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UNE THI~ORIE "INFORMATIONNELLE " * DE LA MESURE ET DE LA TI~LI~MESUHE ** par Julien LOEB Ing6nieur en Chef des P. T. T. *** SOMMAIRE. - - L'auteur essaie d'appliquer les theories de l'In/ormation, en particulier les /ormules de Shannon et de Hartley, aux probldmes de la mesure et de la tdldmesure. Apr~s avoir rarnend r gtude des appareils de mesure h celle de circuits dlectriqttes connus, en tenant compte de leur prdcision finie, on compare le dgbit de l'In/ormation afferent d la grandeur physique d mesurer (affectge d'une loi connue de probabilitds) d celui que l'appareil, analogue d'une ligne de tdlgcommunications, peut gcouler. On dgduit de cette $tude un nouveau critgriurn d'e[ficacitg des appareils de mesare, d savoir leur adaptation gt la grandeur gt mesurer. En particulier, si l'appareil de raesure est trop largement dimensionnd, on peut d~finlr son rendement ~ in/ormationnel ,. ~. -- INTRODUCTION. Au cours d'une r6union de la VI e Commission du Comit6 Frangais de Radio61ectricit6 Scientifique (U. R. S. I.) Monsieur G6rard L~HMANrr avait sugg6r6 qu'on abord~t un large domaine d'6tudes : les relations qui existent entre les mesures en phy- sique et la th6orie de l'Information. ~c En effet, disait-il, un appareil de mesure se comporte en bien des points comme nn appareil de t616communications ; il est caract6ris6 notamment par une bande passante et un niveau de bruit. De plus, il est destin6 non pas h transformer une forme d'6nergie en une autre, ou ~ amplifier un effet phy- sique, mais ~ fournir de l'In[ormation sur la grandeur mesurer. )) L'objet du pr6sent travail est d'examiner le con- tenu de cette suggestion, et de voir dans quelle mesure les th6ories de l'Information peuvent servir h synth6tiser les propri6t6s connues des appareils de mesure ou peut-6tre hen pr6voir de nouvelles. An cours de cette 6tude, on rencontre un prob]~me essentiel, celui de 1' ccAdaptation )) entre le ph6no- m~ne h mesurer et l'appareil charg6 de faire la inesure. Deux 6eueils sont ~ 6viter : un appareil trop pauvre en capacit6 de trans- mission de Flnformation masque une partie du ph6- nom~ne ~ mesurer ; un appareil dou6 de plus de eapacit6 d'Infor- mation qu'il n'en faut constitue un gaspillage de moyens, gaspillage r6pr6hensible s'il porte sur des 616ments rares ou cofiteux, tels que la largeur de bande d'une liaison ou la puissance d'un 6metteur. Dans le second cas, la plus ou moins grande exac- titude de l'adaptation serait repr6sent6e par une notion analogue "~ un rendement. La fagon dont nous allons traiter les problbmes s'inspire largement des th6ories 6tablies pour les circuits de t616communications. Nous devons donc commencer par rappeler tr~s bri~vement les ana- logies existant entre les appareils de mesure et les circuits 61ectriques. Nous 6tablirons de plus une nouvelle analogie entre/es m6thodes de z6ro et les syst~mes asservis. 2. -- ANALOGIES ~LECTRIQUES DES APPAREILS DE MESURE. II est aujourd'hui tout ~ falt classique de ramener l'6tude du comportement d'appareils de mesure celle de circuits 61ectriques. La comparaison se fera en deux 6tapes : l'aspect lin6aire et l'aspect non lin6aire des ph6nom~nes. 2,1. -- Domaine lin6aire. Les proc6d6s connus ont en g6n6ral pour but de caleuler le comportement dynamique lin~aire de ces appareils devant une grandeur "~ mesurer variable avec le temps : on cherche ~ caleuler les erreurs dues au fait que l'appareil dou6 d'inertie ne suit pas les variations de la grandeur il mesurer, et ee ealcul est facile (et largement connu) tant que les ph6- nom6nes se laissent d6crire par des 6quations diff6rentielles lin6aires. Prenons deux exemples d'appareils, simplifi6s dessein : le voltm~tre et le thermom6tre. 2,J_L- Voltt'a~tre. La variable qui d6erit la position est l'angle 0 que fait l'aiguille avec l'origine. (Pour 6viter les difti- cult6s 6ventuelles dues h la but6e de z6ro, nous prenons un voltm~tre h z6ro central.) Soient: 1 le moment d'inertie de l'6quipage, Run coefficient de frottements, u le couple de rappel pour un 6cart de I radian, F 0 le couple moteur par volt de tension appliqu6e, E la tension appliqu6e. On a : 1~i +RO +70=roE. Le circuit 6quivalent est donn6e par la figure i. Comme nous simplifierons par la suite hl'extrgme, * Sur l'emploi de ce n6ologisme le leeteur est pri6 de se reporter h l'article pr61iminaire dtt m6me auteur (volr r6f6- renge [6] de la Bibliographie in fine). ** Get article a fait l'objet d'un expos6 h la s~anee pl6ni6re de la Socx~T~ DES RADIO~LECTRICIENS, le 17 mars 195t. *** Au C. N. E. T. Chef du D6partement TI~LI~COMMANDE e t C01~TRE-MESURES. --90--

Une théorie “informationnelle” de la mesure et de la télémesure

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UNE THI~ORIE "INFORMATIONNELLE " *

D E LA M E S U R E ET D E LA TI~LI~MESUHE **

par Julien LOEB Ing6nieur en Chef des P. T. T. ***

SOMMAIRE. - - L'auteur essaie d'appliquer les theories de l'In/ormation, en particulier les /ormules de Shannon et de Hartley, aux probldmes de la mesure et de la tdldmesure.

Apr~s avoir rarnend r gtude des appareils de mesure h celle de circuits dlectriqttes connus, en tenant compte de leur prdcision finie, on compare le dgbit de l'In/ormation afferent d la grandeur physique d mesurer (affectge d'une loi connue de probabilitds) d celui que l'appareil, analogue d'une ligne de tdlgcommunications, peut gcouler. On dgduit de cette $tude un nouveau critgriurn d'e[ficacitg des appareils de mesare, d savoir leur adaptation gt la grandeur gt mesurer. En particulier, si l'appareil de raesure est trop largement dimensionnd, on peut d~finlr son rendement ~ in/ormationnel ,.

