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Après-mines 2003, 5-7 Février 2003, Nancy 1 UTILISATION DU REMBLAI EN PATE COMME SUPPORT DE TERRAIN. PARTIE II : COMPORTEMENT A COURT, A MOYEN ET A LONG TERME BENZAAZOUA Mostafa 1 , BELEM Tikou 1 , OUELLET Serge 1 , FALL Mamadou 1 1 Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), UER des sciences appliquées 445, boulevard de l’Université Rouyn-Noranda, Québec, J9X 5E4 Canada [email protected], [email protected] RÉSUMÉ : Le remblayage souterrain est devenu une pratique courante pour de nombreuses mines modernes à travers le monde. Le remblai en pâte, en plus de permettre d’enfouir des tonnages importants de résidus problématiques s’ils étaient stockés en surface, constitue un élément structural favorisant la stabilité des vides. En plus des résidus miniers, le remblai en pâte renferme de l’eau et des liants hydrauliques dont le rôle est de générer une certaine cohésion dans le matériau. La difficulté liée à l’utilisation du remblai en pâte est due essentiellement au fait que c'est un matériau complexe, en perpétuelle évolution. En effet, les propriétés mécaniques du remblai en pâte dépendent des caractéristiques physiques, chimiques et minéralogiques des résidus miniers de base, de l’eau de gâchage et du type de liant utilisé et de sa proportion. Par ailleurs, la performance mécanique du remblai en pâte est fortement liée à la présence ou non de sulfates dans le mélange. Le sulfate agit de deux manières, d’une part il peut entraîner une inhibition des réactions à l’origine du phénomène de cimentation et, d’autre part, il pourrait conduire à une altération chimique et/ou une attaque sulfatique conduisant à une chute progressive de la résistance mécanique à long terme du remblai en pâte. MOTS-CLEFS : Remblais en pâte, Résidus miniers, Résistance mécanique, Cimentation. ABSTRACT: Mine Backfilling becomes a common practice in many modern mine operations around the world. Paste backfill represents a good tailings management method by allowing returning this hazardous material to the void underground. In the same time, it represents a structural element participating to the underground support leading to a more complete ore extraction. In addition to the process tailings, paste backfill contains water to facilitate its transport and various amount of binder whose role is to confer some cohesion to this composite material. The difficulties related to the use of paste backfill is that this complex material evolutes continuously. In fact, the paste backfill properties depend on the tailing’s physical, chemical and mineralogical factors, the proportion and chemistry of the water and finally the type and proportion of the added binder. Moreover, the mechanical performances of paste backfill are very dependant of sulfate presence. Sulfates can act in two different manners. In one hand, sulfate will inhibit the hydration reactions of cementitious material, and in the other hand, sulfate may lead to chemical weathering and/or sulfatic attack causing a progressive decrease in term of mechanical strength at long term age. KEY-WORDS: Paste backfill, Mine tailings, Mechanical strength, Cementation. 1. Introduction L'utilisation du remblai cimenté en pâte dans le remblayage minier souterrain est devenue une technique très largement pratiquée dans les mines modernes à travers la planète. Ce remblai cimenté en pâte est un mélange de résidus de concentrateur fins encore humides issus d'une filtration du résidu final (le ramenant à un pourcentage solide compris entre 75 et 85 %), d'un liant hydraulique

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Après-mines 2003, 5-7 Février 2003, Nancy 1

UTILISATION DU REMBLAI EN PATE COMME SUPPORT DE TERRAIN. PARTIE II : COMPORTEMENT A COURT, A MOYEN ET A LONG TERME

BENZAAZOUA Mostafa1, BELEM Tikou1, OUELLET Serge1, FALL Mamadou1 1Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT), UER des sciences appliquées 445, boulevard de l’Université Rouyn-Noranda, Québec, J9X 5E4 Canada [email protected], [email protected]

RÉSUMÉ : Le remblayage souterrain est devenu une pratique courante pour de nombreuses mines modernes à travers le monde. Le remblai en pâte, en plus de permettre d’enfouir des tonnages importants de résidus problématiques s’ils étaient stockés en surface, constitue un élément structural favorisant la stabilité des vides. En plus des résidus miniers, le remblai en pâte renferme de l’eau et des liants hydrauliques dont le rôle est de générer une certaine cohésion dans le matériau. La difficulté liée à l’utilisation du remblai en pâte est due essentiellement au fait que c'est un matériau complexe, en perpétuelle évolution. En effet, les propriétés mécaniques du remblai en pâte dépendent des caractéristiques physiques, chimiques et minéralogiques des résidus miniers de base, de l’eau de gâchage et du type de liant utilisé et de sa proportion. Par ailleurs, la performance mécanique du remblai en pâte est fortement liée à la présence ou non de sulfates dans le mélange. Le sulfate agit de deux manières, d’une part il peut entraîner une inhibition des réactions à l’origine du phénomène de cimentation et, d’autre part, il pourrait conduire à une altération chimique et/ou une attaque sulfatique conduisant à une chute progressive de la résistance mécanique à long terme du remblai en pâte.

