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Mémoire de fin d’études présenté par Mélanie Vesters en vue de l’obtenon du diplôme de Master complémentaire en urbanisme et aménagement du territoire URBANISME AGRICOLE ET AGRICULTURE DE RÉCUPÉRATION DE SURFACES UNE HYPOTHÈSE RÉALISTE Université Libre de Bruxelles Faculté des Sciences Appliquées Instut d’urbanisme et d’aménagement du territoire Année académique 2010-2011 Promoteur: T. d’Huart © XXI

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Mémoire de fin d’études présenté parMélanie Vesters

en vue de l’obtention du diplôme de Master complémentaire

en urbanisme et aménagement du territoire

Urbanisme agricole et agricUltUre de récUpération de sUrfaces Une hypothèse réaliste

Université Libre de BruxellesFaculté des Sciences Appliquées

Institut d’urbanisme et d’aménagement du territoire

Année académique 2010-2011

Promoteur: T. d’Huart

© XXI

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REMERCIEMENTS 

Je voudrais premièrement remercier Mr. d’Huart pour la proposition du sujet, ses conseils avisés et son suivi en tant que promoteur. Merci d’avoir pris le temps de relire ce mémoire en vitesse avant votre départ ;

Merci ensuite à Luc Schuiten de m’avoir ouvert les yeux sur la nécessité de passer de l’utopie à la réalité ;

Merci aux nombreuses personnes ressources qui m’ont éclairée au cours de mes recherches, Angela Camboni, Dickson Despommier, Guy Basin, Nicolas Deeker, Rudolf, Thomas, Christian Crick et Pierre Barthélémy ;

Merci à mes parents de m’avoir donné la possibilité de réaliser ce Master. Merci pour les discussions préalables au choix du sujet, vos conseils lors de ma rédaction, la relecture finale et votre soutien au cours de l’année et de ma recherche ;

Merci à Steph pour la relecture,

Merci Laura et Sophie pour votre soutien et vos idées, pour le travail sur la base de données et pour votre « chouettitude » ;

Merci Biquet, Bibine et Em pour ce blocus de Pâques productif, et merci Anne et Dom pour votre si chouette maison ;

Merci plus particulièrement à Em pour la suite du blocus et les fou-rires.

Merci à mes colocataires pour le soutien tout au long de la recherche puis de l’écriture de ce mémoire.

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RÉSUMÉ 

La ville n’est pas autosuffisante par définition : il a fallu que l’homme invente l’agriculture et l’améliore jusqu’à produire des surplus pour que les villes se développer. Après des milliers d’années d’évolution en interaction, la dernière révolution agricole a contribué à l’éloignement de ces deux entités, qui sont aujourd’hui très lointaines malgré leur proximité spatiale.

Cependant, l’agriculture, tout comme la ville et le monde en général, traversent une période commune de crise : pic pétrolier, réchauffement climatique, mondialisation, injustices, épuisement des sols, gonflement urbain, etc. remettent en question notre modèle de développement. L’homme semble (re)découvrir qu’il fait partie d’un système, et qu’il est en train de le dérégler. Des mouvements alternatifs mobilisent les habitants des quatre coins du monde et préconisent une approche globale concrétisée par un ensemble de solutions à l’échelle du citoyen consommateur. Les concepts qu’ils préconisent sont la relocalisation, la diminution des consommations, l’évolution des systèmes alimentaires, etc. pour préparer une transition en douceur.

La production alimentaire en ville est une idée récurrente dans ces réflexions. Actuellement, elle reste cependant basée sur le volontariat et la collectivité à l’échelle du quartier. A l’opposé, les scientifiques imaginent des fermes verticales, alliant technologie et productivité. A moyen terme, aucune de ces deux solutions ne me semble pouvoir se développer à l’échelle d’une ville. Dans ce mémoire, j’imagine un nouveau modèle : l’agriculture de récupération de surfaces couplée à l’urbanisme agricole. Je propose la mise en culture des surfaces urbaines inutilisées (production agricole), mais aussi le développement d’un système alimentaire plus global (transformation, emballage, distribution, stockage, vente et gestion des déchets), et son inscription dans les processus de planification urbaine.

De rapides calculs permettent de conforter quantitativement cette approche. L’objectif de ce mémoire est alors de la qualifier, en menant une première réflexion sur la possibilité de développer un tel modèle. Pour ce faire, j’y développe un projet pragmatique qui s’insère dans le tissu sociétal actuel à Bruxelles, mais qui garde une vision utopique à long terme.

J’aborde ainsi des questions techniques et économiques, je questionne sur les avantages et inconvénients du modèle, et préviens des obstacles auxquels son implantation sera confrontée. Je propose finalement quelques outils à mettre en place à court terme pour avoir un effet sur le long terme et faciliter l’hypothétique concrétisation d’un tel projet.

Des recherches plus détaillées seront évidemment nécessaires en cas de décision de mettre l’agriculture de récupération de surfaces en application, mais il ressort de ce travail que les sociétés occidentales auraient de nombreux avantages à mettre en place un système alimentaire urbain spécifique à leurs villes, malgré certains obstacles. Une telle évolution urbaine demandera de nombreuses réflexions et combats politiques, qui prendront un certain temps.

Il est important de rappeler que ce modèle n’est pas la solution à la crise, mais bien une des nombreuses solutions qu’il faudra faire coexister : dans une vision à long terme, d’autres types d’agricultures urbaines feront progresser la société parallèlement à l’ARS. Par exemple, l’agriculture urbaine volontaire favorise chez nous les contacts sociaux et la participation citoyenne, et, dans les pays en développement, l’autosuffisance familiale et le développement de nouveaux revenus. De même, le développement de l’agriculture et de la société rurale ne doit pas être oublié, car il permettra un équilibrage des populations entre les territoires ruraux et urbains.

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TABLE  DES  MATIÈRES  Glossaire 1

1. Préface 6

2. Origine et évolution de l’agriculture et des villes 8

2.1 Révolution agricole du néolithique 8

2.2 Révolution agricole de l’antiquité 9

2.3 Révolution agricole du Moyen-âge 10

2.4 Première révolution agricole des temps modernes et révolution industrielle 10

2.5 Seconde révolution agricole des temps modernes : la révolution verte 12

3. Situation actuelle 13

3.1 Villes 13

3.2 Système agro-alimentaire 15

3.3 Environnement 19

3.4 Une situation qui pousse au changement 22

4. Réponses à la crise actuelle 23

4.1 Permaculture : les cycles naturels remis au gout du jour 23

4.2 Transition Towns : vers une plus grande résilience urbaine 25

4.3 Décroissance : remise en question du système économique 26

4.4 Utopies urbaine : archiborescence et cités végétales 28

4.5 Mais il n’y a pas qu’UN modèle… 29

5. L’agriculture urbaine, une partie de la solution ? 30

5.1 Objectifs recherchés 30

5.2 Quel type de production s’adapte à la ville ? 31

5.3 L’idée n’est pas nouvelle 32

5.4 Un nouveau modèle : l’Agriculture de Récupération de Surfaces (ARS) 37

6. L’ARS est-elle raisonnable ? 40

6.1 Calcul approximatif de la surface agricole totale nécessaire 40

6.2 Base de données pour la détermination de la surface totale cultivable 42

7. Imaginer un système alimentaire urbain, à Bruxelles 46

7.1 Réflexions techniques 46

7.2 Réflexions relatives à l’économie 55

7.3 Impacts sur l’environnement et sur la ville 56

7.4 Freins au développement de l’agriculture urbaine 61

7.5 Transformation, distribution et vente 65

8. Propositions 66

8.1 Création du Plan Régional de Développement Durable 66

8.2 Une centrale de biométhanisation à Bruxelles 66

8.3 Système européen de classification énergétique des bâtiments 67

8.4 La rénovation urbaine verte 69

8.5 Une PAC* urbaine ? 69

8.6 Autres 71

9. Conclusion 72

10. Sources et bibliographie 75

11. Annexe A : 85

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Glossaire - 1

GLOSSAIRE 

Les mots et concepts rappelés ici sont suivis d’une étoile (*) dans le texte.

Adventices : plantes indésirables à l’endroit où elles se trouvent. Elles sont communément appelée mauvaises herbes.

Agriculture raisonnée/intégrée : sans pour autant respecter les normes drastiques de l’agriculture biologique, l’agriculture raisonnée/intégrée prend en compte la protection de l'environnement, la santé et le bien-être animal. Elle coûte en général moins cher aux paysans que l’agriculture traditionnelle, tout en étant plus durable. Elle est également moins chère que l’agriculture biologique, sans être aussi contraignante. Cette méthode ne supprime pas totalement le recours aux intrants* chimiques mais réduit fortement leur utilisation. Elle emploie par exemple les pesticides en dernier recours, en cas de dépassement d’un seuil de nuisibilité, et après avoir mis en œuvre d'autres techniques culturales et de lutte contre les nuisibles (lutte biologique, etc.).

Agriculture urbaine : toute production de ressources alimentaires en milieu urbain. Le type d’exploitation et le système de production ne sont pas précisés : production animale et végétale, par des professionnels (agriculteurs urbains) et/ou des amateurs (potagers collectifs, jardins ouvriers, etc.).

AMAP (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) : groupe de consommateurs liés par contrat à un producteur. Ils payent à l’avance un abonnement annuel et reçoivent des paniers hebdomadaires ou bimensuels. Ces paniers sont remplis de fruits et légumes de saison souvent issus de l’agriculture biologique. Chaque ferme est gérée par un agriculteur mais les « AMAPiens » sont parfois priés de l’aider bénévolement en cas de besoin (Site national des AMAP, 2011). Ce mouvement est comparable à celui des GASAP, Groupes d’Achat Solidaires de l’Agriculture Paysanne.

Agriculture de Récupération de Surfaces (ARS) : rentabilisation des surfaces urbaines inutilisées par leur utilisation pour la production agricole.

Attelage : liaison entre des animaux de trait par un joug pour conduire un véhicule agraire (par exemple l’araire).

Compost : produit stabilisé semblable à un terreau, riche en humus (matière organique évoluée). Il est formé suite compostage, procédé biologique de conversion et de valorisation des matières organiques (biomasse, déchets organiques,...).

Empreinte écologique : Indicateur de la demande exercée par les hommes envers les services écologiques fournis par la nature. Elle mesure la surface productive totale nécessaire pour produire les ressources et absorber les déchets d’une personne ou d’une population. Pour que la société soit soutenable, il ne faudrait pas dépasser la surface de 1,4 ha par personne. Or, à titre d’indication, 4,5 hectares de sols sont nécessaires à la vie d’un français, et en moyenne sur terre, l’utilisation du sol est de 1,8ha/personne. Ces calculs prouvent bien que notre modèle de développement n’est pas applicable à tous les pays du « Tiers-Monde ».

Engrais : mélanges d'éléments minéraux destinés à apporter aux plantes des compléments d'éléments nutritifs, de façon à améliorer leur croissance, et à augmenter le rendement et la qualité des cultures.

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Glossaire - 2

Evapotranspiration : eau transférée du sol vers l'atmosphère par l'évaporation au niveau du sol et par la transpiration des plantes.

Fumier : matière organique issue des excréments d'animaux additionnés de pailles. Il est utilisé comme fertilisant en agriculture car il apporte à la terre des matières organiques et des nutriments (ex : matières azotées).

Gaz à Effet de Serre (GES) : composants gazeux qui absorbent le rayonnement infrarouge émis par la surface terrestre et contribuent à l'effet de serre. L'augmentation de leur concentration dans l'atmosphère terrestre est un facteur soupçonné d'être à l'origine du récent réchauffement climatique.

Hydroponie et aéroponie : culture agricole sans terre où les racines des plantes poussent sur un substrat (sable, billes d’argiles ou laine de roche) arrosé d’une solution minérale nutritive, respectivement liquide ou vaporisée constamment. Ces techniques permettent de contrôler tous les paramètres du milieu (concentrations des différents éléments minéraux, température, pH, etc.), et ainsi d’optimaliser le processus de croissance des plantes, selon leur stade de développement.

Intrant : en agriculture, ensemble des éléments apportés aux terres et cultures pour le développement des plantes d’intérêt agronomique. Il s’agit des engrais et produits phytosanitaires* mais également des semences et de l’eau.

Jachère : terres arables en attente de culture et ensemble des pratiques culturales pour leur préparation à l'ensemencement (destruction des adventices* et accélération de la décomposition de la matière organique par ensevelissement du fumier). La jachère n’est donc pas un repos de la terre mais une reconstitution des stocks minéraux du sol par l’agriculteur.

Aquaponie : système mixte entre l’hydroponie* et l’aquaculture. Cette technique, en accord avec les principes de permaculture, consiste à combiner la production végétale et piscicole. En Asie, les riziculteurs élèvent par exemple des poissons dans leurs champs pour assurer la fertilisation. Chez nous, l’aquaponie se fait via le raccordement entre les bacs hydroponiques et un réservoir piscicole.

Lutte biologique : méthode de lutte contre un ravageur ou une plante adventice* au moyen d'organismes naturels antagonistes de ceux-ci. Des phytophages, parasites, prédateurs et autres agents pathogènes (virus, bactéries, champignons…) sont utilisés pour combattre les plantes ou insectes indésirables à la place de produits phytosanitaires*.

Métayage : type de bail rural dans lequel un propriétaire confie à un métayer le soin de cultiver sa terre en échange d'une partie de la récolte.

Mulch ou paillis : couche de matériau naturel protecteur (copeaux, gazon, feuilles mortes, sciure, etc.) posée sur le sol, principalement dans le but de modifier les effets du climat local tels que la température, l’évaporation et le rayonnement solaire.

OPEP : Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole

PAC : Politique Agricole Commune

Pesticide = Produit phytosanitaire : en agriculture, substance servant à la lutte contre les organismes nuisibles. Ce terme générique rassemble les insecticides, les fongicides, les herbicides et les parasiticides.

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Glossaire - 3

Pollinisation : mode de reproduction privilégié des plantes, processus de transport d'un grain de pollen depuis l'étamine (organe mâle) vers les stigmates (organe femelle), souvent effectué par un insecte tel que l'abeille.

Poussières atmosphériques = fumées noires : poussières colorées générées par la combustion. De taille supérieure à 10µm, elles ne pénètrent pas dans le système respiratoire mais dépose une couche noire qui dégrade les bâtiments.

Production maraichère : production de fruits, légumes, fines herbes et fleurs à usage alimentaire dans le but de faire du profit ou d’en vivre (et donc différent du jardinage).

Résilience : aptitude à rester en équilibre (ou en retrouver un) malgré les perturbations, modifications plus ou moins importantes du milieu. La résilience permet au système de résister à un choc, s'adapter à de nouvelles conditions et transformer la vie elle-même quand les conditions sont radicalement différentes.

Rotation culturale : technique culturale qui permet le maintien ou l'amélioration de la fertilité des sols et donc l'augmentation des rendements. Il s’agit de reproduire dans le temps la même succession de cultures en cycles réguliers. On peut ainsi avoir des rotations biennales, triennales, quadriennales. Le choix des cultures se fait en fonction des besoins et des objectifs de l'agriculteur mais aussi du contrôle des adventices, maladies ou besoins biochimiques des plantes.

Rurbanisation : néologisme qui désigne le processus de "retour" des citadins dans des espaces périurbains qualifiés de ruraux. Elle est la conséquence d'un "désir de campagne" et est rendue possible par la disponibilité de l'automobile conjuguée et l'amélioration des moyens et des voies de communication. Il s’agit d’un processus d'extension spatiale de la ville.

Semences hybrides à seconde génération stérile : semences dont une modification génétique par croisement (hybridation) permet de rendre ses descendants stériles. La plante pourra pousser, mais ses graines ne pourront pas germer à leur tour. Cette technique rend impossible l’autonomie des agriculteurs en termes de reproduction de leurs systèmes de production*. Le processus d’hybridation est provoqué par l’homme.

Système agraire : concept d’analyse de l’agriculture qui la divise en plusieurs sous-systèmes (écosystème cultivé et son renouvellement, système social productif et son renouvellement, système d’élevage et son renouvellement, etc.) et qui étudie leur organisation, leur fonctionnement et leurs interactions.

Système alimentaire : Façon dont les hommes s'organisent pour produire, distribuer et consommer leur nourriture.

Système de production : concept d’analyse des exploitations agricoles qui les divisent en plusieurs sous-systèmes (production végétale et animale mais aussi production et utilisation des ressources) combinés de façon cohérente dans le temps et l’espace, et qui étudie leur organisation par les ménages, leur fonctionnement et leurs interactions.

Taux d’urbanisation : Le taux d'urbanisation est la proportion de personnes vivant en ville, C'est le pourcentage d'habitants en zone urbaine par rapport au reste de la population.

Tenure : au Moyen-âge, terre donnée par le seigneur pour la culture.

Terre arable : terre dont le sol est propice à la culture.

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Glossaire - 4

Toiture verte intensive/extensive : une toiture verte extensive est une plantation qu’on ne veut pas entretenir (arrosage, coupe, etc.), et généralement composée d’herbacées. La toiture verte intensive est entretenue et sert généralement de décoration voir de terrasse, permet de déambuler entre les plantes, qui peuvent être des arbustes.

Tubercules : organe végétal de réserve, généralement souterrain, qui assure la survie des plantes pendant la saison d'hiver ou en période de sécheresse. Certaines sont comestibles, comme les pommes de terre, le topinambour ou l’oca.

Urbanisme agricole : urbanisme qui promeut la mise en place d’un système alimentaire* complet dans les processus de planification urbaine.

Vermicompostage : technique de compostage* par des vers de terre.

Vivace : plante pérenne, dont les racines et le tronc restent en terre plus d’une année.

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« J’ai toujours cru en l’idée que celui ou celle qui sème les utopies récolte les réalités » Carlo Petrini (Fondateur et président du mouvement Slow Food)

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Préface - 6

1. PRÉFACE 

Le phénomène urbain apparait aujourd’hui comme majeur aux yeux de ceux qui analysent les interactions entre population, environnement et développement, à l’échelle de la planète ou d’unités géographiques plus restreintes (Véron, 2006). L’urbaniste étudie ce phénomène urbain, et combine l’art, la science et la technique pour gérer l'aménagement des agglomérations humaines. Un ensemble d’outils urbanistiques, règles et mesures juridiques permettent aux pouvoirs publics de contrôler l'affectation et l'utilisation des sols, de pratiquer l’urbanisme (Larousse, 2011).

L’ingénierie quant à elle est l’étude d'un projet sous tous ses aspects et nécessite un travail de synthèse coordonnant les travaux de plusieurs types de spécialistes (Larousse, 2011). Le bio-ingénieur est l’ingénieur du vivant. Il étudie des projets et sujets vivants, analyse la production agricole et animale, et gère leur implantation sur un territoire.

Ayant suivi ces deux formations avec intérêt, je désirais réaliser un mémoire qui les fassent interagir et se compléter. Le sujet proposé « Ville-jardin du XXIème siècle, Archiborescence ; analyse et propositions » m’a donc directement attiré. C’est suite à ma rencontre avec l’architecte belge Luc Schuiten, concepteur de l’Archiborescence, qu’un souci est né de faire un pas réaliste vers l’utopie. Je me suis alors légèrement écartée du sujet, afin de lier véritablement l’agronomie et l’urbanisme : l’utopie d’une production agricole significative en ville m’a fait opter pour le titre « Urbanisme agricole et agriculture de récupération de surfaces. Une hypothèse réaliste ».

Dans ce mémoire, en plus de représenter la culture de légumes et l’élevage urbains et collectifs, j’élargis cette conception actuelle de l’agriculture urbaine à toute production agricole urbaine, qu’elle soit céréalière, maraichère, animalière, par des professionnels ou des amateurs. L’urbanisme agricole quant à lui promeut la mise en place d’un système alimentaire complet dans les processus de planification. Il s’agit donc d’y intégrer la production agricole, mais également sa transformation, sa distribution, sa vente, et la gestion des déchets verts. Le réseau d’approvisionnement ne peut cependant pas être exclusivement local car il aurait un effet d’isolement et pourrait être instable. Il s’agit plutôt de faire autant qu’on peut, où on le peut. Pour ce faire, j’ai tenté d’imaginer un projet de récupération des surfaces urbaines inutilisées dans un but de production agricole par des professionnels. Malgré mon objectif de ne pas fixer ce projet à une ville particulière, la réflexion que j’ai menée se base sur des caractéristiques urbaines, politiques, environnementales des villes européennes et plus particulièrement sur la ville de Bruxelles.

Un objectif de l’urbanisme agricole est un changement profond dans le fonctionnement des sociétés actuelles, en réponse à la crise que nous traversons. Dans ce cadre, le projet présenté ici est vu comme une hypothèse réaliste, pragmatique, qui s’insère dans le tissu sociétal actuel, tout en gardant une vision utopique à plus long terme. Une partie de cette vision est de créer un environnement urbain qui rapproche la population urbaine de ses racines, du système agricole, en restant situé dans les centres urbains. L’objectif de ce mémoire n’est cependant pas d’appliquer concrètement le projet : puisque réfléchir à un problème est déjà progresser, le but en soi n’est pas l’aboutissement du projet mais le développement d’idées qui le feraient évoluer. Cette démarche justifie les incertitudes et imprécisions rencontrées dans ce mémoire.

Après un bref historique de l’évolution parallèle de l’agriculture et des villes, je fais le point sur la situation actuelle du système alimentaire, de l’urbanisation et de

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Préface - 7

l’environnement. Cette situation de crise favorise le développement de mouvements alternatifs dont la permaculture, les villes en transition, la décroissance et les utopies urbaines, qui sont abordées plus en détail dans ce travail. L’idée de relocalisation y est générale, et l’agriculture urbaine fait partie intégrante de ces mouvements. Elle est un sujet actuel, et les différentes visions relatives à son implantation sont ensuite expliquées. Mais ces visions actuelles ont des limites, qui pourraient être évitées par un projet de récupération des surfaces urbaines inutilisées. Après de brefs calculs pour s’assurer du caractère raisonnable de ce projet, une réflexion est apportée sur différents aspects pour sa concrétisation : questions techniques relatives aux surfaces, à la production, aux pollutions et aux intrants, questions économiques, impacts sur l’environnement et sur la ville et freins au développement du projet. Cette analyse me permet de formuler quelques propositions pour faciliter l’implantation à moyen terme d’une telle agriculture urbaine. Pour conclure, je rappelle qu’il ne faut pas voir ce genre de projet comme la solution mais bien comme une solution parmi d’autres, et qu’il ne faut pas oublier l’aspect social des potagers urbains, ni leur aspect économique pour les familles défavorisées.

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Origine et évolution de l’agriculture et des villes - 8

2. ORIGINE  ET  ÉVOLUTION  DE  L’AGRICULTURE  ET  DES  VILLES 

Dans leur livre Histoire des agricultures du monde (2002), Mazoyer et Roudart analysent l’évolution historique de nos sociétés en gardant un œil sur l’évolution des systèmes agraires*. Ils font à juste titre remarquer que les grands changements sociétaux ont eu lieu simultanément aux révolutions agricoles : lorsque la production agricole d’un système agraire devient trop faible par rapport à la population qu’il a permis de générer, la société et le système agraire doivent évoluer. L’essor démographique qui a eu lieu à une époque est donc une cause mais également une conséquence du développement agricole simultané. Les auteurs distinguent plusieurs étapes au cours de l’histoire, que je m’efforcerai, dans les paragraphes suivants, de relier à l’évolution des villes.

2.1 RÉVOLUTION  AGRICOLE  DU  NÉOLITHIQUE  

La révolution agricole du Néolithique se déroule entre 8500 et 8000 av. JC au Moyen-Orient : les hommes, jusque là nomades, se sédentarisent et se mettent à cultiver. Les vallées du Nil, du Tigre et de l’Euphrate, zone du « croissant fertile », connaissent un développement rapide de l’agriculture, de par la qualité de leurs terres arables* : elles permettront deux récoltes par an. 1500 années plus tard, de premières exploitations agricoles apparaissent dans d’autres foyers : Pérou, Mexique, Inde et Chine (Bertin, 2008).

Sans la révolution du néolithique, l’urbanisation aurait été impossible. En effet, l’invention de l’agriculture était une condition préalable au développement des villes : l’augmentation de la production alimentaire par unité de surface a permis de dégager un surplus échangeable (offre), et un accroissement des densités de population (demande). Grâce au surplus produit, la proportion d’agriculteurs peut diminuer et laisser place à une population spécialisée : la nécessité de stocker les excédents et d’organiser le stockage a permis à l’artisanat, à la protection, au commerce, etc. de devenir des métiers permanents (Véron, 2006). Par définition, la ville n’est donc pas autosuffisante.

Cependant, les villes ne se développent pas encore au Néolithique : les rendements agricoles étant encore trop bas, il s’agit plutôt de cités préurbaines, ou proto-urbanisations. Ces premières formes d’urbanisation se sont développées dans les régions les plus chaudes, à cause du problème de l’énergie (chauffage) : la proto-urbanisation de Jéricho, une des premières, se situe en actuelle Cisjordanie (Leblicq, 2011). Les critères de définition d’une urbanisation sont alors bien différents des « normes » actuelles : matérialisation d’une fermeture de la ville, taille et densité du peuplement (Jéricho comptait entre 1000 et 2000 habitants), structure urbaine de l’habitat (maisons en dur, rues, …), durabilité de l’agglomération (en opposition au campement) et spécialisation des tâches (Véron, 2006).

En s’étendant, le système agricole s’adapte aux caractéristiques de climat et de morphologie des lieux. En Europe, au vu de la densité des forêts, il s’agit d’un système

Image 2-1: Diffusion de l'agriculture à partir du foyer mésopotamien (source : mac125.com)

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Origine et évolution de l’agriculture et des villes - 9

de culture sur abattis-brûlis : une parcelle de forêt est coupée puis brûlée, cultivée pendant 3 ans, et puis laissée en jachère* pendant 50 ans. Cependant, avec la création de surplus, l’accroissement de population et le développement de petites villes, le système ne devient plus assez productif. La jachère se raccourcit jusqu’à 5 ans, ce qui ne permet que la régénération d’une savane, beaucoup moins fertile qu’un sol forestier. Le système agraire ne convient plus. Par ailleurs, la spécialisation des tâches a permis l’invention de nouveaux outils, comme l’attelage.

2.2 RÉVOLUTION  AGRICOLE  DE  L’ANTIQUITÉ 

Entre 3500 et 3000 av. JC. a lieu la révolution agricole de l’antiquité, passage de ce système essoufflé au système de culture à attelage* léger avec jachère et élevage associé. Il s’agit de cultiver une parcelle pendant 3 ans puis de la laisser en jachère pendant 2 ans, et d’y faire pâturer le petit bétail. La fertilité est apportée au sol via la minéralisation de leurs excréments. Afin de permettre le mouvement du bétail sur les jachères, les champs étaient ouverts et le travail collectif.

Cette évolution permet le développement de villes comptant jusqu’à 20.000 habitants, comme la cité sumérienne de Our. En -3000, on compte 1 à 2 millions de citadins pour 40 à 70 millions d’habitants dans le monde (Véron, 2006). Lewis Mumford (1964) affirme que l’accroissement de la population a été un facteur d’urbanisation, mais sans être le seul : la croissance démographique ne suffit pas à transformer un village en ville, il faut que les hommes en viennent à dépasser un stade de simple survie. Dans ces villes, on retrouve en effet un artisanat mais également des formes d’organisations socio-économiques et politiques très élaborées, une activité industrielle (mines), et donc une mentalité spécifiquement urbaine. On observe la naissance des marchés et le développement de la fonction commerciale. Les différentes fonctions devant cohabiter, elles s’organisent et se hiérarchisent (Leblicq, 2011).

