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Tonfa

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Article paru dans la Marseillaise du 30 novembre du procès devant le tribunal correctionnel de Marseille de violences policières.

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Page 1: Tonfa

SociétéMARSEILLE 11

La Marseillaise samedi 30 novembre 2013

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Sécurité. Les policiers municipaux sontéquipés de flash-ball et de taser.

Jean-Claude Gaudin tombe dans l’armen Il n’aime pas ça les armes le maire de Marseille. Ça se voit. Quand il en remet une à un agent de sa police municipale, symboli-quement, pour la photo, il la sou-tient sur sa main plate sans serrer les doigts, avec l’empressement qu’on le débarrasse vite. Comme les maires précédents, il avait tou-jours refusé d’armer ses policiers avant que l’air du temps ne s’im-pose à sa décision. « Prenant en compte les agres-sions dont sont victimes les poli-ciers, j’ai accepté les armes non létales », explique-t-il lors d’une cérémonie hier au service de la police de la voie publique de Plom-bières (3e). Et voilà la police mu-nicipale qui change de doctrine. La tranquillité urbaine devient virile. « Nous l’avons dotée de l’ar-mement pour mieux répondre à l’évolution de ses missions », pré-cise Caroline Pozmentier, adjointe au maire UMP déléguée à la sécu-rité. « C’est désormais le bras armé de notre politique de proximité et de tranquillité qui est une de notre priorité », ajoute-t-elle. Au tout début d’une campagne pour les municipales qui se vou-dra sécuritaire, le maire dégaine à tout-va, en équilibre, sur ses contradictions.

Le maire contre-attaque P u i s q u e s e s c o n c u r r e n t s raillent la faiblesse de ses 18 ans de règne en matière de sécurité, lui met en avant deux choses : d’abord la faiblesse des effectifs de police nationale sur Marseille ramenée à

la superficie de la ville, comparés à d’autres grandes communes, tout en rappelant qu’« assurer la sécurité des personnes et des biens est une compétence de l’État » ; ensuite la « grande réforme de la police municipale portée depuis un peu plus de deux ans ». L’homme pointe une faiblesse qu’il attribue à la gauche au pouvoir et se pose comme celui qui veut compenser ce vide. L’art de combler un trou avec du vide. Pour ce qui est de la mise en place de l’armement, les choses ont été bien faites. Le port d’arme n’est remis qu’après une visite médicale, une autre devant un psy, une ana-lyse de sang poussée, une formation de deux jours, une autre au manie-ment et deux cessions obligatoires de tir chaque année. Les formations au taser sont en cours et les premières équipes devraient en être dotées en jan-vier. Mais l’armement comme le gilet pare-balles vont permettre une autre transformation. Cela ouvre légalement la possibilité du travail de nuit. « Les horaires ne sont pas encore arrêtés, le maire choisira entre 2h, 4h ou 6h du ma-tin », précise un technicien. Mais cette organisation ne pourra être effective qu’en septembre prochain quand sortiront de l’école les cent nouveaux policiers municipaux re-crutés pendant cette campagne des municipales, portant à 435 agents les effectifs en automne prochain. Mais d’ici là peut-être que les armes seront passés à gauche.

PhILIPPE PuJoL

n Le film visionné à l'audience et qui va scotcher magistrats et avo-cats a été pris par un voisin à tra-vers l’oeilleton de sa porte. « Cela fait froid dans le dos, ça procure un sentiment de malaise et de gène », commente le président Mahouachi devant ces images de janvier 2012 qui changent tout pour ces six étu-diants renvoyés hier pour « vio-lences en réunion sur deux déposi-taires de la force publique ». On y voit Charles, Arnaud, Ben-jamin, Stanislav, Florian et Joris, la vingtaine, apeurés, descendre un à un les escaliers de leur immeuble du 20, place Jean-Jaurès, être frap-pés par un policier à coups de ma-traque Tonfa avec ses hommes qui les attendent en bas pour le pas-sage à tabac. La haie d’horreur. « Ils descendent sans faire preuve de la moindre agressivité, les bras levés en signe de soumission et on entend des coups, des cris, des plaintes qui rendent mal à l’aise, ils supplient des "arrêtez arrêtez j’ai rien fait", des insultes des policiers "ta gueule, pédé, tu t’es chié dessus ou quoi ?!" », décrit le président. « Pourquoi ces coups alors qu’ils lèvent les bras et qu’une armée les attend en bas ?! Heureuse-ment qu’il y a la vidéo sinon, et vous le savez, c’est votre parole qui l’aurait emporté. On a des dents, un nez cas-sés, des coups de genoux dans la tête, la surenchère... »

