7
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Transfusion Clinique et Biologique 19 (2012) 32–38 Article original Utilisation des concentrés plaquettaires : expérience d’une région Use of platelet concentrates: A regional experience A.-S. Legendre a,, S. Le Monnier b , P. Chamouni c , A. Damais d , I. Hervé e , P. Lenain f , I. Maréchal g , P. Rasonglès h , P. Breton i , P. Pavie a , S. Guirao a , J. Doucet a , É. Rémy a a Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (Omédit) de Haute-Normandie, CHU de Rouen, IBC 2 e étage, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France b Hémovigilance, centre hospitalier intercommunal Eure-Seine, 17, rue Saint-Louis, 27023 Evreux, France c Centre régional de traitement de l’hémophilie, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France d Hémovigilance, centre hospitalier du Havre, 29, avenue Pierre-Mendès-France, 76290 Montivilliers, France e Hémovigilance, centre hospitalier intercommunal Elbeuf-Louviers, BP 310, rue du Docteur-Villers, Saint-Aubin-lès-Elbeuf, 76503 Elbeuf cedex, France f Hémovigilance, centre régional de lutte contre le cancer Henri-Becquerel, rue d’Amiens, 76038 Rouen cedex, France g Hémovigilance, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France h EFS Normandie, BP 558, 609, chemin de la Bretèque, 76230 Bois-Guillaume, France i Hémovigilance régionale, Drass Haute-Normandie, 31, rue Malouet, 76100 Rouen, France Disponible sur Internet le 24 janvier 2012 Résumé But de l’étude. L’Établissement franc ¸ais du sang (EFS) met à disposition des prescripteurs deux types de concentrés plaquettaires : les concentrés plaquettaires d’aphérèse et les mélanges de concentrés plaquettaires standard. Une étude rétrospective réalisée par le groupe Dérivés sanguins de l’Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (Omédit), en lien avec l’EFS et les correspondants d’hémovigilance de huit établissements de santé régionaux, a analysé les prescriptions des concentrés plaquettaires et la position des prescripteurs quant à l’acceptation d’une délivrance de mélanges de concentrés plaquettaires standard. Matériel et méthodes. Entre le 2 et le 6 juin 2008, 151 concentrés plaquettaires ont été délivrés par l’EFS. Des informations ont été obtenues pour 144 concentrés plaquettaires, transfusés à 83 patients, d’âge moyen 50 ans. Au cours de l’étude, 33 mélanges de concentrés plaquettaires standard ont été délivrés (23 %) et 111 concentrés plaquettaires d’aphérèse (77 %). Résultats. Sur les 111 concentrés plaquettaires d’aphérèse, la délivrance de mélanges de concentrés plaquettaires aurait a posteriori été refusée pour 47 concentrés plaquettaires d’aphérèse (42 %), acceptée pour 18 (16 %) et non renseignée pour 46 (42 %). Au total, 51 mélanges de concentrés plaquettaires standard auraient donc pu être délivrés sur cette période, soit 35 % des délivrances des concentrés plaquettaires. Le taux de plaquettes avant transfusion a été renseigné pour 121 concentrés plaquettaires, la médiane était de 32 G·L 1 pour les concentrés plaquettaires d’aphérèse et de 44 G·L 1 pour les mélanges de concentrés plaquettaires standard. Conclusion. Un recours plus fréquent aux mélanges de concentrés plaquettaires standard, d’efficacité thérapeutique comparable, semble intéressant dans un contexte d’augmentation des consommations de concentrés plaquettaires dans les établissements de santé, et les prescripteurs n’y semblent pas opposés. Une brochure d’information sur les concentrés plaquettaires a été rédigée et distribuée aux prescripteurs afin de promouvoir la prescription de mélanges de concentrés plaquettaires standard. Une deuxième évaluation est prévue pour mesurer l’impact de cette communication. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Concentrés plaquettaires d’aphérèse ; Mélanges de concentrés plaquettaires standard ; Transfusion ; Prescription Abstract Purpose of the study. The Établissement franc ¸ais du sang (EFS) distributes two types of platelet concentrates: using a single donor in aphaeresis platelet concentrate (SDAP), versus pooled platelet concentrates (PPC). A retrospective study performed by the Blood Derivatives Group at Cette étude a été présentée sous forme d’une communication affichée au XXIV e congrès de la Société franc ¸aise de transfusion sanguine à Strasbourg en juin 2009. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A.-S. Legendre). 1246-7820/$ see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.tracli.2011.10.003