C’est l’époque des cités-états mésopotamiennes, phéniciennes, étrusques et italiennes (de -3000 à -1000), puis des cités-empires comme Babylone et des villes en paix faisant partie d’un vaste Etat comme en Egypte. Par la suite se développent des cités-états grecques, qui sont composées de la ville mais également de la campagne avoisinante, les citoyens de ces milieux ayant, en théorie, des droits égaux. Le peu de terres arables est cultivé avec soin, ce qui permet à la Grèce de se suffire à elle-même pendant longtemps. L’augmentation de la population associée au développement agricole impliquera ensuite une augmentation du volume des importations, et donc la création de colonies agricoles et commerciales. Athènes constitue le centre industriel principal, et exporte ses productions grâce au port du Pirée. Parallèlement, Rome est une ville parasite : les échanges entre la ville et la campagne sont déséquilibrés. Rome ne rend pas de services aux provinces (peu d’exportation de produits manufacturés), et le système de distribution de pain et céréales renforce le déséquilibre : 90% des céréales de la ville sont importées des greniers, en Afrique du Nord (Leblicq, 2011).

Au début du moyen âge, la ville occidentale est en péril : suite aux crises sociales et politiques du IIIe siècle, et les invasions du Ve, les citadins se regroupent derrière de nouveaux remparts construits à la hâte. On observe une rétraction du territoire des villes et une relocalisation des échanges (Hembise, 2009). Vers l’an 1000, on constate une évolution du paysage, puisque les seigneuries se sont installées dans toute l’Europe occidentale. Les paysans sont installés sur des tenures* et regroupés dans des villages. Certains artisans seront également attirés par les avantages offerts sur les terres seigneuriales (Leblicq, 2011). Malgré l’évolution dans le temps, le système d’attelage léger ne permet qu’une agriculture de subsistance pour une population grandissante. Cependant, vers le XIIe siècle, l’industrie permet l’apparition d’outils tels que le moulin, la herse, la houe, l’araire et la charrue.

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Origine et évolution de l’agriculture et des villes - 10

2.3 RÉVOLUTION  AGRICOLE  DU  MOYEN‐ÂGE 

La révolution agricole du Moyen-âge est alors le passage à un système de culture attelée lourde avec jachère et élevage associé. Le système de fertilisation est identique au précédent, l’évolution ne provenant que de l’amélioration de l’outillage. Cette révolution permet, en plus d’une augmentation de la population, un essor urbain, culturel et économique de grande ampleur.

La ville du Moyen-âge est un terrain propice au développement et à l’organisation des métiers : on voit fleurir des corporations regroupant les fonctions par quartiers. Les villes restent néanmoins unitaires grâce à de nouvelles enceintes plus larges englobant les différents quartiers (Hembise, 2009). Le travail prend des formes très précises et très spécialisées en ville, tandis qu’il garde un format plus traditionnel dans les campagnes (maréchal-ferrant, meunier, potier,…). La grande majorité de la population est rurale et agricole. Les quelques artisans présents dans les villages doivent répondre aux besoins quotidiens de la population. Beaucoup de paysans pratiquent eux-mêmes la transformation de la matière première (Leblicq, 2011).

Pendant la Renaissance, les villes ne sont pas agrandies : avec la séparation des métiers manuels et intellectuels, la naissance de l’humanisme et de l’individualisme, l’architecture est devenue un art libéral, on rêve de cités idéales, de plans réguliers et de perspectives, allant de pair avec le développement de la vitesse (calèches) (Blanquart, 1997). Les constructions se font sur de nouveaux espaces, laissant les centres médiévaux devenir insalubres. L’agriculture quant à elle n’a que très peu évolué durant cette période et les disettes étaient fréquentes.

Le Sud de l’Europe fait preuve d’une urbanisation plus précoce que celle des pays scandinaves. L’essor démographique à cette époque est impressionnant, la population double entre le XIe et le XVIIIe siècle : en 1700, on compte un demi-milliard d’humains sur terre, dont 60 à 80 millions sont des citadins (Véron, 2006).

2.4 PREMIÈRE  RÉVOLUTION  AGRICOLE  DES  TEMPS  MODERNES  ET  RÉVOLUTION  

INDUSTRIELLE  

Au 18ème siècle, le surpeuplement impose une nouvelle évolution des systèmes agraires : la première révolution agricole des temps modernes est le passage à un système de culture attelée lourde sans jachère : au lieu de pâturer sur les terrains en jachère, le bétail est gardé à l’étable, et la fertilité est apportée au sol par épandage du fumier* récolté.

Petit à petit, on voit se développer les usines, l’économie de marché, et la propriété privée : c’est la révolution industrielle qui débute en Angleterre et conquiert ensuite l’Europe. Le changement de mentalité qu’elle implique (individualisme), l’accès à la propriété privée et l’absence de jachère, favorisent l’enclosure, pose de clôture autour des champs. Parallèlement, le développement de l’outillage et la mécanisation de la traction animale permet de doubler la productivité par unité de travail : le besoin en main d’œuvre agricole diminue fortement. On constate alors un exode rural important des paysans sans terre, qui deviendront les premiers ouvriers. Ainsi, le développement agricole soutient l’industrialisation. Avec le développement de l’industrie, de nouvelles classes sociales apparaissent, et le concept de richesse évolue : la richesse foncière n’est plus la seule vraie richesse (Hembise, 2009).

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La fin du 18ème siècle amène l’invention de la machine à vapeur, et avec elle la fin de milliers d’années de « tyrannie des transports »1 (Leblicq, 2011). Quelques machines (batteuse, faucheuse, etc.) favorisent encore la productivité. Mais cette mécanisation de la culture et la révolution des transports amènent la première crise mondiale de surproduction alimentaire : la production de masse provenant des terres fertiles (Amérique, Inde, Russie, etc.) pût être acheminée par train ou bateau. Les grandes puissances européennes, devenues adeptes du libre échange, se positionnent différemment face à cette crise : protectionnisme, soutien à l’exportation, etc.

L’amélioration générale de l’hygiène et des conditions de vie, couplée à l’augmentation de la production agricole permettent une augmentation démographique fulgurante : la population mondiale atteint le milliard d’habitants entre 1800 et 1850. En Europe, les villes absorbent la grande majorité de cet essor en s’agrandissant et se densifiant. Les besoins augmentent, ce qui favorise l’industrialisation.

L’invention du moteur au début du 19ème siècle bouleverse également la société :

La productivité agricole est encore augmentée, et les premiers engrais chimiques apparaissent avec l'avènement de l'industrie chimique, charbonnière et pétrolière. La population agricole cesse alors de croître (Mazoyer et Roudart, 2002)

La ville change progressivement de morphologie pour faire place à l’automobile. Blanquart (1997) constate deux phénomènes en ville : d’une part l’implosion des centres historiques par densification du tissu médiéval, et d’autre part l’explosion des agglomérations hors des murailles (cités minières et industries en périphérie qui sont ensuite annexées). Des grands travaux sont rendus possibles grâce aux machines : l’Haussmannisation a lieu dans de nombreuses villes européennes durant la deuxième moitié du 19ème siècle, et a pour but la résolution de problèmes d’ordre hygiénique. Peu avant cette époque (travaux sous l’impulsion du roi Léopold II), on voit encore des vaches et des cultures dans l’enceinte de Bruxelles.

Avec le temps, l’évolution des villes et celles des campagnes se séparent :

Les villes restent un haut lieu d’innovation et de diffusion des techniques. Leur taille s’accroit : en 1900, huit villes abritent déjà entre 1 et 5 millions d’habitants. En 1950, la population européenne est majoritairement urbaine (Véron, 2006). Le développement urbain est encore plus prononcé aux Etats-Unis : entre 1800 et 1950, le taux d’urbanisation* passe de 5 à 57%.

L’agriculture quant à elle commence à être confrontée aux rendements décroissants des terres.

1 Les transports et leurs coûts jouent un rôle majeur dans l’implantation et l’évolution des cités. Au départ, le transport se fait à dos d’homme : la capacité maximale d’un homme par jour est de 30 kg sur 35 km. Mais comme il doit manger 1 kg tous les 15 km, ce transport n’est rentable que pour des courtes distances. Par la suite, le transport se fait à dos d’animaux. La capacité maximale d’un cheval par jour est de 90 kg sur 20 à 40 km, et il mange des plantes ou de l’herbe sur le bord de la route. Par la suite, avec l’invention de la roue, le transport en Europe occidentale est révolutionné (en Orient, le chameau est préféré puisqu’il consomme peu, peut se déplacer dans le sable et nécessite peu d’accompagnement). Le transport fluvial va néanmoins être préféré au transport terrestre jusqu’à l’invention du chemin de fer. Grâce à l’invention de la machine à vapeur (train, mais aussi bateau à vapeur), des charges beaucoup plus lourdes qu’auparavant peuvent être transportées sur de plus longues distances. C’est avec cette invention que va s’achever la « tyrannie des transports ».

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2.5 SECONDE  RÉVOLUTION  AGRICOLE  DES  TEMPS  MODERNES  :  LA  RÉVOLUTION  

VERTE  

Au milieu du XXe siècle se déroule la deuxième révolution agricole des temps modernes : notre capacité à extraire l'énergie, notamment le pétrole, a permis l’incroyable essor actuel de nos sociétés (Manière de voir, 2011). Pour les pays et les exploitations qui peuvent se le permettre (principalement Europe de l’Ouest et Etats-Unis), la révolution verte amène un accroissement phénoménal des rendements agricoles : intensification des pratiques agricoles, sélection de variétés céréalières à fort rendement potentiel (riz, maïs, blé, soja) mais exigeantes en intrants*, et donc large utilisation d’amendements inorganiques (engrais et pesticides chimiques). L’agriculture se spécialise : l’utilisation d’engrais et de machines spécifiques favorisent la monoculture. La production agricole se voit multipliée et permet un essor démographique jamais égalé. Le monde entre dans l’ère des mégapoles (Véron, 2006).

La diminution du prix des transports (avion) et l’économie de marché favorisent la mondialisation de la concurrence agricole, alors que le potentiel de productivité est très différent selon la région (fertilité du sol, mécanisation, subventions, etc.). Les prix mondiaux sont alignés sur les excédents des grands producteurs, chutent, et favorisent l’exode rural dans les pays moins développés ou moins subventionnés (Mazoyer et Roudart, 2006). Or, la diminution de l’emploi agricole y est généralement supérieure à la création d’emploi dans les autres secteurs économiques, et le chômage et la pauvreté se généralisent.

Le secteur de l’agriculture voit son importance démographique diminuer en flèche (2% de la population active en Belgique), tout en restant le plus grand gestionnaire de l’espace et le premier maillon de l’alimentation. De plus, il devient difficile d’articuler les temps longs qu’impliquent le travail sur le terroir et le vivant, dans une société contemporaine de plus en plus pressée (Baret, 2008). En Belgique, le premier magasin à rayons multiples ouvre à Flagey en 1957, vendant des produits provenant de toute l’Europe, voir plus loin (Lauwens, 2010). Comme de nombreux pays favorisent le soutien à l’exportation, il devient courant d’importer et d’exporter les mêmes produits. La séparation entre la ville et sa campagne est presque totale. Les publicitaires l’ont bien compris et exploitent d’ailleurs la vision idéalisée et nostalgique de l’agriculture.

En outre, ce mode de production intensif n’a pas rempli ses objectifs louables de diminution de la faim, mais au contraire a creusé un fossé dans les revenus mondiaux. Il a également commencé à engendrer une dégradation généralisée des écosystèmes : les conséquences les plus visibles sont l’érosion des sols, la désertification et la pollution des eaux (Griffon, 2006).

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3. SITUATION  ACTUELLE 

La ville a pu se développer grâce aux surplus produits par l’agriculture, qui elle-même a permis le développement d’innovations technologiques telles que les outils, les machines motorisées et les fertilisants. Leurs histoires sont liées depuis leur origine, mais ce lien semble s’être rompu avec la mondialisation des échanges. Les paragraphes qui suivent font le point sur la situation actuelle des villes, de l’environnement et de l’agriculture.

3.1 VILLES  

Actuellement, les échanges mondiaux de biens, de services et de capitaux se font principalement entre villes, reliées les unes aux autres par de multiples réseaux matériels et immatériels. Ces opportunités d’enrichissement sont une des raisons de l’attraction continue qu’exercent les centres urbains sur le monde rural (Regards sur la terre, 2010). Le gonflement urbain est un phénomène qui a récemment repris vigueur : selon l’ONU, le point de bascule a été franchi en 2008, où plus de la moitié de l’humanité vivait en ville. Et cette tendance devrait s’accélérer : alors qu’en 1950 la population urbaine représentait seulement 30% de la population mondiale, les prévisions annoncent 60% de citadins en 2030 (de Saint-Exupéry, 2010). Par ailleurs, à cette date, les pays en développement abriteront 80% des citadins de la planète. Certains parlent d’une nouvelle révolution urbaine : celle des « inflations urbaines » des pays du sud (Véron, 2006).

Le nombre de villes importantes augmente de manière spectaculaire : en 1800, il n’existait qu’une ville de plus d’un million d’habitants, déjà 16 en 1900, et on en comptait près de 400 en l’an 2000. En outre, l’augmentation de leur taille est également impressionnante : une dizaine de villes de par le monde comptent plus de 20 millions d’habitants (Manière de voir, 2011).

Image 3-1: Carte de l'évolution des agglomérations du monde : 1950, 2010 et projections 2025 (source: Manière de voir le monde)

En 1977, Paul Bairoch a tenté de chiffrer la taille optimale des villes. Selon lui, la population d’une ville ne devrait pas dépasser les 600.000 habitants pour que l’avantage économique résultant de sa croissance reste supérieur aux inconvénients et contraintes qu’elle entraine. Il voulait ainsi attirer l’attention sur les externalités négatives de la croissance continue des villes. Et en effet, elles sont aujourd’hui bien présentes :

On assiste à une augmentation paradoxale de la ville illégale : malgré une augmentation des bidonvilles en absolu, la proportion de la population des taudis à

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diminué par rapport à la population urbaine totale (Manière de voir, 2011). L’insertion urbaine des migrants s’avère en effet compliquée et se décline sous plusieurs formes sur tous les continents : bidonvilles en Asie et Afrique, favellas au Brésil, banlieues à Paris et ghettos aux USA. De ce fait, l’urbanisation n’est plus toujours liée au développement. Certains vont jusqu’à qualifier l’urbanisation « d’inflation urbaine » (Véron, 2006).

La ville favorise le développement d’épidémies et la propagation des maladies contagieuses, de par sa forte concentration humaine.

L’essor urbain favorise la consommation du foncier, en proie à la spéculation.

L’augmentation démographique en ville fait augmenter les besoins en nourriture pour une main d’œuvre de moins en moins importante en milieu rural.

Un effet de l’urbanisation galopante est la marginalisation du monde naturel (végétation saisonnière, etc.) et l’augmentation de la distance (réelle et symbolique) avec la production agricole. La périurbanisation est une tendance actuelle qui grignote le territoire agricole petit à petit. Ce développement urbain peu dense pose des problèmes de trafic pendulaire vers des centres fonctionnels mais peu vivants, de développement d’infrastructures sociales (équipements) et techniques (routes), etc. De plus, le monde rural voit son empreinte se réduire et de nouveaux rurbains* se plaindre des conditions de vie (odeur, bruits, crasses, etc.). La rurbanisation ne me semble pas être une symbiose entre les urbains et les ruraux.

L’expansion urbaine tentaculaire, les constructions industrielles et la création de routes, d’autoroutes et de parkings grignotent les terres cultivables et ralentissent la croissance de la production agricole mondiale.

Les villes sont extrêmement fragiles car elles ne possèdent pas l’ombre d’une autosuffisance alimentaire. Selon certaines expériences, en cas de grève, de catastrophe ou de guerre, les villes n’ont que quelques jours d’autonomie avant la famine (The Guardian, 2000). Les villes sont en fait terriblement dépendantes des énergies fossiles, pour leur fonctionnement, le transport, l’apport de nourriture, l’éclairage, etc.

L’impact environnemental est proportionnel à l’ampleur du phénomène d’urbanisation : les villes sont responsables de 75% des gaz à effet de serre* et consomment 75% de l’énergie mondiale. Ces chiffres élevés sont dus au fait que villes accueillent la moitié de la population mondiale et la plupart des activités économiques. De plus, l’urbanisation a toujours reproduit le modèle d’expansion des villes des pays industrialisés. Ce modèle est avide de ressources et est façonné par le développement du transport automobile et un prix de l’énergie faible depuis une cinquantaine d’année. (Regard sur la terre, 2010).

Cependant, les ressources naturelles et financières de ce type de modèle n’existent plus en quantité suffisantes pour soutenir cette trajectoire. Dans les années à venir se produira une rupture profonde en termes de transport, d’investissement, d’alimentation, d’habitat, etc. Elle peut être interprétée comme une menace pour la société mais également comme une opportunité pour de nouvelles voies de développement urbain. Les villes du monde sont déjà rentrées dans cet état de « crise », car les limites du modèle ont trop souvent été atteintes. En outre, les villes devront faire face et doivent déjà s’adapter aux impacts attendus de la modification mondiale du climat : montée des eaux, vagues de chaleur, inondations, tempête, sécheresse et donc arrivée de migrants climatiques.

Seule l’intégration des objectifs climatiques et énergétiques au cœur de l’ensemble des politiques urbaines est susceptible de peser réellement sur le développement des

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villes. Par exemple, il est possible de lutter contre l’étalement urbain, en évitant l’erreur de la décroissance du coût du foncier avec l’éloignement au centre. Or, plus la densité d’une ville est élevée, plus elle peut espérer réaliser des économies d’échelle et intensifier son utilisation de l’énergie. (Véron, 2006).

Les villes actuelles sont face à un défi, car pour une mise en pratique du développement durable d’une ville, une évolution profonde dans les modes de vie des habitants des villes est nécessaire : maintien du lien social, amélioration de l’environnement urbain, préservation de l’environnement global et conciliation entre respect du patrimoine et modernité. Certains restent perplexes, se demandant si les villes seront viables/durables à long terme, et imaginant un crash urbain suite au pic pétrolier mondial, dû à la dépendance extérieure des villes. On peut alors penser dès aujourd’hui à la possibilité de recréer des liens entre ville et campagne en imaginant des perspectives d’exodes urbains avant cet effondrement, mais aussi à une autonomisation des villes, notamment au point de vue alimentaire. Ces réflexions permettraient d’éviter des crises aigües, bien pires que les émeutes de la faim de 20072.

3.2 SYSTÈME  AGRO‐ALIMENTAIRE 

3.2.1 IMPACTS  SUR  L’ENVIRONNEMENT  

Malgré l’explosion démographique sans précédent de la seconde moitié du XXe siècle, la révolution verte a rendu possible une augmentation plus rapide de la production alimentaire mondiale (Mazoyer et Roudart, 2002). Or, les données existantes montrent que l'intensification des modes de production agricole et l'allongement des circuits de production et de distribution ont été accompagnés d'une augmentation des pressions environnementales (OBCD, 2009).

En effet, par exemple, l’agriculture est responsable d’une stérilisation constante des sols car elle favorise son lessivage. Ainsi, le désert gagne chaque année 1,5 millions d’hectares par an, entre autre à cause de l’agriculture (Chevassus-au Louis et al., 2009). Par ailleurs, l’agriculture moderne utilise 70% de l’eau potable disponible sur terre. Le pompage d’eau pour les cultures excède la reformation naturelle des nappes phréatiques d’au moins 160 milliards de mètres cubes par an (UNESCO, 2011). La production agricole est également la plus grande source de pollution des eaux au monde. En effet, suite à la révolution verte, l’emploi d’engrais et pesticides chimiques, créés à partir de pétrole, s’est généralisé. (voir Histoire, p.8). En plus de favoriser la dépendance pétrolière du secteur agricole, ils se retrouvent dans les eaux souterraines, les eaux de pluie, les plantes, les animaux, les sols, l'air, les aliments, et les réserves en eau potable (OBCD, 2006). Certains de ces pesticides ont été scientifiquement mis en cause dans le développement de cancers, d’autres perturbent le fonctionnement hormonal. On observe d’ailleurs une incidence plus élevée de certaines formes de cancers dans la population agricole comparativement à la population générale (Saporta, 2011).

L’industrie alimentaire est, en outre, très sensible aux changements climatiques, puisque l’agriculture dépend des cycles climatiques naturels et prévisibles (Church, 2005). Ironiquement, le système agro-alimentaire est l’un des plus gros

2 Suite à une forte hausse du prix des denrées alimentaires de base en 2007-2008, quelques unes des régions les plus pauvres du monde (principalement en Asie et Afrique) sont entrées dans un état de crise, causant une instabilité politique et des émeutes

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consommateurs d’énergies fossiles et un gros producteurs de GES*, qui favorisent ces changements climatiques :

La dépendance de l’alimentation au pétrole est claire et due à tous les stades de production : plantation, irrigation, entretien, récolte, mais aussi transformation, distribution, emballage et stockage des produits alimentaires. Cette dépendance a été démontrée en été 2000 lors de protestations dans les raffineries et dépôts de distribution de pétrole en Angleterre : la crise du pétrole a interrompu la distribution alimentaire, et les gérants ont vu leurs stocks se vider en quelques jours (The Guardian, 2000).

Le méthane, gaz à effet de serre très puissant est produit en grandes quantités l’élevage de bétail, de par le fonctionnement de leur système digestif (ruminants). La consommation de viande (principalement en occident) et de produits d’origine animale est donc mise en cause par des groupes tels que la FAO.

Selon l'agronome Claude Bourguignon, « par le gaz carbonique qu'elle rejette, l'agriculture intensive mondiale contribue pour un tiers au réchauffement de la planète ». Les sources de dioxyde de carbone du système agro-alimentaire sont bien sûr l’utilisation de machines, la fabrication des engrais et pesticides, la culture de l’alimentation du bétail, la culture en serres, mais également la conservation (chaine du froid), l’emballage et le transport.

En effet, « ces dernières décennies, l'éventail de produits alimentaires offerts sur le marché s'est considérablement élargi : à une offre de denrées alimentaires, limitée, produite localement et variant avec les saisons, s'est substituée une offre très diversifiée d'aliments produits et transformés aux quatre coins du monde, arrivant dans nos assiettes après des circuits longs et complexes, et de manière constante tout au long de l'année » (OBCD, 2009). Les consommateurs se sont adaptés à cette évolution des marchés et les modes alimentaires se sont profondément modifiés. Pour que ces denrées soient proposées en rayons, un système de transport extrêmement rapide et coordonné a été développé, impliquant différents modes de transport, selon la distance à parcourir et les caractéristiques du produit. Les aliments sont généralement transportés par camions et avion, très peu en bateau et train (moins rapides). A titre d’information, le Centre de Recherche et d’Information des Organisations de Consommateurs (CRIOC) affirme que le repas moyen d’un belge parcourt entre 16.000 et 61.000 kilomètres (OBCD, 2009).

Paradoxalement, la plupart des pays consomment des produits importés, que par ailleurs ils exportent eux-mêmes. Ce phénomène est favorisé par les subventions à l'exportation accordées par l’Etat et/ou la Communauté Européenne. De même, la mondialisation permet la délocalisation de certaines parties de la production, ce qui augmente la distance parcourue par les aliments : par exemple, les crevettes récoltées à la côte belge, sont transportées au Maroc pour être décortiquées et reviennent ensuite en Belgique pour être vendues.

Le transport de produits alimentaires sur de longues distances exige par ailleurs que ces produits se conservent bien, et obligent le recours à différentes

Image 3-2: Avec la mondialisation, l'offre alimentaire s'est considérablement élargie

(source: lesurvivaliste.blogspot.com)

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techniques de conservation: application d'additifs, irradiation, refroidissement... En plus des impacts environnementaux et sur la santé, ces techniques demandent un supplément d'énergie par rapport aux denrées produites localement. Parfois les produits sont cueillis avant qu'ils ne soient complètement mûrs. Arrivés à destination, leur maturité est achevée artificiellement, avec l'aide de substances chimiques. Les fruits et légumes de saison, c'est à dire "non forcés" et cueillis mûrs ont donc de nombreux avantages par rapport aux mêmes produits que l'on peut trouver toute l'année dans nos supermarchés.

Ces dix dernières années, on observe une baisse générale du rendement agricole. Ils sont évidemment liés aux impacts environnementaux de l’agriculture moderne :

Suite au travail intensif de la terre, les sols sont lessivés et perdent leur structure. La fertilité de ces sols épuisés est très réduite et ne permet pas une optimalisation du rendement agricole. De plus, par manque de structure, les besoins en eau augmentent, alors que les ressources s’épuisent.

On observe actuellement un épuisement des « gisements » de technologies inexploitées : certains agriculteurs utilisent déjà tous les moyens existants pour augmenter la productivité de leurs cultures,

Le rendement est très dépendant du climat, et donc des changements climatiques et catastrophes naturelles de plus en plus récurrentes (sécheresses ou canicules, inondations, etc.)

Actuellement, près de 80% des terres arables* sont utilisées dans le monde (Despommier citant la FAO). L’extension de l’agriculture sera donc rapidement limitée.

La plupart des agriculteurs ne cultivent qu’une espèce végétale par champs (monoculture). Malgré la facilité de la plantation et de la récolte, mécanisées, cette technique culturale est risquée en cas de maladies, de mauvais climat, etc.

Le développement des cultures nécessite une fécondation des fleurs par les insectes, pollinisation généralement exécutée par les abeilles. Alors qu’Albert Einstein annonçait que « si l’abeille disparaissait de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre », les firmes phytopharmaceutiques continuent à proposer aux agriculteurs des pesticides extrêmement nocifs pour cette espèce en déclin, qui est depuis peu classée comme espèce protégée.

3.2.2 SYSTÈME  ÉCONOMIQUE  MONDIAL  

Le système agro-alimentaire mondial est composé de sous systèmes régionaux relativement spécialisés, concurrents et très inégalement performants. Il se développe de manière contradictoire et divergente (Mazoyer et Roudart, 2002) :

d’un coté, un nombre réduit d’exploitations et de régions du monde accumulent toujours plus de capital, concentrent les cultures et les élevages les plus productifs et conquièrent sans cesse de nouvelles parts de marché ;

et de l’autre, des régions très étendues et la majorité de la paysannerie du monde s’enfoncent dans la crise et dans l’indigence, jusqu’à l’exclusion.

De ce fait, il est courant pour les pays en développement d’exporter des produits alimentaires vers l'Europe alors qu'une partie de leur propre population souffre de faim. Cette distorsion du système est à la base d’inégalités de revenus et donc de développement qui existent entre les pays. Si on veut sortir de la crise alimentaire et construire un monde de prospérité durable, il faut créer les conditions d’un réel développement de l’économie paysanne sous-équipée : seule une rémunération

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décente de tous les agriculteurs permettra d’encourager la nécessaire croissance de la production (Cullather, 2011).

Par ailleurs, alors que par le passé, la météo expliquait souvent les hausses de prix des matières premières, c’est aujourd’hui l’évolution du rapport entre l’offre et la demande qui fait la pluie et le beau temps (Lester Brown, 2011). Une régulation des marchés semble nécessaire car actuellement, la concentration du marché agricole permet aux industriels d’imposer leurs prix aux agriculteurs comme aux consommateurs (Reguly, 2011).

