 en 2005) (47). Ces rsultats confirment la tendance observe entre 2004 et 2005.

Lanalyse des donnes en 2006 mettent en vidence un dpistage et une prise en charge plus prcoce.

En effet, la proportion de diagnostics prcoces augmente (10% au stade de primo-infection en 2006 contre 7% en 2003) et celle des diagnostics tardifs rgresse (20% au stade SIDA en 2003 contre 14% en 2006).

La diminution du nombre de cas de cas de SIDA porte essentiellement, dune part sur les personnes traites par antirtroviraux avant le SIDA, en lien avec lefficacit de ces traitements et dautre part sur les personnes non dpistes avant le SIDA, du fait de la diminution des dpistages tardifs.

(2)

Sexe

En France, la proportion dhommes a progressivement augment parmi les dcouvertes de sropositivit, passant de 58% en 2003 64% en 2006. Cette masculinisation est principalement lie laugmentation constante de la proportion dhommes contamins par rapports homosexuels.

22

(3)

Age

Lge moyen au diagnostic dinfection VIH en 2006 est de 37,7 ans pour lensemble des cas, les femmes tant plus jeunes (34,9 ans) que les hommes (39,3 ans). On note une tendance laugmentation de lge moyen, de 36,6 ans en 2003 37,7 ans en 2006.

(4)

Nationalit

Les personnes de nationalit trangre reprsentent 37% des dcouvertes de sropositivit en 2006 (56% chez les femmes et 27% chez les hommes). Les trois-quarts des personnes trangres sont de nationalit dun pays dAfrique sub-saharienne.

(5)

Mode de transmission

Le mode de contamination le plus frquent sont les rapports sexuels htrosexuels (47,8% des dcouvertes de sropositivit en 2006). Le risque de transmission de linfection VIH demeure trs lev dans la population masculine homosexuelle (29% des nouveaux diagnostics en 2006) et la prvalence du VIH y est 100 fois suprieure la moyenne nationale. Le mode de transmission par injections de drogues reprsente 1,8% des modes de transmission. 0,6% des causes de contamination sont considres comme autres et 20% sont inconnues .

(6) Situation dans les dpartements franais dAmrique (DFA) Les ingalits face au risque dinfection concernent les populations vivant dans les dpartements franais dAmrique, o le taux de positivit est nettement suprieur la moyenne mtropolitaine ; plus de 10 fois pour la Guyane, de 2 4 fois pour la Martinique et la Guadeloupe (figure 4, page suivante).

23

Figure 4: Proportions de srologies positives pour 1000 tests par dpartements franais Rseau laboVIH, 2006, InVS (21).

e)

Situation en Martinique

(1) Suivi des patients infect par le VIH au CHU de Fort-de-France En 2006, la Martinique, 774 personnes infectes par le VIH ont t suivies dans les tablissements de soins. 724 personnes au CHU de Fort-de-France, dont 16 Unit de Consultations et de Soins Ambulatoires (UCSA) du centre pnitentiaire de Ducos, et 50 personnes au centre hospitalier du Lamentin. Le nombre de personnes suivies en ville nest pas connu avec prcision mais ne serait pas trs lev.

24

(2)

Sexe

Depuis le dbut de lpidmie, le sex-ratio est stable et infrieur celui observ en France hexagonale : il est en 2006 de 1.7 homme pour une femme.

(3)

Age

Lge moyen augmente progressivement (44.7 ans en 2006), avec une moyenne dge infrieure chez les femmes que chez les hommes. Les moins de 30 ans reprsentent 10% des patients, tandis que les plus de 50 ans et les plus de 60 ans reprsentent, respectivement, 27 et 10% des patients suivis au CHU de Fort-de-France.

(4)

Mode de transmission

Depuis le dbut des annes 1980, la transmission du VIH se fait en Martinique, comme dans le reste de la Carabe, principalement par voie sexuelle, et le plus souvent la suite de rapports htrosexuels.

Chez les hommes, 48% des cas de transmission sont lis des relations homo ou bisexuelles. Ce type de sexualit est probablement souvent non dclar par les patients. La transmission par toxicomanie intraveineuse concerne les patients contamins en France mtropolitaine.

(5)

Le SIDA en Martinique

La figure 5, page suivante, montre lvolution du nombre annuel de nouveaux cas de SIDA depuis 1990, et lvolution de la prvalence du SIDA dans la cohorte de patients suivis au CHU de Fort-de-France depuis 1997. Les donnes 2006 confirment la stabilisation de lincidence du SIDA observe depuis la baisse spectaculaire de 1996 (introduction des multithrapies). Malgr la disponibilit des traitements antirtroviraux en Martinique, et alors quil nexiste aucun obstacle financier leur accs, entre 20 et 30 patients par an continuent voluer vers le SIDA. On observe par ailleurs une augmentation de la prvalence du SIDA, lie principalement la diminution du nombre de dcs (augmentation du pool des patients ayant atteint le stade SIDA du fait de 25

leur plus longue survie grce aux traitements), et lafflux permanent et rgulier de patients nouvellement dpists. Lpidmie de SIDA est donc insuffisamment contrle la Martinique.

Figure 5: Evolution de lincidence et de la prvalence du SIDA entre 1990 et 2006 chez les patients suivis au CHU de Fort-de-France.

26

2.

Histoire naturelle du VIH

a)

Dfinition

Le Virus de lImmunodficience Humaine est un rtrovirus de la famille des lentivirus dcouvert en 1983.

La maladie qu'il cause chez l'Homme est le Syndrome d'Immuno-Dficience Acquise (SIDA).

Un virus est un micro-organisme intracellulaire strict ne pouvant se multiplier qu' l'intrieur d'une cellule hte en utilisant sa machinerie cellulaire. Il contient une information gntique (sous forme d'ADN ou d'ARN), et une structure de protection souvent protique.

Les rtrovirus sont des virus dun diamtre de 110 125 nanomtres, trs rpandus dans le monde animal. Dans lespce humaine, ils sont lorigine de diffrentes formes de cancers, de dgnrescences du systme nerveux central et dimmunodficiences, dont le SIDA. Leur gnome sintgre sous forme dADN dans celui de la cellule hte, pour ensuite sexprimer pendant toute la vie active de la cellule. Les lentivirus (ou Lentiviridae) font partie de cette famille. Ces virus sont responsables de pathologies volution lente.

Particule virale qui se dtache de la surface dune cellule (photo prise au microscope lectronique). ( H.R. Gelderblom, Robert-Koch-Institut, Berlin).

27

b)

Structure

On distingue actuellement deux types de VIH : le VIH-1 et le VIH-2. Ces deux virus sont trs proches (42 % d'homologie au niveau de leur gnome). Le VIH-1 est le plus rpandu.