« J’étais chauffé par les appels radio relayés par l’état-major » Face à lui Jean-Claude Pernaut, 50 ans, Major bien noté, médaillé du courage et du dévouement, du groupe de nuit des motards de la compagnie de sécurité routière, ap-pelé avec 9 autres patrouilles en renfort de l’équipage en difficulté. Il a été suspendu 15 jours. « C’est un dérapage. Je n’ai pas d’excuse. J’ai mal cerné la situation. La vidéo parle d’elle-même... J’ai été pris dans un phénomène. C’était inapproprié. Souvent on a des problèmes avec des populations nocturnes hostiles. J’étais chauffé par les appels radio relayés par l’état-major. » Mais c’est le seul fonctionnaire à être poursuivi dans une affaire impliquant 27 policiers qui avaient reçu l’ordre de porter assistance à leurs collègues. « J’ai un senti-ment de frustration et de colère dans ce dossier car il n’y a que vous ici. On ne comprend pas. Tous les po-liciers ont tourné la tête, ils n’ont rien vu. J’ai même noté la perle d’un policier disant d’un jeune au visage tuméfié qu’il était rouge car il avait bu. Je n’aime pas le rôle que j’ai aujourd’hui, c’est dérangeant », confesse le président outré par la conclusion du rapport de l’IGS : « Il est impossible d’établir formellement dans quelles circonstances ces bles-sures ont été causées et quels fonction-naires en sont à l’origine. » « Je suis scandalisée en lisant cela », lance le procureur Sylvie Canovas. Les PV d’interpellation ont été bidonnés autant que les cer-tificats signés par deux médecins

de garde à vue qui ont donné zéro jour d’ITT aux jeunes blessés quand la policière s’est vu délivrer 1 jour pour « douleur à la rotation du ge-nou ». Ce 18 janvier 2012, 2h du ma-tin, place Jean-Jaurès, les jeunes du 4e fêtent un diplôme. L’équipage «TV1A3» de police secours débarque sur l’appel d’un octogénaire qui se plaint. « Comment ça les policiers sont des menteurs ?! », s’énerve la policière Myriam Lombard qui fran-chit illégalement le seuil et fait un « bomb-pschit » de lacrymogène à l’intérieur. Elle signera plus tard un PV indiquant avoir été encerclée avec son collègue Flavien Bruna par dix individus. « Il n’est matérielle-ment pas possible d’avoir été entouré tant ces lieux sont extrêmement exi-guës », conteste le juge. C’est pour sa retranscription par ondes radio qui lance tout. « Un policier qui dérape et rentre dans l’appartement. On a l’effet papillon tout va se mettre en marche. On appelle tous les équipages de Mar-seille qui arrivent et ne cherchent pas à comprendre », analyse le juge.

« C’est le dossier du mensonge » « Toute cette force déployée, c’est incompréhensible », dit Joris, étu-diant aux beaux-arts. « Et tout le trai-tement qu’on a eu en garde à vue, les insultes... », s’émeut Stanislav. « On m’a même pas dit que j’étais en garde à vue. C’était comme si on m’avait en-levé. On a tous été choqués », déclare Florian, étudiant infirmier. « J’ai pris un très gros taquet au visage et j’ai été roué de coups », explique Benjamin. « Je n’ai jamais insulté ni frappé », redit Arnaud. Un juge assesseur se penche à l’oreille du président. « Mon assesseur me de-mande pourquoi ces jeunes sont pour-suivis. Je me le demande aussi. » Du jamais entendu dans une audience judiciaire. « On peut tous dire merci

à ce voisin pour cette vidéo quand on voit cette scène de sang effroyable au rez-de-chaussée. Sans cette vidéo, ces jeunes sont condamnés », lance le procureur Sylvie Canovas, solen-nelle. « Ce n’est pas du malaise mais quasiment de la nausée que j’ai eu en la visionnant, ajoute-t-elle, car je suis magistrat du parquet et je fais confiance à la police et c’est capital dans un État républicain et une démo-cratie. Si un policier avait été blessé ils auraient tous témoigné. Là personne n’a rien vu ! Vous, vous êtes le pre-mier de cette chaîne de violences à les faire descendre à coups de Tonfa et de poing dans une haie d’honneur. Vous avez tellement gravement dysfonc-tionné. » De requérir la « relaxe pure et simple » des jeunes et la condamna-tion du Major à 2 ans de prison dont un avec sursis dans « cette procédure marquée sous le sceau du mensonge et de l’habillage ».

« On lui demande d’expier tous les dérapages » « L’omerta nous a été opposée », résume Me Pascal Roubaud. Sa consoeur rappelle comment des instructions ont été données pour écarter les avocats de la garde à vue des jeunes. « C’est le dossier du men-songe. » « Il aurait dû voir que ces jeunes apeurés étaient inoffensifs, les bras levés. Bien sûr c’est sa faute », plaidait Me Christophe Bass en dé-fense du Major qui « avec courage et dignité » a reconnu les faits : « On lui demande d’expier tous les dérapages de cette opération panique. Il a été instrumentalisé par ce qui s’est pas-sé avant, comme vous, magistrats, l’avez été. Vous essayez de le rendre responsable de tous les PV or il n’en a pas rédigé un seul ! Ce sont des réquisitions frustrées de ne pas avoir la policière Lombard et les autres ! » Délibéré le 13 décembre.

DAvID CoQuILLE

Justice. Après la « Bac Nord », une affaire de violencesétouffées vient écorner un peu plus la police marseillaise.

La vidéo choc d’une haie d’horreurs policières

Le procureur : « vous êtes le premier de cette chaîne de violences à les faire descendre à coups de Tonfa et de poing dans une haie d’honneur. vous avez tellement gravement dysfonctionné.» Photo roBert terziAN

Remise d’un flash-ball hier à un policier municipal. Photo LAureNt SAccomANo