MOTS-CLEFS : Remblais en pâte, Résidus miniers, Résistance mécanique, Cimentation.

ABSTRACT: Mine Backfilling becomes a common practice in many modern mine operations around the world. Paste backfill represents a good tailings management method by allowing returning this hazardous material to the void underground. In the same time, it represents a structural element participating to the underground support leading to a more complete ore extraction. In addition to the process tailings, paste backfill contains water to facilitate its transport and various amount of binder whose role is to confer some cohesion to this composite material. The difficulties related to the use of paste backfill is that this complex material evolutes continuously. In fact, the paste backfill properties depend on the tailing’s physical, chemical and mineralogical factors, the proportion and chemistry of the water and finally the type and proportion of the added binder. Moreover, the mechanical performances of paste backfill are very dependant of sulfate presence. Sulfates can act in two different manners. In one hand, sulfate will inhibit the hydration reactions of cementitious material, and in the other hand, sulfate may lead to chemical weathering and/or sulfatic attack causing a progressive decrease in term of mechanical strength at long term age.

KEY-WORDS: Paste backfill, Mine tailings, Mechanical strength, Cementation.

1. Introduction

L'utilisation du remblai cimenté en pâte dans le remblayage minier souterrain est devenue une technique très largement pratiquée dans les mines modernes à travers la planète. Ce remblai cimenté en pâte est un mélange de résidus de concentrateur fins encore humides issus d'une filtration du résidu final (le ramenant à un pourcentage solide compris entre 75 et 85 %), d'un liant hydraulique

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composé d'un ou de plusieurs ciments et dans une proportion allant de 3 à 7 %, et enfin, d'eau de gâchage pour ajuster le pourcentage solide du mélange entre 70 et 80 % selon l'affaissement désiré (cf. figure 1).

RejetsLiant Eau de procédé

Additifs

% sulfuresGranulométrieDensité relative

% H2O

Ca+Mg/Si+Al% ciment

- % CaSO4

Remblai en pâte

SO42--

Chaux soluble

% Liant3 - 7 wt%

Eau %Affaissement

Figure 1. Schéma illustrant la composition des remblais en pâte ainsi que les paramètres les plus importants.

Chacune de ces trois composantes joue un rôle important dans le transport, la mise en place et l'acquisition de la résistance à court terme et à long terme du remblai en pâte. Les avantages associés à l'utilisation du remblai en pâte sont qu'ils permettent (i) de diminuer les quantités de résidus sulfureux générateurs d'eau acide stockés en surface, réduisant du même coup les problèmes environnementaux de pollution et, (ii) d'augmenter les réserves exploitées en intervenant comme pilier secondaire destiné à assurer la stabilité des vides créés. Le remblai en pâte ainsi destiné à favoriser la stabilité des chantiers (vides), doit posséder une certaine résistance mécanique limite afin de satisfaire aux exigences du design de la méthode d'exploitation minière. De nombreux travaux ont déjà montré que l'acquisition de la résistance mécanique du remblai en pâte dépendait de la minéralogie et de la granulométrie des résidus, du type et de la proportion du liant, de la quantité et de la chimie de l'eau de gâchage et enfin, de la géochimie du mélange.

Dans ce papier, certains résultats de travaux de recherche réalisés à l’UQAT au cours des dernières années (e.g. Benzaazoua et al., 1999; Belem et al., 2001; Benzaazoua et al., 2000; Benzaazoua et al., 2002) sont présentés. D’autres travaux plus récents, qui démontrent l’impact de certains paramètres sur les propriétés des remblais en pâte sont également présentés. L’article s’attarde principalement à l’évolution des propriétés mécaniques du remblai en pâte après sa mise place sous-terre jusqu'au long terme (suite de la partie I du papier compagnon). De ce fait, l'effet de chacun des trois composants du remblai en pâte sur l’acquisition de la résistance, à savoir, le type de résidus, le type d’eau de gâchage et le type de liant sera discuté. On présentera aussi quelques cas évidents de perte de résistance suite à une altérabilité chimique du remblai en pâte

2. Composantes des remblais en pâte

La Figure 1 représente les trois composantes principales des remblais en pâte, à savoir les résidus, le liant et l’eau. Cette figure met aussi en évidence les interactions possibles entre ces composantes. Dans ce qui suit on va les définir de façon plus approfondie afin de mettre l’emphase sur leur importance dans le comportement mécanique des remblais en pâte.