Le VIH se compose d'un matriel gntique (ARN) accompagn de quelques protines, le tout contenu dans deux "coques" protiques (les capsides), elles-mmes entoures d'une membrane compose dune bicouche lipidique et portant des protines spcifiques.

Le gnome du virus du SIDA se compose d'un ARN simple brin de 9181 nuclotides. Il comporte trois gnes principaux (Gag, Pol, et Env), ainsi que quelques gnes de rgulation, de petite taille. Il comporte de plus des squences spcifiques, situes ses extrmits.

Figure 6: Schmatisation de la structure du VIH

28

c)

Pntration du virus dans lorganisme

Les cellules dendritiques sont des leucocytes qui prsentent les antignes aux lymphocytes T (par exemple les cellules de Langerhans, prsentes dans la peau et les muqueuses pluristratifies). On les trouve principalement dans les rgions cutano-muqueuses et dans le systme lymphatique. Elles transportent le virus vers les rgions T des ganglions drainants.

d)

Cycle de rplication

Le VIH prsent dans le sang est capable de se fixer plusieurs cellules particulires du systme immunitaire et notamment aux lymphocytes T CD4+ (mais galement aux monocytes et aux macrophages). Linteraction entre ces cellules et le virus se fait grce aux rcepteurs CD4 des lymphocytes T, des co-rcepteurs et la glycoprotine gp 120 de la membrane virale. La fixation de gp 120 au CD4 permet de dmasquer une autre protine membranaire virale : la glycoprotine gp 41. Celle-ci s'insre alors dans la membrane du lymphocyte, permettant alors la fusion des deux membranes, et ainsi l'entre du virus dans la cellule.

Il sen suit une dcapsidation intra cytoplasmique et une rtrotranscription de lARN viral en ADN grce la transcriptase inverse prsente dans le virus. LADN proviral rentre alors dans le noyau de la cellule infecte. Il est intgr au gnome de la cellule grce une intgrase et la transcription de lADN en ARN peut alors commencer.

Une partie de lARN synthtis sera alors excis et piss puis traduit par la machinerie enzymatique de la cellule (ribosomes, appareil de Golgi, etc...) en protines qui pourront sassembler grce des protases.

Le nouveau virion bourgeonne et finit par se dtacher de la cellule en emportant un fragment de membrane cellulaire qui contient les protines membranaires virales. Les nouveaux virus librs peuvent alors infecter de nouveaux lymphocytes CD4.

29

Figure 7: Cycle de rplication du VIH. Daprs B.S. Taylor (89).

e)

Transmission du virus

Trois modes de transmission du VIH sont possibles : sanguine, sexuelle et maternoftale. Certains facteurs augmentent le risque de transmission du virus : une charge virale leve, une maladie sexuellement transmissible associe, le type de rapport sexuel (par ordre croissant de risque : rapport vaginal/anal insertif, vaginal rceptif et anal rceptif). Les rapports oraux-gnitaux sont aussi risque.

f)

Les stades de linfection par le VIH

(1)

Stade de primo-infection

Aprs contact avec le virus, le systme immunitaire tente d'liminer le virus sans y parvenir. Au cours de la phase de sroconversion, des anticorps anti-VIH sont synthtiss et ne seront pas dtects par les tests de dpistage (srologie positive pour le VIH) avant 3 semaines aprs la transmission virale. Cette phase est accompagne dans les 2/3 des cas de symptmes le plus souvent mineurs et non spcifiques, do un diagnostic difficile tablir cette priode de la maladie.

30

(2)

Stade asymptomatique

Le virus se multiplie ensuite dans l'organisme au sein des lymphocytes T auxiliaires. Cette persistance du virus actif est responsable d'une dsorganisation du systme immunitaire marque par une diminution lente du taux de lymphocytes CD4, qui passe progressivement de valeurs normales suprieures 700/mL des valeurs infrieures 500/mL et par une augmentation de la charge virale. Cette phase est de dure trs variable avec une volution totale de l'infection pouvant aller de quelques mois plusieurs annes (volution moyenne autour de 10 ans).

Cette phase est caractrise par l'absence de symptmes dus l'infection et passe inaperue si un dpistage srologique n'est pas ralis. Des pathologies (candidoses buccales par exemple) commencent apparatre signant la fin de la phase asymptomatique.

(3)

Stade SIDA

Lorsque la dpltion lymphocytaire devient profonde, des maladies opportunistes majeures se dclarent. Elles signent la phase volue de l'infection au VIH avec une immunodpression acquise svre. La multiplication virale et la diminution du taux de lymphocytes CD4 s'acclrent, prcipitant l'volution de l'infection. Ces maladies opportunistes sont le plus souvent des infections virales, bactriennes ou parasitaires, mais aussi des tumeurs, qui ne peuvent se dvelopper que si le systme immunitaire est trs dficient. Ces maladies ne surviennent en rgle gnrale que pour des taux de CD4 infrieurs 500/mL. Le risque est croissant en dessous de 350/mL et majeur en dessous de 200/mL.

Les maladies opportunistes sont trs majoritairement responsables de la mortalit de l'infection par le VIH, elles dfinissent le SIDA :

- Candidose bronchique, trachale ou pulmonaire - Candidose de l'sophage - Cancer invasif du col - Coccidioidomycose, dissmine ou extrapulmonaire

- Cryptococcose extrapulmonaire - Cryptosporidiose intestinale > 1 mois - Infection CMV (autre que foie, rate ou ganglion) - Rtinite CMV - Encphalopathie due au HIV

31

- Infection herptique chronique ou viscrale - Histoplasmose dissmine ou extrapulmonaire - Isosporidiose chronique - Maladie de Kaposi - Isosporidiose chronique - Maladie de Kaposi - Lymphome de Burkitt - Lymphome immunoblastique - Lymphome crbrale primitif - Infection M. avium ou kansasii, dissmine

ou extrapulmonaire - Infection M. tuberculosis - Infection mycobactrie dissmine ou Extra-pulmonaire - Pneumonie Pneumocystis carinii - Pneumopathie bactrienne rcurrente - Leuco-encphalite multifocale progressive - Septicmie Salmonelle non typhi rcurrente - Toxoplasmose crbrale - Syndrome cachectique d au VIH.

ARN plasmatique (log copies /ml) et CD4 (x 100 /ml) 7 6 5 4 3 2 1 0

ARN

Lymphocytes6 mois Primo-infection 10 12 ans Asymptomatique 2 3 ans SIDA

Figure 8: Evolution naturelle de la charge virale et des lymphocytes CD4 en labsence de traitement.

32

g)

Dfinition du stade SIDA en France

Le Syndrome dImmunodficience Humaine Acquise correspond un ensemble de manifestations infectieuses opportunistes ou tumorales lies le plus souvent une dpltion profonde de limmunit cellulaire. Le degr dimmunodpression conditionne le risque de survenue des infections opportunistes. La classification CDC/OMS de 1993 regroupe trois catgories cliniques de linfection par le VIH (A, B et C) et prend en compte le nombre de CD4. Cette classification est hirarchique, c'est--dire quun sujet B ne peut passer dans la catgorie A lorsque les signes cliniques ont disparu.

