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    LA DFINITION DU TRAVAIL RPTITIFCOMME FACTEUR DE PNIBILIT

    RAPPORT AUX MINISTRES :

    -DES AFFAIRES SOCIALES, DE LA SANTET DES DROITS DES FEMMES

    -DU TRAVAIL, DE LEMPLOI, DE LAFORMATION PROFESSIONNELLE ET DUDIALOGUE SOCIAL

    TABLI PAR

    HERV LANOUZIREDIRECTEUR GNRAL DE LANACT

    7 SEPTEMBRE 2015

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    Synthse

    La loi a class les facteurs de pnibilit en trois catgories, selon quils relventdecontraintes physiques, de lenvironnement de travail ou de rythmes de travail.10 facteurs de risques ont t fixs par voie rglementaire. Chaque facteur est associ un seuil dexposition dclenchant la reconnaissance dune situation de pnibilit.Pour un mesurage simple, chaque seuil se rfre un indicateur spcifique et unique

    caractrisant lexposition. Il sagit du dcibel (dB) pour le bruit, de la masse soul eve(Kg) pour la manutention manuelle, du mtre par seconde au carr (m/s2) pour lesvibrations, du degr Celsius (C) pour les tempratures extrmes, etc.

    Il est admis quune valuation approfondie des risques, dans une logique exclusive deprvention, passe en ralit par une analyse plus fine de lensemble des facteurs quiconcourent lexposition relle des travailleurs. Ainsi, la prsence de certains produitschimiques aggrave lexposition au bruit, la distance parcourir avec une charge aggraveles risques lis la manutention manuelle, etc. Mais une logique de seuils dexpositions ,dont la finalit est louverture de droits pour labondement dun compte personnel,autorise saffranchir de cette finesse au profit dune simplification de la mth odologie

    de reprage des personnes vises par le texte.

    Il en va ainsi aussi pour les risques lis au travail rptitif. Leur valuation rigoureusencessite de prendre en compte, notamment, les postures et angles articulaires adopter, la force exercer et la rapidit dexcution des tches. Mais le travail rptitifayant t retenu comme facteur de pnibilit au titre des rythmes de travailet non descontraintes physiques, lindicateur de rfrence de la rptitivit doit tre la cadence dutravail, mesure par la frquence des actions raliser dans une unit de temps donne.Cette cadence devient une nuisance lorsqu'elle ne permet pas au salari de rguler sonactivit ainsi quune rcupration suffisante de la fatigue par les structures sollicites.

    Cest pourquoi il est propos de sappuyer sur un nombre dactions par minute pourapprcier lintensitdu rythme.

    La dfinition du travail rptitif est par ailleurs tributaire de contingences lgales,dexigences de fond et de considrations pratiques :

    - Les contingences lgales(article L. 4161-1 du code du travail) :o cette modalit de travail doit tre susceptible de laisser des traces

    identifiables, irrversibles et durables sur la sant ;o un seuil doit tre fix, ce qui impose une approche quantitative ;o lapprciation des seuils de pnibilit doit tre faite aprs prise en compte

    des mesures de prvention collectives et individuelles existantes.

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    - Les exigences de fond :o

    le seuil doit tre rvlateur de lintensit du rythme de travail,caractrise par la vitesse, elle-mme dpendant de la cadence et donc dela frquence des mouvements ;

    o lexistence dunecontrainte temporelle forte, qui caractrise limpossibilitpour le salari de rguler par lui-mme lactivit, est dterminante;

    o laccumulation du travail rptitif caractrise lusure identifiable lors de laretraite. Elle doit se rfrer la journe, la semaine ou lanne.

    - Les considrations pratiques :o la ncessaire abstraction du caractre multifactoriel des facteurs

    biomcaniques et des pathologies ou troubles associs au travail rptitifcar il est impossible de restituer la complexit des effets conjugus descofacteurs dans un seuil normatif ;

    o lintelligibilit de la dfinition, en particulier le caractre usuel de laterminologie utilise, doivent rendre lvaluation du travail rptitif autoportable pour un employeur de PME dpourvu dquipespcialise dans le champ de la sant au travail et pour les salarisconcerns ;

    o la faisabilit et la praticit de la mthode de reprage et destimation de larptitivit appellent un mode de reprage visuel ais. Le seuil doitpouvoir tre identifi sans cotation ergonomique, sans comptage

    sophistiqu.

    Proposition de dfinition

    Cette dfinition doit comporter les caractristiques permettant de qualifier le travailrptitif en tant que facteur de pnibilit (partie littraire descriptive) et un seuil (partiequantitative). Les lments de qualification sont :

    - lexcution de mouvements rpts ;- sollicitant les mmes articulations et segments corporels ;- raliss sous contrainte de temps ;- une vitesse leve ;-

    pendant la majeure partie du temps de travail.

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    Ce qui donne, sur le modle de lactuel article D. 4161-2 du code du travail :

    Facteur de risquesprofessionnels

    Seuil

    Action ou

    situation

    Intensit

    minimale

    Dure minimale

    Travail rptitif caractris parla ralisation de travauximpliquant lexcution demouvements rpts,sollicitant tout ou partie dumembre suprieur, unefrquence leve et souscadence contrainte

    Temps de cycle infrieur ougal 30 secondes,comprenant 15 actionstechniques ou plus

    900 heures par anTemps de cycle suprieur 30secondes, temps de cyclevariable ou absence de tempsde cycle : 30 actions

    techniques ou plus par minute

    Quest-ce quuneaction technique ?

    Cestune action manuelle lmentairemettant en jeu un ou plusieurs segments corporelsou articulations permettant daccomplir une tche de travail simple. Laction techniquepeut tre caractrise par une douzaine de verbes dactions recouvrant la grandemajorit des situations aisment observables et identifiables : saisir, positionner, placer,insrer, pousser, appuyer, visser, tirer, frapper, couper, retirer, abaisser Ces verbespeuvent en outre tre adapts dans chaque secteur dactivit ou mtier recourant unlangage technique partag : clipper, encoller, enrubanner, spatulerIls sont usuels,objectivables et partags par les professionnels (oprateurs, chefs datelier, employeur).Laction de cueillir une pomme, par exemple (torsion et traction simultane dupdoncule), correspond une action technique. Laction de marteler en revanche, estdcompose en autant de coups de marteaux qui doivent tous tre comptabiliss en tantquaction technique. Laction de lcher ou le contrle visuel, qui nappellent pas desollicitation biomcanique ne sont pas dcompts.

    Pourquoi 30 actions techniques par minute?

    La norme NF X 35 119, relative aux travaux rptitifs frquence leve, fixe le seuil de

    contrainte risque minimum 40 actions techniques par minute. Ce seuil correspondtoutefois une valeur de rfrence applicable en labsence de cofacteurs aggravants,ncessitant lapplication de coefficients correcteurs. Ces facteurs sont les contraintesdeffort, posturales, temporelles, dexcution et organisationnelles. En pratique, lesconditions de rfrence, qui correspondent une situation optimale, ne sont jamaisrunies. Lemployeur devrait donc procder lapplication de ces coefficients partirdes observations quil aura ralises sur le terrain. Ceci introduit une dose de complexitsupplmentaire importante, contraire lobjectif de simplicit et de faisabilit poursuivi.Cest pourquoi il est propos, pour prserver le comptage dun seul paramtre (lafrquence), tout en compensant lexcs de simplification que constituerait la non-priseen compte de facteurs de contraintes rputs dterminants, dappliquer au seuil bas de

    la norme une correctionforfaitaire conduisant retenir 30 actions techniques parminute. Appliqu des situations de travail diverses, ce seuil a t reconnu pertinent

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    par les experts et prventeurs consults. Au-del, des situations de travail rptitifjuges par eux sollicitantes et susceptibles de laisser des traces irrversibles seraientindument cartes. Par ailleurs, dans la mthode danalyse de la charge physique detravail publie par lINRS en fvrier 2014 (ED 6161), lazone de risquedbute elle aussi plus de trente actions techniques par minute.

    Proposition daccompagnement

    Pour que la dfinition soit immdiatement oprante et ne donne pas lieu nouveau des interprtations errones, il est essentiel quelle soit accompagneconcomitamment sa parution dune explicitation des diffrents lments qui lacomposent et de la manire dont ils doivent tre compris. Il est donc suggr quuneinstruction ministrielle apporte des prcisions aux questions suivantes :

    Quels sont les travaux concerns ?Les travaux viss par la dfinition sont ceux qui impliquent des sollicitationsbiomcaniques rptes susceptibles de laisser des traces identifiables,irrversibles et durables sur la sant. Ces sollicitations peuvent tre de plusieursnatures mais le travail rptitif tant apprhend en tant que rythme de travail,la frquence de la rptition de mouvements similaires ne peut tre compteobjectivement qu travers lobservation dune sollicitation soutenue des mmessegments corporels ou articulations des seuls membres suprieurs. Lescontraintes posturales conscutives un travail rptitif et impliquant parexemple le rachis peuvent tre prises en compte au titre des facteurs posturepnible ou manutention manuelle .

    Quest-ce quune frquence leve ?La frquence leve sentend dune frquence telle quelle ne permet pas ausalari une rcupration suffisante des structures anatomiques sollicites. Elle secaractrise par la ralisation dun nombre important dactions techniques dansun temps dtermin : 15 actions techniques ou plus pour un temps de cycleinfrieur ou gal trente secondes ou, dans tous les autres cas, trente actionstechniques ou plus en une minute. Ces autres cas couvrent les situations danslesquelles :

    - il existe un temps de cycle dfini suprieur trente secondes (par exemple,cycles industriels dtermins par une machine) ;

    - il existe un temps de cycle non dfini (par exemple, lorsque le temps quiscoule entre chaque tche cyclique changedun cycle lautredu fait de lavariabilit des produits) ;

    - il nexiste pas de temps de cycle identifiable (par exemple, lorsque les picesdfilent de manire continue sur un tapis automatique).

    Quest-ce quune cadence contrainte?La cadence est contrainte (par opposition une cadence libre) lorsque le salarine peut se soustraire de la situation de travail sans prjudice pour la production,le service ou lui-mme et ses collgues. On peut donc juger du caractre contraintdu temps imparti aux consquences attaches son non-respect.