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2.1. Résidus miniers

Les résidus miniers sont composés de la fraction stérile du minerai original. Ce dernier est broyé très finement afin d’atteindre la maille de libération des minéraux de valeur. En bout de circuit, un tonnage important en pulpe de résidus est généré. Une portion allant de 40% à 100 % du résidu total est envoyée dans les parcs à résidus, l’autre partie est destinée aux opérations de remblai en pâte. Elle est d’abord épaissie ensuite filtrée afin d’atteindre un pourcentage solide de l’ordre de 80%. Les résidus miniers renferment, quand ils proviennent du traitement de minerai sulfureux, des teneurs en soufre variant d’une mine à l’autre et, pour une même mine, d’une zone d’exploitation à une autre.

2.2. Liants hydrauliques

Les liants hydrauliques sont utilisés dans les remblais en pâte afin de générer de la résistance mécanique (cf. critères de design des opérations de remblayage dans la partie I). La variété de liants existant sur le marché est relativement réduite en quantité. Hormis, les ciments issus des cimenteries, il existe des liants issus du recyclage de résidus d’autres industries (Benzaazoua et al. 2001). Les liants utilisés dans la confection des recettes de remblai cimenté peuvent être définis comme étant des réactifs hydrauliques, autrement dit des composés minéraux anhydres qui sont capables de réagir avec l’eau pour former des minéraux hydratés. C’est la formation d’hydrates dans un composé quelconque qui permet d’assurer une certaine cohésion qui augmente avec le temps (curage) et qui assure, par conséquent, la cimentation et la résistance mécanique du composite en question. Une contrainte importante avec laquelle les opérateurs miniers doivent composer est le fait que le liant représente le principal coût dans une opération de remblayage (environ 1 $CDN par % par tonne de remblai). Ainsi, toute optimisation des coûts relatifs aux opérations de remblayage passe nécessairement par la réduction de la proportion du liant. Si l’hydratation des divers réactifs hydrauliques est, de nos jours, bien connue dans le cas des composites de type mortiers et bétons, ceci n’est pas le cas des réactions de cimentation dans les remblais cimentés. Cette situation est principalement attribuable aux rapports eau/ciment (w/c) très élevés; généralement supérieurs à 5 comparés à un rapport de l’ordre de 0,4 dans la préparation des mortiers et bétons. Les hydrates qui se forment dans un remblai cimenté semblent aussi être assez différents de ceux qui se forment dans les mortiers et les bétons.

2.3. Eau

L’eau de malaxage est rajoutée au mélange, qui contenait déjà une faible quantité d’eau interstitielle après la filtration, jusqu’à atteindre l’affaissement désiré. Cette eau rajoutée peut être soit l’eau de procédé de la mine ou une eau fraîche. Le schéma de la Figure 2 illustre la complexité des interactions chimiques qui interviennent entre l’eau de gâchage et le type de liant utilisé dans les mélanges de remblai en pâte.

Eau de procédé

Contenu en sulfateContenu en calcium

Liant dissout

rapport Ca+Mg/Si+Al

Qualité de lamatrice cimentaire

pHDegré de saturationTemps

Figure 2. Schéma illustrant les interactions chimiques entre le liant et l’eau de malaxage (d’après

Benzaazoua et al. 2002).

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3. Évolution des propriétés mécaniques à court, moyen et long terme

Les propriétés mécaniques et leur évolution dans le temps sont influencées par plusieurs paramètres ou facteurs qu’on classifierait de la façon suivante :

o Paramètres macroscopiques : il s’agit des tous les phénomènes qui se déroulent à l’échelle de la masse totale de remblai enfouit dans les vides et de son interaction avec le massif rocheux environnant. Pour ne citer que les principaux, on note l’influence de l’interface remblais-murs rocheux, l’influence des phénomènes de consolidation, les effets du drainage et le niveau de fracturation du massif rocheux facilitant plus ou moins le débarras d’eau. Cet aspect est traité dans l’autre partie de l’article (cf. Partie I, Belem et Benzaazoua, 2003).

o Paramètres intrinsèques : regroupent tous les paramètres reliés aux composantes même des remblais en pâte (résidus, eau, liant). C’est cet aspect qui sera détaillé dans ce qui suit.