~. - - INTRODUCTION.

Au cours d'une r6union de la VI e Commission du Comit6 Frangais de Radio61ectricit6 Scientifique (U. R. S. I.) Monsieur G6rard L~HMANrr avait sugg6r6 qu'on abord~t un large domaine d'6tudes : les relations qui existent entre les mesures en phy- sique et la th6orie de l'Information.

~c En effet, disait-il, un appareil de mesure se comporte en bien des points comme nn appareil de t616communications ; il est caract6ris6 notamment par une bande passante et un niveau de bruit. De plus, il est destin6 non pas h transformer une forme d'6nergie en une autre, ou ~ amplifier un effet phy- sique, mais ~ fournir de l 'In[ormation sur la grandeur

mesurer. )) L'objet du pr6sent travail est d'examiner le con-

tenu de cette suggestion, et de voir dans quelle mesure les th6ories de l 'Information peuvent servir h synth6tiser les propri6t6s connues des appareils de mesure ou peut-6tre h e n pr6voir de nouvelles.

An cours de cette 6tude, on rencontre un prob]~me essentiel, celui de 1' cc Adaptation )) entre le ph6no- m~ne h mesurer et l'appareil charg6 de faire la i n e s u r e .

Deux 6eueils sont ~ 6viter : un appareil trop pauvre en capacit6 de trans-

mission de Flnformation masque une partie du ph6- nom~ne ~ mesurer ;

un appareil dou6 de plus de eapacit6 d'Infor- mation qu'il n'en faut constitue un gaspillage de moyens, gaspillage r6pr6hensible s'il porte sur des 616ments rares ou cofiteux, tels que la largeur de bande d'une liaison ou la puissance d'un 6metteur.

Dans le second cas, la plus ou moins grande exac- titude de l 'adaptation serait repr6sent6e par une notion analogue "~ un rendement.

La fagon dont nous allons traiter les problbmes s'inspire largement des th6ories 6tablies pour les circuits de t616communications. Nous devons donc

commencer par rappeler tr~s bri~vement les ana- logies existant entre les appareils de mesure et les circuits 61ectriques.

Nous 6tablirons de plus une nouvelle analogie entre/es m6thodes de z6ro et les syst~mes asservis.

2. - - ANALOGIES ~LECTRIQUES

DES APPAREILS DE MESURE.

II est aujourd'hui tout ~ falt classique de ramener l'6tude du comportement d'appareils de mesure celle de circuits 61ectriques. La comparaison se fera en deux 6tapes : l'aspect lin6aire et l'aspect non lin6aire des ph6nom~nes.

2,1. - - Domaine lin6aire.

Les proc6d6s connus ont en g6n6ral pour but de caleuler le comportement dynamique lin~aire de ces appareils devant une grandeur "~ mesurer variable avec le temps : on cherche ~ caleuler les erreurs dues au fait que l'appareil dou6 d'inertie ne suit pas les variations de la grandeur il mesurer, et ee ealcul est facile (et largement connu) tant que les ph6- nom6nes se laissent d6crire par des 6quations diff6rentielles lin6aires.

Prenons deux exemples d'appareils, simplifi6s dessein : le voltm~tre et le thermom6tre.

2 , J _ L - Voltt'a~tre.

La variable qui d6erit la position est l'angle 0 que fait l'aiguille avec l'origine. (Pour 6viter les difti- cult6s 6ventuelles dues h la but6e de z6ro, nous prenons un voltm~tre h z6ro central.) Soient:

1 le moment d'inertie de l'6quipage, R u n coefficient de frottements, u le couple de rappel pour un 6cart de I radian, F 0 le couple moteur par volt de tension appliqu6e, E la tension appliqu6e. On a :

1~i + R O + 7 0 = r o E . Le circuit 6quivalent est donn6e par la figure i. Comme nous simplifierons par la suite hl'extrgme,

* Sur l 'emploi de ce n6ologisme le leeteur est pri6 de se repor ter h l 'ar t icle pr61iminaire dtt m6me au teur (volr r6f6- renge [6] de la Bibl iographie in fine).

** Get article a fai t l ' ob je t d ' un expos6 h la s~anee

pl6ni6re de la Socx~T~ DES RADIO~LECTRICIENS, le 17 mars 195t.

*** Au C. N. E. T. Chef du D6pa r t emen t TI~LI~COMMANDE et C01~TRE-MESURES.

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t. 6. n ~ 4, 1951] UNE TnI~:ORIE (( INFORMATIONNELLE )) DE LA MESURE

Fic. 1.

nous ne retiendrons de tout ceci que la courbe arnplitude-fr6quenee (fig. 2).

La bande passante sera dans ce cas mesur6e par

FIG, 2.

l ' intervalle de pulsations allant de 0 h (o 0 corres- pondant h la pointe de r6sonance.

Les analogies 61ectrom6caniques ont fait l 'objet de recherches 6tendues, en particulier dans le domaine de la topologie [l], et leur emploi permet de traiter les cas particuliers les plus compliqu6s.

2 , 1 2 . - Thermombtre .

Soient de mgme : C la capacit6 ealorifique ; K le coefficient de conductibilit6 calorifique global. Un thermombtre est 6quivalent au circuit de la

A. ,4'

~AA&AA 0 VlJVvVWV+ ~ o

r - 0

FIG. 3.

figure 3, dont la courbe de r6ponse en fr6quences est donn6e par la figure 4.

Rg2a~s~

l"lc. /~.

Ici encore, nous seh6matiserons h l 'extrgme en a t t r ibuant au thermom~tre une bande passante de

2/s fr6quences s '6tendant de 0 h une valeur rep~re

K 6 ) 0 ~ F �9

2 , t 3 . - Les sys t~mes boucl6$ (eontre-r6action).

