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Tumeurs cérébrales de l’adulte Laurent Riffaud, Service de Neurochirurgie, CHU de Rennes TUMEURS INTRACRÂNIENNES DE L’ADULTE Les tumeurs cérébrales sont les tumeurs intracrâniennes les plus fréquentes de l’adulte. Le type histologique le plus fréquent est l’astrocytome (ou gliome) dont le pronostic reste sombre. I – EVOLUTION NATURELLE DES TUMEURS CEREBRALES Les tumeurs cérébrales évoluent suivant une sémiologie focale et des signes cliniques résultant du retentissement de la néoformation sur l’ensemble du reste du cerveau. A – SEMIOLOGIE FOCALE DES TUMEURS CEREBRALES Elle dépend du siège de la tumeur et varie donc suivant que celle-ci se développe dans une zone "muette" ou dans une zone de grande importance fonctionnelle. L’importance de la sémiologie clinique focale dépend également de la nature de la tumeur : un astrocytome bénin infiltre le tissu nerveux lentement et peut donc occuper un volume important avec un minimum de signes en foyer alors qu’à l’opposé un astrocytome malin type glioblastome a une évolution rapide et une sémiologie focale précoce et importante. La sémiologie focale des tumeurs cérébrales est principalement déficitaire, mais elle peut également aussi se manifester par des crises d’épilepsie. La sémiologie focale des tumeurs cérébrales est régulièrement progressive en "tache d’huile", ce qui correspond à l’expansion de la tumeur. La rapidité est dépendante de la nature de la tumeur et reflète sa malignité. Cependant, une hémorragie intra-tumorale peut modifier brutalement l’évolution progressive de la sémiologie focale de même que l’apparition d’un œdème péri-tumoral. 1

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

Laurent Riffaud, Service de Neurochirurgie, CHU de Rennes

TUMEURS INTRACRÂNIENNES DE L’ADULTE

Les tumeurs cérébrales sont les tumeurs intracrâniennes les plus fréquentes de l’adulte. Le type histologique le plus fréquent est l’astrocytome (ou gliome) dont le pronostic reste sombre. I – EVOLUTION NATURELLE DES TUMEURS CEREBRALES

Les tumeurs cérébrales évoluent suivant une sémiologie focale et des signes cliniques résultant du retentissement de la néoformation sur l’ensemble du reste du cerveau.

A – SEMIOLOGIE FOCALE DES TUMEURS CEREBRALES

Elle dépend du siège de la tumeur et varie donc suivant que celle-ci se développe dans une zone "muette" ou dans une zone de grande importance fonctionnelle.

L’importance de la sémiologie clinique focale dépend également de la nature de la tumeur :

un astrocytome bénin infiltre le tissu nerveux lentement et peut donc occuper un volume important avec un minimum de signes en foyer alors qu’à l’opposé un astrocytome malin type glioblastome a une évolution rapide et une sémiologie focale précoce et importante.

La sémiologie focale des tumeurs cérébrales est principalement déficitaire, mais elle peut également aussi se manifester par des crises d’épilepsie.

La sémiologie focale des tumeurs cérébrales est régulièrement progressive en "tache

d’huile", ce qui correspond à l’expansion de la tumeur. La rapidité est dépendante de la nature de la tumeur et reflète sa malignité. Cependant, une hémorragie intra-tumorale peut modifier brutalement l’évolution progressive de la sémiologie focale de même que l’apparition d’un œdème péri-tumoral.

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B – RETENTISSEMENT DE LA NEOFORMATION SUR L’ENSEMBLE DE

L’ENCEPHALE

Ce retentissement est décrit sous le nom de syndrome d’hypertension intracrânienne dont les symptômes dépendent de l’élévation de la pression à l’intérieur du crâne. En effet, les différentes parties de l’encéphale (hémisphères cérébraux, tronc cérébral, cervelet) sont maintenues à l’intérieur de la boîte crânienne par des structures rigides comme la tente du cervelet et la faux du cerveau. La masse encéphalique fluide se répartit dans toutes les directions sous l’effet de la poussée résultant du développement d’une tumeur, déformant ainsi les structures les moins rigides et produisant des engagements aux points faibles du système (engagement de la circonvolution cingulaire sous la faux du cerveau, engagement de la face interne du lobe temporal dans la fente de Bichat, engagement des amygdales cérébelleuses dans le foramen magnum).

Les conséquences de ces engagements sont redoutables puisque outre la perturbation du

fonctionnement de la région de l’encéphale qui « s’engage », les structures nerveuses qui occupent normalement l’orifice et les vaisseaux correspondants sont comprimées par la hernie cérébrale.

L’augmentation de la pression intracrânienne est donc la conséquence du développement

d’un processus expansif au sein de cet espace clos et rigide qu’est la boîte crânienne. Cependant, cette éventualité est retardée compte tenu de l’accommodation et de la tolérance de l’encéphale lui-même au volume de ce processus expansif. Cette accommodation est réalisée par la plasticité même du tissu cérébral et par une réduction des espaces liquidiens ventriculaires et sous-arachnoïdiens ainsi qu’à un moindre degré par une réduction de l’espace occupé par les vaisseaux (et surtout le réseau veineux).

La décompensation de l’hypertension intracrânienne dépend de la rapidité d’expansion de

la tumeur, de la réaction oedémateuse et de la situation de la néoformation sur les voies d’écoulement du liquide ventriculaire ou du LCS pouvant entraîner un blocage. L’élévation de la pression intracrânienne qui en résulte réduit le lit vasculaire cérébral et crée une ischémie du tronc cérébral. La réponse est une élévation de la pression artérielle moyenne visant à rétablir le débit sanguin cérébral, mais ce système est dépassé lorsque l’hypertension intracrânienne est trop importante, elle-même aggravée par l’augmentation de la tension artérielle dans ce cercle vicieux.

II - SEMIOLOGIE CLINIQUE DES TUMEURS CEREBRALES

La sémiologie est très polymorphe, mais les signes cliniques se manifestent par : - des crises comitiales, - des signes déficitaires, - un syndrome d’hypertension intracrânienne. Ces signes peuvent être associés ou isolés.

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A – UNE EPILEPSIE TUMORALE

C’est une manifestation fréquente des tumeurs supratentorielles (révélatrices dans 40% des

cas). Les crises peuvent être soit focales et elles ont alors une valeur localisatrice, soit généralisées d’emblée (grand mal).

Une crise comitiale est évocatrice d’une lésion tumorale : 1) si elle s’associe à des signes de localisation intercritique et/ou un syndrome d’hypertension intracrânienne, 2) si elle débute à l’âge adulte, 3) s’il s’agit de crises comitiales focales, 4) si elle survient en dehors de tout contexte évocateur (type sevrage alcoolique).

Dans ces cas, une tomodensitométrie (TDM) crânienne doit être systématiquement pratiqué. Les tumeurs les plus épileptogènes sont les tumeurs à faible potentiel évolutif comme les astrocytomes bénins infiltrants.

B – LES SIGNES DEFICITAIRES

Ce sont des signes de localisation tumorale. Ils sont la conséquence de l’envahissement ou du refoulement du tissu nerveux par la tumeur et peuvent soit constituer la première manifestation, soit succéder à des phénomènes épileptiques. Leur apparition progressive en quelques semaines ou mois avec une extension du déficit en "tache d’huile" est évocatrice. Ce syndrome déficitaire ne correspond pas à un territoire vasculaire, mais cependant il peut avoir un aspect trompeur par une évolution atypique mimant un accident vasculaire ischémique transitoire ou un accident vasculaire cérébral constitué ou bien du fait du développement de la tumeur à l’intérieur du système ventriculaire ou dans des zones muettes (pôle frontal, lobe temporal droit…) ou des troubles comportementaux peuvent être au premier plan.

Les signes de localisation sont donc très variables et dépendent du siège de la tumeur.

