«Écrire un livre sur l’islam est devenu cesderniers temps […] une figure imposée», ditson préfacier Rémi Brague, qui salue cepen-dant l’originalité de l’ouvrage :« le présent livre quitte le terrainde l’analyse politique d’un paysconcret pour envisager de frontce qui constitue le cœur […] dela culture, à savoir le rapport àl’absolu». Il est dédié, dit sonauteur, à « tous ceux qui veulenten parler mais ne le connaissentpas encore». (Éditions Artège)

D’où la visée pédagogique del’ouvrage : ni traité savant ni essai théolo-gique, moins encore pamphlet polémique, ilse propose d’offrir des réponses claires aux in-terrogations suscitées par l’islam. Il rassemblepour cela les «Petites feuilles vertes» éditéespar l’association Clarifier*, fondée par AnnieLaurent, qui a su regrouper autour d’elle éru-dits et curieux.

L’islam tel qu’en lui-mêmeOn reproche souvent aux critiques de l’is-

lam le «péché d’essentialisme», c’est-à-direla quête au-delà des différences multiples,de ce qui constitué le cœur, l’essence de l’is-lam. Malgré l’excessive modestie du sous-

titre, le lecteur saura tous de ces différences,qu’il s’agisse des dissidences du chiisme,kharijisme, alaouitisme, druzisme, ou des

écoles juridiques, école hané-fite, école malékite, école cha-féite, école hanbalite. Mais cequi compte d’abord, c’est le sta-tut du Livre, le rapport à l’Ab-solu, le rôle du fondateur, lavisée idéologique. C’est celaque développe Annie Laurent,avec toujours en tête, de façonexplicite ou non, la comparai-son avec le christianisme et lesouci de mettre en œuvre le mot

de saint Paul qui est la devise de Clarifier :« La charité met sa joie dans la vérité».

Le statut spécifique du Coran, c’est que, aucontraire de l’Écriture sainte, il n’est pas ins-piré, mais incréé, copie conforme d’un origi-nal conservé auprès d’Allah de toute éternité.D’où la difficulté de l’exégèse et l’audace –non suivie d’effet – du maréchal Sissi,confiant à l’université El Azhar le soin de ré-viser adéquatement l’interprétation des textessacrés de l’islam.

Quand les textes se contredisent, les pas-sages les plus anciens du Coran, ceux deLa Mecque, plus conciliants parce que Maho-

t nous - l’Islam et nous - l’Islam et nous - l’Islam et nous - l’Islam et nous - l’Islam et nous - l’Islam et nous - E n c y c l o p é d i e d e l ’ h o n n ê t e h omm e

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Un livre éclairant sur l’islam

L’islam ne veut pas le pouvoir apparent,mais le pouvoir réel… qui en islam est religieux.

*Association Clarifier => http://associationclarifier.fr

met n’y était pas en position de force, sontabrogés par les sourates plus récentes, plusviolentes parce que Mahomet s’y imposaitcomme chef temporel, sans que les textes«abrogés» soient retirés du Coran. C’est ainsique Bourguiba abolit la polygamie en accordavec le Coran qui ne la préconise que lorsqueles hommes respectent les conditions d’équitéentre épouses, et c’est ainsi que Khomeinyfixa l’âge légal du mariage de la femme à neufans, à cause de l’exemple de Mahomet, « lebeau modèle».

«L’islam religion d’amour et de paix», man-tra qui nourrit la religion du Pas d’amalgame,ne résiste pas au texte : les mots « tuer» et«combattre» sont employés respectivementsoixante-douze et cinquante et une fois dansle Coran, dont dix et douze fois à l’impératif.Si bien que la violence des djihadistes n’estpas transgressive, mais doctrinale, le « trocentre Allah et l’homme» « signifiant que parla mort donnée et reçue, « le djihadiste a lacertitude de gagner la récompense suprême»,le paradis des soixante-douze vierges pro-mises.

Annie Laurent souligne que le rapport àAllah est un rapport de maître à esclave, Dieudéterminant lui-même le bien et le mal, le li-cite et l’illicite, sans médiation de la loi natu-relle, que les hommes, participant à la sagessedivine, seraient aptes à connaître. L’auteur selivre à une très intéressante analyse du mot«Ar-Rahman», traduit par « le Miséricor-dieux», qui ouvre presque toutes les souratesdu Coran. Mais la volonté d’Allah est inscru-table et arbitraire, sa miséricorde est à usageinterne. «Mahomet est le prophète de Dieu.Ses compagnons sont violents envers les im-pies, bons et compatissants entre eux». Le

pardon d’Allah est conditionnel. Jésus necondamne pas la femme adultère, et lui de-mande de ne plus pécher, Allah exige de lalapider, et ne distingue pas entre le pécheuret le péché.

Un islam européen?