Les mesures pr$cises en Physique se font au moyen de m6thodes de z6ro. On oppose h la grandeur physique inconnue une grandeur de mgme nature restitu6e localement, on 6value l 'erreur et on agit sur la grandeur restitu6e de fa~on h annuler l 'erreur dans la mesure du possible.

On reconna~t lh le sch6ma classique des asser~is- sements, que l'on appelle servomgcanismes, lorsqu'ils comportent des pi~ces m6caniques en mouvement . Prenons comme exemple un pont de mesure de r6sistances. Le sch6ma en serait celui de la figure 5.

H z . . . .

I nconltue Gal vanom~t re Op8 rl'ceu r

I ~ 1 | S t ln �9 I

~'~te do

r~ �9 ! stsnces

FIG. 5.

L'analyse du fonetionnement peut se faire, en langage commun, de la fa~on suivante : partons d 'un 6tat du syst~me off la r6sistance restitu6e n'est pas 6gale h la r6sistance inconnue : le galvano- m~tre d6vie lentement. L'op6rateur agit sur la r6sistance en suivant les indications du galvano- m~tre, mais cette action est en retard, si bien que lorsque l'6quilibre sera atteint , l 'op6rateur ne le saura pas encore et continuera h agir dans le m~me sens. L'erreur s'inversera, et le processus pourra continuer sous forme oscillatoire. Si l 'op6rateur est habile, il fera en sorte que les oscillations s'amor- tissent assez ri te. Sinon, on peut concevoir un 6tat du syst~me dans lequel les erreurs iront en croissant.

En langage de servom6canismes, la t raduct ion est imm6diate. Le gain de la boucle ouverte est li6 h la prdcision exig6e. I1 est d ' au tan t plus 61ev6 que la pr6clsion est grande *. Le comportement dynamique de cette boucle se d6crit, comme il est bien connu, par la courbe de r+ponse en fonction de la fr6quence de l 'ensemble op6rateur-galvano- m~tre.

L' (( habilet6 de rop6rateur )), stabilisant le syst~me en (( ant icipant )) la lecture, est l '6quivalent d 'un r6seau stabilisateur utilis6 dans les servom6ca- nismes. Une telle a t t i tude est pr6f~rableau compor- tement habituel qui consiste h laisser s'arr~ter le galvanom~tre avant de toucher h la bolte de r6sis- tanees.

Noas saisissons cette occasion pour proposer d'introduire dans les ponts ordinaires, en sdrie avec le gal~,anomktre, les rdseaux stabilisateurs habituels (dil~drentiateurs ou intdgrateurs).

Ces r6seaux seraient calcul6s en fonction des

(*) Cette id6e est due h G. LEHMANN.

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3/s constantes des galvanom~tres, ou meme des op6- rateurs humains dont la r6ponse a fait l 'objet d'6tudes r6centes (notamment par le Professeur TUSTIN [2]). De mgme qu'un servom6canisme entre en oscillation lorsque le gain de la boucle ouverte augmente, de mgme, dans le pont, un r6gime ins- table peut s'instaurer si on recherche une trop grande pr6cision.

Ici, encore, tousles r6sultats obtenus au cours de l'6tude des asservissements, et notamment des servo- m6canismes, sont applicables pour rendre compte du comportement dynamique des appareils de mesure, et ils aboutissent h l 'attribution d'une bande passante, qui sert en premiere approximation h les caract6riser.

2,2. - - Quantification.

Un des r6sultats les plus importants des 6tudes faites aux U. S. A. (ShANNoN [31, TULLEB [4]) et en Grande-Bretagne (Gxson [5]) a 6t6 de montrer que, pratiquement, un signal quelconque, pris h l'entr6e d'un syst~me de t616communications ou h sa sortie, n'est pas susceptible d'avoir un nombre infini de valeurs discernables possibles. Cette limitation est due au bruit, compagnon forc6 de tout signal de communication.

Cette notion essentielle se transpose ais6ment dans le domaine des appareils de mesure en physique, sans avoir besoin, dans les cas pratiques, de recourir

l'ultime structure granulaire de l'6nergie pr6vue par la th6orie des quanta, ou plus pr6cis6ment les relations d'incertitude de HEISEI~BEnG.

Darts la th6orie des t616communications, on consi- dbre que le signal m61ang6 au bruit ne peut se voir affecter qu'un nombre finiN de valeurs discernables:

S

oft S est l 'amplitude du signal et B celle du bruit. Le nombre I ajout6 h S / B permet d'6tablir que,

si S = B, il y a deux 6tats discernables : la pr6sence ou l'absenee du signal. Ce cas est le cas limite de fonctionnement des appareils cc tout ou r i e n , (le t616graphe par exemple).

En Physique, bien des ph6nom~nes joueront vis-h- vis de la grandeur h mesurer le mgme r61e que le bruit : ce sont toutes les causes d'erreurs accidentelles ]aites sur la mesure, que nous appellerons ~ bruits g~n~ralisgs ,.

En voici des exemples : Pour les appareils ?t cadre mobile : les variations du champ excitateur, les frottements

des pivots, les erreurs de parallaxe. Pour les thermom~tres : les effets de capillarit6, l'impr6cision de la lecture

d'une hauteur de mercure. En radiogoniomdtrie : les d6viations du rayon dues h la propagation

dans l'ionosph~re ou mgme dans la troposphere, le bruit propre des r6cepteurs, ou les parasites

(atmosph6riques ou industriels).

J. LOEB [ANNALES DES TI~L]~COMMUNICATIONS

Dans le radar : la largeur finie du front des impulsions, la modu-

lation ind6sir6e du signal. Pour les ponts de mesure d'impddance : la structure discontinue des r6sistances utilis~es

comme 6talons, les r6sistances de contact. Remarquons que dans les syst~mes boucl6s

(contre-r6action) on n'a pratiquement h tenir compte que des (( bruits g6n6ralis6s ,, dont le si~ge est le mesureur d'erreur, avant toute amplification. Les autres sont pratiquement sans effet.

2 , 3 . - Application de la Iormule de Hartley.

