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MISE AU POINT / UPDATE THÉMA Troubles anorectaux après chirurgie du prolapsus génital Anorectal disorders following pelvic organ prolapse surgery X. Deffieux · T. Thubert · C. Trichot · A.-C. Donnadieu · E. Faivre Reçu le 29 avril 2010 ; accepté le 4 mai 2010 © Springer-Verlag France 2010 Résumé Les troubles du transit (constipation) et de la défé- cation (dyschésie) sont des symptômes assez fréquemment rapportés chez les femmes qui consultent pour un prolapsus génital. Toutefois, il existe très peu de données sur la prévalence des troubles anorectaux survenant de novo après une chirurgie pour prolapsus génital. L évaluation comporte un interrogatoire et un examen clinique complet, ainsi que des explorations physiologiques comme la manométrie anorectale, le test dexpulsion au ballonnet, la défécographie et lIRM pelvienne. Une constipation de novo est rapportée par des femmes opérées (jusquà 26 %) dune promontofixation par laparotomie, et cette prévalence varie de 5 à 19 % chez les femmes opérées dune promontofixation cœlioscopique. La prévalence de la dyschésie de novo varie de 2 à 4 % chez les femmes opérées soit par promontofixation cœlioscopique, soit par voie vaginale avec mise en place dune prothèse synthétique en polypropylène. Au total, la survenue de novo de troubles anorectaux après chirurgie du prolapsus nest pas une situation si exceptionnelle, et les patientes doivent en être informées avant lintervention. Mots clés Promontofixation · Prolapsus génital · Troubles anorectaux · Dyschésie · Constipation · Incontinence anale Abstract Functional disorders of defecation (constipation, obstructive defecation syndrome, faucal incontinence) are common in women presenting with pelvic organ prolapse. However, very few data are available concerning de novo anorectal disorders following pelvic organ prolapse surgery. Evaluation includes detailed history and rectal and pelvic exam, together with physiologic tests such as anorectal manometry, balloon expulsion test, defecography, and pelvic MRI. De novo constipation is reported up to 26% in women who have undergone abdominal sacrocolpopexy and ranges from 5% to 19% in women who have undergone a laparos- copic sacrocolpopexy. The prevalence of de novo obstructed defecation syndrome ranges from 2% to 4% in women who have undergone laparoscopic sacrocolpopexy or for whom a synthetic polypropylene mesh was placed by vaginal route. Finally, the prevalence of de novo anorectal disorders is not rare following pelvic organ prolapse surgery and patients should be informed preoperatively. Keywords Sacrocolpopexy · Pelvic organ prolapse · Anorectal disorders · Dyschesy · Obstructed defecation · Constipation · Fecal incontinence Introduction Les troubles du transit et de la défécation sont des symp- tômes assez fréquemment rapportés chez les femmes qui consultent pour un prolapsus génital [13]. Ainsi, il y a beau- coup plus de données disponibles sur lamélioration des symptômes anorectaux que sur lapparition de troubles de novo après une correction chirurgicale de prolapsus. Un des éléments essentiels de la chirurgie des rectocèles est que la correction des symptômes nest pas bien corrélée à la correction anatomique : beaucoup de patientes guéries sur le plan anatomique conservent des troubles anorectaux [4]. Il existe aussi des données plus précises sur les compli- cations graves, comme les occlusions postopératoires et les plaies digestives des différentes techniques (risque global de lordre de 1 %) [5]. Pourtant, la question de lapparition de X. Deffieux (*) · T. Thubert · C. Trichot · A.-C. Donnadieu · E. Faivre Service de gynécologieobstétrique et médecine de la reproduction, hôpital Antoine-Béclère, Assistance publiqueHôpitaux de Paris (APHP), université Paris-Sud, 157, rue de la Porte-de-Trivaux, F-92141 Clamart, France e-mail : [email protected] X. Deffieux UPMC université Paris-VI, ER 6, F-75005 Paris, France Public/Intérêt : Chercheurs/Moyen. Cliniciens/Indispensable. Enseignants/Indispensable. Étudiants/Indispensable. Autres professions de santé/Moyen. Cadres santé publique/Faible. Pelvi-Périnéologie (2010) 5:185-189 DOI 10.1007/s11608-010-0322-1

Troubles anorectaux après chirurgie du prolapsus génital

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MISE AU POINT / UPDATE THÉMA