Utilisation des concentrés plaquettaires : expérience d’une région

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Transfusion Clinique et Biologique 19 (2012) 32–38

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Use of platelet concentrates: A regional experience

A.-S. Legendre a,∗, S. Le Monnier b, P. Chamouni c, A. Damais d, I. Hervé e, P. Lenain f,I. Maréchal g, P. Rasonglès h, P. Breton i, P. Pavie a, S. Guirao a, J. Doucet a, É. Rémy a

a Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (Omédit) de Haute-Normandie, CHU de Rouen,IBC 2e étage, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France

b Hémovigilance, centre hospitalier intercommunal Eure-Seine, 17, rue Saint-Louis, 27023 Evreux, Francec Centre régional de traitement de l’hémophilie, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France

d Hémovigilance, centre hospitalier du Havre, 29, avenue Pierre-Mendès-France, 76290 Montivilliers, Francee Hémovigilance, centre hospitalier intercommunal Elbeuf-Louviers, BP 310, rue du Docteur-Villers, Saint-Aubin-lès-Elbeuf, 76503 Elbeuf cedex, France

f Hémovigilance, centre régional de lutte contre le cancer Henri-Becquerel, rue d’Amiens, 76038 Rouen cedex, Franceg Hémovigilance, CHU de Rouen, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France

h EFS Normandie, BP 558, 609, chemin de la Bretèque, 76230 Bois-Guillaume, Francei Hémovigilance régionale, Drass Haute-Normandie, 31, rue Malouet, 76100 Rouen, France

Disponible sur Internet le 24 janvier 2012

ésumé

ut de l’étude. – L’Établissement francais du sang (EFS) met à disposition des prescripteurs deux types de concentrés plaquettaires : les concentréslaquettaires d’aphérèse et les mélanges de concentrés plaquettaires standard. Une étude rétrospective réalisée par le groupe Dérivés sanguinse l’Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et de l’innovation thérapeutique (Omédit), en lien avec l’EFS et les correspondants’hémovigilance de huit établissements de santé régionaux, a analysé les prescriptions des concentrés plaquettaires et la position des prescripteursuant à l’acceptation d’une délivrance de mélanges de concentrés plaquettaires standard.atériel et méthodes. – Entre le 2 et le 6 juin 2008, 151 concentrés plaquettaires ont été délivrés par l’EFS. Des informations ont été obtenues pour

44 concentrés plaquettaires, transfusés à 83 patients, d’âge moyen 50 ans. Au cours de l’étude, 33 mélanges de concentrés plaquettaires standardnt été délivrés (23 %) et 111 concentrés plaquettaires d’aphérèse (77 %).ésultats. – Sur les 111 concentrés plaquettaires d’aphérèse, la délivrance de mélanges de concentrés plaquettaires aurait a posteriori été refuséeour 47 concentrés plaquettaires d’aphérèse (42 %), acceptée pour 18 (16 %) et non renseignée pour 46 (42 %). Au total, 51 mélanges de concentréslaquettaires standard auraient donc pu être délivrés sur cette période, soit 35 % des délivrances des concentrés plaquettaires. Le taux de plaquettesvant transfusion a été renseigné pour 121 concentrés plaquettaires, la médiane était de 32 G·L−1 pour les concentrés plaquettaires d’aphérèse ete 44 G·L−1 pour les mélanges de concentrés plaquettaires standard.onclusion. – Un recours plus fréquent aux mélanges de concentrés plaquettaires standard, d’efficacité thérapeutique comparable, semble intéressantans un contexte d’augmentation des consommations de concentrés plaquettaires dans les établissements de santé, et les prescripteurs n’y semblentas opposés. Une brochure d’information sur les concentrés plaquettaires a été rédigée et distribuée aux prescripteurs afin de promouvoir la