3.1. Effet de la chimie des résidus

La chimie des résidus miniers repose sur leur minéralogie et se matérialise essentiellement par leur proportion en sulfures. Cette dernière caractéristique joue un rôle direct sur leur densité et par conséquent, sur la quantité de liant à ajouter par unité de volume. Les proportions de liant ajouté étant toujours calculées par rapport à la masse totale sèche de résidus. Il existe aussi un effet indirect; il s’agit de la quantité de sulfates présente dans le mélange initial et qui sera proportionnelle à la quantité de soufre du résidu. Afin d’isoler ce paramètre, une étude a consisté à appauvrir et à enrichir un résidu minier sulfureux. Cette opération a été réalisée par désulfuration grâce à la flottation des sulfures (Benzaazoua et al. 2000, Benzaazoua et Mukendi 2002). Au total cinq résidus S1, S2, S3, S4 et S5 à cinq teneurs en soufre ont été préparés à environ 2, 6, 12, 18 et 39 % de soufre respectivement. La granulométrie, paramètre important, est très similaire d’un résidu à l’autre sauf pour le résidu à plus forte teneur en soufre (concentré) qui est légèrement plus fin (voir Figure 3).

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

0,01 0,1 1 10 100 1000

Taille des particules (µm)

% V

olum

e C

umul

é

S1 - 2% SS2 - 6% SS3 - 12% SS4 - 18% SS5 - 39% S

Figure 3. Courbes granulométriques des cinq résidus S1, S2, S3, S4 et S5.

Les résultats obtenus pour une même proportion de deux types de liant testés sont présentés sur la Figure 4. En plus de l’effet du type de liant qu’on traitera plus loin, on note que le pourcentage de soufre influence peu la résistance (UCS) des remblais à base de ciment Portland (T10-T50) qui reste assez faible en général. Cependant, son effet est plus marqué dans le cas du liant à base de laitier

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(T10-Slag) qui semble générer une meilleure résistance surtout après 28 jours de cure. La principale déduction de cette étude est que la proportion de soufre affecte négativement la résistance et ce pour des teneurs inférieures à 12 %, ensuite il y a un effet bénéfique dont on ne connaît pas encore l’explication exacte, mais qui pourrait être liée à l’un et/ou l’autre de ces deux effets :

- la proportion de liant plus grande à des densités plus élevée - la précipitation des sulfates qui participe à la cohésion (voir plus bas)

0

500

1000

1500

2000

2500

2,3 6 12 18 38,5

%Soufre

UCS

(kPa

)

UCS14j T10-T50

UCS14j T10-Slag

UCS28j T10-T50

UCS28j T10-Slag

UCS56j T10-T50

UCS56j T10-Slag

Figure 4. Effet du contenu en soufre sur la résistance mécanique des remblais en pâte pour deux liants différents : Ciment Portland (T10-T50) et Ciment au laitier (T10-Slag).

3.2. Effet de la granulométrie des résidus

Pour évaluer l’effet de la granulométrie des résidus sur le gain de résistance mécanique, une étude sur des résidus de concentrateur ayant cinq granulométries différentes a été réalisée. Ces granulométries ont été créées à partir des résidus d’une mine et ce par deshlamage (élimination de fines) et tamisage (élimination des grossières). Les cinq granulométries obtenues (nommées G1 à G5; Figure 5) représentent bien la diversité des résidus de façon générale comme le montre le positionnement de la moyenne de 11 résidus.

0102030405060708090

100

0.01 0.1 1 10 100 1000

Dimension des particules (µm)

% C

um

ulé

G1 G2 G3 G4 G5 Moyenne 11 mines

Figure 5. Courbes granulométriques des cinq résidus G1, G2, G3, G4 et G5.

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Les résidus G1 à G5 ont été mélangés avec deux types de liant : un mélange à 50:50 de ciment Portland type 10 et type 50 (T10-T50) et un mélange à 80:20 de laitier de haut-fourneau (Slag) et de ciment type 10 (T10-Slag). La masse de ciment ajoutée correspond à 4,5 % de la masse des résidus secs. Les dates choisies pour les essais de résistance mécanique en compression uniaxiale sont à 14, 28, 56 et 90 jours. L’influence du drainage sur la résistance mécanique a également été évaluée sur un nombre réduit d’échantillon faits des résidus G1, G3 et G5 mélangés avec les liants T10-T50 et T10-Slag (liant à base de laitier de haut-fourneau) à 4,5%. Le drainage permet d’évacuer l’excès d’eau aidant par conséquent les phénomènes de cimentation (cf. section 3.4). Ce phénomène est directement affecté par la granulométrie comme le montre le Tableau 1. En effet, plus la granulométrie est grossière (cas de G5), plus la perte d’eau est importante (w = 26 % pour les échantillons non drainés et 23 % pour les échantillons drainés). L’ampleur du drainage se matérialise aussi par l’affaissement de la pâte dans le moule durant la cure dû à sa consolidation.

