12
Une belle occasion Lyon, Nantes, Bordeaux,… plusieurs gran- des villes françaises possèdent leur musée de l’imprimerie. Première région graphique, ou une des toutes premières, après Paris, le Nord-Pas-de-Calais, riche encore de pape- tiers, d’imprimeurs, voire d’éditeurs, n’avait aucun lieu de mémoire consacré à cette imprimerie. Depuis quelques mois s’est ouvert à Wambrechies, grâce à la ténacité d’un ancien imprimeur, qui a collecté pendant des années des outils et des machines avant qu’ils ne pas- sent à la casse, un « espace » centré sur le livre et la typographie (cf. notre article p. 8). Animé par quelques passionnés, ce lieu mène un vrai projet pédagogique avec démonstrations et ate- liers notamment en direction des scolaires. Chacun peut composer sa ligne de plomb, quitter l’espace avec une gravure imprimée par une reproduction de la presse de Gutenberg. L’espace se veut ouvert aux his- toriens et aux chercheurs grâce à une belle bibliothèque. Le propos, tout entier tourné vers la mise en valeur de l’écrit et du livre en particulier, n’est en rien nostalgique. Optimiste, le créateur de cet espace voit dans internet une nouvelle opportunité pour l’écrit et prend soin de l’expliquer à tous ceux qui franchissent la porte de la capitai- nerie de Wambrechies. Et pourtant ! Comment ne pas regretter que l’effort de cet homme, réaliste mais plein d’enthousiasme, n’ait pas été mieux relayé ? Le temps a rogné bien des ambitions. Cet espace ne devrait être qu’une étape et non un aboutissement. Des pièces maîtresses de l’histoire de l’imprimerie, patiemment collectées et aujourd’hui endormies dans un entrepôt, mériteraient d’être présentées. Elles ne le seront probablement jamais, si rien n’est fait. A l’heure, où la région joue la carte du tou- risme, de la culture, les collectivités territo- riales s’honoreraient à apporter leur aide à la sauvegarde de ce patrimoine industriel. Ce serait attristant de manquer une si belle occasion. J.-P. V. Il y a cinquante ans, en mai 1956, les salariés du journal Liberté quittent la Grand-Place de Lille pour rejoindre leur imprimerie 113, rue de Lannoy, dans le quartier de Fives. Le quotidien d’opinion y sera édité jusqu’à sa liquidation judiciaire en 1992. édito 1 AVRIL 2007 N° 5 En mai 1956, le quotidien Liberté célèbre son arrivée rue de Lannoy. L’inauguration de l’imprimerie a attiré plusieurs milliers de personnes. «C’était un quartier vivant où des milliers d’ouvriers travaillaient. C’était quelque chose », raconte Elie Maléri, qui fut photographe au quotidien Liberté. « Au début, nous n’avions pas de laboratoire photo. Nous avons dû installer une chambre noire de fortune », souligne Marcel Deccuber, 82 ans, un autre photographe. La fibre jour- nalistique des militants communistes vibre encore à l’évocation de cette illustre page de la presse lilloise. En ce début mai 1956, le lancement en fanfare de la nouvelle imprimerie de Liberté n’a pas donné la priorité au service photo. En revanche, l’ou- til industriel est prêt à servir le Parti… Liberté s’installait rue de Lannoy à Fives après une longue cohabitation avec La Voix du Nord. Ironie de l’histoire, le démé- nagement du journal au logo au marteau et à la faucille fut en partie subventionné par la « presse bourgeoise » ! Liberté : de la Grand-Place à la rue de Lannoy

Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

n Une belle occasionLyon, Nantes, Bordeaux,… plusieurs gran-des villes françaises possèdent leur muséede l’imprimerie. Première région graphique,ou une des toutes premières, après Paris, leNord-Pas-de-Calais, riche encore de pape-tiers, d’imprimeurs, voire d’éditeurs, n’avaitaucun lieu de mémoire consacré à cetteimprimerie.

Depuis quelques mois s’est ouvert àWambrechies, grâce à la ténacitéd’un ancien imprimeur, qui a collectépendant des années des outils etdes machines avant qu’ils ne pas-sent à la casse, un «espace» centrésur le livre et la typographie (cf. notrearticle p. 8). Animé par quelques

passionnés, ce lieu mène un vrai projetpédagogique avec démonstrations et ate-liers notamment en direction des scolaires.Chacun peut composer sa ligne de plomb,quitter l’espace avec une gravure impriméepar une reproduction de la presse deGutenberg. L’espace se veut ouvert aux his-toriens et aux chercheurs grâce à une bellebibliothèque. Le propos, tout entier tournévers la mise en valeur de l’écrit et du livreen particulier, n’est en rien nostalgique.Optimiste, le créateur de cet espace voitdans internet une nouvelle opportunité pourl’écrit et prend soin de l’expliquer à tousceux qui franchissent la porte de la capitai-nerie de Wambrechies.

Et pourtant ! Comment ne pas regretter quel’effort de cet homme, réaliste mais pleind’enthousiasme, n’ait pas été mieux relayé?Le temps a rogné bien des ambitions. Cetespace ne devrait être qu’une étape et nonun aboutissement. Des pièces maîtressesde l’histoire de l’imprimerie, patiemmentcollectées et aujourd’hui endormies dansun entrepôt, mériteraient d’être présentées.Elles ne le seront probablement jamais, sirien n’est fait.

A l’heure, où la région joue la carte du tou-risme, de la culture, les collectivités territo-riales s’honoreraient à apporter leur aide àla sauvegarde de ce patrimoine industriel.Ce serait attristant de manquer une si belleoccasion.

J.-P. V.

Il y a cinquante ans, en mai 1956, les salariés du journal Libertéquittent la Grand-Place de Lille pour rejoindreleur imprimerie 113, rue de Lannoy, dans le quartier de Fives.Le quotidien d’opinion y sera éditéjusqu’à sa liquidation judiciaire en 1992.

édit

o

1

AVRIL 2007 N° 5

En mai 1956, le quotidien Liberté célèbre son arrivée rue de Lannoy. L’inauguration de l’imprimerie a attiréplusieurs milliers de personnes.

«C’était un quartier vivant où des milliers d’ouvriers travaillaient. C’était quelquechose», raconte Elie Maléri, qui fut photographe au quotidien Liberté. «Au début,nous n’avions pas de laboratoire photo. Nous avons dû installer une chambre noirede fortune», souligne Marcel Deccuber, 82 ans, un autre photographe. La fibre jour-nalistique des militants communistes vibre encore à l’évocation de cette illustre pagede la presse lilloise. En ce début mai 1956, le lancement en fanfare de la nouvelleimprimerie de Liberté n’a pas donné la priorité au service photo. En revanche, l’ou-til industriel est prêt à servir le Parti… Liberté s’installait rue de Lannoy à Fivesaprès une longue cohabitation avec La Voix du Nord. Ironie de l’histoire, le démé-nagement du journal au logo au marteau et à la faucille fut en partie subventionnépar la «presse bourgeoise» !

Liberté : de la Grand-Placeà la rue de Lannoy

Page 2: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

chargée de gérer le personnel ouvrier, lematériel et une partie des locaux del’ancien Écho. Pourtant à Lille, le délé-gué régional de cette société de servicepublic n’est autre que Jacques Talpaert,ancien membre de la direction techni-que du Grand Écho du Nord de laFrance. La cohabitation idéologique demeuredifficile. Après la guerre d’Indochine,ce sera la guerre d’Algérie. Les conflitsvont émailler ces années de plomb entrele titre proche des milieux économiqueset celui qui incarne la voix du Parti.Pour assurer une paix durable entre lesdeux titres mais aussi la protection dupatrimoine des dirigeants du GrandÉcho du Nord, l’État concède des avan-tages exorbitants résultant d’une situa-

tion juridique complexe. La Voixdu Nord et Liberté ne paient pasde loyers d’occupation à laSNEP2 qui n’est juridiquementpas gestionnaire provisoire deslocaux qu’occupent ces deuxjournaux… La loi De Moustiervotée le 2 août 1954 va marquerla fin de cet imbroglio. Elle pré-voit la suppression de la SNEP –un gouffre financier sur le plannational – et l’indemnisation desjournaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pasété confisqué. C’est le cas d’unedes sociétés du Grand Écho quiest légalement propriétaire dusiège de l’immeuble de la Grand-Place. Le règlement des affairesde gros sous de la presse sedéroule l’année où l’abbé Pierredéclenche son insurrection de labonté. L’affaire fait les gros titrestandis que personne ne s’inté-resse à cette transaction qui a lieuentre La Voix du Nord et Liberté.La Voix verse début 1955 unesomme de 60 millions de francs3

au quotidien communiste pouraccélérer son départ.

