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Un enfant d'Afrique by Olympe Bhely-Quenum Review by: Nicole Medjigbodo Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines, Vol. 10, No. 3 (1976), pp. 538-542 Published by: Taylor & Francis, Ltd. on behalf of the Canadian Association of African Studies Stable URL: http://www.jstor.org/stable/483812 . Accessed: 13/06/2014 09:13 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Taylor & Francis, Ltd. and Canadian Association of African Studies are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.34.79.49 on Fri, 13 Jun 2014 09:13:39 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Un enfant d'Afriqueby Olympe Bhely-Quenum

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Un enfant d'Afrique by Olympe Bhely-QuenumReview by: Nicole MedjigbodoCanadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines, Vol. 10, No. 3(1976), pp. 538-542Published by: Taylor & Francis, Ltd. on behalf of the Canadian Association of African StudiesStable URL: http://www.jstor.org/stable/483812 .

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538 REVUE CANADIENNE DES ETUDES AFRICAINES

are peculiarly susceptible to the type of abuse made possible where there is a lax fiscal administration and which the author describes in another context (p. 124).

The weaknesses and strengths of Berger's study are similar to those of many other Ifo- Institut studies. They tend to be strong on description and thin in economic analysis. As a source of much recent information on in- dustrialization policies in Nigeria it can be recommended.

G. K. HELLEINER

Department of Political Economy, University of Toronto

Olympe BHELY-QUENUM, Un enfant d'Afrique, td. Larousse, Paris, 1970, 256p.

O. Bhely-Quenum, originaire du Dahomey, nous pr6sente son livre Un enfant d'Afrique comme (( un roman pour les lecteurs et lectrices de 10 a 14 ans

,, d'Afrique et d'Europe. C'est

dire qu'il veut a la fois intbresser les enfants europ6ens a une r6alit6 sociale, a des habitudes de vie, a des sentiments qui sont diff6rents des leurs, et intdresser les enfants africains en romangant ce qui leur est habituel. 11 faut donc remarquer qu'au d6part c'6tait, a notre avis, une gageure de vouloir concilier les deux inten- tions: ce qui parait curieux, en effet, 6trange 'a l'enfant europeen, a qui l'Afrique apparait encore lointaine et mystbrieuse, n'est pour l'enfant africain que monotone, r6p6titif. C'est d'ailleurs toute la difficult6 des souvenirs d'en- fance comme ceux de Camara Laye, dont les lecteurs africains disent tres souvent: ((mais nous savions dj~i tout cela...

!,, O. Bhely-Quenum a-t-il pu tenir cette ga-

geure? N'a-t-il pas, en fait, 6crit un livre qui, quoiqu'd teneur exotique, peut encore convenir, avec certaines r6serves toutefois, a des lecteurs europ6ens, mais par ailleurs n'a-t-il pas 6chou6 en ce qui concerne le lecteur africain, et ceci pour plusieurs raisons que nous voudrions examiner?

La premiere remarque concerne le manque de situation pr6cise, gbographique, historique. Bien stir, le propos d'O. Bhely-Quenum, si nous

interpr6tons correctement sa Pr6face, etait

justement, en 6vitant toute localisation geogra- phique, d'atteindre ia une (( universalit6 africai-

ne,, pourrions-nous dire; mais il nous semble

que, ce faisant, il oublie le tres grand souci

qu'ont les enfants, de quelque pays qu'ils soient, de situer leurs personnages dans le temps et dans l'espace. En fait, le pays qu'il d6crit, sans le nommer, ressemble fort a la Guin6e (le cadre offre meme certaines ressemblances avec le

village de Kouroussa de C. Laye), avec, en plus, un peu du Dahomey du sud, et de la C6te d'Ivoire avec ses grandes plantations.