Tableau 1. Teneur en eau massique des cylindres de remblai.

Teneur en eau massique w (%)

(liant T10-T50 à 4,5%)

Teneur en eau massique w (%) (liant T10-Slag à 4,5%)

Temps de cure (jours) 14 jours 28 jours 28 jours (drainé) 14 jours 28 jours 28 jours

(drainé) G1 48,6 48,0 47,4 50,3 49,9 48,5 G2 38,5 38,2 - 38,8 38,5 - G3 34,8 34,5 32,6 33,8 33,7 31,2 G4 27,3 27,6 - 28,5 28,4 - G5 26,4 26,0 23,5 25,9 26,0 22,5

0

200

400

600

800

1000

1200

1400

G1 G2 G3 G4 G5

Résidu

UC

S(kp

a)

T10/50 28j T10-Laitier 28jT10-T50 drainé T10-Laitier drainé

Figure 6. Effet de la granulométrie et du drainage sur la résistance mécanique des remblais en pâte après 28 jours de

cure avec deux types de liant : Ciment Portland (T10-T50) et Ciment au laitier (T10-Slag) à 4,5%.

La Figure 6 montre la variation de la résistance (UCS) en fonction de la granulométrie, après 28 jours de cure. La même tendance a été observée après les autres temps de cure. Cette figure met en évidence que le ciment à base de laitier de haut-fourneau (T10-Slag) a généré des résistances mécaniques de 220 % à 340 % supérieures à celles générées par le ciment Portland (T10-T50) après 14 jours de cure, de 260 % à 425 % supérieures après 28 jours de cure. Ces augmentations sont de 280 % à 530 % pour les cylindres drainés après 28 jours de cure et de 300 % à 430 % après 56 jours de cure. Ces résultats montrent nettement que la granulométrie a une influence considérable sur le comportement mécanique des remblais. Cependant, l’importance de cette influence est fortement dépendante du type de liant hydraulique utilisé (comme on le détaillera plus loin) et de la durée du temps de cure.

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L’analyse de la Figure 7 montre que pour les types de liant hydraulique utilisés (T10-T50 ou T10-Laitier) à 4,5%, et dans la plage de durée de cure (14, 28, 56 jours), le remblai cimenté atteint sa plus grande résistance pour une valeur du coefficient d’uniformité (représentant le mieux l’effet de la distribution granulométrique) autour de 12 µm, qu’il soit drainé ou non drainé. En d’autres termes, on observe que les remblais cimentés dont les résidus sont relativement bien classés, c’est à dire possédant une large gamme de taille des grains (distribution étalée) sont plus résistants que les remblais dont les résidus sont relativement mal classés (distribution granulométrie uniforme). Dans le cas des cylindres drainés et avec le liant T10-T50, les résultats montrent que les résidus G1 et G3 ne diffèrent pas significativement comparativement aux cylindres non-drainés. Par contre, le résidu G5 montre un écart de plus de 200 kPa qui n’est pas négligeable et qui peut très certainement être associé à la perte d’eau du cylindre. Mais avec le liant T10-Slag, on constate que les résidus G1, G3 et G5 présentent des écarts significatifs, comparativement aux cylindres non-drainés, qui vont de 48 kPa pour le G1 à 370 kPa pour le G5. Là aussi, ces différences seraient certainement attribuables à la perte d’eau des cylindres.

0200400600800

10001200

5,00 10,00 15,00 20,00

Cu (D60/D10)

UC

S (k

Pa)

T10/50 14j T10/50 28j T10/50 56jT10-Laitier 56j T10-Laitier 28j T10-Laitier 14j

Figure 7. Évolution de la résistance (UCS) en fonction du coefficient d’uniformité Cu (D60/D10) pour deux liants (T10-50 et

T10-Slag) et trois dates de cure (14, 28 et 56 jours).

Une des constatations importantes de l’étude est que la quantité d’eau nécessaire pour atteindre un affaissement de sept pouces (178 mm) dépend fortement de la granulométrie du résidu. Plus un résidu est fin, plus celui-ci nécessite de l’eau pour atteindre la consistance voulue. L’interprétation des résultats présentés (sauf pour la Figure 7) doit tenir compte de cette constante d’affaissement. Ainsi, tous les paramètres physiques (teneur en eau massique, masse volumique humide, masse volumique sèche, pourcentage massique solide, volume du solide, volume des vides, volume d'eau, indice des vides, degré de saturation, porosité théorique, teneur en eau volumique) sont directement influencés par la distribution granulométrique des résidus. On peut tout résumer en disant que l’augmentation de la taille des grains d’un même résidu entraîne une augmentation de la masse du solide, une diminution de la porosité et du degré de saturation.