n Les années « Lannoy »Le projet de construction d’une impri-merie est envisagé depuis plusieursannées. Mais Liberté connaît des diffi-cultés financières. «S’il a pu traverser1953, c’est que les deux souscriptionsqu’il lança avec l’aide du Parti, l’an der-nier, recueillirent dans le peuple le totalimposant de 17 millions de francs»,

n Les années «Grand-Place »Beaucoup de Nordistes l’ignorent.Liberté a écrit son nom pendant près dedouze années sur la Grand-Place deLille, rebaptisée en septembre 1944place du Général de Gaulle. À cetteépoque, les lettres rouges du titre com-muniste s’étalent alors sur le long bal-con du premier étage de l’actuelimmeuble de La Voix du Nord. Le jour-nal Liberté et le Nord Libre, le quoti-dien du Front national, le mouvementde résistance d’inspiration communiste,occupent les deux premiers étages. Larédaction de La Voix du Nord, qui arepris une grande partie de celle duGrand Écho du Nord de la France, estlogée au 3e niveau. À la Libération, la prise de contrôle desmoyens d’informations est unepriorité pour le gouvernementprovisoire de la République. Leslocaux du Grand Écho du Nordde la France, le quotidien régio-nal qui trône sur la Grand-Place,font l’objet d’une sourde batailleentre gaullistes et communistes.La mainmise sur le plus puissantmédia lillois est en jeu. Au nom de la stabilité de larégion et de la peur d’une insur-rection populaire orchestrée parles communistes, un pacte estscellé entre plusieurs hommes :Jean Dubar, l’ancien patron duGrand Écho du Nord, JulesHoucke, dernier chef autopro-clamé du mouvement de résis-tance Voix du Nord, Jean Catrice,délégué régional à l’information,et Francis-Louis Closon, le futurcommissaire de la République. Le titre La Voix du Nord rem-place Le Grand Écho du Nordqui lui offre son personnel et sonpremier rédacteur en chef etdirecteur, Léon Chadé, un ancienjournaliste de l’agence Havas,ami de Maurice Schumann etproche de Jean Dubar. Le journal issude la clandestinité est donc absorbé parle titre collaborationniste. De leur côté, les communistes parvien-nent à former une équipe sous la direc-tion de Pierre Delon, qui fut secrétairegénéral de L’Humanité de 1932 à 1938,et Louis Lallemand, alors responsableinterrégional du PCF qui choisit le titrede Liberté1. Mais les moyens financiers

et humains dont ils disposent sont insuf-fisants pour prendre la suprématie surLa Voix du Nord, « L’Écho de la Voix»comme l’appellent les communistes. Liberté édite son premier numéro le5 septembre 1944 sous-titré «ex-Enchaîné Nord-Pas-de-Calais». Il seplace dans la succession du journalcommuniste L’Enchaîné interdit en sep-tembre 1939 après la signature du pactegermano-soviétique. Le journal est imprimé à 50000 exem-plaires – en même temps que les titresdes quotidiens Le Nord Libre et La Voixdu Nord – par des ouvriers du GrandÉcho du Nord de la France, titre défini-tivement supprimé lors de son procès ennovembre 1945. Il faut attendre la loi Defferre de juin

1946 sur la dévolution des biens de lapresse collaborationniste pour trouverune situation moins ubuesque. Cette loinationalise provisoirement les moyensd’impression dans l’attente de la fin desprocès de « la presse pourrie» qui aoffert ses colonnes à Vichy et àl’Allemagne ! La Société nationale desentreprises de presse (SNEP) est créée. Liberté est imprimé par la SNEP qui est

Liberté : de la Grand-Place à la rue de Lannoy

2

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

Une des dix-neuf linotypes dont le quotidien Liberté est devenu proprié-taire.

Pho

to L

iber

Page 3: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Liberté : de la Grand-Place à la rue de Lannoy

3

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

rappelle Arthur Ramette, direc-teur politique du journal, le23 mars 1954. Le journal n’a pas d’argent. Ilentretient une répulsion idéologi-que pour la publicité commer-ciale. Le journal préfère refuserune publicité plutôt que de cou-per les discours des dirigeants duParti. En outre, les relations avec«La Voix des patrons» sontdétestables. Le rêve de liberté prend forme àFives dans d’anciens locauxindustriels situés 113, rue deLannoy à l’angle de la rue desMontagnards. Ce site, resté célè-bre dans les annales de la ville,est l’emplacement de la fermedite de «Louis XIV» dont uneagence immobilière conserveencore aujourd’hui le souvenirsur la façade4. À cet endroit, leRoi-Soleil aurait séjourné plu-sieurs jours lors du siège de Lilleen août 1667. Trois siècles plus tard, la rue estindustrieuse. Les bâtiments ontété achetés à la société Laroche-Lechat, propriétaire d’une usinede fabrication de courroies située justeen face 90, rue de Lannoy, où se trouveaujourd’hui le supermarché Leclerc.L’entreprise de courroies avait créé cesvastes ateliers en juin 1920. Au début des années 50, les locaux dés-affectés servent déjà de garages auto-mobiles à la société d’éditions du jour-nal Liberté qui y entrepose égalementdu matériel. En mai 1955, René Lemaire, gérant deLiberté, dépose une demande de permisde construire à la mairie de Lille. Leslocaux d’une surface totale d’environ3000 m2 doivent être aménagés pardeux architectes lillois, MM. Fauchilleet Vantyghem. L’imprimerie du journalcommuniste s’installe en plein cœurd’un quartier ouvrier, population quiconstitue l’essentiel de son lectorat.Le déménagement du journal est large-ment anticipé par les fédérations duNord et du Pas-de-Calais du Parti com-muniste qui ont lancé une vaste sous-cription à l’occasion du 10e anniversairede la fondation du titre. En dix ansd’existence, ce n’est pas le premierappel à la générosité lancé auprès deslecteurs-militants. Cette fois, il s’agit

«que Liberté ait son imprimerie », «uneimprimerie exclusivement au service dela paix», écrit le journal le 4 décembre1954. « Liberté n’a pu résister que grâceà l’aide constante, au soutien vigilantdes masses laborieuses», écrit le jour-nal le 26 décembre 1954 à l’occasion dulancement d’une nouvelle souscription.Cette collecte de fonds doit rapporter20 MF, espère le comité central de larégion Nord-Pas-de-Calais5. Le 22 janvier 1956, Liberté présentedans ses colonnes sa «nouvelle impri-merie » et son «nouvel immeuble» enplein travaux. Le journal consacre unepage et plusieurs photos à ce projetindustriel justifié par la lutte des clas-ses. «Les avantages de cette solutionétaient indiscutables : doter notre jour-nal d’une imprimerie moderne, c’étaitdonner à notre Parti une arme redouta-ble pour sa lutte contre le capitalisme ;c’était en outre la perspective pourLiberté de frais généraux moins élevés.Mais ce n’était certes pas la solution defacilité : il allait falloir trouver des mil-lions par dizaines. Ces millions seuls lestravailleurs de notre région pouvaientnous les fournir. »

Liberté annonce être devenu pro-priétaire de cinq rotatives – l’uned’elles est un ensemble colossalde 65 tonnes, les quatre autrespèsent chacune 35 tonnes, – uneclicherie pesant au total 30 ton-nes, une presse de 6 tonnes, dix-neuf linotypes, une machine àtitres. Ce matériel, qui apparte-nait à l’ancien Écho du Nord, estpayable en 15 ans, une autre par-tie en 3 ans seulement. Le démontage, le déménagementet la remise en état de marched’une rotative demandent envi-ron un mois. En outre, la pressequi pèse 6 tonnes ne peut êtredémontée. Elle doit être descen-due, en un seul bloc, d’une hau-teur de 12 mètres, précise lejournal. L’inauguration de l’im-primerie est prévue avant le1er juin. Les locaux de l’ancienne usinede la rue de Lannoy ont été trans-formés. Les caves et le rez-de-chaussée accueillent les servicesde l’imprimerie. Les rotativessont montées sur des socles anti-vibrations «pour que les habi-

tants des maisons voisines ne soient pasincommodés». Au 1er étage, 25 bureauxsont aménagés pour l’administration etla rédaction. Une salle de réunion peutégalement réunir 300 personnes. Début mai 1956, les travaux sont quasi-ment achevés rue de Lannoy. Desouvriers des ateliers de la SNCFd’Hellemmes et d’autres usines ont ren-forcé bénévolement les équipes techni-ques du journal. Le personnel profite du1er mai férié et des jours suivants pourprocéder aux derniers réglages desmachines. C’est l’effervescence. Le week-end du 5 au 6 mai, Libertéquitte l’immeuble de la Grand-Place oùle journal est né. Une plaque,aujourd’hui disparue, sera apposée surle 8, place du Général de Gaulle. Une autre histoire commence pour letitre communiste. Daté du mardi 8 mai1956, le premier numéro de Liberté estenfin imprimé à Fives. «Ce journal estsorti cette nuit sur les rotatives de notrenouvelle imprimerie », titre le quoti-dien. L’inauguration de l’imprimerie, qui sedéroule le 10 mai sous la présidence deMarcel Cachin alors directeur de

L’imprimerie comprend notamment cinq rotatives qui provenaient del’ancien Écho du Nord.