L'6tude commenc6e au paragraphe 2 permet maintenant d'6tendre aux appareils de mesure en Physique la d6finitiori et le calcul de la capacit6 de transmission de l 'Information :

C- - WlogN

ofi W e s t la largeur de bande, N le nomDre d'6tats discernables possibles. Dans les t616communications, ce nombre est, en

g6n6ral, 6gal h I + S / B , off S est l'amplitude du signal et B celle du bruit.

Nous adopterons le logarithme de base 2, car la formule est alors susceptible d'une interpr6tation arithm6tique commode. Nous prendrons comme unit6 d'Information celle que contient un signal cctout ou rien ,.

Avec un tel signal, 0 ou 1, on peut 6crire n'importe quel nombre en num6ration de base 2. La trans- mission d'un nombre entier eompris entre 0 et N n6cessite un nombre de chiffres 6gal h log S N. I1 est ainsi 6quivalent de faire apparaltre un signal pouvant avoir l'une des N valeurs discr~tes possibles ou de faire apparaitre log S N signaux pouvant 8tre 0 o u l .

Le capacit6 C est alors le nombre de chiffres binaires que le syst~me serait capable de transmettre pa r unit6 de temps. La quantit6 d'Information 6coul6e par le syst~me, pour un cycle de largeur de bande, constitue une repr6sentation de sa precision de lecture. En effet, l'erreur de lecture introduite par l'appareil de mesure est de l'ordre de grandeur 1/N. (Elle est 6gale h 1 /N si tous les intervalles sont 6gaux).

Un appareil infiniment pr6cis (comportant une erreur de lecture nulle et un nombre infini d'6tats discernables possibles) serait capable d'6couler, m~me avec une bande de fr6quences finie, une quantit6 d'Information infinie.

On volt intuitivement qu'un tel gtre physique ne peut exister et que, s'il existait, la structure de notre cerveau l'emp~cherait de parvenir jusqu'h notre conscience.

3 . - GRA1NDEUR A MESUHER

ET QUANTIT]~ D'INFoRMATION.

L'6mission d'un signal repr6sentant un message est repr6sent6e par SHANNON comme une suite de

92

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t . 6, n ~ 4, 1951]

tirages au sort entre les symboles appartenant h u n ensemble qui constitue un langage. La quantit6 d'Information, appel6e 6galement par l'auteur Entropie, se construit au moyen de toutes les probabi- lit6s p~ des symboles avec la formule :

H . . . . p~ log p~.

La quantit6 d'Information est ainsi attach6e h un acte de tirage au sort. Elle ne d6pend en aucune fa~on du symbole effectivement lir6.

Elle peut, par contre, et c'est un cas tr~s r6pandu, dOpendre des tirages ant6rieurs. En effet, les p.~ ne sont pas constantes. Elles peuvent dOpendre des tirages antOrieurs, suivant le processus des suites de M A R K O F F .

Par ailleurs, la caract6ristique temporelle du signal est le hombre de tirages par unit6 de temps, ce nombre pouvant d'ailleurs verier d'un instant 'h l'autre.

En d6finitive, le signal serait caractOris6, d'une part par la liste des 6tats discernables affectOs chacun d'une probabilit6 (gOn6ralement en chalne de MARKOFF) et, d'autre part, par la cadence des tirages repr6sent6e par un spectre.

3 , 1 . - Extension ~ la Physique.

Cherchons h transposer cette reprOsentation aans le domaine qui nous int6resse, h savoir celui des mesures en Physique.

On pourrait ~tre tent6, au premier abord, de critiquer la prOsentation dualistique du problbme.

Pour les besoins de la cause, on sOpare le ph6no- mbne h mesurer de l'appareil qui le mesure, alors qu'il n'existe, en fair, qu'un seul ensemble physique form6 de la source de la grandeur h mesurer et de l'appareil de mesure.

Cette objection est partiellement valable, car nous ne voyons jamais les ph6nom~nes qu'h travers des instruments de mesure, m~me si ces derniers se r6duisent h nos sens.

Mais on cherche ici h dOfinir le role des appareils de mesure, et le mgme ph6nombne pourra gtre examin6 h travers diffOrents appareils. I1 faudra toujours se rappeler que le ph6nombne h mesurer n'apparaltra jamais comme pouvant prOsenter un plus grand nombre d'Otats discernables que l'appa- reil ~ travers lequel on le mesure.

3 ,2 . - - l~ tats diseernables d'une grandeur phy- sique.

Aucune grandeur physique n'est susceptible d'occuper une sOrie continue infinie de valeurs dis- cernables.

Sans mgme aller jusqu'h la structure quantifi6e de la matibre ou de l'6nergie, on verra que certaines des grandeurs physiques habituellement mesur6es comportent en elles-m~mes une cause de limitation dens la pr6cision de la mesure. Nous citerons les exemples suivants :

U N E T H ~ ; O I t I E (( I N F O R M A T I O N N E L L E )) D E LA M E S U R E / i / 8

3,21. - - L i m i t a t i o n s u l t i m e s de ltt prOvlMou.

Tempdrature. - - La tempOrature est la mesure de l'6nergie moyenne d'agitation. La durOe pendant laquelle la moyenne s'effectue rOagit sur la prOcision de la mesure : plus cette dur6e est courte, plus les fluctuations deviennent importantes.

Voltage. - - Toute source de courant a une impO- dance interne si~ge d'un bruit thermique. Le bruit cr6e autour de la valeur vraie de la tension une zone d'incertitude.

Rdsistances mesurdes au p o n t . - De la m~me faqon, les tensions de bruit thermique prenant naissance dans les r6sistance masquent le signal d'erreur dbs qu'il devient petit.

3,22. - - L i m i t a t i o n s pratiques. Dens la pratique, on ne s'entoure pas de toutes les

pr6cautions qui permettraient d'obtenir les prOci- sions permises par les limitations ci-dessus exposOes : il est rare qu'on puisse 61iminer les effets beaucoup plus grands dus aux variations de la tempOrature ambiante, aux modifications de structure interne des pi~ces dOtachOes, etc.

3,23. - - L i m i t a t i o n s vo lon ta i r e s .

