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Une analyse d'un discours politique Author(s): Muriel Collin-Platini Source: La Linguistique, Vol. 14, Fasc. 1 (1978), pp. 29-54 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/30248341 . Accessed: 15/06/2014 09:01 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to La Linguistique. http://www.jstor.org This content downloaded from 62.122.73.177 on Sun, 15 Jun 2014 09:01:59 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Une analyse d'un discours politique

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Une analyse d'un discours politiqueAuthor(s): Muriel Collin-PlatiniSource: La Linguistique, Vol. 14, Fasc. 1 (1978), pp. 29-54Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/30248341 .

Accessed: 15/06/2014 09:01

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UNE ANALYSE D'UN DISCOURS POLITIQUE

Muriel COLLIN-PLATINI

Dans le cadre de cette 6tude', nous nous proposons de tester certaines proc6dures linguistiques, d'en v6rifier les possibilites d'emploi, pour rechercher des methodes d'analyse applicables A diff6rents types de discours. Le corpus est constitue par les allo- cutions radiodiffusdes et t6l6visees prononc6es par de Gaulle, de septembre I962 a avril I969. Nous envisageons une analyse strictement linguistique du discours, une 6tude interne, sans

comparaison avec d'autres textes ni r6f6rence a la realit6 extra-

linguistique. Analyser un discours c'est rendre manifestes les proc6d6s lin-

guistiques qui ne le sont que par rapprochement d'un certain nombre d'6nonc6s; c'est transformer en assertions explicites ce qui est implicite dans le discours. Sans recourir aux transformations ni aux r6ductions qui desarticulent le texte, cette etude, essen- tiellement mais pas uniquement lexicale, est faite A partir de mots

pivots' dont les distributions sont relev6es. Le discours 6tant avant tout un 6change entre ses participants, c'est en raison non pas du seul contenu mais de la pragmatique, c'est-a-dire du fonctionne-

i. Une analyse linguistique des discours de de Gaulle, these de 3e cycle, Paris V, juin 1976. Tableau des allocutions radiodiffus'es et t6lvisees constituant le corpus :

1962 20o sept. 1 964 3V dcc. II 1967 4 mars 21 4 oct. 2 1965 27 avr. 12 1o aouit 22

18 oct. 3 4 nov. 13 31 d'c. 23 26 oct. 4 30 nov. 14 1968 24 mai 24 7 nov. 5 3 dic. 15 30 mai 25

31 d&c. 6 11 dic. i6 29 juin 26 1963 19 avr. 7 r7 d6c. 17 24 nov. 27

31 dIc. 8 31 dce. 18 31 d6c. 28 1964 16 avr. 9 I966 3I dec. Ig 1969 1I mars 29

2 aofit [o 1967 9 fivr. 2o 25 avr. 3o 2. Ce sont des unitds pr6alablement d6termin6es autour desquelles l'analyste consi-

d&re que se constitue une des lectures du discours.

La Linguistique, vol. 14, fast. 1/1978

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30 M. Collin-Platini

ment, de l'orientation du message vers autrui et de son action sur le destinataire que ces allocutions ont 6te itudi"es. Aussi le plan suivi reprend-il les composantes - soulignees ci-dessous - du circuit de la communication tel que l'a pr6senti Jakobson : << Le destinateur envoie un message au destinataire. Pour Wtre operant le message requiert d'abord un contexte auquel il renvoie (c'est ce qu'on appelle aussi le << r6f6rent >>), contexte saisissable par le destinataire, et qui est, soit verbal, soit susceptible d'etre verbalisd; ensuite le message requiert un code, commun en tout ou au moins en partie au destinataire (ou, en d'autres termes, A l'encodeur et au d6codeur du message); enfin le message requiert un contact, canal physique et une connexion psychologique entre le destina- teur et le destinataire, contact qui permet d'6tablir et de maintenir la communication >>.

Cette etude s'articule done sur trois questions dont on tente de definir le sens linguistique : Qui parle B qui ? De quoi ? Comment ? Le but est d'identifier l'image du locuteur et du destinataire tels qu'ils sont presentis dans les textes; de cerner les relations entre les partenaires du message, entre ceux-ci et le contenu. Le but est aussi d'6tudier l'objet du discours et la manitre dont le locuteur le presente; et ce, tout en respectant l'interdependance de ces composantes du discours puisque le sens n'est pas dans I'une d'elles mais dans l'ensemble du circuit de la communication. L'objectif ultime, puisqu'il s'agit d'une analyse non comparative, est de caracttriser le corpus pris globalement ou telle de ses parties. Seront done mis en valeur, d'une part les caract&res communs A I'ensemble du corpus, d'autre part les caracteres propres A chaque discours - ou a un type de discours - et les variations dues au

temps ou A d'autres facteurs.

I - QUI PARLE A QUI ? LE LOCUTEUR ET LE DESTINATAIRE

Dans tout discours apparait la relation constante entre le je du locuteur et le tu du destinataire. On tentera ici de definir ces deux partenaires du discours, sachant en outre, comme l'"crit Benveniste4, que < dans les deux premieres personnes, il y a a la

3. Roman JAKOBSON, Essais de linguistique ginirale, Paris, Ed. de Minuit, p. 213. 4. Emile BENVENISTE, Problines de linguistique gkinrale, Paris, Gallimard, x966, chap. 7,

p. 223 '

285.

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Analyse d'un discours politique 31

fois une personne impliquie et un discours sur cette personne. Je designe celui qui parle et implique en mime temps un 6nonce sur le compte de je : disant je, je ne puis ne pas parler de moi. A la deuxieme personne, tu est necessairement design6 parje et ne peut etre pens6 hors d'une situation posie par je; en meme temps je Snonce quelque chose comme predicat de tu >. Partant de ces considerations de Benveniste sur l'homme dans le langage, I'analyse tentera de mettre en dvidence la realite extra-textuelle A laquelle les pronoms des deux premibres personnes renvoient, de definir A qui se substitue le vous auquel le locuteur s'adresse, leje qui parle.

En dehors de ces deux personnes, un autre pronom joue un

r1le important dans le discours, c'est le nous qui est << non pas une

multiplication d'objets identiques mais une jonction entre le je et le non-je >>5. Le franqais n'ayant pas de morph6mes diff6rents

pour les pronoms inclusifs et exclusifs, ii s'agit de priciser quel est le

rif6r~ du nous. Pour la clart6 de I'expos6, on peut dire d&s mainte-

nant, et A de rares exceptions, que le nous de ces allocutions est constitue par la jonction entre le je et le vous qui a pour rtf'6r6 les 6lecteurs de de Gaulle.

Mithode pratique

Pour d6finir les deux partenaires de ce message, on a relev6 les distributions des pronoms personnels, des modalites personnelles nominales correspondantes et de leurs substituts, et ainsi &tabli ce

queje, vous, nous <<font>>, <<sont >>, et <<ont >>. La premikre 6tape de cette analyse, centree sur la forme et non

sur les combinaisons, est corrigee par l'&tude des relations des

participants entre eux et la recherche de leurs substituts qui font intervenir la syntaxe.

I. Presence du locuteur et du destinataire selon les discours

Le pronom nous et les modalitis nominales correspondantes6 apparaissent plus frequemment queje et vous : 2,7 fois plus queje,

5. ID.,ibid. 6. Pour simplifier l'6criture, nous avons regroup6 sous le signeje toutes les formes de

la premibre personne : pronoms et modalit6s nominales. Il en est de mcme pour vous et nous, sauf quand il est pr6cis6 qu'il ne s'agit que du pronom; il faut lire le signeje comme pronoms et modalitts renvoyant au locuteur, vous au destinataire.