Pho

to L

iber

Page 4: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Liberté : de la Grand-Place à la rue de Lannoy

4

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

« Il est souvent tard quand je décided’aller voir «ce qui se passe» au jour-nal. Minuit trente, une heure… Jean-René Desage, mon époux, rédacteuren chef du journal1, tarde à rentrer.Plutôt que de l’attendre, je vais le rejoin-dre au 113 de la rue de Lannoy à Fives.

Le «pointeau» m’ouvre et je franchisles marches métalliques qui mènent àson bureau. Comme c’était à prévoir, iln’y est plus ! C’est donc en bas, à l’im-primerie, que je le retrouverai.Redescendre l’escalier par l’intérieurcette fois, passer devant la salle derédaction, vide mais encore enfumée,celle des téléscripteurs qui égrènentleur musique nasillarde. Et me voici aucœur de l’imprimerie, dans cette odeurd’encre et de métal chaud. Bonsoir auxouvriers, bises aux copains, tous impré-gnés de cette même odeur persistante,tous «à la bourre», comme souvent.Jean-René est là, au marbre.

Le journal aura du retard. Il a fallurefaire la première, sabrer des articleset faire de la place à une info impor-tante et imprévue. Les linotypistes s’ac-

Visite nocturne à l’imprimerie de Liberté…dans les années 1970-1980

L’Humanité, attire des milliers de per-sonnes. Le cortège s’étend de la Foirecommerciale de Lille, site de l’actuelGrand Palais, où un meeting a été orga-nisé, jusqu’aux portes du journal de larue de Lannoy. Plusieurs pages de pho-tos sont publiées dans les éditions deLiberté des 11, 12 et 13 mai 1956. Le quotidien Liberté va sortir des pres-ses de la rue de Lannoy jusqu’en 1992,année de la liquidation judiciaire de lasociété Liberté Édition prononcée le6 juillet par le tribunal de commerce deLille. Le dernier numéro sera édité lemardi 7 juillet 1992. Ce jour-là, il titresur sa première page «Ce n’est qu’unau revoir !»Pendant cinq ans, l’immeuble de Fivesva connaître de nombreuses dégrada-tions. La vente pour une somme de990100 F est signée en 1997 au profitd’une société anonyme InnovationDéveloppement Formation (IDF). Cettesociété de formation a rénové les locaux

1. Album 60 ans de Liberté (1944-2004). Un journal de résistance pour le XXIe siècle. Hors-série de Liberté Hebdo, Lille, 2004.

2. La Voix du Nord, histoire secrète. Ce qu’il faut savoir avant de lire le journal. Édition LesLumières de Lille, Lille, 2005. p. 152, 178 à 182.

3. Nous avons relevé la mention de cette somme dans l’expertise immobilière établie parGeorges Bonjean et déposée par Me André Diligent en 1970 devant la cour d’appel de Douai dansle cadre du dossier des résistants spoliés par La Voix du Nord.

4. Ce souvenir réside dans l’enseigne du café «La Ferme Louis XIV». Ce débit de boissons futtenu de 1930 à 1970 par les parents d’Émile Olivier, qui fut une des grandes figures du syndica-lisme ouvrier à l’imprimerie de La Voix du Nord.

5. Un exemplaire de Liberté coûte 20 F. Le salaire moyen est de 20000 F.

qu’elle occupe toujours aujourd’hui.Des structures métalliques des fonda-tions des rotatives ont été conservéesdans le sous-sol pour témoigner del’existence de l’imprimerie. Le titre Liberté a reparu le 11 décembre1992 sous la forme d’un hebdomadairegrâce à une campagne d’abonnementqui a réuni 5000 lecteurs-fondateurs.Une semaine plus tôt, la fédération duPCF du Pas-de-Calais avait lancéL’Hedomadaire-62, qui deviendraLiberté-62, installé à Lens.

tivent sur la maquette modifiée. Lesénormes rouleaux de papier blanc sonten place dans la roto. Elle va pouvoirpartir dans un bruit d’enfer. Un monstrede métal noir cette machine, avec despistons, des cylindres, dégoulinantsd’huile, une envergure qui occupe touteune salle aux murs sombres commeelle.

La voilà en action. Le papier s’étire,marque une torsion, se couvre d’encre– nous sommes en quadrichromie. Elleprend sa vitesse de croisière sous lesyeux attentifs des mécanos. De grandscouteaux coupent les pages au format.Et les journaux pliés arrivent à l’avant.Le bac rectangulaire s’emplit.

C’est le «bébé» du jour pour ceux quil’ont conçu, des journalistes auxouvriers du livre. Et c’est toutes les nuitsla même émotion, la même fièvre. Ils nes’y habituent jamais. C’est leur vie !»

Françoise Lehoux

Le journal lillois redémarre en 1992avec deux salariés et de nombreuxbénévoles. Liberté-Hebdo est alorsmaquetté et imprimé par l’imprimeriede Nord Éclair, propriétaire du groupeSocpresse. Installé dans des bureauxappartenant à la Fédération du Nord duPCF, 13 rue d’Inkermann, Liberté-Hebdo a vendu 6134 exemplaires cha-que semaine pour la période 2005-2006,selon l’Office de justification de la dif-fusion (OJD).

Frédéric Lépinay

1. Jean-René Desage est entré au journalLiberté au début des années 60. Il est décédéen 1986.

Page 5: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Quelques années après la chute duSecond Empire, et malgré l’avènementde la Troisième République, le Journalde Roubaix d’Alfred Reboux, monar-chiste, puis bonapartiste, est le quoti-dien dominant dans la grande cité tex-tile. Cependant, signe de la bonne santédu camp républicain roubaisien, naît, enjuin 1877, un nouveau journal : Le PetitRoubaisien. Ce périodique est annoncé comme unorgane de gauche par le Journal deRoubaix, qui en complète la présenta-tion en citant ses principaux commandi-taires, à savoir l’équipe municipaled’Alexandre Famechon. Selon le quoti-dien conservateur, aucun imprimeurroubaisien n’a d’ailleurs consenti à luiprêter ses presses, aussi, pour l’occa-sion, un libraire de Nouvion-en-Thiérache, Juliet Lienard, viendra eninstaller une à Roubaix. Il précise égale-ment que le fonds social de souscriptionsera de 50000 francs et que M. Willem,ancien conseiller municipal, aiderafinancièrement l’hebdomadaire, commeil l’a fait pour l’Idée Républicaine et leLibéral du Nord1. «Le futur journal,poursuit-il, reflétera plus particulière-ment les idées sociales, politiques etéconomiques de M. Achille Scrépel2 ». La cohabitation entre les deux titres estimmédiatement difficile. Le Journal deRoubaix aimerait bien discréditer auplus vite son concurrent. Sous le falla-cieux prétexte de démontrer que le nou-veau journal cite ses dépêches, il lui tendun traquenard. Hésitant entre le procèset le canular, Alfred Reboux choisit ladeuxième solution. En échange de l’édi-tion du matin de la petite feuille républi-caine, il lui remet une fausse édition deson journal et il établit la preuve de lacopie. Cette pratique que lui-mêmeapplique depuis de nombreuses annéeslui permet ainsi de faire rire aux dépensdu nouveau journal.Le Petit Roubaisien n’apprécie guère lecôté donneur de leçons de Reboux. Ildénonce ce vilain tour, en précisant quela technique de l’emprunt est chose

courante, y compris par le Journal deRoubaix. Et de citer L’Echo du Nord,qui se voit également « emprunté» sansêtre cité.Durant ces premières années de laTroisième République, sous la prési-dence de Mac Mahon, la presse restesous surveillance. Le Petit Roubaisienest poursuivi pour délits de colportage,et pour diffamation. Même le Journal deRoubaix n’échappe pas à la règle. S’iln’a pas de problèmes avec ses modes dedistribution, les prises de position pas-sionnées et les emportements de langagede son rédacteur en chef lui valent plu-sieurs plaintes en diffamation. S’ilgagne le procès intenté par AlfredMotte, pour avoir refusé l’insertion de saprofession de foi et l’avoir qualifié unpeu vertement, il n’en est pas de mêmeavec Alexandre Famechon. Le mairerépublicain de Roubaix fera la preuve dela mauvaise foi et du parti pris dumonarchiste Reboux. Ce qui causera parailleurs des dégâts dans l’appositionconservatrice, dont le Journal deRoubaix est le porte drapeau.

n En pleine campagne électoraleLe 6 janvier 1878, en pleine campagnepour l’élection municipale, le Journal deRoubaix continue de maugréer contre lesrépublicains. Il ressort ses griefs contreles écoles de Mollins3, quelques moisaprès leur réception et ouverture. Lesarguments sont toujours les mêmes: ellessont trop chères, elles ont été construitesen matériaux de qualité inférieure, unbénéfice illicite a été réalisé par l’entre-preneur, et il y a eu, à l’époque, incapa-cité et légèreté de l’administration muni-cipale dirigée par Famechon. La diatribe se révèle sans effet, les répu-blicains reviennent au pouvoir et sontinstallés le 22 janvier. Mais dès le19 janvier, Alexandre Famechon assi-gne pour un procès en diffamationAlfred Reboux qui, dans son quotidien,l’a accusé d’avoir dénaturé un vote etfait réaliser un bénéfice illicite de237000 francs à la société de Mollins.