rescription de mélanges de concentrés plaquettaires standard. Une deuxième évaluation est prévue pour mesurer l’impact de cette communication.

2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

ots clés : Concentrés plaquettaires d’aphérèse ; Mélanges de concentrés plaquettaires standard ; Transfusion ; Prescription

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urpose of the study. – The Établissement francais du sang (EFS) distributes two types of platelet concentrates: using a single donor in aphaeresislatelet concentrate (SDAP), versus pooled platelet concentrates (PPC). A retrospective study performed by the Blood Derivatives Group at

� Cette étude a été présentée sous forme d’une communication affichée au XXIVe congrès de la Société francaise de transfusion sanguine à Strasbourg en juin009.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (A.-S. Legendre).

246-7820/$ – see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.tracli.2011.10.003

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A.-S. Legendre et al. / Transfusion Clinique et Biologique 19 (2012) 32–38 33

bservatory for Drugs, Medical Devices and Therapeutic Innovations (OMEDIT), in collaboration with EFS and haemovigilance correspondentsrom eight regional health care establishments, has analyzed platelet concentrates prescriptions and the position of the prescribers concerning PPCupply.aterial and methods. – Between the 2nd and 6th June 2008, 151 platelet concentrates were supplied by ESF. Data were collected for 144 platelet

oncentrates and in 83 transfused patients with an average age of 50 years. During this study, 33 PPC (23%) and 111 SDAP (77%) were supplied.esults. – With regards to the 111 SDAP, the supply of PPC was refused in 47 cases (42%), accepted in 18 cases (16%) and unknown for 46 cases

42%). A total of 51 PPC could be supplied during this period, which represented 35% of platelet concentrates prescriptions. The rate of plateletsefore transfusion was known for 121 platelet concentrates, the median was 32 G·L−1 for SDAP and 44 G·L−1 for PPC.onclusion. – More frequent PPC use, with comparable therapeutic efficacy, could be interesting in a context of increasing platelet concentratesonsumption in health care establishments. Moreover, prescribers did not seem to be against the idea. An information pamphlet on plateletoncentrates was drafted and distributed to prescribers in order to promote the prescription of PPC. A second assessment is planned to measurehe impact of this communication.

2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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eywords: Aphaeresis platelet concentrates; Pooled platelet concentrates; Tran

. Introduction

Les concentrés plaquettaires sont des produits indis-ensables en thérapeutique transfusionnelle. Actuellement,’Établissement francais du sang (EFS) met à dispositiones prescripteurs deux types de concentrés plaquettaires : lesoncentrés plaquettaires d’aphérèse issus d’un seul donneur etes mélanges de concentrés plaquettaires standard issus du done sang total de plusieurs donneurs.

De nos jours, l’EFS rencontre des difficultés’approvisionnement en concentrés plaquettaires d’aphérèse,n raison d’une demande croissante de concentrés plaquettaires,e la difficulté de recruter des donneurs d’aphérèse en nombreuffisant et de la durée de conservation limitée de ces produits.ien que les donneurs de sang total soient plus nombreuxt que les mélanges de concentrés plaquettaires standardoient plus faciles d’obtention, la proportion de mélanges deoncentrés plaquettaires standard délivrés aux établissementse santé reste encore faible dans notre région. D’une part du fait’une production limitée et, d’autre part, d’un encouragementntérieur des prescripteurs à utiliser préférentiellement lesoncentrés plaquettaires d’aphérèse.