Troubles anorectaux après chirurgie du prolapsus génital

Anorectal disorders following pelvic organ prolapse surgery

X. Deffieux · T. Thubert · C. Trichot · A.-C. Donnadieu · E. Faivre

Reçu le 29 avril 2010 ; accepté le 4 mai 2010© Springer-Verlag France 2010

Résumé Les troubles du transit (constipation) et de la défé-cation (dyschésie) sont des symptômes assez fréquemmentrapportés chez les femmes qui consultent pour un prolapsusgénital. Toutefois, il existe très peu de données sur laprévalence des troubles anorectaux survenant de novoaprès une chirurgie pour prolapsus génital. L’évaluationcomporte un interrogatoire et un examen clinique complet,ainsi que des explorations physiologiques comme lamanométrie anorectale, le test d’expulsion au ballonnet, ladéfécographie et l’IRM pelvienne. Une constipation denovo est rapportée par des femmes opérées (jusqu’à26 %) d’une promontofixation par laparotomie, et cetteprévalence varie de 5 à 19 % chez les femmes opéréesd’une promontofixation cœlioscopique. La prévalence dela dyschésie de novo varie de 2 à 4 % chez les femmesopérées soit par promontofixation cœlioscopique, soit parvoie vaginale avec mise en place d’une prothèse synthétiqueen polypropylène. Au total, la survenue de novo de troublesanorectaux après chirurgie du prolapsus n’est pas unesituation si exceptionnelle, et les patientes doivent en êtreinformées avant l’intervention.

Mots clés Promontofixation · Prolapsus génital · Troublesanorectaux · Dyschésie · Constipation · Incontinence anale

Abstract Functional disorders of defecation (constipation,obstructive defecation syndrome, faucal incontinence) arecommon in women presenting with pelvic organ prolapse.However, very few data are available concerning de novoanorectal disorders following pelvic organ prolapse surgery.Evaluation includes detailed history and rectal and pelvicexam, together with physiologic tests such as anorectalmanometry, balloon expulsion test, defecography, and pelvicMRI. De novo constipation is reported up to 26% in womenwho have undergone abdominal sacrocolpopexy and rangesfrom 5% to 19% in women who have undergone a laparos-copic sacrocolpopexy. The prevalence of de novo obstructeddefecation syndrome ranges from 2% to 4% in women whohave undergone laparoscopic sacrocolpopexy or for whom asynthetic polypropylene mesh was placed by vaginal route.Finally, the prevalence of de novo anorectal disorders is notrare following pelvic organ prolapse surgery and patientsshould be informed preoperatively.

Keywords Sacrocolpopexy · Pelvic organ prolapse ·Anorectal disorders · Dyschesy · Obstructed defecation ·Constipation · Fecal incontinence

Introduction

Les troubles du transit et de la défécation sont des symp-tômes assez fréquemment rapportés chez les femmes quiconsultent pour un prolapsus génital [1–3]. Ainsi, il y a beau-coup plus de données disponibles sur l’amélioration dessymptômes anorectaux que sur l’apparition de troubles denovo après une correction chirurgicale de prolapsus. Undes éléments essentiels de la chirurgie des rectocèles estque la correction des symptômes n’est pas bien corrélée àla correction anatomique : beaucoup de patientes guériessur le plan anatomique conservent des troubles anorectaux[4]. Il existe aussi des données plus précises sur les compli-cations graves, comme les occlusions postopératoires et lesplaies digestives des différentes techniques (risque global del’ordre de 1 %) [5]. Pourtant, la question de l’apparition de

X. Deffieux (*) · T. Thubert · C. Trichot · A.-C. Donnadieu ·E. FaivreService de gynécologie–obstétrique et médecine de lareproduction, hôpital Antoine-Béclère,Assistance publique–Hôpitaux de Paris (AP–HP),université Paris-Sud,157, rue de la Porte-de-Trivaux,F-92141 Clamart, Francee-mail : [email protected]

X. DeffieuxUPMC université Paris-VI, ER 6, F-75005 Paris, France

Public/Intérêt : Chercheurs/Moyen. Cliniciens/Indispensable.Enseignants/Indispensable. Étudiants/Indispensable. Autresprofessions de santé/Moyen. Cadres santé publique/Faible.

