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étiologie | actualités Une cause rare de syndrome hémolytique et urémique : le pneumocoque L e syndrome hémolytique et urémique (SHU) est associé dans la majorité des cas à une diarrhée par infection à colibacille STEC (Shiga toxigenic Escherichia coli ou E. coli produisant des shiga- toxines) ou à Shigella dysenteriae. Le pneumocoque a été identifié plus récemment comme une cause de SHU, en particulier dans les infec- tions avec un épanchement pulmo- naire ou sous-dural. Or, l’épidémiolo- gie des infections à pneumocoques s’est modifiée depuis l’introduction des vaccins heptavalents (VP-7). Typer les souches de pneumocoques liés aux SHU Une étude a été conduite dans l’Utah et 4 États voisins sur les SHU dia- gnostiqués depuis 1971 chez les patients de moins de 18 ans, et depuis 1996 sur les souches des différentes infections à pneumo- coques, isolées de sites habituel- lement stériles. Les recoupements informatiques de ces données ont permis d’identifier les SHU liés aux pneumocoques, de typer les souches et revoir les dossiers cliniques. Des P-SPHU en augmentation De 1971 à 2008, 460 SHU ont été diagnostiqués : 85 % d’entre eux étaient associés à une diarrhée, 24 cas (7,4 %) n’avaient pas de cause spécifiée et 7 d’entre eux (1,5 %) ont été identifiés par recou- pement comme liés à une infection à pneumocoques. Les infections invasives à pneumo- coques (IPI) ont été diagnostiquées par isolement du germe entre 1997 et 2008 chez 435 enfants : 124 (29 %) uniquement bactériémiques, 91 (21 %) au cours d’une pneumonie non compliquée, 106 (24 %) avaient un empyème thoracique et 67 (15 %) une méningite. Le SHU a été une complication de ces IPI dans 7 cas (1,6 %). Avant 1996, aucun cas n’a été identifié. De 1997 à 2008, l’incidence annuelle moyenne des SHU d’origine pneumococcique (P-SHU) a été de 0,015/100 000 enfants. Pendant la même période, l’incidence des SHU a été de 1,4 cas/100 000 enfants/an. Avant 2000 et l’introduction des vac- cins heptavalents, 1 cas sur 352 SHU (0,3 %) a été identifié ; après 2000, 6 cas sur 108 (5,6 %) des SHU étaient des P-SHU (p<0,001 odds-ratio 19,6). L’âge des enfants variait de 9 mois à 7 ans (médiane 16 mois). Séquelles Bien qu’il n’y eût aucun décès, 3 enfants sur 7 ont dû être dialy- sés et le tiers avait des séquelles rénales à distance. De façon signi- ficative, les pneumonies et les empyèmes étaient plus fréquents dans les IPI avec SHU que sans SHU. Les enfants atteints de P-SHU ont été aussi plus fréquemment en soins intensifs et ont eu des durées d’hospitalisation plus prolongées que les autres cas d’IPI. Des sérotypes non VP7 Six sur 7 des souches de pneumoco- ques appartenaient à des sérotypes non VP7, mais seul le 3 était signifi- cativement associé (p = 0,067). Au total, dans l’Utah, une augmentation de l’incidence des P-SHU a été mon- trée, complication sévère des infec- tions avec empyème par des souches non représentées dans le vaccin. | JEAN-JACQUES BAUDON © www.jim.fr Source Bender JM, Ampofo K, Byington CL et al. Epide- miology of Streptococcus pneumoniae-induced hemolytic uremic syndrome in Utah children. Ped Infect J Dis. 2010 ; 29 : 712-1.

Une cause rare de syndrome hémolytique et urémique : le pneumocoque

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7OptionBio | Lundi 4 octobre 2010 | n° 442

Une cause rare de syndrome hémolytique et urémique : le pneumocoque

Le syndrome hémolytique et urémique (SHU) est associé dans la majorité des cas à une

diarrhée par infection à colibacille STEC (Shiga toxigenic Escherichia coli ou E. coli produisant des shiga-toxines) ou à Shigella dysenteriae. Le pneumocoque a été identifié plus récemment comme une cause de SHU, en particulier dans les infec-tions avec un épanchement pulmo-naire ou sous-dural. Or, l’épidémiolo-gie des infections à pneumocoques s’est modifiée depuis l’introduction des vaccins heptavalents (VP-7).

Typer les souches de pneumocoques liés aux SHUUne étude a été conduite dans l’Utah et 4 États voisins sur les SHU dia-gnostiqués depuis 1971 chez les patients de moins de 18 ans, et depuis 1996 sur les souches des différentes infections à pneumo-

coques, isolées de sites habituel-lement stériles. Les recoupements informatiques de ces données ont permis d’identifier les SHU liés aux pneumocoques, de typer les souches et revoir les dossiers cliniques.

Des P-SPHU en augmentationDe 1971 à 2008, 460 SHU ont été diagnostiqués : 85 % d’entre eux étaient associés à une diarrhée, 24 cas (7,4 %) n’avaient pas de cause spécifiée et 7 d’entre eux (1,5 %) ont été identifiés par recou-pement comme liés à une infection à pneumocoques. Les infections invasives à pneumo-coques (IPI) ont été diagnostiquées par isolement du germe entre 1997 et 2008 chez 435 enfants : 124 (29 %) uniquement bactériémiques, 91 (21 %) au cours d’une pneumonie non compliquée, 106 (24 %) avaient

un empyème thoracique et 67 (15 %) une méningite. Le SHU a été une complication de ces IPI dans 7 cas (1,6 %). Avant 1996, aucun cas n’a été identifié. De 1997 à 2008, l’incidence annuelle moyenne des SHU d’origine pneumococcique (P-SHU) a été de 0,015/100 000 enfants. Pendant la même période, l’incidence des SHU a été de 1,4 cas/100 000 enfants/an. Avant 2000 et l’introduction des vac-cins heptavalents, 1 cas sur 352 SHU (0,3 %) a été identifié ; après 2000, 6 cas sur 108 (5,6 %) des SHU étaient des P-SHU (p<0,001 odds-ratio 19,6). L’âge des enfants variait de 9 mois à 7 ans (médiane 16 mois).

SéquellesBien qu’il n’y eût aucun décès, 3 enfants sur 7 ont dû être dialy-sés et le tiers avait des séquelles rénales à distance. De façon signi-ficative, les pneumonies et les

empyèmes étaient plus fréquents dans les IPI avec SHU que sans SHU. Les enfants atteints de P-SHU ont été aussi plus fréquemment en soins intensifs et ont eu des durées d’hospitalisation plus prolongées que les autres cas d’IPI.

Des sérotypes non VP7Six sur 7 des souches de pneumoco-ques appartenaient à des sérotypes non VP7, mais seul le 3 était signifi-cativement associé (p = 0,067).Au total, dans l’Utah, une augmentation de l’incidence des P-SHU a été mon-trée, complication sévère des infec-tions avec empyème par des souches non représentées dans le vaccin. |

JEAN-JACQUES BAUDON

© www.jim.fr

SourceBender JM, Ampofo K, Byington CL et al. Epide-miology of Streptococcus pneumoniae-induced hemolytic uremic syndrome in Utah children. Ped Infect J Dis. 2010 ; 29 : 712-1.