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VELLERON Les délibérations des consuls pendant la peste de 1720 Velleron (Vaucluse) 84740 Canton de Pernes les Fontaines Texte, documentation, transcriptions et mise en page : Jean François Gandy révision février 2010 [email protected] http://jfgandy.fr

VELLERON - histoire-genealogie.com · La peste châtiment de Dieu Nos ancêtres avaient à faire face à trois calamités: la guerre, la peste et la famine. Ils étaient très désarmés

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VELLERONLes délibérations des consuls

pendant la peste de 1720

Velleron (Vaucluse) 84740 Canton de Pernes les Fontaines

Texte, documentation, transcriptions et mise en page : Jean François Gandy

révision février 2010

[email protected] http://jfgandy.fr

Extrait du premier livre des délibérationsDélibérations du 28 février 1598

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Avant propos

Bien que le village de Velleron ne fût pas atteint par l’épi-démie qui était pourtant à ses portes ( Avignon, Chateauneuf-du-Pape, Bédarrides, Sarrians, Sorgue, Vedène, Monteux, Le Thor, Caumont, Carpentras...). La lecture des délibérations montrent la dignité et le sens du devoir des consuls face à des difficultés permanentes et difficilement surmontables. Leur faible pouvoir entre ceux des co-seigneurs et celui du vice-légat ne leur laissant qu’une marge de manoeuvre très étroite. Les causes ainsi que la propagation de l’épidémie ont été rapidement décrites, pour une plus ample information il faut se plonger dans une abondante bibliographie.

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Premier chapitre

La maladie

La peste est une maladie infectieuse des animaux (principalement de rongeurs sauvages et domestiques), transmise à l’homme par l’intermédiaire de la morsure de parasites infectés (spécialement la puce du rat). La maladie est habituellement caractérisée chez l’homme par l’apparition brutale d’une fièvre élevée, de suppuration des ganglions lymphatiques, de septicémie et de prostration. Cette forme clinique de la maladie est connue sous le nom de « peste bubonique », du fait de la présence de glandes hypertrophiées et suppurantes ou « bubons ». Une pneumonie secondaire peut survenir et conduire à la transmission directe d’homme à homme par voie aérienne. Ce type de pneumonie primaire de la maladie humaine est très souvent fatal. Le vaccin ne fut découvert qu’en 1894 par les biologistes Roux et Yersin.

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La peste châtiment de Dieu

Nos ancêtres avaient à faire face à trois calamités: la guerre, la peste et la famine. Ils étaient très désarmés devant le plus terrible des fléaux: la peste. La pauvreté, le manque d’hygiène, l’absence de prophylaxie créait un terrain très favorable à sa prolifération. «Les épidémies de peste sont pratiquement ininterrompues de 1347 à 1670. 1347-1536: succession de poussée régulières tous les 11 ou 12 ans;1536-1670: une poussée tous les 15 ans d’une durée de 7 à 23 ans; la période 1600-1642 se signale tout particulièrement par sa violence et son extension à l’ensemble du royaume; en revanche, les dernières poussées sont plus limitées et manifestent un recul de la maladie; 1720-1722: réapparition isolée et contenue à Marseille et à la Provence.»

A l’échelle de la France J.N.Biraben avance :1600-1616 de 290 000 à 440 000 morts1617-1642 de 1 610 000 à 2 460 000 morts1643-1657 de 220 000 à 330 000 morts1663-1670 de 85 000 à 130 000 morts

En Europe de 1918 à 1920 un millier de morts principalement au Portugal et une centaine à Paris et quelques cas à Marseille en 1920

En 1720, les médecins n’étaient pas d’accord sur la nature de la maladie et certains pensaient que la lutte contre la peste était im-possible. Les causes étaient inconnues. Chirac, le premier médecin

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du régent, le grand médecin de l’époque ne croyait pas à une conta-gion « …ce n’est qu’une fièvre maligne causée par la mauvaise nourriture du petit peuple… »«…contagionistes et anticontagio-nistes se trouvaient toujours en présence, et aucune des deux par-ties n’était le maître de la situation. La peste seule continuait son œuvre…»1 La médecine était donc impuissanteOn considérait la peste comme une maladie du sang qui s’épais-sissait provoquant la mort du malade

Les traitements : -La transpiration -Les vomissements -Les purgations -Les saignées -Les ventouses

La prophylaxie : -Les parfums pour la désinfection des rues, des maisons et le vinaigre pour les hommes et les objets. -L’isolement

Les anticontagionnistes conseillaient une nourriture riche et soi-gnée.Bien sûr des charlatans proposaient des décoctions qui permet-taient de guérirDevant l’impuissance des hommes, comme on considérait la pes-te comme un châtiment de Dieu; le meilleur remède était donc le recours à la prière afin d’obtenir son pardon pour qu’il arrête l’épidémie.

1 P.aul Gaffarel7

Costume de médecin

Le vêtement était en cuir, les yeux de la cagoule était en cristal, le nez contenait des produits désin-fectants et des herbes odorantes

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La célèbre recette du vinaigre des 4 voleurs, datant d’une peste précédente.

Quelques instruments de médecine, de désinfection, liturgiques.

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Second chapitre

Les causes

Le samedi 25 mai 1720 après dix mois et trois jours d’ab-sence le Grand Saint-Antoine se présente devant Marseille, ce navire marchand est commandé par le capitaine marseillais Jean-Baptiste Chataud. Homme d’expérience

Le voyage retour du Grand Saint-Antoine (Les croix indiquent les décès)

Il était parti le 22 juillet 1719 pour Smyrne où il arriva le 20 août, il repartit le 29 août vers Mosconossy y pris un chargement de blé pour Chypre puis se rendit à Seyde où il chargea 500 sacs de cendre pour le lest. Le 30 janvier 1720 il quitta Seyde avec une patente nette pour Sour à 35 km au sud pour compléter sa cargaison, il repartit le 5 février pour Tripoliy de Syrie à 100 km au nord de Seyde où il embarque cinq Turcs, un Grec, deux

arméniens des français. Il se dirige sur Chypre le 3 avril avec une patente nette datée du 25 mars.Le 5 avril, décès d’un Turc.Le 7 avril, arrivée à Chypre, il débarque les turcs et le grec.Le 18 avril, départ pour la France avec une nouvelle patente nette

datée du 16 avril.27 et 28 avril décès de 2 matelots puis du chirurgien et encore de deux matelots plus trois matelots malades..Arrive à Livourne le 14 mai où il déclare les cinq décès et les malades le navire est mis à l’écart.Le 17 mai mort des trois malades. Le médecin de la santé conclut à une fièvre maligne pestilentielle.