Pelvi-Périnéologie (2010) 5:185-189DOI 10.1007/s11608-010-0322-1

troubles digestifs de novo après une cure de prolapsus estlégitime, car les dissections étendues et la mise en tensionet l’élévation de la paroi vaginale postérieure (par promon-tofixation par exemple) sont autant de facteurs qui peuventen théorie modifier la physiologie de la défécation [6]. Englobalité, la prévalence des symptômes anorectaux diminueaprès cure chirurgicale de prolapsus. La chirurgie peuttoutefois être directement responsable d’une constipationpar différents mécanismes : modification des activitésphysiques, obstacle mécanique gênant le transit, dénervationcolorectale. Les données concernant les troubles anorectauxsurvenant de novo après une cure chirurgicale de prolapsussont peu nombreuses, les publications étant essentiellementorientées vers la description des récidives anatomiques etla satisfaction des patientes. Pour pouvoir obtenir desdonnées précises concernant les symptômes de novo, ilfaut que des questionnaires aient été distribués en préopéra-toire, ce qui n’est pas souvent le cas, hormis dans les essaisrandomisés.

Diagnostic des troubles digestifset anorectaux après chirurgie du prolapsus

La première difficulté dans l’analyse de la littérature vientdu caractère imprécis de la définition des « troublesdigestifs » dans les différentes études. La constipation estsouvent définie dans les articles par une fréquence des sellesinférieure à une selle tous les trois jours. Toutefois, lesrécentes recommandations françaises pour la pratiqueclinique donnent une définition moins précise : « La consti-pation est un désordre digestif complexe qui correspond àune insatisfaction lors de la défécation, due soit à des sellespeu fréquentes, soit à une difficulté pour exonérer, soit lesdeux. Sa définition est imprécise, car elle repose sur uneassociation symptomatique et la perception subjective desmalades » [7]. Une constipation est généralement différen-ciée d’une dyschésie (obstructed defecation syndrome) quirassemble des symptômes de difficulté d’exonération desselles avec nécessité d’importants efforts de poussée, desensation de séquestre rectal et parfois de manœuvresdigitales aidant l’exonération. La dyschésie peut aussi setraduire par un recours fréquent à l’utilisation de supposi-toires ou de lavements évacuateurs. Le risque évolutif de ladyschésie chez la femme opérée d’un prolapsus génitalrésulte des efforts de poussée chronique : récidive duprolapsus génital, périnée descendant et incontinence fécalepar neuropathie ischémique d’étirement.

Enfin, l’incontinence fécale est définie par l’impossibilitéde retarder volontairement le passage du contenu intestinal(selles, gaz) à travers l’anus, jusqu’à la possibilité de le faire,quand et où cela est socialement possible. Une incontinenceanale active est définie par des fuites de gaz ou de selles alors

que le rectum est vide, la fuite étant précédée d’un besoinimpérieux. L’incontinence anale passive correspond à desfuites survenant sur un rectum, et non précédées d’un besoin.Il s’agit alors soit d’une incompétence du sphincter interne,soit d’un problème de vidange rectale incomplète. Lasévérité de l’incontinence anale peut être évaluée par lescore de Wexner.

De façon générale, il faudra rechercher une complication(exposition prothétique du matériel implanté, hypercorrec-tion, bride intrapéritonéale, rétraction prothétique périrec-tale) et une prise médicamenteuse (fer, anticholinergiques,neuroleptiques, opiacés…).

On ne parle de trouble « idiopathique » de novo qu’unefois que ces diagnostics ont été éliminés. Le délai depuisl’intervention compte aussi beaucoup. Hormis les rares casnécessitant une exploration urgente (occlusion, fièvre,défense abdominale, vomissement), il ne convient d’explorerun trouble digestif qu’après avoir laissé un temps decicatrisation suffisant et qu’après que la patiente a repris seshabitudes alimentaires et une activité physique suffisante. Ilest en effet assez fréquent que l’alitement, la limitation desactivités physiques, voire l’existence d’un petit hématome,s’accompagnent d’un ralentissement temporaire du transit.

L’interrogatoire précisera les conditions de survenue dela constipation (délai de survenue après l’intervention) etle caractère de selles : fréquence, alternance diarrhée–constipation (irrégularité des défécations avec émissiond’une selle bouchon puis de selles liquides évoquant unefausse diarrhée), mode de début et évolution (rechercherune pathologie organique ou un changement de rythme devie ou professionnel en cas de constipation récente),existence de manœuvres digitales pour faciliter l’exonérationet la défécation, évocatrices d’une dyschésie associée. Uneerreur diététique (régime pauvre en résidus, hydratationinsuffisante) pourra être mise en évidence, associée à undéfaut d’activité physique, et l’ensemble de ces paramètrespourra être corrigé.

L’examen clinique sera complet, comprenant uneinspection à la recherche d’un météorisme, auscultationavec recherche des bruits hydroaériques, palpation abdo-minale à la recherche d’une masse tumorale ou une ascite,un examen systématique de l’anus à la recherche de fissuresou d’hémorroïdes, un toucher rectal à la recherche d’unprolapsus rectal, d’une pathologie hémorroïdaire ou simple-ment la présence d’un fécalome ou de selles importantesdans le rectum, ainsi que la présence de traces de sang.