5

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

Famechon est immédiatement suivi parl’entrepreneur Samuel de Mollins. Le procès met aux prises deux grandsavocats du barreau de Lille, Me Basquinpour Famechon et Me Reuflet pourReboux qui font citer leurs témoins. Ducôté du défendeur de Reboux, les oppo-sants municipaux au projet de Mollins àsavoir Bulteau Lenglet, Paul ScrépelMasurel, Louis Leclercq Mulliez, PierreParent, récemment battus lors du dernierscrutin, mais aussi les entrepreneurs rou-baisiens : Jean-Baptiste Pennel Wattine,le sieur Picavet, Victor et André Derville.L’accusation, elle, fait appeler lesconseillers municipaux Charles Daudet,Pierre Flipo, Paulin Richard, le notaireValenducq, et les architectes AugusteDupire et Louis Barbotin. Enfin, les deuxparties souhaitent entendre le notaireroubaisien Duthoit et l’architecte dudépartement Marteau.Après l’exposé des faits et l’assignation– 20000 francs de dommages et intérêts– chaque avocat expose sa ligne dedéfense. Me Basquin démontre qu’Alex-andre Famechon a été l’interprète fidèledu vote du conseil, et qu’il est un hon-nête homme et un bon administrateur. Aucontraire, Me Reuflet veut fournir lapreuve que tous les faits annoncés dansle numéro du 6 janvier 1878 du Journalde Roubaix sont exacts et que l’opérationde Mollins est désastreuse pour la ville.L’architecte du département, Marteau,chargé par la ville d’estimer les travauxde la société de Mollins et la valeur desécoles, affirme avoir travaillé à partird’un métré remis par Deniau, l’archi-tecte de la ville. À la demande du prési-dent du Tribunal, il répond que son éva-luation est incomplète, et s’étonne queson rapport soit arrivé entre les mainsde M. Reboux.Le défenseur du Journal de Roubaix faitvenir à la barre les entrepreneurs Il lesinterroge sur la maçonnerie des ouvra-ges, leur demande une estimation. Ilsmentionnent leur protestation après laproposition de Mollins au conseil muni-cipal. Dans un dernier échange sur leprix des terrains, Jean-Baptiste Pennelindique à Me Basquin qu’on a manquéde briques en avril, mai ou juin. Lasociété de Mollins en a fait venir parbateau, ce qui a augmenté les coûtspour l’entreprise. Cette pénurie étonne :Roubaix est entouré de briqueteries etquelques-uns des entrepreneurs interro-

Sur fond de rivalité politique,de la polémique à la diffamation,le procès entre le directeur du Journalde Roubaix et le maire de la ville

Page 6: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Pierre Parent reprend les affirmationsconcernant Isaac Holden et la sociétéd’entrepreneurs spéculateurs. Il citeégalement Alfred Motte selon lequelces écoles ne valaient pas plus de55000 francs. Mais Motte n’est pas làpour le contredire.Le conseiller municipal Charles Daudetfait, à la barre, un bref historique del’affaire. En novembre 1876, six milleenfants traînaient dans la rue, la villen’avait pas d’argent pour des écoles, onne trouvait pas de locaux disponibles.L’idée de construire des écoles et de leslouer à la ville permettait de répondrerapidement à ce besoin crucial.L’adjudication n’aurait pas permisd’avoir des écoles dans un délai aussicourt, puisque six mois plus tard, ellesétaient livrées. D’ailleurs, précise-t-il,on fait une adjudication quand on a desressources… Il confirme qu’un délai dehuit jours a été donné à l’oppositionpour réfléchir au projet, mais que dès lelendemain le conseil municipal recevaitdes lettres d’entrepreneurs. La proposi-tion était un forfait de 76500 francs etun loyer de 3825 francs.A une question de Me Reuflet, CharlesDaudet précise que le projet initial étaitde 68000 francs, sur l’exemple del’école de l’Epeule, mais qu’on y avaitajouté des logements pour les institu-teurs. Le directeur des travaux munici-paux Deniau aurait dit à l’époque que cen’était pas cher. À la question desgaranties de la société de Mollins, pourDaudet, ce n’était pas le problème duconseil municipal. Si les écolesn’avaient pas été livrées, la ville n’enaurait pas pris possession.

n Un mécanisme perfideMaître Basquin va, alors, démonter soi-gneusement « tout le mécanismeperfide» de l’article de Reboux, et meten avant la mauvaise foi du journaliste. Ilreprend les affirmations de la partieadverse sur l’aspect soi-disant philan-thropique de l’opération, auquel onaurait associé Isaac Holden, personnalitéconnue pour ses libéralités. Tout ceci estun tissu de mensonges: le nom du grandindustriel anglais et croisien n’a jamaisété prononcé en conseil municipal. Il précise l’affaire : une proposition delocation à la ville de six écoles par lasociété de Mollins, sur la base d’unloyer de 3825 francs, avec la possibilité

Le procès entre le directeur du Journal de Roubaix et le maire de la ville

6

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

gés possédant leur propre fabrication.Les architectes Barbotin et Dupire ontété chargés par Alexandre Famechon dedresser un état estimatif des écoles. Ilsont travaillé, disent-ils, à partir del’exemple de l’école du Coq français etils arrivent au chiffre de 71348 francs,achat du terrain et travaux compris.Certes! mais, fait remarquer Me Basquin,cette école est la première à avoir étéconstruite et on a relevé les murs desautres établissements pour un surcoût de4600 francs, ce qui nous rapproche de lasomme forfaitaire (76500 francs). Quant au bénéfice de l’entrepreneur, àMe Reuflet, les architectes répondentqu’il faut le relativiser. Il y a toujoursdes frais inattendus et l’entrepreneur nesera payé que 15 ans plus tard !

n On fait une adjudicationquand on a des ressourcesViennent alors les dépositions des poli-tiques. Alexandre Bulteau Lenglet estquestionné par Me Reuflet sur les déli-bérations du 17 et 18 février 1877. Ilévoque le débat sur le prix à ne pasdépasser, sur la location à la société deMollins que personne ne connaissait. Ilmentionne le délai de huit jours accordépour prendre la décision. Il affirmeavoir demandé une estimation de lavaleur des écoles et cite les chiffres deDeniau et Marteau. Il dénie la diffé-rence d’une école à l’autre. Maître Basquin interroge à son tour letémoin. Pourquoi a-t-il pris livraisondes écoles et fait voter sans réserves les3825 francs de location? C’était pourhonorer la signature de Famechon. Lacommission des écoles s’est-elle réuniepour acter des modifications à ces éta-blissements? Bulteau Lenglet répondpositivement : « J’ai accepté les modifi-cations, j’ai accepté les écoles, elles ontété terminées à la rentrée, les profes-seurs ont été nommés, il a bien falluaccepter les écoles.» Il finit en préten-dant être à l’origine du projet de fairebâtir des écoles, tandis que Me Basquinpoursuit en faisant acter que les modifi-cations ont été faites gratuitement par lasociété de Mollins.Le défenseur de Reboux, Me Reuflet,reprend la main sur le projet. SelonBulteau Lenglet, le conseil municipals’est prononcé sur un état descriptif,non estimatif. Ce projet était exclusif etn’a pas été soumis à la concurrence.

Quant à Me Basquin, il demande, lui, siles renseignements sur les terrains ontété envoyés à l’architecte Marteau. Laréponse est négative. À Reboux, laréponse est positive.Paul Scrépel Masurel affirme, égale-ment, que le conseil municipal s’estprononcé sur un devis descriptif, nonsur un état estimatif, et que la miseen adjudication a été demandée. ÀMe Basquin, il souligne n’avoir ni ren-seigné, ni aidé M. Reboux.

De son côté, Leclercq Mulliez rapporteune conversation qu’il a eue avecAlexandre Famechon. Ce dernier lui aprésenté l’offre d’une société philanthro-pique dans laquelle se trouvait IsaacHolden. Parallèlement, il admet que laville n’avait, jusqu’ici, pas mis à exécu-tion les projets d’école faute d’argent. Ilavait donné son accord à condition queMoïse Rogier, entrepreneur et conseillermunicipal, par ailleurs protestant, n’enfasse pas partie. Comme il s’y trouvaitselon les dires de Famechon, LeclercqMulliez aurait demandé la mise auconcours. Il signifie ensuite que les écolesne valent pas le prix demandé et que DeMollins et Rogier sont des spéculateurs.Interrogé par Me Basquin, il reconnaîtque, bien que les briques laissent à dési-rer, le contrat a été loyalement exécuté,mais que l’affaire est mauvaise à l’ori-gine. Et il a ces mots que chacun appré-ciera : «Si M. Famechon avait étéindustriel, il n’aurait pas fait cecontrat».

Le polémiste Alfred Reboux affûtant ses arguments.Caricature parue dans La Vie flamande illustrée.