(A)Nombre de Lymphocytes CD4 Asymptomatique, primo-infection ou adnopathies diffuses chroniques.

(B)Asymptomatique sans critres (A) ou (C)

(C) SIDA C1 C2 C3

500/mm3 200 499/mm3

A1 A2 A3

B1 B2 B3

< 200/mm3

Tableau 1: Dfinition du stade SIDA en France. Classification CDC93.

33

3.

Traitement de linfection par le VIH

a)

Intrt et description des antirtroviraux

Les antirtroviraux sont des molcules de synthse qui inhibent la rplication virale diffrentes tapes du cycle du VIH. Ils sont virostatiques et ne permettent pas lradication du virus. Lutilisation des Highly Active Antiretroviral Therapy dits HAART - ou traitement antirtroviral hautement actif - a permis linfection par le VIH de passer au stade de chronicit.

(1)

Bref historique

Mis sur le march en 1987, la zidovudine (AZT) est le premier antirtroviral capable dapporter une amlioration clinique des patients infects par le VIH. Il sagit dune molcule de la classe des inhibiteurs nuclosidiques de la transcriptase inverse (INTI). Son efficacit reste limite dans le temps et il ne peut enrayer tout seul lvolution fatale de la maladie.

Au dbut des annes 1990, de nouveaux INTI font leur apparition sur le march et apportent une amlioration, encore une fois transitoire, aux patients en chec thrapeutique sous AZT.

En 1994, lessai ACTG 076/ANRS024 dmontre que lutilisation de lAZT chez la femme enceinte permet de diminuer de deux tiers le risque de transmission virale de la mre lenfant. En octobre 1995, les bithrapies dINTI se rvlent plus efficaces que les monothrapies.

Dbut 1996, les inhibiteurs de protases (IP) rvolutionnent le traitement de linfection par le VIH. Lapparition de la trithrapie (association de 2 INTI et dun IP) permet enfin de contrler linfection en induisant une baisse prolonge de la charge virale et une remonte des lymphocytes CD4. Il en dcoule une baisse sans prcdent de la mortalit et de lincidence des infections opportunistes (67).

34

Figure 9: Taux de mortalit et combinaison de traitements contenant un inhibiteur de protase parmi des patients infects par le VIH avec un taux de lymphocytes CD4 infrieur 100/mm3 entre Janvier 1994 et Juin 1997. Daprs Franck J. Palella (67).

En 1997, une nouvelle classe dantirtroviral fait son apparition avec les inhibiteurs non nuclosidiques de la transcriptase inverse (INNTI). En 2001, les inhibiteurs de fusion sont disponibles puis les anti-intgrases en 2007.

(2)

Site daction des antirtroviraux

Les antirtroviraux agissent en bloquant le cycle de rplication du VIH. Ils sont classs selon le niveau et le mode de leur action. Cinq classes dantirtroviraux sont disponibles en 2008 (en noir sur la figure 10 ci dessous) tandis que dautres sont en phase dessai (en vert sur la figure 10). Chacune agit un niveau diffrent de linteraction entre le virus et la cellule.

Figure 10: Site daction des antirtroviraux actuels et en dveloppement dans le cycle de linfection par le VIH (89).

35

(3)

Antirtroviraux disponibles en 2008

(a) Les inhibiteurs nuclosidiques/nuclotidiques et non nuclosidiques de la transcriptase inverse Ils inactivent la transcriptase inverse, enzyme permettant la synthse dADN complmentaire partir de lARN viral.

(b)

Les inhibiteurs de protase

Ils inactivent les enzymes ncessaires au clivage des prcurseurs polypeptidiques constitutifs des particules virales. Les inhibiteurs de protase conduisent la production de virions immatures non infectieux et donc linterruption du cycle viral.

(c)

Les inhibiteurs de fusion

Ils bloquent la fusion entre le virus et la cellule hte par inhibition comptitive en se liant la gp41.

(d)

Les anti-intgrases

Ils inhibent l'intgrase. Il sagit dune enzyme virale qui catalyse l'insertion du gnome viral dans le gnome hte aprs la phase de transcription inverse.

(4) Antirtroviraux bientt disponibles et en dveloppement

(a)

Les inhibiteurs dentre

Ces molcules bloquent le CCR5, lun des co-rcepteurs qui permet laccrochage du virus VIH sur la cellule T4. La FDA (Food and Drug Administration) amricaine a approuv la commercialisation du premier anti-CCR5 en septembre 2007 (le maraviroc). Ce

36

mdicament a reu lautorisation de mise sur le march (AMM) au niveau europen dbut 2008. En France, ce mdicament bnficie actuellement dune Autorisation Temporaire dUtilisation (ATU) et pourrait obtenir lAMM prochainement. Dautres molcules anti-CCR5 sont en cours dvaluation dans des essais cliniques. Il semblerait que les premiers rsultats concernant lefficacit et la scurit de ces molcules soient encourageants.

(b)

Les inhibiteurs dpissage

Des chercheurs franais ont mis au point une molcule, l'IDC16 (drive de l'indole), capable de bloquer l'infection par le virus en empchant l'pissage des ARN du virus, qui est une tape de la maturation du virus (10). Cette tape de la maturation est entirement ralise au sein de la cellule infecte. Les chercheurs ont ralis des essais in vitro sur des cellules du sang priphrique prleves chez des humains et infectes par des souches de VIH1 de laboratoire et aussi sur des cellules isoles chez des patients qui expriment un haut niveau de rsistance aux inhibiteurs de la transcriptase inverse et aux anti protases. Dans les deux cas, la molcule a inhib la multiplication du virus dans les cellules.

(c)

Nanotechnologie et antirtroviraux

Des chercheurs sont en train de dvelopper un mdicament antirtroviral ne prendre ventuellement quune fois par mois (90). Un INNTI exprimental, la rilpivirine, a t formul avec des nanoparticules. Les rsultats sur les animaux suggrent que des injections mensuelles pourraient tre suffisantes pour bloquer la rplication du VIH.