3.3. Effet du type de liant

Comme on pouvait s’y attendre, le type de liant a un effet capital sur le comportement mécanique à court et à long terme et même sa résistance aux éventuelles altérations. Afin de mieux illustrer ceci, une autre série de tests réalisée avec des résidus sulfureux a permis de trouver le type de liant le plus adéquat, c’est-à-dire qui génèrera les meilleures résistances. La proportion de liant choisie pour toutes les recettes de mélange était de 5%. Il est nécessaire de rappeler que l’aspect coût est l’un des plus importants dans une opération de remblayage. À titre informatif, le liant coûte environ 1$/%/tonne de remblai. Les principales constatations de cette étude sont les suivantes : les liants contenant des cendres volantes (FA) n’offrent pas de bonnes performances, les liants à base de

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ciment Portland (ordinaire ou T10, résistant aux sulfates ou T50 ou enrichi en fumée de silice, HSF) offrent des bonnes performances mais la meilleure performance est atteinte avec la recette à base de ciment au laitier (T10-Slag). La Figure 8 montre une légère baisse pour tous les liants utilisés, après la première prise qui dure de 14 à 28 jours selon le type de liant. D’autres études (Benzaazoua et al., 2002) ont démontré clairement qu’il n’existait pas de recette idéale pour toutes les mines. Un liant peut s’avérer efficace dans un cas et complètement inefficace dans l’autre. D’où la nécessité, pour les mines de procéder, avant chaque opération de remblayage, par une optimisation préalable servant à trouver la recette optimale prenant en compte les contraintes techniques (en matière de support terrain), environnemental (débarras des résidus problématiques en surface) et économique (aspect coût de l’opération).

0

200

400

600

800

1000

1200

0 7 14 21 28 35 42 49 56 63 70 77 84

Cure (jours)

UC

S (k

Pa)

5% T10-T50

5% T10-FA

5% T50-FA

5% T10-HSF

5% T10-SLAG

5% T50

Figure 8. Effet du type de liant sur la résistance mécanique des remblais en pâte.

3.4. Effet de la proportion du liant

La proportion de liant et son effet sur la qualité des remblais cimentés est simple à comprendre puisque plus on ajoute de liant dans le remblai, meilleure sera sa résistance. La Figure 9 montre clairement qu’il existe une relation quasi-linéaire (proportionnalité directe) entre l’augmentation de la proportion de liant et la résistance mécanique générée. Ces résultats sont issus d’une étude qui avait consisté à tester plusieurs types de liant, en utilisant des proportions de 3%, 4,5% et 6% (représentant la gamme couramment utilisée dans les mines), mélangés avec un résidu donné. Cette étude ayant aussi porté sur d’autres types de résidu (faiblement et fortement sulfureux), il a été possible de confirmer cette tendance, à savoir la quasi-linéarité de la relation entre le pourcentage de liant et la résistance mécanique développée.

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = FA

0500

1000

150020002500300035004000

4500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = CP

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours

91 jours 118 jours

liant = CL

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = FA

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = FA

0500

1000

150020002500300035004000

4500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = CP

0500

1000

150020002500300035004000

4500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours 91 jours

liant = CP

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours

91 jours 118 jours

liant = CL

0500

10001500200025003000350040004500

1.5 3 4.5 6 7.5

Pourcentage de liant (%)

UCS

(kPa

)

14 jours 28 jours 56 jours

91 jours 118 jours

liant = CL

Figure 9. Effet de la proportion de liants à base de ciment Portland (CP), de cendres volantes (FA) et de laitier (CL) sur

la résistance mécanique des remblais en pâte.

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3.5. Effet de la teneur en sulfates dissous

L'eau interstitielle des résidus filtrés est souvent riche en sulfates solubles quand les résidus contiennent beaucoup de sulfures. Ainsi, selon la teneur en sulfate, la quantité d’eau ajoutée permet de diluer plus ou moins l'eau interstitielle généralement chargée chimiquement (sulfates, calcium et autres métaux). À cela s’ajoute le sulfate de calcium sous forme de gypse (CaSO4.2H2O) ou d’anhydrite (CaSO4) qui est rajouté au clinker comme régulateur de prise.

0

20

40

60

80

100

120

140

1000 4000 8000 12000

Sulfate (ppm)

UC

S (k

Pa)

Figure 10. Effet de la concentration en sulfate de l’eau totale sur la résistance mécanique des remblais en pâte à base

de Ciment Portland et après 28 jours de cure.