Le 19 mai, départ pour Marseille avec une patente nette.Le « Grand Saint Antoine » arrive au large de Marseille le samedi 25 mai 1720. Comme tout navire commerçant avec la Barbarie, le « Grand Saint Antoine » commence sa quarantaine à l’île de Pomègues. Ses patentes sont nettes, attestant l’absence d’épidémie dans le port de départ. Jean-Baptiste Chateaud n’omet pas de dé-clarer les huit morts de son équipage lors de la traversée de re-tour. Les marchandises fines sont débarquées dans les infirmeries du Lazaret et y feront leur « purge »1.les autres marchandises à l’île de Jarre.

1 Désinfection10

La mortalité continue, tant aux infirmeries qu’à bord du « Grand Saint Antoine ».13 juin, mort du garde du navire23 juin, mort d’un des mousses24 au 26 juin, mort de trois portefaix employés à la purge des marchandises.Le 25 juin, Transfert du bateau à l’île de Jarre pour y recommencer la quarantaine.Mais il est trop tard la contrebande des marchandises et des pacotilles1, le linge à laver des matelots ont transmis la peste à la ville.

Les patentes : C’est un certificat établi à chaque escale.

Patente nette : aucune maladie déclarée à l’escale Les passagers doivent rester une semaine aux infirmeries, Les marchandises en purge pendant 26 jours. Le navire en quarantaine 20 jours

Patente soupçonnée : des maladies sont soupçonnées Les passagers doivent rester deux semaines aux infirmeries Les marchandises en purge pendant 40 jours. Le navire en quarantaine 30 jour

Patente brute : Epidémie déclarée Les passagers 20 jours en quarantaine si un passager tombe malade la quarantaine recommence (possible jusqu’à 6 mois). Les marchandises 50 jours Le navire 50 jours

1 Objets que rapportaient les matelots à leurs familles11

Troisième chapitre

La peste à Marseille Le 20 juin 1720, rue Belle-table Marie Dauphan couturière mourrait huit jours plus tard plusieurs personnes décédèrent place du Palais, rue de l’Echelle. La contagion se développa ainsi dans plusieurs point de la ville si l’angoisse augmenta et si des bruits alarmistes commencèrent à circuler, les autorités ne s’inquiétaient pas car c’était dans les quartiers populaires.

Le 10 juillet lors de la mort de deux enfants dans les beaux quar-tiers, rue Jean Galant, les Peysonnel médecins père et fils

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constatèrent que c’était la peste. Les échevins en prirent conscience, firent murer la maison et conduire les parents aux infirmeries mais ils minimisaient toujours le problème car il y avait lieu de préserver le commerce.

Le 12 juillet, ils écrivaient « Comme il n’y a rien eu de nouveau hier, nous osons espérer qu’il y aura plus de peur que de mal ».Le 15 juillet dans une lettre au régent, au duc de Villars « nous avons l’honneur de vous écrire pour vous faire savoir que la santé est bonne dans cette ville… »20 juillet début de la foire de BeaucaireLe 21 juillet, lettre au régent : « Depuis notre lettre du 15 il n’y a rien dans la ville…Nous avons lieu de croire qu’il n’y a plus rien à craindre »Le 24 juillet, lettre aux échevins d’Aubagne : « Dans notre ville, la santé est fort bonne ; il n’y est rien arrivé depuis 16 jours ».Le 26 juillet, enfin un mois après le début de l’épidémie les éche-vins décidèrent d’agirLe 28 juillet, première réunion à l’hôtel de ville des médecinsLe 29 juillet, l’évêque Belzunce réunissaient les curés et supérieurs des communautés afin de prendre des mesures en vue de la conser-vation de son clergé !Le 30 juillet, les galères interdisaient à leurs gardiens de sortir, les moines de Saint-Victor se barricadaient dans leur abbaye.Le 31 juillet, les mendiants étrangers durent quitter Marseille les autres furent enfermés à l’Hôpital de la Charité.Le même jour le parlement d’Aix interdisait aux marseillais de quitter leur terroir.Le 2 août, il mourrait 50 personnes par jour Dès le 5 août, les cadavres furent emmenés aux infirmeries en plein jour sans prêtre et sans cérémonie par les « corbeaux »1

Le 9 août, 100 personnes mourraient par jour1 Corbeau: personnes (souvent bagnards) chargées de l’enlèvement des cadavres:

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Les infirmeries ne pouvaient plus recevoir les malades et les mortsLe quartier de la Tanneries se souleva car 50 cadavres restaient au soleil ;Problème de ravitaillement « pauvres, ils ne trouvent rien à ga-gner ; riches il ne trouvent rien à acheter »Le 15 août, 300 personnes mourraient par jourFin août, 500 personnes mourraient par jourDébut septembre au paroxysme de l’épidémie, 1000 personnes mourraient par jourLes églises fermèrent leurs portes. Sur leurs parvis, sur les places, dans les rues les vivants jetaient les cadavres par-dessus les malades. Les chiens dévoraient les cadavres pourrissants.« J’ai vu et senti pendant huit jours deux cent morts pourrissant autour de ma maison et sous mes fenêtres. J’ai été obligé de marcher dans les rues, toutes sans exception bordées des deux cotés de cada-vres à demi pourris et rongés par les chiens, et le milieu plein de har-des de pestiférés et d’ordures à ne savoir où mettre les pieds…» François-Xavier de Belzunce, évêque de Marseille. Les personnes ayant des moyens avaient fuit dans les campagnes ou s’étaient isolées comme les moines de Saint-Victor qui ne sortir pas pendant toute l’épidémie, ils se contentèrent d’envoyer des prières du haut des remparts. Heureusement d’autres ecclésiastiques se dévouèrent, souvent en payant de leur vie, l’évêque de Belzunce est resté dans les mémoires pour son dévouement.