Cela donne lieu a des incoherences geogra- phiques et historiques. Par exemple, des impos- sibilit6s gdographiques manifestes (p. 225): pour aller a Abeokuta (gdographiquement au sud-ouest du Nigeria), le h6ros de l'histoire, Ajao, et ses amis, passent par Port-Harcourt (au sud-est du Nigeria); cet itinbraire n'a de sens que s'ils viennent de l'est, du Cameroun, par exemple, ce qui contredit la description donn6e tout au long du r6cit. Cette incoh6rence

gbographique se trouve confirmee par quelques l66ments historiques, aI encore tres vagues, que

fournit Ajao (p. 226): il pense que sa famille est

originaire du Nigeria; dans son village on parle le haoussa et le yorouba. Dans un sens comme dans l'autre, I'auteur induit ses lecteurs en erreur; nous pensons qu'il faudrait respecter un

peu l'histoire et la gbographie de l'Afrique. Est- ce qu'un enfant de 10 ' 14 ans, par cons6quent du niveau CM2 (derniere ann6e de l'6cole primaire) ou meme dans ses premieres ann6es d'6cole secondaire, ne verra pas lI logiquement une suite de contradictions inconciliables ? Ou cela veut-il dire qu'O. Bhely-Quenum, contrai- rement a ce qu'il 6crit dans la Pr6face de son livre, a une pietre opinion du raisonnement enfantin? (En ce sens, nous ne pouvons que constater certaines id6es troublantes chez quel- qu'un qui veut faire office de p6dagogue, soit

qu'il sous-estime ce raisonnement ((( les enfants disent des balivernes

,), soit qu'il le surestime en

pretant '

Ajao une analyse de sentiments beaucoup trop compliqu6e pour son age (p. 42)).

Le second point que nous voudrions souli- gner, c'est que les enfants mis en scene sont loin de ressembler i des enfants africains, particulid- rement lorsqu'on comprend que le roman se situe dans la p6riode coloniale: depuis quand les enfants africains, l61ev6s dans un village

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LIVRES / BOOKS 539

d'Afrique, disent-ils ((na , expression typique en France, mais non en Afrique: Anatou et Ajao parlent comme des petits Africains 61lev6s en France (l'auteur lui-meme vit en France depuis de tres nombreuses ann6es, ses enfants y ont 6t6 61ev6s, ce qui pourrait expliquer les limites de son analyse). Comment, par ailleurs, un enfant africain, ignorant jusqu'alors tout de la langue franqaise et n'allant ai l'6cole que depuis peu, peut-il employer ce niveau de langage? (( ... J'6tais parti lI-haut en posant fermement mes pieds sur les saillies du

frdt, tout

en m'agrippant a ses cr6nelages dis s l'61agage; j'avais rep6r6 un nid de tourterelles dans les

rameaux.,) (p. 175) De plus, le frere ain6 d'Ajao, Bourai'ma, ne parle-t-il pas un (( francais d'importation n, artificiel et recher-

ch6? Ces deux derniers exemples confirment que, si l'un des buts d'O. Bhely-Quenum 6tait de faire un ouvrage p6dagogiquement utile sur le plan de l'utilisation de la langue francaise, il ne semble pas qu'il y ait r6ussi.

En troisieme lieu, comment peut-on situer aujourd'hui, un roman pour enfants dans la p6riode coloniale, en pr6sentant, somme toute, cette p6riode comme pas d6sagr6able du tout (pour le propri6taire terrien ais6 Kilanko et sa famille, bien stir) et meme b6n6fique? Com- ment parler

,, d'universalit6 africaine ) quand il

s'agit: 1) d'une famille socialement privil6gi6e, bien que l'auteur ne le dise pas; 2) de personna- ges particulibrement ali6n6s, persuad6s, par exemple, de la sup6riorit6 de

,,l'6cole des

Blancs,,; 3) d'une vision des Europ6ens en Afrique qui, a cette p6riode et pour la grande majorit6 des cas, est historiquement fausse, mis a part le portrait du traitant Noriet; 4) d'une leqon qui est celle de la soumission, de l'accep- tation de la sup6riorit6 de l'Europ6en. Il en est ainsi dans la r6ponse de Fiwa a un Europ6en, Bernardi, qui vient de l'insulter:

( Alors, bande de n6grillons, vous n'avez jamais vu de Blanc? - Excusez-nous, monsieur Bernardi... avait commenc6 Fiwa. - Dites donc, la n6gresse, je vous interdis de m'appeler par mon nom! l'avait-il interrom- pue. - Je vous fais mes excuses, Monsieur...,, A notre avis, ces omissions, ces d6formations n'aboutissent qu'd mystifier le lecteur sur le plan historique, ce qui nous parait tout aussi

dangereux pour les enfants europeens qu'afri- cains.