1) Les tumeurs frontales

Les tumeurs postérieures de la région précentrale ont une sémiologie motrice : hémiplégie controlatérale à début facial ou brachial pour les tumeurs de la convexité ou à début crural pour les tumeurs parasagittales.

Les tumeurs frontales antérieures donnent tardivement des signes neurologiques

déficitaires. Ce sont les troubles psychiques qui sont souvent au premier plan : réduction progressive de l’activité, troubles de l’attention et de la mémoire des faits récents, désintérêt, indifférence affective, pouvant alterner avec des phases d’euphorie et d’excitation niaise (moria). L’examen neurologique met souvent en évidence des phénomènes de préhension forcée : grasping du côté opposé à la lésion.

Dans les lésions développées au niveau de la base du lobe frontal, il est possible d’observer une anosmie ou une atteinte du nerf optique. Le syndrome de Foster-Kennedy est l’association d’une atrophie optique du côté de la tumeur et d’un œdème papillaire controlatéral.

Les tumeurs volumineuses fronto-calleuses peuvent se manifester par un état confusionnel

pseudodémentiel et des troubles de l’équilibre. L’atteinte de l’hémisphère dominant entraîne des troubles du langage qui attirent d’emblée

l’attention.

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2) Les tumeurs temporales

La sémiologie est très différente selon qu’elle se développe dans l’hémisphère dominant ou

dans l’hémisphère mineur. Les tumeurs temporales gauches ont une expression clinique riche dominée par les troubles

du langage : aphasie plutôt de type Wernicke avec discrètes paraphasies au début. Les tumeurs temporales droites restent longtemps latentes et ne se manifestent que

tardivement par des signes d’hypertension intracrânienne (zone muette). Les crises comitiales peuvent être : des troubles paroxystiques du langage en cas de lésion

de l’hémisphère dominant, des crises olfactives et psychomotrices, des crises auditives par lésion de la circonvolution de Heschl ou des états de rêve.

Les tumeurs temporales peuvent s’accompagner d’un déficit du champ visuel

controlatéral : hémianopsie latérale homonyme ou quadranopsie supérieure latérale homonyme.

3) Les tumeurs pariétales

Des troubles sensitifs controlatéraux concernent surtout la sensibilité discriminative : astéréognosie, extinction sensitive. Les fonctions symboliques peuvent être également atteintes : apraxies, anosognosie, troubles du schéma corporel.

Les phénomènes épileptiques peuvent être des manifestations sensitives paroxystiques paresthésiques réalisant des crises jacksoniennes sensitives.

Les tumeurs pariétales peuvent s’accompagner d’un déficit du champ visuel controlatéral :

hémianopsie latérale homonyme ou quadranopsie inférieure latérale homonyme.

4) Les tumeurs occipitales

Le symptôme majeur est l’hémianopsie latérale homonyme. Des crises d’épilepsie à type de d’hallucinations visuelles élémentaires sont également évocatrices.

5) Les tumeurs hémisphériques profondes

Elles ont une sémiologie très variable suivant qu’elles interrompent des voies motrices, des voies sensitives ou des radiations optiques. Les tumeurs développées dans la région des noyaux gris centraux peuvent donner une hémiplégie par envahissement de la capsule interne ou un hémisyndrome sensitif, et rarement à des signes moteurs extrapyramidaux.

6) Les tumeurs des commissures

Les tumeurs du corps calleux ou trigonoseptales sont longtemps asymptomatiques et donnent essentiellement des troubles de la mémoire à type d’amnésie antérograde, de syndrome de Korsakoff, de syndrome démentiel avec signes frontaux.

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7) Les tumeurs de la région sellaire

Elles peuvent avoir une symptomatologie endocrinienne due au retentissement hypophysaire ou hypothalamique. Ces tumeurs donnent souvent des troubles visuels par compression du chiasma optique : l’hémianopsie bitemporale est le syndrome déficitaire visuel chiasmatique caractéristique, mais il peut s’agir également d’une baisse uni- ou bilatérale de l’acuité visuelle, d’une autre forme d’atteinte du champ visuel …

8) Les tumeurs de la fosse cérébrale postérieure

Elles associent des signes d’hypertension intracrânienne précoce, des signes déficitaires cérébelleux ou des signes d’atteinte des nerfs crâniens et des voies longues en fonction de la localisation de la tumeur.

Les tumeurs cérébelleuses se manifestent par un syndrome cérébelleux cinétique homolatéral lorsqu’elles sont latéralisées dans un lobe ou par des troubles de l’équilibre et un syndrome cérébelleux statique lorsqu’elles sont localisées dans le vermis.

Les tumeurs du tronc cérébral sont habituellement infiltrantes et donnent une symptomatologie complexe, très difficile à systématiser et dominées par une atteinte des nerfs crâniens.

Les tumeurs de l’angle pontocérébelleux se manifestent par une atteinte de l’audition, de l’équilibre, et dans les formes évoluées par une paralysie faciale ou une névralgie du trijumeau associée à un syndrome cérébelleux homolatéral et des signes de souffrance du tronc cérébral.

C – LE SYNDROME D’HYPERTENSION INTRACRANIENNE

Le développement d’une tumeur cérébrale à l’intérieur de la boîte crânienne inextensible détermine une augmentation progressive de la pression intracrânienne.

D’une façon générale, l’hypertension intracrânienne est précoce dans les tumeurs infratentorielles et dans les tumeurs ventriculaires par blocage du liquide ventriculaire et hydrocéphalie.

L’hypertension intracrânienne peut révéler également de volumineuses tumeurs situées dans des régions muettes ou peu parlantes du cerveau comme le lobe frontal ou le lobe temporal droit.

1) La céphalée

C’est un signe important mais inconstant de la sémiologie d’hypertension intracrânienne. Au début, elle est intermittente, survenant par accès, débutant le matin ou réveillant le patient dans la deuxième partie de la nuit. Les céphalées d’hypertension intracrânienne sont déclenchées par des mouvements de la tête, exacerbées par les efforts, la toux, l’éternuement, la défécation, s’aggravant en position couchée. La céphalée peut être diffuse ou localisée, mais elle a tendance à s’aggraver et à devenir permanente.

C’est ce caractère qui attire l’attention : céphalées récentes et inhabituelles, tenaces,

résistant au traitement antalgique usuel.

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2) Les vomissements

Les vomissements sont évocateurs d’une hypertension intracrânienne lorsqu’ils sont brutaux, en jets, sans effort, le matin au réveil, déclenchés par certains mouvements de la tête et lorsqu’ils calment la céphalée. Ils peuvent manquer et être remplacés par des nausées.

3) Les troubles de la vigilance

Lorsque l’hypertension intracrânienne devient importante, elle finit par entraîner des troubles de la vigilance : lenteur d’idéation, tendance à l’apathie et à la somnolence, indifférence et troubles mnésiques avec une note frontale fréquente, confusion puis obnubilation et torpeur progressive, voire coma.

Ces troubles cliniques peuvent avoir une allure psychiatrique trompeuse.

4) Les troubles visuels

- L’œdème papillaire est le signe objectif majeur de l’hypertension intracrânienne, mais il est inconstant. Il s’agit au début d’une dilatation veineuse ou d’un flou du bord nasal de la papille évoluant secondairement vers une stase papillaire avec une surélévation du disque papillaire (papilles saillantes), un aspect coudé des vaisseaux qui en émergent, des bords flous et des hémorragies en flammèches accompagnant l’œdème de la papille.

Cet aspect contraste avec une acuité visuelle longtemps conservée. Pour affirmer le diagnostic, on peut s’aider d’une angiographie à la fluorescéine ou d’un

champ visuel à la recherche d’un élargissement de la tache aveugle de Mariotte. L’évolution se fait vers des épisodes d’éclipses visuelles, une baisse de l’acuité visuelle

pouvant aboutir à une cécité irréversible par atrophie post-stase. - Une paralysie d’un ou des deux nerfs abducens se manifestent par une diplopie

horizontale qui n’a pas de valeur localisatrice.