Puis l’épidémie se calma

Le 15 octobre, il mourrait encore 100 personnes par jourLe 30 novembre, on dénombrait encore environ cinq morts par jourLe 15 décembre 1720, légère reprise de la maladieL’épidémie était terminée en février 1721 mais faisait rage à ToulonUne nouvelle alerte de mai à août fit 174 morts

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Le 19 août 1721 le dernier malade de la peste fut constaté à Marseille

La peste était finie à Marseille mais l’épidémie continuait en Provence, à Avignon et dans le ComtatIl faudra attendre presque trois ans pour que le commerce de Marseille retrouve son rythme avec le reste du monde

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Quatrième chapitre

La peste en Provence

Les mendiants et les gueux chassés de Marseille aidèrent à infester le reste de la Provence. Les régions d’Aix, Toulon, Arles et Avignon furent les principales contrées infectées mais l’épi-démie se développa aussi en Languedoc, Rouergue, Vivarais et Gévaudan. En direction du comtat elle se propagea dans deux directions, au nord par Aix et la combe de Lourmarin. Dès fin septembre 1720 l’épidémie attaqua AptA l’ouest par Saint Remy dès le 20 novembre, le 30 à Beaucaire, le 3 janvier 1721 à Orgon et Tarascon, on dénombra des victimes. L’hiver et le printemps furent assez tranquilles.Le 18 août 1721 la peste arriva à Noves. Il semblerait que la Durance avait déjà été franchie car le premier cas serait apparu rue de la Calade à Avignon le 17 juin.

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Cinquième chapitre

La peste à Avignon et dans le Comtat

Bien qu’ayant eu au cours des siècles de nombreuses épidémies, en 1720 Avignon ne parut pas s’émouvoir bien que l’on sache dès juillet que la peste était à Marseille. On raconta que le 31 juillet le peuple qui commençait à s’inquiéter tenta d’arrêter la voiture de poste chargée de voyageurs venant de Marseille, le vice-légat passant par là à cheval ordonna de la laisser entrer. A noter que comme à Marseille les gouvernants essayèrent de minimiser l’importance du danger.

31 juillet 1720, un conseil extraordinaire : créait un bureau de santé de 18 personnes

Le 1 août, le vice-légat Rainier d’Elcy interdisait le commerce avec Marseille mais laissait libre les échanges avec la Provence.

2 août, les juifs furent expulsés ou mis en quarantaine au lazaret de Saint-Roch.

5 août, organisation de patrouilles le long des remparts

21 août, interdiction du commerce avec la Provence

Dès le 3 septembre 1720 un décès suspect

Le 4 septembre, le premier cordon sanitaire était installé le long de la Durance

26 septembre 1720, le commerce était interdit avec Apt et les 18

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discussions pour l’établissement d’un deuxième cordon sanitaire débutaient

14 février 1721, un accord intervenait sur le tracé de la nouvel-le ligne : Durance, Tour de Sabran, monts de Vaucluse, Métha-mis (troupes du vice-légat), Monieux et le Dauphiné. (troupes françaises)

Du 17 mars à la fin juillet 1721, construction du fossé et du « mur de la peste »et garde de cette ligne par les hommes et troupe du Comtat.En réalité l’isolement ne fût jamais complet

Fin août 1721, la peste était à Avignon et dans une partie du Comtat. Les français prirent la place des comtadins pour garder la ligne afin de se protéger du Comtat.

Au 31 décembre 1721, déjà 3540 décès

29 juillet 1722, devant la prolongation de l’épidémie les troupes françaises pénètrent dans le comtat pour isoler, par un troisième cordon sanitaire Avignon et le Comtat infesté.

Août septembre 1722, fin de l’épidémie.

2 et 3 février 1723, levée de toutes les « lignes ».

Total des victimes d’Avignon : environ 6000 personnes.

Ces périodes troublées mirent en valeur les grandeurs et bassesses humaines :« Lorsque éclata le fléau, non seulement les médecins avignonnais se refusèrent à visiter les malades, mais les prêtres eux-mêmes ne voulurent plus porter les secours spirituels…Les administrateurs d’Avignon ne furent pas à la hauteur,...Le vice-légat se montra beaucoup dans les rues...mais jamais il ne pénétra dans un hôpital; jamais il ne visita un malade...Le clergé avignonnais semble avoir eu honte de ce premier recul. Régul iers ou sécul iers r iva l i sèrent b ien tô t de zè le pour se consacrer au serv ice des pestiférés...Ce qui démontra plus clairement l’incapacité du vice légat, c’est qu’il ne prit aucune mesure pour parer à la misère menaçante...».1

François Maurice de Gontry archevêque d’Avignon eut une conduite exemplaire.1 Paul Gaffarel: La peste de 1720

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Sixième chapitre

VELLERONLes délibérations des consuls1

En ces temps là, les communautés villageoises comme Velleron avaient une économie très fragile. Pour illustrer ce propos nous allons remonter en 1719. Comme tous les ans aux environs de la Saint-Jean, le nouveau conseil avait été formé, Joseph Antoine Feuillet et Antoine Gimet étaient consuls. Joseph Guilliny, Estienne Rostÿ2, Denÿs Girard, Barthélémÿ Grangeon, Charles Chauvet, Antoine Lacour, Toussain Dany. Antoine Grangeon est le viguier3 et Jacques Chavassine est le courrier ordinaire

La récolte de 1719 ayant été mauvaise, la fin de l’ année 1719 et le début de 1720 était difficile pour les Velleronnais. Le 14 décembre le conseil a délibéré, la demande précédente d’un prêt de 300 livres pour l’achat de grain ayant été refusée par le vice-légat.« …qu’ayant présenté une requête à monseigneur le vice-légat pour emprun-ter trois cent écus pour le soulagement des pauvres habitants. Son excellence refusa de prêter ladite somme et comme les pauvres sont venus prier de les soulager d’une grande misère en lui donnant de blé ou du seigle… ».1 Les textes en italiques sont la transcription des archives, l’orthographe et les tournures de phrase ont été modernisés(!). Quelques délibérations ont été volontairement omises2 Dans les archives de Velleron, ce nom et prénom apparaît plusieurs fois à des périodes différentes, prieur de Vacqueras en 1681_décédé avant 1695 , prêtre curé de Velleron en 1714, conseiller en 1719_, ce sont sans doute trois personnes différentes3 Viguier: officier de basse justice

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Les consuls empruntèrent dix saumées1 de blé et vingt saumées de seigle.