L’inspection (au repos et en poussée) avec exposition,grâce à une hémivalve de spéculum permettant de refoulerla paroi vaginale antérieure et le toucher anorectal, permetd’objectiver les principales anomalies anatomiques(rectocèle et prolapsus rectal) et fonctionnelles (anisme).L’examen pourra parfois objectiver une hypercorrectionantérieure favorisant les récidives postérieures. Un prolapsus

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rectal ne s’extériorise que lors de la poussée accroupie ouassise. Le toucher rectal permet aussi de préciser la présencede selles dans le rectum ou d’un fécalome.

Si l’examen clinique ne retrouve aucune anomaliepouvant expliquer la constipation ou la dyschésie de novo,des explorations complémentaires seront réalisées : testd’expulsion au ballonnet ou manométrie anorectale à larecherche d’un anisme, rectosigmoïdoscopie à la recherched’une cause organique (compression, tumeur, obstacle créépar le matériel implanté, exposition prothétique). Un scannerou une IRM abdominopelvienne à la recherche d’unecollection profonde pourront être discutés. Certains casd’hématomes profonds ont été diagnostiqués par IRM dansles suites d’une promontofixation cœlioscopique chez despatientes présentant un ténesme important [8].

Troubles digestifs et anorectauxaprès promontofixation

Pour la promontofixation par laparotomie, la prévalence dela constipation passe de 36 à 64 % en préopératoire à 26 à38 % en postopératoire selon les séries [9,10]. Toutefois,certaines études rapportent une augmentation globale de laprévalence des symptômes anorectaux après promonto-fixation par laparotomie (de 29 à 52 %) [11], et d’autresrapportent la survenue de symptômes de novo chez 16 à26 % des femmes opérées par cette technique [12,13].Dans un essai randomisé comparant la promontofixationpar laparotomie et la sacrospinofixation vaginale, Maher etal. ont montré que la prévalence de l’incontinence fécale denovo après chirurgie était identique dans les deux groupes(1/47 vs 1/48) et que, dans le même temps, l’interventionavait fait disparaître une incontinence fécale dans chaquegroupe après l’intervention [10]. D’autres séries de promonto-fixation par laparotomie rapportent des taux très élevésd’incontinence fécale pré- (26 %) et postopératoire (30 %)cinq ans après l’intervention [14].

Concernant la promontofixation cœlioscopique, les princi-pales études rapportent une incidence de 5 à 19 % deconstipation de novo et de 2 à 4 % de dyschésie de novodans des séries ayant un suivi moyen d’un à cinq ans[5,15–18]. Dans une revue de la littérature, Ganatra et al.retrouvent globalement 9 % de troubles digestifs de novoaprès promontofixation cœlioscopique [19]. Deprest et al.ne retrouvent pas de différence significative en termes detroubles anorectaux de novo (6 vs 7 %) qu’ils utilisent uneprothèse synthétique ou une prothèse biologique (Pelvicol®)pour la promontofixation cœlioscopique [20].

Dans le cadre de la promontofixation cœlioscopique, laréalisation d’une colpopexie de type Burch concomitantesemble augmenter, de façon importante, le risque de décom-pensation postérieure, et donc, d’apparition d’une rectocèle

avec dyschésie si une cystocèle et/ou une hystéroptoseont été traitées par une promontofixation antérieure isolée(prothèse intervésicovaginale antérieure seule) [15,21].

Troubles digestifs et anorectauxaprès chirurgie par voie vaginale

Concernant la technique de colporraphie postérieure, dansune série de 231 patientes avec 42 mois de suivi moyen,Kahn et Stanton ont montré que si 76 % des patientes étaienttraitées par cette procédure sur un plan anatomique, lestroubles anorectaux étaient souvent majorés : constipationdans 33 % des cas en postopératoire (versus 22 % en pré-opératoire), sensation de séquestre rectal dans 38 % des casaprès l’intervention (versus 27 % avant l’opération) et épi-sodes d’incontinence fécale dans 11 % après l’intervention(versus 4 % avant). Malgré ça, les patientes affichaient untaux de satisfaction de 65 % [22].

Deux essais randomisés ont montré que cette techniquede colporraphie postérieure est plus efficace que lestechniques transanales (moins de récidive de rectocèle). Enrevanche, les essais ne montrent pas de différence signi-ficative concernant les symptômes anorectaux de novo aprèsl’intervention (un peu plus de troubles défécatoires aprèschirurgie transanale, mais de façon non significative) [23,24].