Les concentrés plaquettaires d’aphérèse étant des produitsono-donneurs, le risque résiduel de contamination du receveur

ar des agents infectieux transmissibles semblait plus faible queour les mélanges de concentrés plaquettaires standard, issuse cinq à six donneurs en moyenne [1]. Or, l’évolution desechniques de préparation (notamment la déleucocytation) ete qualification biologique (particulièrement l’introduction duépistage génomique viral) confère aux deux types de concen-rés plaquettaires un risque résiduel infectieux comparable [2].

L’efficacité hémostatique de ces deux produits est équiva-ente [3] et les données actuelles de tolérance sont en faveur desélanges de concentrés plaquettaires standard. En effet, chez les

eceveurs, l’incidence des effets indésirables liés aux mélangese concentrés plaquettaires standard (notamment allergiques)st significativement plus faible que celle des concentrés pla-

uettaires d’aphérèse [4,5]. Pour les donneurs, les évènementsndésirables graves (manifestation locale ou générale) appa-aissent deux fois plus élevés lors des procédures d’aphérèseue lors des prélèvements de sang total [6].

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n; Prescription

Les praticiens hémovigilants du groupe de travail Déri-és sanguins de l’Observatoire du médicament, des dispositifsédicaux et de l’innovation thérapeutique (Omédit) de Haute-ormandie ont donc souhaité réaliser une étude observationnelle

ur l’utilisation des concentrés plaquettaires, avec l’aide de’EFS Normandie.

Le but de cette enquête rétrospective était d’obtenir un étates lieux ponctuel des prescriptions de concentrés plaquettairesur la région Haute-Normandie, et de connaître la position desrescripteurs quant à l’acceptation éventuelle et a posteriories mélanges de concentrés plaquettaires standard au lieu desoncentrés plaquettaires d’aphérèse prescrits.

. Matériel et méthodes

Cette étude rétrospective observationnelle a été réalisée sures concentrés plaquettaires délivrés aux établissements de santéar l’EFS entre le lundi 2 et le vendredi 6 juin 2008.

La liste des concentrés plaquettaires délivrés par établisse-ent durant cette période nous a été communiquée par l’EFS.lle comportait le numéro du don, le service clinique, le médecinrescripteur et la date de délivrance.

Ensuite, pour chaque concentré plaquettaire, une fiche deenseignements élaborée par le groupe de travail de l’Omédit

été envoyée aux correspondants d’hémovigilance des établis-ements de santé concernés (Annexe 1). La consultation desossiers des patients a permis de recueillir les données suivantes :om de l’établissement de soins, pathologie, informations sures patients (sexe, poids, âge), nature du concentré plaquettairerescrit et transfusé, groupes ABO et Rh1 des patients et desoncentrés plaquettaires, taux de plaquettes avant et après trans-usion si connu, prise éventuelle d’un traitement antiagrégantlaquettaire. De plus, l’avis du prescripteur quant à l’éventuellecceptation a posteriori de substituer un concentré plaquettaire’aphérèse par un mélange de concentrés plaquettaires standard

été recueilli.L’exploitation des données a ensuite été assurée par l’Omédit

e Haute-Normandie, à l’aide du logiciel Excel.Le rendement transfusionnel plaquettaire a été calculé selon

a formule recommandée par l’Agence francaise de sécuritéanitaire des produits de santé (Afssaps) [1].

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4 A.-S. Legendre et al. / Transfusion

. Résultats

.1. Nombre de concentrés plaquettaires délivrés entre le et 6 juin 2008

Cent cinquante et un concentrés plaquettaires ont été délivrésar l’EFS Normandie pendant cette période.

Les informations ont été récupérées pour 144 concentrés pla-uettaires transfusés à 83 patients. Un établissement n’a pasenvoyé les fiches de renseignement le concernant (sept concen-rés plaquettaires).