Délibération du 21 avril 1720 : Inventaire des graines disponibles

« …qu’ayant fait une visite dans le lieu (de Velleron) et ayant trouvé une grande quantité d’habitants qui manquent de blé pour aller jusqu’à la récolte prochaine, les consuls ont trouvé du grain : environ six saumées de seigle chez Mr Fiance, quinze salmées de seigle et cinq de blé chez madame d’Angles(i,e) et cinquante salmées chez Mr le marquis de Velleron,[le conseil] trouvent très à propos d’acheter ces quantités de grains pour le soulagement de tous les habitants et pour éviter la famine… ».

Le vice-légat afin d’empêcher une perturbation du cours des graines impose un achat par tranche de quinze salmées.Ces quelques lignes montrent déjà les difficultés de villages com-me Velleron, même s’ils ne comptèrent pas de décès causés par l’épidémie dans les mois à venir, le dérèglement de l’économie de toute une région augmenta sérieusement les difficultés de ces communautés

Délibération du 14 juillet 1720 Le nouveau conseil nommé fin juin est inscrit dans le livre des délibérations :

Louis Girard premier consulToussain Dany deuxième consul

1 Salmée ou saumée: 184,792 litres (mesure de Carpentras)23

Les conseillers :

Antoine Joseph Feuillet, Joseph Guilliny, Barthélémy Grangeon, Jacques Michelier, Romain Dumon, Joseph Bouteillon, Antoine Gimet, Antoine Lacour, Joseph Feuillet fils d’Antoine, Joseph Feuillet fils à feu Michel, Joseph Milhe, Charles Chauvet.Traditionnellement il est procédé à l’inventaire des biens de la communauté. Louis Girard et Toussaint Dany sont chargé des clefs des archives et papiers de la maison commune.

L’inventaire: -Douze mousquets -Un grand chaudron du moulin à huile -Une cassette en laiton -Une paire de balance avec leurs poids -Un tambour -Des mesures en fer blanc pour l’huile et le vin -Deux lampes en fer -Une pipette en fer blanc du moulin à huile

Nous arrivons à la première délibération parlant de la peste.Délibération du 4 août 1720 :

« Comme la peste étant à Marseille et ayant reçu sur l’ordre de son excellence de se garder et comme il est du tout impossible de gar-der les faubourgs et qu’il est nécessaire de réparer et fermer toutes les murailles priant messieurs du conseil sur ce vouloir conclure et délibérer »«…Messieurs du conseil tous unanimement ont conclu et délibéré de faire fermer toutes les rues passantes au dehors des faubourgs et de ne laisser que la porte de Notre Dame de Conservation ouverte, le tout sous le bon plaisir de son excellence… »

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Délibération 11 août 1720 : Problème de cueillette des grains

Délibération 8 septembre 1720 En présence de Mr Antoine Grangeon viguier de la cour ordinaire l’assemblée est convoquée par Jacques Chevassine sur ordre des consuls. Les consuls et conseillers sont tous présents.L’ordre du jour : La communauté a reçu l’ordre du vice-légat d’envoyer deux hommes pour garder le bord de la Durance, cet ordre fait suite à une réunion qui eu lieu le 7 septembre à l’Isle. Comme il n’y a pas de volontaire le conseil doit nommer les deux soldats« …et comme il ne s’est présenté personnes de bonne volonté, il faut nommer deux par force… ».Chaque consuls et conseillés nomment chacun deux personnes

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« …de sorte qu’à la pluralité des voix ont été nommés Arnaud Jouffret et Pierre Perdiguier pour être soldats… »

Délibération du 7 octobre 1720Ordre du jour : « comme le mal augmente de jour à l’autre et que la peste ayant pris la ville d’Apt et autres lieux de la Provence… »

Le conseil décide d’établir un bureau de santé afin d’éviter si possible la contagion et nomme comme « conservateur de santé » Mr le prieur Rosty, Mr le vicaire, Mr Jean Lio-tard, Mr Guilli-ny, Mr Feuillet, Mr Barthélémy Grangeon, Mr Lafitte, Mr le cadet Rosty, Mr Joseph Liotard prêtre, Mr Antoine Grangeon, Mr Esprit Feuillet. Ils seront les seuls à déli-vrer les billets de santé qui sont des sortes de laissez passer.

Ces billets de santé1 sont visé dans chaque village où se rend le porteur.

1 A défaut d’un billet de Velleron un exemple de billet de santé d’Avignon26

Les membres du bureau de santé ont le pouvoir de décider de faire faire toutes les réparations nécessaires pour « la conservation de la santé… », «…de faire réparer toutes les vieilles murailles de la hauteur né-cessaire »

-d’acheter toutes les poudres qu’il conviendra-de faire réparer les deux portes d’enceinte- de renforcer la garde de jour et de nuit- de nommer des capitaines pour la garde- de louer un endroit pour le bureau et corps de garde afin de pro-téger les gardes de la rigueur de l’hiver.

Le conseil acceptera les dépenses uniquement pour ces points et nomme comme « impugnateur1 pour entendre les dépenses qu’ils doivent faire Joseph Guilliny..» .Lors de cette séance il est également question de faire réparer le moulin à huile apparemment au frais de Roman Dumon qui le loue pour vingt sols.

13 octobre 1720 Ordre du jour: Emprunt au vice-légat

« …que comme d’un jour à l’autre le mal dont nous sommes menacés augmente et qu’il est à craindre que la ville d’Avignon pourrait être fermée et que nous ne pourrions plus y rentrer, avant que ce malheur arrive il trouve fort à propos de présenter une requête à monseigneur, l’Illustrissime Vice-Légat pour emprunter toutes les sommes nécessaires pour Velleron en cas de peste ».