Pour la chirurgie vaginale avec placement d’une prothèsesynthétique non résorbable entre le vagin et le rectum (avecou sans passage trans-sacroépineux transglutéal), la préva-lence d’une dyschésie de novo est de 2 à 4 %, ce qui n’estpas supérieur à la colporraphie postérieure [25,26].

Pour les techniques de sacropexie infracoccygienne, unedyschésie de novo est rapportée dans 5 à 14 % des cas[27,28]. Dans un essai randomisé, de Tayrac et al. ont montréque l’incidence de troubles anorectaux de novo n’était passignificativement différente après sacrospinofixation etsacropexie infracoccygienne [29].

Traitement des troubles digestifset anorectaux après cure de prolapsus

Sur le plan thérapeutique, s’il existe une constipationgênante pour la patiente, après avoir éliminé une causeorganique (défaut de positionnement du matériel, expositionprothétique, abcès…), un traitement régularisant le transitpourra être proposé. Il aura pour but l’amélioration de laqualité de vie du patient et non la fréquence des selles. Ilfaut favoriser les régimes riches en fibres, la consommationde fruits à chaque repas, une bonne hydratation et encoura-ger une activité physique régulière. Si un laxatif est prescrit,il faudra privilégier la voie orale. Les laxatifs osmotiques(polyéthylène glycol ou lactulose), dont l’effet est un

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ramollissement des selles, sont à prescrire en première inten-tion. On peut également prescrire des laxatifs de lest (son deblé ou mucilages).

En cas de dyschésie de novo, sauf exception, uneréintervention ne sera pas discutée avant une tentative detraitement médicamenteux. On pourra avoir recours à desconseils ergonomiques (rehaussement des pieds pourfaciliter l’exonération), à des suppositoires exonérateurs(Éductyl®), des laxatifs osmotiques (DuphalaC® ouMovicol®), des mucilages (polysaccharides végétaux) etdes laxatifs émollients associés à une rééducation parbiofeedback. Toutefois, si ces traitements sont validéspour les dyschésies « idiopathiques » ils n’ont pas étécorrectement évalués chez les patientes déjà opérées.

En cas d’échec de ces traitements conservateurs depremière ligne, l’avis d’un spécialiste (coloproctologue)sera nécessaire avant de discuter une réintervention. Eneffet, les réinterventions pour trouble digestif ou anorectal,après cure de prolapsus, ne sont que très peu évaluées. Il seraimpossible de promettre à la patiente que le relâchement dumatériel (ou son ablation) pourra permettre une disparitiondes symptômes. Par ailleurs, cette réintervention expose à unrisque certain de voir réapparaître le prolapsus génital.Aussi, la patiente choisira souvent de ne pas réintervenirmalgré l’apparition de symptômes anorectaux de novo.Une enquête de registre avait été réalisée concernant lesréinterventions après cure de prolapsus génital. Les troublesanorectaux de novo étaient un motif très rare de réinter-vention, comparé aux récidives anatomiques et aux compli-cations (exposition prothétique, infection, dyspareunies surrétraction prothétique douloureuse…) [30]. Pour préciser cesdonnées, il faudrait toutefois faire une nouvelle enquête,mais cette fois-ci auprès des chirurgiens viscéraux et anorec-taux, à qui sont adressés les cas les plus compliqués.

Enfin, il n’existe aucune donnée dans la littérature concer-nant la prise en charge d’une incontinence fécale apparaissantde novo après chirurgie du prolapsus. Les schémas théra-peutiques habituels de ce symptôme sont donc à suivre.Des conseils hygiénodiététiques peuvent être prescrits :alimentation riche en fibres, exclusion de certains alimentsfavorisant la diarrhée, hydratation suffisante, transit régulier.L’adjonction de mucilages peut être efficace chez des femmesse plaignant d’incontinence anale uniquement pour les sellesliquides. Une rééducation devrait systématiquement êtreproposée si la patiente est motivée. Une neuromodulation dusciatique poplité interne (SPI) peut être proposée bien que lesrésultats publiés sont contradictoires.

Conclusion

Même s’il s’agit de symptômes amenant rarement à discuterd’une réintervention, la survenue de troubles anorectaux de

novo après une chirurgie pour prolapsus génital est unévénement suffisamment fréquent pour que son risque soitabordé lors de la consultation préopératoire.

Conflit d’intérêt : aucun.

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