3.2.3 LE  CONSOMMATEUR,  UN  ACTEUR  À  PART  ENTIÈRE  

Le système alimentaire et le consommateur sont également en cause dans la crise que traverse l’agriculture moderne : si l'impact environnemental de l'alimentation est principalement lié aux étapes de la production et de la distribution, les consommateurs y contribuent largement par leurs choix (OBCD, 2009). Par le côté personnel de l’achat, manger est devenu un acte à dimension éthique et politique :

Ces dernières décennies, les habitudes alimentaires du consommateur européen se sont modifiées considérablement, à cause d’un bouleversement des marchés par la mondialisation mais également d’évolutions sociales et familiales (OBCD, 2009) : consommation de viande, de produits frais et exotiques, etc. Mais il reste possible pour les consommateurs de soutenir des modes de production et de distribution à moindre impact sur l'environnement : choix de fruits et légumes de saison, produits localement, issus de l'agriculture biologique ou intégrée. Malheureusement, dans bien des cas, le consommateur est dans l'incapacité de faire de tels choix car peu d’information est donnée sur l'origine du produit, le circuit parcouru et les modes de transport empruntés.

De même, pour faire les courses, les consommateurs prennent souvent leur voiture et se rendent dans les grands magasins en périphérie des villes. L'impact de ce transport ne peut pas être négligé car il représente une partie non négligeable des transports des aliments : en Belgique, un consommateur parcourt en moyenne 2.500 km par an pour aller faire ses courses (OBCD, 2009).

La standardisation des achats cause de nombreuses aberrations : puisqu’elle ne sera pas vendue si elle présente un coup, une pomme provenant de Nouvelle-Zélande sera jetée après 15.000 km de trajet. On compte au niveau mondial qu’un quart de la nourriture achetée est ainsi jetée par les réseaux de distribution, sans avoir été consommée. La standardisation des produits n’est pas seule en cause dans le gaspillage : chaque Bruxellois jette 15,2 kilo de nourriture non-consommée ou non-terminée par an (Van Caillie citant l’IBGE, 2010). Les courses se font moins souvent qu’avant puisqu’elles impliquent le déplacement jusqu’aux supermarchés moins chers mais plus lointains. Le consommateur achète alors pour plus longtemps, en plus grande quantité et moins frais, et devient en quelque sorte un entrepôt pour les chaines de supermarchés (Koc et Koc, 2000).

D’autre part, le budget consacré à l’alimentation représente jusqu’à 80% des revenus dans de nombreux pays africains. L’indice de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) relatif aux prix des aliments a atteint un record historique en début de cette année 2011 (Image

Image 3-3: Evolution de l'indice FAO des prix des produits alimentaires (source: FAO, 2011)

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3-3). Les problèmes liés à l’agriculture sont déjà importants en 2011 : prix du blé au Royaume-Uni, inflation excessive des prix de l’alimentation en Inde, etc. Après les émeutes de la faim qui ont secoué plusieurs villes africaine en 2007, les révoltes des populations nord-africaines en 2011 marquent le début d’une nouvelle période de revendications politiques, l’alimentation devenant une préoccupation majeure pour les pays en développement (Pollet, 2011).

3.2.4 UN  SYSTÈME  AGRO‐ALIMENTAIRE  EN  CRISE  

L’examen de la situation du système agro-alimentaire mondial montre que la progression de la production a été insuffisante et beaucoup trop inégale pour répondre aux besoins de tous.

Nous l’avons vu, ce système est

vulnérable : faible sécurité alimentaire, ultra-dépendance au pétrole, sensibilité aux changements climatiques auxquels elle contribue ;

inefficient : rendements faibles et utilisation énorme d’énergie fossile (on compte, selon Church (2005) 66 calories d’énergie nécessaires à la vente d’1 calorie de carotte)

non-durable : imports et exports d’un même produit, nombre de kilomètres parcourus entre le champ et la fourchette, grande production de CO2.

Malgré les risques et les difficultés, les ressources en terres et les techniques pourraient, pour certains, paraître suffisantes pour subvenir aux besoins de l’humanité croissante. La question reste alors de savoir à quelles conditions (écologiques, économiques et politiques) ces ressources peuvent être mobilisées pour y parvenir (conférence Mazoyer, 2010). Face aux enjeux environnementaux qui se posent à nos sociétés, il importe également de se poser des questions sur l'impact environnemental des choix alimentaires.

3.3 ENVIRONNEMENT    

La crise ressentie tant au niveau des systèmes agricoles qu’au niveau des villes est en fait une crise environnementale et sociétale généralisée. Les problématiques telles que le pic pétrolier et le réchauffement climatique ont des effets à l’échelle de la planète.

3.3.1 PIC  PÉTROLIER  

Depuis le début du XXe siècle, l’abondance du pétrole a permis d’accélérer le développement de la société industrielle alors basée sur le charbon. Depuis cette époque, la production de pétrole croît, et la société occidentale augmente sa complexité, sa mécanisation et sa consommation (Hopkins, 2008). Cependant, depuis une dizaine d’années, de nombreux pays ont atteint le pic de leurs réserves pétrolières. On appelle « pic pétrolier » le moment où la production de pétrole n’augmente plus, contrairement à la consommation. En effet, lors de la découverte d’une réserve pétrolière, le pétrole jaillit souvent naturellement de la poche souterraine, mais après quelque temps, de l’énergie est nécessaire pour l’extraction du pétrole brut. Il est cependant techniquement et financièrement impossible d’augmenter la production, qui se fait alors dépasser par la consommation croissante. Le pic pétrolier ne signifie donc pas la fin du pétrole, mais la fin du pétrole abondant et peu cher : lorsque l’offre ne satisfait plus la demande, les prix deviennent volatiles et augmentent car la société est en pénurie de pétrole (Image 3-4).

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De plus, avec le temps, l’énergie de production (extraction et raffinage) augmente puis dépasse l’énergie du produit en lui-même (besoin de plus d’un baril pour extraire un baril), et avant d’avoir extrait tout le pétrole d’une poche, la production s’arrête. Malgré les tentatives d’exploitations pétrolières en zones extrêmes (pôles, océans et eaux profondes), l’énergie auparavant abondante et bon marché devient de plus en plus rare. Comme nous l’avons vu (p.15), l’agriculture est une grande consommatrice d’énergie et doit revoir ses systèmes de production* (Pollet, 2011).

Image 3-4: Graphe illustrant le concept du pic pétrolier (source: Titeux et Vandeburie, 2009)

3.3.2 CHANGEMENTS  CLIMATIQUES  

Simultanément, depuis la fin du XXe siècle, les changements climatiques globaux font progressivement sentir leurs effets : multiplication d’épisodes extrêmes (sécheresse, inondations, violentes tempêtes, etc.), importantes migrations de population, espèces végétales en péril, agriculture industrielle bouleversée.

Ils sont en partie dû à l’accumulation des GES* dans l’atmosphère. Les principaux gaz concernés sont le méthane (CH4) et le dioxyde de carbone (CO2). Les principales sources d’émission de méthane d’origine humaine sont l’enfouissement des déchets (méthanisation des déchets organiques en décharge), l’exploitation de combustibles fossiles et l’élevage (GIEC, APE et AEE, 2011). La plus grande émission de CO2 est la combustion des matières fossiles, dans le secteur du transport, de la production d’électricité et de l’industrie. Le secteur du transport est composé des déplacements personnels et du transport de marchandise. En Belgique, 20% des émissions de CO2 sont générées par le transport routier (15 millions de tonnes en 2001). L'augmentation du trafic routier est également à l'origine de nuisances comme le bruit, la congestion du réseau, la dégradation des paysages, la destruction d'habitats naturels, les accidents. Le secteur industriel est quant à lui principalement affecté par les filières de production du papier et d’aliments (Image 3-5).

Le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Etude de l’évolution du Climat) a fixé pour objectif une réduction de 50% de nos émissions de CO2 d’ici

Image 3-5: Source des émissions de méthane (au dessus) et de dioxyde de carbone (en dessous) (source: votreimpact.org)

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2030 si nous voulons éviter le réchauffement de la planète de 2°C d’ici 2100. En plus de réduire nos émissions, il est possible de capter et stocker le dioxyde de carbone présent dans l’air grâce aux plantes. La déforestation sans reforestation, très pratiquée en Asie et Amérique du sud, est donc également une cause de l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère.

Un changement de température de quelques dixièmes de degrés aura déjà des impacts importants sur toute la société : on prévoit des pénuries généralisées de nourriture, d’eau et de terres arables d’ici 2025 (Archer, 2006), les épisodes extrêmes vécus ces dernières années se verront plus fréquents et plus intenses, les ressources en eau potables et la biodiversité seront réduites. Comme nous l’avons vu (p.15), la production agricole est très dépendante du climat.

3.3.3 SANTE  

Un effet de ces changements est la détérioration de la santé mondiale :

L'allergie est devenue un problème majeur de santé publique par l'importance de la population concernée (une personne sur quatre dans les pays industrialisés), par son impact sur la qualité de vie des personnes allergiques, et par son coût pour les malades et pour la société. Les causes possibles de l'augmentation des allergies sont par exemple la pollution croissante de l'habitat et la pollution atmosphérique. (Oasis-allergies, 2006)

Le modèle de développement ne rend pas les sociétés heureuses : en 2006, une étude de l'Association pharmaceutique belge (APB) montre que la consommation d'antidépresseurs est en constante augmentation en Belgique depuis près de dix ans, et que le taux de suicides est de 20 pour 100.000.

La combustion de diesel émet de fines particules qui polluent l'air et encrassent les poumons. Le « brouillard chimique » cause des problèmes de respiration chez les personnes âgées et les autres personnes sensibles.

Des substances générées par le fonctionnement des moteurs tels que le benzène et autres hydrocarbures augmentent les risques de cancers. De même, le lien entre les pesticides (alimentation mais aussi nappes phréatiques) et les cancers a été scientifiquement prouvé. Ils sont fréquents chez les personnes âgées mais également de plus en plus chez les enfants (Saporta, 2011).

Le déséquilibre nutritionnel actuel est responsable de l’explosion des maladies non transmissibles telles que l’obésité, le diabète, les risques cardio-vasculaires (Pollet, 2010) :

En occident, les classes sociales moins favorisées souffrent plus de l’obésité, car elles ont un accès aux calories bon marché. De plus, la consommation étant un signe de reconnaissance sociale, l’industrie alimentaire représente pour elles un accès à la société de consommation.

Dans les pays en développement, l’obésité est encore un signe de richesse et d’opulence, car de suffisance alimentaire.

Comme c’était le cas en Europe au début du 19ème siècle, l’abondance brutale de nourriture couplée au mode de vie sédentaire favorise l’obésité dans les pays émergents, en pleine transition nutritionnelle. L’inégalité est encore plus frappante entre les personnes souffrant de faim et d’obésité.

La prise en charge et les coûts de ces maladies sont plus élevés, pour le patient mais aussi pour la société, que ceux des maladies infectieuses classiques.

Répondre aux besoins alimentaires des populations urbaines (à l’échelle locale), en quantité et en qualité, reste donc un impératif universel. 

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3.4 UNE  SITUATION  QUI  POUSSE  AU  CHANGEMENT 

En analysant les déclins ou réussites de sociétés passées (île de Pâques, Mayas, Vikings, etc.), Jared Diamond (2006) a déterminé que la combinaison de cinq éléments contribuait à l’effondrement d’une société : les dommages environnementaux, le changement climatique, l’augmentation des agressions de voisins hostiles, un moindre soutien des partenaires commerciaux alliés et les réponses de la société à ses problèmes environnementaux. La société occidentale actuelle est selon lui en position de faiblesse puisqu’on observe déjà la diminution de la biodiversité et la déforestation (par exemple), un réchauffement de l’atmosphère et une dépendance au pétrole en provenance de pays instables.

Selon lui, « les civilisations meurent de suicide, pas d'assassinat » quand elles échouent à relever les défis de leur temps. En effet, les sociétés prospèrent ou déclinent selon leur capacité à anticiper le problème avant qu’il n’arrive, à remarquer quand le problème est réellement présent (en cas par exemple de tendances lentes), à essayer de résoudre le problème quand ils l’ont remarqué, et à le résoudre réellement. Un échec dans l’essai de résolution peut provenir :

d’un comportement rationnel : conflit d’intérêt car le maintien du problème est positifs pour certains ;

d’un comportement irrationnel, nuisible pour tout le monde : de trop fortes valeurs religieuses ou politiques par exemple (Diamond, 2006).

Selon Serge Latouche, pour le moment, les catastrophes ne sont encore que « pédagogiques » : elles ne détruisent pas l’espèce humaine mais réveillent l’humanité. Le monde actuel semble être dans cette situation de transition : une crise généralisée frappe les sociétés de plein fouet et les fait réagir. Comme le dit Cheikh Yamani, ancien ministre à l’OPEP*, « L’âge de la pierre ne s’est pas terminé en raison d’une pénurie de cailloux » : ce n’est pas parce que les ressources en pétrole ne sont pas épuisées que la société ne peut pas déjà évoluer.

En ce qui concerne les villes, il s’agit moins d’inventer un nouveau modèle urbain que d’encourager les initiatives qui permettent de concilier les aspirations/comportements avec les contraintes économiques de la mondialisation (Véron, 2006). La crise actuelle nous montre clairement que seule une approche globale conduira à des solutions durables.

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4. RÉPONSES  À  LA  CRISE  ACTUELLE 

Le concept du « développement durable » s’est développé face à ce genre de problématiques sociétales. Il apparait pour la première fois dans le rapport Our Common Future publié par l’ONU en 1987, sous la direction de Mme G.H. Brundtland. Il s’agit d’un mode de développement permettant de « satisfaire les besoins des générations présentes sans grever les possibilités des générations futures de satisfaire les leurs » (UNdocuments, 1987). Ce développement est basé sur 3 piliers : les préoccupations sociales, écologiques et économiques (Image 4-1), dans le temps et dans l’espace. Ce concept est à présent ancré dans la société occidentale, et dans les décisions de certains secteurs d’activité. La société est en train de s’écarter progressivement du modèle de développement économique extrême qu’elle a poursuivi jusqu’ici. De nombreuses réponses très diverses se sont déjà développées, petit à petit :

les agriculteurs pratiquent l’agriculture raisonnée/intégrée*, voire biologique, plus durables : respect de l’environnement, attention portée à la santé humaine et au bien-être des animaux.

le mouvement des « quartiers » : sans avoir de droits fondamentaux, les quartiers sont la nouvelle force urbaine dans le monde, car c’est d’eux qu’émanent de nouvelles formes de mobilisation (ex : contrats de quartier).

La permaculture, les « Transition towns », la décroissance et les utopies urbaines sont des mouvements moins connus qui tentent d’apporter des réponses par une approche globale de la crise actuelle.

4.1 PERMACULTURE  :  LES  CYCLES  NATURELS  REMIS  AU  GOUT  DU  JOUR  

Sans formuler le mot permaculture, l'agronome Américain Cyril G Hopkins a déjà utilisé l'expression « permanent agriculture » dans Soil Fertility and Permanent Agriculture en 1910. Le mot et concept « permaculture », compaction de ces deux mots, n’est pourtant véritablement « inventé » qu’en 1978, suite au premier choc pétrolier, par les australiens Bill Mollison et David Holmgren. Un écosystème naturel mature est largement plus productif que n’importe quel système humain de production de nourriture car son utilisation d’énergie, d’eau et de nutriments est beaucoup plus efficace que celle de l’agriculture (Whittaker, 1975). La permaculture s’est donc orientée vers la recherche de la mise en place d’agro-écosystèmes productifs s’inspirant du fonctionnement des écosystèmes naturels

Image 4-2: Spirale d’abondance, « logo » de la permaculture (source: Mollison, 1997)

Image 4-1: Les 3 piliers du développement durable : écologique, économique et social (source: auteur)

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(Image 4-2). L'efficacité énergétique est toujours recherchée, par exemple en évitant un travail inutile, en faisant d'un déchet une ressource, en valorisant les services "gratuits" rendus par les écosystèmes, ou encore en réduisant les consommations et les déplacements. En agriculture, produire selon les concepts de la permaculture signifie alors construire des systèmes agricoles productifs, locaux, durables et autosuffisants, en interconnectant les plantes, animaux et humains de manière réfléchie. Le but est d’obtenir un écosystème qui produit naturellement suffisamment pour ne pas devoir le surexploiter. Ce principe est applicable à toute taille d’exploitation en milieu rural (fermes mais aussi jardins), et permet théoriquement de se consacrer à une activité non-agricole pendant les ¾ de la journée (Holmgren et Mollison, 1978). Le permaculteur doit d’abord travailler pour lui ou pour alimenter un groupe très proche. Il ne vend son surplus qu’au village, et échange des semences plutôt que des produits.

Les principes éthiques sont les suivants (Servigne, 2011) :

Prendre soin de la Terre, reconnaître qu’elle est la source de toute vie et que les êtres humains doivent s'en occuper avec respect, travailler avec elle, comme elle et pas contre elle.

Prendre soin des Hommes, créer des sociétés ou les humains et la planète vivent ensemble en harmonie, notamment par la coopération et le partage.

S'assurer que les ressources limitées de la planète soient consommées avec parcimonie, distribuées de manière sage et équitable, et que le marginal et la diversité soient valorisés et utilisés (ex : déchets).

Il s’agit donc d’une philosophie de vie qui propose entre autre des applications agricoles. Leur but principal est le développement d’une agriculture pérenne, plus respectueuse de la vie, et permettant l’autosuffisance. Les principes « permagricoles » les plus connus sont par exemple le compost* et le mulch* (recouvrement du sol en permanence), le non-labour, ainsi que les cultures associées (plusieurs cultures en même temps au même endroit).

Alors que Mollison écrit un 2ème ouvrage (1979) sur des aménagements pratiques de production agricole (zonage, cas de climats difficiles, etc.), Holmgren s’éloigne un peu de la définition première de permaculture, en lui donnant une dimension plus générale. La « permaculture » devient pour lui la compaction de « permanent culture », conceptualisant l’intégration de l’homme dans son milieu en général, et désignant les « paysages consciemment créés en imitant les formes et les relations rencontrés dans la nature, qui permettent de récolter en abondance la nourriture, les fibres et l'énergie satisfaisants les besoins locaux », le tout fonctionnant en système fermé et autonome en théorie (Holmgren, 2002). Il met en place 12 principes de base pour concevoir une société durable : le but est de trouver des solutions pour s’organiser, construire, gérer ses ressources, etc., en utilisant toujours moins d’énergie.

Presqu’aucune institution, entreprise importante ou gouvernement n’a encore pris part à ces idées, mais des exemples à plus petite échelle sont nombreux. Par exemple, au Danemark, une série de petites entreprises se sont combinées afin de minimiser les déchets générés (Image 4-3) : le gaz rejeté par une raffinerie est récupéré dans une centrale pour la production d’électricité

Image 4-3 : Ecosystème industriel de l’écoparc de Kalundborg, Danemark (source : Pollution Issues, 2011)

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dans une autre, les cendres produites par la centrale thermique servent de matière première à une cimenterie, etc. (Darnil et Le Roux, 2005).

A l’heure où l’agriculture industrielle, bien que productive, est souvent dans l’impasse (au niveau économique, écologique, productif, etc.), où celle des pays du tiers monde se développe moins vite que les bouches à nourrir, et ce sur des sols de plus en plus dénudés et stériles, la permaculture peut apporter des solutions pour une agriculture moderne plus intégrée.

La permaculture est également vécue comme une philosophie de vie par de nombreux « convaincus ». Des festivals sont organisés afin d’en expliquer les principes et de donner des conseils pratiques aux participants, etc. Il s’agit de concevoir et planifier une/des sociétés humaines écologiquement soutenables, socialement équitables, et économiquement viables, 3 piliers du développement durable. La permaculture est un modèle très lié à celui de la décroissance (voir p.26)

4.2 TRANSITION  TOWNS  :  VERS  UNE  PLUS  GRANDE  RÉSILIENCE  URBAINE  

Les permaculteurs se distancient généralement des villes, et aménagent leur vie et leur terrain à la campagne, en délaissant généralement un changement à plus large échelle, celle de la société. Face à cette réaction et suite à sa prise de conscience du pic pétrolier et de la dépendance des sociétés actuelles, Rob Hopkins, enseignant en permaculture au Further Education College à Kinsale, Irlande, réalise en 2005 avec ses élèves une sorte de charte ayant pour but d’implanter la philosophie de la permaculture au sein des villes (Ruwet, 2011). Selon eux, la première étape a été de créer un Plan d’Action pour une Descente Energétique (PADE) dans le but de passer à une communauté « basse consommation ». Une série d’initiatives sont alors lancées, qui prennent en compte la plupart des aspects de la vie locale (alimentation, énergie, tourisme, éducation, santé, etc.). Le conseil municipal de Kinsale adopte le plan proposé en fin d’année, et des projets se concrétisent dès l’année suivante, en 2006, à Totnes, une ville au sud d’Exeter, Grande Bretagne (Image 4-4) : formations, plantation de noyers publics, programmes scolaires, potagers collectifs, exposés, projections, monnaies locales, annuaire alimentaire local, etc. (Leverbal, 2010)

Image 4-4: "Logo" des Transition Towns (source: Hopkins, 2008)

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Les villes en transition sont une autre facette de la permaculture. L’idée centrale de ce mouvement est la résilience*, l’aptitude d’écosystèmes naturels à rester en équilibre (ou à en retrouver un) malgré les perturbations, modifications plus ou moins importantes du milieu.

Au niveau de la ville, la résilience est dès lors sa capacité à rester équilibrée, à résister à une perturbation importante telle qu’une pénurie de pétrole ou de nourriture ou à un changement climatique (Hopkins, 2008). Le but du mouvement de transition est en quelque sorte de devancer ces pénuries, de suivre le courant, plutôt que de lutter contre. Le mouvement des Transition Towns s’inscrit dans une vision plus globale de réduction énergétique : trois niveaux d’action, mondial (protocoles internationaux type Kyoto), national (quotas énergétiques par exemple) et local (initiatives de transition) devraient permettre à l’humanité de traverser avec succès la transition énergétique qui s’annonce.

Pour ce faire, ce mouvement apolitique et optimiste est composé de « groupes de transition » de tailles très différentes, dont le but est de penser globalement à l’évolution mondiale, et d’agir localement dans sa communauté via des projets et initiatives. Le mouvement des « Transition towns » s’est principalement développé dans les pays anglophones, mais des groupes francophones ont commencé à voir le jour en 2009, grâce à la traduction d’une série d’initiatives et de projets concrets. En Belgique, aucune initiative n’est officielle, mais il existe des groupes de transitions à Bruxelles, Louvain-la-Neuve, Gand, Anvers, etc. qui créent des potagers urbains, repensent le cycle de l’eau en ville, s’échangent des semences, etc. Les groupes de transition sont répertoriés et reliés grâce à internet. L’idée est que ce mouvement se répande d’une communauté à l’autre, sur toute la terre, via le partage des idées et des projets testés (wiki : transition network.org). Comme le montre l’Image 4-5, près de 400 groupes s’échangent leurs expériences à travers le monde.

4.3 DÉCROISSANCE :  REMISE  EN  QUESTION  DU  SYSTÈME  ÉCONOMIQUE  

Economiquement parlant, des solutions sont recherchées pour remédier à l’état de crise général actuel : crise financière, pic pétrolier et réchauffement climatique. Suite au crash boursier de Wall Street en 1929, le président Roosevelt avait mis en place le New Deal, un programme socio-économique dont le but était de redynamiser l’économie, tout en soutenant les couches les plus pauvres de la population. La proposition économique à laquelle beaucoup d’économistes pensent actuellement est donc de mettre en place un « Green New Deal ». Ce programme capitaliste est entièrement basé sur la croissance puisqu’il s’agit principalement de réduire les taxes pour permettre aux familles de dépenser plus, de baisser les taux d’intérêts afin de stimuler les crédits aux consommateurs et aux entreprises, et d’augmenter les dépenses publiques dans les infrastructures afin de créer de l’emploi.

On le sait bien, la croissance est un objectif économique en soi dans notre modèle capitaliste, elle est devenue une évidence même dans la société, alors qu’il s’agit d’un concept propre à l’occident et aux 3 siècles passés (suite à la révolution industrielle

Image 4-5: Localisation des groupes de transitions (source:transition network)

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anglaise). Le principal indicateur économique de la croissance est le Produit Intérieur (ou National) Brut, qui, selon les capitalistes, donne une indication sur le bien-être de la population, mesurant en réalité leur taux de consommation. De plus, les pollutions, catastrophes naturelles et autres dégâts font augmenter le « bien-être » capitaliste car ils induisent une augmentation de la consommation : dépollution, reconstruction, soins, etc., font circuler de l’argent et augmenter le PI/NB. Malgré ce principe, il reste l’indicateur le plus utilisé au monde.

En mettant en place ce Green New Deal, la société resterait dans un modèle au « toujours plus » (travailler plus pour produire plus, gagner plus et pouvoir consommer plus), ce qui ne permettrait qu’à éloigner le mur vers lequel on fonce (Thibaut, 2009). De nouveaux modèles économiques fleurissent alors, dont celui de la décroissance : des changements sociétaux plus globaux sont nécessaires pour éviter ce mur, comme une remise en question de l’objectif « croissance » du capitalisme.

Selon Serge Latouche, économiste français, la décroissance possède deux piliers :

La critique écologique, qui tient son origine globale au rapport du Club de Rome en 1972 (Limits to Growth ?), qui se déroulait en même temps que la conférence de Stockholm, première conférence des Nations Unies sur l’environnement.

La critique socio-culturelle, qui fait suite à la mondialisation, aux dégradations de l’environnement et à la remise en question du modèle de développement des pays du Tiers-Monde et de la relation Nord-Sud.

Les deux critiques se sont « rejointes » en 2002, lors du colloque international sur l’après-développement Défaire le développement, Refaire le monde, au palais de l’UNESCO (Latouche dans La Terre vue du ciel, 2004).

Le mouvement de décroissance est très divisé (a-croissance, non-croissance, décroissance soutenable, etc.), mais le concept utilisé ici est plutôt un « slogan » pour expliquer la vision collective principale du mouvement. Il peut être résumé par la citation de Kenneth Boulding : « celui qui croit qu’une croissance infinie est compatible avec une planète finie est soit fou, soit économiste », ou par le concept de l’empreinte écologique. Pour les décroissants, la croissance est assimilable à une religion, à laquelle on voue un culte, avec des rituels (le consumérisme, etc.). Et l’a-croissance est donc similaire à l’athéisme (Latouche dans La Terre vue du ciel, 2004) : la société doit être libérée de l’impérialisme de l’économie. De ce fait, remplacer le capitalisme par un nouveau modèle de pensée unique n’est pas une solution envisageable : il faut arriver à gérer une matrice d’alternatives, une diversité des cultures, etc.

Selon le mouvement décroissant, le taux de consommation et de production ne peut pas être accru ou même maintenu dans une optique de développement durable (Image 4-6). L’objectif est d’avoir une stabilisation du PIB (voir même une décroissance) en ayant une réelle croissance du bien être. Mais il ne faut pas confondre décroissance et récession, le but n’étant pas de revivre au Moyen Âge : il faut utiliser les outils actuels pour développer la société dans un sens qui ne la détruirait pas. Le but n’est pas de consommer moins à tout prix, mais de consommer mieux, et de réfléchir à sa consommation (Ariès, 2008). Le principe est en fait de trouver des seuils de satisfaction au-delà desquels le bonheur n’augmente pas, voire même diminue. Image 4-6: Dessin de Titom

expliquant la décroissance (source: bxl.attac.be)

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Pour arriver à une société occidentale décroissante, un changement global des valeurs et croyances semble indispensable : il sera nécessaire de réévaluer des aspects non-quantitatifs et non-marchand, restructurer l’appareil productif en développant d’autres formes de production, réduire massivement le temps de travail rémunéré pour se libérer du temps et retrouver d’autres dimensions de la vie, etc. (Rabhi, 2006). Une des grandes mesures prônée par la décroissance est la relocalisation des activités économiques. La déterritorialisation planétaire, conséquence d’une baisse artificielle des couts de transport, nous fait perdre la conscience des bienfaits du local (Latouche, 2006).