Afin de mettre en évidence l’effet des sulfates sur la prise d’un remblai en pâte cimenté, une série de mélange a été réalisée avec un même type de résidu sulfureux et un même type de liant (4,5% du liant à base de ciment Portland T10-T50 dans un rapport 50:50). La Figure 10 présente la variation de la résistance (UCS) en fonction de l’augmentation de la concentration totale en sulfates dissous après 28 jours de cure. Cette concentration représente la concentration recalculée de l'eau totale, c'est-à-dire de l'eau qui sert pour le gâchage (eaux interstitielles du résidu + eau ajoutée). Jusqu’à 8000 ppm, la présence croissante de sulfates solubles conduit à une prise de plus en plus lente due à l’inhibition de l’hydratation par les sulfates. Il s’agit vraisemblablement du phénomène bien connu de retard de priseassuré par le gypse dans les ciments Portland. Toutefois, un effet bénéfique semble être observé au-delà de 8000 ppm et qui ne pourrait s’expliquer que par la contribution de la précipitation des sulfates hydratés pendant l’hydratation du liant (cimentation). Ce phénomène a également été observé après 56 et 90 jours de cure. Par ailleurs, d’autres études (Benzaazoua et al. 2002) ont permis d’arriver aux mêmes conclusions.

3.6. Effet de la proportion en eau

Rappelons que l’eau rajoutée dans le système, en plus de l’eau résiduelle après filtration, sert essentiellement à atteindre la consistance désirée de la pâte afin qu’elle puisse être acheminée sous-terre (cf. Belem et Benzaazoua, Partie I, 2003). Ce paramètre est fixé par le système de pompage et de distribution de la mine. Il est maintenant bien établi que, pour les remblais en pâte, la teneur en eau et le degré de saturation ont une influence négative sur la résistance mécanique comme le montre l’exemple de la Figure 11. Cela se traduit par une diminution de la résistance (UCS) avec une augmentation de la teneur en eau (donc de l’affaissement). Cet effet est net à court terme (7 jours de cure) et moyen terme (28 et 56 jours), mais l’est moins à long terme (120 jours et au-delà) due probablement à une certaine altération au sein même de la masse de remblai (Figure 12). Le graphique de cette figure montrent l’effet combiné de l’affaissement (proportionnel à la teneur en eau), la proportion de ciment (4 % et 5 % de ciment Portland T10) sur la résistance mécanique

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(UCS) et en fonction du temps. On observe clairement la chute de résistance après 56 jours, due à l’affaiblissement de la matrice cimentaire (cf. section 4).

0

100

200

300

400

500

600

22 23 24 25 26 27 28

Teneur en eau W (%)

UC

S (k

Pa)

7 jours de cure

28 jours de cure

56 jours de cure

120 jours de cure

Figure 11. Effet de la teneur en eau sur la résistance mécanique du remblai en pâte à base de ciment Portland.

L’acquisition de la résistance dans les remblais en pâte est conditionnée par l’apparition de précipités hydratés qui forment le liant des grains fins des résidus. Cette précipitation est régie par les lois de solubilité chimique. Une phase solide se forme quand elle atteint son indice de saturation (concentration suffisante). Ainsi, plus il y a d’eau, plus la saturation est difficile à atteindre due à la dilution des espèces en solution. Ce phénomène de précipitation est favorisé par plusieurs facteurs qui conduisent à une perte d’eau par effet combiné de la consolidation, le drainage et l’évaporation. Parmi ces facteurs on peut citer la granulométrie, l’étanchéité du massif entourant le remblai, la dimension du vide remblayé et enfin le mode de mise en place (séquence de remblayage).

4 % ciment

0

50

100

150

200

250

300

350

400

0 14 28 42 56 70 84 98 112 126

Durée de cure (jours)

UC

S (k

Pa)

T10@4%-7'T10@4%-8'T10@4%-9'T10@4%-9.5'T10@4%-10'

5% ciment

0

100

200

300

400

500

600

0 14 28 42 56 70 84 98 112 126

Durée de cure (jours)

UC

S (k

Pa)

T10@5%-7'T10@5%-8'T10@5%-9'T10@5%-9.5'T10@5%-10'

Figure 12. Évolution de la résistance en compression uniaxiale (UCS) en fonction du temps pour des affaissement

différents (teneur en eau différentes) et deux proportions de ciment Portland (4 % et 5 %).