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32 AlM. Collin-Platini

6,1 fois plus que vous, et representent les deux tiers de l'ensembleje, vous, nous. Le plus souvent, l'absence, la presence, le peu d'emploi du je sont accompagnes du meme mouvement pour le vous, sauf le 30 mai 1968. Quand je et vous presentent un nombre d'occur- rences superieur ou igal A leur moyenne d'emploi, le nous decroit, comme le met en relief le graphique suivant.

Friquence moyenne par annie des pronoms et modalitis personnelles nominales

28- '4 I

C..

o

"24-

t I

16

'I '

12

4- ^ / Nous ! II

II

\\ y-

t$ \ /"' -J

8 I I I ,/ ,

l

u

p

t o

1960163 1946I 1 19

1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969

Ces deux dernitres constatations ont conduit 'a faire la somme des emplois de je et de vous pour la comparer au nombre de nous dans un meme discours. Ce calcul met davantage en evidence la

repartition des allocutions selon la pr6ponderance d'emploi de telle personne, c'est-A-dire selon que la somme des occurrences de

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je et de nous est infirieure ou superieure a celles de nous; nous notons igalement si la fr6quence du nous est supdrieure ou inf&- rieure A sa moyenne par discours de 28. En effet, dans les trois discours 15, 21 et 29 oh je + vous est inferieur & nous, et le nous infrrieur a sa moyenne, le cumulje + vous est dj

. "lev6 et compte

19, 13 et 16 emplois, ce qui represente la moyenne ou plus de la somme je + vous qui est de 14,5. Ces trois discours sont done ranges avec ceux qui comptent plus de je et de vous que de nous.

Discours oh je + vous est Discours ouh je + vous est sup6rieur A nous inf6rieur A nous

I : 20-09-62 i6 : 1-12-65 6 : 31-12-62 18: 31-12-65 2 : 04-1o-62 17 : 17-12-65 7 : 19-04-63 19 31-12-66 3 :

18-Io-62 20 : 09-02-67 8 : 31-12-63 22 : 10-08-67 4 : 26-1o-62 21 :04-03-67 9 : 16-04-64 23 : 31-12-67 5 : 07-II1-62 24 : 24-05-68 10 : o02-o8-64 26 : 29-06-68

13 : 04-11-65 25 : 30-05-68 ii : 31-12-64 27 : 24-11-68 14 : 30-11-65 29 : 11-03-69 12 : 27-04-65 28 : 31-12-68 15 : 03-12-65 30 : 25-04-69

- Les sept discours de fin d'ann6e ont une fr6quence d'emploi de nous superieure a je + vous.

- Les discours 7, 9 et Io ont e6t prononces une ann6e sans elections : 1963 et 1964.

- Le discours 12 a td6 prononced une date 6loign6e des

6lections de 1965. De mame, les discours 22 et 27 se placent apris une consultation 6lectorale.

En consid6rant les dates de ces allocutions, cette r6partition selon la pr6pond6rance du couple je-vous ou du nous trouve sa

pleine justification. Les discours 61ectoraux impliquent un appel du locuteur (ie) A l'allocut6 (vous), alors que les discours non

dlectoraux - oh de Gaulle n'a plus A interpeller mais a constater

(fonction essentielle des allocutions de fin d'ann6e), ce qui a ete accompli par l'ensemble des Frangais auxquels il s'associe - font

apparaitre le nous inclusif : je + vous.

2. Pronoms en relation avec le temps des verbes

Les r6sultats pr6sent's ci-dessous portent sur neuf discours. Faute d'une th6orie prtcise sur les temps, ce relev6 ne fait r6f6rence

LL - 2

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Temps

20 septembre 1962 Present Passe Futur

Total

4 octobre 1962 Pr6sent Passe Futur

Total

r8 octobre 1962 Pr6sent Passe Futur

Total

26 octobre I962 Pr6sent Pass6 Futur

Total

4 octobre I965

3o novembre r965

3 dicembre 1965 Pr6sent Pass6 Futur

Total

30 mai I968 Pr&ent Passe Futur

Total

25 avril 1969 Pr6sent Passe Futur

Total

Pronoms

Je Vous Nous

O 0 0 (4P- 0E-40 ~ *V ,o 0 , 5 0

Pf: co H I /H P c

6 2 8 2 I 3 I 2 3 5 i 6 0 1 1 1 o o o 3 3

12 3 14 2 1 3 I 6 7

3 7 1o o I 2 3 I 3 4 o 2 2

I I O O

4 11 15 o I 4 5

5 6 1I i I o I 2 3 I I 0

o 2 2 0

6 8 14 0 4 4 0 0 0

5 2 7 2 4 6 o o o 2 2 o 2 3 5 0

5 2 7 4 7 II o 2 2

9 I o10 2 3 5 3 3 6 5 x 6 2 I 3 I 6 7 0 I I 4 I 5 I o I

14 3 7 8 5 13 5 8 14

4 o 4 o o 3 o 3 o o 3 0 3 o o

10 o 10 0 0 0 0 0 0

0 2 2 I o I o 3 3 0 2 2 0 0 0 0 I I

5 o 5 I I 2 O I I

5 4 9 2 I 3 o 5 5

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Analyse d'un discours politique 35

qu'aux present, pass6 et futur, sans tenir compte des valeurs

specifiques de chaque temps. Parallblement aux temps est pr"cisde la place des pronoms dans la phrase : en proposition rdgissante ou en proposition rigie, pour v6rifier si la relation sujet-objet & l'in-

tdrieur d'une proposition ne trouve pas son correspondant dans la relation &tablie par la subordination, quand l'un des pronoms est dans la principale, l'autre dans la subordonnie. Nous avons en effet observ6 que, dans le couple des deux premikres personnes, je est le plus souvent sujet, et vous objet.

Pour porter sur un plus grand nombre de pronoms, ont 6td additionn6s les resultats des trois discours de I965, prononcds dans un meme contexte : le premier tour des dlections (cf. tableau page prec'dente).

- Leje se trouve plus souvent en principale qu'en subordonnie dans les discours o0, inversement, le vous se rencontre en subor- donnee, cela tend A verifier l'hypoth~se fournie par l'analyse de la fonction des pronoms, je et vous ddpendant d'un m~me verbe.

- Le je se trouve plus souvent au prdsent qu'aux autres

temps. Ces deux premieres remarques conduisent done A verifier si je

n'est pas le plus souvent sujet de verbes performatifs. L'index

intituld << Ce queje fait x> y aidera7. - Le nous se rdpartit presque 6galement entre les trois temps;

il semblerait fructueux de rapprocher le temps, les personnes et le moment du discours. Si l'on relit trls rapidement la partie cen- trale, oh se situe le nous dans le discours du 3 d6cembre 1965, on trouve : << ... ou en 6tions-nous ? b> (pass6); << ... oh allons-nous ? >>

(present); << ... nous sommes en train de... >> (present dit << imm6-

diat )>); << ... nous avons A accomplir... >> (futur). Un paralltle pourrait s'&tablir entre la place des pronoms

- tant A l'interieur de la phrase que du discours -, le temps des verbes et la complexit6 des phrases, pour classer les allocutions et

analyser la structure de chacune d'elles, qui n'est pas aussi simple que la division en trois parties choisie pour une premiere approche de la question.