5) Autres signes moins fréquents

- Crise comitiale généralisée - Désordre végétatif avec bradycardie

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6) Les engagements cérébraux

L’augmentation de la masse encéphalique résultant du développement de la tumeur et de

l’œdème provoque une hernie du tissu cérébral à travers divers orifices : - Engagement temporal : il s’agit de l’engagement de l’uncus de l’hippocampe dans la fente

de Bichat (incisure de la tente) et concerne surtout les lésions temporales. Les formations menacées sont le pédoncule cérébral, le nerf oculomoteur, l’artère cérébrale postérieure. L’expression clinique comporte une atteinte du III : diminution ou abolition du réflexe photomoteur homolatéral précédant une mydriase homolatérale aréactive associée à une hémiplégie controlatérale par compression du pédoncule cérébrale homolatéral. La compression de l’artère cérébrale postérieure donne une hémianopsie latérale homonyme. Cependant, l’altération de la conscience lors des phénomènes d’engagement par compression du tronc cérébral et du système réticulaire activateur ascendant ne rend pas possible l’analyse du champ visuel dans ce contexte. L’engagement temporal s’accompagne donc de troubles de la conscience, parfois d’une raideur de nuque avec des accès de rigidité de décérébration traduisant la souffrance aiguë du tronc cérébral. La mort peut survenir à tout moment par un arrêt respiratoire.

- Engagement des amygdales cérébelleuses dans le foramen magnum : C’est le fait des

tumeurs de la fosse cérébrale postérieure et les signes sont très variables. La gravité de ce type d’engagement résulte dans la compression de la moelle allongée pouvant aboutir à des troubles respiratoires, des troubles du rythme cardiaque et une mort subite. Les signes cliniques peuvent être en rapport avec une irritation des méninges de la fosse cérébrale postérieure ou de la jonction crâniorachidienne : raideur du cou avec inclinaison latérale de la tête donnant un aspect guindé ou en torticolis, et à l’extrême : crises toniques postérieures de Jackson (hyperextension de la nuque, hyperextension des membres et pronation forcée des membres supérieurs) précédant un coma avec troubles neurovégétatifs. Cet état peut être précédé de hoquets ou de bâillements. Dans tous les cas, le risque de mort subite par compression de la moelle allongée est imminent.

- Engagement du gyrus cingulaire sous la faux du cerveau : cet engagement n’a pas de

sémiologie propre. A l’extrême, il peut entraîner une compression des artères cérébrales antérieures.

- Engagement central diencéphalique : il s’agit d’une compression diencéphalique pure

dans l’axe du tronc cérébral entraînant des troubles de la vigilance précoces avec bâillements, dyspnée de Cheyne-Stockes, myosis bilatéral, hypertonie bilatérale. La majoration de la compression du tronc cérébral entraîne une aggravation des troubles de la conscience avec des troubles neurovégétatifs et une rigidité de décérébration.

D – LES TROUBLES MENTAUX DES TUMEURS CEREBRALES

Les perturbations psychiques sont très fréquentes au cours de l’évolution des tumeurs supratentorielles avec des modifications de l’humeur et du caractère, des réductions de l’activité et ralentissement intellectuel. Lorsque les signes de localisation neurologique font défaut, ces troubles psychiques peuvent être au premier plan réalisant parfois un syndrome dépressif ou un syndrome confuso-démentiel.

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III – EXAMENS COMPLEMENTAIRES

Les examens complémentaires sont dominés par l’examen tomodensitométrique (TDM) et l’imagerie par résonance magnétique (IRM).

Les radiographies du crâne n’ont pas d’intérêt, mais lorsqu’elles sont réalisées, elles

peuvent montrer des calcifications tumorales ou des signes d’hypertension intracrânienne chronique comme des impressions digitiformes, une érosion de la fosse hypophysaire…

1) La tomodensitométrie crânienne Elle est réalisée dans le plan orbito-méatal sans et avec injection de produit de contraste

iodé. Cet examen permet de localiser le processus expansif (supra- ou infratentoriel, intra- ou extraparenchymateux, uni- ou multifocal) et de préciser ses caractéristiques : le processus est-il homogène ? Existe-t-il une prise de contraste ? Existe-t-il un œdème périlésionel ? Existe-t-il des calcifications ? Existe-t-il des kystes ou une nécrose associée ? Existe-t-il un effet de masse sur les structures de voisinage ? Existe-t-il des complications à type d’hémorragie, une hydrocéphalie, un engagement cérébral ?

2) L’IRM encéphalique L’IRM encéphalique est l’examen de choix pour l’étude du parenchyme cérébral. Elle vient

compléter les données du TDM et elle est réalisée dans les séquences pondérées en T1 et en T2. Les séquences pondérées en T1 sont réalisées sans et avec injection de produit de contraste dans les mêmes plans de coupes, axiales en général, mais aussi sagittales et coronales. D’autres séquences peuvent être réalisées comme des séquences Flair ou de diffusion. L’IRM apprécie les mêmes données que le TDM, mais avec plus de précision, soit la localisation.

3) La ponction lombaire La ponction lombaire est contre-indiquée en présence de signes d’hypertension

intracrânienne ou devant l’existence de signes focaux ou de signes d’œdème papillaire. Elle est surtout formellement contre-indiquée (c’est le seul cas de contre-indication absolue à la réalisation de la ponction lombaire) dans les tumeurs de la fosse cérébrale postérieure où le risque est un engagement brutal des amygdales cérébelleuses avec compression aiguë de la moelle allongée et arrêt cardiorespiratoire. La ponction lombaire est donc formellement contre-indiquée devant toute suspicion de tumeur de la fosse cérébrale postérieure se traduisant par un syndrome d’hypertension intracrânienne progressif accompagné de signes d’engagement (raideur de nuque voire troubles neurovégétatifs dont un fébricule) pouvant donner le change à un syndrome méningé fébrile.

4) L’électroencéphalogramme L’électroencéphalogramme n’a pas vraiment d’intérêt pour le diagnostic de tumeur

cérébrale. Il est souvent normal ou peut montrer des anomalies localisées non spécifiques comme un foyer d’ondes lentes ou des anomalies paroxystiques de type épileptiques.

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IV – DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE

A – LES GLIOMES

Epidémiologie :

Les gliomes représentent 50 % de toutes les tumeurs intracrâniennes de l’adulte et 90 % sont d’origine astrocytaire. La moitié sont des formes malignes (astrocytome anaplasique et glioblastome). Les astrocytomes bénins représentent 25 % des gliomes. Les autres tumeurs gliales sont représentées par des oligodendrogliomes (15 %) et les épendymomes (10 %).

L’âge moyen de découverte d’un astrocytome bénin ou d’un oligodendrogliome se situe

aux alentours de 40 ans. L’âge moyen de découverte d’un glioblastome est d’environ 55 à 60 ans.

Neuropathologie :

Plusieurs systèmes de grading ont évolué au fil du temps, mais actuellement, c’est le grading de l’OMS qui est utilisé. Ce grading classe les tumeurs gliales par ordre croissant de malignité. - Le grade I correspond à l’astrocytome pilocytique : c’est le seul véritable astrocytome

bénin. Il concerne le plus souvent l’enfant, l’adolescent ou l’adulte jeune. Sa localisation préférentielle est le cervelet et est beaucoup plus rarement supratentoriel hémisphérique. Il peut être localisé également au niveau du tronc cérébral ou au niveau hypothalamo-chiasmatique. Le traitement est essentiellement chirurgical et l’exérèse chirurgicale complète est le garant d’une guérison définitive du patient. En cas d’astrocytome pilocytique inextirpable, une chimiothérapie et une radiothérapie peuvent être utilisées à titre exceptionnel.