1 impugnateur: comptable ou contrôleur de gestion 27

Le conseil vote à l’unanimité pour la demande d’un emprunt de 6000 livres afin d’acheter toutes les provisions nécessaires au soulagement des habitants.Le conseil vote également l’achat de remèdes et drogues pour le soulagement des pauvres habitants à la hauteur de 25 écus mon-naie du roi , les consuls sont délégués pour l’achat des drogues.

16 octobre 1720 Ordre du jour: lettre du vice-légat demandant vingt soldats armés. « …ayant reçu une lettre de son excellence de faire vingt hommes pour la conservation de l’état et de les armer d’un fusil chacun avec les munitions pour tirer six coups »Après délibération le conseil nomme pour la conservation de l’état en cas de besoin les personnes suivantes : Pierre Gimet fils d’Antoine, Jean Gimet fils d’Antoine, Etienne Blanc, Pierre Michelier fils de Jacques, François Chouvet, Joseph Grillet, Boniface Feuillet, Thomas Ouzias, Jacques Cha-vassine, Joseph Perdiguier, Jean Baptiste Gibert, Jean Chouquin, Firmin Bedieu, Sébastien Barret fils d’André, Esprit Cougnin, Dominique Bouvet, César Jouffret, Jean Louis Bressy, Joseph Tes-tenière, (illisible), Mr DegayIls auront chacun un fusil et des munitions conformément à l’or-dre du vice-légat et leurs dépenses seront payées

3 novembre 1720 :Ordre du jour: Problème de distribution du sel, autorisation de faire incanter1 et livrer les moulins à huile Le sieur Cardon n’ayant du sel que pour huit jours et ne voulant plus faire la distribution après ce temps, le conseil décide de faire une crié publique, pour choisir qui fera la meilleure offre.Le conseil donne pouvoir à messieurs les consuls : « de faire fermer une porte qui aboutit le long des murailles car il est très facile d’entrer et sortir ... »1 Incanter: Vendre aux enchères

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Egalement délibèration pour interdire jusqu’aux Pâques prochai-nes: à Rose Milhe, veuve de feu Pierre Feuillet, de faire du pain pour le vendre. 17 novembre 1720: Ordre du jour: emprunt de 3000 livresLa demande précédente d’emprunt de 6000 livres étant apparem-ment restée lettre morte le conseil délibère pour emprunter 3000 livres à la confrérie des pénitents gris.« …Qu’attendu la menace qu’on nous fait de bloquer une partie du Comtat dont nous sommes enveloppé et que nous ne pourrons commercer qu’avec une partie du Comtat je trouve fort à propos d’emprunter trois mille livres grosse monnaie de Mr Feuillet et

Mr le Prieur Rosty patron de la chapelle des pénitents du lieu qui ont en main les trois mille livres, ils offrent de donner cette somme selon les modalités sui-vante Bien que les écus valent sept livres et demi ils offrent de les prêter à six livres pièces et quand viendra le rembourse-ment si les écus blancs valent d’avantage il ne recevront que six livres, s’il valent moins ils

les prendront également à six livres … » Les consuls tous unanimement ont conclus et délibéré « d’em-prunter trois mille livres grosse monnaie1 à quatre pour cent et d’employer les sommes pour acheter du blé afin de soulager les pauvres habitants… ». Ils nomment Jean Liotard pour être pré-sent avec les consuls à l’achat du grain.1 La monnaie courante est le patas ou patac de faible valeur toutes les transactions importantes sont effectuées en grosse monnaie ou monnaie du royaume de France

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Patas

Délibération du 26 janvier 1721Ordre du jour : le temps presse pour imposer la taille.

Suit une longue délibération assez obscure d’où il ressort que la part des consuls vieux, Mr Feuillet et Antoine Gimet, n’a pas été payé par l’exacteur ce qui empêche de dresser la liste de la taille. Les syndics, consuls et impugnateur lui intiment l’ordre de payer, de rendre compte et le menace de la justice.

A noter qu’il existe dans les archives de Velleron une transcrip-tion d’un édit du 5 février 1721: « quoi que nous soyons persuadé que chacun pense à fléchir la colère du seigneur que nous voyons éclater depuis le long temps contre nos voisins et que les haires (afflictions) qui les affligent et dont il a plu à dieu de nous préserver…. » Le vice légat interdit les bals, danses publiques, mascarades et autres divertissements du carnaval afin d’ « ôter toute occasion de scandale et de libertinage et autres bonnes considérations… »cette interdiction ne fût pas reprise dans les délibérations des consuls

Délibération du 14 mars :Ordre du jour : Suite des problèmes de taille, envoi d’hommes pour le travail de la ligne à Lagnes

Il est procédé à l’examen des comptes des exacteurs de 1719, les sieurs Dominique Tamisier et François Lisle habitants de l’Isle.« Messieurs du conseil unanimes ont délibéré et conclu d’imposer une taille pour subvenir au pressant besoin des affaires de la communauté à savoir :…»

Deux sols pour chaque florin sur tous les biens allodiaux1 des 1 Biens échappant aux obligations seigneuriales

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habitants et des forains.Un liard pour chaque florin sur tous les biens feudeaux1

Six livres pour chaque chef de familleTrois livres pour chaque femmes veuvesQuinze sols pour chaque grosse bête et bourriqueTrente sols pour chaque trentaine de bêtes à laine.Le tout en monnaie courante.

Délibération du premier avril 1721Ordre du jour : mise au enchère de la cueillette2 de la taille pendant trois dimanche de suite.

Comme il ne se présente personne, le conseil demande au vice-légat d’autoriser un taux plus élevé. «…attendu que l’année est fort méchante et qu’il est très difficile d’exiger la cueillette de la taille s’il arrivait malheur… »

Le 6 avril 1721Ordre du jour : Réponse du vice-légat

Le vice-légat refuse les offres supérieures à cinq pour cent et pro-pose d’un nommer un exacteur3 de façon autoritaire. Il se présente alors François Léotard qui propose à cinq pour cent.Les consuls accepte « …l’ offre que Mr François Léotard vient de faire à cinq pour cent…avec le cautionnement de mr Antoine Liotard son père… »

Délibération du 29 juin 1721Ordre du jour : nomination des nouveaux consulsComme le veut la tradition récente, le dimanche après la saint-Jean, 1 Biens soumis aux obligations seigneuriales2 Cueillette de la taille: collecte de la taille (impôt)3 Exacteur: personne faisant la collecte des impôts et se rémunérant sur les sommes perçues (5% dans notre cas)

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Jean Liotard et Charles Chauvet sont élus consuls modernes

Délibération du 6 juillet 1721Ordre du jour : Prestation de serment des nouveaux consuls et in-ventaire des biens de la communauté, nomination des conseillers, chirurgien , fermage de la boucherie.