    Lorsque le salari na pas la possibilit de rguler sa charge de travail et fairevarier les sollicitations biomcaniques, dispose de moindres marges de

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    manuvre et ne peut, par exemple, vaquer dautres occupations sans se faireimmdiatement remplacer, la contrainte temporelle simpose lui. La cadencecontrainte renvoie bien souvent des cadences machiniques mais peutrsulter dautres circonstances telles que la dpendance vis--vis de lamontet/ou de laval du poste de travail considr. Elle peut aussi rsulter de

    linterdpendance du collectif, ne serait-ce que par ncessit de se synchroniser.Il ny a pas de contrainte de temps imposelorsque la contrainte de temps, bienque prsente, peut tre planifie ou rgule par loprateur (constitution destocks tampons, autonomie dans lordre des tches, dans lorganisation de lajourne) ou ne lui interdit pas de prendre du retard. Lexistence de latitudes,dans la manire de faire et/ou dans le temps pour le faire, est reconnue de nature rduire les effets de la rptitivit. Il est possible dapprcier le caractrecontraignant du rythme de travail en rpondant, par exemple, aux questionssuivantes :

    o Le salari peut-il interrompre momentanment son travail quand il lesouhaite ?

    o

    Cette interruption ncessite-t-elle quil se fasse remplacer?o Doit-il justifier de cette interruption ?o Est-il oblig de se dpcher pour faire son travail ?o Etc.

    Comment compter les actions techniques ?En pratique, le comptage portera trs souvent sur la partie du membre suprieurvisuellement la plus mobile et sollicite. Il sagira le plus souvent de la main,quand bien mme celle-ci nexcute pas toujours exactement les mmesmouvements et surtout ne les excute pas seule. Laction technique saccompagne

    gnralement de dplacements du coude et/ou de lpaule (rgion corporellemobilisant le bras, lavant-bras, le poignet et leurs articulations respectives), quinont pas lieu dtre dcompts sparment. La main, qui est en tout tat de causetoujours sollicite, sera le plus souvent le segment sur lequel concentrer sonobservation pour comptabiliser aisment les actions techniques. Les actionstechniques sont mesures sparment pour chaque membre suprieur (maindroite et main gauche, par exemple). Les rsultats obtenus pour chaque membrene sont pas cumuls. Le rsultat retenu est le nombre dactions du membresuprieur le plus sollicit (exemple : 45 si la main gauche ralise 45 actionstechniques par minute tandis que la main droite en ralise 27).

    Exemple de comptage : une tche qui consiste pour la main droite :o prendre un objet dans une caisse (1 action technique),o le placer dans une rservation sur un plan de travail (1 action technique),o frapper trois fois dessus avec un marteau (3 actions techniques),

    revient accomplir 1+1+3 = 5 actions techniques.

    Comment estimer la dure dexposition?Le travail rptitif est celui qui est ralis de manire habituelle hauteur de 900heures ou plus par an. Ceci revient approximativement tre soumis cettemodalit de travail pendant la majorit du poste de travail (quatre heures ou plus

    par jour) et de la semaine (vingt heures ou plus par semaine). Le caractrehabituel sapprcie donc sur la dure dexposition. Celle-ci doit par ailleurs

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    prendre en compte lactivit normale de travail, y compris les interruptions etalas prvisibles inhrents, par exemple, aux temps darrtmoyens des machines(taux de service, etc.). Elle peut tre estime de faon simple, par sondages, encomptant plusieurs reprises le nombre dactions techniques par minuteralises par une catgorie homogne de salaris diffrents moments dune

    squence de travail reprsentative de la journe de travail. Les temps dercupration ou les rotations peuvent tre assimils des mesures de prventionds lors quils correspondent des priodes dactivit ne sollicitant pas lesmmes segments corporels ou articulations. Ils peuvent tre dduits du seuil cetitre.

    Conclusion

    La dfinition propose vise permettre aux entreprises, de tous secteurs et toutestailles confondues, de procder, selon une mthode de calcul simplifie, uneestimation du niveau de travail rptitif auquel leurs salaris sont exposs.

    Au vu des connaissances acquises, et malgr le caractre multifactoriel des risquesassocis ce mode de travail, elle concentre dans un indicateur unique lafrquence des actions lobjectivation des situations dont lintensitpermet douvriret alimenter les droits dun dispositif de compensation.

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    Sommaire

    Synthse ............................................................................................................................................... 3

    Sommaire ............................................................................................................................................ 9

    Rapport ............................................................................................................................................. 11

    Introduction .................................................................................................................................... 131 Les difficults poses par la dfinition rglementaire actuelle ........................................... 14

    1.1 Sagissant de la partie descriptive .......................................................................................................... 151.2 Sagissant des seuils ..................................................................................................................................... 15

    2 La caractrisation du travail rptitif ........................................................................................... 162.1 De la rptition crative lexcs de rptitivit..................... ..................... ...................... ............. 16

    2.2 La plurifactorialit, frein la simplification ..................... ..................... ..................... .................... .... 172.3 Le rythme du travail, traceur dterminant..................................... ..................... .................... ........... 172.4 Lexistence de seuils trs variables........................................................................................................ 192.5 Enseignements tirer pour le reprage des situations ............................. ..................... .............. 22

    3 Les mthodes dobjectivation et de calcul du travail rptitif............................................. 233.1 Les outils des prventeurs ........................................................................................................................ 233.2 Les outils dentreprise................................................................................................................................. 253.3 Ce que prvoient les conventions collectives ..................... ..................... ..................... ..................... 263.4 Ce que dit la normalisation ....................................................................................................................... 263.5 Enseignements tirer pour une acception partage ...................................... ..................... .......... 29

    4 Lvolution des secteurs et travailleurs concerns .................................................................. 294.1 Au travers des tudes et rapports disponibles ...................... ..................... ..................... ................. 29

    4.2 Au regard des caractristiques de certaines activits ......................................................... 354.3 Au regard des caractristiques de la production ..................... ..................... ...................... ............. 384.4 Quelle rptitivit retenir ? ..................... ..................... ..................... ..................... ..................... .............. 39

    5 Les effets sanitaires lis au travail rptitif (pathologies et traces identifiables,irrversibles et durables associes aux gestes rptitifs) ........................................................ 40

    5.1 Les donnes de la littrature .................. ..................... ..................... ..................... ..................... .............. 405.2 Les enseignements tirer pour le reprage des situations ................... .................... .................. 44

    6 Proposition de nouvelle dfinition rglementaire du travail rptitif............................. 456.1 La terminologie : des notions reprciser et des ambiguts lever .................... ................. 456.2 Les attendus de la dfinition .................................................................................................................... 556.3 Logique de raisonnement retenue ..................... ..................... ..................... ..................... ..................... 56

    6.4 Dfinition .......................................................................................................................................................... 576.5 Proposition daccompagnement............................................................................................................. 586.6 Liens avec les rfrentiels de branche ................................................................................................. 60

    LETTRE DE MISSION ..................................................................................................................... 63

    LISTE DES PERSONNES AUDITIONNEES ................................................................................. 65

    LISTES DES ENTREPRISES VISITES ........................................................................................ 69

    SANCES DE TRAVAIL ET/OU DCHANGES .......................................................................... 71

    BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................. 73

    SIGLES UTILISS ............................................................................................................................. 83

    ANNEXES ........................................................................................................................................... 85

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    Rapport

    Le simple est toujours faux. Tout ce qui ne l'est pas est inutilisable.(Paul Valery)

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    Introduction

    Partant du constat des difficults issues de la rforme des retraites adopte en janvier2014, la lettre de mission du 16 juillet 2015, lorigine du prsent rapport, raffirme lancessit de scuriser lapprciation par les employeurs de lexposition la pnibilit. Ladfinition du travail rptitif en particulier, en vigueur depuis le 1erjanvier 2015, posedes problmes dinterprtation et donc de mise en uvre. Elle est juge trop imprcisepar les entreprises.

    Il sagit par consquent de proposer une dfinition oprante de ce facteur depnibilit, adapte la ralit du travail dans les entreprises et qui permette :

    - de dire de faon simple quels sont les salaris qui y sont exposs ;- de ne laisser subsister aucun doute sur son application 1.

    La pnibilit est une ralit volutive. Il ny aurait rien de pire pour la prvention que delenfermer dans une approche fataliste qui aurait pour effet de dsigner, a priori, telleprofession ou telle activit comme rdhibitoirement pnible. Ce serait tout dabordfaire fi de lvolution des technologies qui, au cours des dernires dcennies, a permis deraliser des progrs et de supprimer ou allger des tches particulirementpnalisantes. Ensuite, mme si certains des dix facteurs de pnibilit se retrouvent demanire rcurrente dans certains secteurs professionnels, la ralit montre que la miseen uvre dans un ensemble cohrent de mesures de prvention dordre technique etorganisationnel permet dans la plupart des cas de rduire lexpositionaux risques unniveau prservant la sant des salaris. Plus que le secteur dactivit, ce sont donc lesconditions dans lesquelles le travail est organis et ralis qui sont dterminantes et cesconditions peuvent tre amliores.Par ailleurs, le travail pnible doit prsenter des caractristiques susceptibles de laisserdes traces identifiables, irrversibles et durablessur la sant, propres rduire la dureou la qualit de la retraite (douleurs, pathologies, perte dautonomie, moindremotricit). Cette apprciation doit tre ralise sur la base de la projection des effetscumuls des conditions d'exposition au cours de la carrire, mais partir descirconstances dexposition et des connaissances daujourdhui. Il peut donc y avoir uncart entre la caractrisation dun facteur de risque identifi comme pnible unmoment donn (pnibilit rglementaire) et la perception du mme facteur par les

    contemporains (pnibilit vcue ou ressentie). Aussi longtemps que les effets longterme de cette dernire ne sont pas tablis, ce sont les effets connus et documents de lapnibilit lgale qui doivent tre retenus pour louverture de droits sur le comptepersonnel de prvention de la pnibilit.