Col

lect

ion

Ville

de

Rou

baix

. Clic

hé A

rnau

d Lo

ubry

Page 7: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

de rachat pour un prix forfaitaire de76500 francs, à signifier dans les cinqpremières années de location, sans quela ville soit obligée d’acheter à unmoment déterminé. Si à la fin desquinze années de location la ville déci-dait de ne pas acquérir les écoles, uneindemnité forfaitaire de 25000 francspar école serait exigée. En contrepartie, la société de Mollinss’est engagée à bâtir six (ou huit4) écolesavant le 1er octobre de l’année en cours.Ces écoles comportent six classes etdeux logements pour les instituteurs. Lalivraison était échelonnée de la fin dumois juillet à la fin du mois de septem-bre. L’entrepreneur se voyait pénalisé de5 francs par journée de retard à la livrai-son, somme retenue sur les loyers.Disparaissent donc toutes les allégationssur le côté philanthropique de l’affaire.Un cahier des charges a été imposé à lasociété de Mollins, basé sur les règle-ments d’administration publique, notam-ment en matière de salubrité et d’instruc-tion scolaire. Les représentants de la villepouvaient visiter et contrôler lesconstructions, des modifications pou-vaient être apportées après discussionavec l’entrepreneur. Ce qui fut le cas : lacommission des écoles a demandé etobtenu quelques modifications (notam-ment sur la toiture des écoles) et aconstaté la bonne exécution des travaux. Quant au bénéfice réalisé par l’«entrepre-neur spéculateur», l’argument ne tientplus. Il est prouvé que les écoles valent leprix proposé, sinon plus, une des écoles acoûté plus de 80000 francs. Les différen-tes modifications (toitures, surélévationdes murs des écoles), les travaux de voi-rie, l’achat des terrains sont autant d’indi-cateurs prouvant que la ville a fait unebonne affaire, ce que confirme l’archi-tecte du département Marteau au préfetdu Nord qui entérine le projet.

n Une intention de nuireLes anti-De Mollins laissent entendredans leurs dépositions qu’on a pesé surleurs suffrages. Que penser de l’amné-sie partielle de Bulteau Lenglet qui nesavait plus si le projet avait été voté àl’unanimité, quand Maître Basquin pré-sente les chiffres des délibérations, àsavoir l’adoption par 17 voix contre 14du projet de construction des écoles?Les conseillers minoritaires ont bien votécontre le projet. Quand ils se sont retrou-

vés au pouvoir à la suite des évènementsnationaux, ils ne l’ont pas dénoncé. Ilsauraient pu le déjuger, en revotant. Ils ontpar contre voté la réception des travauxdes écoles et la location de 3825 francs.Pour Me Basquin, les Bulteau, Parent,Leclerc et Scrépel n’ont pas su faire taireleurs passions politiques. Plus graveencore, Bulteau reconnaît avoir fourni àReboux des éléments qu’il n’a pas don-nés à l’architecte du département (le prixdes terrains). Me Basquin l’estime com-plice de Reboux pour cette tentative dedéstabilisation de l’équipe de Famechonau moment des élections de janvier.Le cas de l’architecte Deniau est alorsabordé. Maître Basquin reprend tous leséléments chiffrés de l’opération, ainsique les procédures. Elles sont sous-esti-mées, inexactes, faites de moyennes etde calculs approximatifs. Chargé par lemaire Bulteau Lenglet de collecter deséléments sur les terrains, Deniau lui afourni des copies du cadastre dont lesrenseignements sont très incomplets. Ilsemble qu’il ait également falsifié leprix de certains articles comme leprouve une lettre d’un entrepreneurde toitures adressée au Journal deRoubaix. Tout est à l’avenant : 48 omis-sions des plus graves sont relevées parles architectes Dupire et Barbotin, nonsoupçonnables d’être de parti pris, puis-que l’un et l’autre d’opinion politiqueopposée. Le plus grave encore, c’est latransmission de ces chiffres erronés,sans contre-expertise à l’architecte dudépartement, qui les reprend tels quels.Dernière perfidie pour Me Basquin : lefait d’avoir pris comme école de réfé-rence celle du Coq français qui sera lapremière terminée, et dont on saitqu’elle coûtera le moins cher. Après avoir démonté le mécanisme per-fide et prouvé que les écoles de Mollinsne sont pas une opération désastreusepour la ville, Me Basquin se préoccupepour finir de la soi-disant bonne foi dujournaliste Reboux. Les articles qu’il arédigés en février et mars 1877 consti-tuaient un véritable réquisitoire contrele projet. Reboux ne peut donc préten-dre avoir été surpris, il connaît tout del’opération puisqu’il l’a combattue,l’identifiant bien à l’époque comme uneopération financière et reconnaissantl’aspect forfaitaire du prix demandé. Ilne peut donc être de bonne foi quand ilprétend que Famechon a dénaturé le

Le procès entre le directeur du Journal de Roubaix et le maire de la ville

7

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

1. Opposants disparus du Journal deRoubaix.

2. Journal de Roubaix, avril 1877. AchilleScrépel est député républicain de Roubaix.

3. Du nom de l’entrepreneur qui les aconstruites, Samuel de Mollins.

4. Il n’y en aura finalement que six.5. D’après le Progrès du Nord.6. Le 27 février 1878.

vote. La procédure n’est pas irrégulière,il s’agit bien d’une location, non d’uneconstruction soumise à adjudication, etReboux le sait parfaitement quand ilprétend qu’on a parlé d’opération phi-lanthropique et qu’on a trompé leconseil municipal. De plus la procédurea été respectée, le préfet a approuvél’opération, les écoles ont été construi-tes, pendant que Reboux restait étrange-ment muet à l’époque de leur réception.Sa hargne s’est réanimée à l’approchedes élections, et c’est le 6 février 1878au soir, soit la veille du scrutin, qu’il asorti l’article incriminé, dont le titre estun véritable slogan ambigu : un ensei-gnement. L’intention de nuire est claire-ment établie, il s’agissait d’éloignerd’Alexandre Famechon les suffragesdes électeurs. Le tribunal constate que Reboux a étéadmis à bénéficier du droit de prouvercontre un fonctionnaire public la véritédes faits incriminés. Cette preuve n’apas été atteinte. Au contraire, il a étéétabli par les débats que M. Famechonavait été l’interprète fidèle de la penséedu conseil municipal de Roubaix.Reboux, rédacteur en chef du Journalde Roubaix, est donc déclaré coupablede diffamation envers un fonctionnairepublic et condamné à 100 francsd’amende, 200 de dommages-intérêts etaux dépens. Le tribunal ordonne enoutre l’insertion du jugement dans troisjournaux aux choix du demandeur5.Samuel de Mollins obtient égalementgain de cause contre Reboux, déclarécoupable de diffamations envers un par-ticulier, condamné à 50 francs d’amende,200 francs de dommages et intérêts, etaux frais du jugement et procès6.Au-delà de cette condamnation finale-ment assez minime, Reboux en a vud’autres, c’est tout le corps politiqueconservateur roubaisien qui est discré-dité, ce qui va laisser le pouvoir auxrépublicains pour quelques années.

Philippe Waret

Page 8: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

n Du plomb et de la passionDifférents outils, machines ou docu-ments symbolisent, sur quelques dizai-nes de mètres carrés, les différentesphases de la fabrication d’un livre.Avant d’arriver devant la presse, le visi-teur découvre ainsi les postes de casses,ces boîtes divisés en compartiments iné-gaux dont chacun accueille différentesquantités d’une même lettre en plomb,et peut composer sa ligne... Plus loin,c’est l’évocation de la lithographie avecnotamment des pierres et une belle col-lection de lettres à en-tête lithogra-phiées, véritables images de marque,pendant des décennies, des entreprisesauprès de leurs clients. Un peu plusloin, c’est l’évocation de la reliure avecde petites presses, etc. Composition, impression, façonnage,toutes les étapes de la fabrication d’unouvrage se franchissent avec l’aide deprofessionnels qui parlent avec fougue.Pratiques anciennes, mais aussi techni-ques d’aujourd’hui, cette visite se pour-suit par la projection de vidéos, dontune sur la vie de Gutenberg. Dans cet espace, la bibliothèque n’estpas le moindre des intérêts.Collectionneur et érudit, Jean Wambre aaccumulé de nombreux ouvrages etpériodiques sur l’histoire du livre et del’imprimerie qu’il souhaite mettre à ladisposition des professionnels et deschercheurs.

n Déjà une longue histoireL’ouverture de cet espace est le résultatd’un travail de plusieurs années. En