La prestation de serment à lieu devant le viguier et un notaire apostolique et deux témoins un de Pernes et un du Thor. L’inven-taire est presque identique à celui de l’année précédente (un fusil de plus).

Conseillers élusLouis Girard

Joseph Guilliny Antoine Joseph Feuillet Jacques Michelier Joseph Feuillet fils d’Antoine Antoine Delacour Toussain Dany Antoine Gimet Joseph Feuillet fils de feu Michel Joseph Delacour

Suite à une lettre circulaire du vice-légat ordonnant d’envoyer quatre hommes à Lagnes pour le travail de la ligne. Le conseil décide d’envoyer :Joseph Testenière, Thomas Ozias, Jacques Grillet, Jean Chouquin, Ils recevront 10 sols patas par jour et ils devront apporter leurs outils.Dans ces temps pressant, Jean Liotard premier consul propose monsieur Dumon un habitant d’Orange qui offre ses services pour remplacer monsieur Lafitte, il viendra habiter Velleron si aucun autre chirurgien ou paysan ne rase à sa place. Le conseil unanime délibère et conclu de supplier le vice-légat

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« d’interdir toute sorte de paysans qui s’amusent à raser et tout chirurgien qui pourrait venir dans ledit lieu raser publiquement et d’empêcher d’autre de venir vivre et d’habiter et afin que nous nous trouvions pas dans ces temps pressants sans chirurgien mrs du conseil supplient humblement son excellence d’imposer une peine tel qu’il trouva bon pour tous les contrevenant… » Mr Du-mon est accepté comme chirurgien de la communauté.Le conseil décide de renvoyer le boucher « attendu que le bou-cher de l’année dernière nous fait manger que de mauvaise bre-bis qu’on lui apporte mortes… »Le conseil décide de l’expulser, sa famille et son troupeau afin qu’il se retire dans son pays natal. Le conseil délègue les consuls pour acheter de la viande de mouton pour la faire distribuer aux habitants

Délibération du 3 août 1721:Problème de paiement de la Dîme à l’évêque de Carpentras. ( l’évêque intenterait un procès aux velleronnais n’ayant pas payé la dîme)Problème de protection du villageIl décide «...d’acheter des ais1 pour faire clouer au clédis2 afin que personne ne puisse entrer dans la nuit et pour le soulagement de la garde qui ne sera plus obligé de garder la nuit...»

« Le conseil unanime a délibéré et conclu de prier monseigneur de Carpen-tras, notre évêque de nous accorder à perpétuité la fête et jour de Saint Roch afin qu’il prie le seigneur de nous délivrer du mal qui nous menace...» Délibération du 9 novembre 1721Ordre du Jour : emprunt de 6000 livres

Les trois mille livres prêtées par les pénitents semblent être dé-pensées1 Ais: planches2 clédis: treillis

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« …que comme la ville d’Avignon et beaucoup d’autres endroits du Comtat et même nos voisins sont malheureusement attaqués par le mal contagieux et que nous sommes à la veille d’être fermée et que nous même pourrions être attaqué et nous trouvant sans une sol dans la bourse commune pour secourir tous les habitants avec des remèdes et d’autres provisions nécessaires à la vie…pour ne pas être dans le cas de Bédarrides et d’autres lieux… ». Le conseil décide d’emprunter six mille livres monnaie de France pour les employer à acheter les remèdes ou provisions si le villa-ge était affligé par la peste ou était isolé sans pouvoir commercer avec ses voisins.Le conseil décide également

-de faire effectuer toutes les réparations nécessaires au moulin à huile.

-d’augmenter de six liards patas les fermiers de chaque moulin à huile

Délibération du 17 décembre 1721Ordre du jour : aide aux pauvres pour Noël

« …qu’une quantité des pauvres habitants étaient dans l’impossibilité de pouvoir passer les fêtes de Noël et nous priait de leur donné du grain de la communauté pour les soulager dans leur besoin… »Le conseil décide de prendre dix salmées de seigle et de les dis-tribuer par deux eyminées1.

2 février 1722: « …les murailles du lieu en beaucoup d’endroits menacent ruine ils trouvaient à propos de les fairent raccommo-der… » Faire toutes les réparations des murailles en avril

1 Eyminée ou émine: 23,099 litres (mesure de Carpentras)34

19 mars 1722 : offre pour la boucherie de Jean Ferrin natif de Chateauneuf de Gadagne

19 avril 1722 : Toujours les problèmes de perception des impôts Une lettre au vice-légat « d’écrire à son excellence pour qu’il nous permette de rendre nos comptes attendu que les auditeurs, les comptes forains1 ne voulant pas venir celui qui est libre et l’autre ne peut pas venir attendu qu’il est à Avignon et comme les affaires de la Comté souffrent notablement… »Sel pris au Pontet et débité par Jean Cardon 7 sols et demi patas la cosse (environ 1 litre)

2 juin 1722 : problème de la taille : « …que par rapport au temps présent du mal contagieux… »

25 juin 1722 : problème d’impôts

28 juin 1722 :création consulaireDenis Girard premier consulJoseph Feuillet fils à feu Michel second consul

26 juillet 1722 : Nomination des consuls et des conseillers et ...« …qu’il était tombé une partie en haut des murailles communes du dit lieu causé ladite ruine par un égout qui tombe par lesdites murailles de la maison claustrale sur les murailles… »

13 septembre 1722 : Réparation du moulin à huile et distribution de graines aux pau-vres.Remboursement de dettes. (lesquelles?)

27 octobre 1722 : 1 Forain: propriétaire non résident de Velleron

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Problème de boucherie, faire payer les troupeaux étrangers qui paissent dans notre « montagne ».