7. 11 n'est pas possible, dans le cadre de cet article, de reproduire les index rendant compte de ce queje, vous et nous < sont >, <o font ) et << ont >, dont les unitds sont ordonnoes selon un ordre de fr6quence ddcroissant et un ordre alphab6tique. Les paragraphes suivants sont dlaborts a partir de ces index que P'on peut consulter dans la thhse des p. 46 & 61.

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36 M. Collin-Platini

L'emploi ou l'absence du futur peut aussi faire l'objet d'une remarque qui renvoie & une rdalit6 extra-linguistiquel. La compa- raison des resultats des trois discours de 1965 fait apparaitre que l'existence du je et du nous dans le futur depend du vous dans ce meme futur, c'est-A-dire du choix de vous lors des elections du 5 d6cembre. Par contre, dans les allocutions du 30 mai I968 ou du 25 avril I969, la pr6sence du je dans le futur ne semble plus aussi subordonn6e aux autres personnes; dans la premikre, le vous et le nous sont absents; dans la seconde, ils apparaissent moins souvent que leje dans le futur. Aucune conclusion hative quant au contenu ne peut tre tirde de telles remarques, car d'autres 616- ments sont A envisager conjointement.

3. Les < substituts >> des pronoms

Il semble paradoxal de parler de < substituts >> de pronoms alors que couramment le pronom est dit substitut du nom. Cela se peut quand il s'agit du locuteur, disant je, et du destinataire, interpell6 A l'aide du vous : ces pronoms ne renvoient pas A une unit6 prec6demment signalee mais A une realit6 extra-textuelle dont nous recherchons le mode de verbalisation dans le discours.

La definition du substitut du pronom se fait par : - l'identification, grace aux verbes attributifs, en se reportant

aux index < Ce que je, vous, nous (sont) >>; grace aux appo- sitions A je, vous, nous;

- la substitution : un terme est substitut d'un pronom quand ils sont tous deux agents d'un verbe qui n'admet pas dans le corpus tel autre pronom dans cette meme fonction. Pour le v6rifier, on consulte simultan6ment les index des pronoms et ceux des 6quivalents de France - qui constituent le deuxirme point de cette itude - dans la mesure oti certains de ces derniers sont des substituts possibles des partenaires du mes- sage. Il faudrait dans une 6tude exhaustive relever les agents de chaque verbe du corpus;

- I'apostrophe : le locuteur nomme son destinataire vous; - le relev6 des termes qui poss6dent en commun avec l'une des

personnes - je, vous ou nous - un objet que l'autre n'a pas;

8. Nous faisons au niveau de l'apparition des signesje, vous et nous des remarques qu'il serait ais6 de replacer au niveau de ces m6mes r6f6rents.

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les index des substantifs qui suivent les modalitis personnelles nominales ou le verbe avoir - quand il n'est pas auxiliaire -

fournissent cette indication.

- Les substituts de vous : les cinq substituts de vous cites ici ne constituent evidemment pas un ensemble fini; mais ils sont identifis par deux - et souvent trois - procedds ci-dessus

6nonces; en outre, trois de ces substituts sont en meme temps - comme nous le verrons par la suite - destinataire et objet du discours. Ces cinq substituts sont d'une part : citoyens, Frangais, Frangaises; d'autre part : nation, pays et peuple qui ne substituent

que partiellement A vous et selon les contextes. - Les substituts de je : les plus directs et les plus frequents

sont : chef de l'Etat et president de la Republique, par l'intermidiaire desquels on trouve que je s'identifie egalement A t/te, guide, garant, clef de voatte. France et Etat se substituent partiellement A je. Enfin, se trouvent parmi les substituts de je quelques nous (ce pronom n'est pas seulement egal a je + vous, mais joue quand meme le

plus souvent ce rble), et quelques periphrases du type : < Le Frangais que vous estimez >>, <( L'homme mandati >, < Celui qui a l'honneur d'Atre le chef de l'Etat >, ( Celui qui a l'honneur de la (= Ripublique) presider >), Celui qui a l'honneur d'etre at sa tWte )>.

4. Relations des diferents pronoms ou de leurs substituts entre eux

- Je en position de sujet, vous en position d'objet : Les chiffres entre parentheses pricisent le nombre des occur-

rences quand il est supdrieur a I. La relation est marquee par les verbes : adresser (3), afirmer,

demander (4), dire (2), ivoquer, indiquer, montrer, offrir, parler (3), proposer, souhaiter, soumettre.

- Vous en position de sujet, je en position d'objet. La relation est marquee par les verbes : approuver, connaitre,

exprimer, prouver, repondre. Les verbes dontje et vous sont les sujets ou les objets appartien-

nent A des registres diff6rents. Je apparait plus souvent que vous en position de sujet. II est a noter que vous sujet est trois fois sur six en subordonnie regie par une principale dontje est sujet.

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38 M. Collin-Platini

5. Les personnes selon les moments du discours

A considerer les allocutions dans lesquelles nous avions sou- lign6 les pronoms je, vous, nous, et les modalitis nominales corres- pondantes, il est apparu que les personnes - principalementje et vous - se situaient A des moments pricis; trois temps semblaient se dessiner. Pour verifier cette hypothbse, chaque discours a ete decoup6 en trois parties de longueur 6gale. Les r6sultats ci-dessous restent une premiere approche, car tous les discours n'ont pas la meme structure, selon la situation dans laquelle ils ont 6t6 pro- nonces et selon leur but.

R6sultats portant sur l'ensemble des discours :

Premiere partie : goje, 37 vous (soit 127je + vous) contre 209 nous. Deuxitme partie : 61 je, 15 vous (soit 76 je + vous) contre 331 nous.

Troisibme partie : 128 je, 85 vous (soit 213 je + vous) contre 275 nous.

Si le nous et ses modalitis nominales se retrouvent A chaque moment du discours, je et vous sont surtout presents dans la premitre et la dernihre parties oh ils representent respectivement plus du tiers et presque la moitid de l'ensemble des pronoms et des modalites nominales de ces parties, alors qu'au centre du discours ils n'en representent pas le cinquibme. Les resultats sont diffdrents si l'on ne tient maintenant compte que des allocutions oui le coupleje-vous est present : la premiere partie compte 87 je, 37 vous (soit 124 je + vous) contre ioo nous. La deuxieme partie compte 60 je, 13 vous (soit 73 je + vous) contre 144 nous. La troisibme

partie compte I19 je, 77 vous (soit 176 je + vous) contre 85 nous. Ces derniers resultats obtenus A partir de 20o des 30 discours

du corpus mettent en evidence que les pronoms et modalites qui renvoient au locuteur et au destinataire sont principalement en ddbut et en fin de discours et le nous dans la partie centrale.

6. L'implicite dans le circuit Imetteur-ricepteur

D'une mani&re gdndrale, nous comprenons par implicite, quels que soient les diffdrents sens dans lesquels ce terme ait pu &tre acceptd, I'ensemble de tout ce qui doit etre dans le circuit de communication - et non pas dans l'esprit du locuteur - pour

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Analyse d'un discours politique 39

que le message passe. En tant que linguiste, nous limitons notre 6tude aux 6lements presents, par quelque trace, dans le discours, sans y &tre explicitement assert6s, pour mettre en evidence ( les formations imaginaires de A sur la place qu'il occupe et sur celle qu'occupe B x0, A et B dtant respectivement le locuteur et I'allo- cut6. Les implicites du circuit 6metteur-ricepteur sont les impli- cites de tout discours et la condition d'existence de l'acte de parole; il s'agit de la relation qui s'6tablit entre les images respectives qui sont donnies des partenaires d'un message dans le texte. Nous 6tudions comment elles se manifestent ici.