En quatrieme lieu, nous pensons qu'O. Bhely-Quenum lasse son lecteur. Le r6cit nous semble impossible a suivre et peu passionnant pour des enfants de 10 a 14 ans, en particulier quand le francais n'est pas leur langue mater- nelle. Il y a trop de retours en arriere, de souvenirs qui coupent le r6cit et ne peuvent que fatiguer l'attention du jeune lecteur. Par ail- leurs, on est ameni ia se demander s'il s'agit d'un roman, comme son titre l'indique, ou bien d'un recueil d'explications de textes: on ne peut, en effet, lire et s'intdresser au dbroulement de l'histoire en allant chercher a chaque page une bonne partie des mots dans le dictionnaire! On ne peut pas faire oeuvre didactique a tout prix... et surtout pas au prix de l'int6ret de son lecteur.

Sociologiquement parlant, nous notons des contradictions: l'auteur, par exemple, semble manifestement faire l'6loge de la monogamie, ce faisant il fait comme s'il s'adressait a un enfant europ6en pour qui c'est maintenant chose courante et normale pratiquement, et en meme temps il nous apprend que Kilanko, le pere d'Ajao, est musulman; quel enfant afri- cain, habitu6 jusqu'd maintenant a vivre la polygamie comme un fait social normal (meme chez certains chr6tiens), identifiera cette fa- mille, ce pere de famille a celles et a ceux qu'il voit vivre autour de lui ? Qu'il le veuille ou non, les descriptions qu'O. Bhely-Quenum donne des Africains sont celles d'un Europeen. 11 emploie meme le langage des colons a cette 6poque, considerant les langues nationales appel6es alors

, indigenes n ou (( vernaculaires

, comme

infbrieures au franqais; ainsi Kilanko, s'adres- sant aux maitres de son fils, utilise ce qu'on designait sous le nom de (( francais petit-negre,,, faute de voir sa propre langue traduite ou comprise par les autres... (( alors, Messi6, je vous dis m ci...

, ! (p. 190)

En sixibme lieu, il y a, sur le plan de I'analyse des caracteres des 616ments peu clairs ou inconciliables que ne peut manquer de remarquer un enfant de 10 ' 14 ans; par exemple, I'auteur nous d&crit Kilanko comme un homme bon, 6quilibr6, juste dans sa famille et dans son travail, ceci dans un premier temps; mais un peu plus loin, il caractbrise ainsi son attitude A l'6gard des travailleurs qu'il emploie dans ses plantations: Le groupe de travail-

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leurs, comme fatigu6 d'attendre A ne rien faire depuis pres d'une heure, s'6branla telle une colonne de forgats habitues a obedir sans bron-

cherf, (p. 170) (soulign6 par nous). Autre

exemple: BouraTma, le fils ain6 de Kilanko, qui nous apparait depuis le debut du recit comme un caractbre independant, fier, ombrageux meme, se transforme brusquement et se met au (( garde A vous)) devant l'instituteuir! (p. 147). Autre exemple encore: la facon dont Ajao parle d sa grand-mbre et A sa mere est tres 6tonnante, les enfants africains sont plut6t reserv6s sur le plan de l'expression de leurs sentiments; ainsi ces remarques d'Ajao A l'agard de sa mere (( sonnent faux ):

- (( Tu es tellement belle, maman, je suis sdir que tu n'es pas fichee contre moi. - C'est ca, petit charmeur de serpent; mais sois mignon: ne sort plus sans ma permission, sinon tu auras une fessee etje ne serai plus belle. - Oh ! si, tu es et seras toujours belle, maman.,, (p. 26)

D'une faqon g6n6rale donc, il nous semble que le premier but vise par 0. Bhely-Quenum, faire un roman qui interesse a la fois les enfants europeens et les enfants africains n'est pas atteint, peut-&tre pour avoir voulu trop bien faire. Son roman est plut6t un recueil d'explica- tions de textes, il manque de naturel, a part quelques descriptions minutieuses et justes; il en est ainsi de la description de la fabrication des paillasses par Nam Sidiki, du souci des gestes naturels et adequats: (( La sueur perlait 'a son cou et sur son visage, d6goulinait sur son ouvrage; mais de temps en temps elle la rejetait en passant un index A moiti6 recourb6 sur le

front...,, (p. 88). Nous pouvons retenir aussi comme 616ment positif la mise en place du pibge par Fachina, le pere de l'ami d'Ajao:

, Fa-

china posa ensuite un pied sur le ressort de l'engin et, avec ses mains, il en ouvrit les deux branches dentel6es, les aplatit en un cercle, les cala avec mille pr6cautions. II avait soulev6, d'un d61licat geste de l'index, un disque de fer qu'un m6canisme retenait en 6quilibre au milieu du cercle form6 par les deux branches.