16 novembre 1722 : problème de vérification de propriété

20 décembre 1722 :Des charrettes chargées de sel renversent une partie d’arc du pont du Thor. «...que passant des charrettes sur le pont du Thor, chargés de sel, elles renversèrent une partie d’un arc.. pour em-pêcher que le reste du pont ne tomba il fit mettre en oeuvre...» (réparation 30 livres 10 sols)

24 janvier 1723 : Distribution de grains aux pauvres ne pouvant travailler à cause de la rigueur de l’hiver. (20 saumées pour 40 sols patas).Faire raccommoder les murailles de la ville qui menacent ruine.Prix du bled

14 février 1723 :Proposition à la vente du bled de la communauté paiement d’un contrat d’emprunt de 1000 livres1 aux pénitents gris

16 avril 1723: Paiement de la taille par les forains et les seigneurs de Velleron: «...sur le refus que font nos seigneurs, de payer à l’exacteur de notre communauté les tailles sur les biens que nous croyons qu’ils doivent légitimement...»Menace de faire un procès et décision de vendre les graines stockées

20 juin 1723 : Vente du blé que la communauté avait acheté pendant la « conta-gion » pour le secours des habitants.

1 En plus des 3000 livres?36

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Une histoire de bague« il a été exposé par le premier consul que mr Frédéric Guilhon chirurgien d’Avignon demande à mr Jean Liotard consul de l’année 1721 de lui rendre une bague à 7 pierres qui lui fut remise par Magdeleine Milhe lors de la quarantaine lorsque le terroir d’Avignon était affligé du mal, il affirme que la bague lui appartient et que ladite Milhe lui a prise, la bague fut donné au sieur Liotard par ladite Milhe pour être employé aux frais de la quarantaine, étant du sentiment que ladite communau-té restitue à ladite Milhe cette bague et frustrer la communauté de ce qu’elle a fourni pour ladite quarantaine puisque ledit Sr Guilhon n’a rien dit depuis ce temps jusque à aujourd’hui quoi que ladite Milhe depuis peu était au service du dit Sr Guilhon … »Les consuls concluent de rendre la bague lorsque les frais de qua-rantaine seront remboursés et la rendre à ladite Milhe et non au sieur Guilhon.

27 juin 1723: Création consulaireJoseph Guilliny premier consulAntoine Delacour second consul

4 juillet 1723: nomination des consuls et conseillersInventaire

5 septembre 1723 : Délibération pour faire un emprunt pour rembourser les 3000 li-vres des pénitents gris. «...qu’il est nécessaire de chercher des expédients face à la diminution des espèces de la communauté...»

8 décembre 1723 : Délibèration pour un remboursement à tempérament de quarante écus grosse monnaie par an du prêt des pénitents gris. (les 3000 Livres)

« plusieurs personnes se plaignent qu’ayant fait des avances pour la ligne que la judicature de l’Isle avait fait pour se garder contre Avignon qui était affligé du mal contagieux.. » Les consuls décident de se rendre à l’Isle afin de consulter les notes originales pour faire une liste avant payement.

25 juin 1724 : Création consulaireAntoine Joseph Feuillet bourgeois est nommé premier consulAntoine Gimet second consul.

La vie reprend «normalement» la peste ne réapparaît plus dans les délibérations, seuls persistent les problèmes de finances et d’impôts

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Septième chapitre

En guise de conclusion

Si les divers écrits parlent surtout de l’impact démogra-phique de l’épidémie, l’impact économique est aussi important, même si après l’arrêt de l’activité économique des régions conta-minées elle ne constitue pas une entrave au développement. Pour Marseille, plus de trente mois d’isolement n’ont en rien in-terrompu le mouvement des affaires et la progression des for-tunes marchandes. En revanche, l’épidémie pesa lourdement sur les pau-vres, ses victimes de prédilection, ceux qui ne pouvaient fuir et devaient supporter les coûts de la lutte financées par l’impôt. Le dérèglement général d’une région compli-quait encore plus la vie des communautés villageoises qui accumulaient déjà en période normale de multiples difficultés. On remarque dans les délibérations l’absence d’aide des seigneurs de Velleron, aucun prêt avec ou sans intérêt, aucun don. Si il y eut des interventions de leur part, les délibérations n’en parlent pas, sont seulement mention-nées les interventions du marquis de Crillon concernant les impôts. Joseph Louis de Cambis chef d’escadre des galères du roi en septembre 1720 n’a pas laissé non plus une grande marque dans la lutte contre la peste. La communauté de Velleron, comme beaucoup de villages, fût bien seule pendant cette période.

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Annexe le texte du notaire Brémond

Les lignes qui suivent font partie d’un texte que le notaire de Cairane Maître BREMOND a placé à la fin du registres de ses minutes d’actes des années 1719-1720-1721 (A noter qu’il s’ins-tallera en 1722 à Pernes ). Ce texte donne une idée de ce que pouvait être les informations et les rumeurs dont disposaient les habitants des villages (Mettre en parallèle les lignes de P. Gaffarel sur le vice-légat et d’autres dans le paragraphe Avignon)

«Que l’an 1720 et le cinquième jour du mois de juillet, la ville de Marseille a été infectée de peste, que dieu garde et nous préserve, par un vaisseau marchand venant du coté de l’Amérique laquelle peste a causé de grands désordres dans ladite ville par la mort d’une si grande quantité de personnes de la ville que les rues de celle-ci étaient pavées de cadavres, ne pouvant suffire pour les enterrer les fosses expressément faites étaient remplis, mêmes des églises entières et murées.Monseigneur révérentissime et excellence Rainier d’Elcy alors vice-légat d’Avignon fit poser rapidement une ligne le long de la Durance de quatre à cinq cent hommes et il fut fait de grands fossés et murailles à pierre vers Méthamis qui ont coûté plus de cent mille écus à Avignon et au présent pays du Comtat, la peste s’est ensuite communiquée presque dans toute la Provence et à fait de grands ravages par la mort des habitants des villes et lieux de cette province et ensuite malgré la ligne et garde, est passé jusqu’à la ville d’Avignon, laquelle ville a été atteinte le cinq août 1721 et a subi aussi de terribles ravages, comme aussi les lieux de Sorgue, Bédarrides, Château neuf des Papes et Monteux pour les habitants de ces villes et lieux qui n’avaient pas voulu se sauver