En regroupant les matiriaux dcjA exposes et en les complItant, I'analyse fera apparaitre, par rapprochement, les constantes du texte. De l'examen des index rendant compte de x ce queje, vous, nous sont, font et ont x>, il ressort en tout premier lieu que l'action deje se fait le plus souvent par la parole et que nous fait ce queje dit. L'index x Ce que je fait >> offre un grand nombre de verbes d&cla- ratifs, alors que dans l'index x Ce que nous fait >> apparaissent des verbes d'action comme < accomplir >, < rialiser >, x produire >>, < construire >>.

Que fait vous ? . Il prend des decisions >> en 0 rdpondant >> et en ( approuvant >> ce queje dit. Donc, ni nous, ni je agissent seuls, mais ensemble, sur l'instigation de je, avec l'approbation de vous; ce que verifient de telles siquences : sur ma proposition, ia mon ini- tiative, formulies dans des incises. En consid6rant les relations du locuteur et de 1'allocut6, il apparait que je interlocute vous qui r6pond ou rdpondra et l'on peut dire que les verbes ayantje et vous comme agents sont en distribution complkmentaire. Les verbes qui etablissent la relation - la plus frdquente - entreje agent et vous objet sont tous declaratifs et l'on peut meme ajouter perfor- matifs puisqu'ils sont au prisent, ce que corrobore l'Ftude partielle des pronoms en relation avec les temps oh le present est le plus souvent relev6 avecje agent. On a en outre signal6 queje, dont la frequence en principale est la plus forte, rejette en subordonn&e (ou regie) le vous quand il apparait comme agent.

Ainsi, a la double question que l'allocutd est en droit de poser au locuteur : < Pourquoi parlez-vous de cela ? >>, qui conditionne le circuit 6metteur-ricepteur, I'analyse du corpus permet de rdpondre : si le locuteur parle, c'est qu'il ditient le droit de faire

g. M. PxdcHEux, Analyse automatique du discours, Paris, Dunod, ig69, p. 19-20.

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4o M. Collin-Platini

de tels dnoncds; si le contenu est tel, c'est que I'allocut6 est censd avoir A y rdpondre.

Revenons A la premiere partie de la question - << Pourquoi >>. << Permettez-moi de vous le dire >>, lit-on dans une incise oratoire par laquelle le locuteur exprime son droit acquis de parler; c'est son mode d'action, comme le montre le frequent emploi des verbes performatifs. A regarder la relation de je et des equivalents de France (voir plus loin) qui constituent un des objets du discours, je est en fonction d'agent de verbes qui mettent en avant le r61e de responsable du locuteur, comme : x assumer >, assurer >>, << garantir le destin , < maintenir , << preserver >, < repondre de >. Les

propos de je sont done impliquis par la situation propre du locuteur vis-A-vis de l'objet du discours. La deuxikme reponse que fournit I'analyse du corpus A Pourquoi parlez-vous de cela ? > est derivie de l'attitude que le locuteur prete au destinataire vis-A-vis du contenu : mon contenu concerne l'allocutn; vous est concern6 par le message; le locuteur le prend meme A partie dans des incises du type : <<Vous le voyez >> (3 occurrences), x Vous le savez > (2 occurrences), sans compter les < ... moi, que vous connaissez... >>. Ce discours concerne le ricepteur puisqu'il y repond ou y repondra.

En dressant la liste des verbes en distribution compl6mentaire, c'est-A-dire des verbes qui admettent seulement I'un ou l'autre des

pronoms comme agents, on peut faire les constatations suivantes : - Les verbes communs A deux ou trois personnes sont peu

porteurs de sens en eux-memes comme les semi-auxiliaires ou le verbe faire qui se comporte le plus souvent comme substitut d'un autre verbe.

- Les verbes n'acceptant que vous comme agent appartiennent pour la plupart au champ semantique des elections, ce que prou- vent aussi les substantifs deverbatifs << reponse > (3), << reponses >> (i), < vote >> (2), 0 choix ) (i), qui n'apparaissent que d6termines par les modalit6s votre et vos.

- Sur les 81 verbes rdpertori6s dontje est le seul agent, 54 sont au pr6sent (y compris infinitifs et participes dependant de pr6- sents), 16 au pass6 compose, 6 au futur, 2 au conditionnel pr6sent, ce qui, avec d'autres remarques, a conduit A noter la prdpon- dirance des verbes performatifs; 28 sont construits avec une

compldtive, 9 avec un infinitif, 32 avec un compl6ment d'objet direct. Quand le compl6ment est un d6verbatif, on peut dire

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Analyse d'un discours politique 41

que le verbe est modalisateur d'un autre procs comme < adresser des vaeux > ou < adresser des appels >>; c'est le lexbme qui apporte l'information. Certains verbes comme < esperer >>, affirmer >>, << pridire >> qui peuvent Wtre suivis d'une completive ne le sont pas dans le corpus; ils sont en incises, precedes d'un pronom de rappel: <<je l'espbre >>, je l'afirme >>, <<je ne le pridis pas >>. Les verbes << dire >>, < parler o, ajouter , < souligner x> servent a exposer les propos. C'est ainsi que l'on trouve << parler >> au futur en debut de texte, au present en cours d'allocution, et au passe compos6 en conclu- sion. Les verbes assertifs << je crois , je suis sir , << je suis certain > sont au present. Enfin, si l'on effectue un classement simantique on note que sur 81 verbes 56 (dont 40 au prdsent) expriment une action qui se fait par la parole; en font partie les verbes qui ont la

plus forte frequence dans le corpus. Nous proposons donc le schema suivant pour r'sumer les relations entre les partenaires du message :

je peut encore parler je propose -* vous rdpond

nouIs peut agir

Nous sommes rest6 jusqu'ici au niveau du seul signe, sans consid6rer les rff6rents de je, vous et nous qui ne sont pas toujours uniques. Si les deux premiers relevent d'un systhme linguistique stable, nous est plurivoque et apparait tant6t comme ensemble de toi et moi, comme substitut de je, tant6t reste indicidable. Aussi les precedentes remarques sont-elles subordonnies A la perception que chaque auditeur a du discours selon le r6f6rent qu'il donne A

je, vous et nous. Je n'est pas seulement celui qui est en train de dire

je, il est ce que l'auditeur connait de lui, ce qu'il represente socialement, politiquement. L'auditeur peut, ou non, s'identifier au vous, s'inclure ou non dans le nous, et inclure dans le vous et le

nous des ils variables. C'est donc A ce niveau que diff6rentes saisies du message apparaissent.

En ce qui concerne le seul point jusqu'ici 6tudi6, la presence du locuteur et du destinataire dans le discours, on a deja not5

que les 6nonc6s se distribuaient en deux sous-corpus ayant pour unite propre de se situer ou non avant des elections : la frequence du nous, au profit du couple je-vous diminuant avant une consul- tation 6lectorale. Parallklement, A l'interieur de ces derniers

discours, se reproduit un schema tripartite ott le couple je-vous se

situe pr6frrentiellement en ddbut et en fin de message, le nous

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42 M. Collin-Platini

en occupant le centre, qui offre alors certaines similitudes avec les discours oh le nous surpasse le je-vous. Les constantes jusqu'ici relevees mettent en lumibre les rbles respectifs de chaque partenaire du message et les relations qui les unissent.