    Il en va ainsi du travail rptitif. Alors que les tudes montrent que de plus en plus desalaris dclarent y tre exposs, un examen attentif rvle que la nature de larptitivit invoque a volu ou sest dporte. Autrement dit, dautres formes detravail rptitif se sont faites jour. Elles ne saccompagnent pas ncessairement de

    1Sur le plan mthodologique, ce rapport sappuiesur une revue de la littrature franaise et internationale technique, mdicale,

    juridique et en sciences sociales ainsi que sur de nombreuses auditions. Mais il rsulte galement de la confrontation des lmentsrecueillis avec des constats et tests raliss lors de visites effectues dans des entreprises de la mtallurgie (construction automobileet quipementiers), de la chimie (cosmtique et chimie des silicones), de lindustrie alimentaire (abattoir et dcoupe de viande), desservices (blanchisserie industrielle) et de lagriculture (arboriculture). Voir liste de ces entreprises en annexe.

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    gestes plus rapides mais dune attention accrue, dexigences de dlai plus fortes, dunedpendance lautre renforce, dune perte de sens appauvrissant le geste, le rendantdonc dautant plus couteux psychiquement.Les risques sanitaires long terme de cette nouvelle rptitivit dans laquelle, au fil des enqutes, les cadres et professionsintermdiaires se reconnaissent de plus en plus (peut-tre est-il plus appropri de

    parler dintensification, terme de plus en plus utilis, voire de densification du travail),doivent encore tre documents. Dans limmdiat,faute dtre pris en compte au titre dela pnibilit, ils doivent tre valus et traits dans une logique de prvention,conformment aux principes gnraux de prvention du code du travail. linverse,le travail rptitif dont il est avr quil peut laisser des traces identifiables,irrversibles et durables sur la sant, renvoie des modalits de travail industrielimmortalises trs tt dans les Temps modernespar Charlie Chaplin et que tout le mondea en tte : faire toujours les mmes gestes une vitesse trs leve. Cette forme depnibilit na pas disparu et cest bien elle quil sagit ici de reprer travers ce que lonpourrait qualifier de haute rptitivit.

    Ainsi, prveniretgrerla pnibilitne se confondent pas. Une chose est de prvenirdesrisques ds quils ont t identifis et valus. La dmarche de prvention, aprspriorisation et planification, vise les liminer ou, dfaut, les rduire au niveau le plusbas possible. Une telle dmarche doit tre enclenche et conduite sans ncessairement yassocier un seuil ou bien avant que ce seuil, sil existe, ne soit atteint. Une autre estdidentifier les travailleurs exposs un tel niveau quils vont bnficier dun dispositifleur permettant dtre retirsde la situation de travail juge pnalisante via lvolutionde leur parcours professionnel ou lamnagement de leur temps de travail. Une telledmarche, qui relve de louverture de droits, implique cette fois un seuil dedclenchement, que lon pourrait qualifier de juridico-technique. Un tel seuil ne peut

    avoir dautre usage que celui pour lequel il a t conu. Il nest pas un seuil sanitaire et lefait dtre en dessous ne saurait lui seul tenir lieu de politique de prvention.

    En dautres termes, le travail rptitif tant complexe, certains partis-pris acceptablesdans une logique administrative ne le sont pas dans une optique exclusive deprvention. Seule lanalyse approfondie de lactivit dun poste ou dune situation detravail permet dapprhender lensemble desdterminants et leviers sur lesquels il estpossible dagir pour lerendre soutenable. La rptitivit peut tre prsente mais ne pastre la cause principale dune situation gnratrice de TMS. Aucun seuil, en termes devitesse, de dure, de proportion, ne saurait lui seul rendre compte de cette complexit.

    1 Les difficults poses par la dfinition rglementaire actuelle

    La dfinition rglementaire actuelle du travail rptitif contient une partie descriptive :- travail caractris par la rptition d'un mme geste, une cadence contrainte,

    impose ou non par le dplacement automatique d'une pice ou par larmunration la pice, avec un temps de cycle dfini .

    Elle fixe ensuite deux seuils alternatifs :- temps de cycle infrieur ou gal une minute ;- temps de cycle suprieur une minute comprenant plus de 30 actions techniques

    par minute.Elle est en outre assortie dune dure dexposition de900 heures sur lanne.

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    1.1 Sagissant de la partie descriptive

    Certains termes dune part, la construction de lensemble de la phrase dautre part, au

    demeurant proche de la rdaction issue des ngociations des partenaires sociauxinterrompues en 2008, peuvent poser des difficults dinterprtation.

    La notion de mme geste en premier lieu pose la question de savoir sil fautconsidrer exclusivement des gestes strictement identiques, alors quen pratique lessalaris effectuent trs souvent une sries dactions varies mais sollicitant le mmesegment corporel. Autrement dit, faut-il considrer un geste comme la rsultante dunensemble de mouvements et dactions varies (prendre un objet, le placer dans unorifice, clipper un boitier et actionner un bouton avec la mme main), le mme gestetant la reproduction lidentiquede cet ensemble ? Faut-il au contraire considrer quily a mme geste uniquement lorsquune articulation est sollicite dans des conditions

    strictement identiques ? Insrer une pice dans un orifice puis la clipper ne seraientalors pas assimils un mme geste et devraient tre compts sparment. Quelle quesoit la rponse apporte, la distinction est en pratique difficile oprer.

    Les termes impose ou non ensuite, et leur distributivit ou non au reste de la phrase,donnent lieu des interrogations sur les situations quil y a lieu dinclure et dexclure.

    La locution dplacements automatiques dune piceou par la rmunration la pice apparat date et constituer une alternative ne rendant pas compte de toutes les ralitsque peut couvrir aujourdhui lacadence contrainte.

    La notion de temps de cycle dfiniinterroge tous les secteurs dactivit et entreprises quiont des activits rptes mais des cycles et donc des temps de cycle variables ou ceuxqui nont pas de temps de cycle identifiable alors que la rptition est avre. Ladifficult est aggrave par le fait que les seuils renvoient dans tous les cas un temps decycle, infrieur ou suprieur la minute.

    1.2 Sagissant des seuils

    Dans le premier cas (temps de cycle infrieur ou gal une minute), il nest donn

    aucune indication sur ce qui se passe lintrieur du cycle, susceptible de caractriserson intensit. Il sensuit que tout cycle de travail infrieur une minute estautomatiquement considr comme caractrisant un poste pnible. On induit donc quecest la dure du cycle en soi qui pose problme, indpendamment de la frquence desmouvements (gestes en loccurrence) qui vont tre raliss durant la minute. Le mmetraitement est ainsi rserv des cycles de travail comportant respectivement, 3, 10, 20,ou 80 actions dans la minute Or, de telles situations ne sont videmment pascomparables du point de vue des rythmes quelles impriment et de leurs effetspotentiels sur la sant. Dans les faits, il existe de nombreux cycles de travail infrieurs une minute, voire trs infrieurs, qui peuvent incontestablement tre classs au rangdes activits rptitives mais dont ni la frquence ni la cadence des actions ralises

    lintrieur de ce cycle permettent de dduire quils sont pnibles. Lobservation montremme que de tels cycles peuvent conduire le salari soutenir le rythme sans

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    ncessairement devoir se dpcher. Ceci peut provenir du fait que le cycle de la machinepeut tre compens par lorganisation du travail en aval (exemple : 1 pice produite parla machine toutes les 4 secondes mais trois oprateurs pour rcuprer les pices ensortie, soit une pice toutes les 12 secondes, dont la seule action consiste faire glisserla pice depuis un tapis sur un rayonnage).

    Dans le second cas (temps de cycle suprieur une minute), on a cette fois retenu lenombre dactions techniques raliser pour caractriser la frquence, non pas du cyclemais des actions. Mais si ce nombre permet bien de caractriser la densit du travail, ilmet en difficult les entreprises dont le temps de cycle est variable ou qui nont pas detemps de cycle (exemple : pices de triage dfilant sur un tapis de manireininterrompue).

    2 La caractrisation du travail rptitif

    2.1 De la rptition crative lexcs de rptitivit

    La rptitivit, tout le moins la rptition, est le propre du travail. bien des gards,elle est aussi le gage de sa qualit, car le professionnalisme saffirme dans lacquisitionde lexpertise oprationnelle rsultant de la rptition de gestes qui permettent au finalde parler dungeste professionnel, cest--dire de la matrise dun savoir-faire valorisant.Il est donc en permanence ncessaire de garder lesprit quun dispositif visant lacompensation des effets potentiels du travail rptitif doit sintresser aux conditions de

    cette rptitivit. La caractrisation du travail rptitif, cest--dire lidentification descritres qui permettent de distinguer une tche rptitive dune tche non rptitivenest pas en soi suffisante. Il faut ainsi admettre que lorsque la rptitivit existe, ellepeut tre faible, modre, soutenable, voire mme confortable. Il faut ensuitediscriminer cette forme de rptitivit de celle qui est forte, leve et dont lintensit, ladure et le cumul vont justifier louverture de droits au titre du compte pnibilit.

    En dautres termes, il faut distinguer le travail rptitifen tant que caractristique neutredcrivant une modalit de travail, du travail rptitif en tant que facteur de risquedcrivant une forme de pnibilit du travail.

    Fabien Coutarel2 rappelle que la rptition est indispensable la performance et lasant ; la variabilit se cache dans la rptition . La formule peut paratre provocatricemais rappelle ce que lon connat bien propos de tout artiste de spectacle et desrptitions : plus on rpte, plus on se perfectionne ; plus on affine et amliore saprestation, plus on se professionnalise et sapproche de la cration, de la perfection, auprix de multiples retouches successives, jusqu tre juste. Mme rptitif, le cycle detravail subit des variations qui induisent des adaptations, des perfectionnements quisont le signe de la matrise oprationnelle du professionnel et de marges de manuvresalvatrices. Cest la disparition de ces marges qui devient problmatique, et cettedisparition est souvent le rsultat de cadences excessives. La dimension professionnelle

    du geste (en tant que savoir-faire) est alors dissoute dans la frquence excessive.2COUTAREL (F.) : "Les gestes rptitifs " in Les risques au travail pour ne pas perdre sa vie la gagner, 2015, p. 207-210.

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    F. Coutarel se rfre au travaux de K. Chassaing3: Nos rsultats confirment que lacombinaison dune demande forte (charge de travail) et de procdures trs contraintes,restreint llaboration des gestuelles , et pnalise ainsi la sant des oprateurs . Etdajouter: La job latitude renvoie aux possibilits de crer, de prendre des dcisions, maisomet de prendre en compte le rythme, la pression temporelle, qui peuvent entraver et

    rduire ponctuellement cette libertpotentielle de crer.