De par son côté global et peu concret, la décroissance ressemble à une utopie économique. Néanmoins, l’idéal étant le moteur des sociétés, ce courant a tout son intérêt.

4.4 UTOPIES  URBAINE  :  ARCHIBORESCENCE  ET  CITÉS  VÉGÉTALES  

Des utopies de tout type existent. Et les utopies urbaines sont nées il y a bien longtemps : Platon relate il y a déjà 2400 ans l’existence de l’Atlantide, une île fabuleuse où la société vit en harmonie. Plus tard, en 1516, le livre « L’Utopie » de Thomas More (1516), relate la découverte de l’île d’Utopia, et de sa civilisation isolée et parfaite. Le mot utopie est alors inventé, pour désigner un genre littéraire et la proposition d’une société nouvelle (Utopia, 2007). Par la suite, de nombreuses utopies ont été imaginées, comme la Cité du Soleil de Campanella (1623), Hygeia de Richardson (1876), et plus récemment la Belle Verte de Coline Serreau (1996). L’An 2000 a également été une source de rêves d’anticipations pour de nombreux dessinateurs, architectes, artistes, urbanistes, écrivains et cinéastes : des voitures volantes (Image 4-7), un système de cuisson accélérée, le contrôle de robots et machines à tout faire, contrôle des objets par la pensée, etc. (Canto et Faliu, 1993).

Les utopies sont définies par leur aspect profondément positif, mais il existe également des dystopies, qui tendent à exagérer les tendances sociétales négatives du moment : Le meilleur des Mondes de Huxley (1932), Alphaville par Godart (1965) ou encore The Matrix, des frères Wachowski (1999).

Les formes urbaines imaginaires, positives ou négatives, sont en fait un reflet critique des sociétés contemporaines et des idéologies politiques. Leur but principal est de faire réfléchir l’humain sur son monde et ses dysfonctionnements (Utopia, 2007).

Certaines utopies urbaines ont été réalisées, le but de leur concepteur étant en général de changer la société et d’apporter une nouvelle dignité à l’homme par une certaine qualité architecturale et urbaine. Parmi elles on peut citer le Grand-Hornu à Mons imaginé par H. de Gorge vers 1820 comme cité idéale du travail, le familistère de Guise créé par J-B-A. Godin en 1883, les cités-jardins d’E. Howard en Angleterre au début du XXe siècle, la ville de Chandigarh (Inde) conçue par Le

Image 4-7: La sortie de l'opéra en l'An 2000 Albert Robida, 1882

Image 4-8: Cité des étoiles (source: Rhône Pluriel, 2011)

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Corbusier vers 1950, et plus récemment la Cité des Etoiles (Image 4-8), rénovation du vieux centre de Givors (France) par J. Renaudie vers 1974.

Il existe encore des utopies et dystopies qui réagissent aux maux des sociétés actuelles, aux changements climatiques, économiques et écologiques à venir : Werber et Barjavel sont des écrivains utopistes, Masdar city est une cité énergétiquement autosuffisante au milieu du désert, le film V for Vendetta (2006) est une dystopie qui dénonce la peur dans la société, et les jeux vidéos tels que Sim City permettent à tous d’imaginer la ville de leurs rêves.

En Belgique, Luc Schuiten est un architecte utopiste, qui imagine des cités futures plus « naturelles ». Il imagine l’archiborescence, une technique de construction avec des organismes vivants. Il se base sur le biomimétisme, la copie de processus naturels dans l’architecture, et utilise la biotechnologie (énergie solaire, etc.) pour imaginer comment vivre en harmonie avec la nature dans des cités utopiques. Il imagine également l’évolution de la ville de Bruxelles suivant ces principes et idées (Schuiten & al., 2006). Plus récemment, suite à la prise de conscience globale des changements climatiques et du caractère fini des réserves pétrolières, il a développé différentes cités végétales, copiant la nature dans ses formations géométriques et fonctionnelles : lotus, arbres, canyon, vagues, etc. (Schuiten & al., 2010). Actuellement, il réfléchit à la transition de la ville actuelle à cette ville de demain.

4.5 MAIS   IL  N’Y  A  PAS  QU’UN  MODELE…  

De nombreuses critiques mettent en question ces différents modèles : visions de riches, basées sur la simplicité volontaire, peu applicable au niveau global, généralement apolitique, ou trop politique, etc.

Le fait est que notre modèle de développement est mis en question, puisqu’il induit une consommation d’espace (empreinte écologique*) beaucoup trop importante que pour pouvoir être reproduit, et qu’il ne rend pas les sociétés heureuses (voir ‘Situation actuelle’, p.13). Selon les mouvements présentés ci-dessus, le développement durable tel qu’on l’entend aujourd’hui n’est encore qu’une manière politique de légitimer les actions habituelles, et pas encore de changer de paradigme. Pour eux, des actions plus vastes et plus réfléchies sont à imaginer et à coupler avec un changement des mentalités et des habitudes : aujourd’hui en occident, le mode de pensée et la société, guidés dans l’ombre par le capitalisme, atteignent un seuil.

Les différents mouvements marginaux proposent, avec des principes de base très semblables, des sociétés possibles au-delà de ce seuil. Ils seront amenés à collaborer et s’entrecroiser voir s’entremêler, pour remodeler la société actuelle en s’inspirant de sociétés passées ou imaginées, et arriver réellement à une série de sociétés viables, vivables et équitables. Comme pour la transition énergétique que nous vivons actuellement, un modèle unique n’est pas la solution : il s’agit de diversifier les possibilités, pour se préparer au changement relativement brutal qui arrive, pour agir au lieu de subir, agir pour quelque chose, et plus contre quelque chose.

Image 4-9: Cité végétale de Schuiten (source: citevegetale.net)

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5. L’AGRICULTURE  URBAINE,  UNE  PARTIE  DE  LA  SOLUTION ? 

Comme nous venons de le voir, ces modèles alternatifs sont imaginés car nous vivons une période clef et devons imaginer l’évolution de nos sociétés (voir ‘Situation actuelle’, p.13) :

80% de l’énergie nécessaire au système alimentaire* américain passe dans la transformation, l’emballage, le transport, le stockage et la préparation de la nourriture (NSAIS, 2011). Des milliers de kilomètres sont accumulés dans les produits que nous consommons tous les jours

L’agriculture occidentale est extrêmement dépendante des énergies fossiles. Une transition dans ce domaine est inéluctable (Heinberg et Bomford, 2009).

Les villes sont fortement dépendantes au niveau de l’alimentation, et sont un des moteurs de ces transports alimentaires. Les citadins sont souvent complètement déconnectés du milieu rural et n’imaginent que peu les influences et impacts qu’ils peuvent avoir sur lui.

Il semblerait qu’une nouvelle forme de « tyrannie des transports » (voir Histoire, p.8) s’installe dans la société actuelle. Dès lors, la relocalisation de l’agriculture apparait comme une solution possible : un modèle de production locale pourrait réduire la distance du champ à la fourchette et les coûts de transport, et permettre ainsi des économies d’énergie importantes. Une modification des systèmes de production* devrait également être mise en oeuvre : la dépendance de l’agriculture aux énergies fossiles est en partie due aux pesticides et engrais chimiques appliqués sur les champs. De plus, la monoculture est risquée pour les producteurs et précaire car elle détruit les écosystèmes (voir Situation actuelle, p.13). Un rapprochement des citadins avec le milieu naturel pourrait également leur faire prendre conscience des impacts de leur mode de vie sur l’environnement.

La production agricole en ville apparait alors comme une composante intéressante d’un nouveau modèle sociétal. Dans les mouvements alternatifs précités (p.23), cette idée est d’ailleurs récurrente. La production urbaine semble indispensable à la longévité des villes occidentales, en particulier lorsque le prix de l’énergie montera en flèche (Whitefield, 2010) : il sera nécessaire de produire autant de nourriture que possible là où nous vivons.

Cette partie du travail présente les avantages généraux de l’agriculture urbaine*, s’interroge sur la faisabilité urbaine des différents types de production agricole, puis analyse les projets d’agriculture urbaine réalisés ou seulement imaginés à travers le monde. Enfin, j’en introduis un nouveau modèle : l’agriculture de récupération de surfaces.

5.1 OBJECTIFS  RECHERCHÉS  

La production agricole en ville permettrait une plus grande autonomie alimentaire. Elle impliquerait une certaine sécurité pour les villes, via l’autonomisation par rapport au système du commerce mondial. De plus, les économies réalisées pourraient être substantielles à de nombreux niveaux : quand les consommateurs achètent des biens importés, l’argent ne fait que transiter localement, alors que toute somme dépensée localement génère deux fois plus de revenus à l’économie locale (New Economics Foundation, 2003).

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Bien sûr, le consommateur y trouverait également des bénéfices car les produits alimentaires gagneraient en fraicheur et en qualité nutritionnelle puisqu’ils seraient cueillis mûrs. Le citadin obtiendrait la possibilité d’acheter des produits frais, sains et dont la traçabilité est plus facile à assurer. Puisqu’ils seraient produits localement, ils éviteraient l’accumulation des kilomètres et le prix des transports et parviendraient idéalement à être plus économiques pour le consommateur. Cette possibilité d’obtenir des produits frais à moindre coût et de pouvoir observer la production alimentaire, pourrait également participer à un changement d’habitudes alimentaires et réduire la proportion de personnes souffrant d’obésité ou de diabète. Le risque de maladies cardio-vasculaires se verrait également diminué.

5.2 QUEL  TYPE  DE  PRODUCTION  S’ADAPTE  À  LA  VILLE  ?  

La production agricole peut se résumer en trois types : l’élevage, la culture céréalière, et le maraichage*.

La production de gros animaux (vaches, moutons, voir même poules, etc.) apparait directement compliquée en milieu urbain : l’espace nécessaire est important, les bruits et odeurs générés sont nuisibles au cadre de vie urbain, et la production hors sol ne récolte que peu d’adeptes et ne correspond pas à la vision éthique qu’ont les citadins de leur viande. Que cela soit pour la viande ou les produits collatéraux, une exploitation de taille moyenne requiert énormément de places et génère des nuisances non-négligeables. Les procédures légales ne facilitent pas l’implantation de ce type d’exploitation en ville : un permis d’environnement rend obligatoire une étude d’incidence sur l’environnement, qui prend en compte les impacts de tous types autour de l’exploitation. En général, ce permis n’est pas accepté en ville. La possession de quelques animaux est cependant possible par les particuliers possédant un terrain suffisamment grand.

La production d’animaux plus petits semble s’intégrer facilement en ville, et être même parfois nécessaire. Beaucoup de toits au Maroc possèdent des pigeonniers, puisque le pigeon est utilisé dans la préparation de nombreux plats typiques (pastilla, tajines, soupes, etc.). Par ailleurs, les poules possèdent l’avantage, pour le particulier, de se nourrir des déchets ménagers. La présence d’abeilles est en outre nécessaire au développement de jardins et à la production agricole, puisqu’elles pollinisent* la plupart des plantes.

La production de céréales n’apparait pas non plus aisée ou compatible avec la morphologie urbaine. En effet, dans un but de rentabilité économique, les quantités produites doivent être assez importantes. De plus, la récolte est plus compliquée que celle des fruits et légumes et implique, en campagne, l’utilisation de machines, pesticides et engrais en quantité importante. Le contexte urbain ne favorisant pas la mécanisation, la production de céréales ne semble pas s’y adapter. Si l’intention est de cultiver des céréales panifiables en collectivités dans le but de produire quelques miches de pain, l’utilisation de friches peu adaptées pour d’autres cultures est envisageable.

La production maraichère semble quant à elle se prêter assez bien à la culture urbaine, car elle permet la productivité et l’autonomie sans grands investissements, et sur des surfaces de taille et d’orientation très variables (murs, grilles, bacs, toits, sols, etc.). Le travail est manuel, même à la campagne, et deux personnes suffisent à cultiver deux hectares (Coup2Pouce, 2010). Il s’agit de culture à forte valeur ajoutée.

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5.3 L’IDÉE  N’EST  PAS  NOUVELLE  

L’envie d’amener la nature en ville existe depuis bien longtemps : la légende dit que Babylone possédait déjà des jardins suspendus. Durant des siècles, la production agricole et animale se faisait dans l’enceinte des villes occidentales (voir Histoire, p.8). L’essor urbain en cours depuis quelques dizaines d’années a généré un remplissage de l’espace et une densité telle que les terrains, s’ils ne sont pas occupés, ont une valeur largement supérieure à celles que pourraient générer les cultures. Néanmoins, l’idée de la nature en ville refait surface depuis une dizaine d’année : les toitures vertes deviennent de plus en plus communes et peuvent même être imposées dans des règlements d’urbanisme.

L’agriculture est déjà présente ou imaginée dans les villes, en Europe et ailleurs : selon la FAO, l'agriculture urbaine et périurbaine est déjà utilisée par environ 700 millions de citadins, soit un citadin sur quatre de par le monde (Kourous, 2005). Les paragraphes qui suivent en expliquent quelques exemples caractéristiques.

5.3.1 CULTURE  COLLECTIVE  VOLONTAIRE  EN  PLEINE  TERRE  

Plusieurs types de culture volontaire sont observables de par le monde. En voici quelques exemples :

Les jardins ouvriers/familiaux sont des lotissements de parcelles gérés par une association, mis à disposition de jardiniers, moyennant cotisation annuelle, afin qu'ils en jouissent pour leurs loisirs et les cultivent pour les besoins de leur famille, à l'exclusion de tout usage commercial (Fédération Nationale des Jardins Familiaux et Collectifs, 2011).

Appelés au début « champs des pauvres », ces jardins sont apparus dans le nord de l’Europe (Angleterre et Allemagne principalement) lors de la révolution industrielle, au début du 19ème siècle. Les ouvriers utilisaient leur parcelle comme petit jardin ou plus souvent comme potager, ce qui leur permettait une sécurité alimentaire. Une ligue se crée en Belgique à la fin du XIXe, pour développer légalement ces jardins. Ils furent également un prétexte pour tenir la population loin des cabarets et de l’alcool. Au fil du temps, la diversification socioprofessionnelle des locataires de parcelles impliqua qu’on les appelle « jardins familiaux » (Image 5-1). Au milieu du 20ème siècle en France, une loi concrétisa ce mouvement et prévit l’exonération de l’impôt foncier. Mais après la seconde guerre mondiale, les besoins alimentaires étant comblés et l’urbanisation s’intensifiant, les jardins perdirent de leur attrait.

Depuis une vingtaine d'années, on assiste à un regain d’intérêt envers les jardins familiaux dans certains pays européens (France, Allemagne, Suède, Autriche). Ce phénomène est sans doute lié aux crises économique, sociale et urbaine puisque les jardins ont un rôle social en plus du rôle paysager (Habib, 1998). On compte actuellement plus de 3 millions de parcelles en Europe (Office International du CTJF, 2011), de forme et de taille variables. Elles sont principalement louées par des personnes vivant en immeubles à appartements dans les quartiers « pauvres » des grandes villes (ex : HLM en banlieue parisienne).

Image 5-1: Jardin familial de Schiltigheim, Alsace (source: photo-alsace.com)

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Ce type de jardin n’existe pas uniquement en Europe : on les appelle « Community Gardens » à New York, où les parterres de fleurs et carrés de légumes servent de ciment social face au délabrement des quartiers. Dans les pays en développement, ils ont aussi la cote : au Brésil, par exemple, la mairie de Curitiba a créé des jardins publics dans les terrains vagues des quartiers les plus pauvres (Faut pas rêver, 2006). A l’installation d’un tel jardin, un agent de la municipalité explique les rudiments du jardinage aux familles intéressées. Les parcelles sont ensuite entièrement gérées par les habitants du quartier, la mairie continuant à apporter les besoins de base (nouveaux plants, etc.). Ce système s’avère très bien fonctionner car il répond à un besoin réel, comme c’était le cas en Europe.

Le jardin/potager collectif est une parcelle de terrain partagée et gérée collectivement, souvent consacrée à la production écologique de légumes et de fruits (Le début des Haricots, 2011). Il s’installe généralement sur une friche urbaine en ville, suite à un accord avec le propriétaire, privé ou public. La culture se fait en pleine terre et est basée sur le travail volontaire des participants, qui se divisent la récolte.

Le potager collectif se base sur le respect de l’environnement et la rencontre. Du point de vue environnement, les objectifs sont la (re)découverte et l’apprentissage ; la production agricole en étant une conséquence directe. Du point de vue social, il s’agit de recréer un espace collectif où le partage de savoir-faire et de convivialité est l’objectif principal. Toutes les décisions concernant le potager sont idéalement prises par l’ensemble des jardiniers, demandant une implication forte des habitants. Ces jardins sont aussi l’occasion de montrer que des friches urbaines, sans usage spécifique prévu à court terme, peuvent être conquises par les habitants de quartiers à l’habitat dense afin d'y créer des espaces accueillants à la fois pour les personnes et pour la biodiversité. Des terrains abandonnés, lieux de dépôts clandestins et sources d'insécurité, sont ainsi nettoyés et valorisés (Le début des haricots, 2011). La culture y est généralement biologique, et la fertilisation se fait par compostage des déchets ménagers. Les principes de permaculture sont souvent appliqués, afin de réduire le travail nécessaire à la culture (voir p.23).

A Bruxelles, il existe de nombreux potagers urbains : sur une parcelle de la rue Gray, à Ixelles (Image 5-2), le Jardin des arts à Etterbeek, le potager Oasis à Saint-Gilles, le Jardin Bonnevie à Molenbeek, etc. (Jardins de Pays, 2011) De nouveaux potagers sont également en cours de création un peu partout dans Bruxelles : Schaerbeek, Saint-Josse, etc.

Comme leur nom l’indique, les fermes urbaines sont des exploitations agricoles implantées en milieu urbain. Elles se situent le plus souvent en milieu périurbain ou dans la périphérie des grandes villes. Elles produisent principalement des cultures maraichères et de petits animaux (canard, poules, etc.). Chez nous, elles écoulent principalement leur production via un système d’AMAP* (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne), un groupe de consommateurs liés par contrat au producteur. Ils payent un abonnement annuel et reçoivent des paniers hebdomadaires ou bimensuels remplis de fruits et légumes de saison, produits par la ferme et généralement issus d’une agriculture biologique. Chaque ferme est gérée par un agriculteur mais les « AMAPiens » sont parfois invités à l’aider

Image 5-2: Potager collectif de la rue Gray (source: Haricots.org)

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bénévolement en cas de besoin (Site national des AMAP, 2011). Il existe une ferme urbaine à Bruxelles (Neder-over-Heembeek), lancée en 2009 par l’asbl Le début des Haricots (De Schrijver, 2009).

Comme pour les jardins ouvriers, il existe des exemples de fermes urbaines en dehors de l’Europe : au Venezuela, l’agriculture est très peu développée dans le pays en raison de la topographie et du climat (FAO, 2008). Mais depuis 2003, une vingtaine de coopératives agricoles (et plus de 4000 potagers urbains) se sont installés dans la ville de Caracas. Leur but est à la fois de maitriser la pauvreté urbaine et la dépendance à l’importation alimentaire. Ces fermes ont bénéficié de l’aide d’agronomes cubains, expérimentés en agriculture urbaine.

En effet à Cuba, l’agriculture était principalement tournée vers la monoculture d’exportation, l’utilisation d’engrais et de pesticides en masse et la mécanisation massive. Mais, suite à l’effondrement du bloc soviétique et à l’embargo imposé par les USA, l’île a subi une chute drastique des échanges commerciaux et de l’approvisionnement en pétrole (Servigne, 2011). Le défi fut alors de produire rapidement de la nourriture dans une société d’après-pétrole, la transition étant forcée. Cuba a su mettre en œuvre dans l’urgence une économie relocalisée et une agriculture plus saine : chaque bout de terrain libre a été reconverti en parcelle productive (potagers collectifs), les agronomes enseignèrent les principes de permaculture aux habitants, et des fermes urbaines, unités de production intensives (organopónicos), furent créées. Il s’agit de culture sur compost dans des bacs posés à terre, qui permettent d’enrichir le sol urbain, très pauvre (Kiwi Organopónico, 2008). Ce mouvement, au départ citoyen, a très vite été fortement soutenu et développé par le gouvernement. La vente des légumes est directe, dans de petites structures attenantes aux organopónicos. L’agriculture urbaine permet actuellement la production de 50% des fruits et légumes frais de La Havane (2,2 millions d’habitants), et ce niveau peut atteindre les 80% dans les petites villes. L’île n’est cependant pas auto-suffisante.

Bien que rien ne semble vraiment mis en œuvre au niveau politique (excepté à Cuba) pour développer ce type d’agriculture, les idées évoquées ci-dessus sont porteuses d’espoir partout dans le monde. Elles sont généralement basées sur le volontarisme des « nouveaux agriculteurs », concernés et impliqués, à la recherche de liens sociaux et de plaisir. Situés en ville, ces projets se basent sur des principes de permaculture et permettent une gestion agroécologique de la production, peu dépendante du pétrole.

L’exemple de Cuba montre néanmoins que la production intensive volontaire ne suffit pas à l’autosuffisance en fruits et légumes. De plus, le mouvement s’y essouffle : la plupart des cubains ont été forcés à s’impliquer, mais n’aspirent pas à cultiver la terre, car le travail est dur et le salaire faible. Le modèle de gouvernement autoritaire ne fonctionne plus et la crise mondiale touche l’île de plein fouet. La transition semble ne pas avoir été assez profonde, mais il semble difficile d’en demander plus à la population (Servigne 2011).

5.3.2 AGRICULTURE  VERTICALE  HORS‐SOL  

Des projets d’un type complètement différent sont également au goût du jour : les fermes verticales. Il s’agit de bâtiments, construits en ville, voués à l’agriculture hors

Image 5-3: Organopónicos à Cuba (source: FAO)

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sol sur plusieurs étages. Ces fermes verticales n’existent encore que sur papier, elles sont le fruit de l’imagination d’architectes utopistes :

A la « Skyscraper Competition » de eVolo en 2011, trois architectes sud-coréens ont par exemple imaginé une tour pour la production animale : comme le montre l’Image 5-4 le bétail brouterait sur des plateformes en spirales recouvertes d’herbe fraîche. Tous les 30 jours, les vaches se déplaceraient, permettant l’utilisation de la première plateforme par de la volaille, afin que l’herbe se régénère. L’exploitation des animaux (lait, fromage, œufs, viande) se ferait au sein même de la tour, pour éviter les coûts financiers et énergétiques du transport (eVolo, 2011).

Un autre exemple, imaginé par l’architecte belge Vincent Callebaut, est le projet Dragonfly (Image 5-5). Il s’agit d’un immense bâtiment semblable à une aile de libellule qui comprendrait des logements, des bureaux, mais aussi des espaces réservés à l’élevage ou à l’exploitation agricole, dont la production serait prise en charge par les habitants de la tour. Les eaux de pluie seraient filtrées par les jardins verticaux, tandis que les eaux usées des habitants de la tour sont recyclées pour être réutilisées pour l’agriculture. Un immense bouclier solaire et trois éoliennes orientées en direction des vents dominants new-yorkais permettraient au bâtiment d’être autosuffisant (Mao, 2009)

De nombreux exemples de projets de fermes verticales pour la production maraichère sont à citer, comme la « Living Tower » de SOA architect, ou encore le « Living Skyscraper: Farming the Urban Skyline » de Blake Kurasek (Image 5-6).

Une idée plus raisonnable de fermes verticales a été développée par Dickson D. Despommier, professeur de « Environmental

Image 5-5: Projet Dragonfly de V. Callebaut (source: GEO environnement)

Image 5-4: "Grassy Green Vertical Farm", designed to raise happy cows and chickens (source: eVolo, 2011)

Image 5-6: Living Tower (gauche) et Living Skyscraper (droite), des projets de fermes verticales (source: verticalfarm.com)

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Health » (Colombia University, New York), et ses élèves : des fermes urbaines, insérées dans le tissu urbain (un pâté de maisons, voir Image 5-7), produiraient des cultures maraichères et du poisson en circuit fermé.

Les bâtiments permettraient une production agricole durant toute l’année, puisqu’elle serait indépendante du climat. La culture s’y ferait sous serre (murs vitrés) et nécessiterait un apport moindre d’énergie que les cultures traditionnelles. La production serait très intensive de par les techniques utilisées : les plantes y pousseraient en hydroponie* ou aéroponie*, culture sans sol où les racines des plantes baignent dans une solution minérale nutritive, respectivement liquide ou vaporisée constamment (Mazoyer, 2002). Ces techniques permettent de contrôler tous les paramètres du milieu (concentrations des différents éléments minéraux, température, pH, etc.), et ainsi d’optimaliser le processus de croissance des plantes, selon leur stade de développement. L’eau est réutilisable et permet une économie qui peut aller jusqu’à 90 % par rapport à l’agriculture traditionnelle (Despommier, 2009). Valcent Products Inc., une entreprise canadienne, va même jusqu’à proposer VertiCropTM, un système « d’étagères » de 6 mètres de hauteur, remplies de plantes nourries par hydroponie et dont la structure tourne pour donner aux plantes l’éclairage (par LED) optimum à leurs besoins (Image 5-8). Un autre système d’alimentation des plantes pourrait être l’aquaponie*, un système mixte entre l’hydroponie et l’aquaculture. Cette technique, en accord avec les principes de permaculture, consiste à combiner la production végétale et piscicole. Elle est en fait utilisée depuis bien longtemps : en Asie, les riziculteurs utilisent les poissons pour fertiliser leurs champs. Chez nous, elle se fait actuellement via le raccordement entre les bacs hydroponiques et un réservoir piscicole.

Dans ces fermes, l’agriculture serait biologique : elles fonctionneraient comme des écosystèmes fermés, sans contact avec l’extérieur, les insectes pollinisateurs étant installés dans les bâtiments. Il n’y aurait pas besoin d’insecticides ou de pesticides. Puisque les plantes pousseraient en hydro-, aéro- ou aquaponie, les fertilisants ne seraient pas non plus nécessaires. Les fermes appliqueraient, en théorie, les principes de la permaculture : tout déchet est recyclé ou réutilisé, il n’y a que la production qui sort du bâtiment. Cependant, la permaculture prône un respect de la vie et un travail avec la nature, ce qui n’est pas le cas de tours de production éclairées artificiellement, etc.

Afin de limiter le transport, l’idée est également d’installer une pépinière, des entreprises de transformation, etc. autour de ces fermes, afin que tout le traitement de la production se fasse localement.

Image 5-8: VertiCropTM, culture verticale à haute densité (source: Valcent Products Inc.)