L’islam est accessoirement une religion,essentiellement une idéologie conquéranteet totalitaire, puisque la loi de Dieu s’yconfond totalement avec la loi civile, et quel’« islam européen» signifie la conquête géo-graphique de l’Europe et l’anéantissementde sa civilisation.

Annie Laurent analyse avec pertinencel’instrumentalisation du vocabulaire et deslois européens. Tarek Oubrou, maire de Bor-deaux et praticien de la taqiya, prêche un«canonisme mobile», c’est-à-dire une miseen veilleuse relative de la charia, en attendantdes temps plus favorables. Tariq Ramadan dé-tourne les mots « réformisme» et « témoi-gnage», en appliquant le premier à« l’islamisation de la modernité», et le secondà la promotion d’une société régie par lestextes sacrés de l’islam. Hani Ramadan justifiela polygamie, et Gilles Kepel remarque que,pour les musulmans, la loi Taubira est lapreuve que le droit matrimonial français n’estpas intangible.

Les Européens ne comprennent pas, ou fei-gnent de ne pas comprendre les visées de l’is-lam. Aussi Annie Laurent cite-t-elleabondamment les chrétiens d’Orient, et sur-tout leur hiérarchie religieuse, pour démysti-fier l’islam rêvé ou souhaité par lesOccidentaux. Mgr Emil Nona déclare : «Nossouffrances d’aujourd’hui sont un prélude auxvôtres». Mgr Issam Darwich incite à « lutter

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contre Daech, conjointement avec le gouver-nement syrien», le Père Pierre Madros appelleà rechristianiser l’Europe pour ne pas laisser« s’infiltrer le prêche du djihad», le patriarchedes Syriaques catholiques s’exclame : « Lesloups sont dans le bercail ! Réveille-toi, Francebien aimée!»

Un véritable vadémécum

Clair, précis, exhaustif, l’ouvrage d’AnnieLaurent ne relève pas de la vulgarisation,mais c’est un véritable vadémécum pourceux qui veulent connaître l’islam. Son or-donnancement thématique permet de ciblertoutes les spécificités de l’islam, et en tousdomaines, depuis l’islam idéologique jusqu’àla condition de la femme et à la famille. Neserait-ce que pour cela, il faut lire et large-ment offrir ce livre.

Saluons aussi son souci de proposer dessolutions, et d’aller les chercher partout oùs’amorce un sursaut. Ainsi est-elle attentiveaux réactions nouvelles d’intellectuels musul-mans, qui veulent « s’affranchir des clôturesdogmatiques» (Ghaleb Bencheik), ou voientdans le djihadisme «une maladie de l’islamlui-même (Abdelwahab Meddeb)».

En outre, elle propose des éléments de ré-flexion et d’action pour défendre les chrétiensd’Orient et sauver l’Occident de lui-même :souligner la vocation et l’apport des chrétiensen Orient, refuser le projet d’entités politiquesfondées sur le confessionnalisme chrétien, etpour l’Occident exiger la réciprocité, s’oppo-ser aux diplomaties à géométrie variable, re-prendre le chemin de son histoire. Sansoublier les solutions au drame israélo-pales-tinien. Vœu pieux peut-être puisque l’auteurn’exerce pas de fonction politique, mais elle

a le mérite de suggérer des pistes pour qued’autres prennent le relais.

Aimer les musulmans

Sa conclusion : aimer les musulmans, peutsembler naïve au laïc occidental, mais l’au-teur écrit délibérément dans une perspectivechrétienne. Annie Laurent prend au sérieuxl’injonction du Christ «Aimez vos ennemis, etpriez pour vos persécuteurs». « Le Dieu duCoran, disait Jean-Paul II, est seulement Ma-jesté et jamais Emmanuel, Dieu avec nous».L’amour est pour lui soumission et non adhé-sion libre.

Le chrétien doit à la fois porter un regardlucide sur l’islam, donner au musulman l’en-vie d’aimer son pays d’accueil, en valorisantle patrimoine chrétien, et estimer assez lesmusulmans pour les croire dignes d’uneconversion – «avoir le souci de leur salut éter-nel […] ils ont le droit de connaître Dieu envérité».

Ainsi ce précis de connaissance islamiques’achève-t-il non pas sur une note d’opti-misme, mais par un pari sur l’espérance, parle biais d’un chrétien oriental, le Père MichelBarakat, ancien vicaire général du diocèsemelkite de Baalbek : « Il faut aimer les musul-mans tels qu’ils sont, sans pour autant aimerl’erreur qu’est l’islam. Il importe que notre té-moignage soit un témoignage véridique […]D’ailleurs bien des musulmans nous deman-dent d’être de bons chrétiens […] Car la cha-rité, comme dit saint Paul, met sa joie dans lavérité» : la devise même de Clarifier.

Danièle Masson

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