II - DE QUOi ? L'OBJET DU DISCOURS

Sous cet intitul6, nous n'examinerons ici que le champ lexico- semantique de France et des termes apparent6s. La France, lors d'une premiere lecture, a 6t6 retenue comme un objet possible - mais certes pas unique -, pour apprehender ces textes. Parce

qu'il 6tait vaste, il facilitait une approche des allocutions; par sa

complexitY, il permettait d'envisager les liens entre les partenaires du message et l'objet lui-m~me. En effet, France ou Pun de ses

dquivalents peut etre l'objet du discours, tout comme il peut rfd6rer au locuteur ou au destinataire. En procidant au releve des mots p6les retenus comme equivalents de France, on a pu 6tudier leurs relations, voir s'ils 6taient partiellement synonymes, d ter- miner leurs zones d'intersection. On decide d'appeler << 6quiva- lents de France >> - ce qui relkve de la competence de tout

francophone - l'ensemble des unites qui se trouvent dans un meme contexte et dont on fait l'hypothese qu'elles permettent de determiner, soit par opposition, soit par identification, les condi- tions du maniement de France. Nous posons done 1'6galit6 : quand << x Frangais >> = France, il s'agit d'un de ses equivalents. D'oui la liste : Ddmocratie, Etat, Nation, Patrie, Pays, Peuple, Rxpublique.

Si cette analyse est distributionnelle, c'est que 1'6tude du texte A partir de la notion d'environnement nous apparait comme essen- tielle dans la recherche en sociolinguistique. Puisque le sens n'est pas seulement inherent aux unites linguistiques mais depend de

l'usage qu'en fait chaque locuteur, les lexbmes ne sont pas consi- ddrds isolkment mais sont apprehendes dans la chaine syntagma- tique, et definis par leurs environnements. Si certaines unitis ont un sens additif, A savoir qui ne se modifie pas dans les combinaisons

syntagmatiques, le signifi6 des autres unites change avec les combinaisons. II s'agit donc, en considerant les environnements, de mettre en evidence le sens des unites dont le signifi6 varie par celles dont le signifi6 ne varie pas. Pour des raisons pratiques, nous n'avons relevd que six unites se r6partissant 6galement avant et

aprbs le mot p6le 6tudi6. Tout autre 6quivalent situ6 dans la

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Analyse d'un discours politique 43

m6me phrase, m6me k plus de trois unites de distance dv mot p6le, a 6galement &t6 retenu. Quand le terme considdr6, en fonction de sujet, se trouve sdpar6 du verbe par des compl'ments ou une proposition, la solution a dtd de noter le contenu de l'expansion (trois unites) et le verbe dont le mot p6le est le sujet.

I. Risultats

a) Emploi global de France et de ses equivalents par discours : pourcentage par rapport au nombre d'unites linguistiques.

Dates % Dates %

i962 20-09 2,6 1965 11-12 3 14-10 2,9 17-12 2,I 18-10 4,3 31-12 I,1

26-10 2,5 1966 31-12 1,2

07-1I 2,7 1967 og9-o2 2,7 31-12 1,2 14-o3 3

1963 19-04 1,2 10-08 I 31-12 1,2 3I-I2 1,6

1964 16-04 o,8 1968 24-05 2,1 02-08 1,5 30-05 2,4 31-12 1,3 29-o6 1,8

1965 27-04 0o,8 24-11 0,8 04-II 2,7 31-12 0o,9 30-I 1,g9 1969 I1-03 1,5 03-12 1,9 25-o4 2,3

- La frequence des mots thbmes consid6r's, par rapport au nombre des unitis linguistiques, croit en 1962, 1965, 1967 et 1969 - annies dlectorales :

1962 : 2,6% 1963 : i,2 % 1964 : ,1% 1965 : 1,8 % (966 : 1,2 % 1967 : x,8 % 1968 : 1,4 % 1969: 1,76 %

- Si l'on examine maintenant les onze discours retenus par J. Rocher' comme, 6lectoraux, et celui du II dicembre 1965, on note que le pourcentage de l'emploi global de ces termes, par rapport au nombre d'unit6s, est supirieur au pourcentage de l'ann'e (voir tableau page ci-apres). On ne tient pas compte ici des deux discours de 1969, tous deux 6lectoraux.

Si les annees 6lectorales et les allocutions prncdant une consul-

x o. Jean ROCHE, Le style des candidats 4i la prisidence de la Ripublique. Etude quantitative de stylistique, Toulouse, Privat, 1971.

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44 M. Collin-Platini

Dates % % de Termes les plus employes I'annie

18-o0-62 4,3 2,6 France, Peuple 26-xo-62 2,3 2,6 France, Republique 07-11-62 2,65 2,6 France, Republique, Nation 03-12-65 1,g9 1,8 R6publique 11-12-65 1,g 1,8 France, Republique 17-12-65 2,17 1,8 France, Peuple, Nation

09-02-67 2,63 1,8 R'publique, France

04-03-67 3,18 1,8 France, Pays 30-05-68 2,23 1,4 Rdpublique 29-06-68 1,82 1,4 France, R'publique

tation presentent une augmentation de France et de ses equiva- lents, en revanche, dans les discours de fin d'ann6e ces mots thtmes, sauf France, diminuent.

b) Emplois de France et ses 6quivalents par annie

Anns es 0

1962 22 15 3 23 19 32 41 155 1963 4 4 I 8

i 5 18 4 I964 2 6 x 6 5 2 i6 38 1965 12 9 0 11 13 29 46 120 I966 0 0 0 3 2 2 7 I4 1967 5 9 0 12 7 16 34 83 1968 5 7 1 13 8 10 15 59 1969 3 4 1 8 5 4 o10 35

Total 53 54 7 84 60 Ioo 187 545

c) Moyenne d'emploi par annie de chaque terme

R6pu- Annie Etat Nation Patrie Pays Peuple blique France

1962 3,6 2,5 0,5 3,8 3,i 5,3 6,8 1963 2 2 0,5 4 0,5 2,5 6 1964 o,6 2 0,3 2 1,6 o,6 5,3 1965 1,7 1,3 o 1,5 1,8 4,1 6,5 1966 o o o 3 2 2 7 1967 1,2 2,2 o 3 1,7 4 8,5 1968 I I,1 o,2 2,6 1,6 2 3 1969 1,5 2 0,5 4 2,5 2 5

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Analyse d'un discours politique 45

Les occurrences de Republique, Etat, Nation, Peuple et France croissent sensiblement en 1962, 1965, 1967 et 1969, annies dlec- torales, alors que les emplois de Pays se rdpartissent diff6remment et presque contrairement. En ddduira-t-on que Pays est le terme neutre, le terme gdndrique que de Gaulle emploie pour ne pas insister sur l'une des valeurs particulibres que revetent les autres termes ? Les index mettront en dvidence les domaines auxquels chacun de ces termes est prdfirentiellement lid puisque les pre- sentes constatations quantitatives ont surtout pour but d'orienter l'examen de ces index". En 1968, annie dlectorale, on remarque un flichissement, alors qu'on s'attend a un accroissement de ces mots th~mes ou du moins un palier entre 1967 et 1969. Seul Pays se trouve en 1968 au meme niveau qu'en 1967. Les discours de 1968 n'ont done pas la mnme facture que ceux des autres anndes dlec- torales. Pour affiner ces remarques, il serait bon de dissocier les diffdrents types de consultations dlectorales : rdfdrendum, elections

prdsidentielles, ldgislatives. A la suite de ces remarques, on peut, pour chaque mot thime

puis pour leur ensemble, rdpartir les allocutions en deux catd-

gories : celles dont le nombre d'occurrences du terme est supdrieur a sa moyenne d'emplois et celles dont le nombre y est inf6rieur. Cette rdpartition apparaitra dans le tableau synthdtique de la conclusion.