Image 5-7: Une ferme verticale en centre urbain (source: verticalfarm.com)

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Au vu de la productivité de telles installations, la production agricole d’un hectare en ferme verticale serait égale à celle de 4 à 6 hectares au sol, ou plus selon la culture (1 ha vertical de fraises reviendrait par exemple à 30 ha en production horizontale). Les fermes verticales permettraient alors, selon les plus optimistes, de limiter l’agriculture traditionnelle et de permettre la création de nouveaux écosystèmes naturels là où elle a lessivé les sols. Cependant, nourrir la ville de New York nécessiterait la construction de 160 fermes verticales, de 2,6 hectares au sol (un pâté de maison) sur 30 étages chacune (Walsh, 2008). Or, le prix de ces fermes est encore beaucoup trop élevé de nos jours : pour une seule de ces fermes, des centaines de millions de dollars seraient nécessaires (Despommier, 2009). Les coûts de construction et d’énergie rendraient alors l’agriculture verticale beaucoup plus coûteuse que l’agriculture traditionnelle.

De plus, ce type de fermes urbaines assurerait le contrôle unique de toute la chaîne alimentaire par les entreprises qui les posséderaient.

5.4 UN NOUVEAU MODÈLE : L’AGRICULTURE DE RÉCUPÉRATION DE SURFACES (ARS) 

Aucun de ces modèles ne me semble convenir pour le développement de l’agriculture urbaine à plus large échelle et à moyen terme :

Il apparait de plus en plus clair que la pérennité et la stabilité d’initiatives collectives nécessitent une aide des autorités publiques (Ostrom, 2010). Comme pour le cas de Cuba, ce type de production, basé sur le volontarisme, atteint rapidement ses limites.

Bien que le jardinage soit un loisir très répandu, le mode de vie des citadins ne colle bien souvent pas aux exigences d’entretien d’un potager à grande échelle, et les bénévoles intentionnés n’ont souvent pas les connaissances nécessaires pour mener ces tâches de manière adéquate.

Les fermes verticales sont encore utopiques car beaucoup trop chères pour qu’un pays en développement ou développé ne puissent s’en permettre la contruction (Masdar City, ville auto-suffisante au milieu du désert de l’Emirat d’Abou Dabi, est peut-être le seul endroit où ces fermes seraient envisageables).

L’idée développée dans la suite de ce mémoire est un modèle de production agricole urbaine basé récupération de surfaces urbaines inutilisées, par des professionnels, pour la production maraichère et la consommation locale. Il s’agit donc de rentabiliser les espaces sous-utilisés du paysage urbain, de créer un paysage urbain « comestible ». Afin d’assurer son aspect durable, il est nécessaire d’intégrer le développement d’un système alimentaire urbain entier dans le processus de planification : production, transformation, distribution, vente, alimentation et gestion des déchets, le tout lié à l’éducation (Image 5-9). On peut appeler ce type de planification « l’urbanisme agricole ».

Image 5-9: Système alimentaire complet

(source: auteur)

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L’agriculture urbaine, une partie de la solution ? - 38

Une série de projets à petite ou très petite échelle vont un peu dans ce sens :

De plus en plus d’entreprises créent des toitures et façades vertes. Cependant, elles ne génèrent pas de production agricole.

La ferme urbaine Lufa, à Montréal, installe des serres « haute-technologie » sur certains toits de Montréal et revend sa production par AMAP*.

Quelques entreprises américaines (Gotham Green, Cityscape Farms, Skyvegetables) tentent de trouver des clients pour installer ces mêmes serres en hydro- ou aéroponie dans les grandes villes américaines, sur des supermarchés ou restaurants ou toits privés, pour la vente directe ou de proximité. Aucune serre n’est encore en activité.

Au Mexique, l’entreprise Verde Vertical crée des façades vertes à des fins esthétiques et a lancé un projet de façades esthétiques productives (Image 5-10). Ils cultivent ainsi des laitues en hydroponie verticale dans des sacs de culture (Verde Vertical, 2010). Il ne s’agit encore que d’un test (100m²) qui n’est pas reproduit à grande échelle.

Eli Zabar, a installé, en 1995, une serre (0,2 hectares) sur le toit de son magasin « The Vinegar Factory » à l’est de Central Park, Manhattan, afin de proposer des produits frais à ses clients (Wilson, 2009). L’homme et sa chaîne de magasins (Eli’s) sont maintenant devenus une institution New Yorkaise.

Bright farm est une entreprise américaine qui propose d’utiliser les surfaces internes pour cultiver des légumes (Image 5-11). L’entreprise a déjà créé la fameuse Science Barge, à New York, bateau producteur d’énergie verte et d’aliments et de poissons issus de l’aquaponie.

A Bruxelles, l’asbl OKNO possède un potager collectif sur toit, de 150 m² le long du canal, côté Molenbeek. De même l’entreprise Klorofil, possède un petit dôme cultivé sur le toit de l’ancienne brasserie Bellevue, près de la porte de Ninove.

Image 5-10: Projet de façade productrice au Mexique (source: verdevertical.com)

Image 5-11: La « Science Barge » de New York (gauche), un supermarché productif (milieu) et un projet d'agriculture intérieure (droite) (source: brightfarmsystem.com)

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L’agriculture urbaine, une partie de la solution ? - 39

Image 5-12: Le dôme agricole de Klorofil, à Molenbeek (source: klorofil.be)

La plupart de ces projets se font sous serre, à l’horizontal, et en production hors sol (hydroponie). L’idée développée dans ce mémoire est différente car il s’agit d’utiliser toutes les surfaces disponibles, à court, moyen ou long terme, dans le but de générer une production, de la vente de laquelle des agriculteurs pourraient tirer leurs revenus. La culture se ferait au sol (parcs, friches urbaines, accotements), sur les toits (zonings, particuliers, institutions), en façade (façades aveugles, zonings, particuliers) et en caves (particuliers, avant démolition, cave inutilisées, parkings, etc.), et permettrait de récupérer les espaces plats inutilisés et de profiter de tout l’espace disponible.

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L’agriculture de récupération de surfaces, raisonnable ? - 40

6. L’ARS  EST‐ELLE  RAISONNABLE ? 

Imaginer un nouveau modèle d’agriculture urbaine pose une première série de questions globales :

De combien de surface a-t-on besoin pour satisfaire les besoins alimentaires d'une ville ?

Est-il plausible d’imaginer une telle surface cultivée en ville ? La culture de ces surfaces est-elle suffisante pour faire vivre un/des

agriculteurs ?

Dans la suite du mémoire, le projet se basera sur la ville de Bruxelles. En effet, bien que le but ne soit pas d’implanter l’agriculture dans une ville spécifique, il est intéressant de s’appuyer sur un territoire connu et son fonctionnement pour concrétiser certaines idées.

Dans un premier temps, il est possible de calculer approximativement la surface nécessaire pour combler les besoins de tous les bruxellois, et ainsi de se rendre compte du caractère sensé du projet. S’il s’avère être raisonnable, il faudra répondre à une longue série de questions plus pragmatiques. Il est important de rappeler que l’objectif de ce modèle n’est pas de fournir la totalité des besoins à Bruxelles mais bien de produire autant que possible en territoire urbain. Cette étape fait partie d’une solution pour un changement plus global de la société actuelle.

Dans le cadre de ce mémoire, une base de données a été développée. Elle permettra, après remplissage, le calcul de la surface totale disponible, celui de la production totale en fonction des espèces cultivées, celui du coût d’installation des cultures et du nombre de personnes nécessaire à leur entretien.

6.1 CALCUL  APPROXIMATIF  DE  LA  SURFACE  AGRICOLE  TOTALE  NÉCESSAIRE 

Il est possible de calculer de façon très approximative la surface agricole totale nécessaire aux besoins alimentaires de Bruxelles. En effet, certains agriculteurs ruraux cultivent des légumes qu’ils revendent à des familles sous forme de paniers hebdomadaires, via des AMAP*. Après avoir obtenus des réponses de 4 d’entre eux, j’ai calculé qu’en moyenne, ils comptent un hectare pour 80 familles de 3,5 personnes. Par extension (Tableau 6–1 et Annexe A sur CD pour plus de détail), près de 40 km², seraient nécessaires pour produire assez de légumes frais pour toute la population bruxelloise. Par ailleurs, le Tableau 6–2 permet de calculer que près de 18 km² des 161 km² de la Région bruxelloise sont des espaces verts utilisables pour la culture. Il se base sur les données de l’IBGE relatives aux espaces verts (Image 6-1), croisées avec une approximation personnelle des proportions de ces surfaces qu’il semble plausible de mettre en culture. En effet, toutes les utilisations des espaces verts ne se prêtent pas à la culture : on pourra cultiver les friches en presque totalité alors qu’on ne pourra imaginer cultiver qu’un pourcentage restreint des jardins publics.

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L’agriculture de récupération de surfaces, raisonnable ? - 41

Tableau 6-1: Calcul approximatif de la surface agricole totale nécessaire à Bruxelles

Nom  Surface   Familles fournies  Pers/fam  Ha/famille Ha/pers  Pour Bruxelles 

Les Paniers Verts  7 ha  650  3  0,011  0,0036  3906,12 ha  39 km² Haricots  1 ha  100  3,5  0,010  0,0029  3108,95 ha  31 km² 

Helia  1 ha  80  3,5  0,013  0,0036  3886,19 ha  39 km² 

Arc‐en‐ciel  3 ha  180  4  0,017  0,0042  4533,89 ha  45 km² 

Moyenne  35,46 m²  3858,79 ha  38,59 km² 

Image 6-1: Répartition des types d’espaces verts en % des superficies totales d’espaces verts (8563 ha) de la Région de Bruxelles-Capitale (source: IBGE, 2011)

Tableau 6-2: Calcul des surfaces au sol disponibles à Bruxelles

Type  Surface totale (ha)  Partie cultivable  Surface cultivable (ha) 

Jardins et domaines privés  3596  10%  360 

Bois  1713  10%  171 

Parcs et jardins publics  1028  10%  103 

Friches  600  80%  480 

Terres agricoles  600  100%  600 

Espaces verts associés à la voirie 

257  10%  26 

Talus de chemin de fer  257  10%  26 

      Total : 1766 ha, soit 17,7 km² 

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L’agriculture de récupération de surfaces, raisonnable ? - 42

A ces surfaces au sol, il faut encore ajouter les surfaces en toiture et en façades, plus difficiles à calculer.

Il faut garder à l’esprit que cette production est saisonnière et ne peut compenser les besoins en fruits et légumes durant toute l’année : il est en général possible de produire des produits frais d’avril à décembre, et des produits de conservation tout au long de l’année (pommes, oignons, ail, pommes de terre, etc.).

De plus, ces produits sont locaux, et parfois oubliés (panais, topinambour, pourpier etc.), ce qui implique un changement dans les mentalités, puisqu’il faut réapprendre à cuisiner des fruits et légumes peu communs.

Pour la production, on compte approximativement 1,5 à 2 personnes nécessaires par hectare cultivé en agriculture biologique (Deeker, 2011). Rien que sur les surfaces au sol, l’agriculture de récupération de surface permettrait la création de plus de 2500 emplois d’agriculteurs urbains. Il faut également ajouter les surfaces verticales, en hauteur et hors-lumière. On pourrait donc compter plus de 3000 emplois générés par l’ARS.

Le modèle de l’ARS* semble donc a priori réaliste.

6.2 BASE DE DONNÉES POUR LA DÉTERMINATION DE LA SURFACE TOTALE CULTIVABLE 

Une base de données a par ailleurs été construite, reprenant les besoins alimentaires (fruits et légumes) de la population, la quantité produite d’une série de culture par unité de surface, le nombre de surfaces disponibles, etc. Cette base de données est disponible sur le CD-ROM fourni en annexe de ce mémoire. Le schéma de la page 45 explique le raisonnement de la base de données : elle fonctionne en deux parties, une partie relative aux surfaces dans le programme ArcGIS©, et la deuxième relative à la production dans le programme Excel©.

Pour le calcul des surfaces disponibles, le programme ArcGIS© a été utilisé pour sa facilité de représentation graphique. Des champs sont ajoutés dans la table d’attributs d’une couche reprenant les bâtiments de Bruxelles, afin de détailler les caractéristiques de leur toit : inclinaison, accessibilité, capacité (charge d’usage) et ensoleillement (Image 6-2).

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Image 6-2: Capture d'écran de la base de données géographiques

La même opération est à réaliser pour les surfaces verticales et les surfaces au sol :

Les champs à créer dans la table d’attributs des surfaces verticales sont la surface, l’accessibilité, l’orientation, l’ensoleillement et la présence de fenêtres. La surface des façades est calculée approximativement selon le nombre d’étages du bâtiment. L’orientation et ensoleillement sont des caractéristiques importantes car elles détermineront si la culture (et de quelles espèces) y est possible.

Pour les sols, les champs ajoutés sont le statut (public/privé), l’accessibilité, l’ensoleillement, le type de surface (friche, jardin privé, parc public, etc.), la présence de polluants, et le pourcentage cultivable. Comme dans le Tableau 6–2, cette valeur est approximée selon le type de surface et ses caractéristiques.

Suite à un relevé sur le terrain et via des images satellites (Google Earth) ou aériennes (BingMaps), il est possible de remplir ces champs.

Certaines cultures demandent un environnement sans lumière (champignons de Paris, chicons, etc.). Le calcul est rendu plus compliqué pour ces lieux puisqu’il s’agirait de caves privées ou publiques, de locaux désaffectés ou, à court terme, de bâtiments dans l’attente d’une démolition. Une solution reste à trouver pour les intégrer dans le calcul des surfaces disponibles.

Parallèlement, des critères de sélection des surfaces doivent être décidés, selon des calculs de rentabilité économique ou de faisabilité technique : les superficies inférieures à une valeur seuil ne sont par exemple pas prises en compte, ainsi que les surfaces peu accessibles et les toits à trop forte pente ou à charge d’usage trop faible.

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L’agriculture de récupération de surfaces, raisonnable ? - 44

Il est alors possible de sélectionner les surfaces qui répondent à ces critères minimum, et d’exporter leur table d’attributs pour les utiliser dans le programme Excel©.

En parallèle, le programme Excel© est utilisé pour calculer la production alimentaire totale sur les différentes surfaces déterminées, et le pourcentage des besoins alimentaires de la population comblés par la production. De plus, il est possible de calculer les coûts d’installation des cultures et les heures de travail nécessaires pour ces cultures :

En fonction de leur expérience et de leurs besoins/envies, les agriculteurs remplissent les données relatives aux cultures : productivité, heures de travail, coût de production, etc. Ils répartissent ensuite les espèces sur les différents types de surface qu’ils ont à disposition, et choisissent l’importance qu’ils veulent accorder à l’une ou l’autre combinaison de cultures (rotation sur l’année, afin d’utiliser les terres pendant une période la plus large possible). La base de données calcule alors leur production totale par année, les heures de travail à prester, ainsi que les coûts d’installation et d’entretien qu’ils devront supporter.

Dans une autre feuille, les données relatives à la population (population totale et pyramide des âges) permettent, grâce à une Expertise Scientifique Collective (ESCo) de l’INRA réalisée en 2007, de calculer les besoins annuels en fruits et légumes pour la population désirée. Ainsi, la base de données calcule le pourcentage des besoins alimentaires comblés pour cette population par l’Agriculture de récupération de surface.

Le squelette de la base de données a été créé et rempli aléatoirement pour une zone qui entoure les prisons de Saint-Gilles, Forest et Berkendael. De même, seulement quelques légumes en rotation y sont répertoriés à titre d’exemple. Pour obtenir un calcul assez précis et plus large de la production agricole urbaine, il suffit de remplir le squelette avec des données géographiques de toutes les communes bruxelloises, et un nombre plus important de légumes. Il n’est malheureusement pas possible, dans le temps imparti à ce mémoire, de remplir tous les champs de cette base de donnée :

Le relevé des surfaces disponibles est bien trop important pour la création de la base de données. Une fois réalisé, ce relevé peut néanmoins être mis à jour assez facilement.

La quantité produite par les différentes espèces cultivées dépend de trop nombreux critères : variété choisie, manière de produire (serres, agriculture traditionnelle, agriculture bio, etc.), technique de fertilisation, etc. Il est préférable que les agriculteurs concernés remplissent la base de données selon leur manière de produire et leur expérience dans ce domaine.

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Schéma synthétique explicatif du fonctionnement de la base de données relative à la production agricole de récupération de surfaces (source : auteur)

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7. IMAGINER UN SYSTÈME ALIMENTAIRE URBAIN, À BRUXELLES 

Nous l’avons vu, l’agriculture de récupération de surfaces parait a priori sensée au niveau quantitatif. Dans une vision à long terme de développement de ce type de production, l’aspect qualitatif est également à prendre en compte. Afin de concrétiser les réponses aux questions que je me suis posées, je me suis efforcée de baser ma réflexion sur la ville de Bruxelles, que mes expériences académique et personnelle m’ont permis de connaître suffisamment.

Pour rappel, le but de ce mémoire est de réfléchir à une hypothèse réaliste : le développement de l’agriculture de récupération de surfaces et de l’urbanisme agricole. Cette démarche est pragmatique, mais non-dénuée d’une vision à long terme : il ne s’agit ni d’une utopie à proprement parler, ni d’une application concrète. Ceci justifie les incertitudes et imprécisions de cette étude. Les sujets abordés permettront, je l’espère, de faire progresser les réflexions et d’imaginer des recherches plus poussées.

7.1 RÉFLEXIONS  TECHNIQUES  

7.1.1 SURFACES  

Lorsque, au XIXe siècle, l'industrialisation a poussé les hommes vers les centres urbains, les jardins se sont installés à leurs portes. Aujourd'hui, grâce aux sites industriels désaffectés et au recul du nombre de citadins, les emplacements libres pour les cultures sont de plus en plus nombreux.

Les surfaces cultivables peuvent être réparties en 4 types : surfaces verticales, surfaces horizontales au sol, surfaces horizontales en hauteur, et surfaces hors lumière.

Les surfaces verticales reprennent les murs simples et les façades de bâtiments. Il est plus simple que celles-ci ne comportent pas de baie, l’idéal étant une façade aveugle. En plus de sa surface, son orientation et son ensoleillement sont essentiels à sa culture. A Bruxelles, on peut les imaginer sur des immeubles de logement ou de bureaux (Image 7-1). Bien sûr, la culture sur de telles surfaces exigerait des aménagements pour permettre l’entretien et la récolte.

Les surfaces horizontales au sol sont principalement les friches urbaines, les accotements (type talus de chemin de fer), les bois, les parcs et jardins publics, les terres agricoles, les intérieurs d’îlots et les espaces associés à la voirie (ronds-points, échangeurs, etc.). Selon le type de surface, la totalité ou seulement une proportion de celle-ci pourra être cultivée : par exemple, une friche urbaine peut être entièrement exploitée alors qu’un parc a une autre utilité et ne pourra mettre en culture qu’une partie de la superficie.

La culture de champignon peut être imaginée dans une partie de la Forêt de Soignes ou du Bois de la Cambre, et d’autres cultures dans les parcs de la Woluwe, de Laeken, sur le campus de la Plaine, etc. La culture peut tout à fait s’intégrer dans les parcs puisque toute plante qui produit un fruit ou un légume passe par un stade fleuri, ce qui égaierait les parterres cultivés avec des fleurs inhabituelles. Identiquement à certaines zones qui sont rendues privées (terrains de sports à Woluwe ou bâtiments à Ossegem, Image 7-2), on pourrait implanter des parcelles agricoles, des vergers, etc.

Certains jardins privés ou intérieurs d’îlots collectivisés pourraient également être mis en culture. En effet, certains citadins aimeraient voir une partie de leurs terres cultivées, mais n’ont pas les moyens ou le temps de les cultiver eux-mêmes.

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Les surfaces horizontales en hauteur sont principalement des toits plats ou les balcons/terrasses. Il en existe énormément et de tout type à Bruxelles : toits d’écoles, de maisons ou immeubles pour particuliers, pour entreprises, d’entrepôts, etc. (Image 7-3).

Certaines cultures demandent un environnement sans lumière : les lieux de culture sont alors des caves, locaux désaffectés ou, à court terme, bâtiments dans l’attente d’une démolition. Ils peuvent être imaginés chez des privés, dans les caves inutilisés des bâtiments institutionnels, dans les parkings, les couloirs inutilisés des métros, etc.

Image 7-1: Façades aveugles d'immeubles pour particuliers (à gauche, place Brugmann) et d'entreprises (à droite, rue Belliard) (Source : BingMaps)

Image 7-2: Disponibilité dans les parcs de Laeken-Ossegem (à gauche) et de la Woluwe (à droite) (source: BingMaps)

Image 7-3: Toits plats privés à Forest (à gauche) et d’entreprises près de Tour et Taxi (à droite) (source : BingMaps)

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7.1.2 PRODUCTION  

7.1.2.1 QUELLE  PRODUCTION  ET  OÙ  ?  

Il est essentiel de déterminer quel type de culture est possible, et sur quel type de surface. Les surfaces cultivables en ville se divisent en 4 grands types, et différents types de culture s’organisent autour de ces surfaces.

Deux types de production semblent pouvoir être mises en place pour la culture verticale :

Certains fruits et légumes sont « grimpants » et peuvent être cultivés sur un axe vertical : les haricots, les cornichons, le poirier, les tomates, la vigne, le petit pois, le houblon, les mûres ou encore la patate douce. Ces plantes ne grimpent en général pas beaucoup plus haut que deux mètres, et leur récolte s’en voit simplifiée. Elles sont donc à développer sur les surfaces verticales de taille réduite possédant une surface horizontale exploitable à leur pied. Ces cultures sont en général vivaces*, leur tronc étant cultivable plusieurs années de suite, et il est possible de les combiner avec d’autres plantes s’étendant au sol.

Des plantes non-grimpantes sont également cultivables sur surface verticale, principalement les feuilles comestibles ou les petits fruits : laitue, épinards, mâche, chou, cresson, pourpier, roquette, fraises et myrtilles. De nombreuses plantes aromatiques peuvent également y être cultivées (menthe, persil, sauge, origan, aneth, thym, ciboulette, etc.), comme beaucoup d’autres fleurs comestibles mais peu utilisées (capucines, bardane, moutarde, orties, pissenlits, etc.). Ces plantes se cultivent sur des superficies très variables.

Les cultures horizontales sont les cultures maraichères habituelles, un grand nombre de fruits et légumes connus ou moins connus, de plantes aromatiques, de fleurs ou autres. Dans le cas de Bruxelles, il peut s’agir des cultures citées ci-dessus, mais aussi d’échalotes, de salades, de pommes de terre, de radis, d’oignons, de fraises, de courgettes, de concombres, d’ail, d’aubergines, de laurier, de pommes, de navets, de bettes, de panais, etc.

La plupart du temps, le type de culture doit être adapté à la profondeur du sol disponible. Cependant, dans le cas des tubercules* comestibles, comme la pomme de terre, c’est le contraire. En effet, progressivement, suivant la croissance de la plante, il est d’usage de recouvrir la plante de terre, en ne laissant qu’une petite partie à l’air libre. Au plus la plante est recouverte, au plus nombreuses seront les tubercules. Une technique, applicable sur les surfaces horizontales, est de

les faire pousser dans des vieux pneus (nettoyés), en les empilant au fur et à mesure que l’on recouvre la plante de terre. Cette

Image 7-5: Culture de la pomme de terre en tour de pneus (source: Tomodori.com)

Image 7-4: Culture de haricots grimpants, courgettes et brocolis (source: amapdesweppes.fr)

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technique est plus productive que la culture traditionnelle en pleine terre : on peut empiler jusqu’à cinq pneus et récolter plus de 10kg/m², alors que la production moyenne européenne en plein terre est de 1,7kg/m² (FAOstat, 2009). Car en plus de l’allongement vertical de la plante, le pneu a les caractéristiques d’être imperméable, et de garder les racines à l’abri du gel car il absorbe les rayons solaires (couleur noire). Bien sûr, ce type de culture demande plus de temps de travail.

La culture du champignon constitue une source intéressante de protéines car elle peut remplacer une partie de l’alimentation carnée. La culture peut se faire en forêt, dans un mélange de sciure de bois et de copeaux.

Des espèces telles que les champignons de Paris et les chicons se développent en milieu non-lumineux (Image 7-6). Néanmoins, une partie de leur cycle de développement se fait à la lumière. Ces cultures doivent donc être associées à la culture horizontale ou verticale.

7.1.2.2 RENTABIL ISATION  DU  TERRAIN  

En outre, la plupart des cultures n’occupant pas le sol toute l’année, il est intéressant de rentabiliser le sol en organisant des rotations* de cultures et permettre de produire tout l’année. Il est même souvent possible de combiner la culture de plantes n’ayant pas les mêmes besoins biochimiques, ce qui laisse le temps au sol de se régénérer ou du moins de ne pas être surexploité. Les jardiniers « bio » proposent souvent des plans de culture quadriennaux, afin de « refaire » le sol (Thorez et Lapouge-Déjean, 2009).

Une autre technique pour rentabiliser le sol est l’association de cultures : produire plusieurs plantes en même temps sur la même parcelle. Il s’agit d’une technique ancienne et très peu appliquée dans l’agriculture moderne puisqu’elle ne permet pas la récolte mécanisée. Certaines plantes, associées à d’autres, ont un effet protecteur (maladies) ou répulsif (ravageurs) : la tomate évite la piéride du chou, la mouche de la carotte est repoussée par les oignons ou les poireaux, etc. Une couverture plus complète du sol permettra également d’éviter le développement d’adventices*, communément appelées « mauvaises herbes ». On peut associer les plantes en fonction de la saison et du temps de croissance des végétaux, ou en fonction des exigences physiologiques des espèces (croissance lente et croissance rapide, petite plante aimant l'ombre et grande avide de soleil, protection contre le vent, profondeur des racines,...). Un exemple typique d’Amérique latine est l’association de maïs, de haricots et de courges : le maïs sert de tuteur aux haricots, laissant libre champ aux courges sur le sol (Bertin, 2008). De plus, le haricot est une légumineuse : il capte l’azote dans l’air et le fournit au sol. Or, le maïs est grand consommateur d’azote. La courge quant à elle sert de couverture du sol, évite l’évapotranspiration* et donc économise l’eau, dont le maïs est tributaire. Etant donné que le travail agricole en ville ne peut que rarement se faire de manière mécanisée, l’association de cultures apparait comme une évidence de production.

Par ailleurs, on observe actuellement le développement d’Organismes Génétiquement Modifiés, et un contrôle des semences par quelques grandes multinationales (e.a.

Image 7-6: Culture en cave des champignons de Paris (source : linternaute.com)

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Monsanto) : elles fournissent des semences hybrides à seconde génération stérile*, ce qui signifie que les agriculteurs ne peuvent récolter les graines produites dans le but de ressemer leurs champs d’année en année. Ils ne possèdent alors aucune autonomie et doivent racheter des graines chaque année. Certaines espèces d’antan comme celles de l’Image 7-7 ont ainsi été oubliées car leurs semences n’ont pas été conservées. Cependant, beaucoup d’entre elles ont des propriétés nutritives plus grandes, mais surtout des besoins biochimiques et agricoles différents de ceux des cultures habituelles. Certaines organisations en ont fait des listes et en conservent les semences. Il pourrait dès lors être intéressant de diversifier la production urbaine avec ces plantes. Mais en cultivant de telles espèces (d’antan), on risque de faire face au problème de leur vente. Car si elles ont été oubliées, il faudra réapprendre à les connaître, à les cuisiner, etc. Il serait peut-être préférable de proposer ce type d’espèces aux potagers collectifs et autres mouvements alternatifs, afin qu’ils en fassent la promotion.

La température en ville étant généralement plus élevée qu’à la campagne, il est possible d’y cultiver des fruits et légumes qui poussent habituellement dans des climats plus chauds (figues par exemple).