Encore plus souvent, l'utilisateur se rendant compte du coot 61ev6 de la pr6cision, indique lui- m~me la prOcision qui lui convient. C'est en gOnOral eette limitation qui donne lieu h l'Otablissement des listes d'Otats discernables de la grandeur h mesurer. Comme on le verra plus loin, la prOcision requise par l'utilisateur pent d6pendre de la valeur prise par la grandeur h mesurer. Nous examinerons l'exemple de la tension d'un secteur 61ectrique variant autour de l l0 V. Les valeurs voisines de l i0 V, les plus fr6quentes, doivent gtre connues avec pr6cision, alors que si la tension tombe au-dessous de la valeur utilisable, mettons t05 V, il n'est plus n6cessaire de ta connaltre avec la m~me prOcision.

3 , 3 . - Spectre de frfiquences.

Les grandeurs physiques h mesurer sont, dans le cas le plus gOn6ral, fonctions du temps. La rapidit6 avec laquelle elles varient r6agit 6videmment sur la cadence avec laquelle l 'Information est produite.

Le paragraphe prOc6dent nousa amen6s h consi- d6rer la manifestation h u n instant donn6 d'une grandeur physique comme un tirage au sort, entre un certain nombre de cases. La grandeur variable sere caract6ris6e par une s6rie de tirages au sort

une cadence qui d6pendra de sa vitesse de varia- tion.

Nous verrons que les probabilitOs p~ de la th6orie shannonienne dOpendent, dens une large mesure, de la loi de variation de la grandeur h mesurer.

L'analyse harmonique appliqu6e au cas prOsent se conduirait eomme suit : on suppose que la gran- deur physique h mesurer est une fonction sinusoidale du temps, de pulsation ~, dont l'amplitude couvre le domaine possible de variation (les N cases du

- - 93 - -

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5/s

paragraphe 2,3) et on cherche dans ces conditions quelle cadence se succ~dent les tirages au sort.

Si les N cases sont r6parties uniform6ment, la cadence maximum de succession des tirages sera Nr par seconde.

Dans un syst6me en ~volution, la probabilit6 de chaque case d6pend de la case qui vient de sortir.

3 , 4 . - R~partition en probabilitfi.

Apr~s avoir d6fini les 6tats discernables d 'une grandeur physique, il nous faut maintenant 6tudier leur r6partition en probabilit6.

Une telle 6tude comporte forc6ment une grande marge d'arbitraire : arm6 d 'un instrument de mesure, le physicien at tend la manifestat ion de la grandeur h mesurer. La probabilit6 pour que cette grandeur tombe dans une (( case )) ou l 'autre d6pend essentiel- lement de ce que l 'on salt d6jh d'elle, et si, sur deux physiciens, l 'un en salt plus long que l 'autre, la

quantit6 H ----- - - Z P~ log p~ ne sera pas la mgme pour ]e premier que pour le second.

Cet aspect arbitraire des lois de probabilit6s ne dolt pas nous d6courager de pousser plus loin l '6tude. I1 dolt au contraire nous apprendre h mieux adapter nos instruments de mesure aux grandeurs h mesurer, compte tenu de ce que nous pouvons dg]it sa~,oir d'elles par ailleurs.

Voici deux exemples de la modification que peut faire subit h H une connaissance anticip6e sur la grandeur h mesurer.

3 , 4 1 . - l~dduction du domaine de variations.

Soit une grandeur pouvant aller de 0 h V par 6chelons z. Le nombre de ces 6chelons est :

N = Vl~.

Un premier op6rateur, ne sachant que cela, at tr ibuera h priori la m~me probabilit6 h toutes les N cases. La quantit6 d ' Informat ion aff6rente h u n ~ tirage )~ sera :

~, log = log

Un dcuxi~me op6rateur, connaissant mieux le probl~me, arrivera (par une 6tude th6orique plus pouss6e, par exemple) h localiser la grandeur dans un domaine V t h V~ plus peti t que eelui allant de 0 h V. Soit N ' le nombre de cases que contient ce domaine. La probabili% de tirage de l 'un6 de ces cases sera i / N ' . Celle du tirage de ehacune des cases non comprises dans ce domaine V 1 h V z sera nulle, et le terme correspondant p log p sera 6gale- ment nul.

L'op6ration - - Z Ps log ps 6tendue, comme pr6c6- demment, h toutes les eases de 0 h V, donne cette lois :

l t ' ~- -~ N ~ log ~ =:logN' .

Est-ce h dire que, H d6pendant des eonnaissances

J . L O E B [ANNALES DES TI~L~COMMUNICATIONS

plus ou moins completes que poss6de l 'op6rateur, il est vain de chercher h s'en servir ?

Bien au contraire, anticipant sur le contenu des paragraphes suivants, nous pouvons dire que l 'appa- reil de mesure devra gtre choisi en cons6quence. Dans le cas pr6sent, il suflira, au lieu de prendre un appareil de mesure allant de 0 h V, d'en prendre un ne couvrant que le domaine V x h V 2.

3,42. - - Probabilitds ?l r6partition non uniforme.

Prenons encore une grandeur susceptible d'occuper l 'une des N cases allant de 0 h V. Mais cette fois le renseignement suppl6mentaire est le suivant :

La grandeur inconnue dolt ~ priori ~tre 6gale une valeur d6termin6e V0; mais cette coincidence ne se produit qu'avec une certaine erreur, que nous supposerons gaussienne.

La r6partition en probabilit6 des cases de largeur Ax (avec A~ = V/N) rep6r6es par une distance x h la valeur V o la plus probable est la suivante :

1 t~(x) = - ~ e -~ /~ A~,.

Nous supposons, en 6crivant cette formule,

assez petit pour que la somme Z p(x) se confonde prat iquement avec :

I f+c~e--xdr 1.

Formons maintenant :

H ' = - - E p l o g p

-~2 Ax ( x 2 lo A x \ H ' = - - E e ~' , ~ - - ; 2 + g ~ , ~ ) '

O U :

~V---~ ~ J - ~ t2e- , ~ or.

N ~ / ~ D~s que T e s t assez grand, le deuxi~me terme,

Sgal h 1/2, peut gtre n6glig6, et l 'on a :

H ' = log N ~ / ~ V

Nous avons d6jh suppos6, pour 6tendre les int6- grales jusqu'h l'infmi, q u e :

~<<1.