2. Relations de France et de ses equivalents entre eux

A partir des index", on peut regrouper certaines unites et examiner A quels domaines chacun des mots thimes retenus est

pr6firentiellement lid; dtudier si deux ou plusieurs se partagent un meme champ sdmantique; si l'un apparait indifflremment dans plusieurs registres. Par ce regroupement d'unites linguis- tiques, on cherche A ddfinir le (ou les) contexte(s) d'emploi des mots p61es choisis pour apprdhender le corpus. IL s'agit d'une lecture particulibre des index; d'autres lectures sont dvidemment possibles, de mame que l'on peut choisir d'aborder ces discours par d'autres mots pivots.

Ii. On ne peut pas pr6senter ici ces index qui occupent les p. 134 A 187 de la these; ils ont 6t6 dresses A partir des co-occurrences de France et de ses 6quivalents et se rdpar- tissent en trois types : << les environnements >>; < x sujet de >; << x compl6ment du nom de >>.

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46 M. Collin-Platini

Autour du mot peuple apparaissent des termes qui appartien- nent au champ sdmantique des 6lections; autour de patrie des termes qui appartiennent A celui du danger et de la destruction; le rJfdrent de la Ripublique est souvent son existence comme dans les sequences : < Etre ou ne pas etre la Republique >, x Vive la R6publique >>. Le theme de stabilit6 revient quand il s'agit, pour le locuteur, d'&voquer I'Etat avec les termes : aujourd'hui, actuel, naguire, passe', sort, destin, devenir, retour, retomber, reprendre, re'novation. La Nation apparait dans deux registres, celui des 6lections avec : choisir, choix, lire, s'exprimer, confiance, investiture, rifirendum, sufrages, vote; et celui de 1'&conomie avec : dconomique, blndfices, social, dive- loppement, emplois, expansion, plan. L'index des substantifs que qualifie national compl6te cette remarque. La France s'inscrit avant tout dans une relation aux autres Etats; ses environnements sont, d'une part, des noms de pays, des termes comme : monde, mondial, international, nations, peuples, univers; d'autre part, les termes : indipendance, armement, blocs, coaliser, 0. T.A.N., allids, dissuasion, ennemis, extirieur, invasion, inflodation. Enfin, paralllement au fait que nous n'avons pas pu relever sur les graphes de frtquence un accroissement significatif des emplois de Pays dans tel ou tel discours, ce dernier mot p61e ne semble etre lie pref6rentiellement A aucun theme et apparaitre dans les contextes o0i les autres mots p6les sont deja repr6sent's.

3. Relations entre le locuteur, le ricepteur et les iquivalents de France

Parmi les relations entre les partenaires du discours et les 6quivalents de France, plusieurs possibilitis peuvent se pr6senter, reunies sous les chapitres qui semblent le mieux les cerner : substitution des uns aux autres et actions des uns sur les autres.

Puisqu'on a d6jA notd que nation, pays, peuple, Etat - -quivalents de France - se substituaient partiellement A je et vous, on ne reviendra pas sur ce point et l'on ne considerera ici que l'action des partenaires du message sur la France et ses 6quivalents, et inversement. Pour en rendre compte nous avons retenu les siquences oi0 i'un des deux ltIments de la relation - marquee par un verbe - 6tait agent, quand l'autre 6tait en fonction de compl6- ment prdf6rentiel. La frequence est not6e entre parenth6ses.

Le role de la France et de ses dquivalents A l'6gard de je et de ses substituts est :

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Analyse d'un discours politique 47

- d'appeler, avoir, choisir, d6signer, ilire (8), faire confiance, repondre (2).

Le r61e deje et de ses substituts A l'gard de la France et de ses

equivalents est

- d'amener, en parler A, assumer le destin de; assurer, assurer la conduite, la continuit6, conduire, garantir le destin de, main- tenir, maintenir la continuitt, offrir des voeux, parler pour, preserver, proposer A (5), faire une proposition, recourir A, repondre de, servir, souhaiter A (2), former un souhait, sou- mettre A (3), soumettre aux suffrages de.

Le r61e de vous A l 'gard de la France et de ses equivalents est de :

- d6cider du destin (du sort) de la France, engager le sort du

Pays, etre le peuple frangais.

Le rble de nous A l'6gard de la France et de ses 6quivalents est : - d'accomplir le developpement du Pays, assurer A la France,

doter notre Pays, saluer la France, souhaiter une bonne ann&e A la France, redevenir la Nation.

Nous apparait une seule fois en fonction d'objet, ayant pays pour agent : aider.

Pour terminer ce rapide examen des relations entre les parte- naires et un objet du message, on a compare (A partir des tableaux des p. 33 et 44) la distribution des pronomsje et vous d'une part, nous d'autre part, et la pr6sence de tel mot pble dans les discours. On a donc mis en paralldle la repartition des allocutions en deux groupes : selon que l'emploi du coupleje-vous &tait ou non superieur A l'emploi du nous; selon que le nombre d'occurrences du mot

pble 6tait sup6rieur ou non A sa moyenne. Ainsi, peut-on remarquer que tel terme est, ou non, employ6 de preftrence avant les dlec- tions - 1A ofi je et vous sont plus frdquents; une croissance de leur emploi global les ann6es 6lectorales a d6jA 6td not6e.

Etat semble lie aux 6lections puisque seuls deux discours non

dectoraux, le 7 et le 8, comptent un nombre d'occurrences sup6rieur A la moyenne et trois discours electoraux un nombre inf6rieur : le 15, le 21 et le 30. Meme constatation pour Ripublique, terme pour lequel tous les discours sont l1ectoraux quand sa frIquence d'emploi dIpasse la moyenne. I1 est difficile de conclure

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48 M. Collin-Platini

pour Nation, Pays et France dont les emplois se repartissent indiff6- remment - ou du moins ne se rdpartissent pas selon le critere choisi - dans ces deux categories. L'emploi de peuple est sup'rieur A sa moyenne dans ix des 16 discours classes comme dlectoraux selon la repartition des pronoms.

III - COMMENT LE LOCUTEUR S'ADRESSE AU DESTINATAIRE DU DISCOURS

Ne seront prdsentees ici que certaines remarques sur les dimen- sions des discours, des phrases et sur les constituants de ces dernikres.

I. Dimension du discours1

Les allocutions ont une longueur moyenne de I 045 unit6s; vingt discours, sur les trente du corpus, comptent entre 550 et

I 250 unites; huit sont au-dessus de ce dernier chiffre. La longueur maximale est de I 950 unit6s (Io aoitt 1967); la longueur mini- male est de 447 unites (30 mai 1968).