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4. Altérabilité des remblais en pâte

La perte de résistance est un phénomène qu’on observe souvent dans les remblais en pâte (Benzaazoua, 1996; Ouellet et al., 1998 ; Benzazoua et al., 1999 ; Bernier et al., 1999 ; Benzaazoua et al., 2000, 2002). C’est un phénomène qui semble être presque toujours lié à la présence de sulfures. La question qui peut se poser est : est-ce que ce lien est direct ou indirect ? En d’autres termes ; est-ce que les sulfures sont capables de s’oxyder dans une matrice cimentaire ?

Une partie de la réponse a été apportée par Benzaazoua et al. (2000) qui stipulaient que les remblais en pâte sont des matériaux très imperméables qui restent longtemps saturés. L’oxygène, le moteur de l’oxydation, ne peut donc diffuser au travers d’une telle matrice. Ces observations ont été confirmées par la suite avec une étude de perméabilité dans les remblais en pâte et qui montrait que cette dernière est proche de celle des argiles (Belem et al., 2001). Le sulfure jouerait donc, de façon indirecte en fournissant au départ une quantité de sulfates pouvant contribuer d’une manière ou l’autre à la cimentation (négativement ou positivement, cf. section 3.5). Une autre étude basée sur des essais de consommation d’oxygène est en cours et les premiers résultats obtenus prouveraient cette thèse. La réactivité initiale des sulfures, tant qu’il y a présence d’oxygène dissout dans le mélange, fournira un taux de sulfates variable en fonction du contenu en sulfures et aussi selon que le procédé utilise des sulfates (cas de la destruction des cyanures par la méthode SO2-Air). Cette réactivité affecte sensiblement le pH par la production d’acidité. La baisse de pH entraînera bien sur la déstabilisation des phases hydratées, les plus alcalines laissent la place pour des phases plus résistantes à l’acidité. À ce jour, on ne connaît pas bien tous les phénomènes contribuant à la cimentation dans les remblais en pâte. Le seul point sur lequel les chercheurs travaillant dans le domaine soient d’accord est que la cimentation dans les remblais est complètement différente de celle bien connue dans les mortiers et bétons. En voici les principales différences :

- rapport w/c très élevé dans les remblais en pâte de 5 à 12 ; - proportion de ciment ne dépassant guerre les 7 % en poids total sec ; - résidus réactifs (contenu en sulfure) ; - eau de gâchage avec une chimie particulière (sulfates, réactifs organiques, chaux, etc.)

En plus de l’acidité, on peut avoir dans certains cas formation de sulfates expansifs causant une altération de l’intégrité physique des remblais en pâte. En effet, quand les sulfates se forment dans une matrice où il reste encore de la place, les sulfates participeraient à la cimentation. Cette place est sous forme de porosité (estimée à plus de 40% par calcul géotechnique et confirmée par porosimétrie au mercure, Benzaazoua et al. 2000). Cependant, quand l’espace de formation est restreint, la précipitation des sulfates s’accompagne par la dissipation d’énormes pressions intergranulaires conduisant à la fracturation de la masse de remblai durci. Ce phénomène a été bien mis en évidence dans des remblais (Benzaazoua, 1996; Benzaazoua et al., 1999, 2002).

5. Conclusions

Dans cet article, qui se voulait synthétique, il a été mis en évidence l’importance des principaux paramètres conditionnant la performance des remblais en pâte. Ainsi, il est apparu clairement que le comportement des remblais en pâte est dicté, en plus de l’environnement où on les placera, par le mélange lui-même. Ce dernier est composé par trois constituants principaux dont la contribution de chacun est capitale. Les résidus, majoritaires, influencent surtout par leurs caractéristiques physiques (telle que la granulométrie) mais aussi par leur réactivité initiale pouvant livrer dans le milieu des sulfates. L’eau présente joue par sa proportion influençant ainsi, par le biais du taux de dilution, les réactions de précipitation des phases cimentaires. De plus, la chimie de l’eau, surtout en matière de sulfates, va être un facteur capital influençant la résistance mécanique à court et long terme. Le dernier constituant, mais non le moindre, est le liant. De par sa chimie et sa proportion, il

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favorisera plus ou moins l’acquisition de la résistance mécanique. Le liant représente le coût majeur dans une opération de remblayage d’où la nécessité d’optimiser son ajout afin de rentabiliser cette opération.

6. Remerciements

Il fait grand plaisir aux auteurs de remercier toutes les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de cet article. Les partenaires miniers ainsi que l'IRSST sont remerciés pour leur contribution financière et leur participation aux études sur les remblais miniers. Ces remerciements vont également à Hugues Bordeleau, technicien à l'URSTM, pour avoir conduit avec brio la partie technique des essais.

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