.2. Établissements de santé concernés

Huit établissements de santé ont transfusé des concentréslaquettaires sur cette période dont un centre hospitalier univer-itaire, un centre régional de lutte contre le cancer, cinq centresospitaliers généraux et une clinique privée. Les patients concer-és étaient hospitalisés en service d’hématologie, de médecineu de chirurgie. Aucune transfusion plaquettaire en milieu obs-étrical n’a été réalisée sur cette courte période.

.3. Caractéristiques des patients et des concentréslaquettaires

Les 83 patients concernés, dont 37 femmes et 46 hommes,taient d’âge moyen de 50 ans. L’âge moyen était de 47 ans poures patients transfusés en concentrés plaquettaires d’aphérèsemédiane : 54, extrêmes : 2–86) et de 61 ans pour ceux transfu-és en mélanges de concentrés plaquettaires standard (médiane :0, extrêmes : 29–81). En moyenne, chaque patient a recu,7 concentrés plaquettaires (médiane : 1, extrêmes : 1–8) ;0 patients ont recu plus de deux concentrés plaquettairesFig. 1).

Au cours de cette période, 33 mélanges de concentréslaquettaires standard ont été délivrés à 20 patients (23 %es concentrés plaquettaires) et 111 concentrés plaquettaires

ig. 1. Nombre de concentrés plaquettaires transfusés par patient pour les3 patients de l’étude.

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ue et Biologique 19 (2012) 32–38

’aphérèse ont été délivrés à 64 patients (77 %). Un patient a recues deux types de concentrés plaquettaires. Pour 11 prescriptionsnitiales de concentrés plaquettaires d’aphérèse, des mélanges deoncentrés plaquettaires standard ont été délivrés.

.4. Réponse des prescripteurs à la question : « auriez-vousccepté un mélange de concentrés plaquettaires standard àa place des concentrés plaquettaires d’aphérèse ? »

Pour 46 concentrés plaquettaires d’aphérèse (24 patients), lesrescripteurs n’ont pas répondu à cette question (81 % d’internest 19 % de médecins séniors). Il s’agissait soit de patients’onco-hématologie pédiatrique atteints pour la plupart de leu-émie (n = 10), ou de patients adultes pour des indications deancérologie ou de chirurgie (Tableau 1).

Pour 47 concentrés plaquettaires d’aphérèse (26 patients),oit 42 % des prescriptions de concentrés plaquettaires’aphérèse, les prescripteurs, tous séniors, n’auraient pasccepté la délivrance d’un mélange de concentrés plaquet-aires standard. Il s’agissait de pathologies hématologiquespatients allo- ou autogreffés, atteints de leucémie aiguë, patientse pédiatrie). Pour les 18 concentrés plaquettaires d’aphérèseestants (14 patients adultes d’onco-hématologie), les prescrip-eurs, tous séniors, auraient accepté a posteriori la délivrancee mélanges de concentrés plaquettaires standard (16 % desoncentrés plaquettaires d’aphérèse).

La délivrance des mélanges de concentrés plaquettairestandard sur cette période aurait donc pu s’élever à 35 %51 mélanges de concentrés plaquettaires standard), soit uneugmentation de 12 % par rapport aux prescriptions initiales.

.5. Indications des concentrés plaquettaires en fonctionu contexte

Le Tableau 1 montre l’acceptation de la prescription d’unélange de concentrés plaquettaires standard à la place d’un

oncentré plaquettaire d’aphérèse en fonction des pathologies.ous pouvons noter que des mélanges de concentrés plaquet-

aires standard auraient été acceptés dans certaines pathologiesématologiques.

.6. Corrélation entre les différents concentréslaquettaires et le taux de plaquettes avant transfusion

Les Fig. 2 et 3 montrent les taux de plaquettes avant transfu-ion pour les mélanges de concentrés plaquettaires standard etes concentrés plaquettaires d’aphérèse.