Le classement par ordre de grandeur croissante rdpartit les discours selon leur situation dans le temps - avant les elections, en fin d'annie - et met en evidence les allocutions qui n'entrent pas dans cette classification. Maintenant si seuls les discours pro- nonces avant un scrutin sont consideres, une autre subdivision

apparait, selon que la date de la consultation 6lectorale est proche ou tloign&e. Juste avant les klections, les discours sont les brefs du corpus et comptent 554 (no 30), 560 (no 4), 566 (nO 21), 640 (nO 3), 7 8 (no I5), 739 (no 13), 827 (nO I7), 978 (no 5), 656 (no 26) unites. Quand les discours sont prononc6s A une date plus dloignde du scrutin, les chiffres croissent. Ainsi les allocutions comptent I 711 (no i), I 033 (nO 2), I541 (nO 12), I 026 (nO 20), I428 (no 29) unites : chiffres qui 6galent ou d6passent la moyenne de 1 045 unites.

I. Le comptage ici utilisa eat celui que pratique J. ROCHE et qu'il expose, par exemple, dans le Style des candidats..., p. 21. Puisque l'unit6 linguistique n'est pas toujours identifiable a l'unit6 graphique, les chiffres empruntds A MM. Cotteret et Moreau sont r6ajustas, aprts la comparaison des r6sultats de leurs travaux respectifs qui rvivle une diff6rence de 1,5 % entre les unit6s linguistiques compt6es par le premier et les unitts graphiques des seconds; le chiffre le plus dlev6 6tant celui des unit6s graphiques.

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Analyse d'un discours politique 49

Un m&me partage peut &tre effectu6 entre les discours du

31 d6cembre, selon qu'ils terminent une annie electorale ou une

annie qui ne l'&tait pas. Les discours des 31 decembre 1963 (1 859 unites), 1964 (1 093 unites) et 1966 (I 138 unites), annees sans consultation 6lectorale, se situent au-dessus de la longueur moyenne et surpassent nettement ceux des 31 d6cembre 1962 (89go unit6s), 1965 (879 unit6s) et 1967 (995 unites). Restent certains discours, difficiles k ranger avec les pr6c6dents; ce sont essentiellement les derniers, de 1968 et de 1969. Une explication possible pour ceux de 1968: ils n'ont pas la meme facture pour avoir

6t6 provoques par l'v6enement et, quasiment, improvises. On peut 6galement expliquer les dimensions aberrantes des discours 14 et 16 de novembre et d6cembre 1965 (respectivement I232 et I o89 uni-

tes) et du discours 29 du LI mars I969 (i 428 unit6s), par le fait

qu'un discours s'intercale entre eux et la date de la consultation

6lectorale : ce sont les allocutions 15, 17 et 30o qui, elles, sont brbves.

2. Dimension de la phrase

La longueur moyenne de la phrase sur l'ensemble du corpus est de 30 unit6s. La longueur moyenne maximale est de 42 unites

(les 31 decembre 1965 et Io aohit 1967). La longueur moyenne minimale est de 17 unit6s (le 30 mai 1968). Sur l'ensemble des

discours, la longueur moyenne de la phrase croit avec le temps (28,5; 28; 25,5; 31,5; 27; 32; 28,6; 35,5 unit6s). Compte tenu de cette croissance, li6e au temps, les discours de fin d'ann6e se

distinguent, encore une fois, pour se situer au-dessus de cette

moyenne, sauf celui de 1962; 25 des 30 allocutions ont une phrase qui compte entre 24 et 37 unit6s. Les discours inf6rieurs a ces limites sont ceux du 31 dccembre 1962, du 2 aouft 1964 et du

30 mai 1968. Les discours superieurs a ces limites sont ceux des

31 dicembre 1965 et io aofit 1967.

3. Longueur des phrases selon les moments du discours

Paralldlement A ce qui a 6t6 fait pour les personnes, on v6rifie si la complexit6 de la phrase - notion explicitee plus loin -

d6pend des moments du discours, puis s'il existe une relation entre celle-ci et I'emploi de tel pronom, de telle unite linguistique. Les

calculs sont effectuds A partir des chiffres de J. Roche et ne portent

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Page 23: Une analyse d'un discours politique

50 M. Collin-Platini

done que sur onze allocutions : qui sont justement celles oh est

apparue une rdpartition, presque reguli&re, des personnes selon trois parties. Existe-t-il une correspondance entre la presence de tel pronom dans telle partie du discours et l'accroissement ou la diminution de la longueur de la phrase ?

Longueur Longueur moyenne de la phrase moyenne dans la de la

Date phrase Partie i Partie 2 Partie 3

18-12-62 32 30,8 45,7 19,2

26-Io-62 24,3 18,7 28,4 25,5 07-11-62 29,6 27,3 35,3 27,6 05-12-65 25,6 22 26,8 26

17-12-65 23,6 19,4 27,5 23 o9-o2-67 27,7 24,7 32,7 26,2 04-03-67 29,7 33,1 31,5 22,6 30-05-68 I9,4 11,2 31,7 '4,7 29-06-68 29,8 18 46,5 25,5 11-03-69 31 32 34 29

Malgr6 quelques ecarts, les phrases les plus longues et celles dont la longueur est superieure a la moyenne du discours sont au centre du texte. Dans les discours prononcas avant des elections, les phrases les plus longues se situent dans la partie oh le nous est

prdponderant; les phrases les plus courtes dans les parties oh le

couple je-vous compte plus d'occurrences que nous.

4. Complexitl de la phrase difinie par ses expansions

Le nombre moyen de propositions par phrase est toujours ilev6 et varie entre 1,6 et 3,6. Le pourcentage de phrases complexes par rapport au nombre de phrases est egalement fort puisqu'il oscille entre 52 et 8o %. Le nombre de subordonnies en expansion est toujours superieur au nombre de subordonnies nucleus - c'est-&-dire d6pendant directement de la principale -, ce qui fait apparaitre I'enchevetrement, l'imbrication des propositions.

Complexit6 selon les moments du discours : les phrases qui comptent le plus de propositions, le plus de subordonn6es se situent dans la partie centrale du discours, l1i oh les phrases sont les plus lon-

gues. Se trouve done justifiee, aprts coup, notre premiere approche

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Page 24: Une analyse d'un discours politique

Analyse d'un discours politique 51

de la complexiti syntaxique par le decompte des unitis linguistiques. Et il existe chez de Gaulle une correlation totale entre la longueur de la phrase et le nombre de subordonntes qu'elle contient3.

5. Les constituants du discours et de la phrase

La richesse du lexique de de Gaulle peut, tout d'abord, etre evalude selon le nombre d'unites diff6rentes par discours". Le

pourcentage d'unitis diffdrentes par rapport au nombre total d'unites subit, dans le corpus, une faible variation - de 37,9 % a 55 % - compte tenu de la disparitei de la longueur des enonc6s. Les pourcentages les plus faibles correspondent Cvidemment aux discours les plus longs et inversement. La moyenne avoisine 45 %. Une autre manibre d'apprihender la richesse lexicale d'un auteur est de comparer le nombre des unites notionnelles, que sont les

verbes, les substantifs, les adjectifs et les adverbes, au nombre d'unites d'un texte. Le pourcentage des items lexicaux oscille entre 41 et 46,7 et se situe le plus souvent autour de 44 %, et leur distribution se realise ainsi : le nombre moyen des noms par phrase se situe entre 4 et 7,9; des verbes entre 2,7 et 5; des

qualificatifs entre I et 2,6; des adverbes entre o,6 et 1,8. Soit: N > V > Q > Ad.". C'est ainsi que se signalent les discours du 30 mai 1968 par un flechissement de l'ensemble des items

lexicaux; de mars et d'avril 1969 par un mouvement inverse; et

l'allocution du 3 decembre 1965 presente, mais d'une manibre moins nette, une baisse dans l'emploi de ces unites notionnelles.