,, (p. 177)

Enfin, il y a dans tout l'ouvrage une petite phrase que nous pourrions qualifier de progres- siste, parce qu'elle ne reflAte pas l'acceptation de ce qui est, dans cette pdriode coloniale, mais parce qu'elle pr6figure les problmes r6els qui se posaient dejA et qui se poseront de facon peut-

6tre plus aigue quelques ann6es plus tard: (Ajao) (( lisait les textes de morceaux choisis avec une attention soutenue, sollicitait les phrases des grands auteurs europ6ens group6s dans l'ou- vrage contre lequel il lui arrivait de protester, parce qu'il n'y voyait pas un seul auteur africain ( (p. 193) (soulign6 par nous).

Que dire maintenant du second but vise par I'auteur, c'est-a-dire faire un ouvrage utile sur le plan de la langue, du style et du vocabulaire? La premiere qualit6 d'un ouvrage de ce genre doit etre, nous semble-t-il, la simplicit6 et l'emploi

' propos du terme ad6quat, en un mot

la rigueur dans l'expression. Or, au contraire de ce qu'il faudrait faire pour atteindre le but poursuivi, l'auteur se laisse emporter et griser par les mots; donnons-en quelques exemples: (les bagarreurs) ((ressemblaient A des golems de boue arros6s de sang de volaille par quelque devin goujat et impudique n (p. 359); ou encore: (Ajao) (voyait dans la solidarit6 assez sponta- n6e qui les avait tous amen6s a participer a la genese de son rave, tout en y decelant l'utopie, une des forces de la pens6e cologique qui fait que l'homme ne parvient pas a se d6sint6resser absolument de son milieu ni de ce qui s'y passe, meme s'il ne l'avoue pas ) (p. 219).

Cette pr6tention a user d'un vocabulaire recherch6 conduit l'auteur A des exagbrations; qui croira cela de deux enfants qui viennent

d'6changer quelques coups de poing: ((Bou- raima et Assani, en moins de cinq minutes, A force de se marteler reciproquement les 1evres, comme si chacun eutt voulu interdire Ai son adversaire de l'injurier encore, 6taient devenues les plus lippus de tous les

enfants,, (p. 35,

soulign6 par nous). Dans ce meme ordre d'idees, que dire de

l'emploi de mots (et nous n'en citons que quelques-uns) comme ( ichtyophage ,,, ( hippo- phage n (p. 191),

, tintinnabulements

, (p. 214),

les ,(d6pouilles

ophidiennes)) (p. 179). N'ou- blions pas que l'ouvrage est cens6 s'adresser a des jeunes gens de 10 A 14 ans; quelle peut tre pour eux l'utilit6 de cet 6talage savant comme a les longs seins de Venus de

Vestonice,, (en

parlant de Nam Sidiki, p. 88)? Cet usage d'un vocabulaire peu usit6 conduit aussi l'auteur a des erreurs ou A des imprecisions; il en est ainsi du mot

, st~atopyge , qui, en termes d'anthro-

pologue, d~signe un d~veloppement particulier de la region fessibre, manifeste surtout chez les femmes bantous en Afrique; I'auteur au con-

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LIVRES / BOOKS 541

traire l'attribue A la plupart des femmes africai- nes (p. 13), et qui plus est, la definition qui en est donn6e est: A ' la taille fortement cambree ,,. Nous pourrions en dire autant de l'emploi du mot (endogame ) qui, normalement, s'applique A des relations de parent6 et plus particulibre- ment au mariage A l'interieur du groupe, et qui signifie chez l'auteur (( rester dans son village )) (p. 237)!