    Il reste que, mme pour les spcialistes, la rptitivit est un concept ambigu et difficile dfinir () Linvariabilit dune tche dont les activits sont relativement les mmes au fildu temps est associe la sollicitation des mmes tissus. Cette invariabilit diminue les

    moments pendant lesquels les structures peuvent rcuprer. Par contre, lexcution detches varies peut galement solliciter les mmes structures. Cest lorsque les tissus nontpas le temps de revenir leur tat initial de repos que les changements survenant lors dessollicitations ()peuvent saccumuler et occasionner des symptmes4. Selon Colombini, il nexiste pas de frontire claire entre un travail rptitif et un travail qui ne lest paset il ne se limite pas au travail cadence impose5. On verra toutefois, sur ce dernierpoint, qu dfaut de cadence impose ( tout le moins de cadence contrainte), la rptitivit libre nemporte par les mmes effets sur la sant.

    2.2 La plurifactorialit, frein la simplification

    Un consensus existe sur le fait que la rptitivit, prise isolment, nest pas un problmeen soi. Comme facteur de risque, le travail rptitif est complexe apprhender car sonimpact est dpendant, notamment, de son volume (proportion qui lui est consacre dansla journe de travail), de la prcision quil requiert, des forces appliques, des chocs

    imprims, des angles articulaires imposs et des postures auxquelles il contraint(flexions, torsions, extensions, etc.), des exigences temporelles dans lesquelles ilsexerce, de la charge cognitive, des exigences de qualit et des marges de manuvre etde rcupration dont dispose loprateur, etc. En pratique, il en rsulte une immensevarit des combinaisons rencontres et une forte variabilit des effets constats. Maiscest en particulier la combinaison, en tout ou partie, dune grande force, dune posturecontraignante et dune rptition importante qui est cause de danger et de lsions. Chaque facteur de risque nintervient que pour une part dans lapparition despathologies. Il est une composante parmi dautres dun faisceau plurifactoriel pourlequel il est donc trs difficile de dfinir des valeurs-seuil.

    2.3 Le rythme du travail, traceur dterminant

    Certains facteurs sont nanmoins des invariants. Systmatiquement cite, la frquenceest ainsi un des dterminants qui permet le mieux de discriminer et donc valuerlintensit des tches rptitives. Leffort et les contraintes angulaires sont galement

    3CHASSAING (K.) : "Les gestuelles lpreuve de lorganisation du travail: du contexte de lindustrie automobile celui du gnie

    civil", 2010, p. 207-210.4COLOMBINI (D.), DELLEMAN (N.), et al. : "Exposure Assessment of Upper Limb Repetitive Movements : A Consensus Document", inKARWOWSKI W., International Encyclopedia of Ergonomics and Human Factors, 2001.5ibid.

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    essentiels mais lacceptabilit dun niveau deffort ou de ladoption dune positionarticulaire extrme est dpendante de la dure et de la frquence de la contrainte subie6.

    Dans lultime version du projet de protocole daccord des partenaires sociaux, dat du 8juillet 2008 (document prparatoire la runion paritaire du 16 juillet suivant), il tait

    crit que le travail rptitif consiste en la rptition, plus de vingt heures par semaine,dun mme geste, une cadence leve, impose ou n on par le dplacement automatiquedune pice, avec un temps de cycle de moins de 1 minute. La dfinition rglementaire envigueur ce jour sest peu loigne de cette premire approche. Mais un des termesessentiels, qui justifie le rattachement de ce facteur de pnibilit la catgorie descontraintes lies aux rythmes de travail, napparat plus. Cest celui de cadence leve,remplac par cadence contrainte. Or, les deux notions ne se confondent pas. La prsencedes deux semble au demeurant ncessaire : cest parce que la cadence est leve quelleaggrave les sollicitations biomcaniques de segments et articulations dont elle empcheles priodes de rcupration ncessaires. Mais cest aussi parce quelle est contrainte,(que cette contrainte soit mcanique ou organisationnelle), que cette cadence devientpnible et empche loprateur de rguler son activit. Que lune des deux conditionsvienne disparatre (cadence faible ou possibilit relle de dterminer son proprerythme) et les conditions de la pnibilit, entendue comme contrainte de rythme, nesont plus runies.

    Il faut enfin prendre acte du fait que dans le triptyque contraintesphysiques/contraintes environnementales/contraintes de rythme , cest au titre decontraintes de rythmeet non des contraintes physiquesque les partenaires sociaux puisles pouvoirs publics ont retenu7 le travail rptitif. La cadence de travail, plus que lesefforts fournir, lesquels se retrouvent souvent pris en compte au titre des facteurs

    manutention manuelle et postures pnibles, a t privilgie pour le classement de cefacteur. Or, la logique juridique du compte personnel de prvention de la pnibilit(C3P) conduit considrer chacun des facteurs sparment. La prise en compte de leffetde synergie et de linterdpendance des facteurs quappellerait une dmarcheexclusivement prventive est ici carte et conduit devoir apprcier chaque facteur demanire indpendante.

    Ainsi, en sintressant la rptitivit du seul point de vue de rythme de travail, on estconduit se focaliser sur son traceur dterminant : la vitesse. En se concentrant sur lavitesse, comme rvlateur du rythme (au mme titre quon retient le poids de la chargecomme indicateur dintensit de la manutention manuelle ou le niveau de dcibels enmatire de bruit), on doit pouvoir fixer un seuil partir duquel on considrera que letravail rptitif est susceptible de laisser terme des traces identifiables, irrversibles etdurables. Ce faisant, on dclenchera louverture des droits tout en attirant lattention delemployeur sur la ncessit de prserver les quilibres dans ses choix de conception etdorganisation du travail en adoptant des vitesses de travail modres. On sait en effetque lamnagement ergonomique dun poste de travail en vue , par exemple, de rduireles distances de prhension des pices peut avoir un effet positif en rduisant leffort raliser pour atteindre ces dernires. Mais ce gain deffort peut tre rduit nant silest immdiatement consomm par laugmentation mcanique de la frquence rendue

    6

    HARICHAUX (P.), LIBERT (J.-P.) : "Ergonomie et prvention des risques professionnels. Tome 2, les contraintes musculo-squelettiques et leur prvention".7Au vu du caractre multifactoriel du travail rptitif (effort, angles articulaires), il aurait aussi bien pu tre class au rang desfacteurs physiques.

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    possible par cet amnagement. Cette acclration de frquence rduira les marges demanuvre et les capacits de rcupration du salari.

    Tout ceci se retrouve rsum dans un guide canadien commentant la norme ISO 11228-3 : La cadence du travail est un facteur important de la charge du travail. En effet, la

    cadence ou la vitesse dexcution peut influencer ngativement la sant des travailleurs,surtout lorsque cette dernire est contrle par une machine. Consquemment, lorsque la

    cadence impose est grande, il peut se produire un stress gnralis caractris par la

    surcharge de travail, par la rptitivit des gestes et par le manque de contrle sur le

    travail.( ) Ainsi, les facteurs de risque du dveloppement dune LATR (lsion attribuable

    au travail rptitif) comme la frquence des mouvements rptitifs, la dure dexposition et

    lintensit du travail sont tous des facteurs de risques qui, jumels la cadence du travail,

    peuvent tre trs dommageables pour le corps humain. Concrtement, si la vitesse ou la

    cadence augmente, les risques de dvelopper une LATR ou de subir une lsion

    professionnelle sont galement plus levs8.

    2.4 Lexistence de seuils trs variables

    Mme aborde sous le seul angle de la vitesse, la rptitivit reste plurielle car il sagitde parvenir faire la diffrence entre :

    - une rptitivit de lordre de la routine, voire du confort;- une rptitivit soutenue mais soutenable et ncessitant une valuation des

    risques et des mesures de prvention la rendant acceptable ;- une rptitivit haute (ou forte ou leve), caractrise par un seuil partir

    duquel la vitesse (cadence, frquence) sera juge dltre.

    La revue de la littrature en la matire montre quil existe des carts importants selonles sources. Mais ces carts sont peut-tre plus dus la finalit diffrente des travauxconduits, la mthodologie convoque ainsi qudes questions de terminologie et desmantique qu des dsaccords de fond.

    Parmi les dfinitions relatives la rptitivit des tches, celle propose par leprotocole SALTSA9prsente le mrite dtre issue dun groupe de consensus.Sont considrs comme mouvements rptitifs les actions ralises plus de 2 4 fois par minute ou lorsque les temps de cycle sont infrieurs 30secondes. Cette rptitivit est considre comme un facteur de risque de

    troubles musculo-squelettiques du membre suprieur si cette situationdure plus de 4 heures par jour. Ces dures de temps de cycle (< 30 sec.) etdexposition quotidienne (> 4 h/jour), sont frquemment reprises par dautressources et peuvent dores et dj servir de points de repre. En revanche, lenombre des actionsralises (2 4 par minute) parat faible au regard dautresvaleurs couramment cites dans dautres sources (cf. infra). Il sagit l dun

    8Connaissances - La manutention manuelle de charges", 2007, p. 21.s Lobjectif du groupe de consensus constitu la demande de lorganisation sudoise SALTSA () tait de btir un outil de recueildes TMS lis au travail. Cet outil nest pas destin au diagnostic dune pathologie avre, mais orient particulirement ver s larecherche des formes infra-cliniques de ces troubles. Ce choix a deux objectifs : dune part, utiliser ces signes sentinelles pour

    prvenir le plus tt possible les pathologies avres, et, dautre part, constituer une base de donnes standardise sur les TMS ().Ce consensus, ralis par un groupe dune trentaine dexperts europens, devrait tre applicable dans la population europenne etconstituer un outil pidmiologique commun. (MEYER et al., Troubles musculo-squelettiques du membre suprieur lis au travail,2002).