Dix-sept patients n’ont pas pu être pris en compte (taux nonrécisé ou un patient opéré d’anévrisme hépatique pour lequel leaux était très élevé avant transfusion : 462 G·L−1). Dix patients11,4 %) étaient sous anticoagulants ou antiagrégants plaquet-aires : six traités par Kardegic®, un traité par Plavix®, un traitéar antivitamines K et deux traités par héparine de bas poids

oléculaire. Le taux plaquettaire moyen avant transfusion est

e 32 G·L−1 pour les concentrés plaquettaires d’aphérèse et de4 G·L−1 pour les mélanges de concentrés plaquettaires stan-ard. La médiane était de 20 pour les concentrés plaquettaires

A.-S.

Legendre

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(2012) 32–38

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Tableau 1Indications des concentrés plaquettaires.

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Concentrésplaquettairestransfusés (n)

Mélanges de concentrésplaquettaires standarddélivrés et transfusés (n)

Concentrés plaquettaires d’aphérèsedélivrés par l’EFS et transfusés

Prescription concentrésplaquettairesd’aphérèse, délivrancemélanges de concentrésplaquettaires standardpar l’EFS (n)

Mélanges de concentrésplaquettaires standardrefusés a posteriori (n)

Mélanges de concentrésplaquettaires standardacceptés a posteriori (n)

Nonprécisé (n)

HématologieAutogreffe

Lymphome non hodgkinien 3 4 – 4 – – –Maladie de Hodgkin 2 6 2 4 – – 1 MCPS (NA)Myélome 1 1 – 1 – – –Lymphome stade IV 1 1 – 1 – – –

Allogreffe 3 11 – 7 – 4 –Aplasie médullaire 2 3 – 3 – – –Leucémie aiguë

Sans précision 1 4 – – – 4 –Leucémie aiguë lymphoblastique 13 27 1 6 2 18 –Leucémie aiguë myéloblastique 13 21 1 15 4 1 –

LymphomeSans précision 4 7 1 2 4 – –Lymphome non hodgkinien 5 9 3 3 3 – 1 MCPS (A)Maladie de Hodgkin 1 2 1 – 1 – –

Myélopysplasie 4 4 1 – 3 – –Myélome 3 3 3 – – – –Thrombopénie post-chimiothérapie 1 1 1 – – – 1 MCPS (ANR)Thrombopénie centrale 1 1 – – – 1 –Syndrome myéloprolifératif 1 6 3 – – 3 3 MCPS (ANR)

Médecine non hématologieCancer bronchique 3 3 2 – – 1 –Autres tumeurs solides (cérébrale,médiastinale, osseuses)

5 10 2 1 1 6 –

Non précisé 1 1 1 – – – –Cirrhose 1 2 2 – – – 2 MCPS (ANR)Choc septique 2 2 – – – 2 –

ChirurgieChirurgie cardiaque (pontage,greffe, remplacement valvulaire)

4 4 – – – 4 –

Choc hémorragique 1 1 1 – – – –Chirurgie orthopédique 2 2 – – – 2 –Hématome (rétropéritonéal etsous-dural)

2 2 2 – – – –

Anévrisme artériel 2 5 – – – –Avulsion dentaire (greffé hépatique) 1 1 1 – – – –

CPA : concentré plaquettaire d’aphérèse ; MCPS : mélange de concentrés plaquettaires ; NA : non accepté ; A : accepté ; ANR : accepté non renseigné.

36 A.-S. Legendre et al. / Transfusion Clinique et Biologique 19 (2012) 32–38

Fig. 2. Nombre de mélanges de concentrés plaquettaires standard transfusés enf

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Fig. 4. Rendement transfusionnel plaquettaire des concentrés plaquettairesdp

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onction du taux de plaquettes (en G·L−1) avant transfusion.

’aphérèse (indications essentiellement médicales) et de 25 poures mélanges de concentrés plaquettaires standard (indicationslutôt chirurgicales).