O. Bhely-Quenum tombe d'ailleurs d'un extreme A l'autre. En effet, A l'usage probable- ment des lecteurs africains, il essaie d'employer de temps en temps des tournures tres populaires en France meme, des expressions quelque peu argotiques; cela ne serait rien si, pour le lecteur, la distinction 6tait clairement 6tablie entre ce qui se dit et ce qui s'6crit; or, il n'en est rien, et pourtant, une simple enquete aurait permis A l'auteur de constater que certains mots, qui se veulent courants en francais, ne sont pas employes dans les pays d'Afrique ofi le

francais est encore langue officielle et d'ensei- gnement. Prenons le cas du verbe

, barboter,, (p. 32) pris au sens familier de ( voler,,, de l'expression a avoir des atomes crochus

, (p. 72),

de ( bticher ferme,, propre au langage 6tudiant (p. 193); nous trouvons encore (p. 235): a Vous n' tes pas marrant de porter ainsi des tignas- ses,, ! qu'est-ce de la part de l'auteur, si ce n'est encore une fois la volont6 de J faire vrai ,,, mais cette fois au d6triment de la qualit6 litteraire dont se r6clame pourtant l'ouvrage.

Sur ce plan, il nous semble intiressant de souligner aussi la vanit6 de la traduction de certains termes africains, ceux en particulier relatifs A la cuisine, aux vetements, surtout quand, pour des raisons historiques et sociolo- giques ais6ment comprehensibles, ils n'ont pas leur exact 6quivalent en francais (une courte note peut expliquer en bas de page et simple- ment leur signification dans le contexte d'une civilisation diff6rente); par exemple, on n'6- prouve pas le besoin quand on 6crit A propos du vetement japonais de traduire le terme (( kimo- no ), quel besoin a donc l'auteur d'employer A la place du mot a bouba

,, d6signant un v&tement

tres r6pandu dans la plupart des pays africains, le mot franqais ((blouson,, qui a rapport 'A quelque chose de tout A fait diff6rent !

En ce qui concerne le style proprement dit, des d~fauts similaires se manifestent; en vou- lant donner A son style des accents lyriques, peut-&tre pour rendre les images ( plus vraies ,

l'auteur use de tournures pr6tentieuses: (( La joie, d6bordant soudain de ses yeux grands ouverts, coulait sur tout son corps; des que son pere eut r6pondu affirmativement A sa question, Ajao sentit sourdre en lui une agr6able sensa- tion montant progressivement de la plante de ses pieds; rapidement il y eut du trop-plein, mais une autre force en lui r6sistait au flux qui commenqait de filtrer de tous ses pores avant de jaillir de ses yeux !

, Les cliches abondent, tels

( la colere biblique,, (p. 246), le ((silence #de mort,, (p. I 14), lI'hyperbole des propos

, (p. 158),

les a(chevres aux yeux pervers,,

(p. 45); les impropri6t6s aussi; on ne dit pas ((un silence impertubable

, (p. 46), a s''poumonner,, pour

s'6puiser (p. 45), ( l'heure aurorale,, (p. 42), etc. En matibre de conclusion, nous pensons

qu'O. Bhely-Quenum n'a atteint aucun des buts qu'il s'6tait fixes dans sa Pr6face: son livre n'est pas un roman, en tout cas il n'est pas assez passionnant pour captiver des jeunes gens de 10 A 14 ans; son livre n'est pas un recueil d'expli- cations de textes utilisables, du fait de la faible qualit6 de son style, de la pretention de son vocabulaire. Disons, en passant, que, s'il s'agit d'explications de textes, nous ne voyons pas l'interet des questions pos6es par deux collabo- rateurs europeens de l'auteur, questions tres simples que n'importe quel maitre peut, pour une analyse superficielle du texte, aisement formuler. 11 nous semble enfin que le reproche majeur que nous pouvons retenir A l'encontre de ce livre, c'est l'ali6nation dont il fait preuve, ali6nation en particulier A l'agard du colonia- lisme. Quelle peut &re la r6action d'un jeune Africain, et meme d'un jeune Europ6en qui lit ce qui suit, et qui, plus est, sortant de la bouche d'un Africain qui nous est presente comme progressiste pour l'poque (p. 207): ( Croyez-en un grand frbre: l'enseignement des Blancs permet, A nous autres Africains qui le recevons, de voir plus clair dans nos propres traditions, d'expliquer nos cultures et notre personnalit6 au monde des Blancs d6sireux de les connaltre. L'enseignement des Blancs, s'il ne peut pas nous rendre ndcessairement igaux aux Blancs eux-mimes parce que nous n'avons ni les forces ni les moyens techniques sans lesquels l'homme n'est rien, nous permet, tout au moins, de nous adresser i eux dans leur propre langue B (souli- gn6 par nous). Comment accepter que soit dncrit, A l'heure actuelle, A des enfants pour qui ce doit etre une legon et non un fait banal, un

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542 REVUE CANADIENNE DES MTUDES AFRICAINES

colonialisme liber6 de toutes critiques, qui fait parler les Africains comme certains tenants de ce colonialisme aimaient qu'ils parlent! Ce faisant, 0. Bhely-Quenum assume une lourde responsabilite, qui est de masquer les aspects negatifs de cette longue nuit historique, de

presenter la vie de ses heros vivant ia cette

plriode comme paisible, idyllique mme.