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    premier biais terminologique car le terme action ne recouvre icimanifestement pas celui daction technique, repris dans les travaux denormalisation et le texte rglementaire franais dfinissant actuellement letravail rptitif. (cf. infra). La notion daction retenue par le protocole de SALTSAest en ralit plus proche de celle de tche, cest--dire un ensemble dactions

    techniquesassocies une squence homogne de travail. Comprise ainsi, lactionpourrait regrouper un nombre important dactions techniques(de sous-actionsenquelque sorte), ce qui expliquerait la faible importance du seuil propos par leprotocole. Toute autre interprtation aurait pour effet dintgrer parmi lesactivits prsentant des risques de TMS des travaux certes rptitifs maisdifficilement assimilables de la haute rptitivit. Les commentaires du guidepour les comits rgionaux de reconnaissance des maladies professionnelles(C2RMP), qui sinspire de la dfinition du protocole10, semblent confirmer cetteanalyse en mettant en parallle actions et tches complexes : La rptitivitdesgestes peut tre considre comme prsente et significative si les actions sontrptes plus de deux fois par minute ou, en cas de tche complexe (enchanementcomplexe de gestes varis), si la squence gestuelle sous tendant laction est rpteplus de la moiti du temps de la tche.

    Dans le guidea lusage des medecins agrees pour la prise en charge des TMS desmembres superieurs chez les fonctionnaires, la meme de finition de la repe titiviteest retenue. Ce guide prcise en outre que sil existe un facteur rptitif, ilconviendra alors den apprcier limportance, en fonction de la durejournalire ouhebdomadaire dexposition :-la rptitivit est considre comme faible si elle est observe sur moins de deuxheures en continu, ou sur des dures cumules de moins de quatre heures sur la

    journe de travail;-elle est considre comme moyenne si elle est observe sur des priodes de deux trois heures en continu, ou sur des dures cumules de plus de quatre heures sur la

    journe de travail;-elle est considrecomme forte si elle est observe sur des priodes de plus de troisheures en continu .

    LINRS, dans une fiche consacre la conception et lamnagement des postesde travail (ED 79), rappelle en premier lieu que cest la rptitivit excessive desmmes oprations et surtout des mmes gestes qui est pathogne. La fichepropose les ordres de grandeur et prconisations suivants :

    -

    ne pas rpter le geste plus de dix fois par minute11; ()- permettre la prise de pauses, de prfrence au moment o loprateur en ressent le

    besoin (pauses de rcupration au niveau gestuel < 2 minutes et pauses de dtentede lordre de 10 minutes o loprateur quitte momentanment son poste) ;

    - fixer des objectifs de rendement et de charge de travail non excessifs. Le tempsallou pour effectuer des tches doit prendre en compte les incidents. Cest le cas

    10BERGERET (A.) et al. : "Guide pour les comits rgionaux de reconnaissance des maladies professionnelles institus par la loi du 27janvier 1993 (version consolide 2013)", p. 91-120.11Il est conseille dorganiser le travail de maniere a diminuer cette rptitivit : largissement, polyvalence, enrichissement destches pour les lignes de montage, dissociation entre le temps de cycle de la machine et le temps de cycle pour loprateur p our les

    postes de conduite de machine (ex. : par approvisionnement ou vacuation automatique des produits). Donner de lautonomie dansla gestion du temps. Il sagit dviter la dpendance par rapport au systme (logiciel ragissant rapidement, stocks tampons entrepostes successifs, appel des clients par loprateur au lieu de files dattente pour les postes en contact avec la clientle... (Fiche

    pratique de scurit. ED 79. Conception et amnagement des postes de travail, 1999, p. 4).

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    notamment des postes en fin de ligne qui cumulent les alas des pos tes en amont.Leffectif doit tre calcul pour viter une surcharge de travail lors des priodes depointe .

    Lenqute SUMER identifie le travail rptitif la rptition d'un mme geste ou

    d'une srie de gestes une cadence leve, 20 heures ou plus par semaine.Lenqute Conditions de travail repre quant elle, parmi les salaris quidclarent tre soumis un travail rptitif, la proportion de ceux pour qui chaquesrie de gestes dure moins d'une minute12.

    Lapproche physiologique considre que le geste ne peut tre excut que grce des adaptations circulatoires et respiratoires. Une estimation de la dpensenergtique travers la consommation doxygne induite par la nature et lavariation de lactivit musculaire durant le travail (mesure de la ventilationpulmonaire, frquence cardiaque, frquence respiratoire) peut donc tre ralise.

    Un niveau nergtique peut mme tre associ au temps durant lequel la tcheest poursuivie, de sorte quil serait possible de fixer une dure maximaletolrable. Buisset considre toutefois quil est difficile de fixer les niveaux etdures ne pas dpasser au cours dactivits professionnelles ou non, bien queltude des ractions physiologiques au cours du travail permette de prciser

    jusqu quels niveaux celles-ci sont rversibles par le repos. Il est galement malaisdaffirmer que les niveaux atteints nentranent pas une usure prmaturenapparaissant qu trs long terme. Cependant, quelques notions schmatiquessemblent pouvoir tre admises : ()13. Et de citer un pourcentage de la puissancearobie, une nergie totale maximale dpenser exprime en Kj par jour Onpourrait ds lors imaginer que le travail rptitif, et surtout le seuil partir

    duquel il est dltre, pourrait tre repr en sappuyant sur des variablesphysiologiques permettant de prdire un tat de fatigue (production dacidelactique) susceptible de conduire une usure professionnelle prmature. Desabaques pourraient alors tre produites. Ainsi, pour un type dactivit donne, des valeurs objectives correspondrait un profil nergtique de poste dontlemployeur pourrait sinspirer pour comparer un rfrentiel labor par labranche, les situations de travail rencontres dans son entreprise (travail lger,travail modr, travail pnible). Aucun abaque de ce type nest mobilisable cejour. Aussi, il est craindre que cette suggestion soit en pratique peu raliste,tant pour des raisons de faisabilit que parce quelle ne serait applicable qu dessituations de rfrence ne rendant que rarement compte de la ralit trs variedes situations pouvant tre rencontres en entreprise. Cette approche apparatau demeurant plus pertinente pour des travaux appelant une certaine forcemusculaire que pour lapprciation des limites de la seule rptitivit. Elleprsente surtout un intrt lorsquil sagit de raliser une analyse approfondie delactivit dans le cadre dune dmarche de prvention mais parat inoprantedans une logique de calcul rapide de seuil destin une ouverture de droits.

    12Lenqute Conditions de travail2013 (6edition), a t ralise auprs dunchantillon denviron 28 000enquts. Reconduite

    tous les 7 ans, elle est reconnue par le Conseil national de l'information statistique (CNIS) dintrt gnral et de qualit statistique caractre obligatoire.13BOUISSET (S.) : "Postures et mouvements" in ''Prcis de physiologie du travail. Notions d'ergonomie'', 1992, p. 29-105.

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    Plus gnralement la rptitivit est dfinie dans la littrature selon la dure du cycle detravail ou la proportion de temps ou les me mes actions sont excutes. Une hauterptitivit est ainsi souvent dfinie par un cycle infrieur a 30 secondes ou par unmme cycle occupant plus de 50 % du temps de travail quotidien. Mais, ces dfinitionsont t originellement proposes pour des fins de classification dans le cadre dune tude

    particulire et ne constituent pas une rfrence absolue ou un critre de scurit () Lefait quun cycle soit infrieur 30 secondes ne constitue pas ncessairement un risque ().Comme les mcanismes pathophysiologiques dapparition des lsions tendineuses semblent

    tre relis plus prcisment la frquence des mouvements, lestimation de ces derniers,plutt que la dure du cycle, semble tre une mesure plus prcise du risque. Selon des lignes

    directrices publies en 1994, une frquence daction de 2,5 mouvements par minute pourlpaule, de 10 par minute pour le coude et le poignet et denviron200 par minute pour lesdoigts constitueraient un niveau de risque lev pour la frquence, nonobstant les autresfacteurs de risque. On peut donc essayer de quantifier la rptitivit en estimant lafrquence dun mouvement ou dune action, par exemplele nombre dactions effectues parle travailleur (ex. ()nombre de coups de couteau par cycle de travail pour dpecer unpoulet, nombre de touches frappes lheure).14

    Enfin, lindustrie sait de longue date, pour sa gestion de production, dcomposer unetche complexe en tches lmentaires successives en recourant des mthodes dedtermination des temps, au demeurant toujours utilises. La plus rpandue est lamthode MTM (Methods Time Measurement), qui permet de dterminer avec prcisionle temps que demande un ensemble doprations par addition de temps de rfrencebass sur la notion dallure normale. Ces mthodes, mises en uvre en particulier parles ingnieurs et techniciens mthode, sont complexes, destines optimiser laproductivit et la rentabilit mais ne visent pas et ne permettent pas de dduire des

    seuils de rptitivit.

    2.5 Enseignements tirer pour le reprage des situations

    Ce panorama, non exhaustif, illustre la diversit des sources qui se proposent dequantifier les mouvements de lhomme au travail. Il est rsum dans des tableauxsimplifis et enrichi dautres exemples en annexe 1 du prsent rapport. Il en ressortquaucun seuil partag ne traduit actuellement une ralit par construction complexe.Dans le cadre dun dispositif de compensation et dune logique daccs des droitsacquis en fonction de tels seuils, la caractrisation du travail rptitif devra passer par

    une simplification des critres qui permettront den objectiver lintensit.

    14BAILLARGEON (M.), PATRY (L.) : "Les troubles musculo-squelettiques du membre suprieur relis au travail : dfinitions,anatomie fonctionnelle, mcanismes physiopathologiques et facteurs de risque", 2003, p. 41.

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    3 Les mthodes dobjectivation et de calcul du travail rptitif

    Outre les mthodes par questionnaire (ressenti des travailleurs) et les normesexamines au paragraphe 3.4, il existe un certain nombre doutils (check-list, grilles

    dvaluation) qui permettent de procder une valuation des risques de TMS, enparticulier des membres suprieurs. Si la rptitivit fait chaque fois partie des critresdapprciation prendre en compte pour raliser une cotation globale de la situationexamine, aucun de ces outils ne se consacre exclusivement lvaluation des effets desgestes rptitifs. Ils sont en outre conus des fins de reprage des risques et deprvention de leur apparition. Ils permettent donc didentifier lensemble desparamtres sur lesquels il est possible dagir pour en rduire loccurrence mais necherchent pas fixer de seuil universel ne pas dpasser. En outre, tentant de prendreen compte la multifactorialit des TMS, ils prsentent tous, malgr leur manifestevolont de praticit, un certain niveau de complexit et requirent pour leur mise enuvre une disponibilit qui rserve leur dploiement des entreprises dotes destructures et comptences adaptes. La liste ci-dessous passe en revue les outils les plusconnus et utiliss15.