1999, Jean Wambre dépose l’idée d’unprojet de musée de l’imprimerie à Lilleet à Wambrechies où il habite. «Larégion du Nord est la première provincegraphique et ne dis-pose pas de lieu pourpérenniser l’histoirede ses papetiers, deses imprimeurs, deses éditeurs…»e x p l i q u e - t - i l .Imprimeur lui-mêmependant vingt-qua-tre, il a su mobiliserautour de lui quel-ques confrères. Il aainsi réuni au prixd’efforts importants,et de quelques sacri-fices personnels, dif-férentes machines,symboliques de l’évolution de l’impri-merie typographique : une linotype de1886 avec magasin transparent qui per-met de voir les matrices, une pressetypographique du fabricant françaisPierre Alauzet et datant de 1890, quatreplatines d’imprimerie, un massicot, unephotocomposeuse, etc. Wambrechies qui joue la carte du tou-risme de proximité se montre intéressé.Commence alors une longue période oùespoir et doute alterneront, mais où lapersévérance est toujours de mise. En2001, un projet muséographique estenvisagé sur quelque 300 m2 à la malte-rie. Jean Wambre peaufine son idée,continue d’enrichir sa collection, prendcontact avec le musée de l’imprimerie à

Lyon. Une réplique de la presse deGutenberg est réalisée. Las, le ventsemble tourner, d’autres lieux sont évo-qués, les mètres carrés diminuent, leprojet est même menacé faute de local.Jean Wambre le recentre sur le livre etla typographie, il lui donne une orienta-tion nettement pédagogique. Les futursvisiteurs ne seront pas de simples spec-tateurs, mais pourront être initiés à lacomposition, à la reliure, etc.L’appellation musée est abandonnée.Heureusement, la construction d’unecapitainerie et l’obligeance des voiesnavigables sauvent le projet.Depuis quelques mois, « l’espaceGutenberg Nature et Eau» est mainte-nant ouvert au public le deuxièmedimanche de chaque mois, aux groupessur rendez-vous. Est-ce une premièreétape? Beaucoup des machines rassem-blées par Jean Wambre ne sont pas pré-sentées, et en particulier la linotypedont le fonctionnement serait à celui

8

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

L’atelier de Gutenbergà WambrechiesSous l’action de la vis à pressoir, la lourde platine vient presserune feuille de papier sur une forme encrée posée sur le marbre.Ultime étape d’une série d’opérations permettant de reproduireune gravure que le visiteur pourra emporter. A l’espace Gutenberg de Wambrechies,installé dans la capitainerie du port de plaisance,on imprime encore comme le faisait au XVe siècle l’inventeurdu caractère mobile. Ou presque. Unique dans la région,cette réplique de la presse de Gutenbergest d’ailleurs la pièce maîtresse du lieu conçu par Jean Wambre,un ancien imprimeur, et dédié au livre et à la typographie.

Capitainerie,9, rue de l’Ecluse à WambrechiesTél. 03 28 07 94 60 ou 06 99 70 71 41Prix d’entrée :adulte : 1,50 €, enfant : 1 €

RENSEIGNEMENTS

Une imprimerie de Nuremberg au XVIIe siècle. Reproduction de la gravure impriméedevant les visiteurs de l’Espace Gutenberg Nature et Eau à Wambrechies.

seul un véritable sujet d’attrait à l’heuredu numérique. Elles dorment dans unentrepôt quelque part dans la banlieuelilloise. Pendant ce temps le musée del’Imprimerie à Nantes, situé en pleincentre-ville, va bientôt bénéficier denouveau locaux.

Emile Henry

Page 9: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Né en 1836, ce fils d’un directeur debanque lillois, devenu négociant entoile après avoir été ruiné, doit renon-cer, pour des raisons de santé, à l’écoledes Arts et métiers où il vient d’êtrereçu. Lors de sa convalescence quidure plusieurs mois, il répond à unepetite annonce et se retrouve rédacteurau très gouvernemental Mémorial deLille qu’il quitte en 1860 pour L’Echodu Nord. Journal républicain modéré, suspendulors du coup d’Etat du 2 décembre1851, ce quotidien est alors dirigé parle fils de son fondateur, AlexandreLeleux (C.f. L’Abeille n° 4). Pendantcinq ans, Masure y exerce les fonctionsde rédacteur politique et entame unemue politique. Selon la police, il s’y« dépouille de son enveloppe gouver-nementale » et se montre « un adeptede la démocratie la plus avancée ». Ilfait, selon la même source, du vieilEcho pourtant bien assagi « l’organeviolent des idées démagogiques de tou-tes les mauvaises passions ». Sa ren-contre avec le journaliste GéryLegrand, fils de l’ancien député auCorps législatif, rentré à Lille en 1859,est-elle la cause de son évolution ?Masure collabore en effet à La Revuedu mois, lancée en 1861 par le futurmaire républicain de Lille. En tout cas, le pouvoir inciteAlexandre Leleux à se défaire de sonrédacteur qui, en mai 1865, est éluconseiller municipal démocrate.Surveillé, Masure se fait plus prudent.En juillet 1866, il lance un hebdoma-daire imprimé à Bruxelles Le Progrèsdu Nord. « Il serait bien difficile detrouver un caractère de sympathie pourle gouvernement » note la police impé-riale à propos de ce périodique.

Toutefois elle reconnaît que « soit parcrainte de ne pouvoir pénétrer enFrance, soit pour tout autre motif […]Le Progrès est assez sagementrédigé ». En 1867, les données chan-gent, Napoléon III se déclare favorableà une réforme de la loi sur la presse.Au prix d’une lettre dynastique,Masure entend profiter de l’occasionpour transformer son hebdomadaire enquotidien politique. L’autorisation luiest en effet accordée et le 3 mars 1867,Le Progrès affirme ainsi qu’il entendêtre « attentif aux mouvements quitransforment peu à peu les bases de lasociété ». Comprenne qui voudra !Le divorce avec le pou-voir est vite consommé.En janvier 1868, lorsd’une élection partielleau Corps législatif àLille, le journal soutientGéry Legrand contre lecandidat officiel quil’emporte aisément. Ennovembre 1868, il relaiela souscription lancéedans Le Réveil de Parispar Charles Delescluze. L’ancienrédacteur en chef de L’Impartial deValenciennes entend faire ériger unmonument à la mémoire du députéJean-Baptiste Baudin, tué le 2 décem-bre 1851. Cette provocation entraînela saisie du journal et la poursuite enjustice de Masure. Celui-ci est alorsdéfendu par un jeune avocat qui,conseil de Delescluze, vient de dres-ser un véritable réquisitoire contre leSecond Empire, Léon Gambetta.Masure qui a déjà connu la prison enavril 1868 pour avoir « appelé les mili-taires à la désobéissance », la connaîtencore plusieurs fois. Ce qui ne l’em-

pêche pas, en janvier 1870, de lancerune nouvelle souscription en faveur,cette fois, d’un monument à lamémoire du journaliste Victor Noir, tuépar un cousin de l’Empereur, PierreBonaparte.Décrit comme un polémiste au stylenet, froid, acéré, il ne sourira, selon LeDiable rose, qu’une seule fois dans savie : « Ce fut quand il entendit, au4 septembre 1870, sortir d’une poitrinehumaine un cri : Vive la République ! »Masure retrouve alors Gambetta,devenu ministre de l’Intérieur du gou-vernement de Défense nationale, qu’ilaccompagne en octobre 1870 à Tours

et à Bordeaux. De retourà Lille, il reprend lecombat à la tête d’unjournal qui n’est toujourspas épargné par le pou-voir et notamment en1877 pour avoir repro-duit le mot de Gambettaà l’adresse de MacMahon le 15 août à Lillelors de la campagneélectorale : « Quand la

France aura fait attendre sa voix souve-raine, croyez-le bien, Messieurs, il fau-dra se soumettre ou se démettre… »Masure est alors député de Lille. Eluen mars 1876, il est réélu en octobre1877 où les républicains obtiennent lamajorité à la Chambre, puis en septem-bre 1881. Il meurt en octobre 1886 après avoirrefusé de mener une dernière batailleélectorale. Ses obsèques, le 19, sontsuivies par quelque 3 000 personnes.Anticlérical, Masure est pourtantaccompagné d’un prêtre.

J.-P. V.

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

Gustave MasureLe journaliste qui n’auraitsouri qu’une fois«La chose la plus importante à toute une vie est le choix d’un métier :le hasard en dispose» écrit Pascal dans ses Pensées.Rien ne prédestinait probablement Gustave Masure au journalisme,il aura suffi d’un accident de la vie pour en fairel’un des journalistes républicains les plus redoutables.

9

« La chose laplus importanteà toute une vieest le choixd’un métier :le hasarden dispose ».

Pho

to M

édia

thèq

ue J

ean

Lévy

; Lille

Page 10: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

La Société des Amis de Panckoucke poursuit sapublication d’une bibliographie sur la presse du Nordet du Pas-de-Calais. Bernard Grelle est chargé decette rubrique. Transmettez-lui les références quevous découvrez ([email protected], ou à

Société des Amis de Panckoucke, 13 rue du Château Roubaix). Soyez précis : auteur(s), titre de l’ouvrage (ou de l’article), lieu de publication et éditeur, (ou périodiquedans lequel vous avez trouvé ces renseignements), date et page(s), illustrations, etc. N’omettez pas depréciser de quel journal, magazine, revue il est parlé dans ce livre ou cet article, si ce renseignementn’apparaît pas clairement dans le titre, et le lieu d’édition du périodique. N’hésitez pas à joindre uncommentaire explicatif.