La connaissance pr6alable d 'une valeur V 0 avec r6partition gaussienne de l 'erreur diminue ainsi consid6rablement la quantit6 d ' information aff6- rente h u n (( tirage ~,, et il faut s 'a t tendre hce qu 'un appareil de mesure, convenable ~ nous verrons plus loin le sens exact qu'il faut at t r ibuer h ce mot - - dans le cas off l'orr ne sait rien h priori de la grandeur �9 ~ mesurer, cesse de l'gtre si on connatt h priori une valeur autour de laquelle ]a grandeur possSde une r6partition gausienne.

94 - -

Page 6: Une théorie “informationnelle” de la mesure et de la télémesure

t. 6, n ~ 4, 1951]

3 , 4 3 . - - - I n t r o d u c t i o n de su i t e s de Markoff .

Dans de nombreux cas, la probabilit6 d 'un ~ tirage)) d6pend du num6ro ~< sorti )> au tirage pr6c6dent, et la connaissance de la loi exacte de probabilit6 diminue la quantit6 d ' Informat ion aff6rente aux tirages.

Prenons comme exemple un probl6me de mesure, ou de t616mesure (ce qui revient au m~.me) d 'un angle. L'uti l isateur se d6clare satisfait si, h la sortie de t 'appareil de mesure, on peut situer l 'index ser- vant ~ rep6rer l'angle dans l'une de 512 cases dans lesquelles on aura divis6 la circonf6rence. La quan- tit6 d ' Informat ion relative h u n tirage sera:

H = - - 5t2 log 2 = 9.

En fait, dans le probl6me concret ci-dessus, il s'agit de retransmettre la position d 'un radiogonio- m6tre. Le projet en cours de r6alisation pr6voit la transmission du renseignement 25 fois par seconde. I1 est bien 6vident que, au bout de 1/25 e de seconde, le cadre n 'aura pas pu tourner d 'un angle consid6- rable, et que la probabilit6 de le voir occuper une position h 180 ~ de la position actuelle est rigoureu- sement nulle.

Supposons que l 'op6rateur soit capable, au grand maximum, de faire faire h son cadre un tour en i seconde. Cela signifie que 1/25 e de seconde apr6s

un cc tirage ~, l ' index ne peut se trouver que dans l 'une des 40 cases contigufis h celle qu'il vient de quitter (20 de part et d'autre). La r6partition des cases en probabilit6 change alors : sur les 512 cases, 472 ont une probabilit6 nulle, chacune de celles qui restent ayant la probabilit6 1/40 e d'etre atteinte. La quantit6 d ' Informat ion devient alors :

1 1 H' = - - -40 (~-~ log., ~ ) = 5,3.

Une analyse plus fine, tenant compte du fait que l 'op6rateur recherche une station 6mettrice et imprime souvent h son appareil ,an mouvement oscillant, conduirait sans doute h une quantit6 d ' Informat ion plus faible encore.

6 . ---- (( A D A P T A T I O N )) E T R E N D E M E N T

D E S A P P A R E I L S D E M E S U I ~ E .

Nous avons d6fini successivement les quantit6s : C relative h l 'appareil de mesure, H~ relative h la grandeur h mesurer. Le moment est venu de rap- procher ces deux quantit6s, afin de voir si un appa- reil de mesure convient h la grandeur physique qu'il est cens6 devoir mesurer. Le rapport H ~ / C

jouera 6videmment un r61e dans l'affaire. Mais il faut auparavant montrer comment les facteurs de C, en l'esp6ce la largeur de bande W e t le nombre N d'6tats discernables, peuvent se transformer l 'un dans l 'autre.

4 , t . ~ Codage.

Dans son ouvrage fondamental [3], SHANNON pr6sente le codage comme un moyen d 'adapter un

U N E T n I ~ O R I E (( I N F O R M A T I O N N E L L E )) D E L A M E S U R E 6/8

message ~ un canal de transmission. On peut aussi le pr6senter - - ce qui revient au mgme - - comme un moyen de faire varlet W et N sans faire varlet leur produit. Prenons comme exemple le codage par num6ration binaire.

Un appareil de mesure est susceptible d'occuper N 6tats discernables. Chacun de ses 6tats est repr6- sent6 par un train d'impulsions h log2 N moments, ces impulsions ne n6cessitant pour gtre lues qu 'un

S rapport ~ = 1 (les conditions de transmission

peuvent gtre telles que seul un signal c~ tout ou rien ~ peut ~tre pass6 sans risque d'erreur).

Pour chaque 6tat de l'appareil, il faut log~ N impulsions. La bande passante n6cessaire W' est donc 6gale h W multipli6e par log 2 N. Le d6bit possible d ' Informat ion est donna par la formule :

W' 1%2 (1 + t) = W log 2 N.

L'op6ration inverse est possible, avee n ' importe quelle valeur N ' du nombre des 6tats discernables.

On peut donc ajuster, par codage, un appareil de mesure h une grandeur ~ mesurer, de fa~on h 6galiser les nombres d'6tats discernables.

4 , 2 . - R e n d e m e n t d 'un appareil de m e s u r e .

I1 va sans dire que le domaine des 6tats possibles de l 'appareil de mesure dolt contenir le domaine des valeurs possibles de la grandeur ~ mesurer. Ceci 6rant, l 'appareil sera parfai tement adapt6 si l 'on a :

H n

C --

S'il n'en est pas ainsi, deux eas se pr6sentent :

4,2~. - - La capaci t6 C es t insuff isa~te .

Dans ce cas l 'appareil de mesure introduit des erreurs statiques ou dynamiques :

Exemple d'erreur statique : un voltm6tre dont la pr6cision de lecture est moins bonne que celle dont on a besoin pour mesurer une tension.

Exemple d'erreur dynamique : un appareil dou6 d'inertie ayan t h mesurer une grandeur trop rapi- dement variable.

4 , 2 2 . - La capac i t $ G es t surabondante .