Les choix du type de culture, du temps de rotation, et des associations de plantes doivent être faits par les agriculteurs, en fonction du type de surface, de l’exposition, d’une analyse coûts-bénéfices, etc.

7.1.3 CONTRAINTES  TECHNIQUES  

Afin de ne pas endommager le mur, il est préférable que la culture verticale se fasse plantée dans le sol mais grimpant le long d’un treillis, ou plantée dans un substrat en bacs (terre) ou sacs (hydroponie) le long du mur. Quant à la culture sur toiture, elle nécessite un bâtiment dont la charge d’usage est suffisante pour y implanter un potager (la culture nécessite entre 15 et 40 centimètres de substrat, selon les espèces). Dans le cas contraire, des travaux doivent être entamés, afin de renforcer la structure et lui faire atteindre une valeur seuil. Cette valeur doit être préalablement déterminée, et augmente en cas d’utilisation d’une serre. Il faut également vérifier la qualité et les matériaux utilisés pour l’isolation et l’imperméabilisation, afin qu’elles soient suffisantes, durable et non-nocives pour les plantes.

Les cultures sur les toits et façades requièrent également un ou plusieurs points d’accès, des installations de plomberie et d’électricité, de climatisation en cas de serre, une sortie de secours ainsi qu’un système de transport de la production.

7.1.4 INTRANTS*  

Suite aux travaux et expériences de l’Institut d’Hydroponie Simplifiée de Mexico, un groupe de québécois a décidé d’installer des jardins publics sur les toits de Montréal (Des jardins sur les Toits, 2011). Selon eux, la technique la plus simple et la plus efficace pour la culture sur toitures est la culture hors sol dans des bacs avec réserve d’eau. Il s’agit d’une technique hybride entre l’hydroponie et la culture traditionnelle en bac, qui permet de produire en ayant une autonomie d’eau (minimum 4 jours l’été et plus d’une semaine au printemps). Il me semble néanmoins que le choix du substrat

Image 7-7: Légumes d'antan: panais, crosnes, topinambours, etc. (source: Degasne, 2008)

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doive se faire en fonction des caractéristiques propres de la surface choisie (charge d’usage, orientation, etc.), et qu’il en ressortira une utilisation mixte des différents substrats disponibles.

L’approvisionnement en eau est à prévoir dans tous les cas. L’eau de pluie directe n’est généralement pas suffisante, mais sa récolte dans des citernes permettrait d’en utiliser une plus grande proportion. La quantité d’eau nécessaire varie fortement selon le type de substrat utilisé et selon les plantes cultivées. De par la collecte d’eau mais également la proximité de sources d’eau de remplacement, la dépendance de la production au climat est moindre qu’à la campagne. De plus, la culture sur façade et sur toit augmente l’ensoleillement via un rapprochement physique. Cependant ce rapprochement augmente aussi l’exposition au vent, qui pourrait impliquer l’installation de structures protectrices.

Etant donné que la production est située en ville, le fonctionnement de l’agriculture de récupération des surfaces devra se détacher de l’agriculture traditionnelle : il n’est évidemment pas question de pulvériser insecticides, pesticides et engrais comme c’était le cas à la campagne. L’agriculture urbaine sera donc forcée d’être plus respectueuse de l’environnement. Les principes de permaculture seraient en partie applicables, par exemple l’intérêt des déchets :

la biomasse inutile peut être vermicompostée (de nombreux compost de quartier sont déjà recensés à Bruxelles par Worms asbl.),

le substrat sur lequel poussent les champignons de Paris est réutilisable comme engrais pour l’agriculture,

les boues d’épuration peuvent également apporter les minéraux nécessaires à la culture de fruits et légumes,

l'aquaponie pourrait être une autre solution mais nécessiterait un investissement et une capacité de charge beaucoup plus élevé. Elle serait plus appropriée à la culture verticale en hydroponie ou à l’hydroponie sous serres.

La prévention des maladies et ravageurs peut se faire en partie grâce aux associations de plantes, mais également via la lutte biologique*, l’intégration par l’homme de prédateurs des ravageurs dans le potager.

La plupart des cultures maraichères ne sont pas pérennes : elles nécessitent d’être replantées tous les ans. Des pépinières locales seront donc indispensables pour faire germer les graines récoltées qui seront ensuite transplantables sur les différentes surfaces agricoles en ville. Le développement de ces plants se fait en serres, dont il semble que l’endroit de prédilection en ville soit les toits : accès assez simple mais à l’écart de toute acte de délinquance. On pourrait alors imaginer récupérer la chaleur perdue des aérations du bâtiment afin de minimiser les besoins énergétiques des serres.

Afin d’assurer la fertilisation des fleurs, il serait intelligent de combiner la production végétale et apicole. Or, le déclin des abeilles est très préoccupant et observé partout dans le monde (voir ‘Situation actuelle’, p.13). Le développement de l’agriculture en ville nécessitera l’utilisation d’abeilles et donc l’installation de ruches urbaines. L’apiculture urbaine n’est pas une idée nouvelle : à Paris, des ruches sont installées un peu partout, comme à l’Image 7-8 sur le toit de l’Opéra Garnier depuis 20 ans (Tourneret, 2011). En mars 2010, l’interdiction d’élever des abeilles sur les toits de New York, datant de 1999, a été levée (Un toit pour les abeilles citant le Ben Franklin Post, 2010). A Bruxelles, la Société Royale d’Apiculture de Bruxelles et ses Environs (SRABE) compte 200 membres. Aucune autorisation n’est requise pour l’installation de 3 ruches ou moins, mais quelques prescriptions sont à prendre en compte, telles que

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respecter une distance minimale de 20 mètres par rapport à une habitation (cette distance est ramenée à 10 mètres s’il y a un obstacle plein de 2 mètres de haut devant le rucher). Pour l’installation de plus de 3 ruches, un permis d’environnement est nécessaire (SRABE, 2009). En plus d’assurer la pollinisation des cultures, l’implantation de ruches permet la production de miel: entre 10 et 50 kilos de miel sont récupérables par colonie et par an. La biodiversité en ville est plus importante qu’autour d’une ruche à la campagne dans un rayon de 5 kilomètres, ce qui produit un miel aux saveurs plus complexes (Darche, 2010). Le travail nécessaire à l’entretien d’une ruche n’est pas très important : la SRABE estime que 20h de travail sont nécessaires par ruche et par an. Il semble donc très intéressant de développer l’apiculture en parallèle à l’agriculture urbaine.

La production d’autres petits animaux (volaille, pigeon, lapin) pourrait permettre la récupération des déjections pour la fertilisation agricole. Sa mise en pratique est cependant plus complexe.

7.1.5 POLLUTIONS  

Les problèmes de pollution sont inhérents aux villes : pollution du sol, de l’air et de l’eau. Il est essentiel de les prendre en compte, de faire des analyses préalables à l’implantation de potagers urbains, et de créer des normes limitatives des pollutions urbaines, dès que possible.

7.1.5.1 SOL  

Dans la plupart des cas, la qualité du sol est directement liée à la qualité des produits alimentaires : certaines cultures et certains légumes peuvent absorber les contaminants du sol, qui s’introduisent ainsi dans la chaîne alimentaire. Mais en plus, elle est indirectement liée à la qualité de l’eau et de l’air : certains produits chimiques dans le sol peuvent émaner et avoir un effet néfaste lors de leur inhalation, ou s’infiltrer dans les eaux souterraines et dans les cours d’eau par ruissellement ou percolation.

La qualité du sol est souvent liée à l’activité d’entreprises ou à l’agriculture, via le travail avec des substances comme les métaux lourds, les matières organiques et les pesticides. Cependant, les comportements quotidiens des particuliers sont également à mettre en cause : l’usage de citernes à mazout, le déversement de produits d’entretiens sur le sol, le non-respect du dosage de produit phytosanitaires et le stockage de déchets (électroménager, pneus, encombrants,…), etc. sont des pratiques très courantes qui polluent les sols durablement (Baret, Bragard et Defourny, 2009).

En 2009, les pouvoirs publics bruxellois ont mis au point une nouvelle « Ordonnance Sols », qui vise à limiter les risques de pollution pour l'homme et l'environnement, à ramener cette pollution à un niveau acceptable, et sanctionner les pollueurs. Une procédure de validation de « L’inventaire de l’état des sols » vient de débuter. Depuis 2001, un recensement a été opéré pour la pollution lourde : parcelles qui ont fait ou font l’objet d’une activité dite à risque (garages, citernes à mazout, pompes à

Image 7-8: Ruches sur le toit de l'Opera Garnier à Paris (source: thehoneygatherers.com)

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essence, imprimeries, industrie chimique, etc.) ou d’un événement qui a pu donner lieu à une pollution. Au final 18.185 parcelles cadastrales (sur les 220.000 parcelles de Bruxelles) ont été inventoriées. La validation de l’inventaire a pour but de confirmer ou infirmer ces présomptions de pollution. Cette procédure s’étalera sur trois ans, vu l’importance du nombre des personnes à contacter (37.000 propriétaires ou exploitants). (Huytebroeck, 2011). Lors de la vente d’un terrain recensé, le propriétaire ou l’exploitant est obligé par l’Ordonnance de 2009 de réaliser une analyse de l’état du sol (Portail Belgium, 2010). Si le sol est pollué et que le pollueur est le propriétaire ou l’exploitant actuel, le principe du pollueur-payeur est appliqué : le propriétaire ou l’exploitant devra assainir son sol à ses frais. Par contre, s’il s’agit d’une pollution historique (dont on ne connaît pas l’auteur), le propriétaire ne devra traiter la pollution que s’il existe des risques pour l’environnement et la santé des occupants du terrain (principe de gestion du risque).

La dépollution des sols à Bruxelles se fait principalement par excavation ou par élimination in situ (extraction de l’air du sol, ajout de bactéries, de substances chimiques, de plantes, etc.) (IBGE, 2010). Ces processus sont couteux mais indispensables à l’installation d’un potager urbain en sol. Il faut ensuite compter 2 à 5 ans avant que la culture ne soit optimale, car il est nécessaire de reconstruire et refertiliser le sol : bois raméal fragmenté (rameaux vivants fraîchement coupés), compost, purin, ou autre (Delvaux, 2008).

Par ailleurs, les voies de chemin de fer ainsi que les gares ne sont pas reprises à l’inventaire des sites pollués ou potentiellement pollués de l’IBGE, sauf si elles abritent (ou ont abrité) une activité couverte par un permis d’environnement et pouvant engendrer une pollution de sol voire des eaux souterraines. Cependant, un rapport de l’Institut National Suédois de Recherche sur la Route et le Transport (VTI) affirme que les voies de chemin de fer sont une source très importante de pollution, et en particulier de métaux lourds (Gustafsson et al., 2003). L’implantation de parcelles agricoles dans ces espaces pourtant nombreux et envisagés dans mes calculs de surface devrait peut-être remis en question.

7.1.5.2 AIR  

Conformément à « l’Ordonnance Air » de 1999, un système de mesure en temps réel calcule les concentrations de différents polluants dans l’air à Bruxelles : dioxyde de soufre, oxydes d’azote, ozone, oxydes de carbone, particules en suspension, mercure et BTX (benzène, toluène et xylène). En parallèle, un système de mesure avec analyses différées permet, après analyses en laboratoire, de déterminer les concentrations de l’air en composés organiques volatils, hydrocarbures aromatiques polycycliques, poussières*, métaux lourds (plomb, cuivre, nickel, chrome, cadmium, etc.) et agents acidifiants (IBGE, 2009). Le réseau de mesure bruxellois permet d’alimenter le pollumètre, un instrument d’information au public de la qualité de l’air. Il permet aussi de surveiller le respect des valeurs seuils fixées par la législation. En cas de dépassement de ces valeurs, des procédures d’information de la population doivent être respectées, mais aucune sanction n’est prévue puisqu’il s’agit d’une pollution collective, la principale source de pollution de l’air étant le trafic routier (IBGE, 2002). Une Directive européenne régit les teneurs de certains de ces composés, mais elle définit uniquement un cadre global grâce auquel l'Union européenne espère évaluer la qualité de l'air (mesures et interprétations) et la gérer (conserver et améliorer). La Directive prévoit que des réactions sont à établir en cas de dépassement : limitation du trafic, plans de déplacements d’entreprises, etc. (CELINE, 2011).

La pollution de l’air est donc plus problématique que celle du sol : des normes européennes relatives à la santé humaine existent, mais il est très compliqué de les faire respecter. De plus, les normes de pollution pour les humains ne donnent aucune

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indication sur l’affectation des plantes. Il semble essentiel de déterminer une limite relative aux cultures, mais la faire respecter parait difficile. De plus, les dépassements des limites se font généralement sur des courtes périodes, et il semble difficile de protéger les plantes en cas de dépassement ponctuel. Une solution serait de cultiver les plantes sous serres filtrées, mais le coût de production s’en verrait fortement augmenté. Une idée pour calculer l’impact de la pollution aérienne sur l’agriculture urbaine est de réaliser des tests sur les fruits et légumes produits actuellement dans les potagers urbains non protégés (à l’air libre, dans des friches donnant sur la rue, le long des chemins de fer, etc.).

Les principaux effets sur la végétation des pollutions aériennes sont :

Les pluies acides : le dioxyde d’azote et le dioxyde de soufre se combinent aux molécules d’eau pour former des acides nitrique et sulfurique qui s’infiltrent dans le sol lors des pluies et modifie sa composition.

L’eutrophisation : dérégulation de cycles écologiques naturels suite à un apport excessif de substances nutritives (azote et phosphore). Elle cause la diminution de la biodiversité, pollue les eaux et influence la qualité des cultures.

Les métaux lourds : peu détruits par l’environnement, ils ont une durée de vie très longue. Ils sont problématiques car ils se concentrent dans la chaîne alimentaire et sont dangereux pour la santé humaine. Il est important de se rappeler que chaque espèce a un profil type d’absorption de métal à partir du sol, et que tous les légumes ne concentrent pas tous les métaux.

L'ozone troposphérique : il cause des dégâts importants à la végétation et diminue le rendement des cultures agricoles (IBGE, 2009).

La pollution par les métaux et les particules n’affecte généralement pas les abeilles (et donc le miel), car elles ont tendance à butiner les plantes dont les fleurs pendent, et ne récoltent quasiment pas de poussières en suspension.

7.1.5.3 EAU  

La pollution de l’eau est fortement liée aux pollutions du sol et de l’air, comme expliqué ci-dessus. Elle est problématique en cas d’arrosage des cultures avec de l’eau polluée. En ville, l’arrosage se faisant principalement avec de l’eau de pluie, les pollutions présentes dans l’eau sont dues à celles de l’air.

Pour l’agriculture urbaine, les techniques de fertilisation devant être naturelles (voir p. 51), la pollution de l’eau par la culture urbaine ne devrait pas être observée. Il sera cependant essentiel de vérifier cette affirmation lors de l’implantation d’un potager urbain.

7.1.5.4 AGRICULTURE  ET  POLLUTION  

Les murs verts utilisent généralement la phytostabilisation, absorption ou fixation des toxines aéroportées par des plantes spécialisées, telles que le bambou, l’aloe vera ou le chrysanthème (Wismer & st., 2002). Certains microorganismes du sol aident également à capter les toxines, et fertilisent le sol en les transformant (ex : composés azotés). De même, certaines plantes se développent bien voire mieux en milieu très pollué, elles supportent ou nécessitent des métaux lourds pour leur développement et sont appelées « métallophytes ». La biodiversité observée sur les terrils miniers est par exemple très développée et fait l’objet de conservation particulière. Ces plantes empêchent également la dispersion de la pollution, retenue dans le sol, et permettent d’éviter la contamination des nappes phréatiques.

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Il est important de se rappeler que de nombreux éléments polluants présents en trace dans le sol ne vont pas migrer vers les plantes.

Enfin, il est vrai que la pollution de l’environnement urbain risque de nuire aux cultures, mais il ne faut pas oublier que les terres et eaux des campagnes sont très polluées et ne garantissent pas nécessairement des aliments plus sains qu’en ville (voir Situation actuelle, p.13).

7.2 RÉFLEXIONS  RELATIVES  À  L’ÉCONOMIE 

7.2.1 FISCALITÉ  

Une moyenne des prix de 5 entrepreneurs me permet de donner une estimation des prix de différents types d’installations. Des projets tels que l’installation de serres en hydroponie sur les toits coûtent approximativement $1.4 millions pour 900 m² de serres, soit 1500$/m². L’installation d’un mur végétal (non-productif) se fait actuellement pour entre 300 et 1500€ par mètre carré, et celle d’un toit vert pour entre 40 et 300€/m² (selon la pente, la surface et le type d’utilisation, intensive ou extensive*).

L’installation de toitures vertes en ville permet plusieurs types d’avantages financiers :

D’une part, des primes remboursent une partie des coûts d’installation. Le budget Primes Energie a fortement augmenté ces dernières législatures, passant de €1,1 millions en 2004 à €11.7 millions en 2010. En plus d’augmenter, ces primes se sont diversifiées, et favorisent le développement vert de la ville : en 2011, une prime d’isolation pour un toit avec toiture verte rembourse entre 10 et 35€/m², avec un maximum de 100m² et un montant maximum équivalent à la moitié de la facture (IBGE, 2011). En plus de ces primes régionales, des primes communales existent, variables selon les communes. Ces montants, bien que faibles, constituent une avancée favorable qui pourrait favoriser le développement futur de l’agriculture urbaine.

Il est également possible d’obtenir des déductions fiscales. Les dépenses pour l’isolation d’un toit d’une habitation habitée depuis plus de 5 ans donnent par exemple droit à une déduction fiscale, si la couche d’isolant a une résistance thermique R ≥ 2,5 m² K/W et si l’entrepreneur est enregistré (Service Public Fédéral FINANCE, 2011).

Un autre outil est le « prêt vert », prêt avantageux (1.5% d’intérêts) accordé pour la construction ou la rénovation en vue d’une diminution des pertes énergétiques.

Compte tenu de la situation institutionnelle belge, pour obtenir les primes et/ou subsides relatifs à la rénovation et à la construction, le "cahier des charges" à respecter est déterminé par l'autorité régionale et (parfois) communale. Néanmoins, l’Europe et le gouvernement fédéral fournissent également des aides financières ou déductions fiscales, pour l’amélioration des performances énergétiques des bâtiments par exemple (Livios, 2011).

En bref, des outils existent actuellement aux différents niveaux de pouvoir pour favoriser le développement « vert » des villes. On pourrait alors imaginer qu’ils favorisent le développement de l’agriculture urbaine. Il est essentiel de se rappeler que les primes et incitants sont les instruments de prédilection des politiques : la liste des aides relatives à la verdurisation (voire la production sur toits et façades) pourrait être étoffée si les dirigeants y portent un intérêt.

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7.2.2 GESTION  DES  TERRAINS  

Au niveau de la gestion, la production pourrait être réalisée par des agriculteurs urbains indépendants ou bien employés par une entreprise plus large. Cette entreprise pourrait alors également gérer l’installation d’un potager sur toit ou façade, et laisser au propriétaire du bâtiment la possibilité de produire lui-même ou de louer les services de culture de l’entreprise. S’il s’agit d’un bâtiment de distribution (type grande surface), le service de l’entreprise pourrait être la production avec revente directe au propriétaire.

Au vu du coût d’installation non-négligeable, il est indispensable de vérifier la durabilité de l’implantation d’un potager sur un toit ou une façade avant investissement, de calculer la taille minimale qu’une surface doit avoir pour valoir la peine d’être cultivée, économiquement parlant, et de calculer le nombre de surface minimum qu’une entreprise devrait cultiver pour être rentable. Le choix des espèces cultivées influence également le prix de « revient » du projet.

La suite de la chaîne alimentaire (transformation, emballage, stockage, distribution, vente) serait gérée de manière privée, alors qu’on peut imaginer un partenariat public/privé pour la gestion des déchets ménagers. Les coûts pourront être minimalisés si des entreprises de transformation s’installent à Bruxelles.

Il sera utile de calculer si l’avantage financier d’éviter les transports et les intrants chimiques sera rattrapé par le coût d’installation des parcelles cultivées. Il serait par ailleurs dommage que l’aspect financier de la production favorise la monoculture d’espèces ultra-productives à forte valeur ajoutée. De même, pour le producteur mais aussi le consommateur (et donc la société), l’ARS devrait pouvoir être compétitive par rapport à l’agriculture traditionnelle, afin que les prix de vente de leur production s’équivalent, voir que la production locale coûte moins cher au consommateur.

7.3 IMPACTS  SUR  L’ENVIRONNEMENT  ET  SUR  LA  VILLE  

Ce paragraphe tente de lister les coûts et bénéfices que l’agriculture urbaine génère pour la société, afin de savoir si elle est neutre par rapport à l’environnement urbain, si elle lui apporte quelque chose ou si elle lui en retire. Afin qu’elle amène un vrai aspect durable pour la ville, les avantages de sa mise en place doivent surpasser les inconvénients, sur une période pertinente et si ces effets sont équitablement répartis (principes du développement durable).

7.3.1 AVANTAGES  

Les analyses traditionnelles de coût-bénéfices ne prennent pas en compte les bénéfices alternatifs, valeurs et effets non-monétaires et non-quantifiables, apportés par l’agriculture urbaine : qualité de vie, paysage, rentabilisation de surfaces, image de la ville, etc. Le projet européen VALUE va être mis en place afin de démontrer la valeur économique des infrastructures vertes et de présenter comment cibler les investissements pour maximiser les bénéfices pour les collectivités. Quand il sera mis en place, il sera intéressant d’analyser leur méthodologie de travail. En attendant, je me suis efforcée de relever les caractéristiques oubliées dans les analyses traditionnelles. Il sera par la suite intéressant de trouver un moyen de les quantifier.

La qualité paysagère peut être un important moteur économique à l’échelle d’une ville ou d’une région. Puisque le privé n’investit généralement pas dans ce secteur, les villes et régions ont un rôle essentiel à jouer dans le développement de paysages et réseaux d’infrastructures verts et attractifs. Elles peuvent également y encourager les investissements par l’amélioration de la qualité de vie (VALUE, 2011). Comme les espaces publics de qualité améliorent la cohésion sociale, des

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aménagements paysagers attrayants peuvent augmenter le potentiel de développement.

Ramener la nature en ville améliore nettement le cadre de vie du citadin : vu la densité en ville et le manque général d’espace individuel disponible, des arbres en rue, des fleurs aux balcons, des parcelles collectives et des parcs créent déjà un sentiment de bien-être. Y ajouter des espaces verts sur les toits, les façades et les surfaces perdues ne peut qu’augmenter ces bienfaits.

Il est clair également que le rythme cyclique de la nature sera perçu plus clairement par la population grâce à l’agriculture urbaine : les parcelles seront vivantes, les cultures s’y remplaceront les unes les autres, changeant de forme, de taille et de couleur au fil des saisons. Le paysage urbain s’en verrait modifié, la ville vivant les mêmes cycles que la campagne.

Le point de vue esthétique est difficilement quantifiable car très personnel, mais il est accordé que le vert est une couleur reposante pour les yeux, et qu’un environnement de verdure permet de réduire la fatigue et le stress (Laird, 1933)

La culture en ville permettra également une diversification des odeurs urbaines. Via la couverture des toits, l’agriculture urbaine évitera les odeurs dues aux émanations des bitumes en été, désagréables et parfois préjudiciables pour la santé.

L’habitude de manger local qui doit et va se prendre, sera favorisée par le fait que la production locale soit visible. Elle favorisera également la création ou l’amplification du lien entre une ville et sa campagne.

Le contact du citadin avec la terre et sa connaissance du travail agricole se perdent depuis quelques dizaines d’années. L’aménageur peut se réjouir de la proximité spatiale entre ces deux milieux, car elle permet une meilleure intercompréhension et tend à reboucher le fossé qui existe entre ces deux mondes.

Le développement durable des villes et leur évolution post-pétrolière devra passer par une nouvelle manière d’éduquer et d’apprendre. L’agriculture urbaine favoriserait ce développement : rapprocher la culture et l’alimentation permettra à tous de (re)découvrir comment poussent les denrées alimentaires connues et moins-connues (scolaire, formation professionnelle, formation pour le plaisir).

A côté de ces critères non-quantifiables, il a été prouvé scientifiquement que la couverture végétale et la production agricole en ville possèdent des propriétés qui améliorent l’environnement urbain :

Comme le montre l’Image 7-9, le processus de photosynthèse peut être résumé en la transformation, grâce à l’énergie solaire, de 6 molécules de dioxyde de carbone et 6 molécules d’eau en une molécule de glucose et 6 molécules d’O2. A l’inverse, la respiration utilise 6 molécules d’oxygène pour brûler une molécule de glucose, réaction qui produit de l’énergie, du dioxyde de carbone et de l’eau. Ce cycle permet de transformer l’énergie lumineuse en énergie chimique. La photosynthèse doit cependant être plus importante que la respiration pour qu’une plante se développe. En effet, l’énergie produite est entre autre utilisée pour la croissance (tige) et la reproduction (fruits), via Image 7-9: Schéma de la photosynthèse

et de la respiration (source: auteur)

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la transformation et le stockage d’autres molécules de glucose en amidon, graisse ou protéine (Ledent, 2007). C’est la raison pour laquelle la présence de plantes en ville permet, au final, de réduire les teneurs en CO2 dans l’air et d’augmenter celles en oxygène. Il serait intéressant de calculer la quantité de CO2 fixée par les plantes afin de calculer l’apport général de l’agriculture urbaine à la réduction des émissions de ce gaz dans nos villes.

En plus du captage des poussières et microparticules par les plantes, les toits verts permettent de limiter leurs remous : en évitant la surchauffe des bâtiments, ils évitent également que la chaleur émanant des toits ne les charrie. Les poussières sont ainsi stabilisées.

Les plantes ont en outre une grande capacité à stocker la chaleur dans l’eau qu’elles traitent et utilisent, ce qui équilibre également les températures.

Via la transpiration et la formation de rosée, les plantes régulent l’humidité de l’air.

Selon Minke (2010), afin d’obtenir un climat urbain nettement plus sain et une bonne qualité d’air, il suffirait de verduriser entre 10 et 20% de la surface d’une ville.

Le substrat sur lequel poussent les plantes possède quant à lui une propriété d’isolant acoustique : il permet d’éviter la réverbération des bruits sur les parois lisses des villes, de disperser les ondes sonores, et de transformer leur énergie en énergie de mouvement et en chaleur. Les surfaces verticales et horizontales permettent la réduction du bruit ambiant de 2 à 3 dB(A) (Minke citant Mürb, 1981).

A plus large échelle, la présence de végétation réduirait l’effet « île de chaleur » en ville. Ce phénomène est dû à la grande quantité de surfaces artificielles telles que le goudron, l’asphalte, etc. en ville, qui absorbent une grande partie des radiations solaires, empêchant le rafraîchissement naturel par les plantes, trop peu nombreuses. Ces chaleurs favorisent des émanations de gaz de ces surfaces, et des pics d’ozone, provoquant des effets néfastes sur la santé. Une solution proposée par la NASA pour les mégapoles américaines est de promouvoir des trottoirs et toits de couleur claire (réflexion de la lumière et de la chaleur), l’aménagement de forêts urbaines et la création de toits vivants (L’express, 2006).