- Le grade II correspond à des astrocytomes bénins, mais infiltrants. Ils ne prennent pas le

contraste au TDM ou à l’IRM. Ils s’observent essentiellement chez l’adulte jeune et infiltrent de façon diffuse sans limites nettes le cortex, la substance blanche et les noyaux gris. L’exérèse chirurgicale complète est souvent impossible, sauf au prix de séquelles neurologiques importantes et définitives. Ce sont des tumeurs très épileptogènes se traduisant au TDM par une zone hypodense sans prise de contraste et à l’IRM par une zone hypointense mal limitée sans prise de contraste en T1. Elles sont le plus souvent situées dans des zones fonctionnelles et infiltrent en profondeur le parenchyme cérébral. La transformation maligne en astrocytome anaplasique de grade III se produit en 5 à 10 ans. Les options de traitement associent une chirurgie, une chimiothérapie et une radiothérapie. Une simple surveillance clinique et radiologique peut également être proposée.

- Les astrocytomes anaplasiques de grade III : Ce sont des tumeurs malignes. Elles sont soit

découvertes d’emblée, soit elles font suite à l’évolution d’un astrocytome de grade II suivi et connu. La sémiologie clinique est en général un syndrome déficitaire associé à une épilepsie. L’élément discriminant avec les astrocytomes de grade II est, outre l’évolution clinique plus rapide, la présence d’une prise de contraste à l’examen neuroradiologique. L’astrocytome anaplasique est traité par une résection chirurgicale chaque fois qu’elle est possible associée à une chimiothérapie et à une radiothérapie. Le pronostic est sombre et l’évolution défavorable est inexorable en 1 à 3 ans.

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- Les astrocytomes de grade IV ou glioblastomes. Ce sont des tumeurs hautement malignes

dont le pronostic est le décès en 12 à 18 mois malgré le traitement maximum associant résection chirurgicale, radiothérapie et chimiothérapie. L’évolution se fait toujours vers une récidive. Les glioblastomes ont une sémiologie clinique rapidement évolutive et se caractérisent en imagerie par la présence d’une nécrose centrotumorale témoignant de la rapidité d’évolution du processus. Les lésions prennent le contraste de façon intense et inhomogène compte tenu de la présence de nécrose. Les éléments histologiques caractérisant le glioblastome sont les mitoses abondantes, les monstruosités nucléaires, la prolifération endothéliale et la nécrose. L’évolution de l’astrocytome de grade III se fait vers un astrocytome de grade IV ou glioblastome secondaire en un temps variable allant de quelques mois à 2-3 ans.

B – LES OLIGODENDROGLIOMES La présentation clinique des oligodendrogliomes est semblable à celle des astrocytomes

bénins et il s’agit le plus souvent de crises comitiales. Typiquement, l’oligodendrogliome se présente comme une zone hypodense au TDM,

hypointense en T1 et hyperintense en T2 à l’IRM. La caractéristique de ces tumeurs est la présence fréquente de calcifications visibles à l’examen tomodensitométrique.

Les oligodendrogliomes se classent en oligodendrogliomes bénins (de grade II) dont l’évolution est lente et en oligodendrogliomes malins (de grade III ou oligodendrogliomes anaplasiques) dont l’évolution se fait vers une tumeur de grade IV. Les oligodendrogliomes bénins se caractérisent par l’absence de prise de contraste à l’examen neuroradiologique alors que les oligodendrogliomes anaplasiques prennent le contraste.

L’exérèse chirurgicale, lorsqu’elle est possible, constitue la base du traitement et compte-tenu de la localisation fréquente en zones fonctionnelles ou de l’infiltration en profondeur, la chirurgie est souvent incomplète et doit être complétée par une chimiothérapie et une radiothérapie.

La découverte récente d’anomalies chromosomiques (délétion 1p-19q) serait associée à un meilleur pronostic grâce à une meilleur chimiosensibilité de ces tumeurs. La survie moyenne est de 5 à 10 ans pour les oligodendrogliomes bénins, l’évolution se faisant vers une anaplasie, c’est-à-dire vers un oligodendrogliome de grade III prenant le contraste puis vers une tumeur de grade IV. Le pronostic des oligodendrogliomes de grade III est sombre, au moins de moitié inférieure à la durée d’évolution des oligodendrogliomes bénins.

C – LES OLIGO-ASTROCYTOMES

Il s’agit de tumeurs mixtes ayant une composante à la fois astrocytaire et oligodendrocytaire. Le pronostic est calqué sur les astrocytomes et les oligodendrogliomes. Les oligo-astrocytomes de grade II évoluent en oligoastrocytomes de grade III.

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D – LES AUTRES TUMEURS GLIALES

- Il s’agit essentiellement des épendymomes intracrâniens. Ce sont des tumeurs peu fréquentes représentant 3 % des tumeurs intracrâniennes en totalité. Elles sont développées aux dépens de l’épendyme et ont donc une localisation intraventriculaire supra- ou infratentorielle. Des formes intraparenchymateuses peuvent exister.

On distingue les épendymomes de grade I : les subépendymomes dont la chirurgie d’exérèse garantit la guérison du patient. Les grades II correspondent à des épendymomes bénins et les grades III à des épendymomes anaplasiques avec des signes d’anaplasie cellulaire plus ou moins importants. La différence entre le grade II et le grade III n’est pas forcément aisée car il peut exister une prise de contraste à l’examen neuroradiologique pour les épendymomes de grade II. Les critères de malignité sont donc essentiellement histologiques.

L’histoire clinique la plus fréquente est un syndrome d’hypertension intracrânienne caractéristique si la lésion est intra-ventriculaire puisqu’elle entraîne une hydrocéphalie. La chirurgie d’exérèse est la seule garante d’une guérison des subépendymomes et des épendymomes bénins. Le risque évolutif est une récidive d’autant plus rapide que la tumeur est anaplasique et que l’exérèse est incomplète. Compte tenu de sa localisation dans le système ventriculaire, les épendymomes peuvent diffuser dans l’ensemble du système cérébrospinal. Le pronostic reste sombre avec une survie à 5 ans tout grade confondu n’excédant pas un tiers des patients. A la chirurgie s’associe un traitement complémentaire par radiothérapie la plupart du temps. La radiothérapie concerne aussi l’axe rachidien dans les formes anaplasiques compte tenu du risque de métastases par l’intermédiaire du LCS. La chimiothérapie n’a pas d’efficacité démontrée dans ce type de tumeurs.

- Il existe d’autres tumeurs gliales rares : les papillomes des plexus choroïdes dont la

localisation est intra-ventriculaire. Ces tumeurs peuvent entraîner une hydrocéphalie par hyperproduction de liquide cérébrospinal (LCS). C’est le plus souvent une tumeur de l’enfant, de l’adolescent ou de l’adulte jeune. Le traitement chirurgical est la règle et peut permettre la guérison définitive du patient. La forme cancéreuse de ces papillomes : carcinome des plexus choroïdes a un pronostic extrêmement sombre et se caractérise par une récidive, un essaimage tumoral dans les espaces ventriculaires et sous-arachnoïdiens par l’intermédiaire du LCS. Ce sont des tumeurs rares.

E – LES METASTASES

La fréquence des métastases cérébrales est difficile à évaluer. Cependant, elles concernent aussi bien les hommes que les femmes, et 2/3 des métastases surviennent entre 40 et 60 ans (en dehors des métastases du mélanome qui apparaissent en général chez les sujets plus jeunes). Les métastases sont uniques dans 50 % des cas.