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car jusqu’à aujourd’hui 20 janvier 1721 plusieurs habitants de la ville d’Avignon se sont préservés du mal en ne communiquant avec personne et en restant enfermé avec leur famille dans leur maison. Ledit seigneur vice-légat s’est signalé avec monseigneur l’archevêque et messieurs les officiers du palais ils sont toujours paru dans les rues pour donner leurs ordres et aller jusqu’à environ 10 pas des infirmeries afin de s’assurer que rien ne manqua ainsi, grâce au bon dieu, ladite ville a été pourvu de pain, vin, viande et autres aliments nécessaires pour la vie et cependant malgré tout le mal continue toujours et il est mort jusqu’à ce jour du 20 janvier 1721 environ 6000 personnes. Beaucoup de messieurs ont conté et ont fait noter que la ville et principauté d’Orange ont été aussi affligée depuis le mois de septembre 1721 et ne fait pas de grands progrès suivant les nouvelles par plusieurs gens de considération et autres bons habitants étant allés habiter les granges du terroir de la ville et monseigneur l’évêque d’Orange nouvellement nom-mé à l’évêché de la ville est arrivé avec des médecins de France et a mis bon ordre dans la ville où rapidement le mal a cessé avec les quarantaines que les habitants ont fait en ne sortant point de leurs maisons.Mais dans la ville d’Avignon le mal a toujours continué jusqu’à ce présent jour du 25 mai 1722 à cause dit-on de la grande fré-quentation et de voir les habitants de la ville aller ensemble par les rues et les places avec les habitants qui étaient enfermés dans leur maison depuis le 15 septembre dernier sans en être sortis ni avoir communiqués avec personne ayant les provisions nécessaires.Noter : qu’à Orange les habitants ayant voulu faire de même et al-ler en campagne pour vaquer à leurs affaires et ayant ainsi voulu communiquer ensemble et rompre leur quarantaine, la peste s’est allumée dans la ville et même a pris aux granges et fait des rava-ges et qu’à Avignon le mal s’étant un peu calmé, le jour de la fête-Dieu. On a voulu faire la procession générale comme on faisait de coutume et le mal s’est rallumé et il meurt trente personnes

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presque tous les jours.Mais enfin la peste a fini à Avignon le 16 août de la présente année 1722 puisque depuis le présent jour du 15 novembre il n’est mort personne dudit mal après les grandes précautions puisqu’on a fait échauder dans Avignon tous les effets des gens du tiers états, mêmes les effets de ceux qui n’avaient pas eu de mal et ledit mal a ensuite diminué dans le Comtat grâce à la vigilance des troupes que monsieur le Régent a mis dans le Comtat, ces gardes ayant formé une ligne depuis la haute Provence jusqu’au Rhône malgré une autre ligne qui était déjà posée dans le Dauphiné et fermait le passage du commerce du Comtat avec le Dauphiné et le Languedoc Le bon dieu nous fait la grâce que le mal soit fini puisque la li-gne du Dauphiné a été enlevée le 25 novembre 1722 et que les gardes qu’on faisait par tout le Comtat ont été enlevées, la ligne posée dans le Comtat, commandée par monseigneur de Jausseau de Tarascon et monseigneur Gerenton de Carpentras, subsiste pour empêcher que les habitants et marchandises de la ville d’Avignon n’entrent dans le Comtat jusqu’aux premiers or-dres de la cour.»

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Deuxième annexe

extraits du manuscrit «de la peste dont la ville d’Avignon fut affligée en 1721»

recueilli par J.L. de Cambis marquis de Velleron

...quoyque la peste ne soit déclarée que le 16 septembre 1721, on peut dire qu’elle estait répandue... dans le mois d’aoûst... Le com-merce avec la Provence estait interrompu depuis le 27 août 1720 ... On peut conjecturer qu’elle est venue par la contrebande d’un poste appelé la Grange Neuve, situé entre le château de Cortine et le bac de Barbentane où un soldat appelé BAUSSAN, de la ligne d’Avignon porta adroitement dans cette ville des marchandises qu’il avait dont quelques balles infectées...

On peut dire aussi qu’elle s’introduisit par les soyes vendues en contrebande du costé de Pertuis... on peut aussi conjecturer que la peste s’est communiquée par des balles de marchandises tirées de Beaucaire et que les mar-chands de Lyon ne voulurent pas recevoir sur les nouvelles de la peste de Marseille d’où les dites balles étaient venues et qu’ils renvoyèrent icy à nos marchands pour les débiter... La peste fut portée dans Avignon de Bédarrides... par le commerce du lait et du beurre...

Bb Calvet Avignon MS2010Fol 47 V°

Bibliographie

Dictionnaire de l’ancien régime direction Louis Bély

Minute du notaire de Cairanne Archives départementales

La muraille et la peste Pierre sèche en Vaucluse

La peste de Marseille en 1720 Abbé Papon

La peste en Provence Provence historique

Marseille ville morte Carrière, Coudurier, Rebuffat

Belzunce et la peste de Marseille A. Praviel

La peste de 1720 à l’usage des enseignants Archives départementales

Délibérations de Velleron Archives municipales

La peste à Marseille en 1720 L’école moderne française

La peste en 1720 à Marseille et en France P. Gaffarel

La peste à Apt R. Bruni

Les moines de St-Victor pendant la peste R. Bruni

Les hommes et la peste J.N. Biraben

la peur en occident J. Delumeau

Remède et préservatifs de la peste (1562) O. Ferrier

Les chemins de la peste F. Audoin-Rouzeau

La peste J.E.Johnson

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Table des matières

Avant propos page 3 La maladie page 5 Les causes page 9 La peste à Marseille page 12 La peste en Provence page 16 la peste à Avignon et dans le Comtat page 18 Velleron, délibérations des consuls page 22 En guise de conclusion page 38 Annexe: texte du notaire Brémond page 39 Annexe: Manuscrit J.L. de Cambis Page 43 Bibliographie page 44 Table des matières page 45