(d)

Un mot sur le vaccin

Aucun vaccin nest aujourdhui capable de fournir une protection contre le VIH. Lessai le plus prometteur (essai STEP) a t arrt brutalement en Septembre 2007 par la Data Safety and Monitoring Board (DSMB) anglo-saxonne en raison dun nombre

37

dinfections par le VIH plus importantes dans le groupe de personnes vaccines que dans le groupe placebo. Lanalyse des rsultats de cet essai vaccinal de phase II a t prsente lors de la Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections (CROI) en fvrier 2008 Boston (80). Il en ressort, quen ltat actuel des connaissances, le vaccin nest pas ralisable.

b)

Complexit des traitements antirtroviraux

Les antirtroviraux doivent tre imprativement utiliss en association (multithrapie) pour obtenir un niveau suffisant defficacit et rduire le risque dmergence de mutants rsistants. Ladhrence au traitement, pouvant comporter entre 2 et parfois plus de 10 comprims par jour, la tolrance court, moyen et long termes, la recherche de la meilleure qualit de vie possible pour les patients sont des lments trs importants prendre en compte tant dans le choix dun traitement antirtroviral que dans sa surveillance.

(1) Plus de 25 antirtroviraux et spcialits combines disponibles en 2007 La liste des antirtroviraux actuels et bientt disponibles au CHU de Fort-de-France avec leur posologie et le cot journalier en Euros (en avril 2007 au CHU de Fort-de-France) peut tre consulte dans les annexes (annexe 1, pages 140 et 141).

(2)

Premires lignes de traitements

Selon le Rapport dexperts franais 2006, lobjectif principal du traitement antirtroviral est de diminuer la morbidit et la mortalit de linfection par le VIH en restaurant un nombre de lymphocytes CD4 suprieur 500/mm3. En pratique, cela est possible grce une rduction maximale de la rplication virale (charge virale plasmatique < 50 copies/ml) (96). Les schmas valids reposent sur une association de 3 antirtroviraux actifs (multithrapie). Les deux schmas thrapeutiques prfrer sont :

-

2 INTI + 1 IP boost 2 INTI + 1 INNTI

38

(3)

Stratgies dutilisation multiples

Les options valides en terme defficacit immuno-virologique sont nombreuses dans le choix dun traitement antirtroviral. Les lments prendre en compte sont la tolrance immdiate, la tolrance long terme, la simplicit de prise en fonction des conditions de vie des patients, les consquences dun chec sur les options ultrieures, lobservance, le cot sur le long terme.

c) Recommandations actuelles (selon le rapport Yeni 2006)Les recommandations thrapeutiques sont dsormais bien tablies et sans cesse actualises. Les recommandations amricaines (1) et europennes (29) sont proches de celles dcrites dans le dernier rapport dexperts franais. Ce rapport recommande aussi que toute prescription dantirtroviraux initiale soit hospitalire, quune prescription hospitalire soit ralise au minimum de manire annuelle, et que les discussions de mise en place ou de modification dun traitement le soit en runion de concertation pluridisciplinaire laquelle participent cliniciens, virologues et pharmaciens.

(1)

Indication du traitement antirtroviral

Selon les dernires recommandations franaises (rapport Yeni 2006), le traitement antirtroviral est indiqu chez :

Tout patient symptomatique, c'est--dire prsentant des complications en rapport avec le dficit immunitaire (symptmes directement lis au VIH ou tmoignant dune infection opportuniste).

Tout patient asymptomatique dont le taux de lymphocytes CD4 est infrieur 200/mm3.

39

Chez les patients dont le taux de lymphocytes CD4 se situe entre 200 et 350/mm3, il est recommand denvisager de dbuter un traitement antirtroviral. Le patient doit alors tre prpar la mise sous traitement.

Chez les patients asymptomatiques dont le taux de lymphocytes CD4 est suprieur 350/mm3, lintroduction dun traitement antirtroviral nest habituellement pas recommande. Il peut nanmoins senvisager dans certaines circonstances (par exemple lorsque la charge virale plasmatique est suprieure 100000 copies/mL).

(2)

Autres lments prendre en compte

Un pourcentage de lymphocytes CD4 infrieur 15% des lymphocytes totaux est considr comme une situation risque dinfection opportuniste et doit tre pris en compte au mme titre que le nombre absolu des lymphocytes CD4. Ces deux valeurs peuvent tre discordantes chez certains patients.

Le risque de progression est plus rapide chez les patients dbutants le traitement aprs 50 ans.

Chez les femmes, les perspectives de grossesse doivent tre voques afin de discuter des risques et contraintes de suivi dune grossesse selon que cette grossesse est dbute avant ou aprs la mise sous antirtroviraux.

(3) Ladhsion et la prparation du patient au traitement Elles sont essentielles dans le succs thrapeutique. Elles peuvent tre values soit directement, soit indirectement par la mesure de la charge virale ou des lymphocytes CD4 aprs 6 mois de traitement antirtroviral. Lefficacit de consultations spcifiques, dducation thrapeutique et daide lobservance a t dmontre en matire de succs immunovirologique. Avant de dbuter le traitement antirtroviral, linformation et lducation du patient sont indispensables pour optimiser ladhsion la stratgie thrapeutique envisage. Les lments suivants doivent tre discuts avec le patient :

40

Le caractre chronique et potentiellement fatal de linfection par le VIH. Les buts des traitements antirtroviraux. Limportance du premier traitement antirtroviral, qui est associ aux meilleures chances de succs immunovirologique. La possibilit deffets indsirables. Les bnfices dune bonne observance et les consquences dune mauvaise observance (rsistances aux antirtroviraux, efficacit moindre des schmas thrapeutiques ultrieurs).

d)

Le syndrome de restauration immunitaire

Chez les patients infects par le VIH et prsentant un dficit immunitaire svre au moment de linstauration du traitement par association dantirtroviraux, une raction inflammatoire des infections opportunistes asymptomatiques ou rsiduelles peut apparatre et entraner des manifestations cliniques graves ou une aggravation des symptmes. De telles ractions ont t observes au cours des premires semaines ou mois suivant linstauration du traitement par association dantirtroviraux.

e)

Effets indsirables des antirtroviraux

Comme tous les mdicaments, les antirtroviraux peuvent tre lorigine deffets secondaires. Les checs rcents de plusieurs essais de vaccination annulent les espoirs de vaccins efficaces court et moyen termes. Les progrs de la thrapeutique antirtrovirale et labsence dradication du virus impliquent dsormais de concevoir le traitement de la maladie VIH comme un traitement chronique qui devra tre administr sur plusieurs dizaines dannes. La bonne connaissance des effets indsirables des antirtroviraux est indispensable au suivi des personnes infectes par le VIH. Leur tolrance au long cours est dsormais un enjeu majeur pour le contrle durable de cette infection chronique.

41

Les effets indsirables suivants sont rapports avec les antirtroviraux :

(1)

Anomalie de la rpartition des graisses

Ces anomalies sont regroupes sous le terme de lipodystrophie. Il existe deux prsentations cliniques : La lipoatrophie ou fonte adipeuse, est situe plus volontiers au niveau de la graisse sous-cutane du visage (aspect maci), des fesses et des membres. La lipohypertrophie ou accumulation de tissu adipeux, sige prfrentiellement au niveau du tronc avec une augmentation du tissu graisseux intra abdominal, une augmentation du volume des seins, du cou et de la rgion cervicale (bosse de bison). Les deux formes peuvent coexister chez un mme patient.