Dix-neuf concentrés plaquettaires d’aphérèse ont été trans-usés alors que le taux de plaquettes avant transfusion étaitupérieur à 50 G·L−1. Il s’agissait de transfusion liée à desctes chirurgicaux (fracture fémorale, chirurgie cardiaque dontreffe) pour cinq patients et à des pathologies cancéreuses pourrois enfants (ostéosarcome et leucémie aiguë lymphoblastique).ucun patient ne recevait de traitements anticoagulants.

.7. Rendement transfusionnel plaquettaire

Le rendement transfusionnel plaquettaire n’a pu être calculéue pour 99 concentrés plaquettaires (Fig. 4). Pour 47 concentrés

ig. 3. Nombre de concentrés plaquettaires d’aphérèse transfusés en fonctionu taux de plaquettes (en G·L−1) avant transfusion.

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’aphérèse et mélanges de concentrés plaquettaires standard. ( ) : concentréslaquettaires d’aphérèse ; ( ) : mélanges de concentrés plaquettaires standard.

laquettaires (22 patients), le rendement était inférieur à 20 %quatre patients de chirurgie, 17 d’hémato-oncologie et un deéanimation médicale) : il s’agissait de huit mélanges de concen-rés plaquettaires standard (soit 24 % des mélanges de concentréslaquettaires standard transfusés) et de 39 concentrés plaquet-aires d’aphérèse (35 % des concentrés plaquettaires d’aphérèseransfusés). Parmi ces 47 concentrés plaquettaires avec rende-ent transfusionnel plaquettaire inférieur à 20 %, il existait

ne incompatibilité ABO cellulaire donneur/receveur pour huitoncentrés plaquettaires (quatre patients). À l’opposé, neufoncentrés plaquettaires (neuf patients) présentant une incom-atibilité ABO donneur/receveur ont eu un rendement supérieuru égal à 20 %.

. Discussion

La crainte du risque viral, la prévention du risque d’allo-mmunisation anti-HLA et la recherche d’une meilleure qualitéonctionnelle des plaquettes ont longtemps conduit à privilégiere concentré plaquettaire d’aphérèse dans de diverses situationsliniques [7].

Actuellement, l’évolution des techniques de préparation et deualification font du mélange de concentrés plaquettaires stan-ard un produit sanguin de risque résiduel infectieux comparablet d’efficacité transfusionnelle identique au concentré plaquet-aire d’aphérèse et dont les indications pourraient être élargies,’autant plus que la fréquence des réactions allergiques est signi-cativement moins élevée en cas de transfusion de mélangese concentrés plaquettaires standard, due à la présence d’uneolution de conservation [4,5,7]. En effet, dans notre étude,8 concentrés plaquettaires d’aphérèse sur 111 contenaient uneolution de conservation (T. Sol), les autres étaient en milieulasmatique. Les mélanges de concentrés plaquettaires stan-ard, quant à eux, contenaient tous une solution de conservation

SSP).

Devant la demande croissante de concentrés plaquettaires dea part des établissements de santé, la plus grande disponibilité et

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A.-S. Legendre et al. / Transfusion

a facilité d’obtention des mélanges de concentrés plaquettairestandard, l’efficacité transfusionnelle identique entre concentréslaquettaires d’aphérèse et mélanges de concentrés plaquettairestandard, leur risque résiduel comparable et une tolérance duonneur et du receveur en faveur des mélanges de concentréslaquettaires standard, la place de ce produit mérite d’être valo-isée. D’autant qu’en situation bénéfice–risque identique poure receveur, l’impact économique pour l’établissement de santést en faveur des mélanges de concentrés plaquettaires standard,ui moins coûteux que les concentrés plaquettaires d’aphérèse

produire, sont facturés aux établissements de santé à un prix0 % inférieur à celui des concentrés plaquettaires d’aphérèseour une richesse plaquettaire équivalente (d’après l’arrêté du

mars 2010 relatif au prix de cession des produits sanguinsabiles).