Hommes et femmes de pressen {CHAMPIER, Victor} «Victor et Louise Champier ontenfin leur monument », La Voix du Nord, 9-10 juillet2006, p. 17.n {DEFRANCE, André} «Disparition : Ancien P.D.G. deNord Éclair, André DefrancE est décédé », La Voix duNord, 16 juin 2006, p. 3.n {DEFRANCE, André} «Ancien P.D.G. de Nord Éclair,André Defrance est décédé», Nord Éclair, 16 juin2006, p. 10.n {HENNETON} « L’affaire de la rue Nationale », LeJournal de Roubaix, 30 octobre 1985.(Henneton tue Mme Duthoit à Lille).n {MASURE, Bruno} DEMAILLY (Patrice), « Masure, ton-ton flingueur », Nord Éclair, 30 avril-1er mai 2006.n {PIAT, Jean} Pseudonymes : Jean Houset ; PaulFarret ; Jean des Accacias ; Jean-Pierre Vernes.n {PIAT, Jean} « Jean Piat, directeur de nos bureauxparisiens, reçoit la coupe Émile de Girardin », NordMatin, 29 novembre 1965.n {PIAT, Jean} «Un Roubaisien honoré ; le journalisteJean Piat reçoit la rose d’or chez les Rosati deFrance», Nord Éclair, 5 décembre 1976.n {VRAU, Philibert} VISSE (Jean-Paul), «Philibert Vrau etla presse », Philibert Vrau, Actes du colloque du 4 et5 mars 2006, Faculté libre des Lettres et Scienceshumaines, 2006, pp. 127-135.n {WILLOT, Joseph} Lepoutre (Xavier), «Rue du VieilAbreuvoir : À propos de la plaque dédiée à JosephWillot », Nord Éclair ; 8 février 2001.

Généralitésn ASSOIGNION, Paul, « La presse lilloise », Lille et larégion du Nord en 1909, Lille, Impr. Danel, 2 tomes1398 + 1909 p, ici tome 1, Lille, pp. 664-667.n {Crieurs et vendeurs} De NIVELLE (Jean), « La libertéde la rue», Le Journal de Roubaix, 29 août 1885.n {Crieurs et vendeurs} « L’été au boulot : Aurélie,kiosquière à Lille », La Voix du Nord, 12 juillet 2006,p. 8.n {Justice et presse} « Les journalistes témoin en jus-tice », Le Journal de Roubaix, 8 janvier 1886.n {Lecteurs} «Une conférence de Me Drillon, avocatau barreau de Lille : [La formation intellectuelle de l’ou-vrier et la Presse] », L’Institut populaire, 3e année,3e dimanche de décembre 1910; n° 24, pp. 3/4.n {Police et presse} CAUWEL (Marcel), «La police et lapresse», L’Égalité de Roubaix Tourcoing, 1er mars 1906.

n {Église et presse} «La Croix du Nord au Vatican»,La Croix de Roubaix-Tourcoing, 12 mars 1904.n {Église et presse} DEM, «Tous les journaux catholi-ques désavouent M. Lemire», La Croix du Nord,22 janvier 1914.(Sont cités Le Journal de Roubaix, Le Démocrate, LeFigaro, L’Ouest Éclair, Le Petit Démocrate).n {Église et presse} «Le pape et les publicistes chré-tiens», La Croix du Nord, 10 janvier 1914.

Des origines à 1880n [Lesguillon (Croix-Marie)], « Quelques mots sur lesjournaux nés à Roubaix », L’Écho de Roubaix,30 décembre 1866.n {Le Journal de Roubaix} PIAT, (Jean), « La liberté dela presse a 100 ans : Les démêlés du Journal deRoubaix avec le second Empire », Nord Éclair, 13-14 septembre 1981.

1880-1914n {Le Cri des Flandres} DEM, «Un article indigne», LaCroix du Nord, 3 mars 1914.n {Le Cri des Flandres} DEM, «La mauvaise foi du Crides Flandres», La Croix du Nord, 5 mars 1914.n {La Croix du Nord} Émile, évêque d’Arras, «Lejubilé de 25 ans de La Croix du Nord », La Croix duNord, 12 février 1914.n {La Croix du Nord} MONNIER (Henri), évêque deLyon, «Le congrès jubilaire de La Croix du Nord », LaCroix du Nord, 13 février 1914.n {La Croix du Nord} «Notre jubilé de 25 ans», LaCroix du Nord, 16 février 1914.Article et photographies de FÉRON-VRAU, des rédac-teurs, des correspondants régionaux, des ateliers,des services administratifs…n {La Croix du Nord} «Comment fonctionne les servicesde La Croix du Nord», La Croix du Nord, 16 février 1914.n {La Croix du Nord} «Mgr Charost préside les nocesd’argent de La Croix du Nord», La Croix du Nord,18 février 1914.n {Le Petit Nord} «Tout est bien qui finit bien», LeJournal de Roubaix, 18 octobre 1885.(On s’aperçoit à temps que la chaudière de la machineà vapeur faisant fonctionner la presse risquait d’explo-ser. Le journal est tiré à L’Écho du Nord)n {L’Effort : bulletin mensuel de la jeunesse catholiquede Roubaix ; 1903-1933} «Croisade d’Éliacin », L’Éga-lité de Roubaix Tourcoing, 26 février 1906.

n Bibliographiede la presse régionale

10

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

Page 11: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

Bibliographie de la presse régionale

11

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

n {Mémoire de la Société d’Émulation ; Roubaix, 1870,?}GRELLE (Bernard), La Société d’Émulation de Roubaix ausiècle dernier : 1868/1914, Roubaix, Lire à Roubaix, [s.d.],51 p., 29 cm, Les Cahiers de Roubaix, n° 1 (Cette étudeest tout entière fondée sur les Mémoires de la Sociétéd’Émulation).

La presse de 1914 à 1918n La télégraphie sans fil et la presse clandestine à Roubaixpendant l’occupation allemande, Roubaix, Impr. duJournal de Roubaix, [S. d., vers 1920-1925], 15 p. 21 cm.

La presse de 1939 à 1944n PIAT (Jean), «La clandestinité au grand jour », NordMatin, 12 septembre 1964 (Sur la presse clandestine).

Après 1945n «Concours : des écoliers de Lompret voient leur jour-nal récompensé au Sénat », La Voix du Nord, 8 juin 2006.n {Gens et pierres du Nord, Roubaix} «Histoire locale : lenouveau magazine de la Société d’émulation de Roubaixfait fureur », La Voix du Nord, 25 mai 2006.n {Kékséksa}« Kekséksa : Un rédacteur en chef dequinze ans», Le Matin du Nord, 21 septembre 1981.

Le nouveau Nord Éclairn {Nord Éclair} «Le 4 mai un nouveau format, une nou-velle formule, une nouvelle une, de nouveaux repères»,Nord Éclair, 26 avril 2006, dernière page.n {Nord Éclair} «La richesse des pages locales ; toutel’actualité de votre commune et de votre région», NordÉclair, 27 avril 2006, dernière page.n {Nord Éclair} « Nord Éclair change de formule, noussommes à une semaine du changement », Nord Éclair,28 avril 2006, p. 5.n {Nord Éclair} «Le temps de lire. Le temps des loisirs »,Nord Éclair, 28 avril 2006, dernière page.n {Nord Éclair} «Les pages sports. Les pages tempslibre», Nord Éclair, 29 avril 2006, dernière page.n {Nord Éclair} CLAUWAERT (Jules) éditorialiste, LORE

(Jean-René) directeur, «Nord Éclair change : pourquoi,comment », Nord Éclair, 29 avril 2006, p. 2.n {Nord Éclair} CLAUWAERT (Jules), «Le respect de l’autrecomme boussole », Nord Éclair, 29 avril 2006, p. 2.n {Nord Éclair} HARDOUIN (Jacques) président, «Lachance d’avoir, ici, deux quotidiens régionaux», NordÉclair, 29 avril 2006, p. 2.n {Nord Éclair} «24 heures chrono dans la vie de NordÉclair. À quatre jours de sa nouvelle formule, découvrezles étapes de la réalisation de votre journal », Nord Éclair,30 avril-1er mai 2006, p. 2.n {Nord Éclair} «Le nouveau site Web. Le dialogue quo-tidien avec les lecteurs », Nord Éclair, 30 avril-1er mai2006, dernière page.n {Nord Éclair} « Ils ont testé le nouveau Nord Éclair»,Nord Éclair, 3 mai 2006, p. 2.n {Nord Éclair} «Des pages au rythme de vos passions»,Nord Éclair, 3 mai 2006, p. 3.n {Nord Éclair} «Les rendez-vous de l’entreprise. Lespages France et Monde et la nouvelle page économie» ;Nord Éclair, 4 mai 2006, dernière page.n {Nord Éclair} «Vivez l’été avec Nord Éclair du 11 juilletau 27 août : Nord Éclair vous propose sa nouvelle grillepour l’été », Nord Éclair, 4 juillet 2006, dernière page.

n {Le Nord Industriel} FARRET (Paul, alias Jean PIAT), «LeNord Industriel est un bourreur de crânes, ses rédacteursjouent les ignorants », La Bataille ouvrière, 3 septembre1939.n {Nord Matin} PIAT (Jean), «La note à payer », NordMatin, 6 septembre 1944 (Sur les débuts du journal).n {Nord Matin} PIAT (Jean), «Nouveaux riches», NordMatin, 18 septembre 1944 (Sur les débuts du journal).n {Nord Matin} HOURIEZ (en fait, Jean PIAT), «Vingt-deuxans», Nord Matin, 4 septembre 1966.n {Nord Soir-Libération} «Nord Soir est français », 8 août1944.n {Nord Soir-Libération} «Nord Soir : libre comme l’air »,6 novembre 1944.n {La Voix du Nord}, BRETONNIER (Jean-Michel), «LePrintemps de La Voix du Nord », La Voix du Nord, 4 mai2006, p. 5.n {La Voix du Nord} «Collaborations : La Voix cherchedes correspondants», La Voix du Nord, 21 juin 2006,p. 22.n {La Voix du Nord} «Collaborations : nous recherchonsdes correspondants sportifs », La Voix du Nord, 5 juillet2006, p. 24.