Les analogues thymidiniques de la transcriptase inverse (zidovudine et stavudine) sont les INTI les plus frquemment incrimins dans les lipodystrophies.

(2)

Anomalie du mtabolisme lipidique

Les anomalies lipidiques sous traitement antirtroviral sont frquentes. Il peut sagir dune hypertriglycridmie, dune hypercholestrolmie, lie une lvation du cholestrol LDL, associe ou non une diminution du cholestrol HDL. Ces anomalies sont variables selon les antirtroviraux utiliss, lge et ltat nutritionnel, ltat dimmunodpression et dinflammation chronique. La physiopathologie de ces modifications des paramtres lipidiques reste partiellement incomprise en raison de la multiplicit des mcanismes invoqus. Certains IP sont tout particulirement impliqus dans la survenue de ces troubles. Des troubles lipidiques peuvent galement se voir sous INTI et INNTI.

(3)

Anomalie du mtabolisme glucidique

Par leur action au niveau du tissu adipeux, certains antirtroviraux peuvent induire une insulino-rsistance susceptible dvoluer vers une intolrance au glucose puis un diabte.

42

La vitesse dvolution de ces troubles est lie au traitement antirtroviral mais galement au patient. En effet, outre la toxicit des ARV sur ladipocyte, le vieillissement des patients, les antcdents familiaux et personnels danomalies glucidiques et lexistence dune obsit tronculaire majorent le risque de diabte de type 2.

(4)

Toxicit mitochondriale

La toxicit mitochondriale peut se manifester sur un mode aigu et mettre en jeu le pronostic vital (acidose lactique) ou se prsenter sur une forme plus chronique de toxicit dorgane. Les manifestations peuvent alors tre aussi varies que des myopathies, neuropathies, statoses hpatiques, pancratites, tubulopathies rnales, lipodystrophies, atteintes hmatologiques et crbrales. Lun des mcanismes physiopathologique serait linhibition par les INTI de lADN polymrase gamma au niveau des tissus cibles. Il en rsulte des anomalies de production de certaines protines de la chane respiratoire dans ces tissus et donc une altration de la production dATP. La physiopathognie de ces manifestations est probablement multifactorielle, impliquant aussi le VIH lui-mme et le terrain gntique sous-jacent (35).

(5)

Atteinte cardio-vasculaire

Il sagit, dune part dun sur risque cardiovasculaire li la conjugaison de divers facteurs dont le tabagisme et les troubles mtaboliques (lipidiques et glycmiques) chez une population qui vieillit et, dautre part, des phnomnes daltration de la paroi vasculaire en rapport avec le VIH lui-mme. Il en dcoule une augmentation de la prvalence des vnements cardio et crbro-vasculaires chez les patients infects par le VIH.

(6)

Manifestations osto-articulaires

Des complications osto-articulaires type dostopnie et dostoporose peuvent se voir chez les patients infects par le VIH et traits par antirtroviraux. Lostoncrose est plus rare mais peut galement se rencontrer. Ltiologie est considre comme multifactorielle (incluant lutilisation de corticodes, la consommation dalcool, une immunosuppression

43

svre, un indice de masse corporelle lev). Cependant, des cas dostoncrose ont t rapports, en particulier, chez des patients un stade avanc de la maladie lie au VIH et/ou ayant un traitement par association dantirtroviraux au long cours.

(7) Manifestation allergique et dhypersensibilit Des ractions allergiques et dhypersensibilit ont t rapportes avec quasiment toutes les molcules antirtrovirales existantes. Les antirtroviraux les plus souvent associs ce type dintolrance sont labacavir dans la classe des INTI, la nvirapine, lefavirenz, le TMC125 dans la classe des INNTI, le fosamprnavir dans la classe des IP et le T20 dans la classe des inhibiteurs de fusion (70).

44

B. INTOLERANCE MEDICAMENTEUSE ET CARACTERISTIQUE GENETIQUE

1.

Un problme de sant publique

Les mdicaments, mme lorsquils sont prescrits selon les rgles, sont une cause importante de morbidit et de mortalit.

Une tude franaise a montr quenviron 10 20% des malades admis dans un service de soins durgence ltaient pour une cause iatrogne (76).

En 2000, en France, les effets indsirables des mdicaments seraient responsables denviron 128000 hospitalisations par an (soit environ 3,2% des hospitalisations), pour un cot global annuel d'environ 320 millions d'euros (74).

En 1998, aux Etats-Unis, les rsultats dtudes rtrospectives montraient que les effets indsirables des mdicaments taient responsables de lhospitalisation de plus de deux millions de personnes par an pour un cot annuel d aux hospitalisations et aux arrts de travail denviron 100 milliards de dollars (53). Ils seraient lorigine du dcs de plus de 100000 personnes, ce qui place la thrapeutique mdicamenteuse au 4me rang des causes de mortalit dans ce pays.

Ces tudes dmontrent limportance du problme en matire de sant publique.

2.

Variabilit de rponse aux mdicaments

La rponse aux mdicaments est variable d'un individu l'autre, ce qui rend souvent leur utilisation difficile. La variabilit de rponse aux mdicaments peut avoir de nombreuses causes. Outre les erreurs dindication, de posologie ou dutilisation des mdicaments (problme dadhrence et dobservance), cette variabilit peut avoir :

45

une origine physiologique (sexe, ge, grossesse).

une origine pathologique (atteinte hpatique, rnale, pathologies associes).

une origine environnementale (alimentation, alcool, tabac, co-administration de mdicament).

une origine gntique. En effet, des facteurs gntiques peuvent moduler la pharmacocintique des mdicaments et modifier leurs effets.

De nombreux polymorphismes gntiques affectant les gnes codant pour des enzymes, des transporteurs et des rcepteurs ont t dcrits. Leurs consquences sur la biodisponibilit et l'effet d'un grand nombre de mdicaments ont t lucides (6).

Observance Mauvaise utilisation Age

Pathologies associes (hpatique, rnale)

SexeRponse un mdicament

Interactions Md.

Grossesse

GENETIQUE

Alimentation Tabac, alcool

Figure 11: Illustration de la rponse multifactorielle aux mdicaments.

46

3.

Pharmacogntique

a)

Dfinition

La pharmacogntique tudie les mcanismes d'origine gntique intervenant dans la rponse aux mdicaments.

Elle a pour finalit doptimiser les dcisions thrapeutiques, tant en matire d'efficacit que de scurit d'emploi, ce qui devrait amliorer la prise en charge des malades et contribuer limiter le problme de sant publique que pose actuellement les variations interindividuelles de rponse aux mdicaments

A linverse de la pharmacogntique qui tudie linfluence du patrimoine gntique sur le sort des mdicaments, la pharmacognomique a pour objet ltude des effets des mdicaments sur le gnome humain. Il est cependant frquent que les deux termes soient utiliss indistinctement.