    3.1 Les outils des prventeurs

    La check-list OCRA est une mthode dvaluation des risques qui prend enconsidration tous les facteurs de risque pertinents et sapplique aux activitsmultitches (activits complexes ou par roulement), ce qui permet destimer lerisque total pour le travailleur, et fournit les critres de prvision de loccurrence

    de troubles. Elle procde par tape conduisant calculer successivement :- le nombre dactions techniquesrelles effectues par poste de travail pour chaquemembre suprieur ;

    - le nombre total dactions techniquesde rfrence par poste de travail ;- lindice dit OCRA et valuer les risques.Elle se complexifie bien sr en fonction du nombre de tches raliser, les calculsdevant tre effectus pour chaque tche A, B, C, etc. puis agrgs selon une formulede calcul. Cette mthode ncessite du temps et des comptences spcifiques pourpouvoir tre mise en uvre.

    Loutil OREGE (Outil de Reprage et dEvaluation des Gestes), dvelopp par

    lINRS, vise a evaluer les facteurs de risque biomcaniques de TMS du membresuprieur. Mais sa mise en uvre suppose du temps (1 2 h par poste de travail)et surtout des comptences en ergonomie ncessitant de participer a uneformation dispense par l'INRS, la Carsat ou un organisme habilit. Il sinscritdans une dmarche gnrale de prvention et permet, dans ce cadre, dequantifier, aux cots des autres facteurs (effort et positions articulaires), lescontraintes biomcaniques reprsentes par la rptitivit. Celle-ci est valuesur une minute pour les cycles de travail inferieurs a une minute ou sur toute laduree du cycle pour ceux superieurs a la minute. Il sagit donc de prendre encompte la rptitivit de la gestuelle dans sa globalit et non celle des mouvements

    de chaque articulation du membre suprieur . Lechelle retenue (de 1 a 10)15Voir aussi le tableau gnral des outils dans DELALANDE-DANET,(V.) et al., " Troubles Musculo-Squelettiques", 2015, p. 55.

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    permet de distinguer six sous-catgories aboutissant un classement de lactiviten trois plages de rptitivit qualifies respectivement de faible, moyenne etforte. Ces 6 sous-catgories dfinissent le degr dintensit des mouvementsraliss :

    o main non occupee la plupart du temps ou pas de mouvement regulier ;o

    activit brve entrecoupe par de longues priodes de pauses ;o mouvement lent et continu avec pause courte ;o mouvement continu et regulier avec pause occasionnelle;o mouvement continu rapide avec pause peu frequente;o mouvement continu ou rapide ou rythme continu difficile a maintenir.

    Les deux dernires sous-catgories quivalent une rptitivit leve.

    En ne sappuyant sur aucun seuil quantitatif, la mthode saffranchit desdifficults inhrentes au comptage toujours dlicat et sujet interprtations desmouvements. Elle permet de faire un choix parmi une catgorisation qui peutcertes tre mise en discussion au cas par cas au sein de lentreprise mais qui

    relve du sens commun et de lobservation partage. Toutefois, le texte lgislatifrelatif au C3P prvoit la fixation dun seuilpour chaque facteur de risque. Il nestdonc pas possible de prvoir dans ses dcrets dapplication une mthodedapprciation purement descriptive.

    La check-list OSHA (USA)permet le dpistage rapide de la prsence ou non defacteurs de risque de TMS dans les situations de travail, en sintressant larptitivit, l'effort, l'amplitude articulaire, les vibrations, l'environnementthermique, l'organisation du travail. La mthode doit porter sur un nombresuffisant et reprsentatif d'oprateurs pour garantir la qualit du diagnostic. Lecritre retenu pour la rptitivit est la ralisation de mouvements identiques oucomparables effectus intervalles de quelques secondes. Mouvements ou gestesrpts toutes les 15 secondes ou moins . Sagissant des facteurs organisationnels,le critre retenu est : Pas de matrise des cadences de travail. Cadence de lamachine, travail pay au rendement, surveillance constante ou dlais impratifsquotidiens .

    La mthode danalyse de la charge physique de travail de lINRS, paruercemment (fvrier 2014), sappuie sur cinq indicateurs (efforts physiques,dimensionnement de la situation de travail, caractristiques temporelles,caractristiques de lenvironnement et organisation). Chacun de ces indicateurs

    est dtaill par une srie ditems qui doivent tre renseigns en vue daboutir un classement selon quatre niveaux de risque : minimal, acceptable, sousconditions, inacceptable. Lindicateur des caractristiques temporelles sintresseainsi :

    o la frquence des tches ou activits rptes (corps entier), exprime ennombre de fois par minute ;

    o le nombre dactions techniques rptes (membres suprieurs), exprimen nombre de fois par minute ;

    o le travail en flux tendu (se dpcher), exprim par un adverbe de temps ;o la dure dexposition une charge physique lourde, exprime en nombre

    dheures;o

    la priode de rcupration, exprime en temps de pause par heure ;o la libert de pauses, exprime par un adverbe de temps ;

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    o la variation imprvisible de lactivit (alas), exprime parun adverbe detemps.

    Le nombre de 30 actions techniques par minute est considr comme devantdclencher des actions de prvention.

    Il existe dautres mthodes, listes notamment par la norme ISO 11228-316, donnant desrsultats quantitatifs et portant le plus souvent sur les membres suprieurs du corps.

    Les recommandations de la CNAM-TS

    Les recommandations issues de la CNAM-TS sont des textes qui dfinissent etregroupent les bonnes pratiques de prvention des risques lis une activitprofessionnelle donne. Assimiles aux rgles de l'art proposes aux professionnels,elles ne revtent pas un caractre rglementaire. Mais leur porte pratique est avrepour la prvention des risques professionnels. Elles tirent en outre leur forte lgitimitde leur mode mme dlaboration puisquelles sont conues et adoptes par lesreprsentants des organisations professionnelles et syndicales sigeant aux ComitsTechniques Nationaux (CTN).Un examen des trente dernires recommandations adoptes par les CTN montre que lesfacteurs rglementaires de pnibilit (bruit, vibration, manutention manuelle, etc.) sontfrquemment pris en compte et font lobjet de prconisations concrtes. Il n'y est enrevanche pas question de frquences ou de temps de cycle. noter que larecommandation R440, relative aux postes d'encaissement dans les hypermarchs etsupermarchs, aborde lvaluation des risques sous langle de la manutention manuelledes charges mais pas de la rptitivit. Elle limite la manipulation des produits en caissedans la grande distribution en fixant un poids maximum de 8 kg et invite, pour les

    produits entre 3 et 8 kg amliorer leur prhension ainsi qu agir auprs des fabricantspour que les codes-barres soient plus visibles, aisment accessibles et imprims surtoutes les faces.

    3.2 Les outils dentreprise

    Certaines grandes entreprises possdent leur propre rfrentiel dvaluation de larptitivit. Lune delles, implante dan le monde entier, procde lanalyseergonomique de ses potes de travail afin d'valuer les postures au niveau de chaquearticulation. Elle comptabilise les seuls mouvements effectus au-del des postures dites

    neutres. Le tableau ci-dessous lui permet ensuite de dfinir, en fonction du nombre demouvements par jour, le niveau de risque (faible, modr et lev). La mthode est trsfine et nest pas transposable dans les PME/TPE. Seule une campagne reprsentative demesurages, raliss par exemple par une branche professionnelle, pourrait le caschant participer llaboration de Matrices Emploi Exposition17permettant dereprer le classement des mtiers ou activits les plus courantes du secteur considr.

    16La norme ISO 11228-3 met en garde contre tout sentiment dobjectivitexcessive des mthodes dvaluation des risques dont lescritres de classification peuvent toujours tre empiriques , (ISO, 2007, p. 13).17 Une matrice emplois-expositions (MEE) donne la correspondance entre des intituls demplois (en gnral dfinis par lacombinaison dune profession et dun secteur dactivit) et des indices dexposition une ou plusieurs nuisances (). Elle peut treutilise dans des tudes pidmiologiques grande chelle, mais aussi par les acteurs de la sant et de la scurit au travail comme

    aide au reprage des expositions attaches une profession / un secteur dactivit dun travailleur donn. (Qu'est-ce qu'une matriceemplois-expositions ? INVS, 2012).

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    3.3 Ce que prvoient les conventions collectives

    Certaines conventions collectives abordent la question du travail rptitif dans le cadredaccords pnibilit conclus sous lempire du dcret de 2011. Parmi elles, certainesreprennent expressment la partie littraire de la dfinition rglementaire actuelle(inchange depuis 2010), sans plus de prcision (ex : CCN de la fabrication et ducommerce de produits usage pharmaceutique, parapharmaceutique et vtrinaire ;accord du 15 fvrier 2012).Dautres ont apport des prcisions, parfois en termes de seuils18. Cest le cas de:

    - la CCN de la chaussure et des articles chaussants (accord du 26 fvrier 2013) : Excution pendant plus de 20 heures par semaine dune tche dont le temps decycle est infrieur 30 secondes ou dune tche dont le temps de cycle est suprieur

    30 secondes mais dont la ralisation sollicite plus de la moiti du temps de cycle lemme geste ;

    - la CCN du commerce de dtail de gros prdominance alimentaire (accord du 25janvier 2012) : Laccomplissement dau moins 20 cycles par minute pendant aumoins quatre heures par jour ;

    - la CCN des coopratives et socits dintrt collectif agricole btail et viande(accord du 15 novembre 2012) : La rptition dunmme geste cadence leve(lien stress et TMS) : le diagnostic pralable a permis didentifier cette catgorie derisque qui concerne la grande majorit des postes de production dans les

    entreprises dabattage et de transformation.

    3.4 Ce que dit la normalisation

    Trois normes apparaissent particulirement axes sur les travaux rptitifs. Elles nontpas toutes exactement la mme porte ni le mme primtre mais la plus rcentedentre elles effectue des renvois aux deux autres:

    18Le dcret n2011-354 du 30 mars 2011 relatif la dfinition des facteurs de risques professionnels ne comportait pas de seuils.

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    - Une norme europenne (NF EN 1005-5) de mai 2007 ; consacre lapprciationdu risque relatif la manipulation rptitive frquence leve lors delutilisation de machines, elle sadresse tout particulirement aux concepteurs demachines ;

    - Une norme internationale (NF ISO 11228-3) de novembre 2007, consacre la

    manipulation de charges faibles frquence de rptition leve ;- Une norme franaise (NF X 35-119), de juillet 2015, consacre lvaluation et

    aux valeurs seuils de la contrainte biomcanique de tches rptitives desmembres suprieurs.