C'est lh un cas tr6s g6n6ral. Dans de tr6s nom- breuses applications, surtout celles qui me t ten t en jeu la transmission radio61ectrique de l ' Information, il arrive que l ' instrument a une capacit6 C de trans- mission tr~s largement surabondante.

Or, la r6alisation d 'une capacit6 C 61ev6e cof i te cher : elle cofite de la largeur de bande et de la puissance s'il y a transmission radio61ectrlque ; elle cofite de la construction m6canique compliqu6e, dans le cas d'appareils de laboratoire. Nous arrivons ainsi h la notion de rendement d 'un syst6me de mesures. C'est le rapport ~ entre le d6bit d 'Infor- marion aff6rent h la grandeur h mesure H~, et la capaeit6 C de transmission de l 'appareil de mesure :

H n "q-- C

95

Page 7: Une théorie “informationnelle” de la mesure et de la télémesure

7/s

5 . - T ~ L ~ M E S U ~ E D'UN ANGLE:

PAR ECFIANTILLOiNNAGE.

Reprenons le syst~me d6crit au paragraphe 3,63, en le compl6tant par le syst~me de transmission.

Le code d'impulsions h 9 moments (plus une �9 impulsion de synchronisation) dolt prendre place dans I vingt-einqui6me de seconde, soit 40 milli- secondes, ce qui laisse 4 millisecondes par impulsion. Bien que le syst~me puisse encore fonctionner avec des impulsions jointives, on leur donne une largeur de 2 millisecondes. La bande passante n6cessaire pour les faire passer est 250 c/s.

Comme on l'a dit plus haut, la liaison n'a pas besoin d'etre meilleure que celle qui donne S/B = 1. On a donc:

C -= 250 log~ 2 = 250.

Nous avions (paragraphe 3,43) :

H = 25 • 5 ,3=132.

Le rendement est alors de plus de 50 %.

6. - - ADAPTATION DES ~CHELLES.

I1 arrive fr6quemment que la grandeur h mesurer suive une loi de probabilit6 non uniform6ment r6partie. Le paragraphe 3,42 d6crit une grandeur r6partition gaussienne autour d'une valeur centrale.

Le calcul de H, dans ce paragraphe, a 6t6 fait en supposant que, ind6pendamment de tout appareil de mesure, il existe un nombre N d'6tats discer- nables de la grandeur h mesurer elle-mgme. I1 devient N' lorsque les 6tats discernables les moins nombreux sont eeux, en nombre N', de l'appareil de mesure. Prenons maintenant Ie cas o6 la limitation de l 'Information est apport~e par l'appareil de mesure lui-mgme. Soit, par exemple, un voltm~tre dont l'aiguille ne peut occuper que N positions dis- cernables.

Nous sommes encore llbres de choisir une chose : la fonction V(0) qui relie la voltage appliqu6 h la d6viation. On peut pratiquement obtenir une gamme vari6e de ces fonctions en agissant sur la forme des pi6ces polaires des appareils ~ aimant mobile.

Si l'6talonnage est ainsi fair que les parties les plus probables de la zone parcourue par la grandeur

mesurer sont celles qui contiennent le plus grand hombre de cases - - toujours suppos6es ~gales - - de l'instrument, l 'adaptation souhait~e sera r6alis6e.

Essayons de pr6ciser cette r6partition dans le cas o~ on cherche la ineilleure adaptation ~ la grandeur gaussienne du paragraphe 3,42. l~valuons d'abord le rendement d'un appareil h r6partition uniforme mis en pr6sence de cette grandeur gaussienne. Ce serait

H' n log ~v

= ~ -- togN

of~ H~ est la quantit6 d' Information que peut d6biter l'appareil de mesure sollicit6 n fois par unit6 de

ft. LOEB [ANNALES DES TIELECOMMUNICA'VIONS

temps par une grandeur h mesurer ayant uue r6par- tition probabitiste uniforme. L'appareil, pour gtre mieux adapt6, devra ~tre modifi6 de ]a fa~on sui- v a n t e :

A chaque intervalle ~ x du domaine de la grandeur h mesurer, nous ferons correspondre un nombre v(x)Ax de cases de l'appareil de mesure. Bien entendu, il faut que :

E ~ ( x ) hx = N,

N 6tant le nombre total de cases de l'appareil de mesure.

Rendons de plus ,~(x) proportionnel ~ la proba- bilit6 que poss~de la grandeur h mesurer. I1 vient :

N -~-~

D6terminons H de la fa~on suivante: pour chaque intervalle Ax, cherchons la probabilit6 P~i pour que la grandeur h mesurer tombe dans la ii~m~ case comprise dans les v(x)Ax centr6es surla valeur x:

- - e ~ Ax

H" est la somme de toutes les quantit6s P~z dont la somme est N. On retombe ainsl sur la quantit6 maximum d'Information :

H " ~ - - N ~ . log~ = l o g N .

L'adaptation est alors parfaite et le rendement est redevenu ~gal ~ 1.

La g6n6ralisation est imm6diate. Cette adaptation des @helles n'est pas une simple

rue de l'esprit. Nous venons de faire la th6orie ~c informationnelle ~ d'appareils souvent utilis6s dans

Fro. 6.

les centrales 61ectriques : les voltm~tres h 6chelle di- lat6e autour de la valeur la plus fr6quente de la gran- deur h mesurer, l l 0 V, par exemple (volt figure 6).

7. - - CONCLUSION.

La th6orie de l'Information, appliqu6e aux me- sures en physique et aux t616mesures, introduit un nouveau crit6rium d'emcacit6 des appareils utilis6s, leur adaptation au r6gime dynamique de la grandeur h mesurer. En particulier, elle devra permettre d'examiner, dans chaque cas, si les moyens mis en ceuvre pour effectuer les mesures sont insufflsants ou surabondants, le second cas 6tant tr~s fr6quent. Lorsqu'il se pr6sente on est conduit h d6finir un rendement, rapport entre la quantit6 d' Information

9 6

Page 8: Une théorie “informationnelle” de la mesure et de la télémesure

6, n o 4, 1951]

t ransmet t re et celle que l 'appareil serait r6etlement capable de t ransmet t re .