Le risque de développer une métastase cérébrale en fonction du type de cancer est par ordre

de fréquence : le mélanome à égalité avec le poumon, le sein, le choriocarcinome, le rein et le tube digestif.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

Devant une ou des métastase(s) intracrânienne(s), quelle est la nature du primitif la plus

probable ? Dans 30% des cas, l’origine est pulmonaire, dans 25 % des cas : sein, dans environ 7 %

des cas chacun : tube digestif, appareil urinaire ou mélanome, et dans 20 % des cas le cancer primitif n’est pas retrouvé. Dans 10 % des cas, les métastases cérébrales font suite à d’autres tumeurs diverses. 80 % des métastases cérébrales sont supratentorielles. La clinique est peu spécifique et il s’agit d’une crise comitiale dans un tiers des cas, d’un déficit neurologique focal dans un tiers des cas également et d’une symptomatologie pseudovasculaire dans 15 à 20 % des cas.

L’IRM est plus intéressante que la tomodensitométrie dans l’évaluation des métastases cérébrales car elle permet parfois de découvrir de multiples métastases non visibles à l’examen tomodensitométrique (10 à 20 % des patients ayant une métastase unique à l’examen tomodensitométrique ont d’autres localisations visibles en IRM) et elle permet une meilleure analyse de la fosse cérébrale postérieure. L’IRM est donc l’examen de choix dans l’évaluation des tumeurs cérébrales pour déterminer si la lésion est unique ou non ce qui va complètement influencer l’indication chirurgicale. Les métastases cérébrales sont plutôt hypodenses au TDM et hypointenses spontanément en T1 à l’IRM, se rehaussant après injection de produit de contraste. Elles peuvent réaliser un aspect en cocarde avec une nécrose centrotumorale et s’accompagnent d’un œdème péri-tumoral dans ¾ des cas. Les métastases des mélanomes sont habituellement hyperdenses au TDM ou hyperintenses spontanément en IRM, se rehaussant après injection de produit de contraste. Il n’existe pas de signe radiologique pathognomonique d’une métastase cérébrale sauf si on voit des lésions multiples en « lâcher de ballon ». Les caractères bien limités, arrondi, de petite taille, entouré d’un important œdème périlésionel plaident en faveur d’une métastase cérébrale à la différence d’une tumeur gliale qui sera plus infiltrante c’est-à-dire de volume plus important, avec une prise de contraste plus hétérogène et des limites moins nettes. L’œdème est classiquement décrit comme moins important dans les tumeurs cérébrales primitives gliales.

L’indication thérapeutique chirurgicale d’une métastase se discute en Staff multidisciplinaire. La chirurgie d’exérèse reste logique si la lésion est accessible et si elle est unique. Cependant, on peut discuter d’une chirurgie dans certains cas de lésions multiples dont une pourrait être une menaçante à court terme comme par exemple dans la fosse cérébrale postérieure. Habituellement, une radiothérapie externe conventionnelle complète le traitement chirurgical afin d’éviter les récidives. L’indication d’une chimiothérapie dépend de l’histologie et de l’évolution du cancer en cours.

F – LES TUMEURS VASCULAIRES

LES HEMANGIOBLASTOMES :

Ce sont des tumeurs vasculaires bénignes.

Ce sont des tumeurs rares : 2 % de l’ensemble des tumeurs du SNC dont le siège préférentiel est la fosse cérébrale postérieure. Elles peuvent se localiser également dans la moelle épinière ou de façon exceptionnelle à l’étage supratentoriel.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

Ce sont des tumeurs de la trentaine dont le diagnostic est facilement évoqué à l’imagerie.

Les symptômes cliniques sont en général ceux d’une hypertension intracrânienne par hydrocéphalie ou un syndrome cérébelleux ou des signes de compression du tronc cérébral. Le diagnostic est aussi facilement évoqué lorsqu’il existe une polyglobulie : dans un tiers des cas, l’hémangioblastome du cervelet s’accompagne d’une augmentation de l’hémoglobine par sécrétion d’une substance érythropoïétine-like.

L’imagerie neuroradiologique est très évocatrice et permet de montrer une tumeur le plus souvent kystique avec un nodule mural, isodense au TDM ou isointense spontanément en T1 en IRM, se rehaussant de façon intense et homogène après contraste. Le kyste peut manquer mais lorsqu’il existe, il est habituellement très volumineux. Les autres diagnostics évoqués dans ce cas sont un astrocytome pilocytique du cervelet ou bien une lésion métastatique.

L’exérèse chirurgicale permet d’obtenir la guérison du patient. L’hémangioblastome du cervelet peut être le mode de révélation d’une phakomatose :

maladie de Von Hippel-Lindau. Il s’agit d’une maladie autosomique dominante nécessitant un avis et un conseil génétiques. Cette maladie peut donner d’autres tumeurs : hémangioblastomes multiples du SNC, hémangioblastome rétinien, phéochromocytome, autres anomalies viscérales comme des kystes ou des anomalies rénales ou pancréatiques. LES ANGIOMES CAVERNEUX ou CAVERNOMES

Ils se définissent comme des hamartomes vasculaires cérébraux. Ils s’apparentent plus aux formations artérioveineuses qu’aux tumeurs cérébrales. Un individu sur 200 aurait un cavernome et les ¾ sont situés dans les hémisphères cérébraux en situation souscorticale. Toutes les régions encéphaliques peuvent être le siège d’un cavernome : dans la fosse cérébrale postérieure, la localisation la plus fréquente est le tronc cérébral (pont).

Il s’agit d’une masse rougeâtre, polylobée dont l’aspect macroscopique est celui d’une mûre. Le volume varie de quelques millimètres à plusieurs centimètres. Les symptômes cliniques sont de 3 ordres : crises comitiales, hémorragie intracérébrale ou un syndrome compressif tumoral pour les plus gros. Dans 20 % des cas, il s’agit d’une hémorragie intracérébrale et il faut donc être particulièrement vigilant à l’enquête étiologique d’un hématome intracérébral de sujet jeune de localisation lobaire cortico-souscorticale.

L’examen tomodensitométrique révèle une lésion spontanément hyperdense, hétérogène de volume variable, pouvant se rehausser légèrement après injection d’iode, sans œdème périlésionel. Pour les petites lésions, le diagnostic n’est pas toujours facile dans les zones d’artefacts de la base du crâne. C’est l’IRM qui a une grande importance diagnostique. En effet, les séquences écho de gradient (T2*) permettent souvent d’affirmer le diagnostic en montrant un signal hypointense hautement suggestif de cavernome. Cet hyposignal correspond aux dépôts d’hémosidérine, produit de dégradation final de l’hémoglobine, témoignant des saignements itératifs a minima du cavernome lors de son évolution. C’est par ces saignements itératifs intracaverneux que la progression tumorale peut se faire.

Le risque hémorragique a été évalué entre 1 et 2 % chaque année (même risque qu’une malformation artérioveineuse ou qu’un anévrisme intracrânien de découverte fortuite).

L’exérèse chirurgicale est proposée chaque fois qu’elle est possible afin de prévenir cette complication hémorragique.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

G – LES TUMEURS PLUS RARES

Les lymphomes du patient immunocompétent surviennent le plus souvent autour de la soixantaine et il s’agit d’un lymphome de type B à grandes cellules dans 80 à 90 % des cas. Ils représentent moins de 1 % de toutes les tumeurs cérébrales.

Les lymphomes cérébraux primitifs ont une localisation préférentielle en profondeur des hémisphères cérébraux à proximité du système ventriculaire. Les symptômes ne sont pas spécifiques et sont superposables aux autres tumeurs cérébrales. Cependant, compte tenu de leur localisation profonde, il existe fréquemment des troubles de la personnalité, une lenteur d’idéation et une détérioration de la mémoire assez nette dans ce type de tumeurs. Les signes d’hypertension intracrânienne sont au second plan.

En imagerie, l’examen tomodensitométrique et l’IRM montrent des lésions typiquement périventriculaires se rehaussant de façon intense et homogène après injection du produit de contraste réalisant un aspect "cotonneux".