    Pour une valuation simplifie, la norme NF EN 1005-519retient que lon est en situationdactes rptitifs frquence faible lorsque:

    - le temps de cycle est suprieur 30 secondes ;- les mmes genres daction technique ne sont pas rpts pendant plus de 50 %

    du temps de cycle.La situation est galement juge satisfaisante lorsque la frquence des actionstechniques des membres suprieurs est infrieure 40 actions par minute.

    Pour une valuation simplifie toujours, la norme ISO 11228-3 considre que si la duredu travail rptitif est infrieure 1 heure par jour ou 5 heures par semaine, le risqued la rptition est ngligeable. Elle retient ensuite, pour identifier les facteurs derisque, lexistence d un cycle de travail ou une squence de mouvements rpt(e) plusde deux fois par minute et pendant plus de 50 % de la dure de la tche . Elle classe enzone verte (sans danger) les mouvements rptitifs nexcdant pas 3 heures au total aucours dune journe de travail, qui ne sont pas effectus plus dune heure sans pause et

    lorsquils ne sont associs aucun autre facteur de risque. Ces mmes mouvements sontclasss en zone rouge (inacceptable) lorsquils sont effectus pendant plus de 4 heuresau cours dune journe de travail normal. Cette norme se propose ensuite daffinerlvaluation partir de questions couvrant dautres situations (existence de flexions,rotations, force, etc.) dont la rponse induit un classement en zone verte, jaune ou rougeselon la dure concerne dans la journe et lexistence ou non de pauses.

    La norme franaise NF X 35-11920, du 24 Juillet 2015, propose une mthodologiedvaluation et des valeurs seuils de la contrainte biomcanique des membressuprieurs lors de lexcution de taches repetitives a frequence elevee. Elle sappliquelorsque les tches rptitives :

    - sont effectues avec une frquence suprieure 20 actions techniquespar minuteavec une main ;

    - impliquent, avec une ou deux mains, un effort musculaire mme faible, ou desmanipulations de charges infrieures 3 kg ;

    - sont realisees sur une duree inferieure a 8 h par jour.

    Son approche et sa parution trs rcente mritent de sy attarder.

    19La norme EN 1005-5 considre quil nexiste aucun phnomne dangereux pour les membres suprieurs induit par les gestes

    rptitifs lorsque quil nexiste pas de cycle de travail ou lorsque, en prsence dun cycle de travail, les activits perceptives oucognitives prdominent nettement et les mouvements des membres suprieurs sont rsiduels . (AFNOR, 2007, p. 44).20"NF X 35-119. Ergonomie -Manipulation a frequence e levee - valuation et valeurs seuils de la contrainte biomcanique de tchesrptitives des membres suprieurs", AFNOR,2015.

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    Actant lorigine multifactorielle des TMS, elle prend le parti de naborder que lescontraintes biomcaniques des activits rptitives, dont elle considre quelles sont lesmieux connues et une composante importante du risque dapparition des pathologies.

    trangement, alors quelle nen fait pas son unit de temps, la norme sappuie beaucoup

    sur le cycle de travail. Elle en donne une dfinition qui renvoie la notion dactionstechniques.Ainsi, le cycle de travail est-il dfini comme une squence dactions techniquesqui sont toujours rptes de la mme faon.La notion de squencerenvoie quant elle celle de temps de cycle, dfini dans la norme comme le temps coul entre le dbut et lafin dun cycle de travail (en secondes).En rsum, la notion de cycle de travail impliqueun dbut et une fin identifiables, entre lesquels sont effectues des actions manuelleslmentaires telles que tenir, tourner, pousser, couper, qui se rptent lidentique. Laction technique est compare dans la norme aux mouvementslmentaires servant de rfrence dans les methodes d'analyse des taches utilisees dansl'industrie pour determiner le temps necessaire a la realisation dune operation.

    La notion de tche rptitiveest elle aussi dfinie par cette norme. Elle secaractrisepardes cycles de travail rpts. Ainsi, lorsque lon parle de tches rptitives, on inclut deuxtypes de rptition :

    - celle qui consiste toujours reproduire les mmes actions techniques au seindunmme cycle ;

    - celle qui consiste rpter ledit cycle.

    La norme NF X 35-119 introduit ensuite cinq familles de facteurs de contrainteconduisant pondrer des valeurs seuil de rfrence (VSR) permettant de situer la

    rptitivit dans une zone acceptable (verte), sous condition (jaune) ou inacceptable(rouge). Il sagit de leffort, de la posture, du temps, de lexcutionet de lorganisation dela tche. Le facteur de contrainte relatif lorganisation est lui -mme subdivis en sous-facteurs tels que limpossibilitde faire varier les modalits de lexcution de latche (absence dautonomie temporelle et gestuelle), linterruption ou le changement detache (inattendue, incontrlable...), le rythme dactivite soutenu et impose par descollgues, une machine, des clients..., le salaire au rendement, le fini-parti ,limpossibilit davoir de lentraide. Tousces co-facteurs sont aggravants et conduisent abaisser les seuils partir desquels la rptitivit devient problmatique.

    Ainsi, en labsence de contrainte particulire:

    - le seuil de contrainte risque minimum, en de duquel lactivit rptitiveest considre comme prsentant un risque rduit pour tous les oprateurs, estfix 40 actions techniquespar minute (zone verte);

    - la valeur limite acceptable, partir de laquelle le travail rptitif entre dansune zone de risque accru ncessitant une analyse approfondie, est fixe 80actions techniquespar minute (zone jaune) ;

    - la plage situe entre 40 et 80 actions techniques est considre commeprsentant un risque rduit pour le plus grand nombre de travailleurs (elle estdonc incluse dans la zone verte);

    -

    la valeur maximale sous condition, au-del de laquelle le travail rptitifoccupe une zone inacceptable imposant une rduction urgente des contraintes

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    permettant un retour dans la zone acceptable, est fixe 110 actions techniquespar minute.

    Mais la prise en compte des facteurs de contrainte, qui conduit appliquer descoefficients de correction ces valeurs de rfrence, peut aboutir, par exemple, fixer la

    valeur maximale sous conditions 57 actions techniquespar minute (au lieu de 80) ou leseuil de contrainte risque minimum 25 (au lieu de 40). Ce rsultat est le fruit duntravail dobservation, de calcul puis de positionnement dans une zone de risquencessitant une stratgie de comptage relativement labore.

    3.5 Enseignements tirer pour une acception partage

    En rsum, les outils existant mettent en vidence le recours une grande varit determes et de notions voisines mais aussi concurrentes. Des mots diffrents servent

    dsigner le mme objet tandis que des termes identiques ne sont manifestement pastoujours compris de la mme manire. Il apparat que chacun dentre eux contient enralit toujours plusieurs significations possibles. Une clarification simpose donc en vuede la future dfinition normative du travail rptitif mais, surtout, une explicitation de lasignification attache chaque terme retenu. Enfin, les variations entre chaque mthodeillustrent et confirment une intelligibilit partage du travail rptitif mais labsence deseuil universel.

    4 Lvolution des secteurs et travailleurs concerns

    4.1 Au travers des tudes et rapports disponibles

    Lidentification des secteurs et des travailleurs concerns par le travail rptitif estprincipalement ralise en France au travers des enqutes Sumer (DARES-DGT-DGAFP)et Conditions de travail (DARES-DREES-DGAFP-INSEE). Bases sur des mthodes parquestionnaire, ces enqutes permettent dapprcier les volutions des expositionsdclares au cours des dernires dcennies. Elles produisent en revanche des rsultatsqui sont videmment troitement dpendants de la nature des questions poses.

    Lalternance chronologique de ces tudes et des rapports qui les ont jalonnes, conduit retracer les volutions suivantes.

    Dans lenqute Sumer 1994, la DARES21remarquait que si un salari sur quatreet un ouvrier sur deux connaissait des contraintes articulaires durant le travail,ces dernires tant lies des gestes rptitifs une cadence leve ou a uneposition force dune ou plusieurs articulations, il existait un profil particulier desalaris exposs : Les ouvrires non qualifies rptent plutt les mme gestestout au long de leur travail ; les ouvriers qualifis effectuent des travaux exigeantde faon ponctuelle la position force dune ou plusieurs articulations. Au total,cette tude montrait que 28 % de lensemble des salaris (soit 3,4 millions)

    21HERAN-LE ROY (O.), SANDRET (N.) : ''Les contraintes articulaires pendant le travail'', 1997.

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    taient exposs des contraintes articulaires, parmi lesquels 13 % rptant lemme geste ou une srie de gestes cadence leve. Parmi ces 13 %, 44,2 %effectuaient des gestes rptitifs pendant plus de 20 heures par semaine.

    Sumer 1994 montrait galement que si les personnes qui effectuent un travail

    rptitif pendant plus de 20 heures sont majoritairement des ouvriers etouvrires non qualifis dont les mmes gestes sont la consquence dunprocessus de production mcanis. A contrario, les ouvriers qualifis delalimentation artisanale exposs aux gestes rptitifs, le sont trsmajoritairement moins de 20 heures par semaine (71 %). Ceci peut sexpliquerpar le fait que leurs tches de fabrication sont beaucoup plus varies. Cettecaractristique se retrouve dailleurs dans les statistiques relatives au travailncessitant une position force des articulations. Les hommes concernsdclarent y tre exposs le plus souvent moins de 20 heures par semaine car ilssont occups diverses tches ne sollicitant pas les mmes contraintesposturales.

    Par ailleurs, toujours dans Sumer 1994, les gestes rptitifs cadence leve sontdissocis du travail la chane. Ce dernier est dfini comme un travail rptitif, cadence dtermine, sur un produit qui, soit se dplace devant le salari, soit luiest transmis par son voisin, sans que soient constitus entre eux des stocks-tampons . Il est trait dans la partie du questionnaire consacre aux contraintesde rythme de travail (question n 110 : Travaillez-vous la chane ? ), tandisque la rptitivit est traite dans la partie du questionnaire consacre auxcontraintes articulaires (question n 234 : "Rptition d'un mme geste ou d'unesrie de gestes une cadence leve"). Il en rsulte que les rsultats ne font pas

    ressortir exactement les mmes secteurs dactivitconcerns22

    .Dans la premire catgorie (gestes rptitifs) apparaissent :

    o lhabillement et le cuir (56 % de salaris exposs);o lagriculture (42%) ;o lindustrie agroalimentaire (33 %) ;o les services personnels (45 %).