En particulier, il y aura lieu de revoir, h la lumi~re de cette th60rie, le (( rendement ~ des syst~mes de navigat ion radio61ectrique, de d6tection 61ectro- magn6tique, etc.

Manuscr i t re~u le t3 novembre 1950

BIBLtOGRAPHIE

UNE THIs (( I N F O R M A T I O N N E L L E )) DE LA M E S U R E ~ / ~

Ill LoEB (J.), C,riE.~ ( ) , Des r6seaux 61ectriques aux transmissions m6caniques, Bulletin de l'Asso- ciation Technique Maritine et Adronautique de 1968.

[2] TuswIN (A.), La nature de ta r6ponse de l'op6rateur dans le contr61e manuel et les cons6quences que l'on peut en tirer pour le calcul d'un contr61eur. (The nature of the operator's response in manual

control, and its implications for controller design.) Inst�9 Electr. Engrs G. B., Convention on automatic regulators and servo-mechanisms (17-22 mai 1947), t3 p.

[3] SHANNON (C. E�9 Une th6orie math6matique des t61dcommunications. (A mathematical theory of communications.) Bell. Sgst. Techn. d., (U. S. A.) (juillet 1948), v�9 27, n ~ 3, pp. 379-423 (octobre 1948), v. 27, n o 4, pp. 623-656.

[4] TuLT~a (W. G.), Limitations =h6oriques de Ia vhesse de transmission de l'information. (Theore- tical limitations on the rate of transmission of information.) Proc. Inst. Radio Engs., (U. S. A.) (mai 1949), v: 37, n ~ 5, pp. 468-478.

[5] GxnoR (D.), Th6orie des communications. (Theory of communications.) J. Inst. Electr. Engrs; part. III (novembre 1946), v. 93, n ~ 26, pp. 429-457.

COMPTES RENDUS DE LIVRES

OLnSN~Ui~GER (R.). - - L'analyse mathdmatique clans les sciences de l'inggnie~r. (Mathematical analysis.) The Mac Millan Co, New-York (!950), 426 p., 220 fig., prix : 6 $ [Don de l'6diteur].

II ne s'agit pas 1~ d'un livre sur les math6matiques appliquges mais bien d'un ouvrage destin6 avant tout h [aciliter la raise en dqttation des probl~mes de l'ing6nieur. Pour pouvoir effectuer correctement cette raise en 6qnation on dolt conna~tre tes lois [ondamentales de la physique et poss6der une certaine habilet6 h /aire des hypotMses simplificatrices. On ne devra donc pas chef- eher dans ee livrc un cours sur la technique des calculs math6matiques, mais nniquement un expos6 des lois fondamentales d'un certain nombre de chapitres de la physique, illustr6 par de nombreux exemples tir6s des techniques de l'ingdnieur.

Les chapitres sont les suivants : (I) M6canique du corps solide, (II) t~Iectricit6 et magngtisme, (III) Ther- modynamique, (IX;) Elasticit6, (V) Mfcanique des fluides.

Les diff6rentes disciplines 6num6r6es ci-dessus sont remarquablement trait6es; tous les aspects fonda- mentaux sont passds en revue malgrd la concision obligde du texte. En outre, ce qui fait l'originalit6 de cet ouvrage c'est de contenir beaucoup d'exemples d'applications qui ont trait ~t la tecb.nique la plus moderne (tarbo- r6acteur, fusges Y2, etc).

Les dessins sont particuli6rement exacts et ne se bornent pas g de simples sch6mas. De plus, de nom- breuses photographies illustrent l'ouvrage principa- lement dans le but louable de familiariser le lecteur, dans toute la mesure du possible, avec les ordres de grandeur et les aspects des mat6riels industriets (bglices, r6sis- tances, tubes ~ vide, transformateurs, etc.). Une remarque cependant : il est 6tonnant de constater que le syst6me Gm~;I rationalis6 n'est pas utilis6 malgr6 les nombreux avantages qn'il pr6sente pour l'ing6nieur.

Dans sa pr6face I'auteur explique le caract~re, ~ Ia

lois polyvalent et s61ectif de son ouvrage, par le besoin de couvrir tousles r domaines majeurs ~ de la technique et de la physique industrielle, car il est fr6quent qu'un probl6me fasse intervenir ~ la fois plusieurs de ces domaines. Par le choix effectu6, les ing6nieurs des diverses spgcialit6s se trouvent inggalement favoris6s, depuis ceux de.l 'optique, qui sont laiss6s de c6t6, jusqu'h ceux qul sont charg6s de l'6tude de moteurs thermiques (a6ronautiques en particulier), qui b6n6- ficient d'une particuligre sollicitude, l~ais au total, voilh un pr6cieux livre qui, sous un volume r6duit, contient 6norm6ment de choses utiles m~me pour un ing6nieur tr~s confirm&

A. ANGOT.

LAURENT ( A . - G . ) . - La mdthode statistique dans l'in- dustrie. Presses universitaires de France, Paris (1950), t34 p., 7 figures [Don de l'auteur].

Bien que ]es probabilistes et statisticiens fran~ais aient apport6 une contribution importante dans ce do- maine, il n'existe gugre d'ouvrages fran~ais pr6sentant aux utilisateurs, chercheurs, ing6nleurs, etc., les diverses m6thodes que la statistique moderne met au service de la smence et de 1 mdustrle ( ) .

M. LAUnENT ne pr6tend certainement pas, dans son petit livre r6cent, brosser un tableau complet, et son ouvrage ne met pas le lecteur ~ mgme d'appliquer ces m6thodes ; mais il constitue une introduction que beau- coup trouveront commode. Le ehoix du vocabulaire technique fran~ais y est fait avec soin; toutefois on pourrait pr6fgrer qu'h quelques nots anglais (tels que " statistic" (au sens de R.-A. Fisher), " range ", " run" , " trend ") aient 6t6 substitu6s leurs 6quivalents fran~ais - - par exemple, au mot " range " le mot fran~ais " 6tendue " ou " 6talement "

M.-D. IND,mUDJIArr

(*) Toutefois, nous croyons savoir qu'au moins deux ou trois ot~vrages franqais sont en pr6paration,

9 7 - -