L’exérèse chirurgicale est en général impossible et le diagnostic repose sur la réalisation d’une biopsie chirurgicale. Le traitement corticoïde peut avoir un effet spectaculaire avec une disparition complète des lésions en quelques jours ou quelques semaines mais cet effet est transitoire. Le traitement repose sur la chimiothérapie et la radiothérapie encéphalique externe dont les indications sont discutées au cas par cas en fonction de l’état général et de l’âge du patient. Ce traitement lourd ne se conçoit qu’après le diagnostic positif précis du type de lymphome. Le pronostic de lymphome est mauvais car la qualité de vie est souvent médiocre du fait des troubles neurologiques et psychiques et les survies au-delà de 5 ans n’excèdent pas 5 %. Le décès intervient par récidive locale ou dissémination dans le névraxe.

H – LES TUMEURS INTRACRANIENNES EXTRAENCEPHALIQUES

1) Tumeur de la ligne médiane

a - Tumeurs de la région sellaire et suprasellaire LES ADENOMES HYPOPHYSAIRES :

Ce sont de loin les tumeurs les plus fréquentes de l’hypophyse. Les modes de révélation se font soit par un syndrome tumoral pour les adénomes non sécrétants et les adénomes à prolactine chez l’homme, soit par un syndrome endocrinien pour les adénomes sécrétants ou en cas d’insuffisance ante-hypophysaire. Enfin, un syndrome d’apoplexie aiguë lié à une nécrose ou à une hémorragie intratumorale soudaine peut être également un autre mode révélateur.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

1 - Le syndrome tumoral : Il associe des céphalées et des signes visuels à type

d’hémianopsie bitemporale le plus souvent asymétrique. Il peut s’agir également d’autres troubles visuels comme une baisse simple de l’acuité visuelle, monoculaire ou bilatérale, ou d’une hémianopsie latérale homonyme. Il peut exister également des signes d’envahissement du sinus caverneux avec des troubles oculomoteurs et une névralgie faciale ou bien encore des crises d’épilepsie lors des adénomes très envahissants avec extension intracrânienne, voire intracérébrale. L’hypertension intracrânienne est exceptionnelle en tant que telle, de même que l’hydrocéphalie.

2 - Les syndromes endocriniens : Il peut s’agir d’une insuffisance antéhypophysaire complète ou incomplète liée au syndrome tumoral. Un adénome hypophysaire n’est en principe jamais responsable de diabète insipide (pas d’insuffisance posthypophysaire). Il peut s’agir aussi d’un syndrome d’hypersécrétion :

- Le plus fréquent est l’adénome à prolactine chez la femme jeune révélé par un

syndrome aménorrhée – galactorrhée (il peut s’agir également d’une spanioménorrhée, d’une irrégularité menstruelle ou d’une dysovulation). Chez l’homme, les signes sont plus tardifs avec une baisse de la libido, une impuissance, une gynécomastie et exceptionnellement une galactorrhée. Le dosage de la prolactine suffit au diagnostic lorsque celui est supérieur à 200 ng/ml.

- Les adénomes somatotropes réalisent les signes classiques de l’acromégalie avec un syndrome dysmorphique prédominant aux extrémités et à la face. Il s’agit d’une maladie grave pouvant mettre en jeu le pronostic vital par une cardiomyopathie ou un diabète. Les cancers, en particulier colorectaux, sont également plus fréquents. Les dosages endocriniens montrent une hormone somatotrope augmentée non freinable.

- Les adénomes corticotropes : la maladie de Cushing est due à un adénome hypophysaire sécrétant de l’ACTH se manifestant cliniquement par des troubles de la répartition des graisses, une atrophie musculaire cutanée, des vergetures, une acné, un hirsutisme, une érythrose du visage, une hypertension artérielle, un diabète et une polyglobulie. C’est une maladie grave en l’absence de traitement efficace. Le diagnostic repose sur le dosage du cortisol dans le sang avec une étude du cycle nycthéméral et un dosage du cortisol libre urinaire des 24 heures. La maladie de Cushing est le plus souvent due à un microadénome.

- Les autres adénomes sécrétants sont exceptionnellement responsables d’un syndrome endocrinien clinique. Il peut s’agir d’une hyperthyroïdie par adénome thyréotrope. Les adénomes gonadotropes ne sont pratiquement jamais responsables de syndrome endocrinien.

Le diagnostic d’adénome hypophysaire est confirmé par l’examen IRM centré sur

l’hypophyse sans et avec injection de Gadolinium. Outre la morphologie de la tumeur, l’IRM précise son extension suprasellaire et vers les sinus caverneux. Le traitement chirurgical par voie transrhinoseptale est plus utilisé dans les adénomes hypophysaires mais le traitement médical peut être d’abord proposé dans les adénomes à prolactine par agoniste dopaminergique (parlodel®, dostinex®….). Les déficits endocriniens sont traités par une hormonothérapie substitutive adaptée au cas par cas.

3 - le syndrome d’apoplexie aigu hypophysaire traduisant une nécrose ou une hémorragie

intra-tumorale associe de façon brutale des céphalées et des manifestations visuelles sévères (baisse d’acuité visuelle, atteinte du champ visuel, voire cécité brutale) avec une possible atteinte oculomotrice. L’atteinte visuelle brutale est une urgence diagnostique et thérapeutique, et justifie une chirurgie en urgence même sans bilan endocrinien au préalable.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

LES CRANIOPHARYNGIOMES :

Ce sont des tumeurs épithéliales histologiquement bénignes prenant naissance au niveau de la tige pituitaire et se développant dans la région sellaire et suprasellaire. C’est une pathologie grave dont l’exérèse chirurgicale est particulièrement difficile. Elle expose à des séquelles endocriniennes, neurologiques, visuelles et intellectuelles.

Les craniopharyngiomes représentent 3 à 4 % des tumeurs intracrâniennes de tout âge avec

3 des pics de fréquence : chez l’enfant, l’adulte jeune entre 20 et 25 ans et l’adulte entre 60 et 65 ans.

Il s’agit d’une tumeur embryonnaire dont la croissance est variable et dont l’aspect

macroscopique peut revêtir différentes formes. La tumeur contient : (1) une partie charnue, (2) un ou plusieurs kystes dont certains peuvent être très volumineux, (3) des calcifications. Le craniopharyngiome moule, s’infiltre et adhère toutes les structures nerveuses de

voisinage c’est-à-dire tout le cercle artériel de la base du crâne, les voies visuelles, l’hypothalamus et la tige pituitaire. Il existe de nombreuses formes topographiques et les symptômes cliniques révélateurs associent à des degrés variables des signes endocriniens, des signes visuels (baisse uni- ou bilatérale de l’acuité visuelle ou altération du champ visuel) et des signes neurologiques focaux plus rarement. Le syndrome d’hypertension intracrânienne est plus fréquent chez l’enfant car les tumeurs sont souvent très volumineuses et associées à une hydrocéphalie.

Le diagnostic radiologique est basé sur l’IRM. Cependant, sur les radiographies de crâne, il

peut exister une augmentation de volume de la fosse hypophysaire, des signes d’érosion du dos de la selle ou des calcifications en coquille d’œuf. Les calcifications sont également vues à l’examen tomodensitométrique. C’est l’IRM qui est l’examen de choix pour analyser la portion charnue et kystique, les rapports avec l’hypothalamus, l’hypophyse, les vaisseaux et les voies visuelles. Les calcifications ne sont pas cependant pas visualisées en IRM et la tumeur apparaît le plus souvent en hypersignal T1 et T2 avec un rehaussement après Gadolinium plus ou moins important.

Le traitement chirurgical est la règle et l’exérèse doit être la plus complète possible car

c’est la seule chance de guérison définitive. Les récidives sont fréquentes cependant et peuvent nécessiter d’autres interventions chirurgicales voire une radiothérapie complémentaire ou une instillation d’une chimiothérapie à l’intérieur du kyste.