Aujourd’hui, le mélange de concentrés plaquettaires standardeut être utilisé dans quasiment toutes les situations cliniques,ependant le concentré plaquettaire d’aphérèse reste le produitecommandé en cas d’allo-immunisation HLA et dans certainesndications, notamment d’onco-hématologie (greffe, leucémieiguë) selon les recommandations de 2003, qui mériteraient’être reconsidérées [1].

En Haute-Normandie, la délivrance moyenne des mélangese concentrés plaquettaires standard aux établissements deanté était de l’ordre de 11 % en 2003 et de 13 % en 20088]. Notre enquête a été réalisée sur une période qui s’estévélée exceptionnelle en nombre de transfusions de pla-uettes, avec une consommation de concentrés plaquettaireslus élevée qu’habituellement, conduisant l’EFS Normandie

s’approvisionner dans une autre région pour répondre auxesoins locaux. Cette situation peut expliquer en partie laroportion plus importante de mélanges de concentrés plaquet-aires standard délivrée aux établissements de santé sur cetteériode (23 %) et la substitution de 11 prescriptions de concen-rés plaquettaires d’aphérèse par des mélanges de concentréslaquettaires standard.

L’enquête a par ailleurs montré que les prescripteurs auraientccepté a posteriori la délivrance de mélanges de concen-rés plaquettaires standard au lieu de concentrés plaquettaires’aphérèse dans 18 cas. Dans cette configuration, la déli-rance de mélanges de concentrés plaquettaires standard auraittteint au moins 35 % au lieu des 23 % observés (nonobs-ant les 46 concentrés plaquettaires d’aphérèse pour lesquelsa position du prescripteur n’avait pas été précisée). Cesésultats montrent un début de modification des pratiquesui doit être encouragé par une information des prescrip-eurs.

À cet effet, une brochure d’information sur les concentrés pla-uettaires a été réalisée par les correspondants d’hémovigilanceu groupe de travail de l’Omédit, validée par l’EFS eta Direction régionale des affaires sanitaires et socialesDrass), et distribuée à l’ensemble des établissements deanté pour rappeler les modalités de prescription, les indica-

ions, les seuils transfusionnels et la tolérance des concentréslaquettaires d’aphérèse et des mélanges de concentrés plaquet-aires standard afin d’en promouvoir la prescription (Annexe).

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. Conclusion

Cette enquête régionale a permis d’obtenir une photo-raphie de l’utilisation des concentrés plaquettaires sur unanel d’établissements de santé représentatif. La comparaison à’autres régions pourrait être envisagée, notamment par le biaises Omédit.

Désormais, deux types de concentrés plaquettaires compa-ables sont à la disposition des prescripteurs. Ces derniers neemblent pas opposés à une modification des pratiques avec unetilisation plus large des mélanges de concentrés plaquettairestandard. Fin 2009, l’EFS assurait une production plus régulièree mélanges de concentrés plaquettaires standard, de l’ordre de0 %.

De plus, l’impact économique de ce changement de pratiqueserait non négligeable pour les établissements de santé, avecne diminution importante des coûts liés aux transfusions delaquettes.

Une nouvelle enquête sur un mode prospectif est prévue,n incluant de nouveaux critères comme des données cliniquesouvant expliquer les mauvais rendements et des données deolérance. Elle permettra de mesurer l’impact de cette commu-ication sur la prescription des concentrés plaquettaires.

éclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

emerciements

Le groupe de travail Dérivés sanguins de l’Omédit de Haute-ormandie remercie les correspondants d’hémovigilance des

tablissements de santé, l’EFS Normandie et la Drass de Haute-ormandie pour leur collaboration.

nnexes. Matériel complémentaire

Le matériel complémentaire (Annexes 1 et 2)ccompagnant la version en ligne de cet articlest disponible sur http://www.sciencedirect.com etoi:10.1016/j.tracli.2011.10.003.

éférences

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