Les cultures en ville permettent d’augmenter le nombre de surfaces capables de retenir l’eau de pluie. Sur les surfaces cultivées, entre 50 et 90% de l’eau est retenue, une grande partie en s’évaporant, et le reste s’écoulant lentement dans le sol (Lutts, 2008). La culture limite ainsi le débit envoyé à l’égout, le ralenti, et réduit ainsi le risque d’inondations. L’apport en eau pour l’agriculture de récupération de surface se faisant principalement par l’eau de pluie, un réseau de citernes de collectes devra être développé. Or, en cas de forte pluie, une citerne joue un rôle tampon et diminue la quantité d’eau déversée à l’égout, susceptible de grossir une inondation.

La récupération de cette eau de pluie permet également d’éviter à l’eau de pluie de faire partie des eaux à dépolluer dans les stations d’épuration, et d’éviter ainsi des coûts inutiles.

De même, le développement urbain et la société en général pourraient bénéficier de l’implantation, du développement et de la bonne gestion de l’agriculture urbaine de récupération de surfaces :

Une bonne gestion de l’ARS pourrait permettre de ne pas utiliser d’engrais et de pesticides issus de ressources fossiles. La production agricole se fait de manière non mécanisée et en cycle court, ce qui réduit également les besoins en pétrole et les coûts liés au transport. La chaine de conservation des aliments nécessite moins de matériel, d’énergie et de place (stockage, transfert frigorifié, etc.). La

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dépendance alimentaire à l’extérieur est aussi réduite. Tous ces facteurs induisent une résilience plus grande du milieu urbain.

L’ARS occasionne une rentabilisation des friches et des autres surfaces inutilisées, en permettant la création d’une nouvelle source de revenus. Cette relocalisation de l’économie permettrait une stimulation de l’économie locale.

Malgré ce que l’on pourrait croire, la biodiversité en ville est bien développée. La biodiversité de la ville augmente avec la diversité des espaces verts mais aussi des cultures : les espaces cultivés apportent une faune et une flore spécifiques, mais peuvent aussi servir de refuge aux animaux et plantes déjà présents. L’ARS permettrait certainement un retour de certains insectes en ville, tels que les papillons, certaines mouches, etc. et donc d’oiseaux et faune associée. Certaines friches doivent cependant rester non-cultivées car le développement naturel des plantes permet un foisonnement de la biodiversité, et la croissance d’arbres et arbustes dans lesquels les oiseaux peuvent nicher (Biodivercity). Un fauchage occasionnel peut être réalisé afin d’optimaliser la biodiversité de ces parcelles.

L’agriculture urbaine, en parallèle à la gestion des friches, peut alors s’inscrire dans le maillage vert entamé par l’IBGE (Image 7-10). Ce programme est basé sur la création, la protection et la mise en relation physique d’espaces verts, dans un but écologique mais également urbanistique : reconstitution d’un véritable maillage écologique et de corridors, qui autorisent au sein de la ville la circulation des espèces animales et végétales, mais aussi promotion de la mobilité douce, équilibrage régional des espaces verts, qualité paysagère de la ville, etc. (IBGE, 2010). Le rapprochement du citadin et des enfants avec la nature s’en fera d’autant plus rapidement.

Il est possible que l’agriculture urbaine entraîne à long terme une diminution des coûts de soins de santé. D’une part, l’amélioration de la qualité de l’air réduirait peut-être le nombre de problèmes pulmonaires et d’allergies. D’autre part, une réduction des maladies non-transmissibles telles que l’obésité, les maladies cardiaques ou le diabète pourrait être observée, grâce à la sensibilisation de la population à l’alimentation saine (voir ‘Situation actuelle, p.13). Cette dernière serait générée par le rapprochement de ces personnes avec la production maraichère, la réduction du coût de ces denrées saines, mais aussi par un changement dans la mentalité et l’éducation des citadins.

L’agriculture urbaine permettra la création d’emploi vert : comme calculé grossièrement à la page 40, rien que pour la production, l’ARS permettrait d’occuper plus de 3000 agriculteurs urbains. Il faut ajouter à cette somme les travailleurs nécessaires au reste du système alimentaire (principalement la transformation, et la distribution). Le travail à fournir ne demande pas de capacités particulières, et une idée pourrait être de développer une école pratique d’agriculture urbaine afin de former les personnes qui le désirent à la production maraichère.

Enfin, l’agriculture de récupération de surface possède également des effets positifs à plus petite échelle, celle des bâtiments. En effet :

Image 7-10: Maillage vert et bleu à Bruxelles (source: IBGE)

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La végétation est un bouclier contre les intempéries (pluie, surchauffe, gel) et les rayons ultraviolets, et allonge la durée de vie des toits (Minke, 2010).

Les toits et façades verdurisés permettent par ailleurs une augmentation des performances énergétique des bâtiments en leur procurant une isolation naturelle en hiver, et en absorbant la chaleur en été.

Comme pour l’extérieur, le substrat des plantes permet l’isolation acoustique, bien meilleure, de l’intérieur des bâtiments. Les bruits aériens peuvent être diminués de près de 40 dB.

Comme expliqué plus haut, dans le cas de cultures sous serres, l’énergie nécessaire aux serres peut être apportée via la récupération de la chaleur perdue par les aérations des bâtiments. De plus, les serres sont situées en altitude et bénéficient d’une plus grande arrivée de lumière et de chaleur solaire, ce qui diminue leur consommation par rapport à une serre installée au niveau du sol. Ainsi, le bâtiment et la serre sont en quelque sorte en symbiose.

Les primes accordées et l’image de marque des bâtiments concernés augmenteront également leur valeur intrinsèque.

La maintenance et le contrôle de la production et des surfaces doivent cependant être constants et professionnels, afin d’éviter l’endommagement des murs ou la destruction des toits par le développement d’arbres ou d’arbustes.

7.3.2 INCONVÉNIENTS  

D’autre part, l’agriculture de récupération de surface aura des influences négatives sur certains domaines urbains :

Dans le cas des surfaces au sol, le développement de l’ARS impliquera une perte d’espace public : une partie des parcs pourrait servir à la production mais serait alors inaccessible au public afin d’éviter les dégâts et vols. Les parterres cultivés pourront néanmoins égayer la vue des promeneurs. De même, dans quelques parcs bruxellois, l’accès public à certaines zones est déjà limité (installations sportives, bâtiments, etc.).

Il serait nécessaire de vérifier que les cultures maraichères ne produisent pas d’agents allergènes. Le risque n’est pas grand puisque les allergies les plus courantes sont celles à l’ingestion de fruits à coque, céréales ou produits d’origine animale. Les allergies d’origine aérienne sont quant à elles généralement plutôt dues aux pollens de graminées et bouleaux (Oasis-allergie, 2006).

L’agriculture de récupération de surface pourrait entrer en concurrence avec d’autres installations sur toitures : vu la tendance actuelle de diversifier nos sources d’énergie, une étude de la compatibilité entre l’ARS et le développement des énergies renouvelable sera à réaliser. Les toits (plats ou non) sont en effet très favorables à l’implantation de panneaux solaires en ville. Il est néanmoins important de se rappeler que le foisonnement actuel des panneaux solaires suit une décision politique d’accorder des primes pour leur installation. La future « compétition » possible entre les énergies renouvelables et l’agriculture urbaine sera donc éminemment politique : selon leurs priorités, les subsides ou incitants accordés à l’un et/ou à l’autre favoriseront leur développement respectif.

De même, de nombreuses grandes surfaces utilisent leurs toits comme parkings pour les consommateurs. Une concurrence entre l’agriculture et l’automobile pourrait alors se présenter.

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7.3.3 BILAN  

La quantification des avantages et inconvénients de l’agriculture urbaine peut être réalisée assez facilement pour certains critères : une série d’indicateurs existent ou pourraient être créés pour quantifier certains avantages et inconvénients difficiles à apprécier directement. Par exemple, l’évolution de la concentration d’un type de particule/molécule dans l’air pourrait indiquer l’amélioration de sa qualité, l’évolution de la quantité d’eau traitée en station d’épuration permettrait de quantifier la rétention d’eau par les plantes et leur substrat, etc. D’autres critères sont très difficilement mesurables.

Dans tous les cas, le bilan général de ces avantages et inconvénients dépendra des caractéristiques de la ville concernée. En effet, selon ses spécificités, les effets de l’agriculture urbaine seront ressentis très différemment. De même, une pondération devra être apportée aux avantages et inconvénients : une ville dont les habitants sont fortement soumis à l’insécurité alimentaire accordera une importance plus grande à ce critère dans la balance des coûts-bénéfices.

Les nombreux avantages à court terme ne doivent par ailleurs pas faire oublier d’analyser les coûts et bénéfices à long terme de l’agriculture urbaine. Ils se divisent en trois grandes catégories : économiques, sociaux et écologiques, qui correspondent aux 3 piliers du développement durable.

7.4 FREINS  AU  DÉVELOPPEMENT  DE  L’AGRICULTURE  URBAINE 

Malgré ces impacts généralement positifs, et un éclaircissement des questions techniques et économiques, l’agriculture de récupération de surfaces rencontrera des obstacles si on veut réellement l’implanter à Bruxelles. Dans ce paragraphe, je détaillerai 4 d’entre eux : l’accès aux surfaces, l’aspect législatif (outils d’urbanisme), la séparation des compétences et les appréhensions de la population et des services publics.

7.4.1 ACCÈS  AUX  SURFACES    

La gestion de l’accès aux surfaces restera problématique dans bien des cas, que les cultures se fassent au sol ou en hauteur. En effet, l’entretien des cultures demande du travail récurrent et nécessite un accès continu aux toits et façades par des professionnels. Il est par ailleurs également nécessaire que personne d’autre, même les propriétaires des surfaces, n’y ait accès sans permission. En effet, des actes de délinquance urbaine et agricole sont trop fréquents dans les potagers existants : vol de la production, piétinement, excréments de chien, branches cassées et pollutions (déversement des eaux de nettoyage, etc.) sont dommageables pour le bâtiment, la surface et l’agriculteur. Les potagers existants étant souvent installés sans accords particuliers, aucune législation ne punit la délinquance.

Il sera également nécessaire de définir un statut aux surfaces et à la production : s’agira-t-il d’un contrat de location, de propriété ou autre ? La production sera-t-elle comptée dans le contrat, ou bien entière propriété du producteur ? Selon moi, une multitude de possibilités sont possibles et se côtoieront, au cas par cas.

En Belgique, il est très courant que les agriculteurs louent les biens agricoles nécessaires (terrain et/ou bâtiment), par un « bail à ferme », valable pour 9 ans (yourtax, 2008). En effet, les terres classées comme « agricoles » au plan de secteur ne peuvent servir à autre chose qu’à la production agricole. Les fermiers dans le besoin peuvent ainsi se défaire de leurs biens en continuant à les cultiver. Ils louent les terres qu’ils cultivent plutôt que de les posséder. Selon le type de

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Imaginer un système alimentaire urbain, à Bruxelles - 62

contrat, la production leur appartient en totalité ou en partie : en cas de métayage*, une fraction de la production peut servir de paiement au propriétaire de la terre (Bertin et al., 2009). Il semble indispensable de développer un type semblable de bail et une législation liée à l’utilisation des surfaces en ville.

L’achat d’un terrain vague dans un but unique de production agricole ne semble pas rentable, vu le prix des parcelles à Bruxelles. La location me semble le meilleur moyen de produire à coûts réduits car l’installation d’un potager au sol ne demande qu’un investissement minimal. Cependant, ce procédé ne permet pas d’avoir l’assurance de la location à long terme, le propriétaire pouvant construire ou revendre le terrain assez rapidement. Dans son livre La stratégie de la framboise, D.L. Pélegrin interroge : « Puisque, définitivement, nous sommes urbains, pourquoi ne pas rapatrier les campagnes dans les villes ? On loue bien un appartement avec parking. Bientôt, il sera peut-être banal de louer un jardin ou un espace vert. »

Une autre difficulté rencontrée sera de trouver la personne à qui s’adresser pour demander l’accès aux surfaces, puis de la convaincre de l’intérêt de laisser quelqu’un (particulier ou entreprise agricole) y pratiquer l’agriculture urbaine.

Au niveau des surfaces au sol publiques (parcs, bois, accotements, terrains, etc.), il est possible d’imaginer des processus de concession/permission/autorisation de voirie, de servitude ou la création d’une asbl. para-régionale qui y gèrerait la culture (entretien avec P.Barthélémy). Certains bâtiments institutionnels sont gérés par un organisme à part entière (CPAS) qui ne décident cependant pas de l’utilisation des surfaces et bâtiments. De plus, les toits et façades ont un statut particulier qu’il faudra réglementer.

Par la suite, il sera très important de bien définir les rôles et responsabilités des deux parties : la gestion, l’entretien, le contrôle, etc. ne seront plus à charge du secteur public. Il est important à noter que la gestion de l’installation d’espace privé dans l’espace public devra également être abordée.

Par ailleurs, l'aménagement de toits verts sur les édifices publics témoignera de la confiance des administrations dans cette technologie et favorisera son développement à plus large échelle.

Du point de vue des surfaces privées, la recherche du propriétaire est simple chez les particuliers et les entreprises. L’intérêt de l’agriculture urbaine pour le bailleur est clair : l’utilisation d’une friche lui apporte un revenu qu’il ne possédait pas, et celle d’un toit ou d’une façade représente des rentrées qu’il n’imaginait même pas, tout en augmentant la valeur de son bâtiment (voir p.59). De plus, l’image de marque apportée au bâtiment est non négligeable, et peut servir de « publicité » pour les entreprises ou les institutions.

7.4.2 LÉGISLATION  

L’implantation d’activités agricoles en ville devra également faire face aux règlementations de zonage, contraintes de permission et autres codes d’urbanisme. Selon Eric Levron, urbaniste, les pouvoirs locaux doivent planifier l’agriculture urbaine dans le but de la pérenniser,(Grollier, 2009).

Pour rappel, les outils planologiques en Région Bruxelles-Capitale sont au nombre de quatre et sont définis par l’ordonnance régionale organique de la planification et de l’urbanisme du 29 août 1991 (suivie de diverses modifications). Selon le CoBAT (Code Bruxellois de l’Aménagement du Territoire), nous trouvons les 4 plans régionaux et communaux suivants : PRD PRAS PCD et PPAS. En plus de ces 4 plans, l’ordonnance de la planification et de l’urbanisme prévoit 2 règlements d’urbanisme :

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RRU et RCU (Tableau 7-1). Un Plan Régional de Développement Durable, révision du PRD, est en cours d’élaboration (voir p.66).

Tableau 7-1: Tableau récapitulatif des outils de planification à Bruxelles en 2011

Nom Acronyme Niveau Valeur Contenu

Plan régional d’affectation des sols

PRAS Région

Force obligatoire et valeur réglementaire

Situation existante de fait et de droit, affectations et prescriptions, zones de protection

Plan régional de développement

PRD Région Indicatif et engageant

Objectifs de développement, priorités, moyens et zone d’intervention

Plan particulier d’affectation des sols

PPAS Commune

Force obligatoire et valeur réglementaire

Situation existante de fait et de droit, affectations et prescriptions, zones de protection

Plan communal de développement

PCD Commune Indicatif et engageant

Objectifs de développement, priorités, moyens et zone d’intervention

Règlement régional d’urbanisme

RRU Région Valeur réglementaire

Dispositions pour assurer la salubrité, l’habitabilité, la sécurité, etc. d’une zone

Règlement communal d’urbanisme

RCU Région Valeur réglementaire

Dispositions pour assurer la salubrité, l’habitabilité, la sécurité, etc. d’une zone

Actuellement, si l’on veut construire un toit vert sur un bâtiment existant, un permis d’urbanisme est nécessaire. En effet, il est obligatoire en cas de transformations de bâtiments, à l’exception des travaux d’entretien et de conservation. Ces transformations comprennent les modifications intérieures et extérieures, même si elles ne touchent pas au volume général du bâtiment. De même, en cas de modification sensible du relief du sol (>50cm) un permis est requis. Une étude d’incidence sur l’environnement serait peut-être requise en cas d’implantation d’une grande surface agricoles (sur le toit d’une entreprise par exemple). Malheureusement, les nombreux impacts positifs difficilement quantifiables (voir p.56) ne seraient pas pris en compte dans cette étude. Par ailleurs, lorsqu’une étude d’incidence est réalisée, des mesures de compensation sont proposées pour diminuer les effets des incidences négatives. Il serait alors intéressant de permettre l’aménagement de parcelles agricoles sur les toits et façades comme compensation pour une construction à l’empreinte négative trop forte.

Une meilleure valorisation des terres (notamment via des plans d'occupation des sols) permettrait à l'agriculture urbaine de se structurer et assurerait son bon développement. La ville manque d’une législation relative à l’agriculture urbaine, ce qui ralentit le processus de développement de nouveaux projets puisqu’il n’existe pas de procédure standard pour l’approbation et la permission de tels projets. Une règlementation permettrait d’assurer une conformité de réalisation et l’imposition de normes minimales (épaisseur du substrat, provenance, espèces spécifiques, surface minimale laissée en friche, etc.) dans le but d’améliorer la qualité de l’environnement (chaleur, bruit, etc. voir p.57). Des sanctions devraient aussi être imaginées afin de veiller à la qualité de conception, de construction et d’entretien des parcelles.

Selon moi, l’inscription de l’obligation de réaliser des parcelles agricoles sur les toits et façades dans des règlements n’est pas une idée à développer. En effet, l’entretien et la production ne seront pas assurés. Il serait par contre intéressant d’imposer des normes

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de construction qui facilitent le développement de parcelles agricoles futures (toits plats, charge d’usage, installation de barrières, etc.). Les toits productifs ne devraient en effet pas être perçus comme une contrainte mais plutôt comme un atout, et la décision de louer ses surfaces devrait être laissée au propriétaire. De plus, en cas de mauvais entretien des surfaces, l’image de marque de l’agriculture urbaine se verrait dégradée, puisqu’aucune législation relative à l’entretien n’est encore sur pied.

7.4.3 SÉPARATION  DES  COMPÉTENCES  

Nicolas Gilsoul, architecte belge imprégné d’idées vertes, a récemment gagné un concours pour le recouvrement de la petite ceinture. Selon lui, la mise en œuvre de son projet, comme de tout autre projet urbanistique, est difficile à imaginer à Bruxelles car les politiques territoriales fonctionnent par secteur : une division en différentes formes de gouvernement (fédéral, régional et communal) ne favorise pas ce type de projet (CdM, 2011).

Par exemple, les 4400 hectares de la forêt de Soignes sont actuellement gérés à 38% par la RBC, à 56% par la Région Flamande et à 6% par la Région Wallonne. En plus de ces trois administrations, une partie des biens périphériques (parc de Tervuren, parc Solvay, etc.) sont gérés par d’autres organismes : organismes privés, Donation Royale et Fondation Solvay. Un schéma de structure général de la forêt a néanmoins été établi, signé par tous les gestionnaires. Il définit des propositions pour la protection de la forêt, qui doivent être traduites en projets définitifs et réalisations concrètes sur le terrain. L’implantation d’une parcelle de culture de champignons devrait donc passer par une modification de ce schéma de structure, avec approbation par les 3 régions.

Il serait plus efficace qu’il y ait une collaboration entre les différents pouvoirs publics pour aborder le problème, créer des politiques et mettre en place des actions de manière plus globale. C’est la vision actuelle de l’espace public en elle-même qu’il serait intéressant de revoir : si la place publique ou le parc sont importants en soi, il est nécessaire de les relier au sein d’un territoire beaucoup plus large et les imaginer de manière plus globale et intégrée.

7.4.4 POPULATION  ET  SERVICES  PUBLICS  

La proximité entre les citadins et la production agricole risque de soulever des préoccupations relatives au bruit, aux poussières, aux odeurs et autres dangers. De plus, l’accès aux surfaces en hauteur (toits et façades) amènera sûrement des conflits d'usage et de voisinage : l’accès pour l’entretien et la récolte de la production permettra aux agriculteurs d’avoir une vue et une accessibilité sur des endroits qui n’en ont habituellement pas. Une grande confiance devra alors être donnée aux agriculteurs, car le cambriolage en sera d’autant plus facile.

Par ailleurs, certains contestataires risquent de pointer du doigt l’augmentation des insectes en ville, l’odeur générée par l’épandage d’engrais organiques.

Les services de prévention du feu redoutent quant à eux que les toits verts ne fassent obstacle à la lutte contre le feu, et que les pailles constituent un risque d’incendie important sur les toits, difficiles d’accès. Cependant les toits verdurisés sont une protection idéale contre les incendies, pour les toits qui ont une propension à s’enflammer : le toit déjà humide ralenti la propagation du feu. En Allemagne, les toits verts sont considérés comme incombustibles et valables comme protection-incendie (Minke, 2010).

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7.5 TRANSFORMATION,  DISTRIBUTION  ET  VENTE    

Un système alimentaire urbain durable formera une boucle fermée s’il permet à une ville d’importer moins de ressources pour la production de denrées nécessaires, et s’il permet simultanément de réduire la quantité totale de déchets produits. Afin de parler de véritable urbanisme agricole, il est donc nécessaire de prendre en compte la production mais également la transformation, l’emballage, le stockage, la distribution et la vente des produits agricoles, ainsi que la gestion des déchets ménagers.

Selon moi, le nombre de consommateurs étant suffisant en ville pour écouler la production urbaine, cette dernière ne devrait pas quitter la ville, ni pour la vente, ni pour la transformation. Or, bien que le secteur agroalimentaire soit le deuxième plus important secteur industriel en Belgique (15,5 % de l'économie belge), très peu d’entreprises de transformation se situent à Bruxelles (Fevia, 2011). Il n’existe que de petites entreprises qui traitent principalement le cacao, les boissons et la viande, et dont les produits sont destinés à l’exportation. L’installation de nouvelles entreprises agroalimentaires sur le territoire bruxellois est nécessaire pour respecter les principes durables de l’urbanisme agricole. Des locaux seront alors nécessaires, que l’on pourrait imaginer dans de nouveaux bâtiments mais également dans les bâtiments/bureaux vides. On pourrait également penser à développer plus intensivement l’agriculture urbaine sur les surfaces disponibles dans les zoning aux alentours de ces usines, afin de limiter au maximum le transport nécessaire entre les produits et l’usine de transformation. Des points de ventes locaux associés pourraient permettre la vente directe après transformation. Cependant, ces zones étant relativement écartées des centres urbains, il semble plus intéressant d’acheminer la production de manière massive vers les points centraux de distribution, et éviter ainsi le déplacement de chacun des acheteurs sur de « longues » distances.

Il est également important de se préoccuper du réseau de distribution et de vente des produits agricoles. Actuellement, le secteur agroalimentaire belge est axé sur les exportations : 50 % de la production est destinée à des marchés étrangers. De même, 50% des produits disponibles en Belgique sont issus de l’importation. Le marché belge présente de bons débouchés pour les secteurs des aliments « santé » et biologiques, des aliments et légumes, congelés et frais, et des fruits séchés, entre autres (Keymolen, 2008). De même, un éventail de canaux de distribution est disponible pour le marché alimentaire belge : les principaux clients de l'industrie agroalimentaire sont les détaillants, les grossistes ainsi que les distributeurs qui achètent les produits pour un grand nombre de ces canaux de distribution simultanément. Plusieurs alternatives semblent donc imaginables : écouler une partie de la production chez les détaillants et restaurants, mais également avoir des acheteurs plus importants, comme les chaînes de magasin. En Belgique, entamer des discussions avec le groupe Colruyt, pionnier dans le système de distribution durable, est une idée qui me semble avoir des chances de « porter ses fruits ».

En l’absence relative de pouvoir des consommateurs individuels, seul l’Etat peut exercer un contrôle en leur nom. Son rôle devrait donc également être repensé pour l’installation d’un système alimentaire global. Il serait par exemple nécessaire de rééquilibrer les agricultures, en offrant à chacune les mêmes opportunités : accès à l’espace, aux ressources, aux rayons des magasins, à la labellisation, à la publicité, etc. (Baret, 2008)

Il est important de garder à l’esprit qu’un réseau d’approvisionnement ne peut pas être exclusivement local car il aurait un effet d’isolement et pourrait être instable. La question ici ne se pose pas, puisque la production urbaine ne sera, de toute façon, pas suffisante. L’idée est plutôt de concrétiser une chaine alimentaire locale qui se développe dans le contexte social, politique et économique existant.

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8. PROPOSITIONS 

Nous l’avons vu, le développement de l’agriculture urbaine nécessitera d’informer la population, de modifier la législation, de réaliser des recherches plus poussées sur les pollutions urbaines, de calculer des rentabilités économiques, de faire des choix techniques, etc. Je peux alors imaginer des outils, à développer à court ou moyen terme, qui favoriseraient le développement à long terme de l’agriculture urbaine, et lui permettrait de prendre son envol assez rapidement après la mise en place initiale. Il s’agit en fait de prévoir ce dont elle aura besoin pour se développer à long terme et de mettre en place les dispositions nécessaires, dès à présent.

8.1 CRÉATION  DU  PLAN  RÉGIONAL  DE  DÉVELOPPEMENT  DURABLE  

En 2009, le Gouvernement de la Région Bruxelles-capitale a annoncé son intention de modifier totalement le Plan Régional de Développement qui avait été élaboré en 2002 du fait de nouvelles données et de nouveaux impératifs survenus ces dernières années. La Déclaration de politique générale 2009 a explicitement réaffirmé cet objectif en annonçant le lancement du processus d’élaboration du Plan Régional de Développement Durable (Bruxelles+10, 2011).

Le nouveau PRDD traduira les grandes priorités d’action pour la Région aux horizons 2020 et 2040. Comme la PRD, il s’agit d’un plan stratégique qui servira de cadre à l’ensemble des décisions concernant Bruxelles. Il servira à répondre aux défis du développement durable, et plus particulièrement pour Bruxelles, à l’essor démographique, l’emploi, la formation et l’enseignement, l’environnement, la dualisation de la ville et l’internationalisation. Il intègrera les plans et outils existants, tels que le Plan Logement, le Plan Climat, les Schémas Directeurs, les Contrats de Quartier, etc. afin de permettre la cohérence entre les différents domaines de l’action gouvernementale (Bruxelles+10, 2011).

Cette révision est une opportunité pour le développement de l’agriculture urbaine : il est plus facile d’intégrer des priorités ou simplifications futures pour l’implantation de projets agricoles dans la ville dès la conception des plans que de tenter une modification des plans par la suite. Même si aucun projet ne verra sans doute le jour à court terme, c’est le moment de concrétiser les visions à long terme.

8.2 UNE  CENTRALE  DE  BIOMÉTHANISATION  À  BRUXELLES  

La biométhanisation est un procédé de fermentation anaérobie (sans oxygène) de matière organique, qui produit du biogaz, de la chaleur et du digestat (Image 8-1).

La chaleur est valorisée par le passage, dans le digesteur, de tuyaux d’eau.

Le biogaz peut être utilisé comme carburant, gaz dans le réseau de gaz naturel ou, en cogénération, pour produire de la chaleur et de l’électricité, injectable dans le réseau

Le digestat est la matière organique digérée, équivalente au compost. Il peut être valorisé comme combustible mais surtout comme fertilisant agricole particulièrement riche.

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De nombreuses usines de biométhanisation ont vu le jour ces dernières années dans différents pays européens. En Belgique, des actions spécifiques sont nécessaires à la valorisation du biogaz, qui font que son seul débouché exploité en Belgique est la cogénération, dont la chaleur n’est pas utilisée. Le système des certificats verts et les systèmes de primes et subsides sont incontestablement les piliers de la rentabilité actuelle des installations (ValBiom, 2011). Ces certificats existent en Belgique car la biométhanisation est indispensable pour atteindre les normes européennes relatives à l’énergie renouvelable (13% d’ici 2020).