La qualité de vie est largement perturbée par les troubles endocriniens et la substitution

hormonale définitive liée au sacrifice de la tige pituitaire. La prise de poids considérable par hyperphagie est également un des problèmes majeurs du fait qu’elle est difficilement contrôlable. Le pronostic visuel est également mauvais dans les cas de diagnostic tardif avec cécité.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

b - Tumeurs de la région pinéale

Elles sont rares chez l’adulte et plus fréquentes chez l’enfant. Il s’agit soit d’une tumeur germinale, soit d’une tumeur du parenchyme pinéal.

- Les tumeurs germinales primitives du système nerveux central (SNC) se rencontrent

dans la région épiphysaire (épiphyse = glande pinéale) et dans la région suprasellaire. Ce sont des tératomes, germinomes, carcinomes embryonnaires, choriocarcinomes. Ces tumeurs peuvent sécréter des marqueurs tumoraux qui seront dosés dans le sang et le LCS (alpha-foeto-protéine et bétaHCG). Les manifestations sont habituellement neuroendocriniennes : diabète insipide lié à l’extension à la région hypothalamique, puberté précoce secondaire chez l’enfant, signes d’insuffisance antéhypophysaire.

- Les autres tumeurs du parenchyme pinéal sont soit bénignes : pinéalocytomes, soit

malignes : pinéaloblastomes. Les signes cliniques sont alors plutôt ophtalmoplégiques liée à l’atteinte des colliculi supérieurs et de la région prétectale : syndrome de Parinaud. Une hypertension intracrânienne secondaire par hydrocéphalie obstructive par sténose de l’aqueduc du mésencéphale est également fréquente.

L’association troubles neuroendocriniens et neuroophtalmologiques par paralysie de la

verticalité est assez caractéristique d’une lésion pinéale. Les tumeurs malignes pinéales sont susceptibles d’essaimer tout au long du névraxe par le

LCS et justifient de réaliser un bilan d’extension rachidien par IRM. Le traitement associe à divers degrés une chirurgie par biopsie ou exérèse, une

chimiothérapie, une radiothérapie.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

2) Les méningiomes

Les méningiomes sont des tumeurs en général bénignes développées à partir des cellules méningothéliales de l’arachnoïde. Ils représentent ¼ des tumeurs intracrâniennes primitives en deuxième position après les gliomes. Les ¾ des cas sont observés après 50 ans et il existe une nette prédominance féminine. Il n’existe pas de facteur étiologique connu en dehors d’une radiothérapie externe ou d’un traumatisme crânien.

Le méningiome est habituellement unique, mais il peut être également multiple réalisant

alors une méningiomatose de taille variable. Leur taille peut aller de quelques millimètres jusqu’à plusieurs centimètres voire plus de 10 cm. La forme la plus fréquente est un méningiome « en masse » de la convexité crânienne implantée sur la dure-mère par une base d’implantation circulaire et se développant vers le cerveau qu’il refoule. Une réaction osseuse avec envahissement est possible réalisant alors un ostéoméningiome. On distingue les méningiomes de la convexité, de la base du crâne, parasagittaux, de la faux du cerveau, de la tente du cervelet, de la fosse cérébrale postérieure. Il existe de rares méningiomes intra-ventriculaires. Ce sont des tumeurs richement vascularisées habituellement à partir des vaisseaux méningés branches de l’artère carotide externe. Un œdème périlésionel est souvent observé, d’importance variable.

Le grading histologique de l’OMS différentie les méningiomes de grade I bénins, les

méningiomes de grade II atypiques avec un index prolifératif plus élevé et les méningiomes anaplasiques de grade III. Les grades II sont plus susceptibles de récidiver. Les grades III sont des tumeurs cancéreuses dont le pronostic reste sombre.

La présentation clinique dépend de la localisation du méningiome. Les céphalées diffuses

ou localisées sont possibles, mais rarement spécifiques. Une sémiologie déficitaire neurologique parenchymateuse en "tache d’huile" très progressive ou une crise comitiale inaugurale est la règle pour les méningiomes de la convexité alors que le méningiome de la base du crâne se révèle habituellement par une atteinte d’un ou plusieurs nerfs crâniens.

Les examens neuroradiologiques permettent d’évoquer assez facilement le diagnostic. Il

s’agit d’une tumeur spontanément isodense au TDM ou isointense en T1 en IRM, se rehaussant de façon intense et homogène après contraste. La base d’implantation avec la dure-mère est large, sessile. Il existe autour un œdème périlésionel objectivé par une hypodensité périlésionnelle au TDM ou un hypersignal T2 en IRM. L’examen neuroradiologique apprécie la taille du méningiome, sa topographie, sa base d’implantation, ses rapports avec les structures de voisinage, l’effet de masse sur le parenchyme cérébral, l’œdème péritumoral, l’existence de complications associées comme une hydrocéphalie.

Le traitement consiste en l’exérèse chirurgicale la plus complète possible. L’attache durale

peut être enlevée ou coagulée. Le risque de récidive existe pour les méningiomes dont l’exérèse est incomplète ou dans des régions d’accès difficile pour lesquelles la base d’implantation n’a pas pu être coagulée de façon satisfaisante. Le risque de récidive est également important pour les méningiomes de grade II. Un traitement par radiothérapie conventionnelle externe est nécessaire pour les méningiomes de grade III. Dans les récidives des autres méningiomes bénins, la radiothérapie fait également partie de l’arsenal thérapeutique. Le pronostic est globalement excellent pour les méningiomes de la convexité et plus réservé pour les méningiomes de la base du crâne.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

3) Tumeurs de la fosse cérébrale postérieure

LES SCHWANNOMES OU NEURINOMES VESTIBULAIRES :

Ce sont les tumeurs les plus fréquentes de l’angle pontocérébelleux. La sémiologie clinique est particulière avec :

1 - Des signes otologiques : hypoacousie unilatérale progressive de perception (très rarement surdité brusque), bourdonnements d’oreilles. Il peut s’agir également de signes vestibulaires : vertiges, instabilité ou sensation de déséquilibre entraînant une démarche ébrieuse ; ou bien de signes auriculaires : sensations de plénitude auriculaire, otalgie.

2 - Des signes neurologiques liés à :

- la compression des autres nerfs crâniens dans l’angle pontocérébelleux : névralgie faciale par atteinte du trijumeau, paralysie faciale ou hémispasme facial, compression des nerfs mixtes entraînant des troubles de la fonction de déglutition.

- la compression du cervelet avec un syndrome cérébelleux cinétique - la compression du tronc cérébral avec un syndrome pyramidal de façon très exceptionnelle.

3 - Il peut s’agir également d’un syndrome d’hypertension intracrânienne par

hydrocéphalie par compression du IVème ventricule. Les neurinomes du VIIIc sont classés en 4 grades suivant leur taille. Ce sont des tumeurs

toujours bénignes dont le traitement est chirurgical. L’irradiation très ciblée (radiochirurgie par gammaknife) d’une petite tumeur est toujours possible et est réservée à certaines indications précises. La mortalité est passée de 25 % dans les années 60 à 1 % dans les équipes entraînées. Le risque chirurgical principal concerne la motricité faciale. LES AUTRES TUMEURS DE L’ANGLE PONTOCEREBELLEUX :

- Il existe d’autres neurinomes : du V, des nerfs mixtes, du VII. - Les méningiomes du rocher, - Les kystes épidermoïdes.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

V – DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL

Le diagnostic différentiel se pose avec les autres processus expansifs intracrâniens ou

intracérébraux :

A – L’ABCES CEREBRAL

C’est une affection peu fréquente qui peut apparaître d’emblée par des signes cliniques focaux, une hypertension intracrânienne, une épilepsie sans que le stade d’encéphalite aiguë présuppérative ne soit connu. Le syndrome infectieux peut manquer et la porte d’entrée en général dentaire ou sinusienne peut ne pas être évidente d’emblée. Les portes d’entrée métastatiques cardiaques ou pulmonaires sont beaucoup plus rares. Les abcès cérébraux sont souvent polymicrobiens : ce sont des germes aérobies de type streptocoque mélangés à des germes anaérobies. La prédominance masculine est nette et l’abcès cérébral peut concerner tous les âges de la vie. Si on évoque le diagnostic, on doit rechercher un contexte infectieux clinique ou biologique et une porte d’entrée bucco-dentaire ou sinusienne.