Cette branche de la pharmacologie sest impose il y a plus de 50 ans lorsqua t dmontr le caractre hrditaire de rponses anormales certains mdicaments. Les soldats amricains dorigine africaine taient plus risques de dvelopper des anmies hmolytiques aprs la prise dantipaludens (primaquine) que les soldats dorigine europenne. 10% de ces sujets prsentaient un dficit hrditaire en glucose-6-phosphate dshydrognase (14).

b)

Pharmacocintique

(1) Mtabolisme, transport des mdicaments et variabilits gntiques Aprs leur introduction dans lorganisme, les mdicaments pntrent dans le compartiment vasculaire. Il sen suit une phase de transport vers leur cible puis une phase de transformation. La plupart des molcules sont mtabolises par le foie. Toutes ces tapes sont assures par des

47

transporteurs et des enzymes dont lexpression peut varier en fonction du polymorphisme du gne concern. Les enzymes du mtabolisme hpatique peuvent tre divises en deux catgories : les enzymes de phase I qui rendent les molcules plus polaires par hydroxylation et les enzymes de phase II qui gnrent des mtabolites encore plus hydrophiles par conjugaison avec divers radicaux (acide glucuronique, sulfate, gluthation, groupement mthyle ou actyle). La grande majorit des ractions de phase I sont catalyses par la famille des cytochromes P450. Les mtabolites ainsi forms peuvent tre vacue hors de la cellule, selon leur structure avec ou sans laide dun transporteur puis limines dans la bile et les urines. Ces transporteurs sont des protines de phase III, elles appartiennent la mme famille que la P-gp : les protines ABC (ATP-binding cassette).

Figure 12: Les phases du mtabolisme des xnobiotiques.

48

(2) Polymorphisme gntique et rponse aux mdicaments La qualit et la quantit des enzymes mtabolisant les mdicaments dpendent en grande partie de leur expression gntique. Les gnes peuvent prsenter des mutations (anomalies de squences) : mutations ponctuelles ou SNP (single nucleotide polymorphism), dltions partielles ou totales, voire des duplications ou amplifications. Ces diffrentes versions du mme gne dfinissent des allles. Chaque individu possde deux versions allliques dun mme gne, identiques ou diffrents, dterminant le gnotype. Au sein de la population gnrale, lexistence de ces versions allliques, donc de diffrents gnotypes dfinissent un polymorphisme gntique. Les mutations portes par ces gnes sont lorigine de variation dexpression et/ou dactivit des protines, ce qui peut entraner une diminution, un dficit, une augmentation ou labsence de la protine enzymatique. Les polymorphismes gntiques sont exprims dans la population gnrale sous la forme de phnotypes mtaboliques. Selon ce polymorphisme, les patients peuvent tre regroups en mtaboliseurs lents ou limits (activit enzymatique diminue), mtaboliseurs rapides ou extensifs (activit enzymatique normale) et mtaboliseurs ultra rapides (activit enzymatique augmente). La frquence des diffrents phnotypes est variable dans les populations en fonction de lenzyme polymorphe et en fonction de lorigine ethnique (34, 75).

c) Un exemple, le polymorphisme du cytochrome P450Le polymorphisme gnique du Cytochrome P450 a t trs tudi (11). Plus de 70 allles ont t dcrits (54). Il a t montr que la prsence dun certain allle codant pour le cytochrome P450 (le CYP2C9) entrane une moins bonne rponse aux effets anti-coagulants de la Coumadine et augmente le risque hmorragique (4). Il a aussi t montr que la prsence du CYP2D6 est associ une variation des effets des antidpresseurs tricycliques (17).

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d)

Applications pratiques de la pharmacogntique

En France, plusieurs tests sont proposs par les units de pharmacogntique molculaire hospitalires (5). Ces tests permettent, avant la mise en route dun traitement mdicamenteux, didentifier les individus risque et donc de modifier ou dadapter la prescription et les modalits de surveillance dun mdicament en fonction du statut gntique du patient.

e)

Limites des applications de la pharmacogntique

De nombreux polymorphismes gntiques des molcules entrant en interaction avec les mdicaments ont t identifis. Cependant, lidentification dun gne est souvent rendue difficile par le caractre variable des effets indsirables dun mdicament, par les traitements comportant plusieurs mdicaments et par les multiples tableaux cliniques possibles dans leur forme et leur intensit. Une autre limite lutilisation plus large des marqueurs gntiques est labsence de larges tudes prospectives contrles, randomises en double aveugle ayant dmontr lintrt de dpistages prospectifs dans la pratique clinique quotidienne. Le nombre de tests utiliss en routine est donc relativement restreint pour le moment.

50

4.

Pharmacogntique et antirtroviraux

Une mauvaise observance est souvent la cause dun chec virologique. Mais de nombreuses tudes pharmacogntiques ont montr quil pouvait exister des variabilits pharmacocintiques interindividuelles pouvant jouer un rle important dans la rponse de lorganisme un mdicament antirtroviral (26). Dautres tudes ont rapport des diffrences gntiques chez les patients infects par le VIH expliquant des rponses variables en ce qui concerne la toxicit et lefficacit aux antirtroviraux. Toutes les classes dantirtroviraux sont concernes par cette variabilit interindividuelle et de nombreux effets indsirables des traitements antirtroviraux sont aujourdhui partiellement expliqus grce la pharmacogntique.

Nous en donnons quelques exemples ci-dessous :

a)

Exemples au sein de la classe des INNTI

(1)

Efarivenz et toxicit neuropsychiatrique

Lefavirenz est un antirtroviral de la classe des INNTI. Plusieurs essais comparatifs ont montr lefficacit de lassociation dun INNTI et de deux INTI, tant sur le plan immunovirologique, que sur la bonne tolrance clinico-biologique (8, 62). Il a cependant t rapport au cours des premires semaines de traitement sous efavirenz, des effets indsirables touchant le systme nerveux central. Ces effets peuvent se manifester par des vertiges, une insomnie, des troubles de la concentration, une somnolence, des cauchemars et des pisodes dpressifs svres. Lefavirenz est mtabolis dans le foie par le cytochrome P4502B6 (CYP2B6). Une tude a montr comment le polymorphisme gnique de cette enzyme pouvait tre associe aux effets indsirables de ce mdicament et sa pharmacocintique (37). Il a t mis en vidence quun allle du CYP2B6 tait plus souvent retrouv dans les populations afro-amricaines que dans les populations dorigine europennes et que cet allle tait significativement associs des concentrations plasmatiques plus importantes defavirenz. Les diffrences interindividuelles

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dans le mtabolisme de ce mdicament pourraient donc expliquer la susceptibilit certains effets indsirables neurologiques.

