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Toxicite ´ de l’alpha-naphtylthioure ´e (ANTU) § Alpha-naphtylthiourea toxicity R. Garnier Consultation de pathologie professionnelle, ho ˆpital Fernand-Widal, 200, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75475 Paris cedex, France Question Je suis questionne ´ sur une substance active herbicide a ` laquelle ont e ´te ´ autrefois expose ´s des travailleurs agricoles : l’ANTU, que je ne retrouve ni sur les sites habi- tuels, ni dans l’Acta, me ˆme dans les plus anciennes e ´ditions dont je dispose. Pouvez-vous me renseigner ? Dr D. (Seine-Saint-Denis) Re ´ponse L’ANTU n’a pas e ´te ´ utilise ´ comme herbicide, mais comme raticide. Il est retire ´ du marche ´ depuis plusieurs de ´cennies, ce qui explique que vous ayez quelques difficulte ´s a ` en retrou- ver la trace. C’est tout a ` la fois sa me ´diocre efficacite ´ et sa toxicite ´ qui sont a ` l’origine de son retrait du marche ´. L’ANTU est l’alpha-naphtylthioure ´e. Chez le rat, il est res- ponsable d’une hypertension arte ´rielle pulmonaire, d’une alve ´olite, d’un œde `me pulmonaire et d’un e ´panchement pleural. Sa toxicite ´ aigue ¨ pour l’homme semble beaucoup plus faible. Des cas d’intoxication humaine sont rapporte ´s : les manifestations les plus souvent observe ´es sont des troubles de conscience et une hyperse ´cre ´tion bronchique, mais elles sont d’interpre ´tation difficile, en raison d’une association habituelle au chloralose dans les cas publie ´s ; le chloralose est responsable d’une de ´pression du syste `me nerveux central et d’une hyperse ´cre ´tion bronchique (et aussi de myoclonies et de convulsions). L’ANTU a e ´te ´ retire ´ du marche ´ en France, parce qu’il e ´tait synthe ´tise ´a ` partir d’alpha-naphtylamine et qu’on a mon- tre ´ au milieu des anne ´es 1960 que celle-ci et les pre ´para- tions d’ANTU commercialise ´es e ´taient contamine ´es par la be ˆta-naphtylamine. La be ˆta-naphtylamine est cance ´ro- ge `ne. Elle a induit des tumeurs de l’arbre urinaire. En 1982, Davies et al. [1] ont rapporte ´ trois cas de tumeurs de l’arbre urinaire (0,6 attendus) dans une cohorte de 51 de ´ratiseurs britanniques qui avaient utilise ´ de l’ANTU entre 1961 et 1980. Re ´fe ´rence 1. Davies JM, Thomas HM, Manson D. Bladder tumours among rodent operatives handling ANTU. Br Med J 2851982927931 1775-8785/$ - see front matter ß 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´serve ´s. 10.1016/j.admp.2008.10.002 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2008;69:752 Verriers et cataracte § Cataract in glassmakers D. Guldner Centre ophtalmologique, 6, rue E ´ douard-Amavet, 13500 Martigues, France Question Me ´decin du travail dans une verrerie me ´canique, je me pose la question du risque de cataracte lie ´ au rayonnement infrarouge. Deux types d’expositions diffe ´rentes peuvent e ˆtre de ´crites dans cette industrie : d’une part, les salarie ´s qui travaillent a ` la surveillance des fours et qui, ponctuellement, font des contro ˆles visuels dans l’inte ´rieur des fours. Ces contro ˆles visuels se font a ` travers des verres de protection filtrant les infrarouges ; d’autre part, les salarie ´s qui travaillent sur les machines de fabrication du verre. La tempe ´rature du verre e ´tant moins importante qu’a ` l’inte ´rieur du four (400 a ` 500 8C alors qu’elle est de 1400 8Ca ` l’inte ´rieur du four), le rayonnement est moins important et les salarie ´s n’ont pas de verres filtrant les infrarouges. Un mesurage du niveau d’exposition aux infrarouges a e ´te ´ fait par l’INRS en 2000 et montre des niveaux d’exposition supe ´rieurs aux limites d’exposition propose ´es par l’ICNRP. Suite a ` cette e ´tude, des essais de verres filtrant les infra- rouges (classe de protection 4–1,7) ont e ´te ´ faits aupre `s des salarie ´s travaillant sur les machines de fabrication du verre, mais ces protections n’ont pas e ´te ´ accepte ´es par les utilisa- teurs. Mes questions sont les suivantes : un risque de cataracte a e ´te ´ de ´crit dans les verreries a ` main ou ` les salarie ´s « cueillent » le verre dans le four. Ce risque a-t-il e ´te ´ de ´crit dans les verreries me ´caniques ? Courrier des lecteurs Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2008;69:749-753 § Toute question doit e ˆtre transmise, par e ´crit, avec vos coordonne ´es pre ´cises, au Dr Dominique Lafon, 85 bis, chemin du Bas-des-Ormes, 78160 Marly-le-Roi, France. E-mail : [email protected]. § Toute question doit e ˆtre transmise, par e ´crit, avec vos coordonne ´es pre ´cises, au Dr Dominique Lafon, 85 bis, chemin du Bas-des-Ormes, 78160 Marly-le-Roi, France. E-mail : [email protected]. 752