L’image neuroradiologique est assez caractéristique : il s’agit d’une image en cocarde ou

en anneau avec un centre hypodense au TDM ou hypointense en T1 à l’IRM, entourée d’une coque qui prend le contraste de façon intense après contraste. Cette coque est généralement bien limitée et arrondie. La taille des abcès cérébraux peut être importante. L’abcès est entouré d’une zone d’œdème hypodense. Cet aspect en anneau peut évoquer également une métastase nécrotique ou un gliome kystique type glioblastome. L’IRM avec les séquences de diffusion permet de trancher : si la zone centrolésionelle apparaît en blanc, alors il s’agit de pus (alors que si la zone apparaît en noir, il s’agit de nécrose et donc d’une tumeur). Cependant, il peut exister des métastases abcédées d’origine bronchopulmonaire. Les abcès cérébraux ont une localisation supratentorielle élective plutôt superficielle temporale ou frontale. Les abcès cérébraux profonds sont beaucoup plus rares (environ 5 % des cas).

La ponction de l’abcès par guidage stéréotaxique ou par neuronavigation doit être pratiquée

rapidement lorsque l’abcès est volumineux. Elle permet 1) d’affirmer le diagnostic d’abcès, 2) d’isoler les germes responsables, 3) de réduire l’éventuelle hypertension intracrânienne.

Le traitement est médical et consiste en un traitement antibiotique par voie intraveineuse à

large spectre associant plusieurs antibiotiques pendant 4 à 6 semaines environ. Lorsque le germe est isolé, l’antibiogramme réalisé et le traitement antibiotique efficacement mené, le pronostic est bon avec la possibilité d’une guérison sans séquelle. Une comitialité résiduelle est toujours possible. Lorsque l’abcès se vidange dans le système ventriculaire réalisant une ventriculite, alors le pronostic est beaucoup plus sombre avec un risque d’hydrocéphalie cloisonnée secondaire.

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Tumeurs cérébrales de l’adulte

B – LES KYSTES EPIDERMOIDES ET LES KYSTES DERMOIDES

Ce sont des formations bénignes de croissance lente presque toujours congénitales résultant de l’inclusion d’ectoderme lors de la fermeture du tube neural. Le kyste épidermoïde a un aspect blanc nacré et est constitué d’un épithélium kératinisé où s’accumulent les produits de dégradation des cellules épithéliales. Le kyste dermoïde peut contenir des éléments dermiques comme des follicules pileux, des glandes sébacées, des poils.

Ce sont des lésions rares avasculaires dont les sites de prédilection sont parasagittaux ou

ventriculaires. Les kystes épidermoïdes se localisent également dans l’angle pontocérébelleux, dans la fosse cérébrale temporale ou dans la région parasellaire. Les kystes dermoïdes se développent plutôt à proximité de la ligne médiane supratentorielle. Leur croissance est très lente et les symptômes s’installent très lentement sur plusieurs années. La sémiologie clinique varie en fonction de la localisation.

L’imagerie neuroradiologique permet d’évoquer le diagnostic. Le kyste épidermoïde se

présente typiquement sous la forme d’une masse hypodense aux contours irréguliers sans aucune prise de contraste après injection d’iode et sans œdème périlésionel au TDM. Le kyste dermoïde a le même aspect, mais présente souvent des calcifications hyperdenses. Le diagnostic entre les deux n’est pas toujours évident de même que le diagnostic différentiel avec un kyste arachnoïdien ou un astrocytome infiltrant. L’examen IRM permet souvent de faire le diagnostic grâce aux séquences de diffusion où le kyste épidermoïde apparaît fortement hyperintense.

Le traitement de ces lésions est chirurgical, mais l’exérèse n’est pas toujours facile compte

tenu de leur localisation profonde.

C – LES KYSTES ARACHNOIDIENS

C’est une formation arachnoïdienne dont les parois sont purement arachnoïdiennes. Les kystes arachnoïdiens peuvent se développer partout où il existe de l’arachnoïde, mais ils se localisent plus particulièrement au niveau des citernes arachnoïdiennes périencéphaliques. Le contenu du kyste est du LCS de même composition que le LCS sous-arachnoïdien. Ce kyste s’enclôt et le liquide intrakystique ne communique pas avec le LCS voisin. Le kyste peut alors augmenter de volume par accumulation de LCS sous pression et il devient alors symptomatique en comprimant les structures encéphaliques voisines. Des micro-traumatismes peuvent être responsables d’hémorragies locales majorant l’effet de masse et les symptômes.

Le siège est temporo-sylvien dans la moitié des cas, dans la région sellaire dans 10 % des cas et cérébello-pontique dans 10 % des cas.

La découverte d’un kyste arachnoïdien intracrânien est assez banal avec les examens

neuroradiologiques modernes. Il concernerait 1 à 2 % de la population.

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Les symptômes révélateurs peuvent être soit très progressifs, soit très brutaux. - Les symptômes progressifs d’hypertension intracrânienne concernent essentiellement

l’enfant. Il peut exister une dysmorphie crânienne par soufflure de la voûte crânienne, le plus souvent une saillie de la fosse temporale dans les volumineux kystes temporo-sylviens. Les signes d’hypertension intracrânienne sont parfois difficiles à individualiser chez le petit enfant et ce sont les examens neuroradiologiques par TDM ou par IRM qui permettent de confirmer la compression du parenchyme cérébral voisin par un déplacement de la ligne médiane, un effacement des structures ventriculaires et des sillons cérébraux. Les kystes arachnoïdiens suprasellaires peuvent également entraîner une hydrocéphalie. Dans ces cas, le traitement par endoscopie du kyste est le traitement de choix : kystocisternostomie endoscopique voire kystoventriculocisternostomie endoscopique. Le principe est de réaliser une fenêtre (stomie) pour faire communiquer les différents espaces et égaliser ainsi les pressions dans les différents compartiments. On peut discuter également la mise en place d’une dérivation kystopéritonéale. L’amélioration postopératoire est en général spectaculaire.

- L’autre mode de révélation est une hypertension intracrânienne aiguë à la faveur d’une hémorragie intrakystique au décours d’un traumatisme crânien. L’intervention chirurgicale en urgence à ciel ouvert est alors nécessaire. Sous microscope, la paroi interne du kyste peut être ouverte pour le faire communiquer avec les citernes sous-arachnoïdiennes permettant ainsi le libre passage du LCS ce qui permet d’égaliser les pressions (même principe que la stomie par endoscopie). Le kyste peut également se rompre dans l’espace sousdural entraînant un hydrome sousdural compressif ou un hématome sousdural.

Le diagnostic neuroradiologique est assez évident en montrant une empreinte sous la voûte crânienne qui est déformée par le kyste sous pression. Le contenu du kyste a le même signal TDM et IRM que le LCS.

Enfin, il reste le problème de la relation entre les kystes arachnoïdiens et une éventuelle

épilepsie. Il ne faut méconnaître la possibilité d’une épilepsie propre indépendante de l’existence d’un kyste arachnoïdien. La découverte fortuite des kystes arachnoïdiens est fréquente et il faut être très prudent sur les indications thérapeutiques. Celles-ci ne doivent être proposées que lorsqu’il existe une bonne corrélation entre les symptômes et les examens neuroradiologiques.