(2)

Nvirapine et hypersensibilit

Une hypersensibilit la nvirapine survient environ dans 5% des cas et peut se manifester par une fivre, un rash cutan et une cytolyse hpatique au cours des six premires semaines de traitement (85). Les rsultats dune tude australienne suggrent une association entre un taux de lymphocytes CD4 suprieur 25%, la prsence de lallle HLA-DRB1*0101 et un risque environ 17 fois plus important de dvelopper une hypersensibilit la nvirapine (60).

b)

Exemples au sein de la classe des IP

(1) Atazanavir et hyperbilirubinmie non conjugue Latazanavir est un IP dont lutilisation peut tre associe une hyperbilirubinmie non conjugue dans 20 50% des cas et un ictre clinique dans environ 6% des cas (18). Cet effet indsirable est attribu une inhibition, par latazanavir, de lUDP glucuronosyl transfrase 1A1 (52). Il a t observ que les patients porteurs de la mutation UGT1A1*28 du gne codant pour lUDP glucuronosyl transfrase sont plus risque de dvelopper une hyperbilirubinmie, notamment chez les patients atteints de la maladie de Gilbert chez qui la prsence de lallle UGT1A1*28 explique dj une activit enzymatique rduite et une hyperbilirubinmie asymptomatique (43, 81).

(2)

Ritonavir et dyslipidmie

Lutilisation des inhibiteurs de protase chez les patients infects par le VIH, en particulier le ritonavir, est frquemment associe lapparition de troubles lipidiques type dhypertriglycridmie, hypercholestrolmie et augmentation des taux plasmatique de lapolipoprotine B (45). Il a galement t observ une variabilit interraciale en ce qui

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concerne la susceptibilit ces anomalies lipidiques induites par les antirtroviraux (33). Des tudes ont montr une association entre la prsence dallles codant pour les apolipoprotines E et C3 et le risque dhypertriglycridmie svre chez des patients caucasiens infects par le VIH et traits par inhibiteurs de protase (31, 88)

c)

Exemple au sein de la classe des INTI

(1)

Tnofovir et nephrotoxicit

Une atteinte tubulaire proximale se manifestant par une acidose, une glycosurie et une protinurie a t observ chez des patients infects par le VIH sous tnofovir au long cours (25). Des tudes ont conclu une association entre la survenue de cette nphrotoxicit et le polymorphisme de gnes codant pour certaines protines impliques dans le mtabolisme du tnofovir (MRP2 et OAT-1) (15, 48).

d) Applications pratiques de la pharmacogntique des antirtrovirauxComme nous lavons dit prcdemment, les applications simples en routine de la recherche en pharmacogntique sont fortement limites. Elles le sont, dans la plupart des cas, par le manque dassociation forte et uniforme entre un polymorphisme et les observations clinico-biologiques constates (taux plasmatique, efficacit et tolrance dun mdicament) (57). Les associations observes le sont souvent dans de petits chantillons de population et leur extrapolation plus grande chelle et des groupes ethniques plus varis na pas ou peu t tablie. La sensibilit et la spcificit des associations rapportes peuvent galement varier dune tude lautre en raison de ces facteurs. Ces lments entretiennent donc une incertitude quand lutilit clinique du dpistage gntique des marqueurs mis en vidence.

53

Selon Simon Mallal, les facteurs dterminants pour le succs des tests pharmacogntiques en pratique clinique sont (57) :

-

Tests rapides et conomiques

-

Fortes valeurs prdictives

-

Facilit dutilisation en pratique quotidienne

-

Connaissance des signes cliniques qui en justifient lutilit

-

Bnfices cliniques pour le patient et pour son bien tre.

54

5.

Hypersensibilit mdicamenteuse

a)

Dfinition

Selon lAcadmie Europenne dAllergologie et la World Allergy Organization, lhypersensibilit est dfinie comme tout symptme ou signe, objectivement reproductible, provoqu par une exposition un stimulus dfini et une dose habituellement tolre par les sujets sains (49, 50). Lallergie, elle, est dfinie comme une raction dhypersensibilit toujours associe un mcanisme immunologique quil soit dorigine humorale ou cellulaire. LAcadmie Europenne dAllergologie propose de parler dhypersensibilit mdicamenteuse pour toute raction ressemblant cliniquement de lallergie mais dont le mcanisme na pas encore t lucid. Les allergies mdicamenteuses sont toujours associes un mcanisme immunologique o peuvent tre mis en vidence des anticorps et/ou des lymphocytes T activs dirigs contre les mdicaments. Les hypersensibilits constituent une part non ngligeable des intolrances mdicamenteuses, responsables d'une mortalit, dune morbidit et de surcots mal valus. Leurs manifestations sont multiples, allant dune lgre raction urticarienne au grand choc anaphylactique ou au dcollement cutan parfois mortel.

Hypersensibilit

Allergie mdicamenteuse (mcanisme immuno. prouv).

Hypersensibilit mdicamenteuse non allergique

Mdie par IgE

Non mdie par IgE

Figure 13: Hypersensibilits mdicamenteuses allergiques et non allergiques.

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b) Mcanismes physiopathologiques de lallergie mdicamenteuseLes mcanismes de lallergie mdicamenteuse sont multiples et varis. Les mdicaments sont capables dinduire tous les types de ractions immunologiques de Gell et Coombs.

Classification de Gell et Coombs I II III IVHypersensibilit immdiate lie aux IgE. Hypersensibilit par cytotoxicit lie aux IgM et/ou IgG. Hypersensibilit semi-retarde, par complexes immuns IgM et/ou IgG. Hypersensibilit retarde, lie au recrutement et lactivation de lymphocytes T spcifiques.

Tableau 2: Classification des types d'hypersensibilit selon Gell et Coombs.

Lallergie raginique mdie par les IgE (type I de Gell et Coombs) est la forme la plus commune, rsultant de linteraction entre le mdicament et les IgE spcifiques prsentes la surface des mastocytes et basophiles. Ce mcanisme immunologique est responsable des ractions immdiates anaphylactiques (chocs anaphylactiques, urticaires/angio-oedmes, bronchospasmes). Les mdicaments ou leurs mtabolites peuvent galement activer directement la prolifration lymphocytaire T, responsable des ractions immunologiques allergiques retardes, de type IV de Gell et Coombs (ruptions maculo-papuleuses, eczmas de contact, photosensibilisation). Les ractions faisant intervenir le complment (type II et III de Gell et Coombs) sont plus rares. Elles sont notamment responsables de cytopnies, de maladies sriques, de glomrulonphrites, de fivres prolonges et de certaines urticaires. La plupart du temps, les mtabolites sont inconnus et parfois plusieurs mcanismes allergiques interviennent (type I et IV par exemple) et sassocient dautres mcanismes, volontiers toxiques . Ils dpendent la fois du mdicament et de lhte.