Néanmoins, des systèmes extrêmement efficaces existent déjà dans certains pays dont la Belgique (Europaforum, 2010). Par exemple, la société Organic Waste Systems, basée à Gand, est le créateur de procédés efficaces qui réutilisent les déchets ménagers, de restaurants, de marchés mais également les déchets industriels et agricoles, et permettent une récupération optimale de matières recyclables, une production d’énergie maximale, et une réduction importante des volumes de déchets à mettre en décharge (OWS, 2011).

En Région Bruxelloise, au moins 30% des déchets sont compostables (Schaerbeek Irisnet, 2011). Or, pour les petits producteurs, il est plus coûteux de produire son propre compost que d’acheter des engrais chimiques (Furedy, Maclaren et Whitney, 2000). La production de compost à partir des déchets de tous les Bruxellois permettrait de faire des économies d’échelle et ainsi fertiliser les parcelles à moindre coût.

A Bruxelles, une telle usine n’existe malheureusement pas : une centrale classique de biométhanisation est planifiée depuis 2007 à la place du centre de compostage du Bempt à Forest (Huytebroeck, 2007). Les nuisances olfactives importantes que subissent les riverains, générées par le compost, sont à l’origine du projet. Cette usine permettrait de méthaniser 40.000 tonnes de déchets organiques par an, mais ne comprendraient pas les déchets ménagers. En effet, Emir Kir, secrétaire d’Etat à la propreté publique estime que leur collecte serait trop coûteuse. Cependant, leur disponibilité et leur rendement énergétique sont bien meilleurs que ceux des déchets verts : ils sont disponibles toute l’année et possèdent un potentiel énergétique intrinsèque plus grand (ValBiom, 2011). Des systèmes de valorisation des déchets organiques devraient être réellement mis en place à Bruxelles et permettre l’utilisation du digestat pour la fertilisation de l’agriculture urbaine. L’utilisation des déchets ménagers dans la boucle serait cohérente et énergétiquement favorable. La mise en place de « bulles à compost », au fonctionnement similaire aux « bulles à verre » permettrait de limiter les coûts de collecte de ces déchets.

8.3 SYSTÈME  EUROPÉEN  DE  CLASSIFICATION  ÉNERGÉTIQUE  DES  BÂTIMENTS  

La commission de l'industrie du Parlement Européen a voté, en 2009, la révision de la directive de 2002 sur la performance énergétique des bâtiments : c’est décidé, tous les bâtiments construits après le 31 décembre 2018 devront être en mesure de produire

Image 8-1: Cycle énergétique de la biométhanisation (source : technologies propres, 2009)

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leur propre énergie (Parlement Européen, 2009). Mais produire autant d’énergie qu’on en consomme signifie également en consommer moins.

Comme l’affirme Jaime Lerner, maire de Curitiba, il est très souvent possible de trouver une solution groupée pour plusieurs problématiques. Or, l’agriculture urbaine et les bâtiments « zéro énergie » sont deux concepts qu’il semble possible de développer en synergie : les bâtiments basse énergie sont une priorité pour l’Europe, et la verdurisation des toits et façades permet une meilleure isolation.

Afin d’aider les professionnels américains à améliorer la qualité des bâtiments et à réduire leur empreinte écologique pendant et après leur construction, la US Green Building Foundation a édité en 1999 le Leadership in Energy and Environmental Design (LEED) Green Building Rating System, un système de classification des « bâtiments verts ». Les critères d'évaluation sont entre autre l'utilisation de matériaux locaux, l'efficacité de la consommation en eau, du chauffage et énergétique, et la réutilisation des surplus de matériaux. (USGBC, 2005). Initialement prévu pour les nouveaux gratte-ciel de bureaux, la classification LEED s’est maintenant élargie à la construction de tous types de bâtiments et également à la rénovation. Les techniques de construction proposées par LEED impliquent un surcoût par rapport aux techniques traditionnelles, mais ces investissements sont vite amortis, puisque la consommation générale des bâtiments est optimale. De plus, certains gouvernements se basent sur le classement LEED pour accorder des primes et compenser ces surcoûts. Malgré un certain engouement pour cette « marque », elle n’est pas très répandue car elle se base sur des standards et des conditions américaines (climat, etc.).

En Suisse, le standard Minergie® (label de qualité énergétique) est devenu une référence dans le marché immobilier suisse. Elle est portée par le monde économique et politique : les banques accordent des prêts avantageux en cas de construction avec respect des normes Minergie® et des subsides de l’état ou des cantons sont également accordés pour ces constructions (Minergie, 2011). Depuis 2006, le centre d’information et de conseils pour la consommation énergétique de la région Rhône-Alpes a obtenu la licence pour certifier les constructions avec le Label Minergie®. Cependant, l’Etat français ne soutient pas financièrement ces initiatives.

A Bruxelles, la production d’un CPE (Certificat de Performance Energétique) sera obligatoire à partir du 1er mai 2011 pour les ventes d’habitations et de bureaux de plus de 500m², comme c’est déjà le cas en Wallonie et en Flandre. Le certificat sera également obligatoire pour la location, à partir de novembre 2011, et pour les autres types de bâtiments tertiaires en janvier 2013. Les particuliers disposeront alors d’une méthode officielle pour connaître la qualité énergétique de l'habitation de leur choix et ne risqueront plus de devoir débourser des sommes considérables pour la consommation d’énergie (Livios, 2011). Aucune prime fédérale, régionale ou communale, basée sur le CPE, n’est encore prévue à Bruxelles.

Cependant, aucun de ces labels ne prend en compte l’isolation thermique du toit et des façades par la végétation.

Un système européen de classification énergétique des bâtiments devrait être mis en place de manière standardisée. Il le sera probablement d’ici peu de temps, dans la continuité logique de la directive sur les performances énergétiques. Ce système devrait servir de base à l’Europe et aux gouvernements (et aux régions et communes) pour octroyer des subsides à la construction et la rénovation, et favoriser le développement de bâtiments « zéro énergie ». Ce système devrait également prendre en compte la présence de toits et façades verdurisés, afin de favoriser l’agriculture de récupération de surfaces.

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Propositions - 69

8.4 LA  RENOVATION  URBAINE  VERTE  

Le milieu urbain à souvent tendance à se dégrader : éclatement des fonctions et création de quartiers monofonctionnels, implantation massive du secteur tertiaire, nombreux bâtiments désaffectés et délaissés par les entreprises, exode, parking, etc. La rénovation urbaine tente de remédier à ces problèmes par de nombreuses techniques : maintien voire création d’animation dans ces centres, et d’habitats diversifiés pour toutes les classes de la population, amélioration du cadre de vie, assainissement d’îlots, préoccupations concernant l’espace public au service du quartier, mise en valeur de l’héritage architectural et culturel, développement d’actions sociales et culturelles, utilisation rationnelle du sol, participation de la population, etc. La rénovation urbaine existe depuis longtemps : les opérations d’Haussmannisation en étaient déjà. Les opérations de rénovation ne se limitent donc pas à la réhabilitation du logement, mais sont plus globales et plus diversifiées, et font appel à tous types d’intervention : réhabilitation, restauration, démolition, reconstruction, etc. (Quoistiaux, 2010)

A Bruxelles, un outil public actuel privilégié pour la revitalisation urbaine est le contrat de quartier. Il a pour objectif de concentrer différentes opérations urbaines, pendant 4 années, pour renforcer leur impact et créer de nouvelles dynamiques au sein d’un quartier défini. Il intervient donc sur les différentes composantes du quartier (bâti, espaces publics, équipements, initiatives économiques et sociales). De plus, il associe activement les habitants et les usagers du quartier pour mettre en évidence leurs besoins et priorités.

C’est la Commune qui prend l’initiative d’établir un projet, le gère et l’exécute, pendant que la Région, après avoir défini la politique générale et les priorités régionales (PRD), approuve le projet communal et apporte un subside pour sa réalisation (Quoistiaux, 2010). L’outil visé étant de nouveau les primes, le développement de l’agriculture urbaine dépendra fortement des volontés politiques. Par exemple, il suffirait qu’une condition à l’accord de subsides pour la rénovation soit de renforcer/créer des toits plats dont la charge d’usage serait suffisante pour la production maraichère.

Récemment et sur proposition de la Ministre en charge de la rénovation urbaine, le Gouvernement bruxellois a arrêté la sélection de quatre quartiers qui bénéficieront pendant quatre ans de l’aide financière régionale pour l’exécution de contrats de quartier durables. Le montant accordé pour leur rénovation est de 44 millions d’euros (Huytebroeck, 2011). En plus d’une préoccupation environnementale transversale à toutes les opérations, chacun des quartiers devra proposer un projet-pilote innovant sur une thématique environnementale : eaux pluviales, perméabilisation, etc. Un des quatre projets sera orienté vers le développement de potagers mixtes partagés entre habitants et professionnels de l’agriculture urbaine. Proposer un modèle tel que l’ARS serait une belle opportunité pour son développement.

8.5 UNE  PAC*  URBAINE  ?  

Suite au traité de Rome, instituant le principe de libre circulation des marchandises au sein de l’Union Européenne, un problème se pose, pour tous les pays membres possédant une politique agricole nationale (càd presque tous). En effet, par définition, ces deux décisions sont contradictoires : une politique agricole nationale a pour but d’aider le développement de ses propres produits, notamment en leur accordant des primes pour réduire leur prix de vente, ce qui fausse le jeu de la concurrence internationale. Une solution s’impose alors, la création d’une Politique Agricole Commune (PAC). Elle a été mise en place au niveau européen en 1962, dans le but de moderniser et développer l’agriculture. Au départ, son but unique était de soutenir les marchés et les prix agricoles dans l’Union. En 1999, un « deuxième » pilier, consacré

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Propositions - 70

au Développement Rural, est venu compléter ce premier (Henry de Frahan, 2008). Ce nouveau pilier est centré sur l’amélioration de la compétitivité et la multifonctionnalité de l’agriculture, la participation au développement des territoires ruraux, et la promotion de la protection de l’environnement en agriculture, contribuant ainsi au développement durable. Actuellement, le budget réservé à la PAC atteint plus de 40% du budget européen total.

Malgré l’aide commune apportée à l’agriculture européenne, l’Union reste le 1er importateur mondial de denrées alimentaires. De plus, suite aux accords mondiaux sur l’environnement à Kyōto, l’Europe a convenu une réduction de 10% de ses émissions de GES entre 2005 et 2020 pour les secteurs non-concernés par le « Emissions Trading System ». Il serait difficile, selon la Commission européenne (2009) d’atteindre ce but sans faire des efforts supplémentaires pour réduire les émissions agricoles. En effet, en 2009, l’agriculture était responsable au total de 15% des émissions de gaz à effet de serre (GES) en Europe, directement, ou indirectement (changements dans l’utilisation du sol (ex : déforestation), équipement, machines, bâtiments, etc.). La transformation des produits agricoles n’est pas comptée dans ces indices. Les principaux GES émis sont l’oxyde nitreux (N2O), le méthane (CH4, à l’effet de serre très important), et le dioxyde de carbone (CO2). Il est bien évidemment possible de réduire ces émissions, mais également de stocker du CO2 dans le sol.

Les états membres s’étant mis d’accord pour un cadre budgétaire de la PAC jusqu’en 2013, les premières discussions vont commencer dans le courant de cette année, pour une nouvelle période budgétaire allant de 2014 à 2020. Une attention particulière devra être portée à la réduction des émissions de GES par l’agriculture. En 2010, le Parlement européen a publié une résolution sur l’avenir de la PAC, dans laquelle il :

remarque que la sécurité alimentaire reste le défi central de l'agriculture, et affirme que l'Europe doit continuer à contribuer aux ressources alimentaires […] dans un contexte de raréfaction des terres, des ressources en eau et des sources d'énergie résultant du changement climatique, qui exercera une lourde pression sur la capacité de l'Union à accroître son offre ;

estime que les agriculteurs peuvent contribuer de manière rentable à la biodiversité et à la protection de l'environnement, ainsi qu'à l'adaptation au changement climatique et à l'atténuation de ses effets, et est donc d'avis qu'ils doivent être encouragés dans ce sens;

demande que la PAC permette que la grande majorité des terres agricoles relève de régimes agroenvironnementaux rémunérant les agriculteurs qui fournissent des services écosystémiques supplémentaires, tout en encourageant des modèles de production plus durables et plus économes en intrants ;

attire l'attention sur le rôle particulier que jouent les agriculteurs dans les zones périurbaines où la pression peut être très forte sur les ressources rurales et agricoles, et souligne que cette production de denrées alimentaires et de biens publics à proximité des populations urbaines devrait être préservée;

souligne que la crise énergétique mondiale et la hausse des prix de l'énergie pousseront les coûts de la production agricole vers le haut, provoquant une hausse des prix des denrées alimentaires ainsi qu'une augmentation de la volatilité des prix sur les marchés à la fois pour les agriculteurs et les consommateurs, ce qui aura des répercussions négatives sur la stabilité de l'approvisionnement alimentaire et exercera une lourde pression sur la capacité de maintenir et d'intensifier les niveaux de production actuels ;

rappelle qu'il convient de combler les attentes des consommateurs, qui souhaitent que la sécurité alimentaire soit garantie et qui exigent des denrées alimentaires sûres et de qualité supérieure (Parlement européen, 2010).

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Propositions - 71

De nombreux avis circulent à propos de la réforme budgétaire de 2013. Par exemple, certains économistes trouvent que les agriculteurs ne devraient recevoir des subsides de l'UE que quand ils protègent le climat, préservent la biodiversité ou rendent un service écologique à la collectivité (Reform the CAP, 2010).

En comparant les avis et idées de ces différents protagonistes, on peut remarquer que l’agriculture urbaine répond à de nombreux besoins européens : réduction des émissions de GES (diminution du transport, utilisation d’engrais non-fossiles, puits de carbone, etc.), contribution à la biodiversité et à la protection de l’environnement (services écosystémiques rendus), accroissement de l’offre agricole dans un contexte de raréfaction des terres, limitation des effets économiques de la crise énergétique mondiale sur l’alimentation, augmentation de l’aspect durable de l’agriculture, production de denrées alimentaires sûres et de qualité, etc.

Bien qu’il soit trop tôt, techniquement, pour lancer un projet d’ARS à grande échelle, il serait intéressant de mettre le principe sur la table des discussions européennes, et de pouvoir bénéficier d’une aide européenne à l’agriculture urbaine dans le cadre de la PAC, à court, moyen et/ou long terme (2013, 2020 et/ou plus tard).

8.6 AUTRES  

Un certain nombre de surfaces libres à Bruxelles sont utilisées par des parkings. Si ces parkings ont la permission de rester à long terme, une idée serait de les couvrir avec une structure minimale (éviter trop de coûts) et de cultiver par-dessus. De même, pour les parkings existant, il est possible de cultiver des plantes sur les façades (Image 8-2), généralement faciles d’accès.

Le développement de l’agriculture urbaine fonctionnera comme un effet « boule de neige » : suite à ses premières applications et dès les premières preuves du modèle, l’engouement de la recherche permettra le développement des technologies et la diminution des prix d’installation. L’implantation de toits plats cultivables pourrait même devenir obligatoire (supermarché, entreprises, etc.). Il sera pour cela nécessaire de sensibiliser différents secteurs de la société et de favoriser des rapprochements transversaux :

Par exemple, une sensibilisation du secteur de la construction permettrait de développer des connaissances dans ce milieu, des techniques de construction, des nouveaux matériaux (ou une meilleure utilisation des matériaux actuels), etc. En outre, cela favoriserait le passage du message, des professionnels aux particuliers, des avantages économiques à avoir un toit ou une façade verdurisé.

Un autre exemple est le lancement, début 2010 par la Région de Bruxelles-Capitale, de l’Alliance Emploi-Environnement. Elle a pour but de créer des emplois de qualité dans des filières d’avenir et de faire de Bruxelles un modèle en matière de Ville durable. En impliquant plus de 100 participants, publics et privés, la Région a prévu 30 000 heures de formation et 2500 nouveaux emplois dans le domaine de la construction durable (Livios, 2011). L’idée de cette alliance est de stimuler les secteurs économiques les plus porteurs en termes de croissance et d’emploi et de les soutenir dans leur transition vers plus de durabilité. Elle permettrait également d’améliorer la compétitivité des entreprises bruxelloises et de développer l’emploi des bruxellois (y compris des publics peu qualifiés).

Image 8-2 : Verdurisation de la façade d’un parking à Copenhague (photo : M. Vesters, 2010)

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Conclusion - 72

9. CONCLUSION 

La ville n’est pas autosuffisante par définition : il a fallu que l’homme invente l’agriculture et l’améliore jusqu’à produire des surplus pour que les villes se développer. Après des milliers d’années d’évolution en interaction, la dernière révolution agricole a contribué à l’éloignement de ces deux entités, qui sont aujourd’hui très lointaines malgré leur proximité spatiale.

Cependant, l’agriculture, tout comme la ville et le monde en général, traversent une période commune de crise : pic pétrolier, réchauffement climatique, mondialisation, injustices, épuisement des sols, gonflement urbain, etc. remettent en question notre modèle de développement. L’homme semble (re)découvrir qu’il fait partie d’un système, et qu’il est en train de le dérégler. Des mouvements alternatifs mobilisent les habitants des quatre coins du monde et préconisent une approche globale concrétisée par un ensemble de solutions à l’échelle du citoyen consommateur. Les concepts qu’ils préconisent sont la relocalisation, la diminution des consommations, l’évolution des systèmes alimentaires, etc. pour préparer une transition en douceur.

La production alimentaire en ville est une idée récurrente dans ces réflexions. Actuellement, elle reste cependant basée sur le volontariat et la collectivité à l’échelle du quartier. A l’opposé, les scientifiques imaginent des fermes verticales, alliant technologie et productivité. A moyen terme, aucune de ces deux solutions ne me semble pouvoir se développer à l’échelle d’une ville. Dans ce mémoire, j’imagine un nouveau modèle : l’agriculture de récupération de surfaces couplée à l’urbanisme agricole. Je propose la mise en culture des surfaces urbaines inutilisées (production agricole), mais aussi le développement d’un système alimentaire plus global (transformation, emballage, distribution, stockage, vente et gestion des déchets), et son inscription dans les processus de planification urbaine.

De rapides calculs permettent de conforter quantitativement cette approche. L’objectif de ce mémoire est alors de la qualifier, en menant une première réflexion sur la possibilité de développer un tel modèle. Pour ce faire, j’y développe un projet pragmatique qui s’insère dans le tissu sociétal actuel à Bruxelles, mais qui garde une vision utopique à long terme.

J’aborde ainsi des questions techniques et économiques, je questionne sur les avantages et inconvénients du modèle, et préviens des obstacles auxquels son implantation sera confrontée. Je propose finalement quelques outils à mettre en place à court terme pour avoir un effet sur le long terme et faciliter l’hypothétique concrétisation d’un tel projet.

Des recherches plus détaillées seront évidemment nécessaires en cas de décision de mettre l’agriculture de récupération de surfaces en application, mais il ressort de ce travail que les sociétés occidentales auraient de nombreux avantages à mettre en place un système alimentaire urbain spécifique à leurs villes, malgré certains obstacles. Une telle évolution urbaine demandera de nombreuses réflexions et combats politiques, qui prendront un certain temps.

Pour perdurer, l’agriculture urbaine ne doit pas être pensée uniquement en termes de rentabilité économique, mais plutôt dans sa dimension multifonctionnelle : économique, esthétique, éducative, sociale, etc. La production agricole urbaine à large échelle permettrait de recréer le lien perdu mais ineffaçable entre une ville et sa campagne : travail de la terre, sensibilité aux saisons, origine des produits alimentaires, éducation associée...la proximité spatiale des mondes urbains et ruraux permettrait également

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Conclusion - 73

aux citadins de se rendre compte de l’impact que peuvent avoir leurs choix sur l’environnement. Bref, c’est une première avancée qui a comme objectif à long terme de changer nos modes de production alimentaires. L’ARS et les nouveaux systèmes alimentaires s’entremêleront avec d’autres mouvements alternatifs dans un but d’évolution des habitudes et des mentalités des sociétés.

Il est important de rappeler que l’objectif de ce modèle n’est pas l’autosuffisance totale et la fin de la dépendance alimentaire des villes, qui ne seront d’ailleurs probablement jamais atteintes. De plus, l’agriculture urbaine de récupération de surface ne peut se penser seule. L’agriculture urbaine de récupération de surfaces ne doit pas être imaginée comme unique développement possible de l’agriculture urbaine. En effet, d’autres types d’agriculture urbaine contribueront, chacune avec leurs caractéristiques propres, à un changement global des sociétés :

Le développement de potagers collectifs possède une composante sociale importante qu’il ne faut pas négliger. L’implication de la population dans l’agriculture urbaine est même essentielle car elle permet une nouvelle sensibilité à l’environnement, pour les plus âgés mais surtout pour les plus jeunes. Puisqu’une sensibilisation à l’écologie devra faire partie intégrante de leur éducation, autant commencer à la développer tôt et près de chez soi. Informer la population et l’inciter à participer à la production et à la respecter rendra d’autant plus durable le système alimentaire global (Hamm et Baron, 2000). De plus, une évolution des mentalités peut être favorisée par la rencontre, qui permet de mieux comprendre les réalités des autres : cultiver des légumes sert avant tout à promouvoir l'esprit communautaire dans un quartier multiethnique, à favoriser les échanges entre générations et à renforcer la compréhension mutuelle. La cohérence des quartiers s’en voit généralement renforcée, et la participation citoyenne y est supérieure.

Dans les villes occidentales, l’agriculture présente un caractère caritatif ou expérimental. Dans les pays en développement par contre, elle est d’abord une question de subsistance et de commerce local. A cause d’un exode rural important, des campagnards possédant a priori les connaissances techniques (si pas théoriques) de la production agricole arrivent en masse sur le marché urbain (Baret, Bragard et Defourny, 2009). La production agricole urbaine, quelle que soit sa forme (potagers collectifs, fermes urbaines, agriculture de récupération de surfaces, micro-potagers ou autre) est une possibilité pour eux de s’occuper, voire trouver un emploi, ou au moins de diversifier leurs revenus et leur alimentation. Le besoin alimentaire étant fortement présent, l’agriculture urbaine a des chances de s’y développer beaucoup plus rapidement que chez nous. Dans les plus grands bidonvilles d’Afrique noire (e.a. Kibera au Kenya), 11 000 familles peuvent cultiver des aliments de base. Même des "micro-jardins" peuvent procurer jusqu'à 3 dollars de revenu par jour aux familles pauvres, selon la FAO, alors qu’elle estime que près de 3 milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour.

La demande pour des jardins familiaux est très grande dans certaines villes. Ils permettent en général le bien-être et/ou l’autosuffisance des familles, sans demander autant de concessions que la culture collective.

Un autres type de production urbaine est possible, moins contraignant, plus libre : planter des arbres fruitiers (pommes, poires, noix, prunes, etc.) dans les cours d’écoles et les parcs, le long des boulevards, etc. et en laisser la libre récolte par la population. Certains groupes vont jusqu’à répertorier les plantes productrices en libre récolte (urban edibles, 2011).

Par ailleurs, l’agriculture urbaine ne doit pas non plus faire oublier la production en milieu rural. En effet, sans développement du monde rural, la pression migratoire vers

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Conclusion - 74

les villes continuera à augmenter. Les conditions de vie de ces deux mondes doivent s’équilibrer afin de réguler les flux territoriaux.

Pour conclure, je citerai Philippe Baret : Agriculture prendra donc un « s » au futur, la question n’étant plus « Qu’attendons-nous de l’agriculture ? » mais plutôt « Quelles sont les agricultures possibles et lesquelles sont les plus durables ? ». Toutes les agricultures ne doivent pas être tenues aux mêmes objectifs de durabilité, aux mêmes propriétés nutritionnelles ou gustatives. Il est cependant important qu’elles aient le même accès à la publicité, à la recherche, à la place dans les rayons, à l’innovation et à l’espace. Rééquilibrer les agricultures implique un travail sur l’image et sur le cadre institutionnel : seuls les consommateurs informés de manière transparente sur les conditions de production sont à même de poser des choix cohérents. Et seuls des responsables politiques conscients de la diversité des systèmes agraires existants et possibles seront assez ouverts pour favoriser une pluralité d’agriculture dans le respect des critères de durabilité et de l’environnement.

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10.3 PERSONNES  RESSOURCES  

Guy Basin, consultant en permaculture

Pierre Barthélémy, professeur à l’ULB

Angela Camboni des archives et bibliothèque Etopia

Kristian Crick, producteur de l’AMAP « Les Paniers Verts »

Nicolas Deeker, producteur de l’AMAP Helia

Dickson Despommiers, « inventeur » des fermes verticales

Rudolf, producteur de la ferme Arc-en-Ciel

Luc Schuiten, architecte utopiste

Thomas de l’asbl. « Le début des haricots »

10.4 AUTRE  

Utopia, de l’Atlantide aux cités du futur, exposition au Mondaneum (Mons, Belgique), du 20/04 au 28/10/2007

Utopies réalisées. Patrimoine architectural du XXe siècle, Emission par Région Urbaine de Lyon Média, 2007, disponible sur RhoneAlpes.tv : http://www.rhonealpes.tv/culture/video-Utopies-Realisees-vid060340 La Terre vue du ciel, un film de R. Delourme, 2004, Montparnasse production, dont Interview de Serge Latouche par P. Lefèvre (http://www.dailymotion.com/video/x2x9zd_serge-latouche-la-decroissance_sport)

Curitiba : la Ville des Hommes, Emission « Faut pas rêver », France 3, 18/09/2006

Emission L’après-midi porte conseil, 3 juin 2010 sur Radio-Canada, chroniques de Anne Darche, Alain Vadeboncoeur et André Boisclair, disponible sur http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2010/CBF/LapresmidiPorteConseil201006031305_1.asx

Ferme urbaine, Le collectif Coup2Pouce, 2010, vidéo disponible sur http://www.dailymotion.com/video/xfd907_ferme-urbaine_news

Biodivercity, Musée Royal des Sciences Naturelles de Bruxelles, exposition permanente

Nourrir l’humanité : oui ! Mais à quelles conditions ?, conférence de M. Mazoyer à la Maison du Développement Durable, Louvain-la-Neuve, 26 juin 2010

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Annexe A - 85

11. ANNEXE  A :  CALCUL  APPROXIMATIF  DE  LA  SURFACE  AGRICOLE  NÉCESSAIRE  À  L’ALIMENTATION  DE  

TOUTE  LA  POPULATION  BRUXELLOISE 

Nom  Surface   Nbre de familles fournies Fréquence  Pers/famille  Période  Ha/famille Ha/pers  Surface pour Bruxelles 

Les Paniers Verts  7 ha  650  Hebdomadaire 3  mars‐décembre  0,011  0,0036  3906,12 ha  39 km² 

Haricots à NOH  1 ha  100  Hebdomadaire 3,5  avril‐novembre  0,010  0,0029  3108,95 ha  31 km² 

Helia  1 ha  80  Hebdomadaire 3,5  avril‐décembre  0,013  0,0036  3886,19 ha  39 km² 

Arc‐en‐ciel  3 ha  180  Hebdomadaire 4  avril‐novembre  0,017  0,0042  4533,89 ha  45 km² 

Moyenne  35,46 m² 3858,79 ha  38,59 km² 

Soit en moyenne : 35,46m²/personne

38,59 km² pour tout Bruxelles (en comptant 1088134 habitants à Bruxelles, BruStat, 2011)