    Dans la seconde catgorie (travail la chane) apparaissent:o lindustrie agroalimentaire (20%) ;o le bois et le papier (16 %) ;

    o

    le cuir et habillement (25 %) ;o lindustrie automobile (17%).

    Sumer 1994 indiquait enfin que le travail rptitif ne se rencontre pas que danslindustrie mais concerne galement les ouvrires non qualifies du tri, delemballage, de lexpdition, ainsi que les ouvrires du marachage, delhorticulture, de la viticulture et de larboriculture ou encore les caissires(terme de lpoque) de la grande distribution.

    22Ibid.

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    Lenqute conditions de travail de la DARES, en 1998, fait galementrfrence au travail la chane mais formule, quant elle, les questions de lamanire suivante :- Question n41 : "Travaillez-vous la chane ?" (page 12)- Question n42 : "Votre travail consiste t-il reprer continuellement une

    mme srie de gestes ou d'oprations ?"- Question n43 : "Chaque srie dure-t-elle moins d'une minute ?" (page 13)

    Elle identifiait alors, parmi les secteurs exposs au travail rptitif :- lindustrie agroalimentaire;- lhabillement et le cuir;- lindustrie automobile;- lagriculture;- la sylviculture et la pche ;- lindustrie du bois et du papier;- lassemblage lectronique et le secteur manufacturier.

    Commentant Sumer 2003, une enqute de la DARES en 200623rappelait que lesgestes repetitifs concernent surtout les ouvrires : Prs de la moiti desouvrires non qualifies de type industriel y sont exposes, et plus encore dans le

    secteur de l'habillement et du cuir (64 %). Elles sont encore une sur deux dans cecas dans l'industrie automobile, l'agroalimentaire et la chimie. Plus gnralement,lenqute indique que 16,9 % des salaris doivent rpter dans le travail le mmegeste ou la mme srie de gestes une cadence leve, soit 2,95M de travailleurs. Cefacteur de pnibilit touche autant les hommes (16,7 %) que les femmes (17,2 %).Ce sont les ouvriers non qualifis et les ouvriers agricoles qui sont essentiellement

    touchs par cette contrainte (4,1 %). 6,6 % des salaris (1,15M de travailleurs) sontastreints ces gestes rptitifs au moins 20 heures par semaine. 8,7 % des salaris(1,52M de travailleurs) sont astreints ces gestes rptitifs avec un temps de cyclede moins dune minute et 4,9 % (857 200) le sont cette cadence leve 10 heuresou plus par semaine .

    partir de Sumer 2010, une description des facteurs de risque a t ralisepar secteurs (cf. tableau infra). Il en ressort quen 2010 toutes duresconfondues, 25 % des salaris rptent un mme geste ou une srie de gestes(contre 17 % en 2003 et 20 % en 1994), et plus de 8 % des salaris le font plus de 20heures par semaine. Ces gestes rptitifs concernent autant les femmes que leshommes, surtout des ouvriers et ouvrires non qualifi(e)s. Les gestes rptitifsaffectent particulirement les ouvrires non qualifies de lindustrie. Ils sont trs

    frquents dans lhabillement et le cuir (presque un salari sur deux), et un

    moindre degr dans les services personnels et domestiques, les industries desquipements du foyer, de lagroalimentaire et lagriculture. 24

    23ARNAUDO (B.) et al. : Contraintes posturales et articulaires au travail , 2006, p. 4.24BRIRE (J.) et al. : "Des indicateurs en sant travail. Les troubles musculo-squelettiques du membre suprieur en France",2015, p.28.

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    Sumer 2010 permet aussi de reprer les familles professionnelles les plusconcernes par la rptition dun mme geste ou dune srie de gestes unecadence leve, raison de 20 heures ou plus par semaine25:

    Famille professionnelle,concerne par la rptition

    d'un mme geste ou d'une sriede gestes une cadence leve

    Effectifs salaris exposs20h ou + par semaine

    Proportion en %

    Ouvriers non qualifis desindustries de process 104 389 40Ouvriers du textile et du cuir 20 453 28Marachers, jardiniers,viticulteurs 38 991 27

    Caissiers, employs de libreservice 113 293 27Coiffeurs, esthticiens 38 701 26Ouvriers non qualifis de lamtallurgie, de la mcanique,du bois 86 652 26Bouchers, charcutiers,boulangers 32 723 25Ouvriers non qualifis de lamanutention 98 589 25Ouvriers de l'lectricit et de

    l'lectronique 25 469 17Ouvriers du second uvre dubtiment 73 058 15Ouvriers du gros uvre du BTP,du bton et de l'extraction,conducteurs d'engins dubtiment et des travaux publics

    86 649 12

    Donnes extraites de : Les expositions aux risques professionnels ; les ambiances et les contraintes physiques. Synthse stat,numro 08 novembre 2014 .

    Enfin, suite lenqute conditions de travail 2013, la DARES constate une

    reprise de lintensification du travail chez les salaris : Prs dun tiers dessalaris cumulent des contraintes de type marchand (avoir son rythme de travailcontraint par une demande extrieure - clients, public - obligeant une rponseimmdiate) avec des contraintes de type industriel (avoir son rythme de travailcontraint par le dplacement automatique dun produit ou dune pice, par la

    cadence automatique dune machine ou encore par des normes ou des dlais

    respecter en une journe au plus26) .Sagissant du critre traditionnel dapprciation des contraintes de rythmemcaniques, les volutions la hausse sont sensibles depuis 1978 mais sansrupture flagrante, comme latteste le tableau ci-dessous. Ce constat doit

    25VINCK (L.) : "Les expositions aux risques professionnels. Les ambiances et contraintes physiques. Enqute SUMER 2010", 2014.26ALGAVA (E.) et al. : ''Conditions de travail : reprise de l'intensification du travail chez les salaris'', 2014, p. 1.

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    cependant tre nuanc en fonction des catgories socioprofessionnelles. Ainsi,pour la seule catgorie des ouvriers (chiffres en caractre gras), la hausse estnettement plus leve :

    Rythme de

    travailimpos par :

    1978 1984 1991 1998 2005 2013

    Ledplacementautomatiquedun produitou dunepice

    3 3

    6,5(ouvriers)

    4

    10,7

    6

    15,7

    7

    18,5

    8

    21,7

    La cadenceautomatique

    dunemachine

    6 4

    11

    6

    15,4

    7

    18,9

    7

    20,6

    7

    20,3Dautrescontraintestechniques

    7 7

    11

    11

    16,7

    16

    25,8

    16

    24,6

    17

    30,4Statistiques extraites de DARES analyses juillet 2014 N 049

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    Les contraintes de rythme de nature organisationnelle marquent une hausse beaucoupplus nette :

    Rythme detravail impos

    par :

    1978 1984 1991 1998 2005 2013

    Ladpendanceimmdiate vis vis descollgues

    13 11 23 27 27 30

    Des normesde production satisfairedans unejourne

    21 19 38 43 42 46

    Une demandeextrieure 34 39 57 65 65 69dontobligeant une rponseimmdiate

    28 46 54 53 58

    Lescontraintesousurveillancespermanentsexercs par la

    hirarchie

    17 23 29 30 31

    Un contrleou un suiviinformatis

    25 35

    Statistiques extraites de DARES analyses, juillet 2014, N 049.

    Ces donnes sont de nature attester une hausse de lintensification du travail.Elles ne sont en revanche pas synonyme de cadence leve, puisque le sentimentdurgence a plutt dcru lgrement : la proportion de salaris qui disent devoirse dpcher toujours ou souvent dans leur travail est passe de 52 % en 1998,

    48 % en 2005 et 46 % en 201327. La hausse des contraintes temporelles peruesnest donc pas assimilable un travail manuel cadence leve et semblerenvoyer des exigences de travail moins quantitatives que qualitatives. Lesrsultats sont alors contrasts et invitent la prudence. Plus quune rapiditmcanique, les salaris semblent en ralit relater une acclration ou unedensification du travail en gnral.Ltude constate ainsi que les marges de manuvre diminuent sensiblement, etceci pour toutes les catgories socioprofessionnelles entre 2005 et 2013 lexception notable des ouvriers non qualifis pour lesquels elles augmentent.

    27Ibid.

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    Sagissant dutravail rptitif proprement parler, lenqute de 2013 montre que41 % des salaris dclarent que leur travail est rptitif (pour 20 % en 1984),tandis que 24,8 % dclarent que chaque srie de gestes dure moins dune minute(pour 27,3 % en 1984). Mais nouveau, cette dernire donne ne renseigne passur le nombre dactions effectuer durant le temps imparti, autrement dit sur

    lintensit de la rptitivit. Elle ne permet donc pas de dduire le nombre depersonnes dont la vitesse des mouvements est leve. Il reste que la rptitivitdclare a augment dans toutes les catgories socioprofessionnelles (cadres,professions intermdiaires, etc.) et particulirement chez les ouvriers (de 34,7 % 64,3 % de 1984 2013) et dans toutes les classes dge(cf. tableaux en annexe2).

    Des croisements oprs partir des donnes de Sumer 2010 permettent de reprer,parmi les personnes concernes par un travail rptitif pendant plus de vingt heures parsemaine, la proportion de celles qui disposent de marges de manuvre susceptibles derduire les effets potentiels du travail rptitif.

    Il en ressort que :- 24 % de ces salaris font une rotation rgulire de leurs tches (soit plus que la

    population gnrale des salaris dont la proportion tombe 19 %). 26 % ne fontde rotation quen cas durgence et 50% ne font pas de rotation ;

    - 34 % peuvent faire varier les dlais (contre 44 % de la population gnrale dessalaris) ; 48 % ne le peuvent pas ; 18 % nont pas de dlai;

    - 23 % peuvent toujours faire varier lordre des tches (contre 36 % de lapopulation gnrale des salaris) ; 42 % le peuvent selon les tches ; 27 % ne lepeuvent pas et 8 % nont pas dordre tabli).

    Il sensuit que, si de mani