Télévisionn VERSPIEREN (Michel-Constant), La télévision : viol desconsciences, Villeneuve d’Ascq, Faver, 1997, 207 p.couv. Ill., 23 cm.

Le numéro 1 de La Brique, sous-titré journal local d’info etd’enquête de Lille et ses environs, a été présenté lors d’unesoirée de lancement organisée récemment à Lille. Fondépar une poignée de Lillois proches des milieux libertaires,ce bimestriel a été créé notamment pour « faire une autreinformation à Lille» et «prendre l’exact contre-pied de toutce que ne fait plus une profession mise au service au ser-vice des élites, de droite comme de gauche». Au sommaire de ce premier numéro de 12 pages (formatA3) daté de mars-avril 2007 et édité à un millier d’exemplai-res, des sujets sur le futur casino de Lille, la construction dufutur hôtel de police à Lille-Sud, Lille 3000 ou la censure àla mairie. La Brique ne s’interdit pas de sortir de son terri-toire en enquêtant sur la fermeture de l’usine Sublistatic àHénin-Beaumont. Les articles sont signés de pseudos (La Mite) ou de sim-ples initiales. Le journal est édité par une association LesAmis de la Brique. L’héritage du Clampin libéré, le mensuel créé à Lille aumilieu des années 70, n’est pas revendiqué mais ce nou-veau journal lillois affiche une ligne similaire de contre-infor-mation. La Brique est vendue 1,50 €.Imprimée en Belgique, elle est diffusée par des points devente militants.http://labrique.lille.free.fr

La Brique : un héritier du Clampin libéré

Page 12: Une belle occasion Liberté: de la Grand-Place à la rue de ...panckouke.free.fr/Abeille5.pdf · journaux supprimés à la Libé-ration dont le patrimoine n’a pas été confisqué

J O U R N A L D E L A S O C I É T É D E S A M I S D E P A N C K O U C K E

Revue publiée par la Société des Amis de Panckoucke 13,rue du Château 59100 Roubaix n Ont participé à cenuméro : Bernard Grelle, Émile Henry, Frédéric Lépinay,Jean-Paul Visse et Philippe Waret n Maquette : Triangle

Bleu n Abonnements (3 numéros) : 10 € n Vente sur demande à la Société des Amis de Panckoucken Avertissement : les textes sont publiés sous la responsabilité de leurs auteurs n L’ensembledoit être adressé sur disquette PC, logiciel Word ou à l’adresse électronique suivante :[email protected] n Les photos qui accompagnent les textes doivent être libres de droit.

12

Dans le cadre du cycle de conférences sur l’histoiredes supports du patrimoine écrit et graphique,organisé par la bibliothèque municipale de Lille,durant le premier semestre 2007, Didier Queneutte,bibliothécaire, donnera une conférence sur les périodiquesles 24 mai à 18h30 à la médiathèque du Vieux-Lille,26 mai à 18h30 à la bibliothèque de Moulinset le 2 juin à 18h30 à celle des Bois-Blancs.

Renseignements complémentaires :03 20 15 97 30 ou www.bm-lille.fr

Une conférence sur les périodiques

La Voix du NordLa grande braderie«La Voix du Nord, c’est Dallas !»La plaisanterie a couru les couloirsdu journal de la Grand-Place deLille pendant une dizaine d’an-nées. Aujourd’hui, devant l’im-mense gâchis à commencer par laperte de l’indépendance d’un desfleurons de la presse quotidienne,qui a encore envie d’en rire ? Derrière une façade policée, lesdirigeants du grand quotidien d’in-

formation se sont livrés à une lutte sans merci pour le pouvoir,ramassé finalement en 1998 par le groupe belge Rossel pour lecompte de la Socpresse. Depuis La Voix du Nord est passée entreles mains de Serge Dassault qui l’a revendue… à Rossel.Dans La Voix du Nord, La grande braderie, André Soleau qui futrédacteur en chef puis directeur général, donc l’un des princi-paux acteurs de cette tragi-comédie, livre sa version des faits.Cet ouvrage est d’abord son histoire, celle d’un garçon modeste,travailleur et ambitieux qui a su bénéficier d’opportunités pourpasser d’employé de publicité sur route à directeur général.C’est aussi un livre où il règle ses comptes avec ses ancienscolistiers, ses anciens amis, les syndicats de journalistes, lesnouveaux dirigeants du journal. S’il faut mettre à son crédit lamodernisation, accomplie à marche forcée du journal, à aucunmoment, dans ce plaidoyer pro domo, il ne se remet pas encause, oubliant qu’il avait, en 1998, en 2000, et plus tard encore,les moyens de dénoncer les turpitudes qu’il révèle aujourd’hui,faisant trop souvent preuve de dédain vis-à-vis de sa rédaction.Nul doute qu’un jour ou l’autre, ce livre entraînera une répliqued’autres protagonistes de cette grande braderie.

J.-P. V.

André Soleau, La Voix du Nord. La grande braderie,L’Harmattan, 19 €.

Les imprimeursLes hommes qui ont écritl’histoireEn 1965, lorsque l’imprimerie«Les petits fils de Léonard Danel »s’installe à La Chapelle d’Armen-tières, huit générations de la mêmefamille se sont déjà succédé. C’esten effet en 1698 que Liévin Danel apris la suite de l’imprimeurFrançois Fiévet chez qui il avait étéaccueilli comme apprenti. Une

dynastie est en train de naître. Pour faire face à son développe-ment, l’imprimerie Danel délaisse la Grand-Place de Lille pourla rue Impériale (Nationale), puis s’installe à Loos et enfin à LaChapelle d’Armentières où 1800 personnes fabriquent alors200000 ouvrages par mois. Les Danel sont tous plus entrepre-nants les uns que les autres, Louis est le premier à importer desmachines mécaniques, son neveu Léonard, condisciple deFaidherbe, est l’ami de Jules Vernes et de Jules Massenet, sonbeau-fils Bigo-Danel, par son dynamisme, gagne le surnom de«Napoléon de l’imprimerie»…De la presse de Gutenberg à l’impression numérique, l’impri-merie n’est pas qu’une affaire de machines. Pour raconter sonhistoire, Jean Wambre et Philippe Hourdain, qui sont tous lesdeux des hommes de l’art, ont choisi de parler d’abord des «gens du métier» : les imprimeurs et les typographes bien sûr,mais aussi les créateurs de caractères, voire les éditeurs. Leurouvrage, Les imprimeurs. Les hommes qui ont écrit l’histoire,dont chacun appréciera l’élégance de la mise en page, la perti-nence d’une illustration abondante et la qualité de l’impression,réserve toujours des surprises comme cette rencontre avec unBalzac, désabusé, délaissant la littérature où le succès le boudepour se lancer dans l’aventure de l’édition et de l’impression. Sil’écrivain n’y fait pas fortune, son associé sut continuer et déve-lopper l’affaire qui perdure jusqu’en 1971. Dans cette galeried’«hommes de plomb» à côté des Estienne, des Didot, desMame, des Oberthur, voire des Casterman, le Lillois Charles-Joseph Panckoucke est en bonne place. Fils de l’imprimeur dupremier périodique lillois, il donne, nous disent les auteurs, àl’édition et à la presse française une ampleur jamais égalée. De la naissance de l’imprimerie au troisième millénaire, les cha-pitres se succèdent, courts, rythmés. L’ensemble se termine parpanorama des techniques et un glossaire. Qui aime les livresaimera cet ouvrage de passion qui aborde l’avenir de l’écrit avecespérance.

J.-P. V.

Jean Wambre et Philippe Hourdain, Les Imprimeurs. Les hom-mes qui ont écrit l’histoire, 346 p., 27,50 €.Renseignements : Association Livres et Typographies, 9, quai dela Deûle 59118 Wambrechies