56

6.

Le systme HLA (27)

a)

Dfinition

Abrviation de Human Leucocyte Antigen , le systme HLA fut dcouvert par Jean Dausset en 1958 et dsigne en immunologie un systme de reconnaissance du soi prsent chez la plupart des vertbrs. Dans les autres espces (mais aussi chez lhomme), on parle globalement du Complexe Majeur dHistocompatibilit (CMH). Les antignes HLA se trouvent la surface de presque toutes les cellules de lorganisme et jouent un rle important dans la dfense immunitaire. Le systme HLA est impliqu dans le contrle du rejet de greffe.

Les gnes codant pour le systme HLA se trouvent sur le bras court du chromosome 6.

Figure 14: Le systme HLA sur le chromosome 6.

57

b) Les deux types de molcules HLA : HLA de classe I et II

(1)

Molcule HLA de classe I

Au sein du complexe majeur dhistocompatibilit, on distingue les molcules HLA de classe I, codes par des gnes de type A, B C, E, F ou G. Elles sont prsentes sur toutes les cellules nucles de lorganisme. Elles ont comme rle de prsenter les peptides issus de la dgradation des protines cellulaires endognes aux lymphocytes T CD8+. Ces derniers les reconnaissent comme faisant parti du soi . Les protines encodes par les gnes A, B et C sont des glycoprotines de membrane qui "flottent" dans la membrane cellulaire fluide et sont composes de deux chanes polypeptidiques : La chane lourde , qui est une protine glycosyle, peut tre divise en trois rgions : cytoplasmique, transmembranaire et extrieure. La partie extrieure forme 3 domaines (1, 2 et 3). La chane lgre est commune toutes les molcules HLA : c'est la 2-microglobuline, dont le gne nest pas sur le chromosome 6.

Figure 15: Structure dune molcule HLA de classe I.

58

(2)

Molcule HLA de classe II

On distingue les molcules HLA de classe II, codes par les gnes DR, DQ, DP et DM. Elles sont exprimes par les cellules prsentatrices de lantigne (lymphocytes B, cellules dendritiques, monocytes, macrophages) et par les lymphocytes T activs. Elles ont pour rle de prsenter les peptides issus de la dgradation des protines exognes aux lymphocytes T CD4+. Ces derniers les reconnaissent comme faisant partie du non soi et dclenchent la raction immunitaire. Les molcules de classe II sont composes de deux chanes ( et ).

Figure 16: Structure dune molcule HLA de classe II.

59

c)

Le polymorphisme

La plupart des gnes existant dans une espce donne sont uniques. En s'exprimant, ils sont traduits en une protine qui se retrouvera identique chez tous les individus de l'espce considre : ces gnes sont des gnes monomorphes. Certains gnes peuvent exister sous plusieurs formes qu'on appelle allles. Leur position au niveau dun gne sappelle un locus. C'est ainsi que dans le systme ABO des groupes sanguins, le gne responsable existe sous deux formes allliques : A et B. Ces gnes sont faiblement polymorphes. Le systme HLA a la caractristique de prsenter un trs haut degr de polymorphisme, c'est dire quun gne donn est polyalllique. Selon lAnthony Nolan Research Institute (http://www.anthonynolan.org.uk/HIG/), le nombre dallles HLA diffrents mis en vidence est aujourdhui estim 3187. Le nombre dallles HLA-B est estim 1029. La distribution des diffrents allles de classe I et II varie selon lorigine gographique des populations.

Figure 17: Nombre dantignes et dallles du systme HLA identifis de 1968 mars 2008. (http://www.anthonynolan.org.uk/HIG/).

60

d)

Mthodes dtude du systme HLA

On appelle typage HLA la dtermination des allles prsents chez un individu donn. Deux approches sont utilises pour la ralisation dun typage HLA :

La srologie (utilisation danticorps anti-HLA) permet une reconnaissance directe des antignes HLA prsents la surface cellulaire. Cette mthode permet un niveau de rsolution dit gnrique (par exemple HLA-B27).

La biologie molculaire, par une tude directe des gnes, permet dobtenir un typage gnrique mais permet aussi dobtenir un typage dit de haute rsolution ou alllique. Un typage gnrique en biologie molculaire est dsign par 2 chiffres suivant lindication du locus associ un astrisque (ex : HLA-A*02). Un typage alllique est dsign par 4 chiffres aprs le locus, associ un astrisque, ou plus (ex : HLA-B*5701, HLA-DRB1*1405).

Les techniques de biologie molculaire sont trs diverses et variablement utilises selon les laboratoires. Selon lindication clinique, elles permettent indiffremment de typer le systme HLA en gnrique ou spcifique.

-

PCR/SSO PCR/SSP Cytomtrie de flux (technologie Luminex) Squenage alllique ou bi-alllique

La dtermination dun typage gnrique en biologie molculaire peut tre ralise par PCR/SSO (Polymerase Chain Reaction / Sequence Specific Oligoprobes). Dans cette technique fonde sur le principe de lhybridation inverse, des sondes oligonuclotidiques sont hybrides aux fragments dADN qui ont dans un premier temps t dnaturs et amplifis. La dtermination dun typage alllique est possible grce, en particulier, la technique de PCR/SSP (Sequence Specific Primers). A laide de couples damorces spcifiques dun allle ou dun groupe dallles utiliss pendant la PCR, la combinaison des squences amplifies permettront la discrimination dun allle par rapport un autre pour un gne donn. Le choix de la technique est fonction du niveau de rsolution requis selon lindication clinique.

61

7.

Systme HLA et raction dhypersensibilit

mdicamenteuseLe systme HLA est impliqu dans de nombreux domaines : dfense immunitaire antiinfectieuse, rejet de greffe, maladies auto-immunes. Il peut exister une relation entre certains allles HLA et une susceptibilit leve certaines maladies. Lun des premiers exemples dune telle association fut dcrit en 1973 entre lallle HLA-B27 et la spondylarthrite ankylosante (16). Le systme HLA peut aussi tre impliqu dans les phnomnes dhypersensibilit aux mdicaments. Plusieurs tudes ont rapport des associations fortes entre des allles des molcules HLA et la survenue de ractions dhypersensibilits mdicamenteuses (23).

a)

HLA-B*5801 et allopurinol

Lallopurinol est un anti-goutteux hypouricmiant agissant en diminuant luricmie et luraturie par une diminution de la synthse de lacide urique (inhibition de la xanthineoxydase par lallopurinol et par son mtabolite actif, loxypurinol). Dans de rare cas, lallopurinol peut tre lorigine dune raction cutane svre type de syndrome dhypersensibilit, dun syndrome de Steven-Johnson et dune ncrolyse pidermique toxique. Le taux de mortalit face cette raction peut alors tre de 26% (7, 9). En