Toxicité de l’alpha-naphtylthiourée (ANTU)

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Courrier des lecteurs Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement 2008;69:749-753

Toxicite de l’alpha-naphtylthiouree(ANTU)§

Alpha-naphtylthiourea toxicity

R. GarnierConsultation de pathologie professionnelle, hopital Fernand-Widal,200, rue du Faubourg-Saint-Denis, 75475 Paris cedex, France

Question

Je suis questionne sur une substance active herbicide alaquelle ont ete autrefois exposes des travailleursagricoles : l’ANTU, que je ne retrouve ni sur les sites habi-tuels, ni dans l’Acta, meme dans les plus anciennes editionsdont je dispose. Pouvez-vous me renseigner ?Dr D. (Seine-Saint-Denis)

Reponse

L’ANTU n’a pas ete utilise comme herbicide, mais commeraticide. Il est retire du marche depuis plusieurs decennies, cequi explique que vous ayez quelques difficultes a en retrou-ver la trace. C’est tout a la fois sa mediocre efficacite et satoxicite qui sont a l’origine de son retrait du marche.L’ANTU est l’alpha-naphtylthiouree. Chez le rat, il est res-ponsable d’une hypertension arterielle pulmonaire, d’unealveolite, d’un œdeme pulmonaire et d’un epanchementpleural. Sa toxicite aigue pour l’homme semble beaucoupplus faible. Des cas d’intoxication humaine sont rapportes :les manifestations les plus souvent observees sont destroubles de conscience et une hypersecretion bronchique,mais elles sont d’interpretation difficile, en raison d’uneassociation habituelle au chloralose dans les cas publies ;le chloralose est responsable d’une depression du systemenerveux central et d’une hypersecretion bronchique (et ausside myoclonies et de convulsions).L’ANTU a ete retire du marche en France, parce qu’il etaitsynthetise a partir d’alpha-naphtylamine et qu’on a mon-tre au milieu des annees 1960 que celle-ci et les prepara-tions d’ANTU commercialisees etaient contaminees par labeta-naphtylamine. La beta-naphtylamine est cancero-gene. Elle a induit des tumeurs de l’arbre urinaire. En1982, Davies et al. [1] ont rapporte trois cas de tumeursde l’arbre urinaire (0,6 attendus) dans une cohorte de 51deratiseurs britanniques qui avaient utilise de l’ANTUentre 1961 et 1980.

§ Toute question doit etre transmise, par ecrit, avec vos coordonneesprecises, au Dr Dominique Lafon, 85 bis, chemin du Bas-des-Ormes,78160 Marly-le-Roi, France. E-mail : [email protected].

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Reference1. Davies JM, Thomas HM, Manson D. Bladder tumours among

rodent operatives handling ANTU. Br Med J 2851982927931

1775-8785/$ - se

e front matter � 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

10.1016/j.admp.2008.10.002 Archives des Maladies Professionnelles et de l’Environnement2008;69:752

Verriers et cataracte§

Cataract in glassmakers

D. GuldnerCentre ophtalmologique, 6, rue Edouard-Amavet, 13500 Martigues,France

Question

Medecin du travail dans une verrerie mecanique, je me posela question du risque de cataracte lie au rayonnementinfrarouge.Deux types d’expositions differentes peuvent etre decritesdans cette industrie :� d’une part, les salaries qui travaillent a la surveillance desfours et qui, ponctuellement, font des controles visuels dansl’interieur des fours. Ces controles visuels se font a traversdes verres de protection filtrant les infrarouges ;� d’autre part, les salaries qui travaillent sur les machines defabrication du verre. La temperature du verre etant moinsimportante qu’a l’interieur du four (400 a 500 8C alors qu’elleest de 1400 8C a l’interieur du four), le rayonnement estmoins important et les salaries n’ont pas de verres filtrant lesinfrarouges.Un mesurage du niveau d’exposition aux infrarouges a etefait par l’INRS en 2000 et montre des niveaux d’expositionsuperieurs aux limites d’exposition proposees par l’ICNRP.Suite a cette etude, des essais de verres filtrant les infra-rouges (classe de protection 4–1,7) ont ete faits aupres dessalaries travaillant sur les machines de fabrication du verre,mais ces protections n’ont pas ete acceptees par les utilisa-teurs.Mes questions sont les suivantes :� un risque de cataracte a ete decrit dans les verreries amain ou les salaries « cueillent » le verre dans le four. Cerisque a-t-il ete decrit dans les verreries mecaniques ?

§ Toute question doit etre transmise, par ecrit, avec vos coordonneesprecises, au Dr Dominique Lafon, 85 bis, chemin du Bas-des-Ormes,78160 Marly-le-Roi, France. E-mail : [email protected].