Nicole MEDJIGBODO

Department of Modern Languages, University of Ibadan (Nigeria)

Mark W. DELANCEY and Virginia H. DELANCEY, A Bibliography of Came- roon, African Bibliography Series, no 4, New York et Londres, Africana Publis-

hing Company, 1975, 673p., [24-50].

Cette 6norme bibliographie classe en vingt categories allant de l'agriculture ia la zoologie en passant par la sociologie, l'6ducation, la linguistique et la religion, un total de 6041 titres d'ouvrages, d'articles, de brochures, de documents et d'enregistrements sur le Came- roun.

La periode couverte s'6tale de 1884 'i 1972, le releve pour 1972 et une partie de 1973 ne pr'tendent pas ' l'exhaustivit6. Les deux au- teurs se sont consacres depuis 1967 'i cette tache ingrate, mais combien utile de reperage, de verification et d'analyse des documents cites. Une breve description du contenu d'une ou deux lignes suit, en effet, la reference de chaque livre ou article important. Mention est faite, quand c'est le cas, des recensions dejfi parues de lIeuvre citee.

C'est dans 98 ouvrages a caractere bibliogra- phique et dans 31 revues camerounaises ou afri- caines que les auteurs ont puis6 leur informa- tion. Cette consultation s'est faite dans des dep6ts, bibliotheques, universites ou centres anglophones, ambricains ou anglais, ce qui explique peut-etre une plus forte proportion d'erreurs ou d'omissions dans le cas des referen- ces franqaises, pourtant les plus nombreuses. Les titres anglais et allemands viennent ensuite en proportion presque egale. S'y ajoutent quel- ques rares references en d'autres langues, telles le russe.

Trois index facilitent l'utilisation de cette bibliographie. Le premier repartit les ref6rences en fonction de criteres ethniques, linguistiques et geographiques. Le second les classe par auteur et nom propre. Le dernier, et non le moindre, les regroupe par sujet, ajoutant ainsi a la classification gen6rale de l'ouvrage en vingt grandes categories.

Le defaut principal de presentation de cette bibliographie pour un lecteur francophone, c'est le recours, pour les ref6rences francaises, 'a la tradition anglaise qui impose des majuscules a tous les mots principaux d'un titre. S'y ajoute l'effet visuel desagreable qui resulte de la surimposition des accents (francais) a un texte dactylographi6 sur clavigraphe anglais et repro- duit pour l'6dition par proced6 photographique, ce qui a pour effet d'exagerer le contraste entre la frappe et les accents. II arrive d'ailleurs souvent que les accents se deplacent, sautent ou s'inversent et que les accords d'adjectifs avec leur nom ou de verbes avec leur sujet soient fautifs.

Ces vetilles, qui temoignent de la difficult6 du multilinguisme mme '

propos d'un pays officiellement bilingue comme le Cameroun, n'enlevent pas sa valeur intrinseque i l'ouvrage et ne diminuent en rien le merite des auteurs, qui ont fait oeuvre de pionniers et qui admettent la perfectibilit6 de leur entreprise.

C'est une bibliographie qu'il faudra comple- ter de quelques titres manquants (v.g. Yves Marguerat, Dominique Noye) et periodique- ment remettre ia jour dans le futur. Tel quel, c'est dejai un precieux instrument de travail pour les Camerounais et tous les specialistes du Cameroun. Souhaitons qu'en plus du Sierra Leone (African Bibliography Series, no 1) et du Cameroun d'autres pays africains fassent l'ob- jet d'une telle entreprise.

Renaud SANTERRE

Departement d'anthropologie, Universite Laval

A. DE Vos, Africa, The Devastated Continent? Dr. W. Junk b.v. Publis- hers, The Hague, 1975, 236p. (Mono- graphiae biologicae, 26).

11 y a plus de trente ans, J. P. Harroy, dans son livre Afrique, Terre qui meurt, posait dejai la question.

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