CONCLUSION

Si le but d'une telle analyse n'6tait pas en soi de classer les allocutions mais de voir comment se faisait I'unit6 d'un type de discours sur les diffdrents plans du circuit de la communication, on a pu relever les traits unificateurs qui rapprochent certains inonces pour les opposer A d'autres. Ainsi, A l'interieur du corpus

13. Voir A ce sujet les remarques de J. ROCHE dans Travaux de linguistique et de litti- rature, X, i, Strasbourg, 1972, p. 143-

14. Ces calculs sont faits A partir des chiffres de MM. COTTERET et MOREAU, Le vocabulaire du giniral de Gaulle, Paris, Armand Colin, 1969.

15. Nous rtf6rant aux chiffres dc J. Roche ces r6sultats ne refletent pas tout le corpus.

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Page 25: Une analyse d'un discours politique

France

et

ses

quivalents

Longueur

je-vous-nous

emploi

> moyenne

+;

< moyenne

-

Longueur

des

discours

des

phrases

R6sultats

No

des

je-vous

> nous

+

tous

faible

+

<

moyenne

+

discours

je-vous

<

nous

-

equivalents

Etat

R6publique

forte

-

> moyenne

-

S+

+

+

-

loin

des

lections

+

5+

-

2

+

+

+

+

-

loin

des

6lections

-

4+

2 -

3

+

+

+

+

+

-

5+

1-

4

+

-

+

+

+

+

5+

1-

5

+

+

+

+

+

+

66+

25

+

5-

6

-

-

-

-

-

+

+

5-

7

-

+

+

-

-

+

3+

3-

8

-

-

+

-

-

-

+

5-

9

-

-

-

-

-

+

+

5-

o

-

-

-

-

+

hors

sujet

+

2 +

4-

II

-

-

-

-

-

6 -

12

-

-

-

-

6-

8 +

34-

13

+

+

+

+

7-

+

6 +

74

+

+

+

+

-

avant

discours

6lectoral

+

5 +

I -

15

+

-

-

+

+

+

4 +

2-

16

+

+

+

+

-

avant

discours

6lectoral

-

4 +

2 -

7

+

+

+

-

+

+

5+

I -

24+

6-

i8

--

-

-

-

6-

I9

-

-

---

-

-+

5--

1+

II-

20

+

+

+

+

-

avant

discours

61ectoral

+

5 +

r-

2x

+

+

-

-

+

+

4 +

2-

9 +

3-

22

-

-

t--

+

5-

23

-

-

-

+

+

5-

2+

10-

24

+

-

+

-

+

+

4 +

2-

25

+

-

-

+

+

+

4

2-

26

-

-

-

-

+

I+

5-

9+

9-

27

-

-

-

-

-

6-

28

-

-

-

6-

2-

29

+

+

+

-

-

avant

discours

Clectoral

-

3 +

3 -

30

+

-

-

-

+

-

2 +

4+-

5+

7-

Les

lignes

horizontales

s6parent

les

psriodes

4lectorales

des

p&riodes

non

6lectorales.

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Page 26: Une analyse d'un discours politique

Analyse d'un discours politique 53

global se dont dessinds peu A peu des sous-corpus et A c6t6 d'une

etude des constantes chez de Gaulle se place une analyse dif- fdrentielle.

i. Les constantes du discours. Ce sont :

- les places imparties A chaque partenaire du message et la o silhouette )> deje, vous et nous;

- la d6finition des equivalents de France et leurs champs siman- tiques;

- le r61le de l'allocut6 et du locuteur A l 'gard de France et de ses

equivalents.

2. Comparaison interne

Les discours se repartissent en ilectoraux et non 6lectoraux A partir de critbres degag6s de l'analyse. A la lecture du tableau de la page ci-contre, les periodes electorales se signalent par un

grand nombre de reponses positives (+) aux criteres retenus; soit, pour 1962, les discours I x 5; pour 1965 : 13 a 17; pour 1967 : 20 et 21; pour 1968 : 24 A 26; et pour 1969 : 29 et 30, parmi les-

quelles periodes seront designes comme electoraux les discours qui repondent positivement A tous les critbres, soit : 3, 4, 5, 13, 15, 17, 24, 25, 26 et 30. Les autres sont les discours non klectoraux. Un

indice, A la relecture des textes, vient corroborer ce classement :

l'interpellation du destinataire par l'apostrophe : < Frangaises,

Frangais )>, immidiatement suivie par je, vous et des termes appar- tenant au champ lexical des elections.

Les moments du discours electoral :

- plus de je-vous que de nous dans les premieres et derniares

parties de l'allocution; - dans la partie centrale, plus de nous que deje-vous; des phrases

plus longues (caracttristiques du discours non 6lectoral) et

plus complexes.

3. Evolution et crises

Evolution :

- croissance de la richesse lexicale definie par le pourcentage d'unitis diffirentes par rapport aux unitis du texte;

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Page 27: Une analyse d'un discours politique

54 M. Collin-Platini

- croissance de la longueur moyenne des discours; croissance des discours non dlectoraux; flichissement de la longueur des discours d6ectoraux;

- allongement de la phrase du discours non dlectoral et flichis- sement de celle du discours dlectoral.

Crises : certaines allocutions se signalent par l'aberrance d'un ou plusieurs de leurs caractbres en fonction des critbres retenus : - par une phrase tr6s longue : les discours 3, 13, 26 et 30; par

une phrase brbve : le 23; - par une anomalie dans l'emploi des pronoms : les 26 et 29

qui ont plus de nous que de je-vous, bien qu'ils precedent des

edections; le 15 o0t le nombre de nous tgale le nombre de je-vous; le 25 qui a 6 je, pas de vous, et 2 nous seulement;

- par un emploi irregulier des 6quivalents de France et par la < pauvrete >> lexicale : les discours 15, 24, 25, 26 et 30;

- parce qu'ils ne suivent pas la division tripartite: les discours 24, 25, 26 et 30o.

Les discours qui pr6sentent de nombreuses anomalies sont donec celui du 3 d6cembre 1965 (nO 15), ceux de mai et de juin 1968 (nOs 24, 25, 26) et ceux de 1969 (no 29 - deja rejete parmi les discours non d1ectoraux - et no 30). Sans vouloir justifier aprbs coup la d6termination de ces six discours, nous pouvons verifier que les discours 15 et 30 ont amen6 respectivement un ballottage et un 6chec et, plus g6n6ralement que les discours 24, 25, 26, tra- duisent une crise politique.

RAsUMA

D'une part, I'auteur choisit un certain nombre d'unitds - pronoms et equivalents de France - dont il examine la frdquence et les distributions; d'autre part, prsente une etude quantitative de la longueur des discours et des phrases, de leurs composantes. A partir de criteres 6tablis et valid6s au cours de l'analyse : - on relive certaines constantes qui permettent d'identifier les partenaires du

message, de d6finir leurs relations, leur rble; - on peut, en notant comment se fait l'unit6 d'un type de discours sur les diff6-

rents plans du circuit de la communication, subdiviser les allocutions en categories distinctes (6lectorales, non electorales) et signaler celles dont l'aberrance des caract~ristiques rivrle une crise.

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